docudoo

Capital humain, social et intellectuel et niveau de rémunération : Le cas des médecins

Capital humain, social et intellectuel et niveau de rémunération : Le cas des médecins

 

Introduction

 

 

Tout individu étant amené à réaliser un travail reçoit une contrepartie. Cette dernière représente une récompense, en échange des efforts qu’il a accomplis. Pour les salariés des entreprises, cette contrepartie est représentée par le salaire que l’entreprise leur verse. De manière générale, la rémunération concerne les individus qui disposent d’un statut de travailleurs ou de salariés.

 

Pourtant, il existe une autre catégorie d’individus qui bénéficie également d’une rémunération, mais qui n’est pas souvent prise en compte par les économistes et les différents auteurs, compte tenu du fait qu’elle ne représente pas un salarié. Ces personnes sont les entrepreneurs. Qualifiés d’individuels, les entrepreneurs agissent en leur propre nom, et pour leur propre compte. Ils exercent une activité de manière individuelle tout en assumant seuls les actions qu’ils entreprennent.

 

Ces entrepreneurs individuels, comme tout individu, cherchent à améliorer leurs revenus, en d’autres termes à améliorer leur rémunération. Pour un salarié, qui naturellement partage cet objectif, le moyen qui lui permet d’augmenter son revenu est de miser sur le capital dont il dispose. Il convient toutefois de préciser que c’est généralement le dirigeant ou le manager qui est amené à agir sur le capital de leurs collaborateurs afin de l’améliorer.

 

Étant donné que l’entrepreneur ne dispose pas de supérieur hiérarchique pour gérer son capital, nous nous sommes demandé : « Dans quelle mesure la nature du capital (humain et social) de l’entrepreneur est-elle explicative de son niveau de rémunération ? »

 

Afin de mieux répondre à cette question, notre mémoire qui se porte sur le capital (humain et social) et le niveau de rémunération, va s’intéresser particulièrement au cas des médecins. Pour ce faire, trois points seront abordés :

  • Le premier point concerne la revue de littérature sur le capital et la rémunération de l’entrepreneur ;
  • Le second point se porte sur la présentation de la méthodologie mise en œuvre dans le cadre de l’étude empirique ; et
  • Le dernier point s’intéresse à la présentation des résultats de l’étude de terrain et à la proposition de recommandations managériales.

Section 1 : Revue de littérature sur le capital et la rémunération de l’entrepreneur

 

La rémunération représente une contrepartie, principalement financière, accordée à une personne en échange d’un travail effectué ou d’un service rendu. Cette définition nous amène à constater que tout individu exerçant une activité est bien rémunéré. De manière générale, la rétribution est réalisée en fonction du travail fourni. Cependant, il a été constaté que certains facteurs influencent plus le niveau de rémunération que d’autres.

 

Dans cette première section, nous allons aborder le sujet concernant ces facteurs, qui sont notamment le capital social et le capital à travers une revue des travaux réalisés par différents auteurs. Dans ce contexte, nous allons nous intéresser à l’entrepreneur individuel, et plus particulièrement au cas d’un médecin. Ensuite, nous nous pencherons sur la rémunération des entrepreneurs.

 

  • Contribution du capital humain au succès d’un entrepreneur individuel

 

Cette sous-section est destinée à l’étude des différents aspects du capital humain, ainsi que ses effets sur l’entrepreneur individuel. Afin de mieux appréhender le sujet, nous avons jugé opportun de présenter en premier lieu de concept d’entrepreneuriat, ensuite celui du capital humain, pour enfin analyser la contribution de ce dernier au succès d’un entrepreneur individuel.

 

  • Concept d’entrepreneuriat

 

Il existe une grande variété de travaux qui concernent l’entrepreneuriat. En effet, le sujet concernant l’entrepreneur intéresse de nombreux auteurs, compte tenu du fait qu’il se trouve à l’origine même de l’entreprise, car il est impossible de parler d’entreprise sans parler de son propriétaire-dirigeant ; et il est impossible de parler d’un propriétaire-dirigeant sans parler de l’entrepreneur. Afin de mieux appréhender cette notion, nous allons voir les différentes manières de la définir.

 

D’abord, les économistes, qui par nature accordent plus d’intérêt à l’économie qu’à l’entreprise, ont apporté leur point de vue en ce qui concerne l’entrepreneur. Il convient de préciser que sont qualifiées d’économistes toutes personnes s’intéressant aux organisations, à la création, ainsi qu’à la distribution de richesse. Le terme « entrepreneur » est apparu au cours du 17e siècle (Vérin, 1982)[1]. Toutefois, une présentation claire de l’ensemble de sa fonction n’est effectuée qu’un siècle plus tard (Schumpeter, 1954)[2], et c’est Cantillon (1755)[3] qui a réalisé cet exploit. Il se présentait comme une personne toujours à l’affût d’occasions d’affaires, et qui cherchait constamment la meilleure méthode pour faire fructifier ses investissements. Étant considéré comme un individualiste, il faisait preuve d’attention concernant les sujets se rapportant à l’économie et le rationnel. De par son parcours, il disposait d’une grande capacité d’analyse qui lui permettait de rendre une opération profitable.

 

Say (1816)[4] est également un économiste qui s’intéresse à l’entrepreneuriat, et plus particulièrement aux activités de l’entrepreneur. Pour lui, le développement de l’économie passe indispensablement par la création d’entreprise. Ainsi, nous nous concentrerons sur le concept de l’entrepreneuriat selon ces deux auteurs qui sont Cantillon et Say.

 

Pour ces économistes, l’entrepreneur est considéré comme un individu qui est prêt à prendre des risques, du fait qu’il fait des investissements. Or, Cantillon précise le fait que l’entrepreneur est surtout reconnu pour sa capacité à saisir une occasion pour faire du profit, et ce, tout en tenant compte des risques. Quant à Say, il estime que l’entrepreneur représente un agent de changement, du fait qu’il l’associe à l’innovation. Ainsi, l’entrepreneur contribue au développement de l’économie de par sa capacité à générer du profit et à apporter le changement tout en assumant les risques.

 

Les behavioristes ont aussi apporté leur point de vue concernant le concept d’entrepreneuriat. Ces derniers sont représentés par tous les spécialistes qui étudient le comportement de l’homme, notamment les sociologues, les psychologues et les psychanalystes. Weber (1930)[5] fut le premier à s’intéresser au concept. Selon l’auteur, le système de valeur représente la base permettant d’expliquer le comportement d’un entrepreneur. Par conséquent, les entrepreneurs sont considérés comme des innovateurs, des personnes indépendantes qui disposent d’une certaine autorité leur permettant d’assurer le rôle de dirigeants d’entreprise.

 

Pour McClelland (1971)[6], l’entrepreneuriat est associé à un acte d’héroïsme. Ainsi, l’auteur définit l’entrepreneur comme une personne qui « exerce un contrôle sur une production qui ne sert pas qu’à sa consommation personnelle ». Il prend l’exemple d’un gestionnaire dans une unité de production en acier pour illustrer sa définition d’un entrepreneur. Les behavioristes ont continué à analyser le concept d’entrepreneur pour aboutir à l’établissement des caractéristiques des entrepreneurs, comme il est présenté ci-dessous.

 

Figure 1 – Caractéristiques attribués aux entrepreneurs par les behavioristes

 

Innovateurs Besoin de réalisation
Leaders Internalité
Preneurs de risques modérés Confiance en soi
Indépendants Implication à long terme
Créateurs Tolérance à l’ambiguïté et à l’incertitude
Énergiques Initiative
Persévérants Apprentissage
Originaux Utilisation de ressources
Optimistes Sensibilité envers les autres
Orientés vers les résultats Agressivité
Flexibles Tendance à faire confiance
Débrouillards Argent comme mesure de performance

 

Source : Meredith, Nelson & Neck, (1982), « The practice of entrepreneurship », Genève, BIT

 

 

Au vu de ces concepts, nous pouvons alors conclure qu’un entrepreneur est une personne qui a de l’imagination, et qui est reconnue par sa capacité à se fixer des objectifs et à les atteindre. Pour ce faire, il prend des risques calculés tout en apportant le changement. L’entrepreneur est alors un visionnaire qui déploie tous les moyens nécessaires pour réaliser son rêve.

 

Le médecin, qui est un professionnel libéral est considéré comme un entrepreneur individuel du fait qu’il détient sa propre patientèle, et qu’il exerce seul son activité professionnelle.

 

  • Concept de capital humain

 

Le capital humain est un concept qui peut être approché de différentes manières : en considérant ses acteurs, en considérant ses composants, ou encore en considérant sa finalité. Il a alors été constaté que les organisations définissent le concept en fonction de leurs objectifs et de leur mode de gestion. L’International Integrating Reporting Council ou IIRC apporte une définition officielle du capital humain lors de la publication de son nouveau référentiel.

 

Ainsi, le capital humain se définit comme « les compétences, aptitudes, expériences des personnels, ainsi que leur motivation pour innover, mais aussi leur alignement et leur adhésion aux règles de gouvernance, aux méthodes de gestion des risques et aux valeurs éthiques de l’organisation ; leur capacité à comprendre, à élaborer et mettre en œuvre la stratégie de l’organisation ; leur loyauté et leur motivation à améliorer les processus, produits et services, ainsi que leur capacité à diriger, gérer et collaborer ».[7]

 

Cette définition apportée par l’IIRC considère l’aspect opérationnel du capital humain, qui est tourné vers l’extérieur. D’un autre côté, des auteurs (Ployhart et al, 2014)[8] traitant diverses disciplines telles que l’économie, la psychologie, et la gestion stratégique des ressources humaines, considèrent le capital humain dans son aspect organisationnel. Ce qui signifie que le capital humain correspond avant tout à des connaissances, des compétences ou attitudes, et à des capacités. Une autre composante est également considérée, notamment les caractéristiques de l’individu qui sont constituées par la personnalité de ce dernier, ses centres d’intérêt, ainsi que son système de valeur.

