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Comment l’arbitrage épouse-t-il le système juridique saoudien ?

Les spécificités de l’arbitrage en Arabie saoudite

Introduction

 

 

L’arbitrage est-il une justice de riches ? L’arbitrage est un système de juridiction privée qui ne fait intervenir que les parties à un litige et ceux qu’elles ont choisies pour trancher sur leur litige. L’arbitrage est une justice de riches car il ne regarde que ceux qui sont en relation d’affaire. L’arbitrage connait déjà son épopée en Occident. Les conventions successives sur la question le démontre, d’abord celle de New York le 10 juin 1958 et ensuite celle de Washington du 18 mars 1965.

Le système juridique saoudien, comme tout système arabe, présente certaines spécificités. Cette spécificité s’explique par la forte présence de la religion musulmane à toute étape. Mais il s’agit également d’un système basé sur une coutume vieille de plusieurs siècles. Ajouté à ceci, l’influence de plusieurs systèmes, notamment celui romano-germanique et le Common Law presque en même temps fait naitre un système tout à fait à part. L’arbitrage n’en réchappe pas.

L’arbitrage est devenu peu à peu mais très vite un principe dans le règlement de litige, surtout avec l’accroissement des échanges internationaux. Il permet aux parties d’éviter les problèmes de conflit de loi pour choisir celle à appliquer. Cette situation permet une rapidité dans la résolution des conflits.

Par ailleurs, rare sont les mécontentements des parties quant à la sentence prononcée par les arbitres. Ceci est dû au fait que ce sont les parties elles même qui choisissent les arbitres. Il est évident que les parties reconnaissent la « justice » prononcée par les personnes même de leur choix.

Les parties conviennent souvent d’inclure une clause compromissoire en amont dans leur contrat. Cette clause compromissoire donne le pouvoir de trancher sur les éventuels litiges qui pourront naitre entre les parties. Par cette clause, les parties conviennent de ne pas recourir à une justice étatique. En effet, si les parties choisissent une juridiction étatique pour connaitre des litiges entre elles, il risque fort bien d’y avoir des lésions, tout au moins des sentiments de lésion. La loi appliquée par le juge étatique est souvent la sienne. Ce qui pourrait induire à un nouveau litige entre les parties.

Le sentiment de lésions est très important. En réalité c’est le sentiment de confiance et de sécurité qui prime dans les relations d’affaire. C’est comme le terme même du crédit qui veut dire confiance. Sans cette confiance, aucune relation pérenne ne peut s’établir. Cette confiance doit se manifester par la sécurité garantie à chacune des parties.

Le recours à l’arbitrage offre la sécurité. D’abord la sécurité pour les parties. En décidant en amont de soumettre les conflits à un arbitrage, les parties se sentent déjà en confiance quant à l’impartialité et la sécurité. Cette sécurité peut se comprendre quand ce sont les parties qui choisissent les arbitres. Les arbitres choisis sont souvent des connaisseurs de la matière à soumettre à l’arbitrage.

Les sentences arbitrales se sont multipliées énormément ces dernières années. L’arbitrage a conquis sa place dans le système de règlement des litiges. Evidemment, le recours à l’arbitrage n’enlève en rien son importance à la justice étatique. Mais l’arbitrage a su se défaire de son acception de justice de riches pour se populariser peu à peu.

Mais si l’arbitrage a également hérité de cette acception de justice de riche, c’est parce qu’il tient sa source du monde occidental. L’arbitrage est un système déjà quasi-rodé dans les pays occidentaux comme les Etats unis ou la France. Ce n’est que depuis quelques années seulement que les autres pays ont adhéré à cette façon de traiter les litiges. Les pays arabes commencent également à recourir à la justice par arbitrage.

L’Arabie saoudite est l’un des pays arabes qui ont accepté le recours à l’arbitrage. D’ailleurs, le pays a ratifié la Convention de New York pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères par voie de décret royal en 1993[1]. Cette ratification matérialise le grand pas franchi par l’Arabie saoudite vers l’application certaine des principes de l’arbitrage.

Par ailleurs, l’Arabie saoudite a prévu une législation spéciale pour l’arbitrage. Par le Décret Royal numéro M/46 12 Rajab 1403A.H. 26 avril 1983, l’arbitrage est admis comme mode de règlement de litiges sur le territoire saoudien sous quelques conditions énoncées par le même décret royal. Vient également conforter cette législation interne la loi n° M/46 du 19 avril 1984 sur l’arbitrage qui forme le pilier du droit de l’arbitrage en Arabie saoudite.

L’arbitrage est souvent recouru dans des litiges de matière commerciale qui oppose des sociétés d’affaire saoudiennes entres elles ou avec des sociétés étrangères. Quoiqu’il en soit, l’arbitrage a gagné sa place dans le système saoudien.

Mais l’arbitrage, bien que n’ayant pas eu sa dénomination actuelle, était déjà connu depuis des centaines d’années par les pays arabes. En effet, à une époque, il appartenait au Cheikh de trancher des litiges entres les parties. « Comme c’était lui qui rendait justice en son domaine, et que tous les différends entre frères, entre voisins, entre mari et femme se réglaient devant lui, le cheikh avait l’habitude d’écouter les plaignants, ensuite quelques témoins, avant de proposer un arrangement ; les parties étaient sommées de s’y conformer et de se réconcilier séance tenante par les embrassades coutumières ; si quelqu’un s’entêtait, le gifle du maître intervenait en argument ultime »[2].

L’arbitrage sous cette forme « occidentale » n’est connu dans les pays arabes, donc en Arabie saoudite, que depuis peu. Vu sa jeunesse dans le pays, l’arbitrage n’est pas encore arrivé à son apogée. Comme bien d’autres systèmes venant de l’occident, l’arbitrage a du mal a posé ses principes et à obtenir sa vraie place dans les Sociétés arabes. L’Arabie saoudite n’y échappe pas.

Les institutions dites « occidentales » se heurtent souvent aux principes posés par la Shari’a. Il est sans doute vrai qu’il n’y ait aucune raison pour que la Shari’a s’y oppose, des difficultés se font ressentir.

Ces difficultés se perçoivent par exemple quand les sentences arbitrales ont été prononcées en dehors du territoire saoudien. Les investisseurs étrangers se plaignent souvent de l’inexécution des sentences arbitrales bien que celles-ci ont été prononcées de façon légales et sous l’acceptation des parties en présence. Les parties se retrouvent bien souvent à un refus d’exequatur de la part des tribunaux saoudiens. Cette situation fait que les sociétés étrangères répugnent de traiter dorénavant avec des sociétés de droit saoudien. La sécurité juridique, pour elles, ne semble pas pouvoir être garantie.

