Adapter l’Enseignement pour Favoriser la Compréhension des Élèves : Méthodes et Solutions
Lorsqu’une chaussure est trop grande pour une personne, elle risque de fatiguer son propriétaire. Par contre s’il est trop serré, cela causera des ampoules. Il faudra alors une chaussure sur mesure. C’est la même chose pour l’enseignement, il faut qu’elle soit sur mesure pour les élèves. L’enseignement doit permettre aux élèves l’apprentissage et la compréhension des choses afin qu’ils ne se sentent pas étranger. Comment les enseignants se rendent compte de la compréhension des élèves pendant leurs cours? Pour pouvoir y répondre on parlera tout d’abord, du rôle de l’interaction cognitive « élève-professeur » dans le processus de compréhension des cours, ensuite des ressources, moyens et méthodes du corps enseignant pour vérifier le processus de compréhension et enfin des propositions en vue d’améliorer le processus de compréhension des enseignants par leurs élèves
- A) L’importance de la planification de l’activité de l’enseignant avant d’être en classe. 3
- B) La démarche interactive « professeur-élève » : le rôle de l’attitude de l’enseignant en classe. 5
- C) La démarche interactive « élève-professeur ». 6
- D) Les attitudes négatives de l’enseignant : facteurs de blocage sur le processus d’apprentissage de l’élève. 11
- Le manque de confiance des enseignants dû à des connaissances conceptuelles et phénoménologiques de base insuffisantes. 11
- Le fait que la plupart des enseignants agissent en général comme des fournisseurs de renseignements (Brown, 1992) 11
- Les enseignants ne mettent pas en œuvre des innovations de nouveaux programmes ni des méthodologies. 11
- Le manque de cohérence entre les attitudes des enseignants en classe et leur conviction exprimée à propos de méthodes actives d’interaction. 12
- Les enseignants considèrent en général l’échec scolaire comme le résultat d’une carence socio-psychologique due aux conditions sociales de l’enfant et de sa famille. 12
- Les conditions de travail des enseignants. 12
- E) L’importance des compétences de l’enseignant dans le processus de compréhension des élèves 13
- A) Les formes d’interaction orale. 14
- B) L’utilisation de l’écrit et l’exploitation de ses résultats. 16
- Les exercices. 16
- Les travaux dirigés et travaux pratiques. 17
- Les travaux de groupe. 17
- Une bonne utilisation des outils de travail en classe. 18
– les outils classiques : tableau, manuels scolaires…… 18
– les outils modernes : Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC) 18
- A) La distribution du temps scolaire. 19
- B) Enseigner de la même façon dont les élèves apprennent 21
- C) Harmonisation de l’évaluation du travail des élèves : revoir les critères pédagogiques de notation 23
- D) Créer une culture de confiance entre élèves et enseignants. 25
I] Le rôle de l’interaction cognitive « élève-professeur » dans le processus de compréhension des cours
La planification est souvent définie d‘un point de vue temporel et spatial : c‘est l‘activité que l‘enseignant met en œuvre avant d‘être en classe avec ses élèves, ou encore dans une classe vide. Le premier travail, normatif, de Tyler en propose un modèle linéaire et prescriptif, préconisant de débuter par l‘énoncé des objectifs, puis de continuer en spécifiant l‘organisation des activités d‘apprentissage et leur évaluation. Sont apparus ensuite des travaux descriptifs qui ont montré que le modèle tylerien ne correspondait guère à la réalité. La planification aurait essentiellement pour fonction d‘établir et de peaufiner des routines d‘enseignement et elle semble porter en plus grande part sur le contenu enseigné, puis sur les caractéristiques des élèves et, en moindre part, sur le matériel.
La planification a constitué un objet de recherche particulièrement important dans le cadre des travaux sur la pensée des enseignants. Toutefois, il est curieux, compte tenu des postulats de la recherche sur la pensée des enseignants (en particulier le postulat selon lequel le comportement des enseignants serait guidé par ses jugements et décisions), que la question des liens entre planification et comportement de l‘enseignant en classe ait fait l‘objet de si peu de travaux, alors qu‘il en existe beaucoup dans chacun de ces domaines pris séparément.
La recherche internationale comprend quelques études ayant étudié le lien entre planification et activité en classe qui tendent à établir l‘existence effective, empiriquement observable, d‘un tel lien. Deux types d‘études ont été menés. Les études ayant tenté de manipuler expérimentalement la présence ou l‘absence de planification (en annonçant longtemps à l‘avance versus quelques minutes avant de commencer la leçon quel devait en être le thème, rendant ainsi toute planification quasi impossible) montrent que les enseignants qui ont eu la possibilité de planifier la leçon sont davantage centrés sur les élèves et produisent un enseignement de meilleure qualité. Ainsi, Zahorik (1970)[1] trouve que les enseignants ayant planifié sollicitent leurs élèves plus souvent que les autres, tout en les encourageant moins souvent, et ils demandent plus à leurs élèves d‘approfondir leurs réponses que ceux n‘ayant pas planifié. Dans le domaine de l‘éducation physique, Byra et Coulon (1994)[2] ont montré que les séances planifiées comportent plus de temps alloué à l‘explication des règles du jeu, et les périodes effectives de réflexion des élèves sont également plus nombreuses lors des séances planifiées. A l‘inverse, les séances non planifiées comportent des épisodes plus longs au cours desquels les élèves ont des comportements non liés à la tâche.
Enfin, les élèves font preuve de plus d‘attention, la tâche est mieux présentée par l‘enseignant planifiant, ses indications sont plus précises et son feed-back plus adéquat. Un autre type d‘études s‘est focalisé sur le lien entre certaines caractéristiques de la planification d‘enseignants, réalisée à haute voix, et le comportement de l‘enseignant en classe ainsi que, éventuellement, celui de ses élèves. Ces études postulent qu‘il existe une relation étroite entre planification et action de l‘enseignant en classe : on pourra comprendre ce qu‘a fait l‘enseignant dans sa classe à la lumière de sa planification. Ces études ayant comparé les planifications (traces ou enregistrements) des enseignants avec leur activité en classe mettent en valeur une correspondance entre les aspects de la situation planifiée et ceux de la situation en interaction. Peterson, Marx et Clark (1978) ont établi, sur la base de l‘observation d‘une douzaine d‘enseignants expérimentés de lycée, des corrélations entre les catégories de planification et les catégories de comportement en classe. Ils ont trouvé que plus les enseignants font référence à des objectifs dans leur planification, plus ils mentionnent des buts pendant leur enseignement. Plus les enseignants se centrent sur le contenu durant leur planification, plus ils posent de questions et se centrent sur le contenu en classe.
Plus ils se centrent sur le processus d‘enseignement dans leur planification, plus ils se centrent également sur le groupe d‘élèves dans leur enseignement. Morine-Dershimer (1978)[3], s‘intéressant spécifiquement aux divergences entre la planification de l‘enseignant et son activité en classe, a établi une typologie de profils de traitement de l‘information : les enseignants centrés sur le plan du cours sont ceux pour lesquels il y a une divergence planification/réalité, ils peuvent utiliser le plan du cours et les routines d‘enseignement qu‘ils se sont constitué ; les enseignants centrés sur la réalité sont ceux pour lesquels la divergence est mineure, ils prennent ainsi plus de décisions en temps réel et traitent plus de données provenant des élèves ; enfin, lorsqu‘une différence importante entre planification et réalité apparaît, ces enseignants sont nommés « centrés sur les problèmes » et sont amenés à reporter leurs décisions, ou bien à raccourcir leur leçon. Enfin, Twardy et Yerg (1987)[4], étudiant des séances de volley-ball, ont montré que plus les enseignants planifient le contenu, plus ils tiennent à le présenter sous forme magistrale et moins ils participent au jeu. Ils ont également montré que plus l‘enseignant planifie en détail les exercices, plus il tient à informer ses élèves de ses décisions.
La recherche en France peut se décrire selon quatre « écoles » principales, qui ont étudié la planification de l‘enseignement et ses relations avec l‘activité en classe : Bru et ses collègues, qui s‘inscrivent dans un courant systémique, Altet et ses collègues, qui se réclament de l‘étude des processus contextualisés tout en faisant amplement référence à la systémique et à la pensée des enseignants, Huber et ses collègues, qui se réclament de la didactique professionnelle. Il nous faut ajouter à Ces trois écoles, du champ des sciences de l‘éducation, les travaux de Comiti et ses collègues, qui ont mené des recherches aux problématiques très voisines dans le champ de la recherche en didactique des mathématiques.
Monsieur Bru (1991)[5], lui , s‘est intéressé aux effets de la planification sur l‘activité de l‘enseignant en évaluant l‘écart entre planification et action. Il a demandé à 52 enseignants de réaliser deux planifications de séances de langue écrite les plus opposées possibles, séances qui ont été ensuite observées. Bru a mis au jour trois profils d‘enseignant selon le lien entretenu entre leur planification et leur activité en classe : (a) ceux (24 % des sujets) qui prévoient, dans leur planification, des actions sur de nombreuses variables (au moins cinq sur les onze variables observées), prévisions effectivement réalisées dans l‘action devant les élèves ; (b) ceux (30 % des sujets) qui, comme les précédents, planifient sur de nombreuses variables tout en réduisant le champ de leur action dans la classe ; (c) et enfin (46 % des sujets), ceux qui planifient et mettent en Œuvre leur activité en jouant sur un nombre réduit de variables. Ainsi, il semblerait que certains enseignants soient capables de se représenter une étendue plus ou moins grande de variables ; et qui une fois, en présence de ses élèves peut rassembler une palette de décisions plus ou moins étendue.
Altet (1994a)[6] a examiné les planifications et l‘activité en classe d‘enseignants de collège (français et mathématiques). Nous détaillons ici seulement ce qui a trait au lien planification activité en classe : une fiche de préparation reprenant la méthode de Tyler a été proposée aux sujets, qui l‘ont utilisée ou pas ; puis l‘activité des sujets en classe a été filmée et analysée à l‘aide de grilles. La différence entre la planification et l‘activité en classe de l‘enseignant est nommée par Altet (1994a, p. 123 et sq.) « décalage pédagogique par rapport à la stratégie », décalage faisant partie de « modes d‘ajustement dans l‘action pédagogique ». Altet (1994a) [7] met au jour quatre types de décalages : (a) par rapport à la stratégie, (b) par rapport à l‘objectif, (c) par rapport à la consigne, (d) par rapport aux critères de la tâche. Pour Altet, ce changement est principalement dû à l‘analyse par l‘enseignant de la compréhension des élèves. L‘alternative est la suivante : « Soit l‘enseignant ignore ces réactions [d‘élèves qui ne suivent pas ou vont plus vite] imprévues et suit imperturbablement sa stratégie initiale : non-ajustement ; soit il s‘efforce de s‘adapter aux démarches et réactions des élèves en s‘ajustant à eux, en mettant en place un autre scénario plus approprié. » (Altet, 1994a, p. 124) Quant à Huber et Chautard (2001)[8], ils se sont surtout focalisés sur la gestion des « imprévus » en classe. Ils ont montré que le nombre d‘imprévus par rapport à une séance planifiée, de même que la gestion qui est faite de ces imprévus, peuvent varier beaucoup d‘un enseignant à l‘autre. Ils ont proposé la typologie suivante : (a) gestion informative, peu d‘incidents et d‘imprévus (cours fluide) ; (b) gestion avec de nombreux incidents parasites, mais peu de véritables imprévus (cours heurté) ; (c) gestion avec imprévus nécessitant un diagnostic, mais non suivis d‘un traitement ; (d) gestion avec imprévus nécessitant un diagnostic et un traitement débouchant sur une prise de décision.
