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Le plurilinguisme à Chyp

 

Le plurilinguisme à Chypre


Sommaire

 

Introduction

  • La situation sociolinguistique dans le contexte pédagogique de Chypre
  1. Evolution linguistique en Chypre
  2. L’enseignement/apprentissage des langues dans une société multilingue 
  3. Les approches plurielles et le FLE dans un contexte linguistique complexe 
  4. Conceptualisation de la didactique du plurilinguisme et du FLE dans le contexte pédagogique de Chypre
  1.  Les différentes approches en matière de didactique du plurilinguisme
  2. Les effets du plurilinguisme sur l’apprentissage linguistique
  3. L’adoption des approches plurielles lors de l’enseignement/apprentissage du FLE  

 

III.  Evaluation empirique des approches plurielles lors de l’enseignement/apprentissage du FLE à Chypre 

  1. La mise en œuvre des approches plurielles lors de l’enseignement du français :          présentation des données recueillies par les questionnaires
  2. Influence du plurilinguisme sur l’apprentissage du FLE et des autres langues étrangères
  3. Analyses et discussions des résultats
  4. Analyses des résultats de l’enquête : appréciations de l’influence du plurilinguisme sur l’apprentissage du français par les différents acteurs
  5. Problèmes rencontrés et limites quant à l’appropriation du FLE dans le cadre des approches plurielles.

 

Conclusion

Introduction

La population chypriote est composée des peuples ayant des origines différentes. En effet, environ 78% de cette population est d’origine grecque, 18% d’origine turque et 4% est composée par les arméniens et les maronites. Par conséquent, les langues parlées et utilisées dans le pays se trouvent aussi diversifiées. A partir de l’indépendance de l’île en 1960, les langues officielles  adoptées en Chypre sont le grec et le turc. Mais plusieurs autres langues trouvent aussi leur place dans le pays, notamment l’anglais. Cette langue occupe une place prépondérante sur le territoire chypriote, sans doute à cause de son statut mondial de lingua franca mais aussi à cause de la colonisation britannique de l’île de 1878 jusqu’à son indépendance en 1960. Par ailleurs, le contexte interrégional, la situation géographique de Chypre ainsi que les enjeux géopolitiques privilégient le contact avec des langues et des cultures diverses. L’île, située à l’Est de la Méditerranée, constitue un véritable carrefour entre l’Europe, l’Asie et l’Afrique. Son adhésion à l’Union européenne en 2004 a accentué l’importance de l’enseignement des langues étrangères surtout européennes. C’est ainsi qu’en dehors du français et de l’anglais, les langues étrangères européennes telles que l’italien, l’espagnol, l’allemand et le russe trouvent leur place dans le système éducatif de Chypre. Mais il est aussi vrai que le profil linguistique du pays est d’autant plus complexe qu’il implique la nécessité du développement de l’enseignement et de l’apprentissage des langues étrangères.

Le statut de la langue française apparaît assez privilégié dans le système éducatif de Chypre. En effet, le français est enseigné en tant que langue étrangère (FLE) à l’école secondaire parallèlement avec l’anglais. A partir d’une réforme pédagogique en 1996, l’enseignement du FLE a été rendu obligatoire durant les trois années du collège et la première année du lycée. Il tient ainsi la deuxième place en tant que langue étrangère parlée dans le pays après l’anglais et devant l’allemand. On considère donc que le FLE peut jouer un rôle important dans le développement de l’enseignement et de l’apprentissage des langues étrangères en Chypre. C’est pourquoi, il est intéressant d’examiner si la mise en œuvre des approches plurielles dans le contexte pédagogique de Chypre peut faciliter l’appropriation du FLE et faire croître le désir d’apprendre des langues étrangères. Pour pouvoir apporter des réponses et une validation de cette hypothèse, la présente étude se propose d’effectuer une analyse du plurilinguisme en Chypre. Pour ce faire, notre étude se divise en quatre grandes parties : la première partie présentera la situation sociolinguistique dans le contexte pédagogique de Chypre, la seconde avancera une conceptualisation de la didactique du plurilinguisme et du FLE dans le contexte pédagogique de Chypre, la troisième présentera une évaluation empirique des approches plurielles lors de l’enseignement/apprentissage du FLE à Chypre et la dernière se consacrera à l’analyse et la discussion des résultats observés.

  • La situation sociolinguistique dans le contexte pédagogique de Chypre

Le profil linguistique chypriote est fortement lié aux différents événements historiques et politiques qui ont marqué le pays. Chypre fut d’abord envahi par les Turcs (XVIe– XIXe siècle), puis colonisé par la Couronne britannique jusqu’à son indépendance en 1960. Ces événements marqués par la forte présence de différents pays illustrent le profil linguistique du pays.

A. Evolution linguistique en Chypre

1. Aperçu historique des langues officielles et des langues parlées en Chypre

Les langues officielles

Selon l’article 3 de la Constitution de Chypre du 6 août 1960, les langues officielles du pays sont le Grec et le Turc. En effet, la population chypriote est composée de deux principales communautés : 

  • la communauté grecque qui comprend tous les citoyens de la République de Chypre qui sont  d’origine grecque et dont la langue maternelle est le grec.
  • la communauté turque qui comprend tous les citoyens de la République qui sont d’origine turque et dont la langue maternelle est le turc. 

La communauté chypriote grecque présente de forts liens historiques et culturels avec la nation hellénique. En effet, le grec, sous la forme du dialecte arcado-chypriote, a été introduit à Chypre à la suite de l’hellénisation de l’île au XIIe siècle avant J.-C. L’usage de la langue grecque est attesté par les textes écrits et il est incontestablement lié à l’histoire du pays. La langue de scolarisation en Chypre a toujours été le grec moderne standard dont l’étude est obligatoire pour les enfants ayant au moins un parent chypriote grec. Cependant, il faut mettre en évidence l’utilisation du dialecte chypriote parallèlement avec le grec standard.  Le dialecte chypriote, ayant des particularités morphosyntaxiques, se distingue du grec moderne surtout par quelques différences phonologiques et lexicales. Le dialecte du pays est principalement utilisé dans un contexte familier, voire familiale, dans les interactions communicatives, tandis que la langue grecque est adoptée dans les salles de classes, le Parlement et les médias. De cette manière, le chypriote grec, plus parlé dans les régions rurales que dans les grandes villes, est considéré comme la forme orale de la langue standard.  

L’arrivée de la langue turque en Chypre date du XVIe siècle, lorsque Chypre fut conquise par les Turcs. L’île constituait un protectorat de l’Empire Ottoman pendant trois siècles avant d’être colonisée par les Britanniques. Depuis son indépendance en 1960 jusqu’en 1974, date de l’invasion turque marquée par la division de l’île en deux entités distinctes, des actes de violences sont observés entre les deux communautés. Malgré cette période agitée, de nombreux chypriotes grecs semblent bien maitriser le turc, et inversement des chypriotes turcs utilisent régulièrement le grec dans leurs communications orales. Le turc, l’une des deux langues officielles de Chypre, constitue une matière optionnelle pour les deux dernières années du lycée. Il est pourtant enseigné dans les instituts publics d’éducation permanente depuis 1960 et à l’Université de Chypre à partir de 1992 dans le cadre des études moyen-orientales et aussi en option. L’apprentissage de la langue turque en Chypre est actuellement en pleine expansion vu le nombre de chypriotes grecs qui étudient cette langue dans différents établissements ainsi qu’à l’université. Le nombre d’élèves turcs dans les écoles chypriotes grecques est aussi en constante augmentation, et cela, dans l’ensemble du pays non seulement dans la capitale, Nicosie. Dans les écoles publiques, certains enseignants apprennent le turc et dans la capitale, plusieurs centres et associations organisent des activités culturelles destinées aux deux communautés.

Les langues étrangères parlées en Chypre

Les langues étrangères les plus parlées et les plus importantes en Chypre restent la langue anglaise suivie de la langue française. 

La langue anglaise occupe une place importante en Chypre. Sans doute, la colonisation britannique de l’île a-t-elle contribué à  l’implantation de la langue anglaise sur le territoire chypriote. L’anglais est une langue étrangère obligatoire aussi bien dans le primaire que dans l’école secondaire depuis des dizaines d’années. Il est ainsi obligatoire pour tous les élèves entre l’âge de dix et quinze ans et constitue la seule langue étrangère enseignée à l’école primaire. Ayant le statut de langue seconde, l’anglais est fortement présent dans la vie quotidienne des chypriotes. Les médias et surtout la télévision, les films en version originale et la musique, la publicité et aussi le tourisme  constituent des exemples caractéristiques de la prépondérance de cette langue sans pour autant ignorer l’influence de la culture américaine. Il se trouve encore que les manuels scolaires proviennent des pays anglophones et que de nombreux documents officiels et juridiques ne sont disponibles qu’en version anglaise. Par ailleurs, certains types de rapport gouvernementaux continuent encore à être rédigés en anglais. La permanence de la langue anglaise en Chypre s’explique aussi par le fait que les chypriotes gardent des relations étroites avec leurs proches résidant en grande majorité au Royaume-Uni

En ce qui concerne la langue française, elle constitue la deuxième langue étrangère présente en Chypre après l’anglais. Le premier contact avec cette langue date du XIIe siècle. D’après les sources historiques, l’île est un Etat franc de 1192 jusqu’en 1489, date à laquelle elle passe sous la domination vénitienne. Malgré la conquête et la domination de différents peuples tout au long de l’histoire du pays, la présence diachronique de la langue française n’est pas sans importance. Actuellement, le français figure parmi les matières obligatoires pendant les trois ans du Gymnasium et la première année du Lycée. Les élèves ayant entre 12 ans et 15 ans doivent suivre des cours de français, deux périodes de quarante-cinq minutes par semaine. Cependant, à partir de 2001, une reforme linguistique a été mise en œuvre laissant le choix aux lycéens entre une gamme de langues étrangères. Les élèves doivent désormais choisir deux langues étrangères entre l’anglais, le français et d’autres langues européennes comme l’allemand, l’italien, le russe ou l’espagnol. 

Depuis 2001, les autres langues étrangères ont commencé à être enseignées voire parlées en Chypre mais il n’empêche que les principales langues étrangères dans les écoles soient l’anglais et le français.

 

2. La société chypriote : d’une société multilingue vers une société plurilingue

Par définition, et selon le dictionnaire Larousse (2010), les notions multilinguisme et plurilinguisme s’avèrent être synonymes. Les deux concepts s’utilisent indifféremment pour évoquer la situation d’une région ou d’un Etat où plusieurs langues sont parlées. Toutefois, selon le Conseil de l’Europe, le « multilinguisme » renvoie à la présence, dans une zone géographique déterminée, quelle que soit sa taille, à plus d’une « variété de langues », c’est-à-dire de façons de parler d’un groupe social, que celles-ci soient officiellement reconnues en tant que langues ou non. A l’intérieur d’une telle zone géographique, chaque individu peut être monolingue et ne parler que sa propre variété linguistique. Par contre, le « plurilinguisme » se rapporte au répertoire de langues utilisées par un individu. Ce répertoire englobe la variété de langue considérée comme langue maternelle ou première langue, ainsi que toute autre langue ou variété de langue, dont le nombre peut être illimité. Ainsi, certaines zones géographiques multilingues peuvent être peuplées à la fois de personnes monolingues et de personnes plurilingues. Selon les recommandations du Conseil de l’Europe, le plurilinguisme est défini comme « la compétence à communiquer langagièrement et à interagir culturellement d’un acteur social qui possède, à des degrés divers, la maîtrise de plusieurs langues et l’expérience de plusieurs cultures. On considère qu’il n’y a pas là superposition ou juxtaposition de compétences distinctes, mais bien existence d’une compétence complexe, voire composite, dans laquelle l’utilisateur puisse puiser. » (Conseil de l’Europe, 2000). 

Ainsi, le multilinguisme évoque plutôt l’idée d’existence de plusieurs langues dans une zone géographique déterminée tandis que le plurilinguisme se réfère aux langues parlées par un individu. 

De ce point de vue, le multilinguisme se rapporte bien au territoire chypriote en raison de la composition de la société chypriote de deux groupes sociaux importants : la communauté grecque et la communauté turque. Chaque groupe utilise sa propre langue qui est reconnue officiellement sur le territoire. Il faudrait pourtant noter la présence d’autres langues parlées par les groupes des migrants et des minorités comme par exemple les Arméniens, les Maronites et les Latins. 

Il est vrai que le multilinguisme inhérent de la société chypriote pourrait jouer un rôle décisif quant au développement du plurilinguisme. On considère que cette approche est tout à fait possible voire nécessaire dans le contexte pédagogique de Chypre. Les compétences langagières des chypriotes et surtout des élèves en plusieurs langues sont évidentes de même que le rôle privilégié des langues étrangères dans leur vie quotidienne. En effet, les citoyens ont bien compris l’importance majeure de l’acquisition des compétences langagières, tant pour la communication, que pour l’évolution professionnelle. Ainsi, la coexistence des groupes sociaux divers dans le pays constitue une base essentielle, favorable pour la promotion du plurilinguisme. Ce contexte multilingue de Chypre dispose de bases solides pour la mise en œuvre des approches plurielles.

 

B. L’enseignement/apprentissage des langues dans une société multilingue

1. Les politiques linguistiques concernant l’enseignement des langues en Chypre

Politiques linguistiques dans le cadre européen en tant que pays membre

Les politiques linguistiques éducatives pour les pays européens ont été étudiées dans le cadre régional de l’Union Européenne étant donné que les pays membres sont dans la plupart des cas des zones géographiques multilingues. En effet, le Conseil de l’Europe a développé un consensus autour des principes qui doivent guider l’élaboration de politiques linguistiques éducatives. Ces politiques linguistiques ont été orientées vers le développement du plurilinguisme dans chaque pays. Il importe alors surtout de mettre en valeur et développer l’aptitude des citoyens à apprendre et à utiliser plusieurs langues. Le but est donc d’élargir les compétences linguistiques des individus, grâce à un enseignement approprié tout en encourageant le respect et la compréhension des langues et des variétés  de langues d’autrui. Des outils cadres sont à la disposition des pays membres par le Conseil Européen. Tels sont le Cadre Européen de Référence (CECR) et le Guide pour l’élaboration des politiques linguistiques éducatives en Europe. Il existe aussi des instruments juridiques allant des simples recommandations aux conventions qui constituent la base juridique des politiques linguistiques concernant l’enseignement des langues.     