Pourtant, l’arbitrage ne peut être écarté. Il est appelé à s’appliquer à tous les auteurs de la vie économique, même dans les pays orientaux tels que l’Arabie saoudite. L’arbitrage a déjà fait son pas dans ce pays. Mais la question de l’arbitrage nous fait réfléchir sur quelques points cruciaux.

Le premier point de réflexion revient sur le système juridique saoudien lui-même. En effet, le système diffère de ce que l’on connait habituellement dans le monde occidental. On retiendra par exemple la prépondérance du Roi dans la hiérarchie juridique du pays. Cet aspect ne doit pas être minimisé car le fondement de la justice elle-même est différent.

Ensuite, dans cette hiérarchie juridictionnelle, les Cours saoudiennes ne se présentent pas de la même façon. On distingue généralement les Cours générales des Cours spécialisées. Ces différentes Cours ont leurs propres compétences dévolues. Nous retiendront par exemple que si en Orient, les tribunaux sont rattachés au ministère de la justice, les Cours en Arabie saoudite sont rattachées aux ministères qui sont compétents en la matière.

 

Sur la question spéciale de l’arbitrage, il est vrai que l’arbitrage a été institué en Arabie par décret royal. Mais les arbitres ne sont pas librement choisis par les parties. Bien souvent, une liste d’arbitres potentiels est générée et les parties doivent choisir parmi eux.

 

Mais encore, la personnalité des arbitres est très forte. La plupart des arbitres sont des hommes. Ce fait est dû à la considération de l’Islam. Le Président du Tribunal arbitral doit par exemple être un connaisseur de la Shari’a, cette situation semble tout de suite éloigner de ce poste les femmes. En effet, dans le Droit musulman, les femmes n’ont pas énormément de droits.

Ces différents points évoquer nous fait réfléchir à la place de l’arbitrage en Arabie saoudite, son fonctionnement et son aboutissement. Ces questions peuvent être englobées dans un seul problème qui fera l’objet de ce travail : « Comment l’arbitrage épouse-t-il le système juridique saoudien ? »

Mais avant d’entrer dans le vif du sujet, procédons à une brève présentation du système juridique et judiciaire de l’Arabie saoudite. Le système judiciaire du pays est formé par des Cours générales et des Cours spéciales. Mais le système héritant de siècles de coutume, le Roi retient encore une place prépondérante.

 

 

 

 

 

 

Présentation du système juridique et judiciaire saoudien

 

Le système juridique, mais surtout judiciaire de l’Arabie saoudite, et en générale par quasiment tous les pays arabes, est empreinte des influences occidentales, notamment l’influence qu’a eu le droit français sur le droit musulman. Nous retiendrons cette hiérarchie des cours qui existe en France avec à son sommet la Cour suprême. Cette Cour suprême est au sommet de la hiérarchie et est compétent pour connaitre et réviser  des jugements rendus par les Cours inférieures.

Dans son principe, cette Cour suprême a repris le système dualiste que connait le système français. La Cour suprême est formée par la Cour de cassation compétente pour connaitre des litiges d’ordre civil ou pénal, et le contentieux administratif sous la compétence du Conseil d’Etat. Ce système dualiste a été repris par bon nombre d’Etat arabe, mais également par certains Etats voisins de la France, comme en Allemagne ou en Belgique. Il faut dés lors croire que ce système dualiste d’une Cour supérieure ou Cour suprême a convaincu les praticiens du droit du monde, même les pays arabes.

 

  1. La prépondérance du Roi dans le système judiciaire

 

En Arabie saoudite, la compétence d’une telle Cour supérieure relève encore du droit régalien. Le pays étant encore une monarchie, cette compétence est exclusivement réservée au Roi. Le Roi en Arabie saoudite, comme en France avant la république, tient encore une place prépondérante dans l’ordre juridique et judiciaire. Il est considéré comme la Cour ultime pour connaitre des injustices qui pourraient naitre des conflits et des jugements rendus par les Cours considérées inférieures.

Le Roi a le pouvoir de rétablir l’ordre et réparer les injustices[3]. Les citoyens ou les sujets plus exactement ont la possibilité de s’adresser eu Roi pour connaitre du jugement rendu par les tribunaux inférieurs. Le Roi occupe ce statut d’organe suprême judiciaire, il est également la source du pardon. En cela, le Roi a la possibilité de réviser les procès, même les condamnations à mort pour offrir son pardon et ainsi éviter à une personne une exécution.

En définitive, tous les pouvoirs, que ce soit l’exécutif, le judiciaire et même le pouvoir nizamique qui est en quelque sorte le parlement, tourne autour de la personne du roi. En Arabie saoudite, comme pour la plupart des pays arabes et musulmans, la séparation des pouvoirs qui est au socle même d’un Etat de droit ne se manifeste pas encore efficacement. En effet, la profession judiciaire est intimement liée au pouvoir ministériel et administratif. A sa base, les juges que l’on appelle les Cadis sont des fonctionnaires de l’Etat qui sont chargés à la fois des affaires administratives et en même temps de résoudre les litiges.

Le système judiciaire arabe est basé sur la fonction des cadis. Ces cadis sont des fonctionnaires délégués à la justice. Ils sont au service de la justice et de l’équité. Ils sont nommés pour réprimer les violations à la loi mais ne participe pas véritablement à l’instauration d’une jurisprudence ni à l’évolution du droit. Ils ont la simple charge de faire respecter les valeurs musulmanes.

 

  1. Juridiction civile, pénale et administrative

 

L’appareil judicaire saoudien est très vaste et très complexe. Il existe plusieurs Cours parallèles. La raison en est qu’il n’existe pas véritablement de séparation de pouvoirs, entre l’exécutif et le judicaire. En réalité, tout l’appareil judiciaire se trouve sous la coupe du Roi. Par ailleurs, c’est le Roi qui reste l’instance suprême de juridiction.

Les deux principaux ordres de juridictions sont les tribunaux char’iyés et le diwan al-mazalem. Les tribunaux char’iyés constituent les tribunaux de droit commun. Ils connaissent des matières civiles et pénales qui ne relèvent pas d’une autre juridiction. Ces tribunaux doivent appliquer les prescriptions de la Shari’a. D’ailleurs, ces tribunaux sont formés par des ulémas sortis des universités charaïques. En tant que connaisseurs de la Shari’a, ces tribunaux sont également appelés à se prononcer sur la conformité à la Shari’a des textes nizamiques.