Monsieur Comiti et ses collègues ont mené une série de travaux en didactique des mathématiques visant à étudier les régulations du contrat didactique, qui reflète les attentes réciproques de l‘enseignant et de l‘élève par rapport au savoir. Ces auteurs partent du travail de Rousseau (1996), qui s‘intéresse aux équilibres à maintenir dans la relation didactique et aux régulations que l‘enseignant doit effectuer pour maintenir ces équilibres. S‘appuyant sur un principe d‘économie, on pose que l‘enseignant va rester dans l‘orthodoxie, c‘est-à-dire effectuer des régulations qui ne mettent pas en cause son projet. Il peut cependant être amené à sortir de cette logique et, par là même, à changer de situation en agissant sur le milieu ou en changeant le contrat didactique. Ainsi, Comiti et Grenier (1995)[9], Comiti, Grenier et Margolinas (1995), identifient et analysent en termes de milieu des phénomènes liés au décalage entre la situation prévue par l‘enseignant et la situation qu‘il a réellement à gérer : la « résonance » explique l‘importance particulière accordée au traitement de certaines erreurs et le « dédoublement de situation » correspond au cas où enseignant et élèves évoluent dans des situations différentes.
Par la suite, Comiti et Grenier (1997)[10] étudient plus finement les régulations de l‘enseignant pour faire face à ces décalages et précisent quelques contrats locaux, notamment le contrat d‘adhésion et le contrat de production collective.
Il est à noter que la recherche en France est marquée par un fort souci de présentation de typologies. Si ces dernières ont une utilité descriptive indéniable, elles ont également des limites quant à leur valeur explicative car il manque souvent une théorie qui rende compte des différences observées – hormis les recherches de Comiti et ses collègues, fortement inscrites dans une théorie. Les études françaises sont centrées sur l‘enseignant et ne se préoccupent que très peu des comportements et performances des élèves, à l‘inverse des études internationales. Toutefois, cela ne doit pas nécessairement être vu comme un manque, car de très nombreuses variables peuvent entrer en compte dans le lien entre planification de l‘enseignant et performances des élèves. Les études corrélationnelles établissent souvent une liaison directe qui peut être sujette à caution.
Le mot attitude (du latin aptus) est défini dans le cadre de la psychologie sociale comme étant une préparation subjective ou mentale à l’action. Il définit les comportements apparents et observables ainsi que les convictions humaines. Les attitudes déterminent ce que chaque individu verra, entendra, pensera et fera. Elles naissent des expériences et ne deviennent pas automatiquement des conduites routinières.
L’attitude signifie la tendance individuelle dominante à réagir favorablement ou défavorablement à un objet (personne ou groupe de personnes, institutions ou événements). Les attitudes peuvent être positives (valeurs) ou négatives (préjugés). Les sociologues distinguent et étudient trois composantes parmi les réactions :
- la composante cognitive qui est la connaissance d’un objet, exacte ou non ;
- la composante affective : sentiments envers l’objet ;
- la composante conative ou comportementale qui est la réaction envers l’objet.
Les trois composantes interviennent, dans la plupart des situations, de manière concomitante pour donner forme à l’attitude adoptée par les professeurs en classe, par une interaction directe et indirecte entre la société, l’école et les professeurs, comme le montre le schéma précédent. Leite (1994)[11] soulève des questions sur la manière dont la société perçoit ce besoin de changement et quelles sont ses demandes, sur ce qui est considéré comme moderne et comment ces convictions influencent-elles la vision et le comportement des professeurs à l’école.
Voici un tableau 1- A qui recense sept manières d’enseigner regroupées en trois catégories (a, b et c), qui représentent des traits de caractère des professeurs que l’on reprendra dans les résultats.
Le tableau 1 – B, quant à lui représente les compétences des professeurs qui, mesurées de différentes manières et assorties de coefficients, pourraient permettre de comprendre le(s) comportement(s) des professeurs en classe. Les enseignants ont un rôle (plus ou moins) décisif dans toutes les réformes du système éducatif et leurs compétences n’assurent pas automatiquement des attitudes positives envers le processus d’enseignement.
Groupes | I – A Attitudes | I – B Compétences |
a. | 1. Manque de confiance à propos
du contenu |
1. Le rôle du laboratoire de physique |
2. Fournisseur de connaissances établies | 2. La compréhension de la nature de la science | |
3. Donner la priorité à la
manipulation de symboles mathématiques |
3. Le rôle de l’histoire de la physique | |
b. | 4. Résistance aux innovations en
matière de programmes et de méthodologie 5. Manque de cohérence entre les pratiques de classe et les croyances exprimées en matière d’éducation |
4. La compréhension psycho-
pédagogique des processus d’apprentissage des élèves, de la cognition, des modèles mentaux |
5. Evaluation. | ||
c. | 6. Manque d’implication envers
un bon apprentissage |
6. Actualisation des problèmes de
Science, Technologie et Société (STS) |
7. Croire à l’enseignement :
faire ce qui peut être fait et non ce qui devrait l’être |
7. Utilisation pertinente des anciennes
et nouvelles technologies (documents écrits, vidéo, multimédia, logiciels, Internet, etc.) |
|
8. Nouveaux contenus de programmes
de physique |
||
9. Connaissance des résultats obtenus
dans le champ de la recherche en didactique de la physique |
Les interactions verbales seront abordées dans un premier temps, d‘un point de vue général (distribution des tours de parole), puis fonctionnel (louanges, réprimandes). Ensuite, nous en viendrons à des aspects liés aux tâches d‘apprentissage, pour terminer sur le maintien de la discipline.
La recherche internationale sur la gestion de la classe, et notamment les travaux anglo-saxons, relève pour une bonne part du paradigme processus-produit. La question d‘une gestion efficace de la classe, en lien avec son « ordre » mentionné plus haut, a donc été posée de manière insistante, les auteurs cherchant quels étaient les éléments de la gestion et de l‘organisation de la classe susceptibles de favoriser les apprentissages. Un des résultats saillants de ces recherches montre que, d‘une classe à l‘autre, on retrouve généralement une structure d‘interactions verbales assez proche. Cela semble traduire l‘effet de contraintes fortes qui s‘imposent à l‘action de l‘enseignant en classe, contraintes qui peuvent renvoyer aux fonctions et aux conditions de l‘enseignement, parfois difficilement conciliables (transmettre des savoirs communs tout en aidant chaque élève, maintenir un environnement calme et propice aux apprentissages tout en favorisant les échanges verbaux, favoriser l‘autonomie des élèves tout en les rendant aptes à une vie collective, etc.).
En général, on observe qu‘environ les deux tiers des interactions sont à l‘initiative de l‘enseignant, tandis qu‘un tiers seulement est à l‘initiative des élèves. Qui plus est, la répartition des questions indique une méthode expositive sous-jacente dédiée à la transmission et à la vérification des connaissances. Les questions fermées, qui appellent une seule réponse valable, représentent 70 % de l‘ensemble des questions. Les questions ouvertes, qui permettent des possibilités de choix, en représentent 25 %. Les questions stimulantes, qui exigent des initiatives, n‘en représentent que 5 %. Le format des interactions, qu‘elles soient d‘ailleurs verbales ou non verbales, a aussi été étudié. Les enseignants efficaces seraient ceux qui communiquent en utilisant une bonne distance sociale : ils se tiennent à proximité des élèves, utilisent le toucher d‘une façon socialement approuvée, sont plus expressifs à l‘oral, sourient davantage, manifestent une grande ouverture par leurs attitudes corporelles, utilisent fréquemment le contact visuel et organisent la classe en fonction des interactions.
Passons maintenant aux aspects fonctionnels des interactions verbales, en décrivant les recherches qui ont tenté d‘établir un lien entre les types de feed-back verbaux et la réussite des élèves. On notera que ces recherches sont complémentaires de celles portant sur le lien entre le jugement de la valeur scolaire et le comportement des enseignants en classe (voir section 1.2). Les recherches montrent que les corrélations entre les éloges et les gains d‘apprentissage sont faibles et vont dans plusieurs directions. Ces résultats nuancent quelque peu les propos de Medley (1977)[12], qui rapporte que les enseignants utilisant plus de louanges ou de motivations positives que de critiques produisent davantage d‘effets positifs sur les élèves. Néanmoins, les éloges des enseignants, en tant que renforcements positifs pour les comportements acceptables, réduisent la quantité de comportements déviants manifestés par les élèves (Dunkin & Biddle, 1974)[13]. L‘efficacité des éloges dépend cependant d‘une série de facteurs. Elle est supérieure quand les éloges sont spécifiques plutôt que globaux, quand ils sont utilisés avec les élèves dépendants et anxieux, quand ils sont donnés en privé plutôt qu‘en public, quand ils sont utilisés dans le but d‘attirer l‘attention sur le contenu à apprendre et sur la réussite des élèves, quand ils sont exprimés avec chaleur et encouragement, particulièrement auprès des élèves plus jeunes, quand ils ne sont pas trop fréquents, quand ils sont crédibles et, enfin, quand ils sont liés au contexte. De même, l‘emploi d‘éloges semble être efficace parmi les élèves des premier et second cycles du primaire quand ils prennent la forme de récompenses symboliques et quand ils sont administrés aux élèves moins habiles ou issus d‘un milieu socio-économique faible. Inversement, les éloges se révèlent moins efficaces à mesure que monte le niveau d‘enseignement, quand ils sont initiés par les élèves, quand ils sont formulés verbalement et lorsqu‘ils s‘adressent aux élèves qui proviennent de milieux socio-économiques élevés ou qui démontrent de grandes habiletés (Brophy, 1981[14]; Griswold, Colton, & Hansen, 1985[15] ; O‘Neill, 1988[16]). Il ressort que les enseignants peuvent remplacer avantageusement les éloges par des commentaires écrits informatifs et précis sur le travail. Le fait de féliciter les élèves peut aider à construire leur estime de soi et à établir une relation amicale avec eux. Il s‘agit toutefois d‘une arme à double tranchant, car trop d‘éloges ou des éloges inopportuns peuvent ne pas favoriser l‘apprentissage. Pour être vraiment efficaces, les éloges doivent être clairement reliés au sujet qui préoccupe les enseignants et les élèves. Leur crédibilité dépend de ce qu‘ils dégagent, selon qu‘ils paraissent sincères ou superficiels.