 

À partir de l’analyse du point de vue de ces différents auteurs, il a été retenu que le capital humain est constitué par trois composants, notamment les 3C : compétence, comportement, créativité, tel qu’il est présenté dans le schéma suivant.

 

Figure 2 – Les 3C composants du capital humain

 

 

Source : Inspirée de l’ouvrage de Ployart et al, 2014

 

 

Outre la définition de ces trois composants qui constituent le capital humain, il existe d’autres notions qui sont rattachées au capital humain. Il s’agit notamment du capital intellectuel, du capital émotionnel, et du capital relationnel. Il est également important de tenir compte du fait que le capital humain varie en fonction de l’individu, de ses études, ses compétences, ses expériences, mais également de son comportement.

 

En ce qui concerne l’évaluation du capital humain d’un individu, les éléments à considérer ne peuvent alors pas être statiques, compte tenu de la variabilité des composants, d’où la nécessité de définir une approche centrée sur le management de ce capital mais aussi sur sa finalité.

 

  • Contribution du capital humain au succès d’un entrepreneur individuel

 

Le capital humain est reconnu comme étant une composante clé de la valeur de l’entreprise[9]. Il convient alors d’analyser ce que représente cette composante pour l’entrepreneur individuel. Et pour ce faire, nous allons en premier lieu tenir compte de la différence entre une entreprise et un entrepreneur individuel.

 

L’entrepreneur individuel est une personne qui exerce elle-même son activité. Par conséquent, il n’est pas géré par un dirigeant, et il est même considéré comme son propre dirigeant. L’entrepreneur individuel travaille alors pour son compte, ce qui implique que :

  • Il gère lui-même ses activités ;
  • Il fixe lui-même ses objectifs ;
  • Il met lui-même en œuvre tous les moyens nécessaires lui permettant de les atteindre ; et
  • Il met lui-même en place les dispositifs qui lui permettent d’évaluer ses performances.

 

Le médecin qui exerce une profession libérale peut être considéré comme un entrepreneur individuel, dans la mesure où il gère lui-même son activité et qu’il dispose de sa propre patientèle. D’autant plus que le médecin n’est pas managé par un dirigeant.

 

Ainsi, l’entrepreneur individuel se distingue de l’entreprise par sa dimension et par sa structure. L’entrepreneur est à la fois le propriétaire, le dirigeant, et le collaborateur. Au sein d’une entreprise, le capital humain est géré et développé par les dirigeants et les managers. Pour le cas de l’entrepreneur individuel, il se doit de gérer seul son capital humain.

 

En ce qui concerne la contribution du capital humain au succès de l’entrepreneur individuel, un groupe d’auteurs a réalisé une étude ayant pour objectif de mettre en évidence ce que représente le capital humain pour l’individu et pour l’entreprise. D’abord, le capital humain est considéré comme un vecteur de la création de valeur (Edvinsson et Malone, 1997)[10]. Cette valeur est constituée par tous les composants du capital humain, dont les compétences et les qualifications de l’individu. Ainsi, le capital humain se présente comme un atout considérable en matière de création de valeur. Plus le capital humain augmente, plus la valeur de l’entrepreneur individuel est élevée.

 

Ensuite, d’autres travaux ont permis d’avancer le fait que le capital humain représente un facteur de performance globale (Kaplan et Norton, 1992[11]). En effet, ces derniers ont démontré le fait que les ressources humaines, qui peuvent bien être représentées par l’entrepreneur individuel, vont mettre en œuvre leurs compétences afin d’atteindre les objectifs poursuivis. De plus, elles devront aussi adopter un comportement qui les mènera vers ce but. Ainsi, grâce au capital humain, l’entrepreneur individuel a la possibilité de développer sa performance globale.

 

Enfin, le capital humain représente un élément déterminant d’une stratégie (Sveiby, 1997)[12]. L’auteur estime que la stratégie est basée sur la connaissance, par conséquent la compétence de l’individu. Ainsi, grâce à son capital humain, l’entrepreneur individuel est en mesure de mettre en place une stratégie lui permettant d’atteindre les objectifs qu’il s’est fixé.

 

Le schéma suivant expose ainsi la contribution du capital humain au succès de l’entrepreneur individuel.

 

Figure 3 : Contribution du capital humain au succès de l’entrepreneur individuel

 

 

Source : Inspirée des ouvrages d’Edvinsson et Malone, Kaplan et Norton, et Sveiby

 

 

  • Contribution du capital social au succès de l’entrepreneur individuel

 

Avant de procéder à la détermination de la contribution du capital social au succès de l’entrepreneur individuel, il est indispensable d’apporter une définition au concept.

 

  • Concept de capital social

 

Le concept de capital social fait l’objet d’une polysémie. D’un côté, il peut désigner la somme d’argent qui est apportée par les associés lors de la constitution d’une entreprise. Au sens juridique, le capital social représente alors un indicateur qui permet de classifier les entreprises. En fonction de son capital social, une société peut être une société individuelle, une société anonyme, ou une société à responsabilité limitée.

D’un autre côté, le capital social est défini par une autre discipline : les sciences humaines et sociales. Le premier scientifique qui a alors défini le capital humain dans cette discipline est un sociologue (Bourdieu, 1980)[13]. Il considère que le capital social est « l’ensemble des ressources actuelles ou potentielles qui sont liées à la possession d’un réseau durable de relations plus ou moins institutionnalisées d’inter connaissance et inter reconnaissance ».

 

Il est à noter que dans le cadre du présent mémoire, nous nous intéresserons au capital social concerné par la seconde définition. Pour mieux appréhender le concept, d’autres auteurs ont également réalisé des travaux se portant sur le capital social, ils ont alors conclu que ce dernier est subdivisé en trois catégories (Boutillier et Uzinidis, 1995)[14].

 

D’abord, les auteurs distinguent le capital connaissances qui regroupe tous les savoirs et savoir-faire auxquels l’entrepreneur peut accéder. En d’autres termes, il s’agit des connaissances acquises par ce dernier et qu’il applique dans la réalisation de son activité. Ensuite, il y a le capital financier qui représente les ressources en capital de l’entrepreneur individuel. Et enfin, les auteurs ont mis en évidence le capital relations. Ce dernier représente toute forme de soutien que l’individu peut recevoir de son réseau de connaissances. Ce réseau en question peut être formé par des membres de la famille, des amis, ou encore des collègues.

 

Le capital social représente un élément-clé pour l’entrepreneur individuel, et ce, dans toutes les phases de son activité. Cette situation se justifie par le fait que la réussite de ce dernier dépend en grande partie de la qualité, mais également de l’étendue du capital social dont il dispose, tant au niveau microéconomique que macroéconomique, comme le démontre le tableau ci-dessous.

 

Figure 4 : Facteurs de réussite de l’entrepreneur indépendant en matière de capital social

 

Échelle Facteurs
Microéconomique –          Classe sociale

–          Parcours éducatif et professionnel

–          Vécu

–          Réseaux d’amitié et de connaissance

Macroéconomique –          Situation économique : croissance, récession…

–          Situation sociale : stabilité, troubles…

–          Mesures politiques envisagées ou mises en œuvre : encouragement à la création d’entreprise, forte protection des travailleurs, mesures fiscales liées aux professions libérales…

–          Configuration du marché au niveau de l’offre : taille, localisation géographique…

–          Configuration du marché au niveau de la demande : évolution du revenu des ménages, existence de besoins latents ou insatisfaits…

–          Existence et niveau de diffusion des connaissances scientifiques et techniques

 

Source : Inspirée de l’ouvrage de Bessieux-Ollier, Lacroix et Walliser

 

 

À partir de ce tableau, deux points sont à retenir :

  • Au niveau microéconomique, le milieu façonne l’entrepreneur individuel. Ce dernier établit alors son repère et s’appuie sur ce milieu pour acquérir les ressources nécessaires à la réalisation de son activité.
  • Au niveau macroéconomique, la qualité et le nombre d’entrepreneur individuel varient en fonction de cet environnement macroéconomique.

 

  • Contribution du capital social au succès de l’entrepreneur individuel

 

Déterminer la contribution du capital social au succès de l’entrepreneur individuel amène à évaluer l’importance du capital social pour l’entrepreneur individuel. Selon Burt (1995)[15], il existe deux approches qui permettent d’appréhender l’importance du capital social :

  • L’approche par rapport au capital humain ; et
  • L’approche en tant que structure de réseau.

 

L’approche par rapport au capital humain

Les concepts de capital social et de capital humain permettent de cerner les raisons qui font qu’un entrepreneur individuel représente plus de valeur qu’un autre dans son activité professionnelle. En effet, ces deux concepts sont basés sur un principe d’inégalités :

  • Certains médecins peuvent avoir plus de clients que d’autres ;
  • Certains médecins peuvent disposer d’une compétence spécifique que d’autres n’en ont pas ; ou encore
  • Certains médecins gagnent plus que d’autres en termes de rétribution.