Mazalem pouvant signifié en français abus le diwan al-mazalem est considéré comme le tribunal des abus. Il s’apparente comme l’instance administrative en France. Il connait des recours pour excès de pouvoir, mais également de toutes les injustices que les citoyens pourraient se plaindre des faits et actes des fonctionnaires de l’Etat et de l’administration en général. Mais avec le temps, les matières que le diwan al-mazalem connait se sont étendues. Ainsi, cette instance connait dorénavant de matière pénale et civile, comme l’application des jugements mais également de l’exécution des sentences arbitrales. La compétence du diwan al-mazalem s’est même étendue jusqu’aux matières d’ordre commercial.

Ce système juridique arabe, et en particulier saoudien reconnait l’arbitrage comme une possibilité de recours. Il a été consacré par un décret royal. Mais bien que l’institution d’arbitrage soit reconnue par le droit saoudien, il présente également des spécificités. Bien que l’arbitrage soit une institution d’origine occidentale, le système saoudien tient encore aux valeurs ancestrales et religieuses. Cette prépondérance est source des spécificités de l’arbitrage que nous verrons tout au long de ce travail. Cette spécificité, nous les relaterons à travers trois points, spécificité quant aux sources du droit de l’arbitrage, spécificité quant à l’application de l’arbitrage, et enfin spécificité quant à l’exécution des sentences arbitrales.

 

 

 

 

Chapitre premier : Les sources du droit de l’arbitrage en Arabie saoudite

 

 

 

 

L’arbitrage, s’il est reconnu en Arabie saoudite comme un mode de règlement des litiges, présente une réelle spécificité. Si dans un pays occidental comme la France, l’arbitrage est au cœur d’une activité très poussée, en Arabie saoudite et d’une façon plus large, l’arbitrage est encore très limité. Pourtant, les professionnels et les commerçants, surtout occidentaux, ont déjà cette culture d’imposer un règlement en dehors de la juridiction étatique. De cette façon, les professionnels obtiennent plus de garantie quant au respect de leurs droits et l’équité.

Pourtant, le droit de l’arbitrage en Arabie saoudite, relativement récent, ne reconnait pas certaines valeurs et certains principes que le droit « commun » de l’arbitrage tente d’imposer dans le règlement des litiges et à l’instauration d’une justice non étatique. Bien souvent, les professionnels se retrouvent étonnés de voir leurs sentences inappliquées ou rejetées quand ils revendiquent l’application.

Pour cela, nous nous devons de présenter le système choisi en Arabie saoudite pour appliquer l’arbitrage. Commençons tout d’abord par présenter les sources du droit de l’arbitrage en Arabie saoudite. Il existe des sources internes de ce droit. Mais l’Arabie saoudite étant en forte relation avec les autres pays, nous verrons également l’attraction du système saoudien avec les autres systèmes.

 

 

Section 1 : Les sources internes du droit de l’arbitrage

 

L’arbitrage a été institutionnalisé en Arabie saoudite par le décret royal numéro M/46 12 Rajab 1403A.H. 26 avril 1983. Ce texte admet l’arbitrage comme un mode de règlement des litiges pouvant naitre des relations entre particuliers, personnes physiques ou morales. Ce texte forme en lui-même l’essentiel de la source au niveau interne du droit de l’arbitrage en Arabie saoudite.

Mais à coté de ce texte, il existe la Shari’a. Il ne s’agit pas d’une règle homogène écrite mais plutôt de valeurs auxquelles tout musulman doit se conformer. Bien que ne s’agissant pas réellement d’un texte, la Shari’a est une règle impérative qui régit toutes les matières, l’arbitrage n’y échappe pas.

 

  • 1 : La législation sur l’arbitrage en Arabie saoudite

 

En Arabie saoudite, l’arbitrage n’est plus une instance nouvelle. Il a toujours existé, bien que sous une forme que l’on ne l’envisage pas aujourd’hui. Si auparavant la tache de l’arbitre revenait au Cheikh, aujourd’hui l’institution d’arbitrage a évolué pour laisser la place à des arbitres professionnels.

Pour le pays, la première consécration légale de l’arbitrage a été instituée par la première loi commerciale. Cette loi avait consacré quatre articles sur cette instance privée. Mais la véritable consécration avait été effectuée dans la loi mettant sur pied les chambres de commerce.

Mais la loi qui portait création des chambres de commerce présentait des lacunes. En effet, l’arbitrage n’avait été institué que pour les membres desdites chambres. Seuls les adhérents pouvaient prétendre à un arbitrage au niveau des chambres.

En 1984, le 19 avril 1984[4], une loi avait été promulguée tenant uniquement de l’arbitrage. Cette loi comportait 25 articles détaillés organisant l’arbitrage et les procédures à suivre. Nous pouvons affirmer que cette loi est le tenant de la législation sur l’arbitrage en Arabie saoudite.

A coté de cette loi, des décrets royaux ont également été promulgués pour conforter l’arbitrage dans le pays, notamment le décret royal M/11 du 29 décembre 1993 pour l’adhésion du pays à la convention de New York sur l’exécution des sentences arbitrales.

Ne voulant pas exposer les articles de la loi sur l’arbitrage en Arabie saoudite, nous nous attarderons plutôt sur ses points forts et ses faiblesses. En effet, des discussions s’élèvent autour de cette loi, notamment sur sa portée, mais également sur son objet.

 

  1. Objet de la loi

 

L’objet de cette loi de 1984 est l’arbitrage. Cette loi ne pose aucune restriction réelle quant à la matière arbitrable. Elle préconise néanmoins la seule restriction à l’Etat et aux agents de l’Etat ainsi qu’aux matières relevant du droit pénal. En effet, le droit pénal ne doit relever que des instances étatiques. Cette matière ne peut faire l’objet ni d’arbitrage ni de conciliation. Mis à part ce domaine exclusif, toutes les matières peuvent être arbitrées selon cette loi, jusqu’à la matière administrative. Mais quoiqu’il en soit, l’arbitrage a un large champ d’arbitrabilité[5], mais la première matière reste le domaine commercial.

 

  1. La portée de la loi

 

Mais la question est si elle concerne l’arbitrage interne ou l’arbitrage international. Pour cela, il existe deux courants bien distincts. Des auteurs considèrent que couvre autant l’arbitrage interne que l’arbitrage international. D’autres auteurs sont pourtant plus prudents quant à cette approche.

 

  1. La loi de 1984 et l’arbitrage interne

Cette loi est quasiment complète concernant l’arbitrage interne. Elle expose du statut des arbitres. Elle reconnait les mêmes valeurs que pour tous les systèmes d’arbitrage dans le monde. En son article 4, la loi expose de ce que le Tribunal arbitral doit être formé d’un nombre impair d’arbitre.