Considérons maintenant, non plus les interactions verbales, mais le comportement de l‘enseignant à des fins de supervision de sa classe. Des recherches, à la suite des travaux fondateurs de Kounin (1976)[17], ont montré que les enseignants efficaces supervisent fréquemment l‘apprentissage de leurs élèves, à la fois de manière formelle et informelle, et ils ajustent leurs leçons en conséquence. Tout d‘abord, les différentes activités se déroulent sans à-coups, par le fait que les périodes de transition entre les activités sont brèves, ordonnées, et faciles à discerner, et que peu de temps est perdu à organiser la classe ou à transiger avec l‘inattention ou la résistance des élèves. Une bonne vigilance de l‘enseignant (withitness) est également associée à de meilleurs résultats des élèves, elle correspond à une manière de prendre « le pouls » du groupe, d‘« habiter la classe », qui fait que l‘enseignant va circuler dans la classe, utiliser des comportements verbaux signifiants, maintenir un contact visuel avec les élèves. Les gains d‘apprentissage sont en général plus élevés dans les classes où les élèves reçoivent beaucoup de contenu d‘enseignement, où les leçons se déroulent sur un rythme relativement soutenu et où les élèves sont en interactions fréquentes avec l‘enseignant (Martineau, Gauthier & Desbiens, 1999[18]). Enfin, de hauts gains d‘apprentissage correspondent également à une explicitation des buts et du travail à accomplir, qui consiste à expliquer les tâches de façon concrète et à donner plusieurs exemples pratiques avant de faire débuter le travail (Brophy & Good, 1986[19]). Les élèves restent mieux engagés dans leur tâche lorsque l‘enseignant donne des instructions claires, explicites, redondantes et comprises par tous (Doyle, 1986[20]).
Enfin, certains travaux ont montré que les enseignants novices étaient plus directifs que les experts dans la gestion des activités d‘apprentissage, alors qu‘à l‘inverse, les experts étaient plus directifs en ce qui concerne la gestion des interactions sociales entre élèves ; cela tend à indiquer que les novices seraient plus préoccupés par les contenus à enseigner que par les élèves à qui ces contenus sont destinés.
Pour terminer, nous allons aborder un type de comportement particulier de l‘enseignant, celui qui vise à maintenir la discipline, un certain niveau d‘ordre, dans sa classe. Doyle (1990)[21] fait état du nombre important des interventions de l‘enseignant ayant pour but de régler des problèmes de comportement dans sa classe : environ 16 par heure. Pour gérer la discipline en classe, les enseignants efficaces ont plus fréquemment recours à des signaux non verbaux et non obstruant (geste, contact visuel, proximité) qui ne brisent pas la dynamique de l‘activité en cours. A cette même fin, les interventions se font plutôt en privé, à l‘insu du groupe, et sont brèves. Par ailleurs, les règles et les procédures qu‘utilisent les enseignants efficaces sont concrètes, explicites et fonctionnelles ; ces mêmes enseignants se montrent habiles à mettre en place les règles de fonctionnement de la classe dès le début de l‘année scolaire. En ce sens, il a été montré que les enseignants débutants n‘utilisaient que les récompenses et les punitions pour maintenir les élèves engagés dans leur travail. Les enseignants plus expérimentés, eux, supervisent continuellement la classe en se centrant sur l‘apprentissage des élèves.
Toutefois, cela ne signifie pas que les récompenses matérielles ne puissent pas avoir d‘effet. Celles employées par les enseignants à titre de renforcement positif pour les comportements acceptables ou les réponses correctes, que ce soit des jetons, des étoiles envoyées à la maison ou encore des figurines souriantes affichées dans la classe, contribuent à faire diminuer la fréquence de comportements déviants (Medley, 1977[22]).
La recherche en France s‘est peu préoccupée de l‘efficacité de l‘enseignement. Ici, les situations ne sont que rarement référées à l‘« ordre » qui peut y régner, mais plutôt aux différents événements qui s‘y déroulent. Historiquement, d‘ailleurs, la réflexion sur la gestion et l‘organisation de la classe est issue du courant de l‘éducation nouvelle, qui fait de la discipline une conséquence plutôt qu‘un objet de l‘organisation scolaire (Nault & Fijalkow, 1999[23]). De ce fait, il sera difficile de reprendre point par point le plan utilisé pour présenter les travaux internationaux, organisé du point de vue des conduites efficaces de l‘enseignant. Il s‘agit plutôt ici de connaître les pratiques enseignantes en contexte, avec une attirance assez forte pour une approche systémique. Ces spécificités font, d‘une part, que la recension des travaux français ne fait pas apparaître d‘études spécifiquement reliées à la gestion de la discipline, comme cela a été le cas pour les travaux internationaux et, d‘autre part, que les résultats de recherche consistent plus souvent à des énoncés de typologies, quand les travaux internationaux se focalisent plus sur des énoncés de prescriptions. Ainsi, Altet (1994b[24]) propose d‘identifier et de décrire les dimensions du processus enseignement-apprentissage au sein du paradigme des « processus interactifs contextualisés ». Ses travaux abordent les comportements interactifs des enseignants, ce qui lui permet de décrire différents styles pédagogiques qui rendent compte de la manière dont les enseignants résolvent les problèmes qui se posent en classe. Dans l‘analyse même des interactions verbales, Altet (1994b) distingue plusieurs épisodes qui rendent compte de la structure de communication :
- « les épisodes inducteurs, orientés et menés par l‘enseignant, dominants dans le dialogue interrogatif-informatif-évaluatif ;
- les épisodes médiateurs, qui comprennent plusieurs échanges suivis venant des initiatives et contributions des élèves ; ces épisodes se présentent davantage selon un mode intégratif, plus réciproque dans un processus de communication de type écoute-échange ;
- les épisodes adaptateurs, qui sont des épisodes régulateurs, contractuels, centrés sur l‘apprenant, personnalisés, avec un mode de communication interactif, où le mécanisme d‘adaptation enseignant-élève est véritablement réciproque, où chacun réagit à l‘autre dans un processus de communication [… ] est de type compréhension-adaptation (temps de parole des partenaires identique ou presque), mode interactif minoritaire dans l‘enseignement qui ne se rencontre que ponctuellement dans des structures différentes du groupe classe à 30 élèves, par exemple dans des groupes de besoin où des activités diversifiées et des remédiations individualisées, personnalisées sont mises en » (Altet, 1994b, p. 132)
Dans une même veine, Bru (1991)[25] a particulièrement étudié la variabilité interindividuelle, mais aussi, et peut-être surtout, sur la variabilité intra-individuelle des conduites enseignantes. Il montre comment ces dernières se construisent à partir d‘un certain nombre de dimensions et comment les variations de l‘une d‘entre elles entraînent des variations de modalités des autres, le tout aboutissant à un registre de pratiques tout à fait diversifié. A l‘inverse de certains travaux internationaux qui portent leur attention, pour les décrire et les expliquer, sur les différences interindividuelles et traitent les différences intra-individuelles comme des erreurs aléatoires (par définition non expliquées), Bru avance que la variabilité des pratiques pour un même enseignant serait une caractéristique inhérente à la pratique enseignante et devrait être étudiée en tant que telle afin de saisir quelles en sont les raisons. Dans ce but, Altet, Bressoux, Bru et Lambert (1994, 1996)[26] ont construit un outil (OGP, organisation et gestion pédagogique) pour rendre compte des éléments constitutifs des interactions enseignant-élèves. Cet outil classe les interventions de l‘enseignant parmi les dimensions suivantes : l‘information, l‘évaluation, l‘organisation, la stimulation des apprenants, la régulation, et la gestion de la classe et du climat. Les résultats sont trop nombreux pour être détaillés ici, mais notons qu‘ils confirment que la plupart des interactions sont à l‘initiative du maître (61 %) plutôt qu‘à celles des élèves (39 %), et que cette répartition est indépendante des disciplines observées (français et mathématiques). Des recherches se sont également intéressées à quantifier les types d‘interventions verbales des enseignants. Legrand-Gelbert (1988), dans le cadre de recherches en linguistique, a montré que[27] :
- Deux tiers des interventions reviennent au maître et un tiers aux élèves. Les interventions du maître sont à parties égales des questions, des informations ou des réponses, et des ordres ou de l‘évaluation. Les interventions des élèves sont pour deux tiers des réponses, pour un tiers des demandes de réponse ou des informations spontanées.
- La répartition des types de questions est significative de la méthode employée par l‘enseignant, les questions fermées représentant 70 % de l‘ensemble des questions.
- Le nombre d‘échanges verbaux est très soutenu et important. On compte en moyenne 200 échanges pour 55 minutes de cours, soit environ 16 secondes par échange. Lorsque l‘échange s‘accélère, certains élèves seulement fournissent les réponses sollicitées, les autres décrochent.
L‘aspect fonctionnel des interactions verbales (consignes et louanges) a été également étudié. Clanet (1997)[28] a par exemple relevé, au cycle 2 de l‘enseignement primaire, lors d‘une séquence de mathématique ou de français, en moyenne 37 incitations positives et 2 incitations négatives par heure, l‘enseignant ne révélant la solution qu‘une seule fois. La variété est importante : certains enseignants n‘adressent que des incitations à dominante positive, d‘autres adressent plus d‘incitations négatives que positives.