 

Ainsi, du point de vue intégrant le capital humain, les différences qui résident au niveau des capacités individuelles représentent ces inégalités. Des auteurs ont d’ailleurs illustré cette situation à travers la réalisation d’une analyse qui se porte sur les bénéfices de l’éducation (Becker, 1975)[16]. D’ailleurs, la théorie du capital humain met d’ores et déjà en avant le fait que les entrepreneurs qui sont les mieux rémunérés sont ceux qui disposent d’une grande intelligence, d’un niveau de diplôme élevé, ou encore d’une importante expérience.

 

Du point de vue intégrant le capital social, c’est la valeur ajoutée que l’entrepreneur individuel obtient grâce à ses relations avec les autres acteurs qui est considérée. Les inégalités sont alors situées au niveau des différences contextuelles entre tous les entrepreneurs individuels (Coleman, 1990)[17].

 

Cette théorie concerne notamment les entrepreneurs individuels qui ne peuvent bénéficier d’une situation favorable à l’exercice de leurs activités qu’en bénéficiant de certains atouts tels que l’intelligence ou encore l’éducation. La possibilité pour l’entrepreneur individuel de conduire son projet vers le succès requiert une certaine capacité à gérer son activité, à identifier les occasions qui se présentent et à rassembler tous les atouts qui lui permettent d’atteindre ses objectifs. Le capital social permet à cet entrepreneur d’identifier ces opportunités, ainsi que de les développer.

 

Ainsi, nous pouvons en déduire que le capital social se distingue du capital humain :

  • Le capital social correspond à une qualité, un lien qui est instauré entre l’entrepreneur individuel et les différents acteurs, notamment représentés par ses différents partenaires ; et
  • Le capital humain correspond à une qualité qui est propre à l’entrepreneur individuel.

 

L’approche en tant que structure de réseau

 

L’approche du capital social en tant que structure réseau correspond à la théorie des trous structuraux (Burt, 1995)[18]. Issue d’une collaboration entre des sociologues et des économistes, cette dernière se fonde sur le fait que la structure d’un réseau peut procurer à l’entrepreneur individuel certains avantages compétitifs. En d’autres termes, les avantages que peut tirer un individu d’un capital social dépendent de la qualité de ses relations. L’entrepreneur individuel peut alors construire une relation plus profonde avec certains partenaires compte tenu des avantages que ces derniers lui procurent.

 

Cette relation se manifeste notamment par :

  • Une confiance mutuelle ;
  • Un soutien mutuel ; ou
  • Un lien fort basé sur la collaboration.

 

Par ailleurs, une étude réalisée par Papa Waly Diabong en 2004[19] sur l’impact du capital social sur les entrepreneurs scientifiques a permis d’aboutir aux conclusions suivantes :

 

  • Trois types d’acteurs ont alors été relevés : les inventeurs entrepreneurs, les inventeurs non entrepreneurs, et les entrepreneurs non inventeurs.

 

  • Pour la première catégorie d’acteurs, c’est-à-dire les inventeurs entrepreneurs, le capital relationnel a été indispensable afin de compenser le manque au niveau du moyen financier, lors du démarrage de leur projet. Ces entrepreneurs ont alors dû recourir à leur réseau relationnel pour réussir à mener à bien leur projet.

 

  • En ce qui concerne les inventeurs non entrepreneurs, le manque de capital financier et de capital relations ont connu une grande difficulté dans la conduite de leur projet.
  • Enfin, pour les entrepreneurs non inventeurs, ces derniers disposent d’un capital financier suffisant pour le démarrage de leur projet. Cependant, ils ont admis la nécessité du capital relationnel qui leur a permis de développer leur capacité d’innovation.

 

En conclusion, le capital social contribue à la réussite de l’activité de l’entrepreneur individuel, et ce, dans toutes les phases du projet. Il a été constaté que le capital relationnel joue un rôle compensatoire lors d’une faille constatée au niveau des autres composants du capital social.

 

 

  • Littérature sur la rémunération des entrepreneurs

 

Cette sous-section traite la formation et l’hétérogénéité des revenus des entrepreneurs, et ce, à travers le déploiement du capital humain et social. Dans un premier temps, nous abordons la littérature concernant le concept de rémunération des entrepreneurs. Dans un second temps, nous nous intéresserons au concept de bagage personnel de ces entrepreneurs.

 

  • Concept de rémunération des entrepreneurs

 

Les travaux qui se portent sur l’évaluation du rapport entre la rémunération et le capital ont principalement été réalisés pour les salariés. Par contre, ces travaux se font rares lorsqu’il s’agit des entrepreneurs individuels.

 

En effet, les auteurs ont tendance à s’intéresser aux conditions d’installation des entrepreneurs et à leur pérennité, qu’à leur rémunération (Rouault, 2001)[20]. Cette insuffisance de littérature en ce qui concerne le sujet réside dans le fait que les spécialistes des sciences sociales et humaines ont toujours considéré les entrepreneurs comme étant des non-salariés.

 

La rémunération d’un entrepreneur individuel est alors mal connue du fait que sa composition varie en fonction de la catégorie juridique qu’il adopte. Sa rémunération peut alors être composée de bénéfices, de dividendes, ou encore de plus-values. Dans tous les cas, tous ces éléments constituant la rémunération de l’entrepreneur ne représentent pas un salaire du point de vue économique.

 

La rémunération des entrepreneurs présente également un aspect mixte travail/capital, et cette situation différencie les entrepreneurs des salariés. Ces derniers sont rémunérés de manière exclusive sur le travail qu’ils ont réalisé, tandis que les entrepreneurs individuels, sont rémunérés d’une part sur le travail qu’ils ont fourni, et d’autre part sur le capital qu’ils ont investi dans leur activité. Le schéma ci-dessous illustre cette différence.

 

 

 

 

 

 

 

 

Figure 5 : Rémunération des salariés et rémunération des entrepreneurs individuels

 

 

Source : Inspirée de l’ouvrage de Rouault D., 2001.

 

 

Les entrepreneurs individuels sont alors rémunérés de deux types de revenus :

  • Le revenu du travail : du fait qu’ils exercent eux-mêmes leur activité ; et
  • Du revenu du capital : étant donné qu’ils ont investi un capital dans la réalisation de leur activité.

 

Leur rémunération est alors caractérisée par l’administration fiscale de revenus d’activité.

 

En termes d’option pour le statut d’entrepreneur individuel, le capital humain et le capital social de l’entrepreneur jouent un rôle important dans le choix de l’individu, car l’origine sociale se présente comme un facteur d’influence. En effet, le comportement de l’entrepreneur, l’un des composants du capital humain, façonne ce dernier et lui permet de disposer d’une capacité à entreprendre, à se lancer dans la mise en œuvre d’un projet. D’un autre côté, son cercle social, notamment son entourage, exerce également une influence sur l’entrepreneur. De plus, le travail que l’entrepreneur réalisera résulte de son capital humain, de par ses compétences.

 

L’origine sociale de l’entrepreneur contribue alors grandement dans sa réalisation et dans la réussite de son activité, et de manière générale, la réussite entraine une bonne rémunération. Cette origine sociale qui favorise le succès de l’entrepreneur individuel se présente sous diverses manières, notamment :

  • La catégorie socioprofessionnelle des parents ;
  • L’existence d’un patrimoine familial (héritage) ; ou encore
  • Le financement d’un projet par un membre de la famille.

 

Un second élément qui contribue à l’augmentation de la rémunération de l’entrepreneur individuel est son niveau d’études, en d’autres termes, son diplôme. Aussi loin que l’entrepreneur a avancé dans ses études, aussi élevée sera sa rémunération. Les cas ci-dessous permettent d’illustrer ce constat :

 

Cas n°1 : Entrepreneur rémunéré de par ses compétences

Un entrepreneur a réalisé des études supérieures qui lui ont permis de disposer d’un capital humain élevé, notamment en matière de compétences. Il sera alors en mesure de mettre en place un projet novateur, avec des avantages concurrentiels. Il gagnera une part de marché importante et sa rémunération augmentera en conséquence.

 

Cas n°2 : Entrepreneur rémunéré de par son diplôme

Dans le cadre d’une profession règlementée, telle que la profession libérale, à chaque diplôme correspond un statut, et à chaque statut correspond une rémunération. Plus le statut de l’entrepreneur individuel est élevé, plus sa rémunération augmente. Un diplôme élevé permet alors d’accéder à une rémunération élevée.

 

Afin d’avoir une vision plus claire sur la rémunération des entrepreneurs, les statisticiens se sont basés sur leur revenu fiscal. Il a alors été relevé que le niveau d’études et le diplôme de l’individu jouent un rôle substantiel dans l’amélioration de son revenu, comme l’illustre le graphique ci-dessous.

 

Figure 6 : Moyenne des revenus fiscaux des entrepreneurs individuels en fonction de leur diplôme

 

 

 

Source : Ouvrage de Rouault D., 2001

 

 

Nous avons alors pu constater que le capital humain et le capital social contribuent non seulement au succès de l’entrepreneur individuel, mais également à l’augmentation de sa rémunération. D’autant plus qu’il va sans dire que le succès mène systématiquement à une meilleure rémunération.

 

 

  • Bagage personnel des entrepreneurs

 

Dans le cadre de la rémunération, le capital humain et le capital social représentent le bagage personnel de l’entrepreneur individuel. Le tableau suivant permet de mieux appréhender le concept.

