Comment la mutuelle parvient-elle à intégrer l’immobilier social – activité atypique autant par sa nature que par son poids financier – dans son champ social en préservant son modèle économique et le caractère fondamental d’équité dans le traitement des demandes ?
Problématique : « Comment la mutuelle parvient-elle à intégrer l’immobilier social – activité atypique autant par sa nature que par son poids financier – dans son champ social en préservant son modèle économique et le caractère fondamental d’équité dans le traitement des demandes ? »
1.1. DEFINITIONS DES CONCEPTS. 6
1.1.1. Définition et objet de la mutuelle. 6
1.1.2. Le fonctionnement de la mutuelle. 7
1.1.3. Le code de la mutualité : 8
1.2. LE LOGEMENT OU L’IMMOBILIER SOCIAL. 9
1.2.2. Les différentes sortes d’immobiliers sociaux. 9
Le Prêt Locatif Aidé d’Intégration (PLAI) : 9
Le Prêt Locatif à Usage Social (PLUS) 11
Le Prêt Locatif Social (PLS) 13
1.2.3. Les plafonds de ressources pour un immobilier social 14
1.2.4. Principales conditions d’attribution d’un logement social 15
1.3. LES ENJEUX DE LA MUTUELLE.. 15
1.3.1. Impacts socio-économique de la mutuelle. 15
1.3.2. Stabilité et régulation de la situation sociale, économique et politique. 16
1.3.3. Accès équitable des membres aux biens et aux services. 18
1.4. LA MUTUELLE ET L’IMMOBILIER SOCIAL : ENJEUX ET RÔLE.. 22
1.4.1. Enjeux des habitats sociaux et rôle des mutuelles. 23
2.1. LE CHOIX DE LA METHODE D’ENQUETE.. 29
2.2. PRESENTATION DE LA METHODE CHOISIE.. 31
2.2.1. La méthode qualitative. 31
2.3. DEROULEMENT DE L’ENQUETE.. 32
3.1. ANALYSE DES RESULTATS. 42
En France, la toute première mutuelle date du XIVe siècle, notamment en 1319, et marque le premier pas vers la protection sociale. A l’époque, il s’agissait d’un établissement de secours mutuel. Au fil des années, la mutualité a contribué à l’essor de ce mouvement, mais en tournant plus vers la préservation et l’entretien de la santé pour ensuite s’étendre vers des préoccupations centrées sur les personnes âgées comme la retraite. Dans ce cadre, les adhérents versent des cotisations de manière forfaitaire, néanmoins, réalisées dans une optique démocratique. Dans certains cas, le paiement de ces contributions est relatif aux revenus perçus par les affiliés, cependant, elles ne sont jamais calculées sur la base des risques propres de ces derniers.
Mais les mutuelles et les coopératives n’ont connu un véritable engouement que vers le XIXe siècle, notamment dans les années 1820 à l’époque de la révolution industrielle. La société faisait face à des sérieux problèmes d’inégalités, d’exclusion sociale séparant ainsi les riches et les pauvres. Les mutuelles avaient ainsi été créées dans le but de rééquilibrer les privilèges et établir l’égalité, l’équité et la liberté dans le pays tout en renforçant la solidarité entre les citoyens. Néanmoins, il y a encore un écart entre la réalité et l’idéal poursuivi. Force est de constater que cette innovation sociale a changé notre conception de l’économie.
En France, le gouvernement a mis en place la sécurité sociale à la fin de la Seconde Guerre mondiale afin que tous les citoyens puissent avoir une couverture sociale. En 1945, la mutuelle et la mutualité gagne en importance dans le remodelage et la gestion sociale des services médicaux de la population.
La mutuelle santé va tenir un rôle pécuniaire dans le financement des dépenses en matière de santé et de protection familiale. Elle contribue énormément dans le financement des outils de prévoyance sociale et dans l’administration des biens aux personnes.
Aujourd’hui, les domaines d’intervention des mutuelles se sont élargis et sont diversifiés. Outre le domaine de la santé, il existe aussi des mutuelles d’assurances, de crédit et récemment d’habitat. En effet, la mutuelle s’est lancée dans l’immobilier, notamment dans l’immobilier social.
Les organismes d’habitation à loyer modéré (HLM) ont sorti un livre Blanc en 1976 intitulé « De la crise du logement à la crise de l’habitat ». Dans cet ouvrage, ils mettent en exergue des problèmes sociaux qui subsistent au sein du pays tels que le manque d’espace, l’éloignement géographique, la qualité des logements construits et le cadre de vie des personnes des Français. En 1975, le nombre de personnes mal logées atteint les 16 millions. Ainsi, le problème était plus important et plus complexe que la crise du logement. Pourtant, les préoccupations des organismes de l’immobilier social sont surtout focalisées la gestion des logements sociaux et la construction d’immeubles de qualité avec des prix accessibles à la majorité de la population. Outre ces objectifs, ils réalisent accompagnement aussi les locataires sur le plan social et les incitent à participer à la rénovation urbaine et facilitent l’accès de ces derniers à la propriété.
De la sorte, l’engagement du gouvernement français et des organismes d’habitation à loyer modéré s’est étendu au-delà de la « seule » mission de production de logements. Aujourd’hui, il inclut de nouveaux objectifs comme, par exemple, faire adhérer aux programmes des publics encore plus larges et plus variés. C’est un enjeu de taille étant donné que l’insuffisance de logements respectant les normes d’hygiène est toujours d’actualité. La Fondation Abbé Pierre indique dans son rapport qu’en 2013 le nombre de personnes mal logées est toujours de 10 millions[1]. Les stratégies et politiques de logement social mises en place en réponse aux nouveaux besoins sociaux, néanmoins bouleversant les processus de production existantes, n’enflamment pas les acteurs institutionnels de l’habitat.
Cependant, la construction et la promotion d’immobiliers sociaux demeurent à l’heure actuelle essentiellement d’initiative des acteurs privés destinés à des personnes solvables sur le marché classique de l’immobilier. Rares sont les projets qui ont réussi à introduire des instruments d’aide au logement pour assurer l’accès de la collectivité à ce privilège. Et ce, en dépit des ambitions clairement affichées pour la promotion de la « mixité sociale », exprimées, dans la plupart des cas, par les participants. Réussir à concrétiser des projets de logement social mettant en œuvre des outils d’aides institutionnels est une méthode permettant de diffuser les plus-values des approches participatives auprès d’un public plus large outre les pionniers. C’est aussi un moyen d’aboutir au développement de plusieurs groupes projets, constitués de ménages aux desseins communs, néanmoins différents de par leurs capacités financières.
C’est dans cet objectif de mixité sociale réalisée au moyen de la promotion de l’habitat social que nous nous intéressons sur le rôle de la mutuelle, nous conduisant au questionnement suivant : « Comment la mutuelle parvient-elle à intégrer l’immobilier social – activité atypique autant par sa nature que par son poids financier – dans son champ social en préservant son modèle économique et le caractère fondamental d’équité dans le traitement des demandes ? »
Cette interrogation est celle qui aura motivée le travail présenté dans ce mémoire de recherche. Pour apporter des éléments de réponses, nous le subdivisons en trois parties essentielles : la première met en exergue les revues littéraires sur la mutuelle et l’immobilier social. Nous mettons en exergue les définitions des deux concepts et leurs enjeux. Ensuite, la deuxième est consacrée à description de la méthode par laquelle nous avons mené notre recherche pour répondre à la problématique. Enfin, la troisième partie présente les résultats de l’enquête et les analyses portées sur ceux-ci.
La mutuelle est une société coopérative de droit privé à but non lucratif, disposant d’une personnalité morale (Article L. 111-1 du code de la Mutualité) [2]. En effet, c’est une société de personnes et non de capitaux. Son système de fonctionnement est basé sur des valeurs comme l’entraide et la solidarité dans une perspective de prévoyance sociale. La mutuelle est un moyen de lutte contre la discrimination et l’exclusion.
Un organisme est appelée mutuelle dès lors qu’il est immatriculé selon les dispositions établies par décret en Conseil d’Etat et qu’il obéit aux règles du code de la mutualité. La mutuelle fonctionne grâce aux cotisations versées par leurs adhérents, à leur avantage et celui de leurs ayants droit. Ses actions poursuivent un objectif de prévoyance réalisé dans une démarche d’entraide et de solidarité dans le total respect des règles du code de la mutualité et des dispositions entérinées par leurs statuts.
Ces organismes ont pour mission d’accompagner et de préserver la personne humaine durant toute son existence.
Les mutuelles ont plusieurs vocations, les différenciant les unes des autres. Elles peuvent :
- avoir des activités d’assurance comme :
- la couverture des risques causant des dommages qui portent atteinte au physique du bénéficiaire, suite à une maladie ou un accident ;
- la signature d’engagements dont la mise en œuvre est relative à la durée de la vie de la personne, le paiement d’une certaine somme en cas de mariage ou de maternité, l’incitation à l’épargne pour la capitalisation
- l’exécution d’opérations d’assistance aux personnes et de protection juridique ;
- la couverture du risque de perte de revenus engendré par le chômage ;
- l’apport d’une caution mutualiste pour appuyer les engagements signés par leurs cotisants pour la construction, l’acquisition, l’amélioration ou encore la location de leur habitat ou de celui de leurs ayants droit ;
- assurer des actions de protection de l’enfance, des personnes âgées dépendantes ou en situation de handicap et de la famille, prévenir les risques de dommages physiques suite à une maladie ou un accident ;
- réaliser une action sociale ou manager des opérations sanitaires, culturelles ou communautaires ;
- prendre part au management d’un régime licite d’assurance maladie et maternité :
- assurer le mangement des opérations et services sociaux aux gages de l’Etat ou de collectivités territoriales.
Les mutuelles interviennent également dans les opérations infra :
- Caution mutualiste
- Protection juridique,
- Assistance aux personnes.
- Couverture du risque de perte de revenus,
Les opérations et activités des mutuelles sont soumis au Code de la Mutualité. D’après l’article L 510-1 de ce code, c’est l’Autorité de Contrôle prudentiel qui est chargé du suivi de ces organismes[3].
En France, ces sociétés interviennent en support de la sécurité sociale obligatoire. De la sorte, elles offrent principalement des prestations sanitaires complémentaires ainsi des services de retraite complémentaires-retraite. Comme nous l’avons dit auparavant, ces organismes ne sont pas des sociétés de capitaux mais de personnes. De ce fait, ils n’ont pas d’actionnaires et donc, pas de dividendes à distribuer. Leurs représentants sont élus par les membres. Cependant, ils sont autorisés à émettre des titres participatifs.
Une des particularités de ces entités est qu’elles sont ouvertes à toute personne désirant s’intégrer sans sélection du risque, elles prônent la solidarité entre tous leurs membres et tous ceux qui veulent y participer. Elles n’excluent personne sur des critères discriminatoires comme l’état de santé.
Selon l’article L 114-16 du Code de la Mutualité, l’administration de la mutuelle est tenue par un conseil désigné par les membres de l’assemblée générale. Celle-ci réunit les affiliés ou les délégués. Il est important de préciser que les administrateurs ne sont pas rémunérés à ce titre et occupent dont ces fonctions gratuitement[4].
Les mutuelles diffèrent foncièrement des entreprises classiques de par leurs valeurs communautaires et leurs caractères solidaires.
Le Code de la Mutualité rassemble des textes juridiques français qui définissent le statut et le fonctionnement ces organismes ainsi que leur organisation et structuration.
Le Code de la Mutualité a connu des nombreuses modifications à travers le temps afin qu’il réponde au besoin de l’époque. La première a eu lieu en 1985 et la dernière en 2001. Le remaniement de l’année 2001 a été réalisé dans le but de se conformer aux directives de l’Union européenne publiées en 1992. Cette initiative a aussi permis d’actualiser les règles applicables aux mutuelles. Le code est composé de cinq parties qui sont elles-mêmes fractionnées en plusieurs documents, on compte : une partie législative, quatre parties règlementaires (une partie ancienne, des décrets en conseil d’Etat, des décrets simples et des Arrêtés) et des Annexes.
La transposition des directives européennes au Code de la Mutualité française a exigé la mise en place de mesures de sécurité financière plus rigoureuses, mais également un ratio de limite d’âge pour les candidats souhaitant assurer une fonction au sein du conseil d’administration. Le nouveau code impose aussi aux organismes mutualistes de dissocier les opérations et services maladie et de prévoyance des activités sociales comme les services dentaires et optiques, les pharmacies et les cliniques. Cette disposition provoquera la fusion de nombreux organismes motivés par une volonté d’entraide.
On désigne par immobilier social, un logement bâti par les organismes d’habitations à loyer modéré soutenu financièrement par l’Etat, les bailleurs de fonds, l’Action Logement ou encore les collectivités publiques[5].
En France, il existe trois catégories de logements sociaux : le prêt locatif aidé d’intégration, le prêt locatif à usage social et le prêt locatif social.
Le prêt locatif aidé d’intégration est une offre qui consiste en l’édification, l’acquisition, l’amélioration ou le réaménagement de logements mis en location à des personnes/ménages ayant des difficultés sociales et financières. Autrement dit, des personnes à faibles ressources. Cette offre inclut également un accompagnement social au profit de ces personnes pour les aider à s’intégrer dans la communauté. Il existe une convention qui leur permet d’obtenir une aide personnalisée pour jouir d’un logement.