Dès 1997, l’éducation à la citoyenneté démocratique est devenue une priorité du Conseil de l’Europe et des Etats membres. Les Chefs d’Etats et des gouvernements des pays membres se sont mis en accord sur  la place centrale des langues dans l’exercice de la citoyenneté démocratique en Europe, dont l’explication résulte de l’acceptation que si, dans une démocratie, la participation active des citoyens aux décisions politiques et à la vie de la société est nécessaire, cela suppose que celle-ci ne soit pas rendue impossible par l’absence de compétence linguistique appropriées. Il en découle que la possibilité de prendre part à la vie politique et publique de son pays et aussi dans le cadre de l’Union Européenne implique une compétence plurilingue, c’est-à-dire la capacité d’interagir de manière efficace et appropriée avec les autres citoyens de l’Europe. Le développement du plurilinguisme ne relève pas seulement alors d’une nécessité fonctionnelle mais il constitue aussi une composante essentielle des comportements démocratiques. La reconnaissance de la diversité des répertoires plurilingues des locuteurs devrait conduire  à la tolérance linguistique et, par là au respect des différences linguistiques et culturelles. (Guide pour l’élaboration des politiques linguistiques éducative en Europe, 2002). 

Politiques linguistiques dans le cadre national

Un Rapport National (Rapport National, 2003) établi par le Gouvernement chypriote a mis en évidence les points jugés comme nécessaires à remises en causes et à de réformes dans le système éducatif du pays en matière des éducations linguistiques. Ainsi, selon ce rapport, les points suivants ont été relevés pour être soumis à réflexion :

  • La restructuration du système d’examens de langue dans l’optique d’obtention d’un emploi et/ ou d’une promotion ;
  • L’éducation linguistique des enfants bilingues scolarisés dans des établissements primaires et secondaires publics ; 
  • L’écart perçu entre le niveau de langue atteint à l’école et le niveau exigé pour entrer à l’université ; 
  • La nécessité d’une politique claire et directe sur la place du dialecte chypriote dans l’éducation linguistique dispensée dans les écoles publiques. Une politique qui devrait prendre en compte l’expression orale des enfants en particulier, et des adultes en général ;
  • La nécessité d’une approche globale de l’éducation linguistique (y compris l’apprentissage culturel) ;
  • Les liens entre les langues et entre les enseignants de langues ;
  • Les problèmes administratifs concernant l’offre de langues étrangères dans le deuxième cycle du secondaire ;
  • L’introduction d’une deuxième langue étrangère à l’école primaire ;
  • Le système d’enseignement privé ;
  • La formation initiale et continue des enseignants.

Ces points résultent des analyses effectuées et des points de vue des différents acteurs de la société chypriote et du système éducatif incluant ainsi des élèves et des enseignants.  Face à cette situation, des politiques devront être mises en œuvre ou du moins en vue d’orientations à venir. 

  • Nécessité d’une politique linguistique nationale cohérente

L’enseignement de la langue ne se limite pas au seul domaine éducatif ou pédagogique et aux aspects inhérents à l’enseignement. Des questions politiques et sociales sont aussi touchés telles que la coexistence de groupes de langues et de cultures différentes à l’intérieur ou au-delà des frontières, l’équité sociale et l’égalité dans l’accès aux langues par tous les citoyens, quelles que soient leurs origines sociales ou culturelles. (Profil de la Politique Linguistique Educative : Chypre, 2003).  Les politiques linguistiques devront prendre en compte les enjeux sociaux surtout pour les pays multilingues où il existe des langues officielles et des langues minoritaires comme Chypre et surtout du fait qu’il existe un lien relativement complexe entre la capacité linguistique nationale et la spécificité des affaires locales relatives à l’identité et aux langues. Il convient alors de considérer une politique linguistique éducative d’une manière globale. 

  • Mettre en œuvre/exploiter les potentiels linguistiques du pays 

Le multilinguisme est l’un des grands atouts de Chypre lorsqu’il constitue la base essentielle pour le développement du plurilinguisme dans le contexte pédagogique. En premier lieu, Chypre a adopté dans sa constitution de 1960 deux langues officielles, puis, en second lieu, la plupart des Chypriotes considèrent l’anglais comme une langue seconde plutôt qu’une langue étrangère. La grande majorité des citoyens, notamment la population urbaine, possède des connaissances dans cette langue et une bonne part de la population active possède une excellente maîtrise de l’anglais, parallèlement à leur langue maternelle. En outre, les élèves ont la possibilité d’apprendre une deuxième langue étrangère au cours de leur scolarité et dans le second cycle du secondaire, ils peuvent choisir une troisième langue étrangère. Les langues minoritaires à Chypre constituent des potentiels moins reconnus mais elles méritent d’être considérées. Il serait dans les avantages du développement du plurilinguisme de placer des efforts plus conscients pour valoriser et d’optimiser l’accès de l’ensemble de la population à ses grands héritages linguistiques.

Pour le grec, facteur-limitant l’accès à cette langue reste la coexistence et le mélange entre le grec moderne standard et le grec chypriote, vu que la langue d’enseignement est le grec moderne standard et que dans la vie courante, c’est-à-dire dans l’expression orale, la population utilise surtout le grec chypriote. L’action devrait se situer alors dès l’enseignement primaire et devrait s’agir surtout de :

  • Faire connaître aux élèves les variétés de grec moderne standard et de grec chypriote et les faire accepter l’utilisation du grec chypriote dans certaines situations ;
  • Susciter, par ces approches, un sentiment d’identité, d’appartenance et de fierté ;
  • Encourager l’instituteur à donner l’exemple en utilisant le grec moderne standard dans la salle de classe, sans réprimander les élèves qui utilisent le grec chypriote ;
  • Expliquer clairement aux élèves l’importance de la bonne maîtrise du grec moderne standard oral et écrit pour leur future carrière ; 

–  Mettre en évidence l’importance du grec moderne standard pour la lecture éclairée de textes dans de nombreux domaines (Profil de la Politique Linguistique Educative : Chypre, 2003).  

En tant que chypriote grec, je trouve que les gens dissocient dès leur naissance l’utilisation des deux langues. Mais il est peut-être nécessaire de reconnaitre ou de bien définir clairement le statut de deux langues.

Pour le turc, il s’agit surtout de développer la compréhension mutuelle entre les deux communautés qui repose en grande partie sur l’amélioration de la connaissance de la langue et de la culture de l’autre communauté. Les mesures qui ont été prises ont été axées sur l’introduction du turc dans le système éducatif, qui a commencé par l’entrée du turc parmi les options des langues proposées dans le deuxième cycle du secondaire à savoir le lycée ainsi que dans l’éducation continue des adultes.

Dans presque toutes les écoles privées, l’anglais est utilisé comme langue de l’enseignement ; le français est la première langue étrangère et est enseigné obligatoirement dès les deux premières années du collège. Par ailleurs, depuis quelques années, une autre gamme de langues étrangères est entrée au lycée, les langues étant choisies en option.

 

2. L’offre et le choix des langues en Chypre : l’enseignement des langues officielles et étrangères dans le primaire, le secondaire et à l’université  

Selon l’article 20 de la Constitution de 1960 de la République de Chypre, chacune des deux communautés officielles en Chypre, que ce soit la communauté grecque ou la communauté turque, a le droit fondamental de diriger son propre système éducatif. Mais  en général, le système éducatif chypriote se structure comme suit : 

  • Enseignement primaire : jusqu’à l’âge de 12 ans
  • Enseignement secondaire : de 12 ans jusqu’à 18 ans, se divisant en deux cycles
  • Le premier cycle : le Gymnasium, autrement dit le collège : de 12 – 15 ans
  • Le second cycle : le Lyceum, ou le lycée : 15 – 18 ans
  • Enseignement supérieur

A Chypre, l’enseignement n’est obligatoire que jusqu’au premier cycle du secondaire. Environ 10% des élèves choisissent de ne plus continuer leurs études. Environ 85% de ceux qui continuent choisissent de continuer leur scolarité au lycée et le reste choisit de poursuivre des formations professionnelles dans des établissements secondaires techniques et professionnels. 

 

  1. L’enseignement des langues officielles

 La langue de scolarisation dans les écoles publiques et dans certaines écoles privées est tout d’abord le grec moderne. L’étude du grec moderne au collège vise à permettre aux élèves de comprendre les particularités de la langue et le caractère de la civilisation grecque contemporaine ainsi que de mettre en valeur et d’apprécier la littérature. Puis à partir d’un niveau plus élevé, au lycée, l’enseignement vise à conduire les élèves à apprécier la richesse de la langue en les familiarisant avec des œuvres classiques de la littérature. A part le grec moderne, Chypre dispose aussi du dialecte chypriote qui coexiste très bien avec le grec moderne. Des œuvres littéraires et des pièces de théâtre représentatives de la littérature chypriote sont aussi étudiées en classe, de même que l’histoire du pays de l’époque du bronze jusqu’au 20e siècle, dans le cadre du cours d’histoire.  Il faut souligner que le grec, en tant matière obligatoire durant toute la scolarité des élèves chypriotes, bénéficie d’un très grand pourcentage dans les heures d’enseignement. En effet, le grec moderne représente à peu près 22% du temps d’enseignement au collège, contrairement au grec ancien qui est enseigné aux deux dernières classes du collège, trois fois par semaine, et qui constitue une matière optionnelle au lycée choisie par très peu d’élèves. A part ce système qui est surtout suivi par le programme d’enseignement public, les écoles privées introduisent aussi dans leurs programmes les études du grec moderne et du grec ancien et dont les volumes horaires peuvent être  parfois plus élevés que ceux dispensés dans les écoles publiques.

Quant à l’enseignement du turc, en tant que langue officielle, elle ne trouve pas encore place dans l’enseignement primaire des écoles publiques. Mais, l’enseignement et l’apprentissage du turc a fait l’objet de mesures d’encouragement. C’est ainsi que, dans le cadre de la mise en œuvre d’une politique linguistique éducative, il a été décidé que le turc soit enseigné à partir du second cycle de l’enseignement secondaire, mais, malgré les efforts et les discussions durables, il reste encore une option parmi les autres langues étrangères. Les cours des langues étrangères y compris du turc, en dehors du cadre scolaire, sont très demandés par les parents car les langues constituent pour eux un facteur important d’entrées à l’Université de Chypre et à d’autres universités étrangères. La société chypriote considère donc que la connaissance des langues contribue essentiellement à la réussite professionnelle. 

 

  1. L’enseignement des langues étrangères dans l’enseignement primaire et dans le secondaire

Le rôle primordial de l’anglais dans le contexte pédagogique de Chypre est indéniable, que ce soit en tant que langue seconde ou étrangère. Cette langue est obligatoire pour les élèves de la quatrième année de l’école primaire ayant précisément dix ans, jusqu’à la première année du second cycle de l’enseignement secondaire. L’importance de l’anglais au niveau international s’ajoute à l’importance que les chypriotes accordent à cette langue et entraine cette obligation d’étudier l’anglais dès l’enseignement primaire. Il serait intéressant de noter que la langue anglaise, optionnelle pour les deux dernières années du lycée,  n’est pas très demandée par les élèves. Cela s’explique peut-être par leur volonté de s’initier à/ apprendre une nouvelle langue étrangère plutôt qu’approfondir voire perfectionner leur connaissances en anglais. En effet, de nombreux élèves choisissent l’italien, langue pour laquelle il n’y a que très peu d’enseignants dans le pays. Ainsi, il a fallu recourir à des mesures d’urgence, entre autres le recours à des enseignants vacataires dont des enseignants provenant de Grèce. Malgré l’amélioration de la situation depuis peu, il n’est pas encore possible de parler de succès jusque-là. De plus, les parents craignent que l’acquisition de compétences dans les langues enseignées ne soit pas suffisante à partir de la classe B du lycée. Ils trouvent qu’en à peine deux années, les élèves ne pourront que s’initier à la langue choisie.

Le statut du français dans le contexte pédagogique de Chypre est assez privilégié lorsqu’il constitue la deuxième langue étrangère étudiée aussi bien au collège qu’au lycée. Depuis 2000, le français est obligatoire dans les écoles publiques pendant les trois années du collège et la première année du lycée. À partir de la deuxième année du lycée, les élèves ont le choix entre plusieurs langues (Allemand, Italien, Russe, Espagnol,…). Il est alors constaté que la grande majorité des élèves préfèrent choisir l’italien ou l’espagnol ou encore le russe et l’allemand comme deuxième langue étrangère. Les cours de langues dans les écoles publiques sont assurés pour deux périodes par semaine d’une durée de 45 minutes chacune. L’enseignement/ apprentissage des langues étrangères représentent donc 14% environ du temps d’enseignement. 

Les langues étrangères sont vraisemblablement très appréciées aussi bien par les parents que par les élèves. Les parents estiment que les standards en langues étrangères dans l’enseignement public ne soient pas assez élevés. D’après certains parents et élèves, le succès des écoles privées s’explique par le fait que celles-ci pratiquent des tests de sélection qui leur permet de n’y accepter que les meilleurs élèves. Et en outre, les écoles privées disposent de programmes scolaires bien définis, d’un cadrage et d’une préparation continue pour atteindre les niveaux standards internationaux. Certaines écoles privées mettent particulièrement l’accent sur les cours de langues étrangères.  En effet, elles présentent jusqu’à six cours d’anglais par semaine dès le début du secondaire et elles offrent des cours optionnels de langue en petit groupe de seulement cinq élèves, alors que dans les écoles publiques, les groupes sont constituées d’au moins quinze à 25 élèves.

Les élèves des écoles privées ainsi que des cours privées peuvent bénéficier alors d’un large avantage dans les offres en matière d’éducation linguistique et par conséquent dans les entrées universitaires, mais ceci joue en défaveur des élèves dont les parents ne disposent pas d’assez de ressources financières pour assurer des cours privées pour leurs enfants.