 

Figure 7 : Bagage personnel de l’entrepreneur individuel

 

  Capital humain Capital social
Bagage initial Parcours estudiantin

Diplôme

Compétences

Origine sociale
Bagage enrichi Compétences

Expériences

Réseaux développés au cours de l’exercice de l’activité

 

Source : Ouvrage de Rouault D., 2001

 

 

En matière de valorisation du bagage personnel de l’entrepreneur individuel, l’auteur (Rouault D., 2001) a réalisé trois constats. Le premier concerne le fait que les revenus du bagage personnel s’accroissent avec l’âge. La théorie du capital humain démontre que les années d’expérience permettent un gain de productivité, ce qui entraine une augmentation de la rémunération. Les entrepreneurs, de par leurs expériences, voient leur rémunération s’accroitre à partir d’un certain âge[21].

 

Le second constat se porte sur le fait que le capital social joue un rôle plus important que le capital humain. En effet, si l’entrepreneur individuel est issu d’une famille aisée, il pourra facilement accéder à des études supérieures. De plus, il pourra facilement démarrer son activité individuelle. Contrairement à un entrepreneur individuel qui, bien qu’ayant accompli des études supérieures, aura plus de difficultés à financer ses projets s’il ne dispose pas d’un capital social important.

 

Enfin, le capital humain est mieux valorisé pour un entrepreneur individuel. Ce capital est notamment représenté par les diplômes supérieurs. Ainsi, pour un même diplôme, il a été constaté qu’un entrepreneur individuel est mieux rémunéré qu’un salarié.

 

 

Section 2 : Modèle de recherche et méthodologie

 

L’entrepreneur individuel est reconnu comme étant une personne qui, armée de courage, choisit de réaliser son projet en refusant d’intégrer une structure organisationnelle pour se développer sur le plan professionnel. Il dispose alors d’un capital humain ainsi que d’un capital social à un nouveau suffisant pour lui permettre de démarrer son activité individuelle.

 

La revue de littérature que nous avons réalisée nous a permis de prendre connaissance du fait que le bagage personnel de l’entrepreneur individuel lui permet d’un côté de débuter dans le domaine de l’entrepreneuriat, et de connaitre du succès d’un autre. Dans l’optique de mieux appréhender le sujet, la réalisation d’une étude empirique se présente comme indispensable.

 

Cette seconde section est alors destinée à la présentation de la méthodologie adoptée dans la réalisation de cette étude. Dans un premier temps, nous exposerons nos hypothèses de recherche, pour ensuite aborder la méthodologie de recherche.

 

2.1. Hypothèses du modèle de recherche

 

L’hypothèse se définit comme « une proposition de réponse aux questions posées dans la problématique »[22]. L’hypothèse correspond alors à une réponse anticipée à la problématique. C’est la raison pour laquelle nous avons jugé opportun de rappeler la problématique de notre mémoire, qui est formalisée comme suit :

 

« Dans quelle mesure la nature du capital (humain et social) du médecin est-elle explicative de son niveau de rémunération? »

 

Face à ce questionnement, nous avançons les deux hypothèses suivantes :

H1 : Plus le capital humain de l’entrepreneur est élevé, plus la rémunération est importante.

H2 : Plus le capital social de l’entrepreneur est élevé, plus la rémunération est importante.

 

Il convient de préciser que lors de la formulation de ces deux hypothèses, nous nous sommes basé sur la revue de littérature qui a été réalisée dans la section précédente.

 

Première hypothèse : Plus le capital humain de l’entrepreneur est élevé, plus la rémunération est élevée

Le capital humain d’un individu peut être considéré comme l’ensemble des capacités qui lui permettent de produire, de travailler, ou encore d’exercer une activité. Ces capacités ont été acquises par l’accumulation de connaissances ainsi que de savoir-faire, qu’il soit général ou sur un domaine spécifique. Le capital humain, comme il a été mentionné précédemment, est constitué par trois composants, notamment le comportement, la compétence et la créativité.

 

Dans cette première hypothèse, nous avançons le fait que la rémunération de l’entrepreneur augmente en fonction du niveau de son capital humain, étant donné que ce dernier lui permet d’être plus compétent, plus créatif, et par conséquent de mettre en place un projet innovant qui lui rapporterait encore plus de clientèle.

 

Deuxième hypothèse : Plus le capital social de l’entrepreneur est élevé, plus la rémunération est élevée

Le capital social présente plusieurs aspects. Cependant, dans le cadre de notre étude, nous nous limiterons au capital relationnel qui est considéré comme l’ensemble des ressources actuelles et potentielles que dispose un individu compte tenu du fait qu’il dispose d’un réseau durable de relations.

 

La seconde hypothèse est basée sur le fait que ce capital social permet à l’entrepreneur de bénéficier d’une rémunération élevée, car cette dernière varie en fonction de la qualité et de la quantité de relation dont dispose l’entrepreneur.

 

Ces hypothèses ainsi que ces pistes de recherche nous permettent d’identifier les faits qui seront observés dans le cadre de l’étude empirique. Nous nous focaliserons alors sur le cas des médecins qui, de par leur activité, représentent des entrepreneurs individuels.

 

2.2. Méthodologie de recherche

 

Après avoir identifié la problématique et les hypothèses qui en découlent, il convient de choisir la méthodologie de recherche qui convient le mieux. Pour ce faire, nous allons apporter une justification en ce qui concerne le choix de cette méthodologie. Ensuite, nous présenterons la méthode sélectionnée pour le recueil des données, pour enfin présenter l’échantillon qui sera étudié.

 

2.2.1. Justification de la méthodologie

 

La méthodologie est un mode de confrontation des idées afin de confirmer, infirmer, voire nuancer une hypothèse. Ces idées peuvent alors provenir de l’expérience, de l’imagination, ou encore de données concrètes. L’objectif de notre étude est d’étudier le capital humain et social des médecins afin de voir s’il existe un lien entre la nature de ce capital et la rémunération de ces derniers.

 

Au vu des hypothèses avancées, le but est alors d’expliquer l’interdépendance entre la nature du capital de l’entrepreneur individuel, notamment le médecin, et sa rémunération, et plus particulièrement l’impact de ce capital sur cette dernière. De ce fait, nous nous trouvons dans une démarche exploratoire, c’est la raison pour laquelle la méthode qualitative est la plus adaptée.

 

Afin de tester nos hypothèses, nous nous sommes basé sur la recommandation de Wirtz (2000)[23] indiquant que l’étude de cas représente l’approche empirique qui est la plus adaptée à l’analyse des relations entre gouvernement des entreprises et comptabilité financière. En effet, dans notre cas, nous cherchons à analyser la relation entre le capital humain et le capital social du médecin et sa rémunération.

 

De plus, notre approche est de nature qualitative. Il a été constaté que l’étude de cas se présente comme la méthode qui permet d’accéder à des données qualitatives. De plus, elle est considérée comme le seul moyen permettant de confronter les hypothèses avec la réalité.

 

2.2.2. Recueil des données

 

Afin de pouvoir répondre à la problématique, le recueil de données sur le terrain est indispensable. Dans un premier temps, il est nécessaire de choisir le terrain et construire l’échantillon. Ensuite, il convient de collecter les données et les analyser.

 

La construction d’une enquête a alors deux objectifs. Cette opération permet de :

  • Valider ou infirmer les hypothèses avancées ; et
  • Compléter les informations recueillies au sein du cabinet concernant les médecins.

 

Dans le but d’obtenir les informations les plus pertinentes possibles, deux méthodes seront mises en œuvre :

  • L’observation participante ; et
  • L’entretien semi-directif.

 

Première méthode : l’observation participante

L’observation participante représente une méthode qui permet de comprendre l’autre dans le partage d’une situation commune (Foote, 1995)[24]. Cette méthode permet par conséquent de cerner une situation et d’avoir des réponses qui ne peuvent être accessibles par l’utilisation d’autres méthodes.

 

Pour notre cas, nous avons adopté trois formes d’observation participante dans le cadre de notre étude empirique :

  • L’observation participante ouverte : cette pratique consiste à procéder à l’observation des médecins faisant l’objet de notre étude, tout en leur tenant informé de notre démarche. Ainsi, nous avons obtenu préalablement l’accord de ces entrepreneurs avant d’appliquer cette méthode.

 

  • L’observation participante périphérique : compte tenu du fait que la durée de notre observation a été limitée, donc pas complète, notre démarche est caractérisée d’observation participante périphérique.

 

  • L’observation participante externe : nous représentons un acteur externe aux cabinets des médecins concernés par notre étude, par conséquent, l’observation participante que nous avons mise en œuvre est qualifiée d’externe.

 

Comme toutes les méthodes, celle que nous avons réalisée présente des avantages et des limites. Nous étalons ces éléments dans le tableau ci-dessous.

 

Figure 8 : Observation participante – Les avantages et les limites

 

Observation participante Avantages Limites
Ouverte -Confiance du groupe observé

-Accord préalable du groupe observé

-Sécurité et assurance dans l’observation

-Risque de changement de comportement du groupe observé
Périphérique -Possibilité de prise de recul de l’observateur -Risque d’insuffisance du niveau de l’observation (information, événement manqué…)
Externe -Vision neuve sur la situation du groupe observé -Risque d’insuffisance de connaissance de groupe observé

 

Source : Recherche personnelle

 

Deuxième méthode : l’entretien semi-directif

Selon De Ketele et Roegiers (1996)[25], l’entretien est une « méthode de recueil d’informations qui consiste en des entretiens oraux, individuels ou de groupes, avec plusieurs personnes sélectionnées soigneusement, afin d’obtenir des informations sur des faits ou des représentations, dont on analyse le degré de pertinence, de validité et de fiabilité en regard des objectifs du recueil d’informations ».