Accordé à la signature d’une convention entre le bénéficiaire et l’Etat, ce prêt est un financement destiné aux organismes d’habitations à loyer modéré et aux sociétés d’économie mixte. A noter que les personnes âgées et celles en situation de handicap peuvent également avoir accès à ce prêt. [6]
Le prêt locatif aidé d’intégration sert à financer les opérations suivantes :
- La construction de logements neufs,
- L’acquisition de logement en l’état,
- L’acquisition de logements avec transformation (amélioration, réaménagement),
- La mise en place de logements-foyers attribués aux personnes âgées ou en situation de handicap.
- Les avantages du prêt locatif aidé d’intégration :
Le prêt locatif aidé d’intégration offre plusieurs avantages à son bénéficiaire. Il permet de profiter :
- d’un prêt au taux de 3,25 % auprès de la Caisse des dépôts et consignations avec une durée d’amortissement de la charge foncière allant jusqu’à quarante et cinquante ans,
- d’une taxe sur la valeur ajoutée au taux de 5,5 % pour l’édification, le réaménagement et la transformation de logements de logements sociaux,
- d’une exemption de la taxe foncière sur les propriétés bâties durant vingt-cinq ans,
- Les conditions d’attribution d’un prêt locatif aidé d’intégration :
Pour bénéficier d’un prêt locatif aidé d’intégration, l’entité intéressée doit remplir et respecter certaines conditions, à savoir :
- Les revenus du locataire ne doivent pas excéder les plafonds imposés pour chaque type de prêt : dans le cadre du prêt aidé d’intégration, ces revenus sont plafonnés à 60 % des ressources maximum fixées pour bénéficier d’un logement social classique ;
- Le plafond du loyer est déterminé par l’Etat suivant le nombre de personnes par foyer et le type de logement et la localisation de celui-ci ;
- Une convention doit préalablement être signée entre l’Etat et l’entité concernée. Celle-ci permet au bénéficiaire de faire valoir son droit pour jouir de l’aide personnalisée au logement ;
- Les taux de subvention octroyée dépendent de la nature des opérations à réaliser, et il n’existe pas de plancher quant au montant que doit payer le bénéficiaire pour l’acquisition ou de transformation du logement.
Le prêt locatif à usage social est une offre qui promeut l’instauration de la solidarité dans l’habitat et qui soutient la mixité sociale. Ce prêt est destiné également aux organismes d’habitations à loyer modéré et aux sociétés d’économie mixte.
Le prêt locatif à usage social sert à financer :
- l’acquisition de terrain,
- l’édification de logements neufs,
- l’acquisition et la réhabilitation d’habitations anciennes,
- le réaménagement ou la mutation de pièces ou d’immeubles en logements locatifs qu’ils soient nouvellement acquis ou pas.
Ce méthode de financement immobilier permet aussi aux sociétés d’économie mixte et aux organisme d’habitations à loyer modéré de lancer ou appuyer de nouveaux projets de logements sociaux. Parallèlement, ce prêt est, pour ces entités, un moyen d’équilibrer leurs opérations financières.
Deux conditions importantes doivent être respectées dans le cadre d’un prêt locatif à usage social, à savoir :
- le plafond fixé pour le loyer à payer,
- les revenus maximum des locataires pour pouvoir jouir de ce type de logement social.
- Etablissement d’un habitat solidaire à l’aide du prêt locatif à usage social
Le prêt locatif à usage social vise à établir un habitat solidaire et pour ce faire, il encourage et instaure la mixité sociale. De la sorte, ce prêt a pour objectif :
- d’accueillir des locataires (occupant 30 % des habitats sociaux) dont les revenus ne dépassent pas 60% des ressources maximum,
- d’accueillir des locataires (occupant 10 % des habitats sociaux) ayant des revenus excédant le plafond des ressources de 20 %.
- Les avantages du prêt locatif à usage social
Le prêt locatif à usage social offre de nombreux avantages aux organismes d’habitations à loyer modéré et aux sociétés d’économie mixte. En effet, ces derniers peuvent jouir :
- d’un prêt au taux de 4,3 % auprès de la Caisse des dépôts et consignations avec un préfinancement, pour une durée de trente-deux ans ;
- d’une taxe sur la valeur ajoutée de 5,5 % pour l’édification, le réaménagement ou encore l’amélioration de logements sociaux[7];
- d’une exemption de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour une période de vingt-cinq ans.
Le prêt locatif social[8] est une offre de financement pour l’acquisition, l’édification ou la réhabilitation des logements qui seront mis en location à titre de logement sociaux. Ce prêt peut être octroyé à une organisation ou une personne physique du moment qu’une convention a été signée entre le bénéficiaire et l’Etat.
- Objet du prêt locatif social
Le prêt locatif social est donc un moyen de financer l’achat ou la construction de logement destiné à être louer, mais aussi de financer les travaux d’amélioration ou de réaménagement nécessaires[9]. Cependant, il ne donne pas pour autant le droit à une subvention de l’Etat[10]. Par contre, il permet de profiter de la taxe à la valeur ajoutée au taux de 5,5 % et d’une exemption de la taxe foncière sur les propriétés bâties pendant vingt-cinq ans[11].
Une convention d’aide personnalisée au logement doit être signée entre l’Etat et les bailleurs. Sa durée doit être supérieure ou égale à celle de la part du prêt qui ne supporte pas la charge foncière et ne doit ni excéder les quarante ans ni être plus bas que quinze ans[12].
- Montant du prêt
Le montant du prêt doit être chiffré au minimum à 50 % du prix de revient de l’achat ou de l’opération réalisé sur le logement[13]. Il peut être égal à la totalité du prix de revient.
- Conditions financières de l’octroi du prêt
Pour les organismes d’habitations à loyer modéré et les sociétés d’économie mixte, le taux d’intérêt est fixé à 1,86 %. L’amortissement est défini pour une durée maximale de quarante ans, avec une possibilité allant jusqu’à cinquante ans pour un montant représentatif de la charge foncière. A noter que cette durée peut atteindre soixante ans si le logement social se trouve dans une zone tendue. Les institutions de crédit peuvent présenter des clauses particulières sur la durée du prêt ou les modalités de remboursement : elles peuvent notamment proposer si le remboursement se fera par amortissement constant ou bien (par échéances constantes.
- Plafonds de ressources
Les plafonds de ressources du prêt locatif social sont identiques à ceux du prêt locatif à usage social majorés de 30 %.
L’octroi de logements sociaux (qu’il s’agisse de logements financés par un prêt locatif aidé d’intégration, un prêt locatif à usage social ou un prêt locatif social) aux ménages ou aux individus dépend des revenus annuels de ces derniers qui doivent respecter certains plafonds établis. La détermination des plafonds de ressources prend en compte deux paramètres essentiels : le nombre d’individus au sein du foyer et son revenu fiscal type.
Plafond de ressources pour une habitation à loyer modéré en Ile-de-France[14]
Monnaie : en euros
Composition du foyer | Prêt locatif aidé d’intégration | Prêt locatif à usage social | Prêt locatif social |
1 personne | 12 722 | 23 127 | 30 072 |
2 personnes | 20 740 | 34 565 | 44 944 |
3 personnes | 24 929 | 41 550 | 54 025 |
4 personnes | 27 373 | 49 769 | 64 713 |
5 personnes | 32 407 | 58 917 | 76 608 |
6 personnes | 36 466 | 66 300 | 86 207 |
Par personne supplémentaire | +4 062 | +7 388 | +9 606 |
Source : LAOUES B. & BRIOIT N., (2015), « Logement social, comment ça marche ? », Massy ma ville, n° 202, p. 10 et MINISTERE DE LA COHESION DES TERRITOIRES, (2015), « Prêt locatif social », publié le 7 août 2015 et mis à jour le 19 août 2016 => http://www.cohesion-territoires.gouv.fr/pret-locatif-social.
En ce qui concerne le prêt locatif aidé d’intégration, le loyer minimum déterminé par la convention établie ne doit pas excéder 60 % du loyer maximum du prêt locatif à usage social, sous réserve d’une dérogation préfectorale.
Afin de bénéficier d’un logement social, l’individu ou l’organisme doit nécessairement :
- respecter les plafonds de ressources
- avoir une nationalité française, s’il est de nationalité étrangère, il doit disposer d’un titre de séjour valide
Le concept d’impact désigne un « effet produit par quelque chose, influence qui en résulte »[15]. D’après cette définition tiré du dictionnaire Larousse et si nous la transposons à la conduite notre travail, nous pouvons affirmer que, dans cette section, nous cherchons à appréhender et évaluer l’effet engendré par les mutuelles et l’influence qu’elles exercent, sur le plan économique et social, aussi bien à l’interne qu’à l’externe dans un objectif de rendre le monde meilleur.
Fernand Braudel[16] a réalisé une étude prouvant la manière dont le capitalisme est parvenu à devenir le seul régime économique admis au niveau mondial. Dans son œuvre, l’historien distingue fondamentalement le capitalisme de l’économie du marché. Le premier est un régime qui privilégie les détenteurs de capitaux, leur octroyant un pouvoir de décision au sein d’une firme même s’ils ne sont pas des prolétaires, salariés ou des entrepreneurs. Dans ce système, ces détenteurs de capitaux sont admis comme étant les propriétaires des richesses créées par l’entreprise. Ce mécanisme soulève, néanmoins, des interrogations sur le véritable producteur de richesse et les bénéficiaires de celle-ci, sur le détenteur du pouvoir de décision (est-ce les entrepreneurs, les salariés et ouvriers, les commerçants, les financiers ?) Si nous concevons cette doctrine économique comme un système, alors nous admettons aussi que le marché est un lien d’échange de biens et de services qui poursuit une dynamique. En ce sens, les organismes mutualistes ne peuvent pas être considérés comme des organisations capitalistes, ils se développent plutôt dans une économie de marché.
Les mutuelles ont un impact considérable sur l’environnement socio-économique dans lequel elles évoluent. En effet, elles poursuivent trois dynamiques majeures :
- Elles stabilisent et régulent la vie politique, sociale et économique de sa zone d’implantation;
- Elles entretiennent l’accès aux biens et aux services de manière équitable;
- Elles impulsent et encouragent la diversité et l’insertion sociale, économique et politique.
Ces dynamiques se manifestent de plusieurs manières et nous avons décelé quelques indicateurs qui nous aideront à les exposer en détail. Nous aborderons donc dans les sections qui suivent, la contribution des mutuelles dans la réalisation de ces dynamiques qui constituent l’impact socio-économique.
Il existe plus de 300 mutuelles et coopératives dans le monde, détenues par 725 millions d’individus. Ces derniers sont à la fois clients et propriétaires de ces organismes. Ces entreprises emploient au total 3,9 millions de salariés qui travaillent ensemble, animés par la solidarité, l’égalité et la démocratie, des valeurs fondamentales aux mutuelles. Etant donné que les adhérents sont à la fois clients et propriétaires, ils sont amenés à décider des orientations de l’organisme et ces décisions ont des conséquences à leur égard que ce soit en tant que clients ou en tant que propriétaires, et ce, de manière collective et égalitaire. De la sorte, les membres doivent toujours être conscients que lorsqu’ils prennent des décisions, ils doivent considérer ces deux situations.
Réussir à perpétuer les activités d’un organisme mutualiste en vue d’assurer sa pérennité et sa stabilité dépend donc de la capacité des membres à concilier leurs intérêts qui, à première vue, peuvent paraitre incompatibles, ou du moins contrastés.
Aussi, les organismes mutualistes parviennent à maintenir un niveau de stabilité économique grâce à une stratégie de capitalisation qui les distingue des entreprises classiques, à savoir : la constitution de réserves. C’est la toute première forme de pratique managériale qui intègre le développement durable. En effet, elle permet de répondre au mieux aux attentes et impératifs du moment et d’accroitre concomitamment la capacité des prochaines générations à satisfaire les leurs.
Cette idée de constituer une réserve revient à Philippe Buchez. Cette politique a été élaborée dans une optique intergénérationnelle et de durabilité des mutuelles. Buchez indique qu’ « entre l’humanité du passé, celle du présent et celle de l’avenir existe une liaison historique nécessaire, c’est pourquoi la société humaine qui est permanente doit avoir à sa disposition un fonds social permanent[17] ». A l’heure actuelle, les organisations mutualistes[18] du Global 300 possède une réserve de 867,5 milliards de dollars hors d’atteinte de la spéculation. A préciser que ce capital appartient à leurs affiliés du présent et du futur.
Les organisations mutualistes ont des conséquences réelles et positives sur l’économie, la vie sociale et politique d’un pays dans le sens où elles contribuent à leur régulation et stabilisation. Elles améliorent le taux de survie de l’homme, elles résistent beaucoup plus efficacement aux crises et elles ont un poids considérable sur les marchés dans lesquels elles opèrent. Concernant ce dernier exemple, nous pouvons citer le cas de Harmonie Mutuelle qui est le première mutuelle française en termes de chiffres d’affaires avec 2,452 milliards d’euros de cotisations) et d’adhérents (2 639 721 membres) et de personnes protégées (4 610 065 personnes) et se classe en tant que leader du marché des complémentaires de santé[19]. A noter que les mutuelles dominent ce marché avec 54 % de parts de marché estimés à 17,8 milliards d’euros[20]. ZenKyoren (ou National Mutual Insurance Federation of Agricultural Cooperatives est le numéro un du marché de l’assurance vie et de non-vie dispose d’un chiffre d’affaires de 70,7 milliards de dollars en 2010[21]. La plus grande compagnie d’assurances en Finlande est la mutuelle KLP. Néanmoins, il serait exagéré d’affirmer que toutes les organisations mutualistes ont cet impact en permanence, bien que cela est démontré dans de multiples cas. Mais les mutuelles ont un potentiel, un pouvoir à exercer cette influence dans son environnement. Les situations comme les pratiques changent, ces entités ont, historiquement et foncièrement, ce potentiel et ce pouvoir d’impact.