Les interactions concernant l‘apprentissage ont aussi fait l‘objet de recherches en France. Barré-De Miniac (1997)[29] indique qu‘en milieu favorisé, avec un public scolaire familier du système scolaire français, les enseignants tendent à structurer très fortement les situations et les tâches, avec des consignes très explicites, dont la formulation (et souvent la reformulation par les élèves) est soigneusement préparée, alors qu‘en milieu hétérogène et cosmopolite, plus défavorisé (et par conséquent avec un public qui présente une moindre connivence avec le système scolaire), les situations sont moins explicitement structurées, les enseignants tendant à utiliser une démarche par imitation et découverte progressive par l‘élève de la tâche à accomplir. Plus précisément, et toujours dans le domaine de l‘enseignement du français langue maternelle, Goigoux (2001)[30] a utilisé une approche ergonomique pour mettre en évidence, chez l‘enseignant, quatre schèmes principaux dans les séquences de découverte de texte (séance de lecture en cycle 2): deux schèmes très spécifiques aux savoirs et savoir-faire enseignés (schème de guidage de la construction collective du sens du texte ; schèmes d‘aide au traitement des mots) ; deux autres partageaient des traits communs à d‘autres disciplines d‘enseignement (schème d‘ajustement et de prise en compte de l‘individu dans le collectif ; schème de régulation de l‘attention des élèves). Toujours en lien direct avec l‘apprentissage, Borgès et Raby (2000)[31], ont mené une étude de cas afin d‘étudier les interactions d‘enseignants de langues dans l‘enseignement supérieur, médiatisées par les technologies de l‘information et de la communication (TIC). Deux types de cours faits par cinq enseignants ont été observés durant une année : un cours audio-visuel « traditionnel » d‘expression spontanée, dans une salle de langue classique et un cours en « autonomie guidée », sur ordinateur, avec un enseignant-tuteur. Les résultats montrent que, dans la situation en autonomie guidée, les interactions enseignants-étudiants s‘amenuisent du fait des nombreuses tâches supplémentaires (mise en route des ordinateur, assistance technique, dépannage, tâches administratives). L‘effet des TIC ne va donc pas dans le sens attendu.
- Les attitudes négatives de l’enseignant : facteurs de blocage sur le processus d’apprentissage de l’élève
- Le manque de confiance des enseignants dû à des connaissances conceptuelles et phénoménologiques de base insuffisantes
Dans beaucoup de pays, le nombre de professeurs est très élevé, et bon nombre de ceux qui ne sont pas passés par le système traditionnel d’éducation ne sont pas préparés à exercer ce métier.
- Le fait que la plupart des enseignants agissent en général comme des fournisseurs de renseignements (Brown, 1992)[32]
Dans le cas présent, le modèle de base de l’enseignement est : a) la spontanéité ; b) la conviction que tous les élèves sont identiques et prêts à suivre le même type d’instruction ; c) l’acceptation des modèles enseignés par les professeurs ; et d) la manque de disponibilité quant aux façons d’apprendre et de penser des élèves (Halwachs, 1975)[33].
Ceci est partiellement dû à la conviction profonde qu’enseigner les sciences, c’est faire les sciences, et non un processus, une manière de penser. De bonnes pratiques dans l’enseignement de la physique sont censées développer la pensée critique, la capacité à résoudre des problèmes et préparer à l’interprétation des données ainsi qu’acquérir de bonnes connaissances en communication. Par des formes d’actions non explicites, les attitudes des enseignants trahissent un manque de confiance dans la mise en place de nouveaux projets et rejettent de manière passive les nouvelles méthodes et technologies. Reay (1975)[34] dit que l’une des raisons de cette attitude pourrait être le peu de temps de préparation dont disposent les enseignants durant leur journée de travail. Une autre explication pourrait être le style personnel du professeur dans l’interprétation des programmes, contenus et pédagogie (Sacristan, 1989)[35] ; Gallard et Gallagher, 1994[36]). Des études menées au Brésil (Garrido et al. 1991[37]) montrent que les enseignants éprouvent un intérêt modéré pour les innovations à l’école et font peu de concessions.
- Le manque de cohérence entre les attitudes des enseignants en classe et leur conviction exprimée à propos de méthodes actives d’interaction
L’auteur Black (1989)[38] rend compte d’une étude menée par exemple sur une classe de physique où le professeur était convaincu de sa capacité à donner des cours de science interactifs. Après l’étude, il s’est avéré qu’il parlait à sa classe 90% du temps. Des études portant sur des activités en laboratoire organisées autour de situations d’apprentissage montrent que les élèves écoutent le professeur plus de 50% du temps (Hegarthy-Hazel, 1990)[39]. Carvalho (1993)[40] fait état de la dichotomie entre le discours libéral et l’action répressive qui domine les cours de formation des enseignants. Une étude des convictions et opinions des professeurs de sciences au sujet de la nature de la science et de son enseignement (Souza Barros et al., 1987)[41] a montré que même si les professeurs de physique étaient moins dogmatiques à propos de la nature de la science et approuvaient les modifications apportées aux programmes ainsi que les méthodes actives en classe, leur comportement en classe était tout autre. Koualidis (1987)[42] a découvert que les méthodes pédagogiques des professeurs de sciences sont plutôt traditionnelles, puisqu’elles donnent une grande importance à la présentation des connaissances et à la capacité des élèves à penser en termes abstraits.
- Les enseignants considèrent en général l’échec scolaire comme le résultat d’une carence socio-psychologique due aux conditions sociales de l’enfant et de sa famille
On attend peu de ces enfants, et ceci génère de mauvaises pratiques d’enseignement. Les enseignants ont par conséquent tendance à rejeter la responsabilité de leur propre inefficacité sur les élèves (Carvalho et Gil-Perez, 1993[43] ; Alves – Mazotti, 1994[44]).
Les statuts professionnel et social, les infrastructures scolaires, les bibliothèques peu fournies, les laboratoires mal équipés, les mauvaises conditions de sécurité, etc., créent de nouvelles variables qui influent sur les attitudes des enseignants les plus dévoués et les mieux préparés.
L’analyse faite par un professeur du secondaire (Cedrez, 1993)[45], qui vient d’un pays qui impose l’application de programmes officiels par l’inspection régulière des classes, donne une bonne représentation de ce qui se passe dans la salle de classe : » le programme officiel de physique ne peut être couvert avec les connaissances mathématiques élémentaires que les élèves ont acquises auparavant. Je dois donc entraîner les élèves à résoudre des problèmes au lieu de les aider à comprendre les phénomènes et apprendre la physique ».
Souligner certains aspects négatifs permet de définir des actions afin de modifier le cadre général. Il y a un fort consensus sur le fait que les enseignants, à qui l’on demande rarement de réfléchir sur leur propre manière d’enseigner, ne feraient que répéter le contenu des manuels. Puisque les enseignants jouent un rôle essentiel dans toute réforme du système éducatif ils devraient être sollicités pour comprendre les nouvelles propositions et participer à leur formulation, pour analyser leur efficacité et modifier leur comportement, leurs conceptions personnelles sur la manière d’enseigner et sur le contenu de leurs cours. La plupart des enseignants sont influencés par la manière dont ils ont eux-mêmes été formés et ont tendance à reproduire ce modèle.
La liste des différentes compétences présentées ci-dessous, nécessaires mais insuffisantes pour assurer de bonnes méthodes d’enseignement et d’apprentissage, n’est en aucun cas exhaustive mais fait l’objet d’un fort consensus au sein de la communauté des chercheurs.
Il est à noter tout d’abord, que la psychologie cognitive et sociale, la linguistique et l’anthropologie. La domination actuelle et l’acceptation du constructivisme comme seul paradigme d’enseignement valable, la compréhension insuffisante de la réelle signification du mot (Moreira, 1991)[46] ainsi que le modèle des théories d’apprentissage tel qu’il est appliqué aux classes, ne font qu’ajouter à la confusion qui règne sur tout le processus d’enseignement depuis les vingt dernières années. Zanarini (1992)[47] discute quelles conceptions du savoir sont essentielles à l’exercice d’activités scientifiques, à l’exploration de la complexité des processus sur lesquels est construit le savoir scientifique ainsi que leurs relations avec le domaine où règne effectivement le sens commun. Il examine les implications sur des perspectives constructivistes de l’enseignement des sciences, plus particulièrement au cours des premières années d’enseignement. En étudiant les relations entre le langage, le savoir et le développement psychologique, qui traitent de la construction partagée du savoir, on peut mentionner trois aspects : a) le pouvoir et le contrôle de l’enseignant sur la construction du savoir de ses élèves, b) l’adaptation du langage à l’école et c) les liens entre le discours en classe et le savoir.
Ensuite, il est important de faire l’évaluation. Il est nécessaire de comprendre et d’appliquer à la fois des méthodes d’évaluation qualitatives et quantitatives. Comme la plupart des enseignants n’ont jamais suivi de cours formels sur ce sujet, ils évaluent leurs élèves principalement dans le cadre du passage en classe supérieure. Peu de connaissances conceptuelles sont contrôlées. Les instruments d’évaluation utilisés, peu construits et souvent non validés, reflètent en grande partie les connaissances transmises par le professeur sous forme factuelle. La conséquence est que beaucoup d’étudiants ont de mauvais résultats lors d’évaluations externes, comme le montrent les résultats des examens d’entrée à l’université, des études sur les connaissances scientifiques de base, etc.
Après, dès lors qu’il y a une utilisation pertinente des anciennes et nouvelles technologies (laboratoire, documents écrits, vidéo, multimédia, logiciels, Internet, etc.). Beaucoup d’enseignants n’ont pas accès à du matériel didactique ou aux technologies modernes d’éducation. Dans de nombreux cas, la manière dont les innovations sont introduites n’incite pas à leur acceptation. La modernisation des écoles ne signifie pas forcément l’acquisition de nouveau matériel, des technologies d’enseignement les plus sophistiquées, etc. Cet aspect est d’actualité et en raison de l’accroissement exponentiel des connaissances, sa mise en œuvre à large échelle devrait être basée sur une recherche poussée portant sur l’impact éducatif des nouvelles technologies. Pour Mittchell & De Jong (1990)[48], et Thornton (1993)[49], un bon enseignement nécessite une variation continue des activités intellectuelles spécifiques de celui qui apprend et un grand nombre de stratégies pédagogiques.
Enfin, il faut appliquer les résultats obtenus dans le domaine de la recherche à celui de l’enseignement. C’est probablement le domaine qui offre le plus grand nombre de possibilités de modifier les méthodes actuelles d’enseignement. Beaucoup de professeurs n’ont pas accès à cette documentation particulière. Il existe un fort besoin de publier des journaux, bulletins d’information sur les derniers résultats et instruments de recherche, résumés d’ouvrages récents, présentation de matériels pédagogiques, de vidéo, multimédia, expériences, etc. On s’attend à ce que la disponibilité des réseaux informatiques permette, dans le futur, de résoudre au moins partiellement ce problème.