 

L’entretien semi-directif compte parmi les techniques d’entretien. Il s’agit alors d’une méthode de collecte d’informations qui permet de centrer le discours des répondants autour des thèmes définis de façon préalable. Ce type d’entretien présente quelques caractéristiques, notamment :

  • Les discours sont organisés par thèmes, et l’ordre peut être plus ou moins déterminé en fonction de la réactivité du répondant ;
  • L’interviewer doit établir quelques points de repère afin de retenir les passages obligés ;
  • Les informations obtenues sont de bonne qualité, étant donné que les questions sont orientées vers l’objectif poursuivi ; et
  • L’inférence peut être modérée.

 

Toutefois, cette technique présente également des atouts et des limites, que nous présentons dans le tableau ci-dessous.

 

Figure 9 : Entretien semi-directif – Atouts et limites

 

 

Source : Fiche technique Euréval, 2010

Ainsi, l’entretien semi-directif permet à l’interviewer d’orienter l’interlocuteur sur des thèmes et des sujets précis, tout en lui accordant la possibilité de s’exprimer. Sa mise en œuvre requiert l’établissement d’un guide d’entretien. Pour ce faire, nous avons entrepris la démarche suivante.

 

Figure 10 : Démarche entreprise dans la construction du guide d’entretien

 

 

Source : Ouvrage de Didier Roche, 2009[26]

 

 

Le guide d’entretien que nous avons élaboré afin de réaliser les entretiens semi-directifs auprès des médecins se présente alors comme suit.

 

Figure 11 : Guide d’entretien semi-directif

 

Thèmes Questions
Profil des médecins 1/ Pouvez-vous indiquer votre âge ?
2/ Pouvez-vous indiquer la durée de votre expérience en tant que médecin indépendant ?
Capital humain 3/ Pouvez-vous parler de votre parcours estudiantin ?
4/ Pouvez-vous parler de votre diplôme ?
5/ Pouvez-vous parler de vos compétences dans le domaine de la médecine ?
Capital social 6/ Pouvez-vous parler de la taille de votre réseau relationnel ?
7/ Pouvez-vous indiquer comment votre réseau relationnel a été construit ?
8/ Pouvez-vous parler de la qualité de votre réseau relationnel ?
Succès dans l’entrepreneuriat 9/ Pouvez-vous indiquer comment votre projet d’ouvrir votre propre cabinet a été réalisé ?
10/ Pouvez-vous indiquer quels ont été vos atouts lors de la création de votre cabinet ?
11/ Pouvez-vous indiquer les difficultés que vous avez rencontrées lors de la création de votre cabinet ?
12/ Pouvez-vous indiquer comment ses difficultés ont été surmontées ?
Rémunération 13/ Pouvez-vous indiquer votre durée de travail hebdomadaire ?
14/ Pouvez-vous indiquer le nombre de patients moyens que vous recevez hebdomadairement ?
15/ Avez-vous constaté une évolution de ces éléments (durée de travail et nombre de patients) depuis la réalisation de votre activité ?
16/ Si oui, quelles en sont les raisons d’après vous ?
17/ Si non, quelles en sont les raisons d’après vous ?
Avis personnel 18/ D’après vous, votre capital humain contribue-t-il à l’amélioration de votre rémunération ?
19/ D’après vous, votre capital social contribue-t-il à l’amélioration de votre rémunération ?
20/ Avez-vous autre chose à ajouter ?

 

Source : Recherche personnelle

 

 

Ainsi, notre entretien est axé autour de six thèmes qui sont les suivants :

  • Le profil du répondant : dans un souci de confidentialité, les informations concernant les médecins se limitent à leur âge et leur date de début d’activité en tant qu’entrepreneurs individuels.

 

  • Le capital humain : il concerne le bagage personnel des médecins en matière de capital humain, ainsi que leur évolution.

 

  • Le capital social : il s’agit également de prendre connaissance du bagage personnel des médecins sur le plan relationnel.

 

  • Le succès dans l’entrepreneuriat : l’objectif est d’identifier les facteurs clés de succès des médecins, ainsi que les difficultés qu’ils ont rencontré en tant qu’entrepreneurs individuels. Le thème vise aussi à comprendre comment ces difficultés ont été surmontées.

 

  • La rémunération : dans ce thème, nous cherchons à comprendre comment évolue la rémunération des médecins. Pour ce faire, nous avons retenu comme indicateurs la durée de travail des médecins, le nombre de patients qu’ils reçoivent, ainsi que les raisons des éventuelles évolutions.

 

  • Avis personnel : nous cherchons à cerner le point de vue des médecins en ce qui concerne l’interdépendance entre leur capital et leur rémunération.

 

L’entretien semi-directif a été réalisé de manière individuelle auprès de chaque médecin. En ce qui concerne l’analyse des informations collectées, nous nous sommes servi d’une grille d’analyse manuelle qui nous a permis de mieux appréhender la situation. De plus, cet outil nous a également permis de réaliser une analyse verticale des données, c’est-à-dire par médecin, ainsi qu’une analyse horizontale, par thème.

 

La grille d’analyse à laquelle nous avons eu recours se présente comme suit :

 

Figure 12 : Grille d’analyse de contenu manuelle

 

 

Source : Ouvrage de Didier Roche, 2009

 

 

2.2.3. Présentation de l’échantillon de médecins étudiés

 

Lors de la construction de l’échantillon de médecins étudiés, certains éléments ont été pris en compte, notamment :

  • L’objectif de l’étude empirique ;
  • La qualité de l’enquête ;
  • Les hypothèses avancées ; et
  • La méthodologie d’analyse des résultats.

 

Ainsi, nous avons choisi de nous intéresser à dix entrepreneurs individuels représentés par des omnipraticiens. Il convient de préciser que la notion d’omnipraticien intègre deux types de médecin :

  • Les médecins généralistes ; et
  • Les médecins opérant suivant un mode d’exercice particulier ou MEP[27].

 

La répartition de ces médecins est exposée dans le tableau ci-dessous.

 

Figure 13 : Répartition des omnipraticiens représentant l’échantillon étudiée

 

  Effectif Pourcentage
Médecins généralistes 7 70%
Médecins en MEP 3 30%
TOTAL 10 100%

 

Source : Issue de l’enquête qualitative

 

 

Dans un souci d’une meilleure interprétation des données et d’une bonne compréhension de la situation des médecins entrepreneurs individuels, nous n’avons pas cherché à définir une représentativité statistique de l’échantillon. Au contraire, nous avons opté pour une grande diversité de cas, afin de ne pas se faire une opinion figée sur une seule situation.

 

Le seul point commun de tous les médecins constituant l’échantillon est alors leur statut d’omnipraticiens. Ainsi, les points de diversité concernent :

  • Leur âge ;
  • Leur expérience ;
  • Leur capital humain ;
  • Leur capital social ; et
  • Leur rémunération.

 

Nous avons jugé opportun de souligner le fait que les médecins concernés par notre enquête disposent d’une base de données dans le cabinet, par conséquent, certains éléments concernant ces derniers ont déjà été à notre disposition et nous ont été d’une grande utilité dans la réalisation de notre enquête.

 

Ces éléments concernent notamment l’évolution du revenu de ces entrepreneurs individuels depuis la création de leur cabinet. Ces données seront également présentées dans le cadre de notre étude.

 

 

Section 3 : Principaux résultats de l’étude empirique

 

L’enquête qualitative que nous avons réalisée auprès des dix professionnels libéraux a pour objectif de comprendre dans quelle mesure le capital humain et le capital social de ces derniers ont un impact sur leur rémunération. Pour y voir plus clair, cette dernière section de notre mémoire est consacrée à :

  • La présentation des résultats de l’enquête ;
  • La vérification des hypothèses avancées ; et
  • La proposition de solutions face aux cas soulevés.

 

3.1. Analyse des résultats

 

Dans cette sous-section, nous présenterons les résultats de notre analyse concernant la situation des médecins entrepreneurs individuels. Pour ce faire, nous allons procéder par une présentation de l’analyse par thème.

 

En fonction du thème abordé, les éléments qui seront présentés peuvent être issus de :

  • L’observation participante ;
  • Les entretiens semi-directifs ; ou
  • Les éléments disponibles sur les médecins au sein du cabinet.

 

  • Profil des médecins

 

Comme il a été précisé précédemment, les médecins qui ont fait l’objet de notre étude empirique sont des omnipraticiens, dont 70% sont des généralistes, et 30% en mode d’exercice particulier.

 

En ce qui concerne leur âge, les données varient de 35 ans à 56 ans. Le schéma ci-dessous illustre les résultats.

 

Figure 14 : Âges moyens des médecins indépendants

 

 

Source : Issue de l’enquête qualitative

 

 

Ainsi, nous pouvons en conclure que les médecins en MEP sont plus jeunes que les médecins généralistes. Les médecins étudiés ont un âge moyen de 46 ans.

En ce qui concerne la durée d’expérience, le plus ancien a débuté en 1987, ce qui lui fait 29 années d’expériences. Tandis que le plus récent a débuté son expérience en tant qu’entrepreneur individuel en 2011, avec 5 années d’expériences. Le graphique ci-dessous expose les résultats.

 

Figure 15 : Expériences professionnelles des médecins en tant qu’entrepreneurs individuels

 

 

Source : Issue de l’enquête qualitative

 

 

La moyenne de la durée d’expériences de tous les médecins confondus est de 14 ans. Les médecins généralistes ont une durée moyenne de 15 ans, et les médecins en MEP de 10 ans. À première vue, leurs durées d’expériences semblent homogènes, toutefois, le graphique ci-dessous présente la répartition de ces durées sur un intervalle de 5 ans.