L’identité mutualiste couvre ce potentiel, ce pouvoir d’une manière singulière. Au demeurant, les mutuelles ne sont pas que des fictions ou de simples structures. Elles représentent une espace de partage, d’innovation, stimulant la créativité de leurs membres, et procurent des expériences de vie authentiques, instaurant et inculquant le sens de la de prise en charge et de la démocratie. Dans ce sens, Larousse n’hésite pas à les qualifier d’écoles, le dictionnaire les décrit comme « une école est aussi une « activité ou condition de vie d’où l’on tire des enseignements[22] ».
Nous avons indiqué auparavant que les mutuelles ont un impact social, économique et politique agissant comme régulateur et stabilisateur de ces aspects de la vie. Elles s’expriment par des pratiques expérimentées sensiblement par la mutuelle elle-même et par ses affiliés et donnant lieu à des résultats combinant dynamique entrepreneuriale à un besoin humain.
Les mutuelles contribuent via leurs actions et leurs activités à donner aux individus la possibilité d’accéder aux biens et aux services de façon équitable et de le maintenir. Pour ce faire, elles procèdent de plusieurs manières.
Tout d’abord, cette contribution se traduit par le fait qu’elles opèrent dans des domaines liés aux besoins élémentaires et à l’économie réelle : elles visent à satisfaire des besoins comme manger, se loger décemment, être en sécurité. Plus de trois cents grandes organisations mutualistes travaillent pour répondre à ces besoins[23]. Dans cette optique, les mutuelles sont tout à fait en accord avec leur but originel qui est de combler les besoins de leurs adhérents. A l’opposé, les domaines d’activités les plus courants des cinq cents firmes à capital-actions les plus importantes sont liés majoritairement à l’économie spéculative.
Les organismes mutualistes surpassent également les entreprises classiques et les autres formes d’organisation dans la satisfaction des besoins de leurs adhérents attendu qu’ils opèrent pour répondre aux besoins de personnes ou de localités difficilement atteignables. Les assureurs mutualistes et les mutuelles financières sont réputés comme étant singulièrement capable de proposer des services aux personnes dans le besoin. Cette tendance est d’autant plus vraie dans les territoires les plus défavorisés et les pays en développement, contribuant donc à l’amélioration des conditions de vie des populations qui y habitent[24].
A l’évidence, les mutuelles favorisent le retour à la communauté. Mais ce qui leur rend si particulier est la manière dont cela s’opère ainsi que les mobiles qui les poussent à s’engager au sein de leur communauté. Les organisations mutualistes sont, effectivement, des fondateurs attestés de communautés. D’ailleurs, elles sont elles-mêmes une communauté et travaillent pour répondre en permanence à ses besoins. Ces réponses s’effectuent à travers des choix de management, la proximité auprès des adhérents, l’établissement des priorités des actions à mener, des propositions de services conformes aux véritables besoins de ces derniers, etc. Ce retour à la communauté des organismes mutualistes est démontré par l’application de la ristourne. A titre d’exemple, les adhérents des mutuelles ainsi que des coopératives du Global 300 perçoivent chaque année des ristournes estimées à 66,4 milliards de dollars, en d’autres termes, chaque mutuelle et coopérative obtiennent 208 millions de dollars de ristournes[25].
Cet engagement des entreprises mutualistes et coopératives pour le développement social est reconnu par les Nations Unies et cette dernière l’a affirmé dans sa résolution 64/136 en date du 11 février 2010 :
Considérant que les coopératives et les mutuelles, sous leurs différentes formes, aident toute la population, notamment les femmes, les jeunes, les personnes âgées, les personnes handicapées et les personnes issues de peuples autochtones, à participer aussi pleinement que possible au développement économique et social, dont elles sont en train de devenir un facteur très important, et qu’elles contribuent à l’élimination de la pauvreté […][26].
Si nous prenons toujours le cas des mutuelles du Global 300, en 2012, ces entreprises associées aux coopératives de ce réseau, disposent de revenus globaux évalués à 1 926 milliards de dollars, à titre de comparaison l’Italie est neuvième puissance économique mondiale et possède un produit intérieur brut de 1 895 milliards de dollars[27]. A titre de rappel, ces chiffres ne concernent que les 300 mutuelles et coopératives les plus importantes du monde. Or, il y a 750 000 organisations mutualistes et coopératives dans toute la planète. Force est donc d’admettre que les mutuelles contribuent considérablement au développement économique mondial et tiennent une place déterminante. Par ailleurs, il est intéressant de remarquer que les sociétés mutualistes et coopératives effectuent un chiffre d’affaires supérieur à celui réalisé par les exportations de produits pétroliers, automobiles, textiles et habillements dans leur totalité. A noter également que ces revenus n’incluent pas encore les réserves de 867 milliards de dollars constituées par ces organisations et sont nettes des ristournes versées à leurs adhérents. En outre, les mutuelles s’engagent véritablement dans le développement de leur communauté et favorisent environ quatre millions d’emplois. Leurs efforts sont dirigés dans le maintien d’un accès équitable de leurs membres et les bénéficiaires de leurs actions, aux biens et aux services.
Il est indéniable que les mutuelles sont des acteurs majeurs de l’économie mondiale. Cependant, l’attention que lui portent le public, les gouvernements et les autres organisations est en deçà des efforts qu’elles réalisent.
Les efforts pour garantir un accès équitable aux biens et aux services constituent une dynamique qui impacte conséquemment la vie sociale et économique du pays et des bénéficiaires. Cet impact est palpable par les résultats et les activités typiques des mutuelles. Il est expérimenté de manière concrète par les affiliés, les ayants droits, les salariés, les communautés et l’entité elle-même.
Les organisations mutualistes forment une force démocratique qui déteint sur les adhérents, la communauté et, d’une manière globale, le monde. A titre d’exemple, si les mutuelles du Global 300 se regroupaient pour former un Etat, ce serait le premier pays le plus démocratique de la planète. Ces organismes rassemblent 725 millions d’individus qui ont tous le droit de voter, au moins annuellement, pour décider de l’orientation de leur organisation[28].
Ces affiliés sont tout à fait libres de participer aux réunions annuelles telles que les assemblées générales ordinaires. Cependant, la démocratie s’exerce également lors des assemblées générales extraordinaires ou semestrielles, lors des conseils d’administration, des comités et des ateliers. Au sein des mutuelles, la démocratie n’est pas strictement représentative, elle est également participative et est très animée. Cette dynamique garantit le respect de la pluralité des avis et des besoins et permet même de l’encourager.
Nous ne pouvons qu’admettre la portée de cette participation démocratique en particulier pour le corollaire éducatif occasionné pas ces activités. Manifestement, les organismes mutualistes procurent à leurs adhérents des renseignements, de la formation et de l’éducation, leur contribution aux activités de leur entreprise constitue déjà une importante démarche éducative. De plus, cette démarche prend une dimension encore plus conséquente dans les pays en développement qui sont encore en plein apprentissage de l’application de la démocratie, du mangement, de la finance, de prise en charge ainsi que dans le processus d’alphabétisation, d’apprentissage des matières scientifiques élémentaires et des relations interpersonnelles[29]. Dans ce contexte, nous pouvons citer comme exemple l’École-Club Migros de Suisse : il s’agit du premier établissement de formation continue du pays qui compte plus de quatre cent cinquante mille individus qui suivent des formations. L’Ecole propose des cours de langues, de gestion, de culture, d’informatique, etc.
Il est de fait que la formation et l’éducation figurent parmi les meilleures voies pour combattre l’exclusion sociale, économique et politique et apparemment les mutuelles participent grandement à l’aboutissement de cette démarche éducative. Toutefois, l’Etat n’intègre pas, ou du moins suffisamment pas, encore ces valeurs et procédés mutualistes dans les programmes d’éducation nationaux.
Pour résumer, les mutuelles sont de véritables agents qui, par leur seul existence et leur caractère particulier, promeuvent la diversité économique au sein du globe. A l’évidence, elles contribuent significativement à l’essor de ce qu’on appelle l’ « économie plurielle[30] ». Cette influence et ces activités contribuent au maintien d’un certain équilibre et améliorent les situations sociale, économique et politique. Les organisations mutualistes prouvent que non seulement il existe un modèle de développement autre que le capitalisme, mais que ceci permet de réussir efficacement les importants défis sociaux et économiques. A noter que le mutualiste est considéré comme étant l’une des plus importantes innovations organisationnelles et entrepreneuriales du dernier millénaire.
Les mutuelles possèdent fondamentalement une plasticité remarquable et de ce fait, elles parviennent à répondre à des besoins extrêmement très variés. Par ailleurs, le modèle mutualiste est basé sur l’homologation du droit des individus à participer ad libitum à la vie culturelle de la communauté, par la « Déclaration universelle des droits de la personne »[31].
À l’heure où la crise du logement s’intensifie, d’autres solutions d’habitation reparaissent. Aujourd’hui, de nouveaux concepts voient le jour : on parle de logement social, de logement participatif, de logement écologique ou encore d’habitat groupé. Ces nouvelles formules sont élaborées et mises en œuvre en réponse aux problèmes de la réclusion, de la normalisation des habitats et de leur impact sur l’environnement. Par ailleurs, les coopératives d’habitants offrent une solution pour résoudre le problème de la spéculation immobilière.
Si un immeuble appartient à une mutuelle ou une coopérative, les adhérents mutualistes et copropriétaires disposent d’un droit d’utilisation sur leur logement. Toutefois, ils ne peuvent en aucun cas le mettre en vente ou en location pour en tirer des bénéfices personnels. En ce sens que l’habitat ne constitue pas un capital mais tout simplement un logement. En Allemagne comme en France, de nombreuses organisations collectives confectionnent des dispositions juridiques pour mettre en place, en se fondant sur le droit des affaires, de nouvelles formes de propriété qui les épargneraient des spéculations et de se concentrer sur l’utilisation de l’habitat.
Le modèle basé sur la propriété privée des immobiliers astreint les foyers à payer des loyers au propriétaire durant toute la période où ils habitent le logement, cela peut durer toute leur vie. A terme, ces loyers peuvent couvrir le coût d’acquisition ou de construction. Le locataire peut, toutefois se libérer de cet engrenage s’il devient lui-même propriétaire d’un logement, à moins qu’il participe au rouage du marché en louant sa propriété, le mettant ainsi en position dominante. Même si les propriétaires n’ont pas des considérations purement spéculatives, ils en tirent avantage quand il commercialise leur immobilier à un prix supérieur au coût d’acquisition ou de construction, ou quand ils encaissent des loyers et les accroissent en fonction de la situation du marché. Ainsi, parmi les alternatives à la propriété privée, le logement social semble être une solution efficace oscillant entre location et propriété.
A l’heure actuelle, les logements sociaux font l’objet d’une démarche de marchandisation qui amène à reconsidérer l’offre immobilière. Cette nouvelle réalité amène aussi les professionnels de l’habitat à trier les demandeurs qui peuvent acquérir un logement au sein des résidences sociales.
- La situation actuelle du marché du logement social
Le logement social s’inscrit au centre des enjeux des acteurs de l’habitat et plus particulièrement des mutuelles.
Aujourd’hui, nous constatons que le logement social destiné aux personnes de la classe moyenne subit une démarche de de marchandisation. Ce processus est sévèrement critiqué par Clerval dans ses œuvres[32]. Eyraud indique que « depuis une vingtaine d’années, le logement social en France vit des mutations internes, qui à terme menacent la vocation sociale du système[33] ». Cette inquiétude de l’auteur semble justifiée étant donné que le pays compte, d’après un recensement de l’année 2009, 5 140 000 logements sociaux qui constituent 18,5 % du parc des résidences principales. Eyraud partage le point de vue de Clerval et affirme par ces mots :
« Évalués à 200 milliards d’euros en 2011 par le président de la Société Nationale Immobilière (SNI), premier bailleur en France avec près de 300 000 logements sociaux, les Habitations à Loyer Modéré (HLM) suscitent la convoitise des milieux de l’immobilier et financier. Même les bailleurs privés veulent participer au festin qui s’annonce et réclament des allègements fiscaux équivalents pour louer aux classes moyennes, voire aux catégories modestes, en échange d’une réduction de loyer[34] ».
Sur le plan législatif, les offices d’habitations à loyer modéré sont maintenant soumis aux normes de comptabilités privées qui ont certainement été introduites par la mise en place des Offices Publics d’Aménagement et de Construction (OPAC)[35]. Effectivement, des politiques locales d’urbanismes délaissent souvent la production d’immobiliers sociaux au profit de la production de projets moins imposants en « rationalisant le financement et en démultipliant les opérations de démolition des quartiers HLM d’habitats populaires »[36]. Les terrains dégagés suite à ces opérations n’auront alors aucune valeur marchande et le bailleur peut les revendre sur le marché à un prix aligné à ceux de la concurrence[37].