Mais sur ce statut de l’arbitre, le système saoudien innove en instaurant une restriction quant à la confession de l’arbitre. En effet, suivant les termes de l’article 4 du règlement d’application de la loi prévoit que les arbitres doivent être de confession musulmane[6]. Cette solution retenue évite le recours aux arbitres occidentaux. Elle est surtout le reflet de la méfiance du système saoudien par rapport au système occidental[7].

Ensuite, la loi préconise une procédure plus complexe pour l’arbitrage. En effet, si la procédure normale que nous connaissons en matière d’arbitrage en Europe est d’inclure une clause d’arbitrage dans le contrat, la loi saoudienne insiste sur le besoin de dresser un acte tout à fait à part. C’est l’acte d’arbitrage. Une simple clause insérée dans le contrat ne vaut que l’intention de soumettre à arbitrage les litiges.

Par ailleurs, cette convention, l’acte d’arbitrage doit être soumis à l’approbation des chambres commerciales, c’est-à-dire de la juridiction saoudienne. Sans cette approbation, la sentence de l’arbitrage ne peut être exécutée sur le territoire saoudien.

Cette immixtion ou cette place que retient la juridiction saoudienne dans la procédure d’arbitrage contraste avec le but de l’arbitrage. Elle relate la spécificité que représente l’arbitrage dans le pays. En effet, l’objectif de l’institution d’arbitrage est réellement d’éviter les juridictions étatiques. Pourtant, l’arbitrage semble être sous le contrôle très strict de la juridiction étatique en Arabie saoudite.

 

  1. L’application contestée à l’arbitrage international

Il n’y a nul de doute quant à l’application de la loi à l’arbitrage interne. Mais s’applique t-elle également à l’arbitrage international ? En droit, ce qui n’est pas interdit est possible. Cette loi de 1984 ne prévoit pas si elle s’applique en même temps à l’arbitrage interne et à l’arbitrage international. Ce qui pourrait nous emmener à conclure dans un premier temps que la loi peut couvrir l’arbitrage international[8].

Mais certains points de la loi nous indiquent l’opposé. D’abord, sur le statut de l’arbitre, la loi prévoit que les arbitres doivent être de confession musulmane. Ce qui pose une réelle restriction contraire aux dispositions de la Convention de New York sur l’exécution des sentences arbitrales étrangères. L’esprit de cette convention est de bannir tous les murs qui pourraient entraver l’exécution des sentences par des considérations du même ordre que la confession de l’arbitre. Il semble d’ores et déjà que la loi, par elle-même, veut éloigner de son objet l’arbitrage international.

Mais si la loi pose cette restriction de la religion, elle ne pose pas une telle restriction quant à la nationalité. Ce qui pourrait nous amener à considérer que la loi pourrait accepter des sentences rendues par des arbitres musulmans mais prononcée en dehors du territoire saoudien.

Ensuite, l’article 25 du règlement exécutoire de la loi prévoit que la langue de l’arbitrage doit être la langue arabe. Encore une fois, cette limitation ne peut concerner l’arbitrage international et limite son champ à l’arbitrage dans le monde arabe tout au plus.

Enfin, pour conforter cette inadéquation de la loi saoudienne avec l’arbitrage international, cette loi précise que le droit saoudien seul doit être applicable. Cette mesure est autant contraire à la Convention de New York ainsi qu’à la convention arabe de Riyad qui précisent le libre chois des arbitres du droit applicable.

En définitive, la loi saoudienne sur l’arbitrage se cantonne par elle-même à l’arbitrage interne. Elle a de son propre fait exclu toute possibilité de couvrir l’arbitrage international. Il peut s’agir d’une volonté expresse du législateur autant que d’une carence de la législation saoudienne.

 

 

  • 2 : La Shari’a

 

  1. L’envergure de la Shari’a

 

La Shari’a peut être considérée comme la loi islamique. C’st au moins l’acception que retient le monde occidental. En réalité, la Shari’a englobe beaucoup de chose et touche à peu près toutes les matières. C’est la Shari’a qui régule la vie de tous les musulmans, individuellement mais également de façon sociétaire. La Shari’a est à la base même du droit musulman.

La Shari’a peut être comprise de façon multiple, suivant le point de vue. Mais pour un musulman, la Shari’a ne peut être que la révélation divine. La Shari’a est le chemin, la route qui mène vers Dieu. Pour un musulman, la finalité de toute chose est Allah. Les faits et gestes qu’il pose doivent être effectués dans ce but et uniquement ce but. Nous comprenons mieux pourquoi la Société musulmane est-elle aussi catégorique sur le respect des révélations divines. La Shari’a est la loi suprême. Elle émane de Dieu.

Si la Shari’a est considérée comme une loi divine, il appartient essentiellement au juge de transcrire une telle loi pour l’imposer à tous les musulmans. Ces juges, ce sont les cadis. Néanmoins, ces cadis ne doivent pas transcrire ces paroles divines avec leur seule intelligence. Il faut que cette transcription soit véritable et suivent l’esprit même de la parole divine. C’est pour cela que les Cadis sont des spécialistes de la Shari’a, sortants d’université charaïque ou équivalente. L’Arabie saoudite est l’un des pays qui ont opté pour une intégration de la Shari’a dans leur législation.

La Shari’a, bien qu’elle soit une règle immuable, même avec le temps, a néanmoins subi plusieurs atténuations. Sa place a pour le moins régressé, surtout avec le partage et la relation avec l’Europe. Des praticiens du droit musulman tentent d’optimiser l’application de la Shari’a en opérant des interprétations souvent large de la loi divine.

 

  1. Les sources de la Shari’a

 

La Shari’a n’est pas en elle-même une règle écrite et homogène. Elle tire ses sources en majorité du Coran et de la Sunna. Mais bien que la Shari’a ne soit pas une règle écrite, elle s’impose à tous les adeptes, autant que ces derniers veulent trouver la voie de Dieu. La Shari’a s’impose comme la loi divine. La Shari’a, tout comme l’Islam, devient dés lors à la fois une religion et un droit[9].

 

  1. Le coran et la sunna

Le Coran et la Sunna forment ensemble la source principale de la Shari’a. Leurs prescriptions sont immuables et obligatoires. Leur transgression est passible fortement de punition très sévère comme en témoigne les procès et les jugements rendus par les tribunaux, notamment en Arabie saoudite. En effet, pour un adultère qui est largement prohibé par le Coran, la sanction en est la lapidation.