II] Les ressources, moyens et méthodes du corps enseignant pour vérifier le processus de compréhension
Le terme « interaction » semble poser a priori moins de problèmes de définition, car, dans le champ de recherche sur la pensée des enseignants, ce terme désigne l‘activité de l‘enseignant dans sa classe, en présence de ses élèves. Ainsi, le champ de recherche sur l‘interaction des enseignants paraît, d‘un premier abord, clairement délimité d‘un point de vue spatial et temporel. Toutefois, une réflexion plus approfondie fait apparaître de nombreuses difficultés pour délimiter ce champ. Tout d‘abord, à propos de la nature de l‘interaction : se limite-t-elle à un travail collectif préalable. Cette question paraît encore moins facile à régler, une autre difficulté apparaît à propos des limites spatiales et temporelles dont on a parlé. L‘interaction se réalise-t-elle uniquement entre enseignants et élèves ou faut-il considérer d‘autres partenaires (parents, collègues, etc.)? Ainsi, ne peut-on concevoir les corrections de copies comme une phase d‘interaction décalée dans le temps, où l‘enseignant adresse un message à l‘élève, que ce dernier lira ultérieurement et auquel il pourra réagir d‘une manière ou d‘une autre ? De même, un enseignant planifiant sa leçon n‘est-il pas dans une forme d‘interaction anticipée avec ses élèves ? L‘interaction doit-elle se limiter à la classe ou intégrer des « espaces » plus vastes tels que l‘école ? L’utilisation de l’écrit et l’exploitation de ses résultats.
L‘examen de la littérature récente confirme l‘abandon progressif, entamé déjà dans les années 1980, de l‘approche processus-produit. Cette approche, essentiellement fondée sur des méthodes quantitatives, a souvent été assimilée au béhaviorisme en ce qu‘elle vise à mettre en relation des comportements observables d‘enseignants à des résultats d‘élèves. De ce fait, elle a subi les critiques des courants qui se sont construits contre le béhaviorisme, même si certains auteurs influents, comme Berliner (1990) , contestent une assimilation complète des travaux processus-produit au béhaviorisme. Pour ce dernier, ces travaux sont moins marqués par un ancrage théorique béhavioriste que par un fort souci pragmatique qui les rapproche de la psychologie appliquée. Plus largement, on constate même, dans la période récente, un recul des méthodes quantitatives dans la recherche en éducation. Ainsi, dans la partie « méthodologie » du 4e Handbook of research on teaching (Richardson, 2001) , un seul chapitre, d‘environ 40 pages, est attribué aux méthodes quantitatives alors que huit le sont à des méthodes qualitatives, pour un total de plus de 150 pages. Nombre des courants ultérieurs sont nés en réaction contre les travaux processus-produit. Il en est ainsi en particulier des approches cognitivistes « classiques » qui, à partir des années 1970, se sont donné pour objet l‘étude de la pensée des enseignants. Il s‘agit, dans ce cadre, en considérant l‘enseignement comme un processus de traitement de l‘information, d‘inférer, à partir de comportements observables, l‘activité cognitive qui les génère. Ce courant est lui-même actuellement supplanté par d‘autres modes d‘approche, plus qualitatifs, visant davantage à prendre en compte le contexte, les situations d‘interaction, ou encore la subjectivité des acteurs. Ainsi, la phénoménologie exerce une influence qui s‘est assez fortement affermie au cours des deux dernières décennies sur les travaux en éducation. Selon cette approche, aucune réalité n‘existe en dehors des consciences individuelles et il s‘agit donc de saisir l‘expérience vécue subjectivement à l‘aide de matériaux narratifs (essentiellement par des études de cas) Les approches interactionnistes sont elles aussi très influentes actuellement. Elles mettent l‘accent sur le caractère socialement construit de la cognition humaine et définissent l‘activité enseignante comme une interaction fondée essentiellement sur le langage : « L‘enseignement serait composé d‘activités organisées par l‘interaction sociale, et dépendant d‘un répertoire complexe d‘opérations – langagières – sur les connaissances. Ce répertoire complexe d‘opérations serait marqué par les interactions sociales préalables qui le structurent » (Casalfiore, 2000, p. 8). Largement fondés sur des méthodes sociolinguistiques d‘analyse du discours ou d‘analyse conversationnelle, ces travaux portent là encore beaucoup sur des cas particuliers dont il s‘agit de décrypter finement le jeu des interactions langagières.
Enfin, le courant de la cognition située jouit actuellement d‘un engouement certain dans les travaux récents qui concernent l‘étude de l‘activité enseignante. Ce courant « situationniste » partage avec le courant interactionniste le postulat de constructivisme social et le souci d‘accorder au contexte une place fondamentale pour la compréhension de l‘activité enseignante. Il s‘en sépare toutefois en postulant qu‘on ne peut étudier séparément l‘individu et le monde qui l‘entoure, car c‘est de leur interaction que la cognition émergerait. On note également un intérêt grandissant dans le cours de la dernière décennie pour la recherche opérée par les praticiens (practitioner research). On peut en voir une illustration par le fait que, pour la première fois, le 4eHandbook of research on teaching y consacre un chapitre (Zeichner & Noffke, 2001) . Au plan de la recherche française plus particulièrement, l‘intérêt pour le praticien s‘est aussi opéré par une approche fondée sur la psychologie ergonomique. Il s‘agit de prendre au sérieux l‘idée que le travail de l‘enseignant peut avoir des éléments en commun avec d‘autres travaux a priori très différents (travail d‘un opérateur sur une machine, par exemple) et que, à ce titre, il est justiciable d‘une analyse qui peut utiliser des concepts et des méthodes communs. La tradition française de la psychologie ergonomique (voir par exemple Leplat, 1997) tient comme essentielle la distinction entre la tâche prescrite et l‘activité effectivement réalisée. Ce n‘est pas une approche « situationniste », car elle postule que les principes de l‘action ne résident pas uniquement dans la situation où se déroule l‘action elle-même, mais qu‘ils sont aussi à rechercher à l‘extérieur de la situation. Dans l‘approche ergonomique, « l‘extérieur » est essentiellement constitué par les prescriptions du travail ; l‘étude de leur interprétation, de leur redéfinition par les individus, est considérée comme fondamentale. On aurait tort de croire que cet « extérieur » n‘est qu‘un niveau supérieur ajouté à l‘analyse du travail, un simple contexte éloigné de l‘action : cet « extérieur » n‘est en effet pas « externe » à l‘activité des individus, il lui est consubstantiel. On peut certes avancer que l‘ergonomie n‘est pas la première à mettre l‘accent sur le fait que les principes de l‘action peuvent être extérieurs à la situation dans laquelle elle se déroule. Certains sociologues par exemple, en mettant l‘accent sur les structures sociales ou sur les dispositions des individus, ont mis en garde contre une vision purement interactionniste de l‘action. L‘originalité de l‘approche ergonomique tient dans le fait de rechercher ces principes dans les prescriptions du travail et dans leur interprétation par les individus. Cette « extériorité » des principes de l‘action a été certainement négligée par plusieurs courants de recherche en éducation. C‘est le cas, par exemple, des travaux processus-produit, qui se sont focalisés sur le décompte de comportements observables et qui ont fait de certains comportements observables les principes exclusifs d‘autres comportements observables. C‘est le cas également de certains travaux ethnographiques ou microsociologiques qui ont étudié la classe comme une microsociété quasi autonome, générant ses propres règles, normes et croyances. Cette vision nous semble facilitée par le fait que la classe est un espace clos aux limites clairement délimitées, dont l‘analyse peut sembler autosuffisante. On peut également voir là les limites des approches interactionnistes qui, en étudiant la situation pour elle-même, se sont privées d‘une compréhension plus large de l‘action.
Une étude plus approfondie serait nécessaire pour détecter les origines des divers courants et leurs emprunts mutuels, mais il nous semble que l‘évolution des travaux que nous venons de brosser très rapidement (délaissement relatif des méthodes quantitatives, accent porté sur la subjectivité des acteurs et sur les significations locales, intérêt croissant pour la recherche des praticiens) reflète sans doute pour une part l‘influence du relativisme, particulièrement forte actuellement dans le domaine des sciences sociales (Boudon & Clavelin, 1994[50]) . Le relativisme, dans sa version radicale « postmoderne » (cf. le « programme fort » de Bloor, 1983[51]), postule que les faits scientifiques sont des constructions sociales n‘ayant pas plus de vérité que d‘autres représentations de la réalité. En portant l‘idée qu‘il n‘y a pas d‘objectivité de la connaissance, il a fait naître, nous semble-t-il, un fort scepticisme dans la communauté des chercheurs eux-mêmes. Dans le cas de la communication par écrit et selon Philippe Breton, chercheur au CNRS, s’exprimant au colloque de Poitiers du 25 mars 1999, trois registres de communication se présentent :
- la communication expressive : récit, rhétorique, littérature : considéré comme l’élite ;
- la communication informationnelle : considéré comme la meilleur par les élèves, car selon eux, information = connaissance ;
- la communication argumentative : c’est écrire et publier pour
- convaincre, elle est très peu considérée.
Ils sont importants puisqu’ils permettent la prise de conscience de l’élève. On va prendre l’exemple bien connu d’un professeur qui constate que les élèves sont particulièrement peu soigneux pour la présentation des travaux et s’en contentent allègrement ! La réaction traditionnelle consiste à dire et redire aux élèves qu’il faut présenter sérieusement ses travaux, que c’est important, que ça compte pour des points. Ces conseils sempiternels, que l’on a distribués sans compter, sont pourtant aussi ennuyeux qu’inefficaces comme le montre fort bien Jacques André. Reprenant l’idée d’une participante à nos formations, on a, un jour, adopté une attitude pédagogique très différente : annoncé aux élèves: « Ce matin, c’est décidé, on va vous faire étudier un texte pendant une demi-heure et de vous interroger ensuite … » On leur ai distribué le texte à étudier, volontairement présenté d’une manière très peu soignée (ratures, pas de structure, écriture illisible, …). Face à cette situation paradoxale, la réaction des élèves ne s’est pas fait attendre. « Qu’est-ce que c’est cette feuille cochonnée … », « C’est impossible d’étudier dans un texte aussi mal présenté … » On est alors entrée dans le jeu et j’ai incité chaque élève à s’exprimer, jusqu’au moment où un élève subtil s’est exclamé: « Ah ! Madame, c’est pour ça que vous voulez toujours que nos travaux soient bien propres ». Placés dans une telle situation, les élèves découvrent par eux-mêmes les réponses à la question classique, mais trop souvent inexprimée. « A quoi ça sert ? » Les élèves se rendent compte que le fait de soigner ses travaux ne sert plus uniquement à faire plaisir au professeur (exigeant ou maniaque !) ou à avoir de meilleures notes, mais permet d’étudier plus vite, mieux et avec un meilleur rendement.
Ces discussions en classe sont aussi des moments privilégiés pendant lesquels chaque élève peut s’exprimer librement et a le sentiment d’être écouté, d’être reconnu comme « apprenant ». On s’est rendu compte que, dans la plupart des cas, cette prise de conscience est la phase initiatrice de la motivation de nos élèves et en amène en général quelques uns à changer spontanément de comportement. Ce changement de comportement est toutefois éphémère si aucune autre action pédagogique en rapport avec cette prise de conscience n’est entreprise dans les jours ou les semaines qui suivent. Cette continuité est d’ailleurs indispensable à la réussite de l’ensemble de la méthode.