Eyraud précise que « dans la même loi, les sociétés anonymes d’habitations à loyer modéré obtiennent une réforme des règles de gouvernance interne. Le Conseil d’administration, jusqu’alors gouverné par quatre collèges égaux, parmi lesquels le bailleur et les locataires, sera désormais dirigé par le financeur, selon la règle de l’actionnaire majoritaire. Il n’y a plus qu’un pas à franchir pour introduire la rémunération du capital. Depuis, plusieurs lois sont venues conforter cette orientation: la loi de décentralisation Raffarin de 2004 a permis la dérégulation des loyers (conventionnement global de patrimoine), la Loi Boutin l’a rendu obligatoire[38] ».
Ainsi, le mode de gestion du parc social a changé et conséquemment, les bailleurs sociaux se privatisent. Eyraud affirme que ce processus de privatisation fut engagé par la loi n°2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine[39] « en donnant le pouvoir au sein des sociétés anonymes d’habitations à loyer modéré et dans de nombreux cas, au Mouvement des Entreprises de France par le canal du 1 % logement, et aux Caisses d’épargne qui avaient été privatisées sous le gouvernement Jospin. Depuis 2010, les bailleurs ont été poussés à la concurrence. Ils fusionnent, créent des groupes, achètent ou revendent des programmes de logements sociaux dans toute la France. En effet, les bailleurs sociaux peuvent désormais vendre et acheter du patrimoine HLM. Le prix d’un logement social est de l’ordre de 50 000 euros, mais l’on peut supposer qu’il est plus élevé dans les zones tendues, notamment à Paris, où les transactions sont fréquentes »[40].
Ces événements indiquent une rupture radicale avec les politiques des années 1980 et 1990 relatives aux logements sociaux. En ces temps-là, « les programmes de logements sociaux se vendaient 1 franc symbolique[41] ». D’ailleurs, l’abrogation de certains règlements relatifs aux loyers des habitations à loyers modérés figure parmi les vecteurs les plus pernicieux pour la marchandisation des immobiliers sociaux. La loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion du 25 mars 2009[42] stipule que « le conventionnement global de patrimoine, qui doit être intégré dans des conventionnements d’utilité sociale (CUS), impose aux bailleurs sociaux de réorganiser les loyers, c’est à dire de les fixer en fonction du marché »[43]. Ce qui révoque totalement les principes originels de la détermination des prix des loyers au prorata des revenus des ménages. Avant la loi Boutin, C’est l’Etat qui se chargeait de la fixation des prix des loyers (à l’exception des constructions neuves), il le faisait « en fonction notamment de la solvabilité des locataires et du montant APL (Aides au logement personnalisées). Le « découplage » de ce dispositif permettra à terme à l’État de baisser le budget des aides à la personne de manière unilatérale »[44].
Cette marchandisation des immobiliers sociaux peuvent aussi se traduire par une mise en vente des habitations à loyers modérés, une formule inspirée de la réforme de Margaret Thatcher qui a établi au Royaume-Uni le droit d’acheter un logement social. Ce principe a été instauré en France par la loi Méhaignerie du 1986, mais n’a, pour le moment, pas abouti. Eyraud affirme que « cette disposition n’a produit dans les années 1990 que des copropriétés surendettées, ou de la spéculation »[45].
Sous le mandat de Nicolas Sarkozy, le ministre du Logement de l’époque, Benoist Apparu a tenté de relancer cette loi afin de « compenser la baisse drastique des aides à la pierre, les bailleurs ont reçu l’injonction de vendre 40 000 logements par an, soit 60 à 80 % de la production annuelle de HLM, afin de financer la construction de nouveaux logements sociaux »[46].
Concrètement, les bailleurs sociaux « les plus engagés dans le processus de marchandisation, se sont pliés sans hésitation à ces instructions, le mouvement HLM dans son ensemble n’a pas suivi. C’est la raison pour laquelle, le programme de l’UMP (Union pour un mouvement populaire) aux présidentielles avait prévu d’instaurer le droit pour chaque locataire HLM d’acheter son logement, menaçant une érosion progressive mais certaine du parc HLM »[47].
Les mutuelles étant des organismes à but non lucratif, les sources de revenus qui leur permettent de fonctionner ne proviennent certainement pas d’activités commerciaux ou de la perception de recettes publicitaires. Si l’on doit détailler les activités financières et économiques des organisations mutualistes œuvrant dans ce domaine, on constate que :
- leurs ressources d’exploitation proviennent presque uniquement des loyers sur les logements en location ;
- les postes dépenses échappent dans leur grande majorité, leur contrôle, non pas qu’elles ne savent pas les gérer mais parce qu’ils sont imposés : il s’agit notamment de la taxe foncière et des annuités au titre de la dette;
- les autres postes de dépenses sont liées à la qualité de vie des occupants et doivent, de ce fait, être assurées dans le respect des conditions d’hygiène, de sécurité et de l’environnement : il s’agit des frais d’entretien et de maintenance des maisons et immeubles ;
- les mutuelles doivent également payer des frais d’accompagnement social et des frais de gestion administrative.
Les résultats des mutuelles découlent donc de la différence entre les recettes d’exploitation et les dépenses énumérées ci-dessus. Toutefois, les organismes mutualistes ne sont pas taxés sur leurs résultats d’exploitation. Ils ne paient donc pas d’impôt sur les sociétés. Cette disposition est justifiée par le fait que ces résultats sont réinvestis dans leur totalité pour financer les travaux sur les logements existants ou la construction de nouveaux. Cette exonération d’impôt sur les sociétés permet aux mutuelles d’habitat de poursuivre leurs activités par autofinancement, autrement, elles doivent chercher une autre source de revenus.
La figure ci-après nous aidera à avoir un ordre d’idée des activités économiques et financières des organismes de logements sociaux. Elle représente les recettes et dépenses de toutes les mutuelles du secteur au cours de l’année 2015 :
Sources : L’UNION SOCIALE POUR L’HABITAT, (2017), APL : des mesures budgétaires négatives pour le logement social, les ménages les plus modestes, l’économie et l’emploi, Dossier de presse, 7 novembre, p. 6.
Comme nous pouvons le remarquer les dépenses d’investissements relèvent à 17 milliards d’euros en une année. 80 % de ces investissements sont dédiés à la construction de nouveaux logements, donc ils ont réutilisés pour accroitre l’offre. Les 20 % restants sont alloués au financement des travaux réhabilitation, amélioration et aménagement des établissements déjà existants.
Le financement de ces investissements s’effectue par l’emprunt. Ensuite, les organismes les remboursent par l’argent des loyers perçus. Si ces derniers se basent sur une politique d’endettement plus lourde, alors ils sont contraints d’augmenter le loyer pour supporter le remboursement. Ce qui n’est pas du tout le but recherché.
Les organismes d’habitations à loyers modérés doivent donc recourir aux subventions pour compléter les emprunts. C’est dans ce contexte que l’Etat, et davantage les collectivités territoriales entrent en jeu par l’intermédiaire des dispositifs de mutualisation propre aux organismes de l’habitation à loyer modéré à l’instar du fonds national des aides à la pierre (FNAP).
Les mutuelles disposent aussi d’une troisième source de financement de leurs activités, à savoir : le résultat issu de la différence entre les recettes et les dépenses d’exploitation, et les produits issus des ventes de patrimoines. Les ressources provenant des résultats d’exploitation sont constantes et durables tandis que celles découlant des ventes sont plus casuels et diminuent le parc de logements des mutuelles et corollairement elles réduisent aussi les recettes de leurs activités futures.
Dans le cadre de ce travail de recherche, nous avons choisi de recourir en grande partie à des méthodes qualitatives[48] combinées à une approche de recherche croisée, notamment l’analyse multicas[49] qui consiste au stade de la récolte d’information et de leur étude, à interpréter les données et formuler une théorie[50]. Cette démarche d’analyse est adéquate car elle permet d’osciller entre les informations recueillies et les travaux théoriques nous permettant d’appréhender la manière dont la mutuelle intègre l’immobilier social dans son champ social tout en préservant son modèle économique et le caractère fondamental d’équité dans le traitement des demandes. A préciser que les théories et les modèles ont pour finalité de nous servir de guide et non pas de repère, pour que nous puissions mieux comprendre les données empiriques.
Les théories et les modèles n’étant pas utilisés comme une balise à partir de laquelle nous constituons une série d’hypothèses à vérifier, mais servant plutôt de guide afin de mieux comprendre les données terrain.
Nos choix de méthodes s’expliquent par le fait qu’à ce jour, aucune donnée théorique n’est reconnue pour connaitre les démarches et stratégies adoptées par les mutuelles pour intégrer le logement social dans sa politique. A l’évidence, ce travail de recherche est une première. Cet état de fait est aussi pour nous une opportunité d’étoffer nos informations pour répondre à la problématique de la recherche.
Nous nous sommes également inspirés des œuvres de Nieto et de son condisciple Perez pour l’identification des patterns[51] qui proposent une possibilité de reproduction des faits à partir des modèles de comportements. Les modèles présentés doivent être appréhendés non pas comme des dynamiques que l’on peut appliquer à toutes les mutuelles, mais comme étant des capacités admises de l’identité mutualiste. Enfin, Notre méthode de recherche est conforme aux critères de validité de Maxwell[52].
Au cours de notre oscillation entre les informations recueillies, les modèles théoriques et l’établissement de nouveaux concepts, nous avons collaboré avec des attachés de mutuelles, des résidents des logements ainsi que d’autres chercheurs. Au cours de notre travail, nous nous sommes rendu compte qu’étudier les organisations mutualistes nécessite la conduite d’une recherche coopérative et de l’entraide. Dans ce sens, nous avons pu réaliser ce travail grâce à la collaboration d’une dizaine de personnes. Cette étude des organisations mutualiste a donc pu être achevée grâce à une aide mutuelle d’acteurs du milieu.
L’approche qualitative peut être effectuée sous plusieurs formes, à savoir : la simple observation, l’observation participante, les interviews (non-directives, semi-directives, directives), les interviews individuelles ou de groupe, etc.
Pour que la démarche choisie soit pertinente, il faut qu’elle soit en accord avec les objectifs poursuivis.
Si les méthodes quantitatives de recherche par le biais du sondage permettent d’obtenir des données chiffrées, des ratios, des proportions, d’afficher les tendances, aidant à faire des rapprochements et d’examiner les relations entre les variables, elles sont inefficaces pour distinguer des éléments et phénomènes à faible quantité. Il est difficile de recourir à des démarches quantitatives lorsqu’il s’agit de déchiffrer et d’exprimer la complexité des pratiques selon les contextes et de comprendre d’emblée la pluralité des logiques, systèmes, processus appliqués en fonctions les différentes utilisations.
En considération des faiblesses des approches quantitatives et du contexte de notre travail, les méthodes de qualitatives semblent être les plus appropriées, plus particulièrement lors de la conduite d’interviews ou d’observations.
Au cours de cette étude empirique, nous avons appliqué deux approches d’enquête qualitative, à savoir l’observation et les interviews qualitatives.
- L’enquête par interview (non-directifs, semi-directifs, directifs) peut produire de nouvelles données aidant à l’appréhension de stratégies, d’expériences, de comportements, de modes de fonctionnement et de situations pratiques. Les interviews sont notamment les plus adaptées lorsqu’on veut étudier en détail les parcours des individus, les événements et les motivations qui orientent leur trajectoire, et aussi reconstituer des faits et des histoires de individus.
L’approche des récits de vie est singulièrement intéressante. Il consiste à suivre et transcrire l’histoire de vie des individus interviewés. La conduite d’interviews collectives peut aussi s’avérer pertinente pour constituer une dynamique ou analyser les interactions entre les personnes.
- La méthode d’enquête par observation est le plus souvent utilisée afin de soutenir l’approche par interview. Elle découle des démarches anthropologiques. L’observation consiste à décrire et interpréter les faits, elle peut aider à comprendre en illustrant la subtilité et la profondeur de pratiques sociales, des habitudes, des interactions, parfois même dans leurs formes les plus ordinaires les rendant discrètes, amenant l’entourage à penser que c’est « naturel ».
Exemple d’observations : observation d’un changement de comportement des clients des logements sociaux.
Dans notre étude, nous nous sommes focalisées sur quinze mutuelles françaises au cours de ce mémoire. Dans le déroulement de notre enquête, nous nous sommes intéressés sur le cas de deux mutuelles en particulier pour répondre spécifiquement à la question posée en problématique. Tous les organismes étudiés sont inscrites dans le classement du Global 300 et Global 500. Les renseignements collectés découlent des rapports annuels de l’année 2016, des sites web et d’entretiens par mail et en face à face avec les responsables. Ces informations sont qualitatives, mais obtenons aussi des données quantitatives. Ensuite, nous les avons analysées en nous référant aux cadres théoriques déjà exposés dans la partie précédente.
Après la collecte d’informations, nous avons examiné les cas de chaque mutuelle étudiée. Nous avons eu recours aux aides de certains chercheurs à l’instar de Monsieur Christophe Duval, anthropologue.
Au cours de notre enquête, nous avons rencontré certains obstacles limitant notre travail de recherche. En effet, certaines mutuelles ne dévoilent pas ostensiblement les informations sur leurs politiques et d’autres aspects de leurs activités ou s’abstiennent de répondre aux sollicitations qui leur sont adressées. Nous tenons donc à préciser que les données recueillies sont incomplètes pour cinq des mutuelles interrogées. En conséquence, nous avons employé, à des fins statistiques, des informations figurant dans le Global 500 et Global 500 dont les données sont celles des rapports annuels de 2014.