 

  1. Le Coran, source de la Shari’a

Pour le monde musulman, il n’y a de législateur que Dieu. Il est le seul qui peut légiférer. Ses lois ont été transmises aux prophètes se succédant, donnant naissance au Coran. Le Coran dispose sur toutes matières. Il existe plusieurs versets concernant le statut personnel de l’individu, du droit pénal, mais également quelques versets sur les relations commerciales et économiques.

Sur cette relation commerciale, nous citerons par exemple un verset qui prohibe sévèrement aux musulmans de ne pas pratiquer l’intérêt, le Riba[10]. Pour les musulmans, le Riba n’est que l’expression d’un gain malhonnête qui ne peut qu’éloigner la personne de Dieu.

Mais si le Coran constitue la source essentielle de la Shari’a, « le Coran constitue essentiellement le code révélé d’un État supranational », les contenus à caractères légaux du Coran sont insuffisants pour régler l’ensemble des questions de droit. Avec le Coran, la Sunna est également source de la Shari’a.

Sur la matière d’arbitrage, le Coran a toujours été ouvert à sa pratique, comme l’affirme un de ses versets, « Dieu vous prescrit de restituer les dépôts à leurs propriétaires et de juger avec équité quand vous arbitrez entre vos semblables », verset 58 de la sourate des femmes

 

  1. La Sunna, complémentaire du Coran

Elle est consignée dans le hadith du prophète de l’islam Mahomet et de ses compagnons relatés par des chaines d’intermédiaires appelés aussi garants (isnad). Mahomet est considéré comme un exemple pour l’ensemble des musulmans. Ces hadiths vont donc servir de matière première lors de l’élaboration des lois : ce qu’a fait Mahomet en telle circonstance aura force de loi, en première approximation.

 

 

  1. Les sources secondaires de la Shari’a

A coté de la Sunna et du Coran qui sont considérés comme les sources principales de la Shari’a puisqu’ils sont porteur du message de Dieu par le biais des prophètes, il existe également d’autres sources jugées secondaires mais qui présentent une grande importance dans la mise en place et l’évolution de la loi islamique, le droit musulman, la Shari’a.

Parmi les sources secondaires qui ne sont pas limitées et que l’on ne va pas évoquer toutes ici, nous pourrons retenir la coutume et la kanun. Comme dans tous les systèmes juridiques, la coutume peut être source de droit. Il s’agit des façons et de l’esprit dont vivaient les ancêtres. S’agissant de coutume dans le système musulman, ce sont les solutions adoptées aux situations que les précédents ont adopté et qui ne sont pas contraire aux prescriptions du Coran.

A coté de la coutume, il y a évidemment la loi, ce que le système islamique appelle Kanun. Les travaux kanunites doivent respecter l’esprit de la shari’a, les lois doivent être compatibles à la loi islamique. C’est le rôle des Cadis d’y veiller, les juges musulmans qui sont et doivent être des spécialistes sortants d’université charaïques.

 

Section 2 : Le système saoudien et les autres systèmes

 

  • 1 : La relation avec l’occident

 

  1. La genèse de l’arbitrage international en Orient avec le pétrole

 

Au moyen orient, dans les pays arabes, l’arbitrage a connu ses débuts pendant les années 50, avec la fin de la seconde guerre mondiale et la reconstruction du monde occidental ravagé par la guerre. Cette reconstruction de l’occident a fait apparaitre un besoin colossal en matière d’énergie, la main mise sur le pétrole est devenue la priorité des pays occidentaux, entre les Etats unis et les pays de l’Europe.

La première sentence en matière de pétrole avait opposé le Cheik d’Abu Dhabi et une société occidentale, le Petrolium Development ltd. L’arbitrage sous le contrôle de Lord Asquith of Bishopstone avait pour mission de déterminer les zones de contrôle et d’exploitation de la société convenue entre les deux parties. Les autres sentences[11] prononcées après cette première ont d’ailleurs eu toutes cette mission.

Les arbitres devaient se prononcer sur le droit applicable aux conventions conclues ente les parties. Toutes les sentences avaient écarté la possibilité de soumettre les litiges au droit national arabe que les arbitres jugeaient inapplicables.

En Arabie saoudite, la célèbre sentence d’Aramco[12] n’y a pas dérogé et a suivi les précédents d’Abu Dhabi. En d’autres termes, l’application du droit saoudien a été écartée pour motif que « le droit hanbalite ne contient aucune règle précise sur les concessions minières et a fortiori sur les concessions pétrolières et le tribunal arbitral appliqua le principe de l’autonomie de la volonté ».

Le droit musulman fut écarté pour ses lacunes et son inadaptation aux exigences du commerce international. Mais la conséquence d’une telle solution fut la méfiance des pays arabes vis-à-vis de l’arbitrage introduit par l’occident.

Ce n’est que dans les années 80 qu’un changement se dessina dans cette pratique de l’arbitrage en terre d’Orient. Les arbitres ont commencé à être conciliants vis-à-vis des droits nationaux musulmans. Le moyen d’inopérant de la Shari’a, de la loi islamique a commencé par être écarté de plus en plus et les droits nationaux arabes ont pu trouver leur application dans les litiges opposant les pays arabes aux sociétés d’exploitation pétrolière occidentales[13].

Malgré cette évolution de l’arbitrage vis-à-vis du droit musulman, les pays arabes continuent à être méfiants envers les autres systèmes. Le cas spécifique de l’Arabie saoudite est très palpable. En effet, l’Arabie saoudite continue cette méfiance en édictant la loi de 1984 sur l’arbitrage qui exclut implicitement l’arbitrage international de son champ d’application.

 

  1. La convention de New York

 

L’Arabie saoudite a adhéré officiellement à la Convention de New York du 10 juin 1958 sur l’exécution des sentences arbitrales étrangères avec la promulgation du décret royal M/11 du 29 décembre 1993. La convention de New York est et reste le grand pilier de l’arbitrage international. En adoptant cette convention, l’Arabie saoudite a accepté son application. Néanmoins, le gouvernement saoudien a émis certaines restrictions dans cette application.

 

  1. Exposé de la convention

Cet exposé sera relativement bref puisque nous reviendrons encore en substance sur l’application de cette convention en Arabie saoudite plus tard. Nous nous attarderons surtout sur les motifs de la convention.

Cette convention a été de  l’initiative de la Chambre de Commerce Internationale, la CCI. La CCI a élaboré un projet de convention que l’on a débattu par la suite devant le Conseil économique et social des nations unies en 1958. A l’époque, la CCI avait présenté son projet sous l’appelation de convention pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales internationales. Mais le conseil économique et social des nations unies a préféré retenir l’expression de sentences arbitrales étrangères à la place.