La question posée est de savoir quel est le rôle des activités expérimentales des élèves dans leurs apprentissages en Sciences physiques et chimiques ? Cette formulation recouvre en plus deux questions auxquelles nous allons tenter de donner d’abord des réponses. La première question consiste à demander la place des séances de travaux pratiques dans l’enseignement des sciences-physiques et chimiques ? La réponse à cette question est facile car il suffit de regarder la part de l’horaire affecté à ce type d’enseignement : le temps passé au laboratoire peut aller jusqu’à environ 50% de l’horaire (notamment dans les filières de lycées encore appelées actuellement technologiques) et de considérer la place de l’évaluation des savoir-faire expérimentaux dans les examens, qui, de très faible, voire inexistante il y a quelques années, ne cesse de prendre de l’importance.
Pour la deuxième question nous voulons savoir quelle est notre perception de la pratique expérimentale ? La réponse à cette question est autrement plus délicate car elle conduit souvent à remettre en cause les pratiques pédagogiques usuelles.
Pour répondre à la question de savoir le rôle des activités expérimentales des élèves dans leurs
apprentissages en sciences physiques et chimiques, nous dirons que: Grâce aux travaux pratiques, les sciences expérimentales doivent en principe stimuler des qualités particulières chez les élèves :
- curiosité,
- observer,
- se poser des questions esprit d’initiative et ténacité : concevoir et réaliser des expériences,
- sens critique : construire sa connaissance
La démarche expérimentale, en effet, aide à : maîtriser les concepts qui gèrent le fonctionnement d’un dispositif articuler pratiques expérimentales et appropriation de connaissances plus théoriques et les mémoriser (car on retient mieux lorsque l’on fait).
- Les travaux pratiques constituent un excellent moyen d’acquérir des connaissances et des méthodes.
On pourrait même dire que c’est leur objectif essentiel, d’où le rôle très important joué par l’activité « exploitation des résultats expérimentaux ». Il faut aussi remarquer que les savoir-faire théoriques et les savoir-faire expérimentaux sont en quelque sorte des pré-requis pour la pratique d’une démarche scientifique : ce qui distingue fondamentalement la démarche scientifique des savoir-faire de base, c’est le degré d’autonomie dans la démarche et la décision.
Mais la démarche scientifique va bien au-delà du simple moyen d’acquérir des connaissances limitées uniquement au domaine de la Physique et de la Chimie. Comme « pour connaître, il faut imaginer en liberté et réfuter avec rigueur, ne rien admettre par argument d’autorité mais par raison et observation, expérimentation et vérification », la démarche scientifique est donc, en plus, une excellente formation de l’esprit. Et les travaux pratiques participent à cet acte éducatif.
- La démarche scientifique participe à l’éducation en général.
« En apprenant les Sciences on apprend à raisonner » (Georges CHARPAK) (physicien français contemporain, prix Nobel)
On a tiré quelques avantages mais en conclusion, on peut en déduire que les échanges ont été peu nombreux. La cause de ce manque est uniquement l’absence d’un réseau de communication. Pour qu’une communication puisse se faire efficacement en groupes nombreux, il faut intégrer un de ces 3 types de réseaux (Allemand, 2000) :
- le réseau modélisateur : où les intervenants ont des interactions sociales simples mais fortes, c’est le cas de la famille ;
- le réseau empirique : où les acteurs des échanges ont des liens informels entre eux vers un but, c’est l’exemple du projet professionnel ;
- le réseau critique : où les participants ont un intérêt commun idéologique qui ressort dans les discours produits sur le thème, c’est la religion ou le parti politique
Du côté de l’enseignement, plusieurs travaux de recherche ont montré que la démarche expérimentale suivie dans la pratique didactique consiste en une méthode stéréotype en quatre (4) étapes (Johsua, 1989 ; Giordan, 1978). C’est ainsi que dans la quasi totalité des manuels des années quatre-vingt-dix, l’agencement des concepts et des lois se fait selon une démarche qui commence par des observations, en passant par la réalisation d’une expérience prototypique qui sert le plus souvent de support à l’induction de la loi physique. En somme la démarche expérimentale suivie par les manuels scolaires est en gros composée des étapes suivantes :
- Observations ;
- Expérience prototypique ;
- Interprétation ;
- Formulation de la loi.
Pour les tableaux, ils sont utilisés pour l’élaboration au tableau, par exemple, avec l’ensemble des élèves, d’un brouillon de réponse à un questionnaire donné. Il est aussi possible de réaliser une synthèse au tableau de toutes les idées des élèves de la classe.
Il est faisable de considérer un exemple. Chaque année, on considérera que l’on constate que les élèves de quatrième ne prennent note que si j’écris au tableau ou que l’on précise « Attention, c’est important, vous devez noter ». Or, l’on s’est fixé un objectif global, celui de les former à prendre des notes au vol. Dans le cadre de cet objectif complexe, On a rassemblé au fil des expériences des activités et des exercices répartis sur les trois dernières années du secondaire.
Les NTIC sont des technologies à développer pour plusieurs raisons :
– la nécessité d’initier les élèves aux NTIC, car c’est un outil d’avenir et que ce besoin de savoir-faire se fera de plus en plus présent au fur à mesure de leur avancée dans leur cursus de formation. En utilisant cette technologie comme outil de travail, on espérera stigmatiser dans l’esprit de l’élève, souvent confus, la notion de travail scolaire associé à l’ordinateur. En effet, bien souvent, l’informatique est trop souvent liée à l’idée de jeux ;
– l’intégration des NTIC se faisant efficacement en appliquant le paradigme d’apprentissage elle apportera donc à l’élève une nouvelle façon d’apprendre. Ce nouveau cadre pour apprendre développera une nouvelle relation vis-à-vis du savoir et un nouveau rapport de lui-même vis-à-vis de sa propre formation ;
– l’exploration pour l’enseignant de la faisabilité de la méthode est nécessaire dans un premier temps pour une application plus efficace secondairement. Les limites, les problèmes, les avantages clairement identifiés permettront d’améliorer la réalisation de nouvelles séances. Il faut telles ou telles conditions pour atteindre les objectifs ;
– les conditions de travail sont telles que l’exercice de travail scolaire avec les NTIC rend l’enseignant tributaire d’autres personnes. Cela oblige donc au travail en équipe.
III] Propositions en vue d’améliorer le processus de compréhension des enseignants par leurs élèves
Un grand nombre des travaux sur la gestion en classe ont porté sur la gestion du temps scolaire, qui est apparue comme une dimension fondamentale de l‘activité de gestion de classe et, plus largement, de l‘activité d‘enseignement. l‘inverse de la structure des interactions verbales, dont on a vu dans la section précédente qu‘elle était globalement invariante inter-enseignants (même si des variations intra-individuelles ont été montrées), la distribution du temps scolaire peut varier fortement d‘une classe à l‘autre, voire d‘un jour sur l‘autre pour un même enseignant.
La recherche internationale s‘est essentiellement focalisée sur la relation entre la gestion du temps et les acquisitions des élèves, d‘autant que les modèles très influents de Carroll (1963)[52] puis de Bloom (1974)[53], font du temps un facteur fondamental dans les acquisitions des élèves. On a assisté à une spécification de plus en plus fine de cette relation entre temps et acquisitions, qu‘on peut suivre en trois étapes.
Tout d‘abord, les chercheurs ont étudié le temps globalement alloué à une discipline, que ce soit le temps prescrit d‘un point de vue institutionnel (qui peut varier d‘un état à l‘autre, d‘un district à l‘autre, etc.), ou du point de vue du temps effectivement consacré par les enseignants. Ces travaux ont révélé une très grande variabilité, interclasse et même intra-classe, de l‘utilisation du temps scolaire, ce qui confirme l‘idée d‘espace de liberté dans l‘organisation de la classe. En revanche, les résultats concernant le lien entre utilisation du temps et acquis des élèves paraissent assez contradictoires, bien que faisant plutôt état, en moyenne, d‘une corrélation positive mais faible entre temps alloué et acquisitions des élèves.
Dans un deuxième temps, les chercheurs se sont focalisés sur le temps d‘engagement des élèves dans la tâche, arguant du fait que c‘est surtout le temps que consacre l‘élève à une activité qui détermine ses acquisitions. Leurs travaux n‘ont pas seulement porté sur la relation entre temps d‘engagement et acquisitions, mais également sur les modes de gestion de la classe susceptibles de faire varier ce temps d‘engagement. Les résultats montrent généralement une corrélation positive entre le temps d‘engagement des élèves et leurs acquis, même s‘il faut noter que, indépendamment du niveau des élèves, il existe un seuil où plus de temps alloué ne produit pas davantage d‘apprentissage. Toutefois, il reste à interroger, sur un plan méthodologique, la mesure de cette durée d‘engagement : si l‘on peut quelquefois affirmer que ce que fait un élève est manifestement en rapport avec une tâche proposée, il reste impossible de rendre compte de ce que traite réellement l‘élève, à l‘instant précis où il est observé.
Dans une troisième étape, initiée par la Beginning Teacher Evaluation Study (BTES), les chercheurs ont construit la notion d‘Academic Learning Time (ALT), qui prend spécifiquement en compte les notions étudiées, l‘engagement des élèves dans l‘apprentissage desdites notions et la qualité de l‘enseignement (mesurée indirectement par le taux de réponses exactes données par les élèves aux questions de l‘enseignant). Les résultats de la BTES montrent que la corrélation entre l‘ALT et les acquisitions est plus forte que la somme des corrélations qu‘entretient chaque élément avec ces mêmes acquisitions.
On notera finalement que ces travaux sont finalement moins orientés vers l‘analyse de l‘activité des enseignants que vers l‘étude des conséquences des variations dans la gestion du temps sur les apprentissages des élèves. Si le constat d‘une forte variabilité tant inter-enseignants qu‘intra-enseignants (d‘un jour sur l‘autre) a bien été établi, il nous semble que l‘étude des facteurs susceptibles d‘expliquer ces variations reste largement à faire. D‘ailleurs, les modèles qui fondent l‘étude de la gestion du temps en classe (Bloom, Carroll) concernent les apprentissages des élèves, et non directement l‘activité des enseignants.
La recherche en France apparaît singulièrement lacunaire dans le domaine. Elle est surtout dominée par les travaux de chronopsychologie et, dans une moindre mesure, par les évaluations des expériences d‘aménagement du temps scolaire, issues du champ de la recherche en sciences de l‘éducation, mais aussi par les travaux de certains chercheurs en didactique des mathématiques.