Dans le cadre des activités extrascolaires, les jeunes chypriotes ne pratiquent pas seulement des activités sportives ou des cours de musique, mais ils apprennent aussi des langues étrangères. A partir de l’âge de huit ans, la plupart des enfants commencent des cours d’anglais. L’apprentissage du FLE commence généralement à l’âge de 11 ans. Les élèves suivent des cours particuliers aux différents instituts privés, aux Alliances Françaises ou même à l’Institut Français de Chypre. L’apprentissage des langues étrangères en dehors du cadre scolaire s’explique par cette volonté des élèves d’élargir leurs compétences linguistiques et mieux maitriser les langues étrangères. Les élèves ont alors pour but de passer des examens internationaux, et notamment le DELF et le DALF pour ce qui est du français, pour lesquels les élèves ne sont pas préparés à l’école. Ces examens leurs permettent d’accéder les différentes universités européennes et enrichir leur CV et ainsi d’élargir leurs compétences professionnelles. 

  • L’enseignement des langues à l’université

Il est estimé que 50% des jeunes chypriotes poursuivent des études supérieures après les enseignements secondaires et que la majorité continue leurs études dans des universités étrangères et surtout au Royaume-Uni et aux Etats Unis d’Amérique. L’université de Chypre a été créée en 1992  et depuis, de nombreuses filières ont été mises en place, y compris les filières linguistiques. La langue d’enseignement à l’université est le grec mais les manuels proviennent encore des pays anglophones notamment du Royaume-Uni. L’admission à l’Université de Chypre est conditionnée par des tests et des concours d’entrées et il est à noter que les épreuves de grec et de langues étrangères sont considérées parmi les plus difficiles. Les filières de langues pratiquent aussi des tests et des sélections à l’entrée et la bonne connaissance en langue étrangère est exigée.

L’Université de Chypre offre une licence de langue et de littérature grecque moderne et une licence d’études turques avec le choix d’opter pour un axe historique et politique ou un axe linguistique et littéraire. Les professeurs de l’université envisagent aussi de mettre en place un master d’études européennes où les langues occuperaient une place importante. Par ailleurs, d’autres formations ont été mises en place depuis quelques années et elles concernent le premier, le deuxième et le troisième cycles. Les diplômes  préparés sont le Ptychio (d’une durée de 4 ans), le master / magister (d’une durée de un an et demi à deux ans) et le doctorat (d’une durée de 3 à 8 ans).

Plusieurs filières d’orientation sont proposées aux étudiants à Chypre suivant un cursus littéraire ou un cursus scientifique. Pour certaines spécialités, ils doivent suivre des cours de langues pendant trois semestres. Le Centre de Langues de l’université de Chypre propose des cours d’anglais, de français, d’allemand, d’italien, d’espagnol et de russe. Beaucoup d’étudiants font obligatoirement des cours d’anglais pour améliorer leur niveau et leurs compétences en cette langue ou encore des cours d’anglais de spécialité afin d’élargir leur connaissances linguistiques sur un domaine précis (par exemple, anglais du tourisme, des finances, de l’économie…). Mais il n’en est pas moins important le choix parmi les autres langues étrangères. Il faut remarquer que la demande, et par conséquent les inscriptions, en français sont en baisse ces dernières années tandis que les inscriptions des étudiants en espagnol, en italien ou même en allemand sont en constante augmentation. La perte/le refus de la langue française au niveau universitaire reflète l’évolution des modes et des habitudes au niveau européen mais cette situation reflète aussi les nouveaux besoins en matière des langues de la société chypriote.

 

3. Adaptation des programmes linguistiques en fonction des besoins sociolinguistiques, professionnels et économiques

Chypre est un pays dont les ressources naturelles sont limitées, mais qui dispose d’une situation géographique privilégiée étant considéré comme le carrefour des trois continents.  Les secteurs à mettre en profit sont alors les secteurs des services, en particulier le tourisme, les finances et le secteur bancaire où la communication efficace est très valorisée, ce qui implique la nécessité de bonne maîtrise des langues étrangères. Ainsi, pour les employeurs, la maîtrise de l’anglais est un facteur très déterminant, au même titre que l’utilisation du grec langue maternelle, que ce soit à l’oral ou à l’écrit. Les chypriotes sont ainsi conscients de l’importance de l’enseignement linguistique. Les postes les plus qualifiées  nécessitent souvent la connaissance d’une troisième langue autre que l’anglais et le grec, notamment dans le cadre de l’intégration de Chypre dans l’Union Européenne. Dans ce cadre, le gouvernement chypriote a alors estimé que le français et l’allemand devraient jouer un rôle important à cause de la prépondérance des deux pays dans l’union européenne. Dans les professions du secteur public, les qualifications linguistiques doivent aussi figurer dans les  profils des postulants. En effet, tous les candidats d’origine chypriote ou autre doivent posséder une très bonne connaissance du grec (au moins le niveau B1). De plus, la maîtrise d’une autre langue est toujours presque recommandée, notamment l’anglais, le français ou l’allemand. Pour travailler dans le secteur du Tourisme, un excellent niveau en grec et en anglais est même exigé, donc des approfondissements dans les études supérieures sont nécessaires.

 

La langue russe tient aussi un rôle non négligeable au sein de la société chypriote. Cela est essentiellement dû au développement du secteur des services. Il est intéressant de préciser que Chypre est la base de plusieurs sociétés offshore russes. De plus, l’économie du pays relève en grande partie de ces compagnies internationales ainsi que du tourisme. La langue russe devient de plus en plus demandée et est parlée surtout par les adultes, plus particulièrement les personnes actives. Certaines catégories de profession requièrent la maîtrise, du moins la connaissance de la langue russe, en particulier les emplois de banque, les postes d’avocats ainsi que ceux relatifs à la comptabilité.

Après les évènements de mars 2013 et l’arrivée de Troïka à Chypre, les Chypriotes sont de plus en plus méfiants. Nombreux peuvent en être les causes, entre autres la capacité financière et le niveau de vie devenus compromis. Cela a des conséquences notables sur l’apprentissage linguistique. Les étudiants chypriotes se tournent de plus en plus vers les pays européens tels que l’Allemagne et la France pour faire leurs études supérieures car celles-ci y sont gratuites. Par conséquent, il y a de moins en moins d’étudiants qui se rendent en Angleterre, pays où les étudiants partaient traditionnellement pour les études supérieures. L’intérêt des étudiants pour faire leurs études en Allemagne et en France fait accroître l’intérêt, et par conséquent l’apprentissage, pour les langues française et allemande, plus particulièrement pour les niveaux avancés (B1, B2, C1, C2) qui sont indispensables pour entrer aux universités françaises et allemandes. De plus en plus de jeunes, âgés de 18 à 25 ans, immigrent vers ces pays pour leur carrière professionnelle. Le développement du statut de cette langue dans le système éducatif chypriote est revendiqué par les enseignants d’allemand. 

  • Les approches plurielles et le FLE dans un contexte linguistique complexe

L’approche plurielle peut être définie comme une démarche pédagogique dans laquelle l’apprenant travaille simultanément sur plusieurs langues. […] A l’inverse, une approche singulière sera une approche dans laquelle le seul objet est une langue ou une culture particulière, prise isolément. (Candelier M., 2003). Il s’agit alors d’une méthode d’enseignement linguistique qui consiste à étudier plusieurs langues dans un même cursus. La situation actuelle du Chypre. Aujourd’hui, presque tous les domaines en Chypre requièrent un plurilinguisme. De ce fait, la mise en place d’une approche plurielle peut s’avérer efficace afin de mieux atteindre l’objectif d’avoir une population plurilingue.

Le français occupe actuellement la deuxième place en tant que langue étrangère étudiée en Chypre mais il reste que cette langue est considérée par les chypriotes comme difficile à apprendre si bien que les élèves préfèrent apprendre une nouvelle langue et surtout l’italien au lycée ou encore à l’université.

 Etant donné que le français est la deuxième langue étrangère obligatoire dans le système éducatif, il est intéressant de voir si la mise en œuvre d’une approche plurielle et notamment de l’intercompréhension dans la méthode pédagogique peut contribuer à l’amélioration de son acquisition et à la volonté d’apprendre des nouvelles langues envisagées au lycée ou à l’université.

  • La place du français dans le contexte sociolinguistique de Chypre

Malgré le fait que le français soit considéré comme la deuxième langue étrangère enseignée et parlée en Chypre, et que la présence du français en Chypre date de très longtemps (à partir du XIIè siècle), il est observé actuellement que le FLE a perdu sa place dans la société chypriote. Le FLE est considéré par les chypriotes comme difficile à acquérir. Par conséquent, l’écart entre l’acquisition de la première langue étrangère et la seconde dans la société chypriote reste large. Cette situation s’observe aussi dans les choix des élèves aux cours du secondaire : nombreux sont ceux qui délaissent le français et choisissent une autre langue étrangère en plus de l’anglais. Le français est toujours obligatoire avec l’anglais au lycée, mais c’est à partir de 2001, qu’une reforme linguistique a été mise en œuvre, laissant le choix entre une gamme de langues aux étudiants. Les élèves doivent choisir deux langues entre l’anglais, le français et d’autres langues européennes comme l’allemand, l’italien, le russe ou l’espagnol. Le choix des élèves s’oriente de plus en plus vers l’italien et l’espagnol. Cette modification n’a pas eu de conséquences  sur l’enseignement de l’anglais, mais c’est surtout sur l’appropriation du français par les chypriotes que l’effet s’est manifestement constaté.

En dépit de la difficulté de l’appropriation du FLE par les chypriotes, la présence et la nécessité de la langue française dans le contexte linguistique en Chypre reste quand même prépondérante. Le gouvernement en est conscient surtout après l’intégration du pays dans l’Union Européenne en 2004. Les politiques linguistiques européennes ont été orientées vers le développement du plurilinguisme dans chaque pays et dans la région. Il importe surtout de mettre en valeur et de développer l’aptitude des citoyens à apprendre et à utiliser plusieurs langues pour que chaque citoyen européen puisse participer activement à la vie politique européenne dans le cadre de la mise en œuvre de la démocratie et vu que l’éducation à la citoyenneté démocratique est devenue une priorité du Conseil de l’Europe et des Etats membres. Or, il est constaté que la France et l’Allemagne jouent un grand rôle dans la prise des décisions européennes ce qui implique que le français reste une langue que les citoyens de chaque pays membres devraient maîtriser y compris Chypre qui a adhéré l’organisation de la Francophonie en 2006. Il est aussi à noter que les décisions européennes se placent en Belgique qui est généralement un pays francophone. L’inauguration de l’école franco-chypriote en 2012 s’inscrit dans la volonté des gouvernements français et chypriotes de promouvoir les langues et les cultures de deux pays et  « porter des valeurs de tolérance, humanisme,  égalité de chances, curiosité intellectuelle, intercompréhension, capacité de vivre ensemble ». De cette façon, on peut constater une évolution du statut de la langue française dans le contexte pédagogique de Chypre, pays membre de la Francophonie depuis 2006. 

  • Les approches plurielles dans ce contexte sociolinguistique complexe

Face à la situation sociolinguistique à laquelle se trouve Chypre, mettre en œuvre une démarche pédagogique dans laquelle l’apprenant travaille simultanément sur plusieurs langues se place comme une alternative apte de familiariser la population avec les différentes langues présentes sur le territoire. En effet, le multilinguisme ou la présence de plusieurs langues dans la zone géographique chypriote peut être développé et orienté à la sensibilisation ou même l’appropriation de plusieurs langues par les citoyens. Il implique alors dans ce cadre l’apprentissage simultanée de ces langues. Il s’agit d’exploiter le bagage linguistique d’une personne afin d’établir des ponts qui permettront la compréhension même partielle d’une autre langue, ou autrement dit le développement des compétences partielles vu leur importance au niveau international et leur présence dans la vie quotidienne des chypriotes, le français, l’allemand, et les autres langues européennes dans le cadre de l’intégration européenne et aussi du fait de la situation géographique du pays. 

Mais la mise en œuvre d’une approche plurielle nécessite certaines conditions. Il est par exemple nécessaire de voir l’intercompréhension entre les langues à apprendre et à enseigner simultanément. L’intercompréhension entre les langues implique que les langues enseignées simultanément appartiennent à la même famille. 

La situation sociolinguistique chypriote s’avère alors être complexe notamment en raison de l’existence de plusieurs langues sur le territoire, qui s’explique par ses origines, les contextes politiques que le pays a traversés au cours de son histoire, par sa situation géographique et aussi par son intégration dans l’Union Européenne. Face à cette situation, développer le plurilinguisme de sa population se place comme une alternative positive pour le pays, et surtout qu’une bonne politique linguistique est aussi véhiculée dans le cadre de l’intégration régionale en Europe. Les approches plurielles se présentent comme une méthode pour en faire la conceptualisation avec le développement du FLE dans cette méthode en raison des places que cette langue tienne dans le pays.

  • Conceptualisation de la didactique du plurilinguisme et du FLE dans le contexte pédagogique de Chypre

Il est nécessaire de présenter le plurilinguisme en tant qu’approche pédagogique afin de voir si la mise en place d’une telle approche dans le contexte pédagogique de Chypre peut contribuer à l’acquisition du FLE et des langues étrangères en général. 

  • Les différentes approches en matière de didactique du plurilinguisme

L’approche plurielle concerne la didactique intégrée, l’interculturel, de l’intercompréhension entre langues (parentes) et de l’éveil aux langues. 

  • La Didactique Intégrée

La didactique intégrée consiste à l’établissement de liens entre un nombre limité de langues (et de cultures), celles dont on vise l’apprentissage dans un cursus scolaire classique, ou même dans un cursus visant pour les quelques langues enseignées des compétences différentes. L’objectif est d’utiliser la langue maternelle comme appui pour faciliter l’accès à une première langue étrangère, puis sur ces deux langues pour faciliter l’accès à une seconde langue étrangère, etc. Le but reste, pour l’essentiel, le développement de compétences communicatives, langagières et culturelles, pour chacune des langues et des cultures du cursus. Prendre appui sur la langue maternelle pour faciliter l’accès à une autre langue étrangère est en effet une méthode qui a déjà fait l’objet d’une histoire plein de rebondissement selon Castelotti.