L’arbitrage a déjà existé bien avant cette convention. Mais son mérite réside dans la proposition faite sur l’abolition du double exequatur qui existait jusque-là[14]. En effet, la sentence devait obtenir l’exequatur du pays dans lequel elle a été rendue et l’exequatur de celui dans lequel la sentence devra être exécutée.

Cette suppression d’une longue procédure d’exequatur accorde un gain de temps précieux, un temps qui vaut de l’argent en matière de commerce. Ainsi, avec l’envol des relations commerciales entre quasiment tous les Etats, la solution se devait d’être adoptée.

La convention de New York n’est pas parfaite, les murs de l’exequatur sont encore là et les procédures d’exécution des sentences arbitrales, étrangères ou internationales restent longues et dépendent de la législation sur l’arbitrage de chaque pays. Néanmoins, l’adhésion d’une centaine d’Etat démontre cette volonté d’unifier les efforts pour prospérer le commerce international.

 

  1. La convention de New York en Arabie saoudite

L’Arabie saoudite a adhéré à la convention de New York en 1993 avec le décret royal M/11 du 29 décembre 1993. Mais le pays a également émis quelques réserves dans son application. La loi saoudienne sur l’arbitrage ne comportait aucune expression revenant aux « sentences étrangères ».

Soit elle mettait sur un même pied l’arbitrage interne et l’arbitrage international, soit elle a expressément écarté l’arbitrage international. Nous avons vu plutôt que la loi saoudienne est plutôt réticente envers les sentences étrangères. Mais la ratification de la convention de New York devrait remédier progressivement à cette situation.

La ratification de la convention de New York peut relever trois conséquences.  Dans le cas où le contrat prévoit une clause compromissoire fixant le lieu de l’arbitrage à l’extérieur de l’Arabie Saoudite, la sentence dont il sera demandé la reconnaissance ou l’exécution en Arabie Saoudite, sera une sentence étrangère qui devra être reconnue et exécutée conformément aux dispositions de la convention de New York.

 

  1. Les conséquences de la convention sur la loi saoudienne

Mais cette conséquence n’est pas automatique. En effet, la reconnaissance et l’exécution de sentences étrangères dépendent encore largement de la législation de chaque pays. Or, la loi saoudienne prévoit que la sentence doit être rendue par un tribunal composé d’arbitres de confession musulmane. Ce qui peut poser un problème avec une sentence rendue par des arbitres occidentaux.

La convention s’applique à une sentence arbitrale rendue à l’extérieur de l’Arabie Saoudite, mais portant sur un différend interne. Il n’est en effet pas rare qu’un contrat conclu entre une filiale d’une société française se trouvant sur le territoire saoudien  et une société de droit saoudien contienne une clause fixant le lieu de l’arbitrage à l’étranger. Mais le même problème peut se rencontrer quant à l’exequatur de la sentence par le Diwan Al Mazalem.

Par contre, si la sentence a été prononcée sur le territoire saoudien entre deux personnes, sociétés exerçant en Arabie saoudite, la convention est écartée et c’est la loi sur l’arbitrage locale qui sera appliquée.

 

  1. Les réserves émises par l’Arabie saoudite

La première réserve émise par l’Arabie saoudite est énoncée par le décret royal portant ratification de la convention de New York. « Le Royaume déclare qu’il appliquera la convention à la reconnaissance et à l’exécution des seules sentences rendues sur le territoire d’un Etat contractant ». Cette réserve n’est pas spécifique à l’Arabie saoudite. Elle est même normale et raisonnable.

La seconde réserve émise par le gouvernement saoudien lors de la ratification de la convention a été celle de la commercialité. Cette réserve implique que seuls les différends d’ordre commercial peuvent faire l’objet d’arbitrage international. Dans tout autres cas, aucune reconnaissance ni exécution ne pourraient avoir lieu.

 

  1. Le système de le CIRDI, la convention de Washington

 

La convention de Washington de 1968 porte sur le règlement des différends relatifs aux investissements. Elle a été ratifiée par 140 pays dont 11 pays arabes. Parmi ceux qui ont ratifié cette convention figure l’Arabie saoudite[15].

Cette convention a mis en place un mécanisme d’arbitrage institutionnel qu’est le CIRDI sous l’auspice de la Banque mondiale. Mais le véritable intérêt d’adhérer et de ratifier cet instrument est l’efficacité de dénouement des litiges garantie par le mécanisme mis en place. Néanmoins, l’Etat qui accepte de soumettre le litige à l’arbitrage du CIRDI est présumé avoir renoncé à ses privilèges diplomatiques et de juridiction.

 

 

  • 2 : L’arbitrage arabe

 

Le monde arabe a d’ores et déjà tenté de mettre en place un système d’unification de règlement de différends, surtout en matière de commerce inter arabe et d’investissement. Les deux conventions signées par les pays arabes qui ont abouti à un pseudo unification sont celles de Riyad, relayée ensuite par la convention d’Amman.

La convention d’Amman reste jusqu’à ce jour le pilier de la tentative d’unification dans le système arabe de l’arbitrage. Cette convention signée en 1974 à Amman accuse néanmoins des lacunes. Il lui est accusé une trop grande similitude avec la convention CIRDI.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Chapitre II : L’application de l’arbitrage en Arabie saoudite

 

 

 

 

 

L’arbitrage est reconnu en Arabie saoudite comme un mode de règlement des litiges. Cette institution a été consacrée par le décret royal numéro M/46 12 Rajab 1403A.H et conforté par la loi sur l’arbitrage de 1984. Si en Occident, comme en France, les Cours d’arbitrage sont des Cours d’exception indépendante de toute juridiction étatique, ce n’est pas le cas en Arabie saoudite.

En effet, les Tribunaux d’arbitrage suivent une hiérarchie imposée dans le système juridictionnel de l’Arabie saoudite. Leurs décisions, leurs sentences doivent être approuvées par des Cours supérieures. Sans cette approbation, les sentences rendues par les tribunaux arbitraux risquent fort bien d’être caduques.

Par ailleurs, l’arbitrage obéit à des critères très sévères en Arabie saoudite. Si nous n’évoquons que le cas de l’arbitre, une condition très importante pèse sur sa personnalité. L’arbitre est une personne honorable et capable de trancher sur la question à lui soumise. Cette personnalité est renforcée davantage dans l’esprit de l’arbitrage en Arabie saoudite. Il faut par exemple que l’arbitre soit de confession exclusivementt musulmane.