 

Figure 16 : Expériences professionnelles des médecins sur un intervalle de 5 ans

 

 

Source : Issue de l’enquête qualitative

La moitié des médecins ont une expérience inférieure à 10 ans. 20% des médecins ont une expérience entre 15 à 19 ans, et entre 25 et 29 ans également. La tranche de 20 à 24 ans n’est pas représentée.

 

  • Capital humain

 

Au niveau du parcours estudiantin, la règle exige qu’un omnipraticien effectue 9 ans d’études universitaires. Par conséquent, tous les médecins ont au moins réussi ces 9 années d’études. Cependant, certains médecins désirant de se spécialiser ou de s’améliorer ont réalisé d’autres études, bien que leur statut demeure encore celui d’un omnipraticien.

 

La répartition de ces médecins se présente alors comme suit.

 

Figure 17 : Répartition des médecins en fonction de leur durée d’études universitaires

 

 

Source : Issue de l’enquête qualitative

 

 

La majorité des médecins (60%) ne se contente pas du minimum requis pour l’exercice de la profession. Cette tendance est amplifiée en ce qui concerne les médecins généralistes, car 71% d’entre eux ont réalisé plus de 9 ans d’études supérieures. Les médecins en MEP présentent toutefois une exception, étant donné que seul 33% ont dépassé le minimum requis en matière de niveau d’études.

 

Lors de l’évaluation du diplôme des professionnels libéraux, nous avons retenu comme critère le nombre de diplôme que ces derniers ont accumulé au cours de leur parcours estudiantin. En moyenne, les médecins détiennent 2,3 diplômes. Les médecins généralistes détiennent 2,2 diplômes, et les médecins en MEP 2 diplômes.

 

Le graphique ci-dessous retrace la répartition des diplômes des médecins en fonction de leur diplôme.

 

 

Figure 17 : Répartition des médecins en fonction de leur diplôme

 

 

Source : Issue de l’enquête qualitative

 

 

En termes de compétences des entrepreneurs individuels, elles ont été classifiées en trois catégories :

  • Faible
  • Moyen
  • Élevé

 

Le graphique ci-dessous présente alors les tendances en matière de compétences.

 

Figure 18 : Répartition des médecins en fonction de leurs compétences

 

 

Source : Issue de l’enquête qualitative

Ainsi, aucun médecin ne dispose de faibles compétences. La moitié des médecins ont des compétences moyennes et l’autre moitié dispose de compétences élevées.

 

Le graphique ci-dessous récapitule alors le capital humain des médecins, en fonction de la durée de leurs expériences en tant qu’entrepreneurs individuels, leur parcours estudiantin, et le nombre de leur diplôme.

 

Figure 19 : Récapitulation du capital humain des médecins

 

 

Source : Issue de l’enquête qualitative

 

 

Il convient de préciser que dans ce graphique :

  • Med désigne les médecins généralistes ; et
  • Mep désigne les médecins en MEP.

 

En termes de durée d’expériences, deux médecins disposent d’un niveau élevé : med 4 et med 6. En termes de parcours estudiantin, trois médecins disposent d’un niveau d’études élevé : med 1, med 4 et mep 3. Enfin, en termes de diplôme, deux médecins ont le plus de diplôme (4 diplômes) : med 1 et med 4. Nous pouvons alors constater que :

  • Le médecin med 4 dispose du meilleur capital humain, et ce, à tous les niveaux ;
  • Le médecin med 1 dispose d’un niveau d’études élevé et d’un diplôme important. Cependant, il ne dispose pas d’une durée d’expériences élevée.

 

  • Capital social

 

Au niveau de l’analyse du capital social des médecins, les éléments qui sont étudiés sont :

  • La taille du réseau relationnel des médecins ;
  • La manière dont le réseau relationnel a été développé ; et
  • La qualité du réseau relationnel.

 

En matière de taille du réseau relationnel, l’évaluation se présente comme suit :

  • Niveau 1 : taille réduite (le médecin dispose de peu de relations) ;
  • Niveau 2 : taille moyenne (le médecin dispose d’un réseau normal) ;
  • Niveau 3 : taille importante (le médecin dispose de plusieurs relations).

 

Le graphique qui suit expose la répartition des médecins en fonction de la taille de leur réseau relationnel.

 

Figure 20 : Répartition des médecins suivant la taille de leur réseau relationnel

 

 

Source : Issue de l’enquête qualitative

 

 

La moitié des médecins disposent d’un réseau relationnel de taille moyenne. 30% des médecins ont un réseau relationnel considéré comme réduite. Enfin, 20% des médecins ont un réseau relationnel de taille importante. Peu de médecins disposent alors d’un réseau relationnel important en termes de taille.

 

Quand à la manière dont le réseau relationnel a été construit, les résultats de l’enquête sur le terrain ont permis de distinguer les tendances suivantes :

  • Des médecins ont déjà eu un réseau relationnel avant de devenir entrepreneurs individuels (+++) ;
  • Des médecins ont développé leur réseau relationnel lors du démarrage de leur projet (++) ; et
  • Des médecins ont développé leur réseau relationnel après avoir démarré leur projet (+).

 

Le graphique suivant présente alors la répartition des médecins entrepreneurs individuels en fonction du développement de leur réseau relationnel.

 

 

 

 

 

 

Figure 21 : Répartition des médecins suivant le mode de développement de leur réseau relationnel

 

 

Source : Issue de l’enquête qualitative

 

 

40% des médecins ont déjà disposé d’un réseau relationnel important avant même de devenir entrepreneurs individuels. 40% ont construit leur réseau lors du démarrage de leur projet. 20% ont construit leur réseau après avoir démarré leur projet.

 

En matière de qualité de réseau relationnel, la classification des critères se présente comme suit :

  • Très influent : le réseau relationnel du médecin a une grande influence sur lui ;
  • Influent : le réseau relationnel du médecin a une influence normale sur lui ; et
  • Peu influent : le réseau relationnel du médecin a peu d’influence sur lui.

 

Le graphique qui suit représente la tendance des médecins étudiés en matière de qualité du réseau relationnel.

 

Figure 22 : Répartition des médecins en fonction de la qualité de leur réseau relationnel

 

 

 

Source : Issue de l’enquête qualitative

La moitié des médecins disposent d’un réseau relationnel influent, donc de qualité normale. 30% des médecins ont un réseau relationnel peu influent. 20% des médecins ont un réseau relationnel très influent.

 

Afin de mieux appréhender le capital social des médecins, le tableau suivant apporte une récapitulation en ce qui concerne le sujet.

 

Figure 23 : Situation du capital social des médecins

 

  Taille du réseau Mode de développement du réseau Qualité du réseau
Med 1 2 (++) Très influent
Med 2 2 (+++) Influent
Med 3 2 (+++) Très influent
Med 4 3 (+++) Influent
Med 5 1 (++) Peu influent
Med 6 2 (+) Très influent
Med 7 1 (++) Influent
Mep 1 3 (+++) Peu influent
Mep 2 2 (++) Influent
Mep 3 1 (+) Influent

 

Source : Issue de l’enquête qualitative

 

 

À partir de ce tableau, nous pouvons constater qu’un médecin peut avoir un réseau de taille importante, sans pour autant être important et très influent (med 2, med 4, mep 1). De plus, il est possible d’avoir un réseau relationnel très influent sans que sa taille soit importante (med 1). Certains réseaux relationnels peuvent toutefois être de taille plus ou moins importante et très influents (med 3), tandis que d’autres sont à la fois peu important et peu influent (med 5, mep 3).

 

La taille du réseau relationnel, son mode de développement, ainsi que sa qualité ne constituent alors pas des éléments interdépendants.

 

  • Succès dans l’entrepreneuriat

 

L’analyse du succès dans l’entrepreneuriat consiste à comprendre quels éléments du capital humain et social des médecins constituent un facteur clé de succès, et ce, au moment de la création de leur cabinet. Le premier point abordé concerne alors la manière dont le projet des médecins a démarré.

 

Il a été relevé que les médecins ont financé et ont pu réaliser leur projet grâce :

  • Aux réseaux relationnels dont ils disposent ;
  • Aux compétences dont ils ont acquises ; et
  • À leur capacité de financement propre.

 

Le graphique suivant répartit alors ces résultats.

 

Figure 24 : Mode de réalisation du projet des médecins

 

 

Source : Issue de l’enquête qualitative

 

 

Ainsi, la totalité des médecins considèrent que le capital humain est indispensable en matière de mise en œuvre d’un projet d’entrepreneuriat. Ensuite, 80% ont été soutenus par un réseau relationnel familial, contre 60% par un réseau relationnel externe. Seuls 30% des médecins affirment avoir disposé de leur propre moyen de financement.

 

Concernant les atouts des médecins lors de la création de leur cabinet, le graphique suivant en apporte plus d’éclairage.

 

Figure 25 : Atouts des médecins ayant permis la réussite de leur projet

 

 

Source : Issue de l’enquête qualitative

Ainsi, selon les médecins, le capital humain prime dans les conditions de leur succès, avec le comportement (100%) et les compétences (100%). Le capital social contribue également au succès (soutien familial 80% ; soutien externe 60%). Enfin, la capacité financière a permis à 20% des médecins à mettre en œuvre leur projet.