A partir de la fin des années 50, les principes dominantes dans l’enseignement linguistiques étaient en premier lieu la considération que la langue est avant tout « un ensemble acoustico-visuel » et « que la prononciation est l’élément essentiel de l’enseignement/apprentissage d’une langue étrangère ». Il en est sorti que le recours à la langue première ou langue maternelle n’est donc pas nécessaire et serait même un élément perturbateur, susceptible de gêner et même d’empêcher l’accès à la langue étrangère. Ce n’est qu’à partir des années 80 que ces points de vue ont été remis en cause et que les orientations méthodologiques dans l’enseignement des langues étrangères commencent à faire évoluer la place de la langue maternelle dans l’apprentissage des langues étrangères. (Castelotti, 2001).

  • L’intercompréhension entre langues

L’intercompréhension entre langues est le travail parallèle sur plusieurs langues d’une même famille, qu’il s’agisse de la famille à laquelle appartient la langue maternelle de l’apprenant (ou la langue de l’école) ou de la famille d’une langue dont il a effectué l’apprentissage. Il est question ici d’un premier pas vers plus encore de pluralité. Le nombre de langues que l’on prend en considération est augmenté, en acceptant parallèlement de se limiter à certaines compétences. On tire parti des atouts les plus tangibles de l’appartenance à une même famille – ceux relatifs à la compréhension – qu’on cherche à cultiver systématiquement. La visée principale reste communicative, mais il est clair que d’autres aptitudes sont développées de façon plus intense que dans le cas précédent. Entre autres : des aptitudes métalinguistiques générales, la capacité même à s’appuyer explicitement sur des connaissances dans une langue pour « passer » à une autre langue, la confiance en ses propres capacités d’apprentissage.

L’intercompréhension consiste alors à utiliser comme pont de passage une langue (généralement la langue maternelle) que l’on maîtrise pour passer à l’appropriation d’une autre langue (langue étrangère). Il s’agit par exemple de l’apprentissage des langues d’origine germanique en utilisant comme pont la langue française et le Grec. Ce cas est aussi lié à notre cadre d’étude et a même fait l’objet d’une expérience menée par Argyro Moustaki où le grec, le français et l’anglais constituent les vecteurs d’intercompréhension de la famille germanique, en expérimentant l’allemand et le néerlandais. (Argyro Moustaki, 2010).

  • L’approche interculturelle

L’approche interculturelle vise à observer, analyser et réguler toute interaction entre des individus appartenant à des cercles culturels différents. Les interlocuteurs peuvent communiquer dans une même langue. Cependant, des malentendus, de mauvaises interprétations peuvent se manifester au cours de la conversation, pouvant aboutir à l’instauration de préjugés (ou au renforcement des stéréotypes). 

L’idée fondamentale est de s’intéresser à ce qui se passe concrètement lors d’une interaction entre des interlocuteurs appartenant, au moins partiellement, à des communautés culturelles différentes, donc porteurs de schèmes culturels différents, même s’ils communiquent dans la même langue. Dans ce cadre, on opte pour une éthique personnelle et une déontologie professionnelle qui reconnaissent l’altérité, la différence, et qui l’intègrent dans les procédures d’enseignement, à la fois comme objet d’apprentissage et comme moyen de relation pédagogique. (Blanchet, 2004).

  • L’Eveil aux langues

Il y a éveil aux langues lorsqu’une part des activités porte sur des langues que l’école n’a pas l’ambition d’enseigner (qui peuvent être ou non des langues maternelles de certains élèves). Mais l’approche « éveil aux langues » n’indique pas seulement le travail sur ces langues car il devrait normalement être un travail global – le plus souvent comparatif, qui porte à la fois sur ces langues, sur la langue ou les langues de l’école et sur l’éventuelle langue étrangère (ou autre) apprise. Il est donc question ici et à l’évidence d’un pas supplémentaire vers la pluralité. Dans cette perspective, ne serait-ce qu’à cause du grand nombre de langues sur lesquelles l’élève travaille (en général, plusieurs dizaines), la construction de compétences de communication apparaît essentiellement comme une visée «en seconde instance ». Cela ne veut pas dire qu’elle est considérée comme secondaire, mais que l’on développe des compétences qui sont mises au service de l’acquisition de compétences de communication, dans quelque langue que ce soit.

 L’éveil aux langues peut être interprété analogiquement comme ce que le Cadre Européen Commun de Référence ou CECR appelle  la perspective d’une sorte d’éducation langagière générale, que l’on peut concevoir comme une préparation à l’apprentissage des langues, dont le lieu privilégié serait l’enseignement préscolaire et primaire. Cette préparation vise au développement de l’intérêt pour les langues et les cultures, de la curiosité à leur égard, de la confiance de l’apprenant en ses propres capacités d’apprentissage, des compétences à observer ou à analyser les langues, quelles qu’elles soient, de la capacité à s’appuyer sur la compréhension d’un phénomène relevant d’une langue pour mieux comprendre – par similitude ou contraste – un phénomène concernant une autre langue …

 L’approche éveil aux langues peut aussi être considéré comme un accompagnement des apprentissages linguistiques en cours, à l’école primaire et au–delà. Dans ce cas, la notion de visée « en seconde instance » n’a plus de dimension chronologique d’antériorité, et renvoie à un développement continu et parallèle des savoirs, aptitudes et attitudes nécessaires à la construction d’une compétence de communication. Développement auquel bien entendu, chaque apprentissage linguistique particulier va également contribuer. Avec l’éveil aux langues, on quitte donc (pour mieux y revenir) le terrain de l’enseignement/apprentissage d’une langue particulière et on entre, cette fois de plein pied, dans le domaine d’une éducation langagière globale. 

Le Guide pour l’élaboration des politiques éducatives en Europe fait particulièrement référence à l’éveil aux langues dans la notion d’éducation au plurilinguisme. Par-delà les aptitudes concernant l’écoute, l’analyse et l’apprentissage des langues, l’éveil aux langues ambitionne de favoriser le développement de représentations et attitudes positives non seulement des langues et de leur diversité, mais aussi des personnes qui parlent ces langues et de leurs cultures. Cela s’applique, bien entendu, tout particulièrement, aux langues et cultures des élèves alloglottes, migrants ou autochtones, qui sont ainsi reconnues par l’école. En fait, l’éveil aux langues, par-delà sa contribution aux apprentissages linguistiques, constitue une dimension de l’approche interculturelle, dans laquelle il s’inscrit pleinement, avec ses propres spécificités.

Le développement de la curiosité, de l’intérêt et de l’ouverture envers ce qui est autre devrait aussi contribuer à ce que le choix des langues que les élèves apprennent soit plus diversifié. Il s’agit aussi de développer une « culture langagière », des savoirs relatifs aux langues, en particulier d’ordre sociolinguistique. Ces savoirs constituent un ensemble de références aidant à la compréhension du monde dans lequel les élèves vivent et vivront.

Une telle approche didactique constitue aussi un moyen d’accès à des connaissances, savoir-faire et attitudes habituellement visés par d’autres disciplines non linguistiques : l’examen des lieux où sont parlées les langues que l’on rencontre mène à la géographie, la découverte des emprunts de langue à langue ou de la parenté entre langues renvoie à l’histoire, les écritures à la calligraphie et aux arts plastiques, la numération aux mathématiques, les proverbes à l’étude du milieu naturel. Sans oublier la part que prennent les attitudes d’ouverture dans l’éducation à la citoyenneté.

La finalité de l’approche éveil aux langues est de contribuer à la construction de sociétés solidaires, linguistiquement et culturellement c’est-à-dire concilier diversité et solidarité. Entre autre, les buts de l’éveil aux langues sont : 

– Le développement de représentation et attitudes positives qui implique l’ouverture à la diversité linguistique et culturelle et la motivation pour l’apprentissage de langues. Cette culture linguistique constitue un ensemble de références aidant à la compréhension du monde multilingue et multiculturel dans lequel l’élève est amené à vivre.

– Le développement d’aptitudes d’ordre métalinguistique et métacommunicatif (capacités d’observation et de raisonnement) et cognitif facilitant l’accès à la maitrise des langues, y compris à celle de la  ou des langues de l’école ou langue d’enseignement.

Ces buts et cette finalité a été celle qui a été formulés par le programme européen Evlang

La didactique du plurilinguisme reflète les besoins sociolinguistiques actuels. Les chypriotes en tant que citoyens de l’Union européenne et par nature polyglottes pourraient adopter cette méthode afin d’enrichir leurs connaissances linguistiques et découvrir des nouvelles langues.

  • Les effets du plurilinguisme sur l’apprentissage linguistique

La mise en œuvre du CECR

Depuis sa création en 2001, le CECR, fruit d’un long travail des experts et des linguistes, repose sur une perspective actionnelle de l’apprentissage et de l’emploi des langues. La Recommandation du Conseil de l’Europe sur l’utilisation du Cadre Européen Commun de Référence pour les langues (CECR) et la nécessité d’adopter le plurilinguisme a été publié en 2008. Elle invite les États membres à mettre en œuvre le CECR dans leur système éducatif et à promouvoir le plurilinguisme. La mise en œuvre de la CECR se ramène donc à l’idée du plurilinguisme.

C’est à travers la mise en œuvre de cette recommandation qu’on va donc analyser dans un point de vue général les effets du plurilinguisme sur l’apprentissage linguistique. A partir des observations auprès de quelques pays européens, il a été montré que des modèles communs ainsi que des différences dans la relation entre le degré de mise en œuvre du CECR et les niveaux de compétences en langue vivante étrangère ou LVE existent.

 

Le tableau ci-après montre la relation entre la mise en œuvre du CECR et des niveaux de compétence linguistique.

 

Pays Degré de mise en œuvre du CECR Niveau de compétences en langue étrangère
Autriche ++ Haut niveau
France + Niveau moyen
Pays-Bas + –  Très haut niveau
Hongrie + – Niveau moyen
Suède  Très haut niveau
UK (Ecosse) – – Bas niveau

Source : Parlement européen, 2013

Pour faire le lien avec le cas du Chypre, nous pouvons citer le cas de l’Autriche et de l’Ecosse. L’Autriche a un haut degré de mise en œuvre du Cadre de référence et possède de hauts niveaux de compétences en langues vivantes étrangères. L’Écosse, d’autre part, a un bas niveau de mise en œuvre du CECR et est considéré comme ayant un bas niveau de compétences en langues étrangères. Ici, on peut avancer que la mise en œuvre du CECR et l’orientation vers l’objectif du plurilinguisme ont des effets positifs sur l’appropriation du FLE et des langues étrangères. On peut atteindre le plurilinguisme en adoptant le CECR car celui-ci facilite le passage d’une langue à une autre. D’ailleurs, le niveau de compétences écrites ou orales pour une langue donnée est décrit dans le CECR (niveau A1, A2 etc.). La situation est mitigée lorsqu’il s’agit de pays dont le degré de mise en œuvre du CECR est moyen (de + à -). Aucun rapport clair n’apparaît entre le degré de mise en œuvre du Cadre de référence et les niveaux de compétences en LVE: la France, par exemple, a un degré élevé de mise en œuvre (+) mais un niveau de compétences moyen, alors que la Suède a un faible degré de mise en œuvre (-) mais un très haut niveau de compétences en LVE. 

Par conséquent, d’autres facteurs que le niveau de mise en œuvre du CECR influencent les niveaux de compétences en langues vivantes étrangères, tels que les us et coutumes en matière de langues et l’importance de l’utilisation de la langue. En général, dans les pays où la langue officielle est utilisée à grande échelle à l’étranger (anglais, français), la nécessité d’apprendre une autre langue est moindre que dans des pays où la langue du pays est moins universellement employée (néerlandais, suédois,). Toutefois, les situations de l’Autriche et de la Hongrie sont légèrement différentes car l’Autriche a un haut niveau de compétences en LVE et sa langue nationale, l’allemand, est très utilisée, alors que la Hongrie a un niveau moyen de compétences en LVE et que le hongrois n’est pas utilisé à grande échelle. Cela peut être dû au fait que le paysage linguistique en Hongrie soit plus large que celui dans les autres pays. 

D’un point de vue global, la mise en œuvre du CECR et des approches plurielles peut avoir des effets sur l’appropriation des autres langues, mais cela dépend aussi d’autres facteurs comme les us et les coutumes en matière linguistique et l’importance de l’utilisation de la langue officielle du pays par d’autres pays. 

Mais voyons maintenant dans un cadre plus intégré ces effets du plurilinguisme sur l’apprentissage linguistique en analysant les approches proposées.

  • L’intégration des approches plurielles dans la démarche pédagogique

Selon le CECR, une compétence plurilingue diffère de la compétence que l’on peut avoir dans différentes langues, ce qui a des conséquences en matière d’apprentissage des langues et d’objectifs d’enseignement. Les composantes langagières individuelles de la compétence plurilingue ne sont pas au même niveau et sont différenciées selon l’expérience de l’apprenant et dans une relation instable au fur et à mesure que cette expérience change. Cependant, elles sont toutes disponibles et un utilisateur peut changer de langue quand la situation change (à condition que l’interlocuteur soit également plurilingue). L’interaction des composantes langagières différenciées chez l’utilisateur plurilingue favorise le développement de la conscience culturelle et langagière. La compétence plurilingue et pluriculturelle ne consiste pas en « une collection de compétences à communiquer distinctes et séparées suivant les langues », mais bien en une « compétence plurilingue et pluriculturelle qui englobe l’ensemble du répertoire langagier à disposition ».

Les approches plurielles apparaissent bien nécessaires pour tout projet qui s’inscrit dans la perspective de la compétence linguistique et culturelle prônée par le cadre européen. En effet ce cadre propose de retenir « le caractère pédagogique qui invite à articuler les enseignements de langues les uns aux autres, en ce qu’ils sont susceptibles de mettre en jeu des compétences communes ». Il semble qu’il est impossible de parvenir à articuler les enseignements de langues les uns aux autres si on ne propose pas des activités d’intercompréhension ou de l’éveil aux langues par exemple impliquant le travail sur à la fois plusieurs variétés linguistiques et culturelles.