Ce sont là des points sommaires que nous évoquons mais pour voir le système d’arbitrage en Arabie saoudite en profondeur, il nous faudra d’abord revoir le statut de l’arbitre en Arabie saoudite avant de voir la procédure d’arbitrage elle-même.

 

          Section 1 : La nomination de l’arbitre

 

L’arbitrage, comme tout le système juridique en Arabie saoudite, et dans une large mesure en dans les pays arabes, est intimement lié à la culture. Il se rattache à la culture mais également à la religion. En effet, la culture arabe tire sa plus grande inspiration des enseignements du prophète Mahomet. Ce dernier est considéré comme le porte-parole d’Allah.

Les enseignements religieux doivent toujours être pris en compte dans la vie d’un musulman. Un musulman doit se comporter de la manière la plus appropriée et ne jamais s’écarter des valeurs de l’Islam. Chaque individu doit se comporter d’une façon digne et nul ne peut ignorer les préceptes suivant la Shari’a.

L’arbitrage, bien qu’ayant été initié par les occidentaux, ne peut passer outre les prescriptions de la Shari’a. L’arbitre doit lui-même être en complète phase avec la Shari’a. La Shari’a a été reprise par les textes de loi ayant force légale sur tout le territoire de l’Arabie saoudite. Ainsi, le statut d’un arbitre doit tenir compte de plusieurs conditionnalités.

L’arbitre doit être un professionnel ayant une certaine expérience dans le domaine qui lui est présenté. Ainsi, en matière de commerce de pétrole, l’arbitre doit avoir une connaissance poussée sur la matière. Cette exigence est commune, même dans les pays où l’arbitrage connait son épopée. En effet, il est inconcevable de faire traiter à une personne une matière dont il n’a la moindre connaissance.

L’arbitre doit être neutre et impartial. Nombreux ont été les débats soulevés sur cette impartialité que doit remplir l’arbitre[16]. Mais au final, les auteurs se sont accordés à ce que les arbitres sont supposés impartiaux dès le moment où ils ont été librement choisis par les parties.

Cette liberté dans le choix des arbitres par les parties est altérée dans le système saoudien. Ou il serait sans doute plus juste de parler de limitation. Cette limitation se réfère toujours et à chaque fois aux prescriptions de la Shari’a. Dans cette optique, trois points méritent à ce que l’on s’y attarde. Ce sont notamment la nationalité de l’arbitre, la confession de l’arbitre et enfin nous nous intéresserons sur la possibilité pour une femme d’être reconnue comme arbitre dans une affaire.

 

Les conditions que nous allons relever ici sont de l’ordre de trois. La législation saoudienne est très sévère quant à leur observation. Le manquement à ces conditions peut signifier le rejet complet des sentences qui pourraient être rendues. Ces conditions sont la nationalité de l’arbitre, la religion de l’arbitre.

Un autre point, sans parler formellement de conditions, nous évoquerons le sexe de l’arbitre. Cet aspect ne relève pas de conditionnalité mais d’un simple constat. Force est de constater que rare sont les femmes qui arbitrent des litiges, que ce soit en Occident ou en Orient. Mais connaissant la position des pays islamiques sur le sexe féminin, il est important de s’attarder sur ce point.

 

  • 1 : La nationalité et la religion de l’arbitre

 

L’un des nombreux avantages qu’offre l’arbitrage est la liberté des parties. Cette liberté s’exprime dans le choix de ou des arbitres. En amont, les parties peuvent prévoir par une clause compromissoire l’intervention d’un arbitrage en cas de différends et écarter les juridictions étatiques. Par cette clause, les parties peuvent également désigner la ou les personnes qui vont arbitrer le litige. Dans cette optique, les parties jouissent en principe d’une liberté totale.

Si les parties sont libres de choisir leurs arbitres, ceci reste encore un principe. Que ce soit dans les pays occidentaux ou dans les pays arabes, le constat reste le même, c’est l’existence d’une certaine restriction quant à ce libre choix. La nationalité de l’arbitre a souvent été source de mésentente, entre les parties, mais également entre les auteurs.

En Arabie saoudite, le décret royal n° M/46 12 Rajab 1403A.H a institué une limitation quant à cette nationalité de l’arbitre. Le décret impose à ce que l’arbitre soit de nationalité saoudienne. Cette condition est nécessaire dans la reconnaissance des sentences arbitrales rendues. Si l’arbitre n’est pas de nationalité saoudienne, le décret royal exige à ce qu’il soit de confession musulmane.

 

 

  1. Les causes de cette restriction, la Shari’a

 

L’Arabie saoudite est un Etat islamique qui base essentiellement nombreuses considérations sur la Shari’a. Plus que les autres pays arabes, tout le système juridique saoudien reflète les enseignements tirés par la Shari’a. Cette prépondérance de la Shari’a est la cause majeure de la restriction quant à la nationalité de l’arbitre. Il est estimé qu’une personne étrangère ne peut être connaisseur des prescriptions et des préceptes islamiques.

La loi sur l’arbitrage prévoit expressément à ce que l’arbitre soit de nationalité saoudienne ou de confession musulmane. Cette prescription signifie néanmoins une chose, la restriction quant à la nationalité de l’arbitre est tempérée par la notion de confession. Une personne étrangère peut alors être arbitre si elle est de confession musulmane.

L’esprit de cette considération reste le même. C’est la prépondérance de la Shari’a dans la vie de tous les musulmans. La Shari’a pose des principes très rigoureux, comme l’égalité, le partage des profits ainsi que des pertes, la prohibition des intérêts et bien d’autres encore. Ces valeurs ne se retrouvent pas dans un esprit occidental par exemple. Pourtant, leur respect est primordial dans un pays islamique tel que l’Arabie saoudite.

 

  1. Les conséquences de cette restriction

 

L’une des conséquences de cette restriction est la limitation de l’arbitre étranger. Si les arbitres peuvent être de nationalité étrangère, ils doivent néanmoins être musulmans. Ce fait écarte ipso facto l’intervention d’arbitres venant de l’occident. Il est très peu probable mais pas impossible que des occidentaux soient de confession musulmane.

Le controverse de la nationalité de l’arbitre n’est pas chose nouvelle et ne se cantonne pas aux seuls pays arabes. La tendance de la pratique de l’arbitrage était que l’arbitre soit de nationalité étrangère. Cette nationalité étrangère de l’arbitre devait être la preuve de son impartialité vis-à-vis des parties en présence. On estimait à une époque que l’arbitre ne devait pas se confondre dans un sentiment ou un esprit de paire avec l’une des parties.