Aussi, parmi les éléments à tenir compte lors de la conduite de notre travail se trouvent l’échantillon de populations. D’après l’étude que nous avons réalisée, on compte 750 000 mutuelles et coopératives dans le monde. Le classement Global 300 en recense 300 et celui du Global 500 en dénombre 500. A l’évidence, un échantillon de 15 mutuelles parait donc fable. Néanmoins, même s’il ne représente pas le fonctionnement et le comportement dans son ensemble ou dans toute sa complexité, ces entreprises disposent d’une influence notable et il ne serait pas concevable d’étudier les méthodes dont toutes les mutuelles utilisent pour intégrer l’immobilier social dans leur politique sociale, sans les intégrer dans l’analyse.
Enfin, le temps imparti, la disponibilité des données, l’étendue du travail et le poids de ces organisations au sein de leur ensemble justifient le choix de cet échantillon. Aussi, cette étude est réalisée dans l’objectif d’enrichir les informations sur les études de cas des organismes mutualistes qui ne sont pas inscrits dans les classements Global 300 et Global 500. En se concentrant sur les mutuelles françaises, nous pouvons aussi fournir une meilleure représentation des organismes du pays. Dernièrement, les autres travaux consultés, qui étudient d’autres organisations mutualistes, nous permettent de confirmer les dynamiques ou mouvements observés auprès des mutuelles de grande envergure.
- Enquête auprès de Harmonie Habitat : Interview avec Brice CHINCOLLA, Directeur de la Gestion Locative et Patrimoniale
- Quel est l’intérêt d’Harmonie Habitat pour le secteur du logement social ?
Harmonie Habitat est une filiale de Harmonie Mutuelle spécialisée dans la réalisation de logement social dans le département de Loire-Atlantique. Son histoire remonte à la période de l’après-guerre, notamment en 1950 lorsque la crise du logement faisait rage. A l’époque, environ 35 % des logements dans la ville de Nantes étaient dévastés. C’est alors qu’André Hougron a créé une mutuelle d’entraide qui s’activait pour rassembler les familles pour qu’elles accèdent au logement. A l’époque, l’entité s’appelait ANAC ou Association d’Aide à la Construction. Au fil des années, l’entreprise s’est adaptée au contexte et s’est développé pour devenir en 2008 Harmonie Habitat. Si son nom a changé à travers les années, sa vocation mutualiste et restée intacte, voire renforcée. Aujourd’hui, elle tire son de Harmonie mutuelle et de son ancienne dénomination le CIF Habitat. Donc, notre intérêt pour la production de logement social date d’il y a 60 ans.
- Comment Harmonie Habitat intervient-il dans le secteur du logement social ?
Harmonie Habitat est l’un des plus grands acteurs du logement social dans le département de Loire-Atlantique. Nous logeons près de 6 000 familles dans tout le département offrant des résidences à des jeunes travailleurs, des personnes âgées et des personnes en situation de handicap.
L’une des plus grandes œuvres d’Harmonie Habitat est la construction de la Sillon de Bretagne en 1970. A l’époque, la mutuelle s’appelait Home Atlantique et c’était une société anonyme d’habitations à loyers modérés. L’immeuble Sillon comportait 980 logements et abritait 2 500 personnes. Il est un quartier à lui seul. Nous avons démarrage sa réhabilitation en 2006. Bien sûr nous avons eu le soutien de Nantes et de la ville de Saint-Herblain et ensemble on a chevé les travaux fin 2013. Les travaux ont coûté 62,9 millions d’euros entièrement prise en charge par la mutuelle.
Aujourd’hui, le sillon de Bretagne comporte :
- 21 000 mètres carrés d’espace de travail,
- 628 logements,
- 3 300 individus qui y résident ou y travaillent,
- Une médiathèque,
- Un pôle petite enfance,
- Un pôle santé,
- Un pôle emploi.
Harmonie Habitat est présente dans 73 communes et dispose d’un patrimoine de :
- 6 012 logements en immeubles collectifs et en maisons individuelles,
- 1 746 places au sein des foyers destinés aux jeunes travailleurs et personnes âgées ou en situation de handicap,
Au cours de l’année 2016, nous avons attribué 694 logements.
Notre champ d’intervention est assez large :
- Nous faisons de la réhabilitation de nos patrimoines et nous occupons de leur entretien afin d’améliorer la qualité de vie des occupants,
- Nous réalisons des logements collectifs à destination des personnes âgées des jeunes travailleurs et des personnes en situation de handicap,
- Nous construisons des logements sociaux afin de satisfaire les besoins en logements des locataires et des accédants à la propriété.
- Comment Harmonie Habitat répond-elle aux demandes d’accession à la propriété des clients ?
Nous proposons des programmes d’accession à la propriété aux personnes qui sont conformes aux conditions des ressources. Actuellement, nous vendons les logements sous le dispositif de la location-accession.
Ce dispositif est plus sûr aussi bien pour les locataires que pour nous. Pour les locataires, ils louent le logement avec option d’achat. Si, dans le futur, ils ont la possibilité d’acquérir le bien, ils n’ont qu’à activer cette option. De plus, ce dispositif leur confère plusieurs avantages dans le cas où ils décident d’acheter le logement. Déjà, ils seront exonérés de taxe foncière, le prix de vente sera plafonné ainsi que le montant de remboursement du prêt social de location-accession à payer mensuellement.
Les conditions d’accession au logement est le même que celles des locations : il y a la nationalité, les plafonds de ressources et la location du logement en tant que résidence principale.
Les plafonds des ressources varient la zone géographique et le type de logement social :
Plafonds des ressources en vigueur depuis le 1er janvier 2017.
- Le logement social est activité qui s’inscrit dans le modèle économique social, comment Harmonie Habitat arrive-t-elle à intégrer ce secteur dans sa politique sociale en préservant son modèle économique et le caractère fondamental d’équité dans le traitement des demandes ?
Harmonie Habitat a toujours connu une croissance remarquable surtout depuis ces quatre dernières années. En 2015, nous avons attribué 674 logements de plus que l’année précédente et en 2016, c’était 20 de plus qu’en 2015. Et nous continuons toujours de progresser. En 2015, notre patrimoine s’est accru de 10 % alors que nous avons investi plus de 50 millions d’euros dans tout le département.
Ces exploits découlent de la politique de développement conduite par l’organisation depuis quelques années :
- Contribution à l’accroissement de l’offre de logements sociaux destinés aux familles dans notre zone géographique, surtout à Nantes Métropole.
- Soutien et accompagnement d’Harmonie Mutuelle par le biais de la Mutualité Retraite, dans l’élaboration de l’offre de logements à destination des personnes âgées, concrétisée par la construction de logements neufs, ou par l’appui pour la reprise de logements, ou encore par le développement de l’offre de logements individuels appropriés.
- Accompagnement dans l’élaboration de solutions de logements destinées aux jeunes travailleurs et aux étudiants.
Outre sa politique de développement, Harmonie Habitat poursuit ses activités de réhabilitation de ses biens avec des interventions planifiées à différentes étapes de la progression. En 2015, La mutuelle a investi 6 millions d’euros pour la réalisation de ces activités.
Cette mobilisation a pour finalité l’amélioration de la qualité de vie des locataires et particulièrement dans le domaine de la consommation énergétique afin de réduire au minimum possible les charges locatives.
Afin de soutenir le parcours résidentiel de nos occupants, Nous opérons en recours à diverses approches :
- Elaboration d’un prêt social en location-accession de logements neufs et dans le cadre de la vente d’habitations à loyers modérés.
- Contribution active au sein du réseau coopératif nommé « Parcours résidentiel inter-bailleurs », établi dans tout Nantes.
- Considération singulière pour les mutations internes qui ont lieu dans nos établissements (En 2015, 16 % des octrois de logements sont des mutations internes).
Toujours dans le cadre de notre politique sociale, nous avons mis en place en 2016 un centre de management locatif téléphonique qui nous permet d’être plus en attentif aux besoins des occupants et améliorer la qualité de nos services.
Nos résultats au cours de ces dernières années ont été réalisés dans un contexte qui devient graduellement difficile et où le modèle économique du logement social rencontre plusieurs obstacles. Les soutiens financiers pour les constructions neuves ou la réhabilitation sont de plus en plus restreints. Les contraintes techniques et urbaines accroissent également en nombre et en complexité, obstruant la faisabilité des actions à mener.
Des obstacles législatifs sont également à prévoir pour l’année à venir : le projet de Loi de Finances 2018 par son article 52 impose une diminution d’au moins 60 euros mensuelle de l’aide personnalisée au logement des locataires d’habitations à loyers modérés. Aussi, l’Etat exige des entreprises d’habitions à loyers modérés de baisser leurs loyers de cette somme pour réduire les charges des ménages. Cependant, cette mesure coercitive engendre une perte violente de ressources pour les sociétés d’habitations à loyers modérés et les oblige à interrompre une grande partie de leurs projets d’édification et de réhabilitation de logements et aussi à limiter l’entretien des logements et l’accompagnement des individus vulnérables. Ce projet de Loi envisage aussi de supprimer l’aide personnalisée au logement « accession » entravant ainsi l’accès des familles à faibles ressources à la propriété.
En dépit de ces circonstances difficiles, la mutuelle poursuivra ses objectifs de développement et cherchera toujours à élaborer des offres qui répondent aux besoins des individus et des ménages quels que soient leurs problèmes et leurs âges et même s’ils ont des revenus modestes.
- En considération de ces risques, que conseillez-vous pour préserver la situation de vos locataires et accédants à la propriété et aussi pour soutenir et équilibrer l’accès au logement social ?
Comme je l’ai dit auparavant, Harmonie Habitat a toujours su aller de l’avant malgré les obstacles. Nous avons toujours trouvé des solutions pour assurer l’accès au logement social des ménages et des individus. Le plus grand obstacle nous devons affronter maintenant c’est ce projet de loi qui risque de coûter cher aussi bien pour nous que pour les familles modestes. Les dégâts que cette mesure engendra seront colossaux.
En ce moment, nous sommes en train de collecter des signatures pour une pétition qui sera adressée à Monsieur Macron, notre Président pour lui convaincre d’abandonner ce projet de loi. Nous ne sommes pas les seuls à mener ce combat, d’autres acteurs du logement social vont également entamer des actions alors nous allons nous mettre d’accord et unir nos voix pour faire entendre raison au gouvernement.
- Crédit Mutuel : Interview avec Gilles le Noc, Directeur Général adjoint de la confédération du Crédit Mutuel
- Le Crédit Mutuel est présent dans le secteur du logement social depuis maintenant quelques années, pourquoi l’intérêt pour ce secteur ?
Le logement social fait l’objet d’une attention particulière depuis la naissance du concept. Il enrôle différents acteurs qui ont contribué à son développement : L’Etat, les collectivités territoriales, les institutions et établissements publics, les sociétés privées, etc. Ils se rallient et s’engouent pour offrir à toute personne et à tous les foyers la possibilité de se loger correctement.
Le Crédit Mutuel est doté de fortes valeurs mutualistes, le groupe a été bâti sur ces valeurs et il continue de l’animer. Compte tenu des crises du logement qui ont sévi et qui sévissent toujours sur le territoire français, nous avons décidé d’intervenir sur ce secteur et d’instaurer ces valeurs mutualistes qui sont la solidarité, le respect des personnes et la prise de responsabilité. Le secteur du logement social correspond à ces idéaux. Ainsi, nous intervenons à notre niveau dans notre secteur géographique.
- Comment le Crédit mutuel intervient-il dans le secteur du logement social ?
Nous avons choisi de noua activer dans ce domaine en nous impliquant au sein de multiples structures d’habitations à loyers modérés.
Nous tissons des relations de coopération et de partenariats avec différentes organisations qui travaillent également dans le locatif social et dans l’accès à la propriété. Le Crédit Mutuel est ainsi actionnaire d’entreprises sociales pour l’habitat qui assurent la gestion de près de 20 000 logements sociaux.
Parmi ces entreprises sociales pour l’habitat, nous sommes actionnaires d’Atlantique Habitations. Qui propose et gère plus 11 000 logements éparpillés sur 100 communes dans les départements du Morbihan et de Loire-Atlantique. L’entreprise œuvre dans la construction de logements neufs, d’acquisition d’immobiliers, de réhabilitations des logements et de vente de patrimoine. Atlantiques Habitations proposent aussi de nouveaux services comme la gestion de foyers et de maisons de retraite. Ainsi, elle a pour mission de répondre aux besoins variés des ménages et individus à faibles ressources ou à revenus moyens.
Nous possédons aussi des actions chez Nantaise d’Habitations. C’est le plus grand bailleur privé du département de la Loire-Atlantique. En 2008, l’organisme comptait 8 000 logements situés dans ce département. Ces activités sont diverses, il réalise des logements classiques et proposent également d’autres services dédiés aux personnes âgées ou en situation de handicap, aux jeunes salariés ou ouvriers, etc.
- Comment le Crédit Mutuel répond-il aux demandes d’accession à la propriété des clients ?
Eh bien, en Loire-Atlantique par exemple, nous opérons à travers deux coopératives de production d’habitations à loyers modérés qui sont : Demeures et Tradition et La Maison Familiale de Loire-Atlantique.
Depuis leur création, ces coopératives ont mis en accession à la priorité 5 000 logements destinés aux personnes qui souhaitent être pour la première fois propriétaire d’un logement. Pour ce faire, elles proposent deux types d’offres : la location-accession et l’accession directe en vente en état futur d’achèvement.