Les travaux sur la distribution du temps scolaire ont en commun de s‘intéresser aux variations institutionnelles du temps scolaire et non aux différences de gestion de ce temps par les enseignants eux-mêmes. Les quelques études réalisées à ce jour ont généralement montré une grande variabilité inter-enseignants dans la gestion du temps scolaire. Ainsi, dans une étude conduite auprès de 30 classes de CE2 observées sur 2 semaines, le temps de travail disponible en classe variait significativement d‘une classe à l‘autre : le temps d‘enseignement du français pouvait varier dans un rapport de 1 à 4, et le temps d‘enseignement des mathématiques pouvait varier dans un rapport de 1 à 3 (Altet, Bressoux, Bru, & Lambert, 1994[54], 1996[55]). Ces résultats confirment, dans un système éducatif très centralisé, les variations considérables dans la gestion du temps scolaire qui avaient été dégagées dans les systèmes éducatifs anglo-saxons (américain en particulier) qui, eux, sont très décentralisés.
Très peu nombreux également sont les travaux qui ont tenté d‘établir une relation entre la gestion du temps scolaire (qu‘elle soit observée ou rapportée par les enseignants) et les acquis des élèves. Les quelques travaux réalisés tendent toutefois à montrer une influence positive de la durée consacrée à l‘enseignement d‘une discipline sur les acquis des élèves dans cette même discipline. Par exemple, Suchaut (1996)[56], montre qu‘un élève de maternelle scolarisé dans une classe où la durée hebdomadaire des activités d‘apprentissage s‘élève à 9 heures bénéficiera de 3 points supplémentaires par rapport à un élève comparable scolarisé dans une classe où seulement 4 heures sont consacrées à ces mêmes activités. Des données comparables ont été observées pour des élèves de cours préparatoire, même si, comme pour les travaux internationaux, il existe un seuil au-delà duquel plus de temps alloué ne procure pas plus d‘apprentissage, mais parfois légèrement moins.
Un chercheur en didactique des mathématiques (Chevallard, 1985[57]) a identifié un temps didactique distinct du temps d‘horloge et des contraintes temporelles de l‘enseignement, et a distingué le temps de l‘enseignement du temps de l‘apprentissage. Mercier (1995, 1998) fait du temps didactique l‘un des éléments essentiels de l‘étude de la relation professeur-élèves. En étudiant l‘avancée du temps didactique pour un élève particulier, c’est-à-dire l‘articulation du temps de l‘enseigné au temps didactique, il montre qu‘un élève donné peut être amené à réaliser de lui-même un apprentissage utile pour sa réussite, mais invisible pour l‘enseignant, parce que relatif à des savoirs qui ne sont pas les objets actuels de l‘enseignement. Un tel apprentissage peut se produire quand un élève rencontre une ignorance correspondant à un rapport institutionnel nouveau à un objet ancien, donc en liaison avec le fonctionnement temporel de l‘enseignement. Mercier appelle « épisode didactique » un tel moment, et pose la question de la gestion didactique de ces moments, ce qui permet d‘identifier des manques didactiques pour certains élèves et amène de nouvelles questions sur le rôle du professeur, en particulier celle de la gestion publique de certains épisodes didactiques concernant un élève particulier et le rôle qu‘y fait jouer le professeur à d‘autres élèves. Sensevy (1998) [58] montre comment le maître peut, à travers la gestion dans le temps d‘un dispositif spécifique, laisser les élèves prendre une part à l‘institutionnalisation, en laissant vivre des énoncés intermédiaires qui sont proposés aux élèves pour un nouveau travail.
Les connaissances scientifiques sur l’apprentissage, majoritairement issues des travaux de laboratoire, se révèleraient incapables de rendre compte de la manière dont des élèves « réels » pourraient apprendre en situation écologique. Critique classique, au niveau de laquelle se cristallise de longue date le « divorce » entre chercheurs et praticiens. Argument qui divise également les scientifiques, en opposant notamment les tenants d’une approche expérimentale et les promoteurs d’une approche située (Hauw, 2002)[59]. Un argument fréquemment soulevé est que les travaux scientifiques sur l’apprentissage moteur ont porté sur des tâches simples de laboratoire, alors que dans les situations d’enseignement les élèves sont confrontés à des tâches infiniment plus complexes.
Cet argument est souvent basé sur une vision quelque peu réductrice de la recherche sur l’apprentissage moteur : s’il est vrai que les travaux fondateurs (par exemple Adams, 1971[60]) ont porté sur des tâches extrêmement simples de positionnement linéaire, un grand nombre de travaux plus récent ont porté sur des tâches complexes, proches des situations rencontrées dans le contexte sportif (Wulf et coll., 1997[61]). Il est clair cependant que les travaux sur les tâches complexes ne constituent qu’une évolution récente de ce domaine de recherche, et sont encore peu diffusés en dehors des revues scientifiques internationales. La littérature de vulgarisation rend généralement compte de travaux déjà anciens, basés sur une approche plus classique (Simonet, 1985[62] ).
La question mérite cependant d’être posée : la manière dont une tâche simple est maîtrisée diffère-t-elle de l’acquisition d’une habileté plus complexe ? Wulf et coll. (2002)[63] ont développé un certain nombre d’élément en faveur de cette thèse. Selon les auteurs, la distinction entre tâche simple et tâche complexe n’est pas si aisée. Ils s’accordent à affirmer qu’une tâche peut être définie comme complexe dans la mesure ou elle exige le contrôle d’un grand nombre de degrés de liberté (par opposition à des tâches ne justifiant l’utilisation que d’une seule articulation), où sa maîtrise ne peut être envisagée dans le cadre d’une seule session d’apprentissage, et également dans la mesure où elle possède une certaine pertinence écologique. Wulf et coll. (2002) , suite à une revue assez complète de la littérature scientifique, montrent qu’un certain nombre de préceptes issus de l’étude de l’apprentissage de tâches simples ne s’appliquent qu’imparfaitement dans le cas des habiletés complexes. On peut évoquer par exemple l’un des principaux préceptes pour l’apprentissage issus de la théorie du schéma de Schmidt (1975)[64], le principe d’interférence contextuelle (Shea et coll., 1979[65]). Ce principe pourrait être énoncé de la manière suivante : lorsque l’on doit enseigner plusieurs habiletés au cours d’une même séance, il est plus efficace de varier d’essai en essai les tâches auxquelles sont confrontés les élèves (pratique aléatoire) que de regrouper dans des blocs successifs les essais réalisés sur une même tâche (pratique groupée). Ce principe paradoxal a été démontré à maintes reprises : les sujets confrontés à la pratique aléatoire se révèlent supérieurs aux autres dans les tests de transfert et de rétention des habiletés apprises. Shea et coll. (1979) suggèrent que cette supériorité de la pratique aléatoire vient du fait que les sujets se livreraient dans cette condition à une activité cognitive importante de manipulation de l’information entre les différents systèmes de mémoire, activité qui ne serait que plus faiblement sollicitée par la pratique bloquée. Wulf et coll.(2002) montrent cependant que ce principe d’interférence contextuelle ne fonctionne pas lorsque les sujets sont confrontés à des tâches complexes : dans ce cas la pratique bloquée amène de meilleurs résultats. Les auteurs estiment que les tâches complexes demandant un traitement de l’information plus important, la pratique aléatoire entraîne des phénomènes de surcharge cognitive néfastes à l’apprentissage. Les auteurs évoquent un certain nombre d’autres facteurs, tels que l’utilisation du feedback, de la démonstration, des instructions, et montrent que les résultats acquis dans des expérimentations portant sur des tâches simples ne peuvent être sans précautions généralisées aux tâches complexes. Dans ce sens, un réexamen des « lois de l’apprentissage » classiquement acceptées et enseignées sur les bancs des universités, est sans doute à envisager.
Le travail sur les tâches complexes a surtout permis de réévaluer le temps nécessaire à l’apprentissage. La plupart des expérimentations portant sur des tâches simples avaient pu laisser l’impression que l’apprentissage moteur pouvait être considéré comme une adaptation relativement rapide aux contraintes de la tâche, réalisée au prix de quelques essais. Delignières et coll. (1998)[66], étudiant l’apprentissage des balancers en suspension mi-renversée aux barres parallèles, montrent qu’au bout de 80 essais, et malgré des progrès effectifs dans l’amplitude des balancers, les sujets exploitent toujours un mode de coordination de débutant. Une étude plus récente a porté sur l’évolution des coordinations avec la pratique sur un simulateur de ski (Nourrit et coll., 2003[67]). Des sujets ont été suivis lors de 39 séances d’apprentissage totalisant 390 minutes de pratique. Là encore, les résultats indiquent que les sujets ne quittent que difficilement leurs modes initiaux de coordination. Une évolution significative du comportement, vers un mode de coordination exploitant de manière plus efficiente les propriétés du simulateur, est cependant observée chez tous les sujets. Il faut attendre la 5ème séance pour que cette évolution se dessine chez les sujets les plus performants (50 minutes de pratique cumulée), et jusqu’à la 15ème séance pour les plus lents (150 minutes de pratique). On voit que l’on se situe largement au-delà des durées de pratiques autorisées dans le cadre des cycles d’EPS, qui ne peuvent guère que permettre aux élèves de constater leurs difficultés sans espérer les surmonter. Cette affirmation doit évidemment être relativisée en fonction de la difficulté des tâches. Nourrit (2000)[68] a montré que la durée de pratique nécessaire pour obtenir une transition vers le comportement expert dépendait directement de la difficulté de la tâche.
Au-delà de la nature des tâches soumises à examen, on peut également évoquer les théories sous-tendant les recherches sur l’apprentissage. Le champ a été dominé durant des décennies par l’approche cognitiviste, considérant le sujet apprenant comme un système de traitement de l’information (Schmidt, 1993[69]). Dans ce cadre, l’apprentissage était avant tout conçu comme un problème de construction de représentations pertinentes de l’action à réaliser (programmes moteurs, connaissances). L’organisme qui agit n’était plus alors considéré que comme une interface entre l’environnement et les représentations. De manière paradoxale, on a vu se développer durant de longues années des recherches sur l’apprentissage moteur dans lesquelles la dimension motrice était simplifiée à l’extrême, l’analyse portant surtout sur la rapidité et la précision du traitement de l’information.