  • L’Intercompréhension entre les principales langues du terrain

Nous allons tenir compte de toutes les langues parlées dans le pays comme principales langues de terrain: le grec, l’anglais, et le français, ces derniers en tant que langue officielle la plus parlée des deux, et première et seconde langues étrangères. L’idée d’intercompréhension renvoie tout de suite à l’idée de l’apprentissage ou de l’enseignement de langues appartenant à la même famille. 

Les langues sont reliées entre elles par des relations de diverses ordres – parenté généalogique : exemple le français et l’italien qui ont des origines latines ; l’allemand, le suisse allemand, et le Norvégien qui sont issus du vieil haut allemand, les relations d’emprunt – qui sous-tendent des ressemblances et fondent des stratégies d’intercompréhension. D’un point de vue plus pragmatique, l’intercompréhension constitue l’accès à la compréhension d’article de journaux rédigés dans langue étrangère sans parler cette langue. Il s’agit ici alors de voir des relations qui existent entre le grec, l’anglais et le français. 

Le grec moderne est une langue indo-européenne mais génétiquement isolée au sein des langues de l’Union Européenne, car elle n’appartient ni à la famille des langues romanes ni des langues germaniques ou à d’autres familles où l’intercompréhension entre langues est plus facile. En effet, selon Argyro Moustaki, un Grec a toujours une première réaction négative quand il entend parler de l’intercompréhension. Cet auteur précise qu’il est compréhensible que les Grecs aient cette réaction quand il s’agit par exemple des langues germaniques ou romanes, mais que cela n’est pas évident pour le grec. A la caractéristique de l’isolement linguistique viennent s’ajouter des opinions communément répandues classant le grec parmi les langues « difficiles »  à apprendre, alors que l’italien, par exemple, serait une langue « facile ». (Moustaki, 2010).

En examinant les possibilités de l’intercompréhension pour la langue grecque, on se rend compte tout d’abord d’une dissymétrie, vu que l’intercompréhension est un processus à double sens : le grec langue-cible pour des locuteurs alloglottes ou le grec langue de départ, c’est-à-dire langue maternelle d’un individu voulant participer à une expérience d’intercompréhension mais l’intercompréhension sera beaucoup moins problématique, pour la simple raison qu’un très grand nombre de Grecs, surtout de jeunes scolarises les deux dernières décennies, apprennent au moins une langue étrangère, principalement l’anglais. Ainsi, un Grec pourra partager les bienfaits de l’intercompréhension à un deuxième niveau, c’est-à-dire au moyen de la ou les langue(s) étrangère(s) qu’il apprend, notamment l’anglais et le français, qui lui serviront de passerelle vers d’autres langues s’inscrivant dans le même réseau génétique,  comme l’allemand et les langues germaniques par exemple. Evidemment, il s’agit ici des possibilités d’exploitation de cette intercompréhension, directement liées à la conception des cours et aux buts visés par l’apprentissage des langues. 

La première question que l’on doit se poser, en préparant un cours d’initiation ou encore une analyse de l’intercompréhension entre le grec et d’autres langues, concerne tout d’abord la langue maternelle du « locuteur 2 », ainsi que les autres langues éventuellement qu’il connait. En effet, le degré d’efficacité lors d’une expérience d’intercompréhension sera différent en fonction des langues déjà connues par le locuteur-2, puisque les éléments linguistiques facilitant la compréhension d’une langue, du grec en l’occurrence (emprunts, similarités de forme de certains affixes, etc.), seront différents pour le locuteur du français ou de l’anglais. 

Ce qui explique aussi alors, à part le fait que beaucoup de jeunes chypriotes maîtrisent l’anglais et le français, la possibilité et la facilité d’intercompréhension entre le grec, le français et l’anglais. En effet, il est à noter que par ailleurs, que si le grec ne fait pas partie d’une des trois grandes familles linguistiques de l’Europe, il appartient pour autant à la grande famille indoeuropéenne et donc, en tout état de cause, n’est pas une langue absolument isolée, pas plus que n’importe quelle langue, et en plus au cours de son histoire il a eu des rapports privilégiés avec certaines langues, à savoir le latin, l’italien, le français et l’anglais. Le latin constitue une simplification du grec ancien. Dans l’Antiquité, le grec ancien constituait une langue universelle que tout le monde parlait. Puis, le latin s’utilise en Europe, d’où viennent les langues latines : français, espagnol, italien, roumain, portugais. La grande majorité des termes scientifiques viennent du grec, c’est pourquoi le grec est considéré comme la langue des sciences. L’histoire des langues au cours des siècles (provenant toutes de la famille indoeuropéenne) montre pourquoi il y a des similitudes (transparences) lexicales et grammaticales entre les langues, toutes les langues. C’est pourquoi une italien comprend un français etc.

Un avantage essentiel de la communication par l’intercompréhension tient au fait que les interlocuteurs sont sur un pied d’égalité. En conséquence, ils doivent apprendre à se considérer et à se traiter mutuellement comme des partenaires, et ils doivent adopter les comportements  et acquérir des compétences nécessaires à cette forme de communication, à savoir le respect et la tolérance et la coopération. L’intercompréhension s’appuie  sur un fondement psychologique très solide : l’interaction entre les facultés linguistiques de l’homme  et sa capacité d’exploiter les connaissances acquises.

Chypre dispose de très grands atouts pour développer l’intercompréhension. Si nous avons exposé l’intercompréhension entre le grec, le français et l’anglais, c’est parce que les chypriotes peuvent aussi développer l’intercompréhension avec les familles de langues européennes des pays situés à proximité avec les langues du territoire, officielles ou minoritaires.

Des études typologiques ont bien démontré que les langues avoisinantes n’appartenant pas à la même famille linguistique présentent très souvent des similitudes importantes. C’est le cas du grec et du français, du français et de l’allemand… etc. Ce sont les politiques linguistiques, ainsi que les habitudes dominantes sur l’apprentissage des langues étrangères, qui, en favorisant les langues « à grand rayonnement », agissent au détriment des langues minoritaire. Cela a eu comme résultat l’ignorance et la méconnaissance par le grand public des possibilités d’intercompréhension dans cette aire géographique. Ces possibilités restent en attente d’une étude approfondie et peuvent être mises au profit du plurilinguisme chypriote.

  • L’adoption des approches plurielles lors de l’enseignement/apprentissage du FLE 

Comme nous avons évoqué dans la section I.C.1, la langue française tient une place assez importante dans la société chypriote pour de multiples raisons toujours évoqué dans cette sous-section. Il s’avère alors intéressant de voir comment l’apprentissage et l’enseignement du FLE se déroule dans le pays et de le comparer avec celui des autres langues sur le terrain.

  • La démarche pédagogique d’enseignement/apprentissage du FLE à Chypre et son développement au sein d’une société plurilingue

Jusqu’alors, les enseignants chypriotes se sont toujours adaptés aux tendances de la didactique du FLE. Depuis les années 90 jusqu’en 2000, c’est l’approche communicative qui a été la plus utilisée en Europe, et aussi à Chypre. Mais actuellement, les enseignants chypriotes  essaient de suivre les directives du CECR ainsi que l’approche actionnelle relative aux recommandations du ministère de l’éducation et de la culture. Cependant, il faut admettre que chaque enseignant a ses propres pratiques d’enseignement.

Les différentes approches didactiques ont évolué à Chypre. Au fur et à mesure, diverses approches sont utilisées, notamment l’approche communicative, l’approche audiovisuelle, l’approche actionnelle et l’approche par compétences. Au Chypre, les enseignants les appliquent plus ou moins. L’application est plus importante dans les instituts de langues, dans les alliances et les écoles privées. Dans les écoles publiques, où le nombre d’élèves est très élevé, il n’est pas toujours facile de concilier les quatre compétences écrites et surtout orales.

Les niveaux d’enseignement du FLE dans les écoles secondaires  publiques en Chypre ne sont pas encore bien définis à ce que les élèves atteignent tel ou tel niveau sauf pour les enseignements privées, notamment dans les Instituts de Langues, l’Institut Français ou les Alliances Françaises. C’est peut-être parce que les élèves ne passent aucun examen de fin d’année ni le DELF. Mais pour les trois classes du collège où le FLE est obligatoire (deux périodes par semaine de 45 minutes chacune) on utilise la méthode Pixel 1, 2, 3 respectivement, de la maison Clé International. Pour la première année du lycée où le FLE est aussi obligatoire, on utilise la méthode Soda 1, de Clé, et au bout de ces quatre années on atteint le niveau A2, selon les Nouveaux Programmes Analytiques de français pour l’année scolaire 2013-14.

A partir de l’enseignement supérieur, les démarches pédagogiques d’enseignement peuvent varier. Le Centre de Langues de l’Université de Chypre propose des cours des langues (anglais, français, italien, espagnol, allemand, turc, russe) à tous les étudiants de l’université sur la base des cours optionnels ou obligatoires selon la filière et le niveau d’études des étudiants. Pour ce qui est du FLE, la section de français utilise la méthode Alter Ego plus, éditions Hachette, depuis septembre 2012 qui adopte l’approche actionnelle ; les cours de FLE sont assurés deux fois par semaine et ont une durée de 3h par semaine (1h30 x2 fois par semaine). Les enseignants sont censés faire un cours basé sur l’accomplissement des tâches (perspective actionnelle)  mais ils ont la liberté de concevoir le cours à leur gré.

L’enseignement universitaire est assuré par le Département d’Études Françaises et de Langues Vivantes de l’Université de Chypre qui offre une formation sous-graduée sanctionnée par le Diplôme en Études françaises niveau Master 1 et une formation post-graduée sanctionnée par le Master en Études françaises niveau Master 2. Au niveau sous-gradué, les cours, d’une durée de quatre ans, permettent aux étudiants d’acquérir et de renforcer leurs connaissances dans les domaines de la culture, de la linguistique et de la littérature françaises et de commencer à se spécialiser dans l’une de ces branches. Au niveau Master les cours visent à l’approfondissement des connaissances dans des domaines choisis au sein de ces orientations et préparent à l’exécution d’un projet de recherche. La formation répond non seulement aux besoins du savoir universitaire mais vise aussi à se conformer aux exigences des nouvelles réalités européennes. Le programme d’enseignement s’étend généralement sur trois semestres pendant lesquels les étudiants sont tenus en principe d’être présents à l’Université de Chypre. Les cours sont de type séminaire. Le contenu des cours dispensés pendant un même semestre ou une même année est, dans la mesure du possible, organisé autour d’une thématique centrale afin de garantir la cohérence des enseignements offerts, de permettre un approfondissement plus effectif des connaissances et de promouvoir la participation active au débat scientifique.

La démarche pédagogique peut aussi s’orienter vers des programmes de coopération établis avec d’autres universités dans le cadre de l’enseignement du FLE. Il en est ainsi du projet de télécollaboration Le français en (première) ligne, un projet que l’Université de Chypre a établi avec l’Université Stendhal – Grenoble 3, donc une coopération franco-chypriote pour l’année 2012 – 2013. 

Le projet en question a débuté en 2012 dans le but de faire communiquer en ligne des étudiants en master de FLE en France avec des étudiants étrangers distants qui fréquentent des cours de français à l’université. 

Le programme de coopération montre que la démarche pédagogique d’enseignement du FLE peut s’adapter à toute forme de méthode pédagogique qui peut se faire en plusieurs façons et manières. Cela concerne est valable pour les approches plurielles aussi. On peut les adopter pour l’enseignement du FLE à Chypre, étant donné que les chypriotes maitrisent plusieurs langues. 

  • Comparaison entre l’enseignement du FLE et des autres langues enseignés sur le terrain 

Le programme européen a toujours prôné l’enseignement des langues étrangères. L’objectif est de faire progresser la compétence en langue étrangère et préparer les jeunes à leur vie de citoyen européen en leur donnant les outils nécessaires à la communication. En plus de son importance dans la vie européenne, l’anglais occupe aussi une place importante pour les chypriotes. En effet, en plus d’être une ancienne colonie anglaise, la langue anglaise est présente quotidiennement dans la vie des chypriotes ainsi que dans ses relations internationales. Comme l’anglais est très utilisé dans l’enseignement au Chypre, il en résulte que la majorité des chypriotes parlent l’anglais. Sa présence dans la vie quotidienne chypriote facilite l’accès à cette langue.

Face à l’enseignement de cette langue, la pédagogie de la langue française manque de cette pratique quotidienne. De plus l’enseignement du FLE dans le programme pédagogique chypriote est devenu un choix dans les classes secondaires (2e et 3e année du lycée) et depuis quelques années il constitue une matière optionnelle dans les classes primaires. Ce qui implique que, malgré les méthodes pédagogiques scolaires et universitaires mises en place pour l’appropriation du FLE par les chypriotes, l’enseignement de l’anglais devance largement l’enseignement du français. L’anglais aussi s’aligne aux prescriptions du CECR mais on atteint un niveau plus élevé que le français (niveau B1) à cause de son statut de langue seconde, sa forte présence sur le territoire et le nombre d’heures d’enseignement de l’anglais qui commence dès l’école primaire.

En ce qui concerne les autres langues vivantes étrangères comme l’allemand, l’espagnol, ou encore l’italien… leur enseignement par rapport à l’enseignement du français sur le territoire chypriote est un peu délaissé par les chypriotes dans les instituts des langues en tant qu’activité extrascolaire /en dehors du cadre scolaire, sauf au niveau de l’enseignement secondaire où ces langues font partie des choix de langue étrangère au même titre que le français et où le choix des élèves s’orientent plutôt vers l’enseignement et l’apprentissage de l’italien et de l’espagnol. 

Mais il  a été observé qu’à partir de l’intégration de Chypre dans l’Union Européenne en 2004, le français et l’allemand devraient entrer de plus en plus dans la vie quotidienne des chypriotes en tant que citoyens européens. Ce qui implique que le français et l’allemand devraient gagner de l’importance au  même titre que l’anglais dans la vie des chypriotes. 