Il leur est possible de proposer ces offres grâce à leur statut de coopérative d’habitations à loyers modérés. Ainsi, elles donnent à des foyers dits « primo-accédants » à faibles ressources des moyens d’accès à la propriété. Ces logements sont proposés à des prix en deçà de ceux du marché conventionnel. Ces coopératives, de par leurs offres, promeuvent aussi la mixité urbaine et sociale au sein de leurs collectivités.
Pour que le ménage accède à la propriété, il doit répondre à certains critères notamment le respect des plafonds des ressources annuelles et soumettre une demande de logement social ou d’accession à la propriété.
Les plafonds varient de l’emplacement géographique du bénéficiaire. En France d’outremer, par exemple, dans les régions Antilles-Guyanes, les plafonds sont les suivants :
Plafonds des ressources annuelles (en euros) | ||
Zone géographique A | Zone géographique B ou C | |
1 personne | 31 250 | 23 688 |
2 personnes | 43 750 | 31 588 |
3 personnes | 50 000 | 36 538 |
4 personnes | 56 875 | 40 488 |
≥ 5 personnes | 64 875 | 44 425 |
- Le logement social est activité qui s’inscrit dans le modèle économique social, comment le Crédit Mutuel arrive-t-il à intégrer ce secteur dans sa politique sociale en préservant son modèle économique et le caractère fondamental d’équité dans le traitement des demandes ?
Face aux dérives des entreprises capitalistes et leur obsession pour la recherche de profit maximal pour leurs actionnaires, il semble que les organismes à but non lucratif sont celles qui répondent le mieux aux besoins de la population en situation de crise.
Cette adéquation des entreprises mutualistes à la réalité se base sur trois principes : le premier est qu’elles ne sont pas obsédées par la production de dividendes au profit des actionnaires. Cette position leur permet d’éviter de prendre des risques de manière effrénée. Le deuxième est qu’elles basent leurs stratégies et leurs politiques dans la réalisation des projets à long terme dans une époque où la vision à court terme a causé des dommages conséquents. Le troisième est la considération qu’elles portent aux personnes – physiques comme morales – mises en difficulté par les incidences de l’économie du marché.
Alors pour nous recadrer dans le contexte du logement social, à l’heure actuelle, les logements, et plus particulièrement pour les jeunes, représente un enjeu socio-économique majeur. Dans cette situation, nous, mutuelles, ainsi que les organismes coopératives, sommes un authentique levier d’innovation. Notre poids financier nous confère une place importante dans l’économie du pays, mais nous n’avons pas comme but de réaliser des profits ou d’être rentables. Notre principale mission est de répondre aux besoins sociaux.
Cependant, le principe de l’équité dans le traitement des demandes est plus compliqué à appliquer car beaucoup de variables entrent en jeu pour décider de l’octroi du logement. Dans le cadre de l’accession directe à la propriété, l’accès équitable est préservé car il suffit d’étudier la conformité du dossier et de la situation de l’accédant aux critères d’attribution. Mais lorsqu’il s’agit de location ou de location-accession, nous devons prendre en compte la stabilité de son revenu, c’est-à-dire que les ménages aux ressources stables seront priorisés. Avec la mesure de la baisse des aides personnalisées au logement prévue par le gouvernement dans le projet de Loi de Finances 2018 qui, si elle est votée, aura un impact financier considérable, nous devons nous assurer que les locataires soient solvables.
- Quels sont les risques du logement social pour les mutuelles ?
Eh bien, les plus grands risques auxquels nous devons faire face actuellement est la précarité et le chavirement de la vie des ménages dans sa globalité. Ils sont confrontés à de nombreux comme le chômage, la versatilité du statut social, le divorce et bien d’autres circonstances. Ces bouleversements conduisent souvent les occupants (qu’ils soient accédants à la propriété ou locataires) à des problèmes déterminants. Et pour nous aussi car s’ils se retrouvent en difficulté, cela aura certainement un impact sur leur motivation dans la location ou l’accès au logement.
- En considération de ces risques, que conseillez-vous pour préserver la situation de vos locataires et accédants à la propriété et aussi pour soutenir et équilibre l’accès au logement social ?
Je pense que tous les acteurs et bénéficiaires du logement social doivent prendre ces risques en considération car il en va de l’intérêt général de tous. Il faut donc agir de façon à mutualiser ces difficultés. De notre côte nous cherchons toujours à innover et proposer de nouveaux services afin de pallier les risques logement.
- Quel est l’intérêt de ces mutuelles pour le secteur du logement social ?
Si le contexte et l’époque de la fondation des mutuelles de logements sociaux diffèrent, leur finalité reste la même, à savoir : fournir de l’habitat abordable pour leurs membres et clients dans un climat d’entraide et de solidarité. Harmonie Habitat fut créée après la Seconde Guerre mondiale pour aider les familles à disposer d’un logement. Le Crédit mutuel combat aussi la crise du logement mais plus tard qu’Harmonie Habitat, sa prise de responsabilité est motivée par l’idée d’offrir à toute personne et à tous les foyers la possibilité de se loger correctement.
A l’évidence, ces mutuelles sont animées d’un désir de justice social, humanitaire et de solidarité. L’idée étant de donner un toit aux ménages et personnes âgées sans que les charges ne soient trop lourdes pour eux. Ainsi, on constate une certaine proximité entre ces organisations mutualistes de par leurs valeurs et leur philosophie. L’intérêt de ces entreprises réside dans la satisfaction des besoins de ses membres et l’instauration d’une équité entre les individus dans les domaines où elles peuvent intervenir.
- Comment ces mutuelles interviennent-elles dans le secteur du logement social ?
Les mutuelles ont chacun leur manière d’intervenir au sein de leur communauté. Harmonie Habitat s’est, depuis sa création, engagée dans la production de logements sociaux tandis que le Crédit Mutuel a débuté dans l’octroi de crédit d’assurances et a ensuite élargi ses domaines d’intervention dans le secteur du logement social. A eux deux, ils comptabilisent plus de 26 000 logements à la disposition des ménages, des jeunes travailleurs et des personnes handicapées dans les département de Loire-Atlantique et de Morbihan.
Pour atteindre leur but, les mutuelles n’hésitent pas à s’allier avec l’Etat et les collectivités (cas d’Harmonie Habitat lors de la construction de l’immeuble Sillon de Bretagne) ou avec d’autres organisations coopératives telles qu’Atlantique Habitations et Nantaise d’ Habitations (cas du Crédit Mutuel). Leur champ d’activités est diversifié ; Construction de logements neufs, acquisition d’immobiliers, réhabilitation et amélioration des logements et vente de patrimoine. Ils proposent aussi des services comme la gestion de foyers et de maisons de retraite.
- Comment les mutuelles répondent-elles aux demandes d’accession à la propriété des clients ?
Les organisations mutualistes tentent toujours de faciliter l’accès au logement de leurs membres et leur offrent plusieurs possibilités de s’en procurer. Les membres peuvent choisir entre : la location et l’accession à la propriété. Dans le cadre de cette deuxième option, les mutuelles proposent deux dispositifs, à savoir : l’accession directe en vente en état futur d’achèvement et le prêt social en location-accession.
Quant aux démarches d’attribution de logements, la priorité est donnée aux primo-accédants aux revenus modestes. Les avantages sont nombreux : un prix plus abordable du logement que sur le marché classique de l’immobilier, exonération de taxe foncière, plafonnement du montant de remboursement des prêts pour la location-accession.
- Le logement social est activité qui s’inscrit dans le modèle économique social, comment les mutuelles arrivent-elles à intégrer ce secteur dans sa politique sociale en préservant son modèle économique et le caractère fondamental d’équité dans le traitement des demandes ?
L’intégration du logement sociale dans le champ social des mutuelles ne perturbent en rien leur croissance. Nous avons vu la production de logements d’Harmonie Habitat qui assument entre 2014 et 2015 une augmentation de 10 % de son patrimoine. Le Crédit Mutuel, de son côté, bien que nous n’ayons pas pu obtenir des chiffres sur leurs activités, atteste bien l’importance de leur poids financier et affirme son ambition d’accroitre sa capacité de production d’habitat social.
A noter que les activités de production, de réhabilitation ou d’amélioration de logements sociaux des mutuelles n’ont pas pour but de maximiser leurs recettes car elles ne répondent pas à des objectifs de production de dividendes. Leur statut de société de personnes à vocation non lucratif et leur mission de satisfaire les besoins de leurs membres les conduisent donc à établir des politiques différentes des entreprises classiques pour financer leurs projets. Les mutuelles misent donc d’une part sur leur capacité d’autofinancement en réinvestissant leur résultat d’exploitation et d’autre part, sur les emprunts et les subventions de l’Etat ou des collectivités locales tels que nous l’avons indiqué dans la partie précédente. Ce qui demande une bonne gestion des ressources. Outre ces sources de financement, les mutuelles ont également une politique de développement qui leur permet d’être toujours fonctionnelles et de réaliser des exploits. Chincolla, le Directeur de la Gestion Locative et Patrimoniale d’Harmonie Habitat nous a expliqué que le groupe contribue à accroitre son offre en logement sociaux. Nous pouvons comprendre par-là que c’est en investissant continuellement dans la construction de logements neufs qu’ils arrivent à maintenir l’attractivité et leur performance. En d’autres termes, plus ils investissent dans la production, plus ils élargissent leur parc et par conséquent leur offre. Etant donné le nombre des personnes mal logées dans le pays, cette politique de développement leur rend intéressant au regard des financeurs. Aussi, les organismes comme Harmonie Habitat qui fait partie d’un grand groupe mutualiste tel que Harmonie Mutuelle peuvent compter sur le soutien des entités du groupe pour optimiser leurs offres.
En ce qui concerne l’équité du traitement des demandes de logement social, les mutuelles sont confrontées à une problématique majeure : « le conflit entre la volonté et le principe d’aider les personnes aux revenus modestes et leur solvabilité ».
En effet, la solvabilité figure parmi les critères principaux d’attribution d’un logement social pour bon nombre d’organismes. Or, selon une étude menée par Jean-Claude Driant, Françoise Navarre et Pierre Pistre, près de 50 % des demandeurs de logement social sont trop pauvres pour remplir les critères règlementaires de solvabilité[53].
Les mutuelles et les organismes d’habitations à loyers modérés disposent d’une méthode de simulation du loyer jugé « acceptable » par les personnes sollicitant un logement social. L’approche est fondée sur deux exigences définies par convention :
- un taux d’effort net acceptable plafonné à 20% du loyer, charges non prise en compte ;
- une liquidité minimum disponible de 800 euros par unité de consommation pour les besoins élémentaires du demandeur, ce montant équivaut à 80 % du seuil de pauvreté de l’année 2014[54].
Le calcul est basé sur les revenus mensuels globaux « actuels » des ménages après déduction des pensions alimentaires s’il y en a et comprenant les allocations. Ce montant n’inclut pas également les aides personnalisées au logement. Cependant, ces organismes prennent en compte le revenu fiscal datant de deux ans passés pour positionner les demandeurs vis-à-vis du plafond des ressources. Par exemple, si, en 2017, un ménage formule une demande de logement social, il doit déclarer son revenu global actuel déduit des pensions alimentaires et incluant les allocations (aides au logement non prise en compte). Ensuite, pour positionner le candidat en regard du plafond des ressources, l’organisme utilisera son revenu fiscal du 2015. Il en est aussi de même pour le calcul des aides personnalisées au logement. Déjà, ce décalage de temps peut compromettre l’éligibilité des demandeurs aux revenus modestes aux aides personnalisées au logement.
Pour revenir aux conditions normées de solvabilité des demandeurs de logement social, nous devons alors distinguer trois sortes de situations en fonction des ressources par une de consommation de ces derniers :
- la première est celle des demandeurs dont les ressources est en deçà de 800 euros : force est d’admettre que ces ménages ne remplissent pas les conditions d’acceptabilité établie ;
- La deuxième est celle des demandeurs dont les ressources excèdent les 800 euros, mais qu’après imputation du loyer « applicable », ils ne disposent plus que d’une liquidité inférieure au référentiel établi : Cette catégorie de ménage peut être accompagné afin qu’il soit en règle par rapport aux critères. Pour ce faire, la mutuelle doit réduire leur contribution au loyer pour qu’il ait une liquidité acceptable de 800 euros par unité de consommation ;
- La troisième est celle des demandeurs dont les ressources sont supérieures à 800 euros par unité de consommation même après la pratique du taux d’effort de 20 % : il s’agit dans ce cas-ci d’un ménage solvable.
Pour illustrer notre propos, le tableau suivant démontre l’effort financier des foyers demandeurs d’habitation sociale et les loyers « applicables » avec un taux d’effort net plafonné à 20 % sans modalité de liquidité disponible.