La recherche sur l’apprentissage moteur a connu ces dernières années de profonds bouleversements théoriques, notamment par l’introduction de l’approche dynamique (pour une présentation, voir Delignières, 1998[70]). Cette approche est principalement née de l’insatisfaction des chercheurs, relative à l’incapacité des théories cognitivistes de rendre compte de la complexité du comportement moteur. L’approche dynamique considère le comportement comme émergeant d’un système d’interactions complexes entre l’organisme, la tâche à laquelle il est confronté, et l’environnement (Newell, 1986[71]). Ces interactions déterminent l’adoption préférentielle de certains comportements. De nombreux travaux ont notamment montré que des débutants, confrontés à une tâche nouvelle, adoptaient spontanément des modes de coordination à peu près identiques. Les principes sous-tendant ces coordinations spontanées ont pu être décrits de manière précise (Delignières et coll., 1998[72]). Dans ce cadre, l’apprentissage est conçu comme le dépassement de ces coordinations spontanées, pour adopter un autre mode de réponse plus adapté au système de contrainte auquel l’organisme est soumis. Les travaux actuels portent sur la manière selon laquelle s’opère cette transition du comportement débutant au comportement expert, et sur les moyens de faciliter cette transition.
L’approche dynamique propose une vision sans doute plus réaliste du comportement et de l’apprentissage moteur, c’est-à-dire plus proche de la complexité des situations écologiques. Elle a permis des avancées significatives dans la compréhension du comportement des débutants, et sur la manière dont ces premières coordinations étaient dépassées lors de l’apprentissage. Si les études actuelles sont encore souvent réalisées en laboratoire, les années qui viennent verront certainement apparaître des travaux plus appliqués, qui permettront de coller au plus près des apprentissages réalisés en situation réelle (Beaubrun et coll., 2001[73]). Enfin si l’approche dynamique s’est principalement développée dans le cadre de l’étude des coordinations motrices, certains travaux voient actuellement le jour qui s’intéresse davantage aux activités d’opposition (Hodges et coll., 1998[74]).
L’évolution récente de la recherche nous amène à relativiser cette critique : de plus en plus les chercheurs étudient l’acquisition d’habiletés complexes, proches de celles rencontrées dans les activités sportives. Par ailleurs les théories actuelles permettent une approche plus réaliste de la complexité des situations d’apprentissage rencontrées en contexte écologique.
Ce qui nous semble essentiel de pointer dans cette partie, c’est que la fracture entre le laboratoire et le terrain, au niveau de l’apprentissage, n’a pas le caractère inéluctable que certains ont pu suggérer. La recherche expérimentale charrie un ensemble de contraintes (simplification des objets, parcellisation des hypothèses, standardisation des protocoles expérimentaux), qui peut déformer singulièrement le regard qu’elle tente de porter sur le réel. D’un autre côté, elle apporte une finesse d’analyse que l’observation de terrain ne peut procurer. Il convient de garder à l’esprit que la recherche est plurielle et dynamique. Nous pensons qu’un certain nombre d’évolutions actuelles, dont nous avons tenté de tracer les contours, peuvent permettre une compréhension plus approfondie de la manière dont l’élève acquiert des habiletés complexes dans les situations d’enseignement.
La stratégie qui consiste dans l’harmonisation de l’évaluation est puissante car elle responsabilise les élèves alors qu’ils collaborent pour obtenir une connaissance utile des critères d’évaluation.
Tout d’abord, le personnel enseignant :
- décide d’un axe pédagogique pour le processus d’harmonisation avec les élèves (connaissance et compréhension d’un discours particulier, choix judicieux des mots, idées appuyées par des détails) ;
- enseigne explicitement les critères qu’il recherche; utilise des outils tels que des ancrages, une rubrique ou une liste de contrôle ;
- prend des échantillons anonymes de devoirs qui représentent différents niveaux de rendement;
- discute collectivement des résultats et utilise cette information pour planifier son enseignement, faisant opportunément aux élèves ses observations afin de les aider à améliorer leur rendement ;
- classe les échantillons en allant du moins au plus efficace ;
- demande aux élèves d’être explicites sur leur appréciation et de justifier leurs raisons en donnant des exemples tirés des textes. Il leur demande de noter le déroulement de leur pensée avec des papillons adhésifs.
Ensuite, de leur côté, les élèves :
- lisent les échantillons par les élèves regroupés en équipes de deux ou trois ;
- participent activement en posant les bonnes questions;
- parlent de leur expérience d’harmonisation avec l’ensemble du groupe.
L’harmonisation et l’harmonisation ont plusieurs rôles essentiels. La direction joue un rôle essentiel en instaurant à l’école une culture qui mette en valeur le processus d’apprentissage et de planifications collectives (Booth et Rowsell, 2007[75]). Pour faire en sorte que l’harmonisation ne soit pas une activité isolée mais fasse partie intégrante du cycle de l’évaluation, de l’enseignement et de l’apprentissage, la direction doit :
- organiser régulièrement des séances d’harmonisation et s’assurer que les ressources sont disponibles pour répondre aux résultats de l’évaluation ;
- participer aux séances d’harmonisation, apprenant ainsi aux côtés du personnel enseignant et élargissant la base de connaissances de l’école sur le rendement des élèves ;
- modéliser des questions efficaces, des conversations responsables et contribuer activement à enrichir le dialogue sur le rendement des élèves ;
- soutenir les occasions de partage du leadership.
Les enseignants ont l’impact le plus direct sur le rendement des élèves; leur rôle pendant le processus d’harmonisation est essentiel. Si l’on veut axer les séances d’harmonisation sur l’apprentissage des élèves et aider à façonner une culture ouverte à l’apprentissage professionnel, à un dialogue enrichissant, et à une planification en collaboration, le personnel enseignant doit :
- discuter des résultats et utiliser cette information dans la planification de l’enseignement, faisant opportunément aux élèves ses observations afin de les aider à améliorer leur rendement ;
- participer activement aux séances en posant les bonnes questions; ceci permettra de bâtir une base solide de connaissances axées sur les attentes du curriculum et les niveaux de rendement ;
- parler de ses stratégies pédagogiques réussies et ses ressources avec les membres de l’équipe, offrant à tous les élèves d’excellentes occasions d’apprentissage qui répondent précisément à leurs besoins.
Un aspect essentiel du rôle des élèves consiste à relever les stratégies qu’ils ont trouvées les plus utiles durant leur propre processus d’apprentissage. L’harmonisation s’en trouve instruite car les enseignants gagnent à connaître les réflexions de leurs élèves, qui ajoutent aux discussions sur l’évaluation. Pour que les élèves tirent parti de l’harmonisation, ils doivent :
- apprendre à exprimer les points forts et les points faibles de leur propre apprentissage;
- tenir compte des observations qui leur ont été faites afin d’améliorer les rédactions ultérieures.
Les facteurs à prendre en considération tout d’abord, avant l’harmonisation sont :
- Commencer et terminer à l’heure
- Apporter le travail des élèves (on peut prédéterminer des échantillons de travail en fonction des élèves repérés)
- S’écouter mutuellement avec respect et confiance
- Être ouvert à de nouvelles idées et vouloir les exprimer
- Prendre les décisions en fonction de l’amélioration de l’apprentissage des élèves
Ensuite, pendant l’harmonisation, il faut explorer les données en posant des questions profondes :
- Comment faire en sorte que nos pratiques d’évaluation soient justes, équitables et répondent aux besoins d’apprentissage de tous les élèves?
- Dans quelle mesure sommes-nous cohérents dans ce que nous attendons des rédactions des élèves, au niveau de l’année, du cycle ou de l’école?
- Comment utilisons-nous les informations relatives à l’évaluation pour faire des observations judicieuses aux élèves sur leurs techniques de rédaction?
- Nos élèves expriment-ils bien leurs points forts et leurs lacunes dans leur capacité d’écriture?
Enfin, après, l’établissement de l’horaire de la séance d’harmonisation. Prenez de 15 à 20 minutes pour évaluer ensemble la rédaction d’un élève à partir des quatre catégories de connaissances et de compétences. Ne vous précipitez pas. Il suffit probablement, pour calibrer cette séance d’évaluation, que l’équipe, ensemble, note un à deux élèves de la classe de chaque enseignante ou enseignant. Une fois que les enseignants se sentent plus confiants et jaugent avec plus de cohérence les travaux des élèves, ils peuvent évaluer le reste de leurs élèves eux-mêmes, tout en travaillant à la table avec les membres du groupe. Cela donne en effet la possibilité de parler de certains travaux qui pourraient susciter une discussion.
Créer une culture de confiance et de conflit productif. Créer une culture de confiance relationnelle permet aux enseignants de se sentir libres de communiquer leurs idées, leurs expériences et leurs opinions. Les recherches indiquent d’ailleurs que, dans les écoles particulièrement efficaces, il y a une grande confiance relationnelle entre tous les intéressés. Un aspect important de cette confiance est la pratique du conflit productif, où le personnel communique ouvertement de façon professionnelle, en vue d’améliorer la pratique et la réussite des élèves. L’harmonisation de l’évaluation est d’autant plus efficace quand le conflit productif est ancré dans la culture de l’établissement.
La construction d’une culture de conflit productif exige probablement que nous modifiions notre propre perception du conflit. Le conflit est souvent perçu comme un argument qu’il faut gagner ou perdre, où une personne a raison et l’autre a tort. En fait, le conflit productif devrait être perçu comme une approche de collaboration dans laquelle le conflit nous force à approfondir notre base de connaissances. Chaque membre du personnel enseignant devrait se considérer comme un intervenant influent dans la communauté d’apprentissage. L’harmonisation de l’évaluation risque d’être inefficace si les enseignants ont peur d’exprimer leur pensée, de poser des questions sur les données d’évaluation, ou d’adapter leur façon de penser après avoir écouté les idées des autres.
Sous réserve qu’il existe des normes de respect bien établies, les membres des communautés d’apprentissage professionnelles peuvent écouter et accepter les différents points de vue en vue d’approfondir la connaissance du rendement de leurs élèves. Enfin de compte, les enseignants arrivent à s’accorder par le biais du dialogue sur les preuves de l’apprentissage des élèves qu’ils observent. C’est grâce à ce dialogue que les enseignants apprennent à approfondir leurs pratiques et à remettre en question certains aspects de leurs choix pédagogiques.
CONCLUSION
En bref, la planification de l’activité de l’enseignant, la démarche interactive entre le professeur et l’élève faciliteront la compréhension du cours. Les méthodes usitées pour arriver à ce but sont nombreuses, on pourra citer l’utilisation des outils classiques et modernes en plus des différents travaux réalisés. Même avec cela de nombreux élèves ont toujours des problèmes de compréhension. Il est important de trouver des solutions ; la création d’une culture de confiance entre les élèves et enseignant en est une.
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[27] Les chiffres donnés ici seraient à préciser en analysant d‘une part différents types de cours (on sait que les questions fermés sont trois fois plus nombreuses en physique qu‘en géographie, par exemple), et d‘autre part différents styles pédagogiques (on sait que, dans une pédagogie « traditionnelle », la prise de parole de l‘enseignant représente environ 65 % de ce qui est dit, alors qu‘elle représenterait environ 55 % dans une pédagogie « moderne »).
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