 

En ce qui concerne les difficultés rencontrées par les médecins lors de la réalisation de leur projet d’entrepreneuriat, il a été relevé que :

  • La principale barrière pour ces médecins (80%) réside au niveau du manque de financement en termes d’apport personnel. Ainsi, certains d’entre eux ont recouru au soutien de leur famille. Pour ce faire, ils n’avaient pas besoin d’argumenter pour obtenir de l’aide dans la mise en place de leur cabinet. D’autres médecins ont recouru au financement externe à travers leur réseau relationnel. Ces derniers étaient tenus de justifier la fiabilité de leur projet et de faire preuve de compétences et de créativité afin de pouvoir gagner la confiance et l’assurance des investisseurs.

 

  • D’autres médecins (20%) n’ont pas rencontré de difficultés sur le plan financier, lors du lancement de leur projet. Ceci s’explique par le fait qu’ils disposaient déjà d’une ressource financière suffisante avant même la réalisation de leur projet. Toutefois, la moitié de ces médecins constatent que des difficultés ont été rencontrées lors du lancement de leur projet, notamment en ce qui concerne la recherche de patientèle, étant donné qu’ils disposaient d’un faible réseau relationnel. Afin de surmonter cette contrainte, ils ont misé sur la mise en exergue de leurs compétences afin de convaincre les patients.

 

Cette situation met en évidence le fait que le capital humain et le capital social de l’entrepreneur individuel contribue à son succès. Et ces deux types de capital peuvent se compenser entre eux.

 

  • Rémunération

 

La compréhension de la rémunération, qui intéresse principalement notre étude, nécessite la prise en compte de certains paramètres en ce qui concerne les médecins :

  • D’abord, tous les médecins ayant fait l’objet de notre étude disposent du même statut, et par conséquent, présentent le même tarif en matière de consultation des patients ;

 

  • La seule manière pour ces médecins de gagner plus en matière de rémunération se joue alors au niveau du nombre de patients qu’ils peuvent recevoir.

 

  • Pour pouvoir augmenter le nombre de patients, les médecins ont trois options : soit ils augmentent leur durée de travail, soit ils misent sur leurs capital humain pour satisfaire leur patientèle qui va leur être fidèle, soit ils misent sur leur réseau relationnel pour attirer encore plus de patients.

 

Ceci étant, une augmentation du nombre de patients entraine systématiquement une augmentation de la durée de travail du médecin. Sauf si en situation normale, le professionnel rencontre des heures creuses où aucun patient de ne vient se présenter dans son cabinet.

 

Au cours de l’observation participante que nous avons réalisé auprès des médecins, nous avons pu remarquer que dans la plupart du temps, les médecins étaient débordés, et certains avaient déjà même des journées plus chargées à cause des patients qui réservaient un rendez-vous à l’avance.

 

En termes d’évolution de la rémunération des médecins, les constats des médecins sont bien en cohérence avec les données dont dispose le cabinet :

  • D’abord, les médecins qui n’ont vu aucune ou peu d’évolution au niveau de leur rémunération sont ceux qui n’ont changé aucun de leur mode opératoire. C’est-à-dire qu’ils conservent le même rythme de travail, conservent leur qualité de travail, et n’ont pas cherché à développer leur réseau relationnel.

 

  • Ensuite, les médecins qui ont connu une évolution en ce qui concerne leur rémunération ont dû mettre en place certaines stratégies qui sont mis en évidence dans le tableau ci-dessous.

 

Figure 26 : Actions mis en place par les médecins afin d’augmenter le niveau de leur rémunération

 

Capital concerné Actions Résultats % de médecins
Capital humain Améliorer les prestations offertes à la patientèle (compétences, créativité, comportement envers les patients) Satisfaction des patients entrainant une fidélisation et développant le principe du bouche-à-oreille 60%
Doubler les efforts et augmenter les heures de travail Prise en charge de plus de patients 50%
Optimiser le temps en développant un sens du dynamisme et de la réactivité Réduction du temps de prise en charge d’un patient pour en recevoir plus 20%
Capital social Recours au réseau familial pour trouver plus de patients Augmentation du nombre de patients 70%
Recours au réseau externe pour trouver plus de patients 60%

 

Source : Issue de l’enquête qualitative

 

 

  • Avis personnel

 

Les avis des médecins en ce qui concerne la contribution du capital humain et du capital social à l’amélioration de leur rémunération se présente comme suit :

 

Figure 27 : Avis des médecins sur la contribution du capital humain et du capital social à l’amélioration de la rémunération

 

 

Source : Issue de l’enquête qualitative

 

 

Ainsi, au niveau du capital humain, 90% des médecins considèrent que le capital humain contribue à l’augmentation de leur revenu, car plus ils font plus d’efforts, plus ils sont compétents, plus leur rémunération augmente. 10% des médecins estiment toutefois que le capital humain ne contribue pas à l’augmentation du revenu dans le cadre d’une profession règlementée.

 

En ce qui concerne le capital social, 70% des médecins estiment que le réseau relationnel permet d’améliorer leur rémunération, étant donné qu’ils pourront non seulement accéder à des ressources leur permettant d’améliorer leur projet, mais également car ils ont la possibilité d’acquérir de nouveaux patients. Toutefois, 30% des médecins affirment que le capital social n’est pas indispensable à l’amélioration de la rémunération, car la réussite dépend principalement du capital humain, dans le cadre de leur profession.

 

Force est de constater que certains médecins affirme que le niveau d’augmentation de la rémunération varie en fonction de la dimension du capital, qu’il soit humain ou social.

 

3.2. Validation ou infirmation des hypothèses de recherche

 

Après avoir présenté les résultats de l’analyse de l’étude de terrain, il convient de procéder à la vérification des hypothèses qui ont été avancées. Cette démarche aboutit à deux possibilités : soit l’hypothèse est validée, soit elle est infirmée.

 

H1 : Plus le capital humain de l’entrepreneur est élevé, plus la rémunération est importante

Compte tenu des résultats de l’enquête de terrain, nous pouvons confirmer que la rémunération de l’entrepreneur augmente lorsque son capital humain est élevé. En effet, sa rémunération s’améliore en fonction de l’effort qu’il entreprend. Plus les études qu’il a réalisées sont élevées, plus il a la possibilité d’augmenter son statut. Et plus il a de l’expérience, plus il est en mesure de trouver des moyens pour optimiser son organisation et pour satisfaire ses clients.

 

H2 : Plus le capital social de l’entrepreneur est élevé, plus la rémunération est importante

Cette seconde hypothèse est également validée, compte tenu des résultats de l’étude empirique. En effet, le réseau relationnel permet à l’entrepreneur de réaliser son projet, et ce, dès son démarrage. Toutefois, cette hypothèse est nuancée, compte tenu du fait que même si l’entrepreneur détient un réseau relationnel important et influent, tant qu’il ne dispose pas du capital humain nécessaire à la réalisation de son projet, il ne pourra pas exercer son activité correctement, encore moins améliorer sa rémunération.

 

Ainsi, la première hypothèse est validée, et la seconde hypothèse est également validé mais nuancée.

 

3.3. Recommandations managériales

 

À partir des analyses qui ont été réalisées, tant sur le plan théorique (revue de littérature) que pratique (étude empirique), nous avançons quelques recommandations managériales à destination des entrepreneurs individuels, mais également à destination de tout acteur étant amené à gérer son capital humain et son capital social en vue d’améliorer sa rémunération.

 

  • Mettre en place un système de management du capital de l’individu

 

Comme tout élément constituant une entité, qu’elle soit morale ou physique, le capital de l’individu a besoin d’être managé. Par manager, nous entendons les actions suivantes :

  • Créer : il est important de construire son capital. Le capital humain s’instaure à travers les études et l’acquisition d’expérience. Quant au capital social, il s’obtient en tissant des relations, en créant des réseaux.

 

  • Développer : il est indispensable d’améliorer le capital déjà acquis. Pour le capital humain, il se cultive notamment à travers l’accumulation des expériences. En ce qui concerne le capital social, il est important de tenir compte de la qualité du réseau relationnel avant sa taille.

 

  • Suivre et évaluer : l’entrepreneur doit être en mesure de suivre l’évolution de son niveau de capital, de l’évaluer, afin de mettre en place des actions permettant de l’améliorer dans le cas où il se trouve en position de régression ou de stagnation.

 

  • Fixer des objectifs en matière de rémunération

 

Le fait pour l’entrepreneur de se fixer des objectifs en matière de rémunération lui permet de mobiliser le niveau de capital nécessaire à leur atteinte. Il va sans dire que pour améliorer la rémunération, il faut améliorer son capital humain et social. Il est également à retenir que le capital social et le capital humain peuvent se compenser. Ceci étant, l’idéal est d’avoir un niveau équilibré de ces deux types de capital.

Les objectifs que l’entrepreneur se fixera doivent être réalistes et réalisables. Ils doivent également être mesurables et réalisables dans le temps.

 

Enfin, l’entrepreneur doit avant tout considérer son capital comme un bagage personnel, et qu’il devra veiller à l’améliorer, et ce, même en dehors du cadre d’amélioration de la rémunération.

 

 

 

Conclusion

 

 

En guise de conclusion, nous rappelons que le présent mémoire a pour objectif d’étudier, comme pour tout entrepreneur, le capital humain et social des médecins, et ce, afin de voir s’il existe un lien entre la nature du capital et la rémunération de ces derniers.

 

La revue de littérature nous a permis d’avoir une vision plus claire sur les concepts d’entrepreneuriat, de capital social, de capital humain, et de rémunération des entrepreneurs. Cette section nous a également permis de découvrir quelques pistes en ce qui concerne le fait que le capital humain et social de l’entrepreneur a de l’influence sur son niveau de rémunération.