Seules les approches plurielles se présentent comme la démarche pédagogique qui pourra satisfaire à ces besoins plurilinguistiques. En effet, il est important d’avoir un premier contact avec la langue en question en adoptant la didactique intégrée, ou à travers les activités d’intercompréhension et même d’éveil aux langues. C’est pour cette raison qu’il est envisageable d’adopter cette méthode pour l’apprentissage du FLE et pour une initiation à d’autres langues étrangères compte tenu des besoins linguistiques des apprenants ou du contexte pédagogique ou encore selon les objectifs fixés par les enseignants. 

  • Evaluation empirique des approches plurielles lors de l’enseignement/apprentissage du FLE à Chypre 

  • La mise en œuvre des approches plurielles lors de l’enseignement du français : présentation des données empiriques 

Dans cette section, nous allons présenter des recherches pragmatiques sur la mise en œuvre des approches plurielles dans les enseignements linguistiques notamment dans l’enseignement du FLE. Nous allons nous baser sur les données empiriques.

1. Informations concernant les élèves

L’échantillon est constitué de neuf élèves appartenant à des tranches d’âge différentes. Les répondants sont des deux sexes.

Figure 1 : Répartition selon la tranche d’âge

Cette figure 1 nous montre que la majorité des répondants appartiennent à la tranche d’âge 13-15 ans. Cela nous permet de dire que ces élèves sont scolarisés au collège et/ou au lycée.

Figure 2 : Répartition selon le sexe

Cette figure 2 nous montre que 78% des élèves interrogés sont des filles. Cela pourrait avoir un impact sur les réponses obtenues dans les questions suivantes. En effet, d’une manière générale, les filles semblent plus intéressées par l’apprentissage de langues que les garçons.

Figure 3 : Répartition selon la langue maternelle du répondant

D’après cette figure 3, tous les élèves ont comme langue maternelle le grec. Cela pourrait influer sur leur motivation à apprendre le français.

  • Autres langues parlées par les élèves

Parmi les élèves interrogés, 8 ont annoncé parler le français, ce qui représente près de 89%. Tous les élèves ont mentionné parler anglais, soit 100% des répondants. Cela nous permet de dire que l’anglais prend encore une avance par rapport au français bien que ce dernier ait déjà sa place. Par ailleurs, seul un élève sur les 9 interrogés parle russe, soit 11,1%. Toutefois, les langues parlées par les élèves ont toutes la même origine, ce qui en facilite l’apprentissage. Il serait intéressant de préciser que nombreux sont les élèves qui parlent français, en raison des fortes ressemblances de cette langue au grec.

  • Autres langues connues par les élèves

Deux élèves parmi les 9 interrogés ont avoué connaitre la langue espagnole, soit 22,2%. Deux élèves connaissent l’italien. Un élève dit connaitre la langue tchèque et un élève connait la langue roumaine. Ces réponses nous permettent de dire que le contexte linguistique au Chypre est très vaste. La disparité des langues peut être un facteur-limitant la pratique de la langue française. Toutefois, les réponses données par les étudiants mettent bien en évidence le multilinguisme en Chypre.

  • Utilisation d’une autre langue lors du cours de français

Tous les élèves interrogés ont répondu qu’ils aimeraient utiliser leur langue maternelle lors du cours de français, ou encore une autre langue qu’ils connaissent. Cela nous permet de tirer deux conclusions. D’une part, l’apprentissage du français est encore sujet à difficultés pour de nombreux élèves. D’autre part, les élèves seraient davantage motivés à apprendre le français si les enseignants utilisaient leur langue maternelle pour que les connaissances puissent être rapidement transmises. Les réponses recueillies nous permettent de dire que les élèves semblent motivés à apprendre le français car ils souhaitent tout mettre en œuvre pour que l’apprentissage soit plus facile.

  • Comparaison entre les langues connues par les élèves

Interrogés s’ils font une comparaison pendant les cours de français avec d’autres langues qu’ils connaissent, tous les élèves ont répondu par l’affirmatif. 5 élèves ont avoué faire ainsi quelquefois, un élève le fait souvent et trois élèves le font très souvent. Cela nous permet de conclure que l’utilisation du français n’est pas encore très élevée. Pour l’apprendre, les élèves ont encore recours à d’autres langues. Cela témoigne encore de la motivation des élèves à apprendre le français car ils cherchent à utiliser d’autres moyens pour mieux comprendre et utiliser la langue française.

  • Avis des élèves sur la langue utilisée pendant les cours de français

L’avis des élèves sur la langue utilisée pendant les cours de français était interrogé. En effet, on souhaitait savoir s’ils pensent que les cours devraient se faire uniquement en français. Trois élèves ont nié tandis que six pensent qu’il serait mieux de faire entièrement les cours de français en utilisant la langue française. Cela nous laisse prétendre que l’apprentissage du français n’est pas facile  pour les élèves. Cependant, ils semblent motivés à apprendre cette langue.

  • Avis sur l’association du français avec une autre langue pour l’enseignement du FLE

Un seul élève pendent que l’enseignant du FLE devrait utiliser uniquement le français. Cinq élèves pensent qu’il serait mieux que l’enseignant parle en français et en grec tandis que huit élèves pensent qu’il faudrait travailler sur les ressemblances et les différences entre les langues. De par ces résultats, il semblerait que la motivation des élèves pour apprendre le FLE se base sur leur désir de voir en quoi les langues se ressemblent ou se diffèrent-elles.

Par ailleurs, tous les élèves pensent que le fait d’être polyglotte facilite l’apprentissage du français. Cela reflète encore la situation du Chypre, plus précisément son multilinguisme. Les élèves seraient alors plus motivés à apprendre le français dans le cas où une autre langue qu’ils connaissent mieux serait utilisé.

  • Commentaires et autres remarques des élèves

Certains élèves trouvent que le français est difficile mais qu’ils sont quand même motivés à apprendre la langue, d’autant plus qu’il s’agit d’une belle langue de culture. D’autres élèves trouvent que l’apprentissage du français est relativement plus facile que celui de l’anglais, compte tenu des ressemblances au grec. Tous les élèves interrogés semblent motivés à apprendre le français malgré les difficultés qu’ils peuvent rencontrer. Ils pensent par ailleurs que l’apprentissage du français permettrait de mieux apprendre d’autres langues d’origine latine telles que le roumain ou l’italien.

2. Informations concernant les enseignants

D’abord, il serait nécessaire de préciser que l’échantillon est constitué de 13 enseignants. Ces derniers font partie de diverses classes d’âge. Par ailleurs, il y a des hommes et des femmes.

 

Figure 4 : Répartition des enseignants selon l’âge

La figure 4 nous montre que presque la moitié des enseignants interrogés appartiennent à la classe d’âge 33-43 ans. Nous pouvons alors prétendre qu’ils ont déjà acquis une certaine expérience en enseignement, ce qui nous donnerait des réponses fiables et reflétant plus ou moins la réalité.

Figure 5 : Répartition des enseignants selon le sexe

Cette figure 5 nous permet de lire que la majorité des enseignants interrogés sont des femmes. Cela pourrait laisser penser que le métier d’enseignant attire plus les femmes que les hommes, plus particulièrement l’apprentissage du FLE.

Figure 6 : Répartition des enseignants selon leur langue maternelle

La figure 6 nous renseigne sur la langue maternelle des enseignants interrogés. Nous pouvons lire à travers cette figure que la grande majorité a pour langue maternelle le grec. Cependant, il y a aussi des enseignants dont la langue maternelle est le français. Cela rejoint ce que nous avons déjà vu auparavant, c’est-à-dire que les enseignants de FLE sont en nombre insuffisant et qu’on a souvent recours aux enseignants des pays proches du Chypre.

Figure 7 : Langue parlée par les enseignants

La figure 7 nous permet de constater que tous les enseignants interrogés parlent l’anglais, sans doute pour la raison que cette langue reste la langue étrangère la plus parlée au pays, ayant probablement une origine historique. 11 enseignants parlent le français. Cela nous laisse penser que le français attire de nombreux enseignants.

Figure 8 : Langue connue par les enseignants

Interrogés sur les autres langues qu’ils connaissent, les enseignants ont donné des réponses qui méritent d’être étudiées de plus près. A travers les résultats du questionnaire, nous pouvons lire que les langues les plus connues par les enseignants sont l’espagnol (surtout), l’italien et le grec. Il n’est pas vraiment étonnant que les enseignants connaissent la langue grecque, vu que c’est la langue la plus parlée au Chypre. Cependant, les résultats seraient sujet à interrogation, vu que seuls deux enseignants ont déclaré connaitre la langue grecque.

Figure 9 : Approche didactique connue par les enseignants

D’après la figure 9, c’est l’approche communicative qui est très utilisée pour la didactique du FLE. L’approche actionnelle est également bien utilisée. Cependant, la méthode multimédia n’est que faiblement utilisée. Ces réponses nous permettent de dire que les enseignants mettent en œuvre les moyens qu’ils jugent les mieux efficaces pour l’apprentissage du FLE.

Figure 10 : Rôle de la langue maternelle lors de l’apprentissage du FLE

Selon les enseignants, la langue maternelle tient un rôle important lors de l’apprentissage du FLE. Comme les élèves l’ont toujours évoqué, ils trouvent que le français est intéressant bien qu’il soit un peu difficile. C’est justement pour cette raison que l’utilisation de la langue maternelle a son intérêt. En effet, cela pourrait faciliter, du moins lors des premières années d’apprentissage, la compréhension et accélèrerait l’utilisation de la langue à bon escient.

 

Figure 11 : Parallélisme avec la langue maternelle pendant l’enseignement de la grammaire

D’après cette figure1 54% des enseignants ont déclaré faire un parallélisme avec la langue maternelle pendant l’enseignement de la grammaire. Cela rejoint ce qui a été dit en commentaires pour la figure 10. Comme l’enseignement de la grammaire se fait quasiment dès le début de l’apprentissage de la langue, il serait plus facile d’utiliser la langue maternelle, d’autant plus que les élèves n’ont qu’une faible connaissance en français au début.

Figure 12 : Parallélisme avec la langue maternelle pendant l’enseignement du lexique

Selon la figure 12, seuls 8% des enseignants n’utilisent que rarement la langue maternelle lors de l’enseignement du lexique. Cela semblerait évident car pour bien parler une langue, il faudrait la pratiquer. Pour permettre aux élèves de bien maîtriser le lexique français, il faudrait les contraindre à utiliser un vocabulaire français et approprié. 

 

Figure 13 : Utilisation de la langue maternelle pendant le cours de français

La figure 13 nous montre que 46% des enseignants utilisent la langue maternelle pendant les cours de français. Cela nous permet d’avancer que la langue française n’est pas encore maîtrisée par les élèves, d’où le recours à la langue maternelle. Mais cela nous permet également de penser que l’intérêt pour la langue française est élevé car les enseignants essaient d’utiliser un moyen pour faciliter l’apprentissage.

Figure 14 : Etablissement de liens entre les langues de l’élève pendant le cours de français

La figure 12 montre que 46% des enseignants pensent que des liens sont établis entre les langues de l’élève pendant l’enseignement du FLE.

Figure 15 : Avis des enseignants sur l’apprentissage de FLE en français

La figure 15 montre l’avis des enseignants sur la question de l’utilisation seule de la langue française lors de l’apprentissage du FLE. Seuls 31% des répondants ont répondu par la négative. Les 69% pensent que le français seul doit être utilisé pour les cours de FLE. Cela nous permet de dire que les Chypriotes sont très intéressés par le FLE et sont motivés à bien apprendre la langue.

Figure 16 : Rôle du bagage linguistique de l’apprenant en classe de FLE

Selon les enseignants, le bagage linguistique de l’apprenant tient un rôle important en classe de FLE. Cela pourrait s’expliquer par le fait que le plurilinguisme influe sur la facilitation de l’acquisition des notions en une langue, et plus particulièrement quand les deux langues ont une ressemblance, comme dans le cas du français et de la langue maternelle des élèves.

Figure 17 : Rôle de la pratique d’une autre langue pour l’apprentissage du FLE

Selon la figure 17, tous les enseignants pensent que le fait de parler plus d’une langue facilite l’apprentissage du FLE. Cela rejoint ce que nous avons dit sur le plurilinguisme, en commentaire de la figure 17.

Figure 18 : Statistique sur la connaissance de la didactique du plurilinguisme

D’après la figure 18, 31% des enseignants ont déclaré ne pas connaitre la didactique du plurilinguisme. Cela pourrait être un facteur qui freine l’apprentissage de la langue française.

 

Figure 19 : Approches plurielles connues des enseignants

La figure 20 nous permet de voir que c’est l’approche interculturelle qui est la plus conne des enseignants parmi les approches plurielles utilisées lors de l’apprentissage du FLE. L’éveil aux langues est peu connu bien qu’il s’agisse d’une méthode assez fiable.

Figure 20 : Désir des enseignants d’apprendre plus sur les approches plurielles

La figure 20 nous fait constater que tous les enseignants désirent apprendre plus sur les approches plurielles. 77% semblent très motivés. Cela nous permet de dire que les enseignants sont très motivés à mettre en place les moyens nécessaire pour améliorer l’apprentissage du FLE.

 

Figure 21 : Intérêt pour une formation sur la didactique du plurilinguisme

D’après la figure 21, tous les enseignants sont intéressés par une formation sur la didactique du plurilinguisme.

  • Autres remarques et commentaires ajoutés par les enseignants

Les enseignants interrogés one mentionné plusieurs remarques qui méritent d’être mentionnées dans le présent travail. D’abord, certains ont dit que le plurilinguisme est une notion chère au ministère de l’éducation et de la culture et ils se demandent comment pourrait-on intégrer la didactique du plurilinguisme dans l’enseignement du français. Par ailleurs, les langues connues des élèves ont une influence sur l’apprentissage du français. En effet, ont-ils mentionné l’approche diffère selon qu’il s’agisse d’une langue ou d’une autre. Cependant, le rôle important de la langue maternelle a été souligné en ce qui concerne l’apprentissage des langues étrangères, plus précisément le cas des Chypriotes parlant un dialecte et non pas une langue.

La comparaison avec la langue maternelle se fait souvent, a déclaré un enseignant, quand il enseigne le français pour que l’assimilation se fasse mieux, notamment quand il s’agit du lexique et de la grammaire.