Valeurs moyennes | Nombre de demandeurs | Loyer net moyen applicable | APL hors charges moyenne | Surface moyenne (type normé) | Loyer brut moyen/m² | Reste à vivre moyen | Revenu mensuel par Unité de Consommation moyen |
Rural (hors unités urbaines) | 39 918 | 298,59 | 139,69 | 55,56 | 8,00 | 836,65 | 1 045,78 |
Petites unités urbaines | 133 474 | 289,44 | 150,77 | 56,12 | 7,93 | 800,55 | 1 000,65 |
Moyennes unités urbaines | 177 440 | 279,16 | 165,40 | 56,23 | 8,00 | 771,16 | 963,91 |
Grandes unités urbaines | 521 176 | 290,77 | 180,14 | 56,94 | 8,35 | 785,40 | 981,72 |
Unité urbaine de Paris | 445 201 | 367,78 | 171,25 | 58,05 | 9,42 | 968,56 | 1 210,65 |
France Métropolitaine | 1 317 209 | 315,34 | 170,95 | 57,10 | 8,61 | 848,48 | 1 060,55 |
Valeurs médianes | Nombre de demandeurs | Loyer net médian applicable | APL hors charges médiane | Surface médiane (type normé) | Loyer brut médian/m² | Reste à vivre médian | Revenu mensuel par Unité de Consommation médian |
Rural (hors unités urbaines) | 39 918 | 267,40 | 134,00 | 49,00 | 7,58 | 793,60 | 992,00 |
Petites unités urbaines | 133 474 | 258,00 | 161,00 | 49,00 | 7,54 | 748,44 | 935,50 |
Moyennes unités urbaines | 177 440 | 246,60 | 203,00 | 49,00 | 7,60 | 711,67 | 889,50 |
Grandes unités urbaines | 521 176 | 260,00 | 219,00 | 49,00 | 7,98 | 728,00 | 910,00 |
Unité urbaine de Paris | 445 201 | 320,60 | 157,00 | 64,00 | 8,93 | 896,00 | 1 120,00 |
France Métropolitaine | 1 317 209 | 278,60 | 195,00 | 49,00 | 8,19 | 781,33 | 976,63 |
Source : DRIANT J-C, NAVARRE F., PISTRE P., (2016), « Étude de l’offre locative du secteur des organismes d’HLM et SEM au regard de la demande de logement social en France métropolitaine », ANCOLS, Lab’Urba UPEC, p. 211.
Si on pratique, dans ces situations, un taux d’effort acceptable de 20 %, bien qu’il soit assez faible, bon nombre de demandeurs se trouveront dans des positions budgétaires difficiles.
Ainsi, en nous basons sur l’affirmation de Gilles le Noc et en considérant ces trois situations, le traitement équitable de la demande est en conflit avec le critère de solvabilité. Les ménages à revenus stables et remplissant les conditions normées seront privilégiés dans la démarche d’attribution de logement social. Ce qui est aussi justifié car, comme nous l’avons vu précédemment, les recettes d’exploitations des mutuelles d’habitat proviennent essentiellement des loyers des ménages. L’attribution d’un logement social à une personne ne remplissant pas les critères établis, présente un risque économique et financier pour eux.
Selon les dires des représentants de toutes les mutuelles, Le traitement équitable des demandes sera également obstrué par le projet de Loi de Finances 2018. A l’évidence, la réduction des loyers imposés par cette nouvelle loi aura de graves conséquences sur les activités économiques et financières des organismes d’habitations à loyers modérés. D’une part, les recettes d’exploitation de ces derniers connaitront une sensible baisse qui les contraindra à suspendre une grande partie de leurs projets de construction et de réhabilitation et de limiter les travaux d’entretien et de maintenance des logements. Il en va de même pour les services d’accompagnement des personnes vulnérables. D’autre part, le projet de loi veut aussi supprimer les aides personnalisées au logement pour l’accession à la propriété, ce qui va certainement faire obstacle à l’accès des familles à faibles ressources à la propriété. Ces mesures du projet de loi de Finance 2018 conduiront les organismes mutualistes vers un traitement inéquitable, mais forcé, des demandes de logement social.
- En considération de ces risques, que conseillez-vous pour préserver la situation de vos locataires et accédants à la propriété et aussi pour soutenir et équilibrer l’accès au logement social ?
A cette question, les personnes interviewées font appel aux valeurs mutualistes, à savoir : l’entraide et la solidarité. Le crédit Mutuel exhorte les organismes d’habitations à loyers modérés, l’Etat, les collectivités locales, les ménages demandeurs de logements sociaux, les locataires et les accédants à la propriété d’évaluer les risques car en effet, il en va de l’intérêt général. Les risques doivent être partagés, répartis entre les acteurs. Les mutuelles et les autres organisations coopératives œuvrant dans le secteur du logement social cherchent toujours des solutions innovantes pour répondre au mieux aux besoins de logements de la population. Parmi ces solutions, nous pouvons citer celle évoquée dans la deuxième situation concernant les conditions normées de solvabilité qui propose un accompagnement des ménages ayant un revenu inférieur à 800 euros par unité de consommation après imputation du loyer applicable. Cette disposition démontre un effort de la part de ces organismes à vouloir aider les ménages à disposer d’un logement social.
En ce qui concerne le projet de Loi de Finances 2018, aucune solution n’a encore été envisagée par les acteurs des habitations à loyers modérés pour faire face à cette mesure dans le cas où elle sera mise en vigueur. Cependant, des organismes comme Harmonie Habitat tentent d’avorter ce projet de loi en faisant signer une pétition qu’ils vont présenter au Président de la République pour se faire entendre.
- NUANCE ENTRE LA DEMARCHE CLASSIQUE D’ATTRIBUTION DU LOGEMENT ET LA DEMARCHE PRIORITAIRE DANS LE CADRE DU TRAITEMENT EQUITABLE DES DEMANDES
Dans la démarche d’attribution des logements sociaux, il est important de dissocier les demandes classiques qui sont soumises aux conditions générales d’attribution[55] de celles de logement entendues prioritaires. On qualifie également de personnes prioritaires, tout individu en situation de handicap, tous ceux qui accueillent des personnes en situation de handicap, tout individu qui ont des difficultés à trouver un appartement faute de moyen financier, ou encore tout individu ayant finalement décroché un emploi après une longue période de chômage[56]. Dans ce cadre, les logements conçus ou préparés spécifiquement pour les personnes en situation de handicap, doivent en priorité, être attribués aux individus présentant ces conditions ou à, la place, aux personnes vieillissantes en situation de dépendance ainsi qu’aux individus pouvant les donner l’hospitalité.
Théoriquement, les méthodes de confrontation de l’offre et de la demande de logements soumis aux formalités classiques d’attribution se différencient celles soumis aux formalités d’attribution prioritaire. La démarche classique permet d’octroyer une construction neuve ou libérée à un demandeur tandis que la démarche prioritaire s’intéresse à une demande particulière qui tend à faciliter l’accès à l’habitation. Ces deux démarches sont supposées se compléter car leur processus se fonde sur une appréciation de l’urgence du besoin en matière de logement, et sur l’établissement des préséances de relogement.
Concrètement, l’évaluation des demandes des individus identifiés comme faisant partie du public prioritaire, peut être réalisée de nombreuses façons : la commission chargée de l’examen peut procéder par un repérage préalable ou bien par un contrôle rétroactif. Dans le cas d’une procédure de repérage préalable, une personne ou famille peut être désignée ou identifiée comme appartenant à la description de public prioritaire par les collectivités locales ou les établissements de l’État ou vie une instance collaborative adossée au Plan Départemental D’Action pour le Logement des Personnes Défavorisées. A titre d’exemple, dans la métropole bretonne, le dossier de demande sera soumis à une commission d’allocation prioritaire appelée aussi « commission locale de l’habitat » qui prendra en charge la demande de logement[57]. Dans le cas d’une procédure de contrôle rétroactif, la demande de la personne ou famille n’est pas désignée ou identifiée par une instance collaborative. Il incombera aux mutuelles d’habitations à loyers modérés de distinguer les personnes considérées comme publics prioritaires et ayant disposé d’une habitation par l’approbation des commissions d’allocation. La liste des candidats bénéficiant de logements sociaux sera ensuite diffusée à la préfecture afin que cette dernière puisse vérifier si l’organisme d’habitations à loyers modérés a tenu ses engagements en termes de relogement prioritaire.
Dans les moments où le secteur de l’habitation à loyer modéré subit une forte pression, les organismes mutualistes et les autres acteurs du domaine souhaitent avoir une plus grande liberté en vue de procurer de nouveaux logements aux publics prioritaires. Ils ne veulent pas recourir au contrôle rétroactif car cette procédure est jugée trop lourde à manager et elle est moins réactive lorsqu’il s’agit de relogement, ce qui pour conséquence de laisser des logements en vacance et générant ainsi des coûts.
La politique d’attribution de logement social est souvent établie d’après la législation en vigueur et les résolutions, mais également selon la pression sociale. Afin de se conformer aux règles des politiques publics, les organismes d’habitations à loyers modérés ajustent leurs dispositifs en étoffant les listes des relogements prioritaires et les démarches d’allocation. Depuis la mise en vigueur de la loi pour la lutte contre les exclusions de l’année 1998, cet usage a connu un essor remarquable : le secteur favorise les personnes dépendantes ou en situation de handicap, les personnes en difficulté financière, les personnes fragilisées par les maladies, les personnes sorties d’hébergement, etc. Compte tenu de l’insuffisance de l’offre, les deux procédures d’attribution entrent en compétition. Les dispositifs s’entassent causant la superposition des demandes.
- LES FAILLES DES DEMARCHES CLASSIQUES ET PRIORITAIRES DANS LE CADRE DU REPECT DU PRINCIPE D’EQUITE DU TREAITEMENT DES DEMANDES
Les démarches et la complexité des procédures d’attribution telles que mentionnées plus haut prouvent que les personnes responsables des réservations et des attributions de logements sociaux disposaient d’une latitude malgré les dispositifs règlementaires et législatifs qui régissent le secteur. En effet, ces responsables peuvent agir librement et il leur est possible de favoriser un candidat en particulier d’en ignorer quelques-uns ou de pratiquement bloquer la candidature d’autres demandeurs. En d’autres termes, ils sont incontrôlables. Ce qui nuit gravement au principe d’équité du traitement des demandes.
Nous avons décelé quatre étapes de la procédure pendant lesquelles les acteurs chargés des réservations et d’attribution de logements peuvent intervenir : premièrement, lors de l’enregistrement du dossier du candidat, deuxièmement, lors de la sélection des dossiers à présenter aux organismes d’habitations à loyers modérés, troisièmement lors de la pré-instruction des candidats, et dernièrement lors de la présentation du dossier à la commission d’attribution.
Il est à noter également que les démarches d’attribution prioritaire peuvent faire l’objet d’arbitrage. En effet, la situation de concurrence qui peut s’instaurer au sein des filières prioritaires et la possibilité pour les personnes responsables des réservations et d’attribution compromettre les règles qui régissent les démarches d’attribution et de réservations. Cette latitude est communément tolérée par tous les acteurs du secteur. Elle est permise pour de bonnes et de mauvaises raisons, toutefois elle est acceptée pour démontrer la flexibilité du système et son malléabilité.
Les règlements ont été établis dans le but de cadrer le champ d’actions des acteurs et de délimiter la latitude de ces derniers. Cependant, ce cadre règlementaire procure une trop grande liberté à ces personnes qui, même en connaissance de cause, opèrent selon leur volonté dans la conduite de la démarche d’attribution de logements sociaux. D’un autre côté, pour appréhender la manière dont se pondèrent le formel et l’informel dans la conduite des démarches, il faut considérer toute l’étendue du contexte. De la sorte, le statut de chacune de ces personnes et leur façon d’intervenir dans le processus d’octroi changent suivant les variables du contexte dans lequel ils s’inscrivent. A titre d’exemple, les bailleurs sociaux, dans notre cas les mutuelles, peuvent octroyer directement du logement à un demandeur. Ensuite, il est important de se rappeler que les personnes chargées des réservations ainsi que les organismes d’habitations à loyers modérés peuvent intervenir sur le traitement des demandes dans presque toutes les étapes de la procédure de sélection et d’attribution du logement, en suivant des logiques tout à fait singulières et qui peuvent privilégier les demandeurs aux revenus modestes ou aux profils particuliers ou au contraire les dénigrer.
Néanmoins, ces logiques ne sont pas tendancieuses : elles découlent d’une anticipation des éventuels impacts de certaines actions d’attribution sur le travail et la tâche de chaque acteur (certains peuvent éprouver des problèmes dans la gestion locative tandis que d’autres sont confrontés à des problèmes de gestion sociale).
Au sein de la communauté des acteurs qui travaillent pour faire tourner le système des attributions, la majorité d’entre eux admettent que le mécanisme établi est tout de même pertinent et efficace malgré ses inconvénients. Dans notre contexte, lorsque nous évoquons les termes efficacité ou performance, il est question de l’habileté des acteurs à traiter une pile d’attribution classique et de se joindre aux politiques territoriales de l’habitat.
En France, pas moins de 400 000 logements sont attribués tous les ans en moyenne. Beaucoup admettent que le système est amendable, mais aussi intéressant lorsqu’il s’agit, entre autres, d’intervenir de manière arbitraire pour soutenir les demandeurs qui sont le plus défavorisés.
Les mutuelles occupent une place déterminante dans la vie économique et financière d’un pays. Elles sont des véritables acteurs de la diversité économique. Cette position vis-à-vis de la société leur confère un pouvoir, une influence qu’elles utilisent pour maintenir un équilibre dans la vie sociale de la communauté où elles évoluent. De par leur seule existence, elles démontrent que le modèle capitalisme n’est pas le seul modèle de développement performant pour améliorer les conditions de vie de la société. Elles sont mêmes décrites comme l’une des plus importantes innovations organisationnelles et entrepreneuriales du siècle dernier.
Dotées de valeurs de solidarité, d’entraide et de justice, les mutuelles interviennent dans des domaines où les hommes éprouvent des difficultés à s’en sortir avec une dégradation de la valeur humaine. C’est dans ce cadre d’ailleurs qu’ils ont investi sur le secteur de l’immobilier, non pas pour faire affaire, mais pour aider les personnes et les familles à disposer d’un logement décent. Bien évidemment, les cibles de leur activité sont les individus et les ménages modestes disposant ayant une faible rentrée d’argent. Leur action s’inscrit ainsi dans l’économie sociale.