 

À partir des ces idées préliminaires, nous avons établi nos synthèses, éléments qui fonderont notre étude empirique. C’est alors à travers l’étude de cas se portant sur une dizaine de médecin que nous avons pu vérifier si le capital de l’entrepreneur participe à l’amélioration de sa rémunération.

 

La démarche adoptée dans le cadre de l’étude consistait à réaliser une observation participante auprès de l’échantillon étudié, à établir un guide d’entretien en vue de la réalisation d’un entretien semi-directif, et à examiner les éléments qui étaient déjà en notre possession en ce qui concerne les médecins concernés par l’enquête.

 

À l’issue de cette enquête, nous avons pu confirmer les deux hypothèses que nous avons avancées et qui sont fondées sur la revue de littérature. Ainsi, nous pouvons confirmer que le capital humain et le capital social de l’entrepreneur lui permettent d’améliorer son niveau de rémunération, dans la mesure où il les développe et les améliore.

 

 

 

Bibliographie

 

 

  • Becker G.S., (1975), « Human capital, a theoretical and empirical analysis with special reference to education », New York: National bureau of economic research, Chicago, University of Chicago Press, 2e édition.
  • Bessieux-Ollier C., Lacroix M. et Walliser E., (2006), « Le capital humain : approche comptable versus approche managériale », Revue internationale sur le travail et la société.
  • Bourdieu P., (1980), « Le capital social », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 31.
  • Boutillier S. et Uzinidis D., (1995), « L’entrepreneur, une analyse socioéconomique », Economica.
  • Burt R.S., (1995), « Le capital social, les trous structuraux et l’entrepreneur », Revue française de sociologie, vol. 36, n° 4, pp. 599-628.
  • Cantillon R., (1755), « Essai sur la nature du commerce en général », Londres, Gyler F., Higgs H., C.B., Londres, MacMillan, 1931.
  • Coleman J.S., (1990), « Foundations of social theory », Cambridge, Harvard University Press.
  • De Ketele J-M. et Roegiers X., (1996), « Méthodologie de recueil d’informations. Fondements des méthodes d’observations, de questionnaires, d’interviews et d’études de documents. Méthodes en sciences humaines », 3e édition, Paris, De Boeck Université.
  • Deroy X., (2008), « L’événement entrepreneurial et le modèle entrepreneurial », Revue française de gestion, n° 187, pp.52-63.
  • Diabong P-W., (2004), « Le capital social des entrepreneurs scientifiques : Essai d’analyse à partir de l’étude de 24 biographies », Laboratoire Redéploiement Industriel et Innovation Université du Littoral Côte d’Opale.
  • Edvinsson L. et Malone M., (1997), « Intellectual capital: realizing your company’s true value by finding its hidden brainpower », New York: HarperCollins.
  • Foote W.W., (1995), « Street corner society, la structure sociale d’un quartier italo-américain », Paris, La découverte.
  • Kaplan R.S. et Norton D.P., (1992), « The balanced scorecard – measures that drives performance », Harvard Business Review, vol. 70, n° 1, pp.58-63.
  • Ployart R.E., Nyberg A.J., Reilly G., et Maltarich M.A., (2014), « Human capital is dead, long live human capital resources! », Journal of Management, vol. 40, p. 371-398.
  • Rédis J., (2006), « Contribution à la connaissance de l’accompagnement à la levée des fonds destinée aux jeunes entreprises de croissance: le cas de la France », Revue de l’Entrepreunariat, Vol 5, n°1.
  • Reyes G., (2012), « Les pratiques de gestion du pharmacien titulaire pour mesurer et piloter son officine », Revue internationale P.M.E. : économie et gestion de la petite et moyenne entreprise, vol. 25, n°3-4, p. 289-316.
  • Reyes G., (2013), « Le métier de pharmacien titulaire d’officine face à l’incertitude du marché de la santé », RIMHE, Revue Interdisciplinaire Management & Humanisme n°8.
  • Roche D., (2009), « Réaliser une étude de marché avec succès », Eyrolles.
  • Rouault D., (2001), « Les revenus des indépendants et dirigeants : la valorisation du bagage personnel », Économie et statistique, vol. 348, n° 1, pp. 35-59.
  • Samson A-C, (2008), « Les revenus des médecins généralistes – trois études micro-économétriques », Économies et Finances, Université de Nanterre – Paris X.
  • Say J.B., (1816), « England and the English People », 2e édition, par Richter J., Londres, Sherwood, Neely & Jones.
  • Schumpeter J.A., (1954), « History of Economic Analysis », édité par Schumpeter E.B., New York, Oxford University Press, Londres, George Allen & Unwin, 6e édition, 1967.
  • Sveiby K.E., (1997), « The new organisational wealth: managing and measuring knowledge based assets », Berret-Koehler, San Francisco.
  • Vérin H., (1982), « Entrepreneurs, entreprises, histoire d’une idée », Paris,
  • Weber M., (1930), « The Protestant Ethic and the Spirit of Capitalism », traduit par Parsons T., Londres, Allen & Unwin.
  • Wirtz P., (2000), « L’étude de cas : Réflexions méthodologiques pour une meilleure compréhension du rôle de la comptabilité financière dans le gouvernement de l’entreprise », Comptabilité – Contrôle – Audit, p. 121-135.

 

[1] Vérin H., (1982), « Entrepreneurs, entreprises, histoire d’une idée », Paris,  PUF.

[2] Schumpeter J.A., (1954), « History of Economic Analysis », édité par Schumpeter E.B., New York, Oxford University Press, Londres, George Allen & Unwin, 6e édition, 1967.

[3] Cantillon R., (1755), « Essai sur la nature du commerce en général », Londres, Gyler F., Higgs H., C.B., Londres, MacMillan, 1931.

[4] Say J.B., (1816), « England and the English People », 2e édition, par Richter J., Londres, Sherwood, Neely & Jones.

[5] Weber M., (1930), « The Protestant Ethic and the Spirit of Capitalism », traduit par Parsons T., Londres, Allen & Unwin.

[6] McClelland D.C., (1971), « Entrepreneurship and achievement motivation: approaches to the science of socio-economic development », in Lengyel P., Approaches to the science of socio-economic development – Approches de la science et du développement socio-économique, Paris, Unesco.

[7] IIRC, (2013), « Cadre de référence international portant sur le reporting intégré », p.14.

[8] Ployart R.E., Nyberg A.J., Reilly G., et Maltarich M.A., (2014), « Human capital is dead, long live human capital resources! », Journal of Management, vol. 40, p. 371-398.

[9] Bessieux-Ollier C., Lacroix M., Walliser E., (2006), « Le capital humain : approche comptable versus approche managériale », Revue internationale sur le travail et la société, p.2.

[10] Edvinsson L. et Malone M., (1997), « Intellectual capital: realizing your company’s true value by finding its hidden brainpower », New York: HarperCollins.

[11] Kaplan R.S. et Norton D.P., (1992), « The balanced scorecard – measures that drives performance », Harvard Business Review, vol. 70, n° 1, pp.58-63.

[12] Sveiby K.E., (1997), « The new organisational wealth: managing and measuring knowledge based assets », Berret-Koehler, San Francisco.

[13] Bourdieu P., (1980), « Le capital social », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 31.

[14] Boutillier S. et Uzinidis D., (1995), « L’entrepreneur, une analyse socioéconomique », Economica.

[15] Burt R.S., (1995), « Le capital social, les trous structuraux et l’entrepreneur », Revue française de sociologie, vol. 36, n° 4, pp. 599-628.

[16] Becker G.S., (1975), « Human capital, a theoretical and empirical analysis with special reference to education », New York: National bureau of economic research, Chicago, University of Chicago Press, 2e édition.

[17] Coleman J.S., (1990), « Foundations of social theory », Cambridge, Harvard University Press.

[18] Burt R.S., (1995), « Le capital social, les trous structuraux et l’entrepreneur », Revue française de sociologie, vol. 36, n° 4, pp. 599-628.

[19] Diabong P-W., (2004), « Le capital social des entrepreneurs scientifiques : Essai d’analyse à partir de l’étude de 24 biographies », Laboratoire Redéploiement Industriel et Innovation Université du Littoral Côte d’Opale.

[20] Rouault D., (2001), « Les revenus des indépendants et dirigeants : la valorisation du bagage personnel », Économie et statistique, vol. 348, n° 1, p. 36.

[21] À partir de 40 à 45 ans selon l’étude réalisée par Rouault D.

[22] Définition selon Madeleine Grawitz.

[23] Wirtz P., (2000), « L’étude de cas : Réflexions méthodologiques pour une meilleure compréhension du rôle de la comptabilité financière dans le gouvernement de l’entreprise », Comptabilité – Contrôle – Audit, p. 121-135.

[24] Foote W.W., (1995), « Street corner society, la structure sociale d’un quartier italo-américain », Paris, La découverte.

[25] De Ketele J-M. et Roegiers X., (1996), « Méthodologie de recueil d’informations. Fondements des méthodes d’observations, de questionnaires, d’interviews et d’études de documents. Méthodes en sciences humaines », 3e édition, Paris, De Boeck Université.

[26] Roche D., (2009), « Réaliser une étude de marché avec succès », Eyrolles.

[27] Médecins pratiquant l’homéopathie ou l’acupuncture par exemple.

Nombre de pages du document intégral:52

24.90

Retour en haut