 

3. Appréciation des approches plurielles par les enseignants

Tout d’abord, l’activité de l’enseignant dans les approches plurielles est une activité multimodale qui demande chez lui une gestion plurielle de différentes ressources : langagières, gestuelles, graphiques, etc. Elle est par définition variable car d’une part l’enseignant peut solliciter des actions écrites ou orales, il peut également donner des injonctions de mise au travail, etc. et d’autre part les consignes peuvent subir des reformulations, des remaniements, des modifications ou même des suppressions et ce, en fonction des échanges qui se produisent. 

Pour mieux appréhender pratiquement l’appréciation des enseignants sur les approches plurielles, en raison de manque de données à analyser pour Chypre, nous allons essayer de nous baser sur une étude effectuée par Anna Isabel Andrade sur l’appréciation des approches culturelles notamment de l’intercompréhension au Portugal (Andrade, 2001), donc qui peut s’analyser dans le cadre du CECLV. Pour pouvoir donner des résultats fiables, nous allons essayer de bien préparer des questionnaires qui seront adressés aux enseignants et aux élèves. Les questionnaires posés aux enseignants et futurs enseignants étaient des questions hypothétiques.  

Les réponses données par les enseignants et les futurs enseignants ont montré leur volonté de prendre en compte d’autres langues, d’autres cultures et d’autres personnes appartenant à d’autres univers linguistiques et culturels, disponibilité qui se transmet avec certain plaisir. En guise d’exemple, une des réponses des participants se présente comme suit : «  Je me considère ouverte à la diversité linguistique et culturelle. Je crois que je n’ai pas de préjugés  par rapport à d’autres cultures et j’essaie toujours d’enrichir mes expériences communicatives. » . Mais il se trouve aussi que les enseignants sont tout de même conscients des limites qui peuvent se présenter dans un cadre d’apprentissage/enseignement plurilinguistique.

L’approche plurielle, en effet, pourrait être une solution à long terme sur les problèmes socio-politiques et aussi linguistiques de Chypre. Ce pays manque des ressources naturelles, mais il a des grands atouts géopolitiques liés aussi au multilinguisme apparent. Les enseignants ainsi enquêtés ont manifesté, pour la grande majorité d’entre eux, leur soutien et leur ouverture quant à l’adoption de l’approche plurielle et du plurilinguisme dans les établissements scolaires et à l’ensemble du système éducationnel en entier.

Sur le plan éducationnel, de nouveaux horizons seront à découvrir, de nouvelles langues fascinantes et différentes mais aussi familières qui non seulement sont une nécessité de la mondialisation, à l’exemple de l’Union Européenne, mais également un atout plus que bénéfique pour les connaissances personnelles. Chaque individu pourra bénéficier de nouveaux savoirs, savoir-faire et savoir-être notamment dans l’apprentissage des nouvelles langues et par conséquent de nouvelles cultures étrangères. Dans les universités, les étudiants auront une plus large gamme de choix des langues. On pourrait même dire que les lacunes dans certaines langues seront remplies par d’autres. L’approche plurielle et plus précisément l’éveil aux langues, offrira à l’apprenant des opportunités de s’ouvrir sur les langues et par conséquent sur le monde, en d’autres termes de comprendre et de connaitre leur langage et d’en apprécier les caractéristiques tout en apprenant de nouveaux. Un enseignant de français a affirmé que la langue française peut réellement être un atout dans l’approche plurielle et favoriser le plurilinguisme en ce sens qu’elle est pratiquée par de nombreux Chypriotes.

La plupart des enseignants de FLE sont ouverts à la nouvelle approche didactique mais une initiation et formation spécifique est exigée afin de se familiariser avec ces approches. Toutefois, d’autres enseignants étaient plus réticents et préfèrent utiliser les approches didactiques traditionnelles, entre autres l’approche communicative, l’approche actionnelle.

L’approche plurielle permet, avons-nous dit une intercompréhension des langues parentes. Mais il existe l’approche éveil aux langues qui ouvre aussi l’éducation de l’oreille aux réalités phonologiques et accentuelles. On remarque alors une habitude aux sons de la langue française et donc évidemment une ouverture facile à toutes les autres langues ayant des phonèmes communs. Chaque langue est unique ; aucune autre langue n’a les caractéristiques de la langue française. Ceci facilitera aussi la reconnaissance et reproduction des rythmes, phonèmes et intonations. Des études des relations entre la langue allemande et la langue française ont démontré cette facilitation d’acquisition. En effet, plusieurs mots des deux langues ont les mêmes origines, ce qui en améliore la maîtrise et la compréhension.

Sur le plan social, l’approche plurielle pourrait faire naître de nouveaux liens, la compréhension entre les différentes groupes sociaux présents à Chypre et donc balayer certaines idéologies et pensées discriminatives tenant à l’origine ethnique ou familiale par exemple qui se sont transmises de génération en génération. Elle permettra d’autant plus à une ouverture de la Chypre. Donc, on peut penser que l’approche plurielle est un moyen de rapprochement de tous les habitants de Chypre, chypriotes-grecs et chypriotes-turcs pour la paix entre tous. Le langage est toujours associé à une idée de patrimoine. Dans la mesure où le langage est partagé et utilisé, il peut faire naître un sentiment de communauté, de familiarité. 

Sur le plan culturel, on peut affirmer que les langues ainsi maîtrisées apporteront des modifications importantes. L’inculturation, entrée de cultures étrangères dans la culture locale notamment, pourra apporter de nouveaux changements positifs, et offrir un mariage de cultures dans quelques années pour donner des cultures nouvelles, un mélange culturel qui pourrait faire naitre de nouvelles visions de la culture ancienne. Ces cultures étrangères pourraient aussi faire mieux comprendre des cultures locales et en donner des interprétations nouvelles. On peut citer les constructions anglaises de l’époque coloniale qui laissent leur trace dans la culture chypriote et pourquoi pas actuellement, les nouvelles infrastructures françaises laissant ses empreintes à Chypre. En fait, le plurilinguisme permet aux cultures européennes de s’assembler en une seule, mais de conserver les différences au niveau local. En fait, les enseignants affirment que l’apprentissage d’une langue permet une familiarisation avec l’Autre et la diversité des cultures et des langues. On remarquera alors une acquisition des premiers énoncés et quelques éléments de la culture des pays ou régions concernées. Le FLE sera donc un moyen d’acquisition des cultures françaises et francophones. Ainsi, on pourra dire que l’ouverture aux approches plurielles permettra aux chypriotes-grecs de connaitre et puis de comprendre les cultures des chypriotes-turcs et vice versa, mais aussi un élargissement quant aux langues étrangères telles l’allemand ou les langues latines.  

Economiquement, le plurilinguisme ouvre les portes de l’Europe, mais aussi de l’Asie. Les langues comme l’anglais ou le français permettront une adaptation plus facile dans la l’Union Européenne, tout comme l’allemand, la langue la plus répandue en Europe. De nouveaux investisseurs pourraient arriver. Le tourisme pourrait exploser rapidement car les communications seront facilitées par exemple. Le commerce aussi pourrait voir un nouvel élan avec plusieurs pays. 

Voilà autant de raisons pour l’utilisation de langues étrangères comme moyen pour adopter des approches plurielles, celles-ci pourraient contribuer à l’initiation et à l’apprentissage de langues nouvelles. Des études antérieures sur le thème de plurilinguisme et approches plurielles ont démontré que la langue française peut effectivement être employée comme « langue-pont » dans l’apprentissage de l’allemand. La phonétique française et la grammaire facilitent la compréhension de la langue germanique. L’anglais est aussi utilisé pour l’allemand. Nous trouvons des étudiants francophones et anglophones qui apprennent facilement l’allemand via la langue française et/ou anglaise. Les chypriotes-grecs maitrisant 3 langues (grec, anglais, français) peuvent facilement s’initier à une langue nouvelle.

Les limites se situent au niveau social, culturel et individuel. La société chypriote est subdivisée en plusieurs sous-sociétés (la société grecque, la société turque, …) qui ont chacune ses propres cultures, connaissances, histoires à ne pas négliger. Unifier Chypre par le langage où tous se comprendront quel que soit la langue utilisée n’est pas facile mais constitue un défi, ce serait idéal… Des moyens colossaux financiers, humains, matériels doivent être mis en place. Les enseignants ont exprimé leur méfiance justement parce qu’ils ne sont pas prêts à changer leurs habitudes/pratiques pédagogiques et intégrer toutes les langues du territoire lors de leurs enseignement (que ce soit d’une langue ou d’une matière non-linguistique).

Chaque société est différente et ses caractéristiques sont évidemment influencées par les langues étrangères. L’exemple des mélanges de langues à l’oral (un peu d’anglais dans le français) comme à l’écrit avec les sms des jeunes ne sont plus à citer. Le mélange des langues témoigne de ce besoin des gens à s’exprimer dans plusieurs langues, non pas à une seule ! Nous avons vu que le problème de l’incompréhension et de l’enseignement pourrait se résoudre avec la pratique des approches plurielles, accentué par l’inadaptation de la population au changement. Sur le plan éducationnel, de nouvelles réformes pourraient bloquer certains étudiants ou élèves dans leurs études car le cours normal d’apprentissage se voit changé. Il ne s’agit pas de trop de connaissances avec la pratique des approches plurielles, il s’agit de familiariser seulement les gens aux langues et aux cultures nouvelles. La politique linguistique de la Chypre nécessite effectivement une adaptation au multilinguisme observé dans le pays.

Les enseignants donnent bien alors des valeurs à la diversité linguistique et culturelle et comprennent très bien l’importance de sa préservation ainsi que la nécessité du plurilinguisme et il en résulte qu’ils acceptent et veulent adopter les approches plurielles. 

 

4. Appréciation des approches plurielles par les apprenants 

En ce qui concerne les appréciations des apprenants sur les approches plurielles, en général, cela dépend des relations des enseignants avec les apprenants, l’attention que les apprenants accordent aux méthodes d’enseignements, leurs attitudes, leurs origines, l’ambiance dans le contexte d’apprentissage et d’enseignement, leurs engagements, leurs contextes éducatifs d’origine, et encore de leurs besoins. La plupart des chypriotes sont presque bilingues, voire trilingues (anglais, grec et même le dialecte chypriote) donc ils aiment bien faire des analogies avec les langues qu’ils maitrisent déjà et ils l’exigent même lors de l’apprentissage du FLE. Ils se sentent plus « en sécurité » lorsqu’on traduit un nouveau terme français en grec, ça les aide à mieux comprendre le sens du mot français et ainsi ils assimilent mieux le vocabulaire ; les profs aussi ont souvent recours à la langue maternelle ou à l’anglais pour expliquer un phénomène grammatical ou lexical. De cette manière, en s’appuyant sur le bagage linguistique des élèves (anglais, grec, français qui aide pour l’apprentissage de l’anglais et des autres langues latines, ou une autre langue si l’élève est d’origine étrangère- par ex. russe), on gagne du temps, les élèves comprennent et apprennent plus facilement la nouvelle langue, en l’occurrence le français, et ils ont un regard positif vis-à-vis des langues (commentaires des élèves : « le français n’est pas difficile finalement, il y a beaucoup de ressemblances avec le grec surtout la grammaire » ; « l’anglais est peut-être plus difficile finalement, il n’y a pas beaucoup de ressemblances avec le grec », « comme je parle anglais, je peux apprendre le français plus vite », « comme je parle français, je peux facilement  me mettre à l’espagnol….) Si on met en œuvre l’intercompréhension par exemple, on s’adapte aux besoins linguistiques d’un pays (Chypre) où le multilinguisme est une réalité qu’il ne faut pas ignorer, bien au contraire ; on pourrait s’initier à l’apprentissage du turc qui est une langue officielle du pays ; de cette façon, les approches plurielles peuvent contribuer au rapprochement des chypriotes-grecs et des chypriotes-turcs et à la promotion de la paix dans l’île. Il y a aussi une mise en cause de cette approche pédagogique du FLE qui veut qu’on exclue la langue maternelle lors de l’enseignement/apprentissage du FLE. Cette méthode insiste sur l’utilisation du français uniquement dans la classe sans avoir recours à la langue maternelle ni comparer le FLE avec celle-ci. Toutefois, il y a aussi cette part de parents et d’enseignants surtout qui optent pour le bain linguistique sur le modèle d’un locuteur natif– exclure la langue maternelle et les autres langues parlées par les élèves- car ils croient que de cette façon, on apprend mieux la langue étrangère.

Dans les écoles privées à Chypre, l’enseignement est basé sur la didactique intégrée, mais dans ce cas, la langue de scolarisation c’est l’anglais- toutes les matières sont enseignées en anglais de même que le FLE et les autres langues étrangères. Dans  l’école franco-chypriote, la langue de scolarisation c’est le français. 

Les apprenants ont besoin d’enseignements fiables qui leur ouvriront les portes des emplois à Chypre mais aussi à l’étranger et d’enseignants qualifiés. En fait, les apprenants attendent simplement de leurs enseignants qu’ils soient aptes à faire leur métier. Des méthodes nouvelles doivent voir le jour qui permettront aux élèves et étudiants d’acquérir le maximum de connaissances dont ils ont besoin. Ici se pose le problème de la formation des enseignants. Ces derniers doivent agir de manière à effacer les incompréhensions et promouvoir l’apprentissage des langues étrangères parce que grâce à ces apprentissages on va pouvoir promouvoir les principes de respect, de solidarité et de paix. L’entrée de Chypre dans l’Union Européenne signifie que des opportunités et des perspectives d’avenir s’ouvrent aux étudiants. 

Mais le problème de maîtrise de certaines langues pourrait en être un obstacle. Ainsi, les approches plurielles apparaissent clairement comme une aide aux apprenants ayant soif de connaissances nouvelles d’une manière moderne, originale et efficace. Ce n’est pas l’adoption de la politique linguistique qui leur pose problème mais son application à l’ensemble du pays. La politique éducationnelle rencontre toutefois des problèmes car tout le monde ne peut répondre à cette solution trouvée d’adopter l’approche plurielle à l’ensemble des élèves et étudiants chypriotes. Il serait recommandé de changer la mentalité des apprenants et des enseignants, ces derniers ayant chacun leur propre style d’enseignement. De plus, il faut des moyens financiers pour parvenir au changement des programmes et des curricula à l’école et à l’université. 