Les mutuelles investissent dans la construction et la réhabilitation de logements sociaux pour répondre au besoin fondamental d’avoir un toit. A vocation non lucratif, elles ne recherchent pas à réaliser des profits, mais à satisfaire leurs membres dans le besoin. Leurs revenus sont principalement issus des loyers des logements sociaux qui font partie de leurs patrimoines. Les recettes perçues sont ensuite allouées aux postes de dépenses tels que le paiement des dettes, l’entretien et la maintenance du patrimoine, le paiement de la taxe foncière sur les propriétés bâties et les frais de gestion. Les restes des recettes après déduction des dépenses sont ensuite directement réinvestis dans les activités de construction et de réhabilitation de logements. Mais ce résultat d’exploitation ne suffit pas pour rester fonctionnel, les mutuelles d’habitations à loyers modérés doivent recourir aux subventions de l’Etat et des collectivités locales ainsi qu’à l’emprunt qui couvre d’ailleurs au moins 80 % de leurs investissements. Toutes les recettes encaissées sont directement utilisées pour la construction de nouveaux logements.
La politique de développement des mutuelles de l’habitat est très performante car elle se base sur l’extension du patrimoine grâce à un investissement permanent dans la construction de logements neufs. Cette politique concorde à la demande accrue en logement : des millions de personnes sont à la recherche d’habitations et la production continuelle est donc une démarche de réduction du nombre de personnes mal logées, incitant les bailleurs, les collectivités et l’Etat à contribuer à ces programmes qui s’inscrivent dans la politique de développement du pays. Ce qui répond à la problématique de l’intégration du logement social dans le champ social des mutuelles dans le respect de leur modèle économique.
Concernant l’équité du traitement des demandes de logement social, les organisations mutualistes sont en difficulté quant à son application effective. Plusieurs variables entrent en jeu et les empêchent d’agir de la sorte, mais le critère de solvabilité reste l’obstacle majeur pour réaliser cet objectif. Le fait est que les ménages à revenus stables et remplissant les conditions normées seront toujours privilégiés dans la démarche d’attribution de logement social. Comme nous l’avons stipulé plus haut, les sources de revenus des mutuelles de l’habitat sont essentiellement les loyers payés par leurs locataires. Si les logements sont attribués aux personnes qui ont des difficultés à régler leur loyer, ces organismes ne pourront pas à leur tour combler les postes de dépenses. Ce qui représente un très grand risque économique et financier.
Un autre obstacle à la préservation de l’équité lors du traitement des demandes se situe dans les démarches d’attribution des logements sociaux. En effet, la complexité des procédures d’attribution des logements confère une latitude aux personnes responsables des réservations et des attributions de logements sociaux. Ces dernières peuvent être tentées de favoriser un candidat en particulier et d’en dénigrer d’autres. Elles intervenir lors de l’enregistrement du dossier du candidat, de la sélection des dossiers à présenter aux organismes d’habitations à loyers modérés, de la pré-instruction des candidats, et de la présentation du dossier à la commission d’attribution. Si cette latitude est tolérée par l’ensemble des acteurs du secteur pour montrer la plasticité du système et son malléabilité, la sélection des demandeurs peuvent être sujette à des décisions arbitraires.
Enfin, l’équité du traitement des demandes est menacée par le projet de Loi de Finances 2018. Cette mesure impose aux acteurs de diminuer les loyers à payer par les locataires d’en moyenne 60 euros. Ce qui aura un impact considérable sur les activités économiques et financières de ces organismes. D’une part, les recettes d’exploitation de ces vont baisser drastiquement, ce qui les contraindra à arrêter une grande partie de leurs projets. D’autre part, le projet de loi entend supprimer également les aides personnalisées au logement pour l’accession à la propriété. Cette mesure aura pour conséquences d’empêcher les familles aux revenus modestes d’accéder à la propriété. Il s’agit là d’une élimination directe de certains candidats à l’accession à la propriété. Ainsi, l’iniquité du traitement des demandes est bien présente.
En outre, la suppression des aides personnalisées au logement par l’Etat
- obstrue au projet de 35 000 familles d’accéder à la propriété et ce, annuellement ;
- garde des foyers dans le parc locatif aussi bien privé que social alors qu’ils pourraient se mobiliser vers l’accession à la propriété ;
- n’impacte que modestement le plan de réduction de la dépense publique ;
- conduira à la diminution des opérations du secteur de la construction et du bâtiment ;
Si le gouvernement supprime cet avantage, alors elle donnera lieu à une rupture économique au sein des foyers concernés, surtout ceux qui vivent dans des logements sociaux. Sans ce dispositif d’aide, ces derniers risquent de pas supporter les loyers de leur habitation PSLA.
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[1] FONDATION ABBE PIERRE, « Les chiffres du mal logement en 2013 » cité par L’EPOK & L’ECHO HABITANTS, (2015), « Étude sur l’habitat participatif et solidaire », p. 5.
[2] LEGIFRANCE, consulté le 09 novembre 2017 http://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=3CE943AAFD179D5AB0873A5BDB3C8CE7.tpdjo04v_1?idArticle=LEGIARTI000022305185&cidTexte=LEGITEXT000006074067&dateTexte=20120509
[3] LEGIFRANCE, consulté le 09 novembre 2017
[4] LEGIFRANCE, consulté le 09 novembre 2017
[5] LAOUES B. & BRIOIT N., (2015), « Logement social, comment ça marche ? », Massy ma ville, n° 202, p. 9.
[6] VALOGGIA, (2009), « Prêt locatif aidé d’intégration (PLAI) », paru le 27 mars
http://www.valoggia.fr/Infos-Conseils/Plans-de-financement-immobilier/Prets/pret-locatif-aide-integration-avantages-conditions-octroi-20090331
[7] Suivant le décret du 30 avril 1998
[8] Selon les Circulaires UHC/DH 2/3 n° 2001-14 du 6 mars 2001 et UHC/FB3/29 n° 2003-79 du 30 décembre 2003.
[9] La liste détaillée des travaux finançables est indiquée au I de l’article R. 331-1 du Code de la Construction et de l’Habitation.
[10] Articles R. 331-17 à R. 331-21 du Code de la Construction et de l’Habitation.
[11] Cette durée peut être prolongée à trente ans pour les logements neufs qui respectent à certaines normes de qualité environnementale et ceci vaut aussi pour les prêts locatifs à usage social et les prêts locatifs aidé d’intégration à une différence près au niveau des délais.
[12] Articles R. 331-19 du Code de la Construction et de l’Habitation.
[13] Articles R. 331-20 du Code de la Construction et de l’Habitation.
[14] Ibidem, p. 10.
[15] LAROUSSE (2012). Consulté le 11 novembre
http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/impact/41780.
[16] BRAUDEL, F. (1993). Civilisation matérielle, économie et capitalisme. Armand Colin.
[17] MLADENATZ, G. (1933). Histoire des doctrines coopératives. Paris : Presses universitaires de France, p. 48.
[18] Ce chiffre correspond aux réserves des mutuelles et des coopératives.
[19] PERRIN, G. (2016), « Top Mutualité : les 10 premières mutuelles du classement 2016 », paru le 23 novembre, consulté le 10 novembre 2017.
[20] MUTUELLES DE FRANCE, « Etat du marché de la complémentarité santé », consulté le 10 novembre 2017
http://www.mutuelles-de-france.fr/articles_detail/TXpB/etat-du-marche-de-la-complementaire-sante
[21] ICMF, (2010), « Mutuelles : le top 500 », p. 10.
[22] LAROUSSE (2012), consulté le 10 novembre 2017,
http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/%C3%A9cole
[23] LAFLEUR M. & MERRIEN A-M., (2013), « Impact socio-économique des coopératives et des mutuelles : Quand le passé inspire le futur : contribution des coopératives et des mutuelles à un monde meilleur », IRECUS, p. 14.
[24] BIRCHALL, J. & HAMMOND KETILSON, L. (2009), “Resilience of the cooperative business model in times of crisis”, International Labour Organization, p.26.
[25] LAFLEUR M. & MERRIEN A-M., (2013), « Impact socio-économique des coopératives et des mutuelles : Quand le passé inspire le futur : contribution des coopératives et des mutuelles à un monde meilleur », IRECUS, p. 15. Op. cit.
[26] NATIONS-UNIES (2010), « Résolution 64/136, Rôle des coopératives dans le développement social », p. 1, consulté le 10 novembre 2017
http://www.copac.coop/publications/un/a64r136f.pdf
[27] JOURNAL DU NET, (2017), « Classement PIB : les pays les plus riches du monde », paru le 12 juin. Consulté le 12 novembre 2017.
http://www.journaldunet.com/patrimoine/finances-personnelles/1171985-classement-pib/
[28] LAFLEUR M. & MERRIEN A-M., (2013), « Impact socio-économique des coopératives et des mutuelles : Quand le passé inspire le futur : contribution des coopératives et des mutuelles à un monde meilleur », IRECUS, p. 17.
[29] NATIONS-UNIES (2011). « Rôle des coopératives dans le développement social et mise en œuvre de l’Année internationale des coopératives », Rapport du secrétaire général, 13 juillet.
[30] LAFLEUR M. & MERRIEN A-M., (2013), « Impact socio-économique des coopératives et des mutuelles : Quand le passé inspire le futur : contribution des coopératives et des mutuelles à un monde meilleur », IRECUS, p. 19.
[31] Ibid, p. 18.
[32] CLERVAL, A. (2013), « Paris ans le peuple : La gentrification de la capitale », La Découverte, Paris, cité par PARISE F., (2015), « Habiter et consommer le logement social : une approche stratégique de l’habiter des classes populaires et moyennes sous contraintes de pouvoir d’achat », Sociologie. Université Sorbonne Paris Cité, p. 396.
[33] EYRAUD, J.-B. (2012), « La marchandisation du logement social », juillet, cité dans COREDEM, (2012), « Le logement en Europe : Délogeons la crise ! », coll. Passerelle, n° 7, septembre, p. 54.
[34] Ibid.
[35] Ibid., p. 55.
[36] Le saut vers la marchandisation se précise à partir de 2003, lorsque la loi Borloo crée l’ANRU (Agence Nationale de Renouvellement Urbain), from Eyraud, J.-B. (2012). La marchandisation du logement social.
[37] EYRAUD, J.-B. (2012), « La marchandisation du logement social », juillet, cité dans COREDEM, (2012), « Le logement en Europe : Délogeons la crise ! », coll. Passerelle, n° 7, septembre, p. 55. Op. cit.
[38] Ibid.
[39] La loi Borloo.
[40] Ibid.
[41] Ibid.
[42] Dite aussi Loi Boutin
[43] Ibid.
[44] Ibid.
[45] EYRAUD, J.-B. (2012), « La marchandisation du logement social », juillet, cité dans COREDEM, (2012), « Le logement en Europe : Délogeons la crise ! », coll. Passerelle, n° 7, septembre, p. 57. Op. cit.
[46] Ibid.
[47] Ibid.
[48] ROBSON C., (1993), “Real world research”, Balckwell publication, Oxford.
MAXWELL J.A., (1997), “Qualitative research design: An interactive approach”, Sage publication, Londres.
THIETART R.-A., (1999), « Méthodes de recherche en management », Dunod, Paris.
[49] YIN R.Y., (1993), “Application of case study research”, Sage publication, Londres.
YIN R.Y., (1994), “Case study research, design and methods”, Sage publication, Londres.
[50] GLAUSER B.G. & STRAUSS A.L., (1967), « The discovery of grounded theory, strategies for qualitative research”. Aldine, Chicago.
LOCKE K., (2001), “Grounded theory in management research”, Sage publications, Londres.
[51] NIETO M. & PEREZ. W., (2000), “The development of theories from the analysis of the organisation: Case study by the patterns of behavior”. Management Decision, 38(10), pp. 723-733.
[52] MAXWELL J.A., (1997), “Qualitative research design: An interactive approach”, Sage publication, Londres. Op. cit.
[53] DRIANT J-C, NAVARRE F., PISTRE P., (2016), « Étude de l’offre locative du secteur des organismes d’HLM et SEM au regard de la demande de logement social en France métropolitaine », ANCOLS, Lab’Urba UPEC, p. 210.
[54] Celui-ci était précisément de 1 008 euros par unité de consommation en 2014 selon l’Insee, pour le seuil de pauvreté pris à 60% du revenu médian. Il convient de rester prudent en matière de comparaisons avec le seuil de pauvreté que l’Insee calcule à partir des revenus fiscaux alors que nous disposons ici des revenus totaux (au sens des ressources mensuelles) déclarés par le demandeur lors du dépôt de la demande ou de son renouvellement. Les références au seuil de pauvreté évoquées dans le texte le sont donc à titre indicatif.
[55] Elles concernent la composition du foyer, la capacité de revenus du demandeur, les critères de logement lors de la formulation de la demande, son patrimoine, la distance qui sépare la zone d’implantation du logement et son lieu du travail.
[56] Pour mémoire, les personnes mal logées qui reprennent une activité suite à une période de chômage de longue durée forment une nouvelle catégorie de personnes prioritaires définie dans le cadre de la loi portant engagement national pour le logement.
[57] VANONI D., (2008), « Les procédures d’accès au logement social : Cadre légal, organisation, pratiques des acteurs », Politiques du logement : questions sociales, Recherches et Prévisions, n° 94, décembre, p. 46.
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