Le plurilinguisme facilite véritablement l’acquisition d’autres langues surtout quand la langue d’éveil est une parente des autres langues. Le grec et le français sont des langues qui se rapprochent l’une de l’autre et les deux peuvent faciliter l’apprentissage des langues latines. Seulement, la place de la langue maternelle influence beaucoup les autres langues étrangères. 

 

B. Influence du plurilinguisme sur l’apprentissage du FLE et des autres langues étrangères

Appréciation de l’influence du plurilinguisme sur l’apprentissage du FLE et des langues étrangères par les enseignants et par les apprenants

Les appréciations de l’influence du plurilinguisme sur l’apprentissage du FLE et des langues étrangères sont très subjectives autant pour les enseignants que pour les apprenants. Pour les appréciations de l’influence du plurilinguisme, nous allons nous baser sur les réponses données aux questionnaires. Les groupes d’auteurs du CARAP, ont regroupé les influences dans des compétences, à partir des observations empiriques et aussi des regroupements des travails des différents auteurs sur les approches plurielles. (CARAP, 2010).  Selon les observations des élaborateurs du CARAP, le plurilinguisme induit des : 

    • Compétences mobilisant dans la réflexion et dans l’action, des savoirs, savoir-être et savoir-faire, qui est valable pour toutes les langues et les cultures ;
    • Compétences de construction et d’élargissement d’un répertoire linguistique et culturel pluriel ;
    • Compétences à gérer la communication linguistique et culturelle en contexte d’altérité 
  •  Compétences de résolution des conflits, obstacles, malentendus, évidemment importante dans ces contextes où la différence menace sans cesse de se transformer en problème : savoir demander de l’aide pour communiquer dans des groupes bi-/plurilingues, Savoir que les catégories de sa langue maternelle / la langue de l’école ne fonctionnent pas forcément de la même manière dans une autre langue ;
    • Compétences de négociation, qui fonde la dynamique des contacts et relations en contexte d’altérité ;
    • Compétences de médiation, qui fondent toutes les «mises en relation», entre langues, entre cultures et entre personnes;
  • Compétences d’adaptations qui font appel à toutes les ressources dont on dispose pour «aller vers ce qui est autre, différent».
  • Compétences à donner du sens à des éléments linguistiques et/ou culturels non familiers, en refusant l’échec (communicatif ou d’apprentissage), 
  • Compétences à analyser de façon critique la situation et les activités (communicatives et/ou d’apprentissage) dans lesquelles on est engagé.

Ainsi, à partir des observations empiriques de ces auteurs, on a pu dégager les influences que le plurilinguisme peut avoir généralement sur ses acteurs dont entre autre les principaux sont les enseignants et les apprenants. En tant que pays membres, ces observations sont aussi validées en Chypre. Il reste que les appréciations restent subjectives, ce qui se pose comme limites des observations et des déductions évoquées.

IV. Analyses et discussions 

Avant de passer aux analyses des appréciations de l’influence du plurilinguisme sur l’apprentissage du français, nous allons présenter les informations concernant les acteurs interrogés : enseignants d’une part, et élèves d’autre part.

  • Analyses des appréciations de l’influence du plurilinguisme sur l’apprentissage du français par les différents acteurs

Si nous analysons alors les appréciations sur les approches plurielles et les influences du  plurilinguisme que nous avons présentées en III, on peut dire que les approches plurielles trouvent bien leurs avantages et leur place auprès des enseignants et par conséquent auprès des étudiants. En effet, les enseignants sont bien conscients des avantages et des effets bénéfiques du plurilinguisme et des approches plurielles. Leur volonté de prendre en compte d’autres langues, d’autres cultures et d’autres personnes appartenant à d’autres univers linguistiques et culturels, leurs disponibilités à des approches dans les démarches pédagogiques linguistiques, donc y compris de la démarche pédagogique du FLE s’explique par leurs pratiques pédagogiques lorsqu’ils font souvent des comparaisons et des correspondances avec d’autres langues présentes dans le contexte pédagogique de Chypre. La découverte et l’adoption de la didactique du plurilinguisme leur serait un outil bien pratique lors de l’enseignement des langues. Le plurilinguisme pourrait s’adapter facilement au système éducatif de Chypre en raison du multilinguisme de la société. De cette façon, une approche plurielle pourrait servir à l’initiation des élèves à n’importe quelle langue de leur choix vu que ces approches facilitent l’apprentissage d’une nouvelle langue en travaillant sur les compétences partielles surtout écrites et celles de compréhension que les élèves peuvent  acquérir. 

Nous avons enquêté les enseignants et en langue française en Chypre qui sont les principaux acteurs du FLE, et des étudiants. Leurs avis personnels sont très importants dans la compréhension de notre étude et dans  la vérification des hypothèses. Il est nécessaire de savoir les réactions des élèves face à la pédagogie linguistique. Les enquêtes ont pu montrer que les enseignants étaient favorables à l’utilisation du FLE comme langue-pont pour l’étude des langues étrangères si non comme un moyen d’éveil. 

Les enseignants trouvent des avantages à adopter les approches plurielles dans le système éducatif chypriote selon la politique linguistique. Cette politique s’opère dans une ouverture de la Chypre sur l’étranger, sur les pays riverains de l’Europe et de l’Asie. Dans beaucoup de domaines, le plurilinguisme est un facteur de développement. Sur le plan éducationnel surtout, mais aussi social, culturel et aussi économique mais a également des effets sur la politique linguistique. Les intérêts politiques, financiers et les stratégies géopolitiques peuvent être un empêchement à l’accomplissement de cette politique  linguistique.   

 

La langue anglaise se place vraiment au-dessus de la langue française. La mondialisation en est une cause. Car les étudiants préfèrent s’adonner à des études linguistiques qui pourront leur rapporter dans un futur proche, c’est-à-dire dans le milieu professionnel, qu’ils pourront utiliser facilement et qui leur ouvriront les portes de leurs avenirs. Le français ne s’affiche pas comme une langue obligatoire dans les relations humaines et professionnelles en Chypre jusqu’à maintenant.

  • Problèmes rencontrés et limites quant à l’appropriation du FLE dans le cadre des approches plurielles

Une des principales limites à laquelle l’appropriation du FLE dans le cadre des approches plurielles fait face, c’est la domination de langue anglaise dans le cadre européen. En effet, il est constaté que la plupart des systèmes éducatifs européens ne proposent plus qu’une seule langue en LV1, l’anglais, et éventuellement un choix très restreint en LV2. Et c’est la domination de la langue anglaise internationalement qui fait aussi que les étudiants s’intéressent de moins en moins à la diversité et les études de langues et cultures étrangères sont en perdition partout en Europe : baisse des effectifs et suppression de départements et de facultés entières spécialisés dans les études linguistiques. C’est dans cette optique même que Pierre Frath a évoqué son article intitulé « Plus on fait de l’Europe, moins on parle de langues… »,  et où il avancera des propositions pour un véritable plurilinguisme en Europe. 

 

En Chypre, le cas que nous avons étudié, nous avons déjà évoqué l’importance de l’anglais dans ce pays, sa présence dans la vie quotidienne des chypriotes, l’importance que les chypriotes présentent pour cette langue. En outre, il se trouve aussi que les chypriotes, notamment les étudiants trouvent que le FLE est une langue difficile à apprendre. Mais il se trouve aussi que cette domination de l’anglais peut être jouée en faveur du FLE dans les approches plurielles en raison que ces deux langues appartiennent à la même famille linguistique.

Conclusion

 

En guise de conclusion, dans le cadre européen, le plurilinguisme est très prôné pour ses citoyens. Plusieurs raisons expliquent cette nécessité si on ne cite que le besoin d’avoir des citoyens qui se comprennent mutuellement, afin qu’ils puissent circuler librement, afin qu’ils puissent comprendre et participer activement à la vie communautaire européenne. Le FLE est une des langues considérées comme langues mères en Europe, ce qui nécessite son appropriation et aussi pour de nombreux raisons, notamment pour le rôle que la France tienne dans ce cadre régional. Mais les européens devraient avoir des connaissances même basiques des langues européennes pour….Chypre a une situation sociolinguistique considérée comme complexe car en plus de son intégration dans l’union européenne, sa situation géographique implique aussi la présence de plusieurs langues dans ce pays. Le plurilinguisme pourrait jouer un rôle de rapprochement voire de réconciliation des deux communautés en Chypre.  En adoptant les approches plurielles dans le système éducatif, on pourrait s’initier à la langue turque et se familiariser avec cette langue et culture ;  

Parallèlement à la nécessité du plurilinguisme et la nécessité du français en Chypre, on a alors avancé l’idée d’intégrer le FLE dans le cadre des approches plurielles avec l’objectif d’apprendre le français et développer le plurilinguisme. On a pu constater que cette méthode présente bien des avantages qui peuvent être mis en œuvre en Chypre pour faire face à sa situation et développer le FLE sur son territoire. Mais l’idée d’intégrer le FLE dans les approches plurielles fait aussi face à des limites. Il se peut même qu’il est question d’affaiblir l’importance que les européens accordent à l’anglais, comment faire pour que les européens affaiblissent l’importance qu’ils accordent à l’anglais et faire répercuter cela vers les autres langues. Cela pourrait se faire en adoptant le plurilinguisme qui met en valeur les langues minoritaires. Le plurilinguisme permettrait aussi la découverte et l’initiation à toute langue.

Bibliographie

 

  • ANDRADE A. I., Former à l’intercompréhension, qu’en pensent les futurs professeurs de langues, 2001
  • BLANCHET P., L’approche interculturelle en didactique du FLE – Cours d’UED de Didactique du Français Langue Étrangère de 3e année de LicencesService Universitaire d’Enseignement à DistanceUniversité Rennes 2 Haute Bretagne, 2004.
  • CANDELIER M., L’introduction de l’éveil aux langues dans le curriculum. Strasbourg : Centre Européen pour les Langues Vivantes / Conseil de l’Europe, 2003.
  • CASTAGNE  E., Les enjeux de l’intercompréhension, Coll. ICE, 2005.
  • CASTELLOTTI V., Une conception plurielle et intégrée de l’enseignement des langues – principes, modalités, perspectives, 2005.
  • Cadre de Référence pour les Approches Plurielles des Langues et des Cultures -Version 3 – Mai 2010.
  • Guide pour l’élaboration  Guide pour l’élaboration des politiques linguistiques éducative en Europe, 2002.
  • Ministère de l’éducation et de la culture – Profil de la politique linguistique Educative Chypre : Divisions des Politiques linguistiques, Chypre 2003 – 2005.
  • MOUSTAKI A., Grecs, français, anglais, vecteurs d’intercompréhension de la famille germanique, 2010.
  • MOOR D., Plurilinguismes et école, Coll. LAL, Paris, 2006.
  • LOIZIDOU T., Analyse des feedback correctifs dans un projet de télécollaboration asynchrone entre futurs enseignants et apprenants de FLE, 2012.
  • Parlement européen, Direction générale des politiques internes, département thématique politiques structurelles et de cohésion, Mise en œuvre du cadre européen commun de référence pour les langues dans les systèmes éducatifs européens, 2010.

 

Table des matières

Sommaire 2

Introduction 3

  1. La situation sociolinguistique dans le contexte pédagogique de Chypre 4
  2. Evolution linguistique en Chypre 4
  3. Aperçu historique des langues officielles et des langues parlées en Chypre 4
  4. La société chypriote : d’une société multilingue vers une société plurilingue 6
  5. L’enseignement/apprentissage des langues dans une société multilingue 7
  6. Les politiques linguistiques concernant l’enseignement des langues en Chypre 7
  7. L’offre et le choix des langues en Chypre : l’enseignement des langues officielles et étrangères dans le primaire, le secondaire et à l’université 10
  8. Adaptation des programmes linguistiques en fonction des besoins sociolinguistiques, professionnels et économiques 13
  9. Les approches plurielles et le FLE dans un contexte linguistique complexe 14
  10. La place du français dans le contexte sociolinguistique de Chypre 15
  11. Les approches plurielles dans ce contexte sociolinguistique complexe 16
  12. Conceptualisation de la didactique du plurilinguisme et du FLE dans le contexte pédagogique de Chypre 17
  13. Les différentes approches en matière de didactique du plurilinguisme 17
  14. La Didactique Intégrée 17
  15. L’intercompréhension entre langues 17
  16. L’approche interculturelle 18
  17. L’Eveil aux langues 18
  18. Les effets du plurilinguisme sur l’apprentissage linguistique 20
  19. L’intégration des approches plurielles dans la démarche pédagogique 22
  20. L’Intercompréhension entre les principales langues du terrain 23
  21. L’adoption des approches plurielles lors de l’enseignement/apprentissage du FLE 25
  22. La démarche pédagogique d’enseignement/apprentissage du FLE à Chypre et son développement au sein d’une société plurilingue 25
  23. Comparaison entre l’enseignement du FLE et des autres langues enseignés sur le terrain 27

III. Evaluation empirique des approches plurielles lors de l’enseignement/apprentissage du FLE à Chypre 28

  1. La mise en œuvre des approches plurielles lors de l’enseignement du français : présentation des données empiriques 28
  2. Informations concernant les élèves 28
  3. Informations concernant les enseignants 31
  4. Appréciation des approches plurielles par les enseignants 40
  5. Appréciation des approches plurielles par les apprenants 43
  6. Influence du plurilinguisme sur l’apprentissage du FLE et des autres langues étrangères 45

Appréciation de l’influence du plurilinguisme sur l’apprentissage du FLE et des langues étrangères par les enseignants et par les apprenants 45

  1. Analyses et discussions 47
  2. Analyses des appréciations de l’influence du plurilinguisme sur l’apprentissage du français par les différents acteurs 47
  3. Problèmes rencontrés et limites quant à l’appropriation du FLE dans le cadre des approches plurielles 48

Conclusion 49

Bibliographie 50

 

Nombre de pages du document intégral:64

24.90

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