Le sentiment qui existe et persiste dans l’esprit des professionnels du commerce international est celui de la « neutralité géographique ». Cette neutralité est censée être la garantie de l’impartialité des arbitres. Cette considération a bien évidemment plus d’impact psychologique que réel. En effet, nul ne peut garantir une impartialité de la part d’un arbitre tiers aux parties, plus que si l’arbitre était ressortissant d’un pays de l’une des parties[17].

Cet impact, psychologique a priori, se fait ressentir davantage quand l’une des parties n’est pas de nationalité saoudienne. La crainte réside toujours dans cette présomption d’esprit de paire avec la partie saoudienne au détriment de la partie étrangère. Ce fait est grand source de malaise dans les relations commerciales avec l’Arabie saoudite. Si les parties exigent en effet le recours à l’arbitrage, c’est expressément pour éviter les inégalités qui pourraient surgir si l’affaire était portée devant une juridiction de l’Etat de l’une des parties.

Cette considération est symbolique certes mais elle présente beaucoup d’intérêt. Comme le dit un adage anglais, « il ne suffit pas que justice soit faite, il faut qu’elle soit visiblement et manifestement faite »[18].

René DAVID[19] a réfuté cette idée. En effet, selon cet auteur, la nationalité de l’arbitre ne doit pas être considérée comme un facteur d’impartialité ou de partialité. Comme l’indique également les travaux de la CNUDCI, la nationalité de l’arbitre a été relégué au second plan. En effet, si à l’origine la nationalité étrangère de l’arbitre était un facteur décisif dans la constitution d’un tribunal arbitral, cette tendance n’a plus guère d’importance, surtout en matière d’arbitrage international. L’aspect retenu est celui du professionnalisme.

 

Se penchant sur la religion de l’arbitre, le cantonnement à la confession musulmane peut se comprendre quand le pays en question base son système juridique sur la Shari’a. Le résultat en est que c’est respecter les préceptes musulmans qui prime dans la résolution des différends. Dans un pays tel que l’Arabie saoudite, c’est l’essentiel. Bien évidemment, cette situation n’est pas toujours favorable à la partie étrangère dans les desseins ne rejoignent pas la plupart du temps l’esprit musulman.

 

  • 2 : La discrimination reposant sur le sexe

 

En Arabie saoudite, les femmes ont hérité de considérations superflues depuis des siècles. En effet, elles ne disposent pas énormément de droits, bien que la situation se soit déjà évoluée récemment. La participation des femmes dans des résolutions de conflits ou de différends est quasi inexistante, pour ne pas dire ignorée en Arabie saoudite.

En principe, n’importe qui peut prétendre être arbitre. Néanmoins, des restrictions sont toujours observées. Ces restrictions ne sont pas toujours légalement consacrées. Ce sont les usages qui les établissent. Ainsi, les arbitres devraient toujours être des praticiens du domaine qui leur serait avancés. Concernant les femmes, leur participation active dans les relations commerciales n’est que récente. D’ailleurs, elle n’est pas encore à un point où les femmes peuvent prétendre participer autant que les hommes. Ceci est d’un constat universel.

Le phénomène n’est pas réservé aux pays orientaux ou arabes. Il y a quelques siècles de cela, les principes, la jurisprudence occidentale elle-même, interdisaient aux femmes la possibilité d’être arbitre[20].

Mais le phénomène est très accentué dans les pays de l’Orient, c’est également le cas de l’Arabie saoudite. René DAVID remarque par exemple que  « En certains pays, où l’arbitrage est étroitement intégré à la justice étatique, on peut exclure les femmes parce qu’elles ne peuvent pas dans ces pays être juge ou parce qu’elles n’ont pas une pleine capacité civile ».

Cet aspect discriminatoire s’explique également par la Shari’a. En effet, les arbitres doivent avoir une connaissance approfondie des règles de l’Islam pour permettre la bonne observation de la Shari’a. Force est de reconnaitre que dans les pays islamiques, les femmes n’ont pas encore leur place dans cette vision. D’ailleurs, les femmes musulmanes n’ont pas le droit de se retrouver dans la même mosquée que les hommes lors de la prière. Autant de considérations qui écartent d’office les femmes dans la pratique de l’arbitrage et des institutions judiciaires en général.

 

 

          Section 2 : La procédure d’arbitrage

 

 

  • 1 : Les matières arbitrables

 

 

En général, l’arbitrage est une juridiction spécialisée non étatique que les professionnels du commerce international choisissent pour le règlement des différends. Il s’agit dès lors et a priori de différends d’ordre commercial.

 

 

  1. La commercialité des matières

 

Il est de la pratique commerciale de recourir à l’arbitrage pour régler les différends pouvant naitre des relations. Les parties conviennent souvent en amont et dans le contrat même de soumettre les éventuels litiges à une juridiction non étatique, à des organismes professionnels de règlements des différends.

Les parties ont libre choix dans ce sens. Elles peuvent choisir le Tribunal devant lequel seront assujetties les affaires les concernant. Elles peuvent également choisir la loi applicable. Mais pour des raisons d’ordre pratique, les parties conviennent de recourir à des organismes qui ont l’habitude du genre d’affaire. C’est le cas par exemple lorsque les parties sont de nationalités différentes. L’arbitrage est le premier procédé de règlement des litiges en matière de commerce international.

Cette commercialité de l’affaire à soumettre à l’arbitrage est suffisamment et clairement annoncée par la loi saoudienne sur l’arbitrage. Le décret royal a procédé par élimination sur cet aspect. Peuvent être soumises à arbitrage les matières pour lesquelles la conciliation n’est pas prohibée. Ces matières pour lesquelles la conciliation est prohibée sont les matières pénales[21] et les matières qui concernent la personne. Ces matières doivent relever uniquement de la compétence de la juridiction saoudienne.

Cet aspect n’est pas réservé au cas de l’Arabie saoudite. En effet, il est inconcevable de traiter une affaire d’ordre pénal par un Tribunal arbitral, ou encore le statut de la personne. Par élimination, la matière arbitrable reste celle commerciale.

Néanmoins, l’affaire Aramco[22] reste un précédent considérable. En effet, la sentence arbitrale a dû se tourner vers le droit public pour asseoir sa sentence. Se prononçant sur un contrat de concession en matière de pétrole en Arabie saoudite, le Tribunal arbitral a également dû se prononcer sur la prérogative qu’un Etat possède sur l’octroi de pavillon pour le transport maritime.

D’autres tentatives ont été effectuées pour élargir l’application de l’arbitrage jusqu’à la matière d’Etat. Des compromis d’arbitrage ont eu lieu entre des Etats pour régler des différends et des litiges qui naitraient entre eux. Mais bien évidemment, une telle application se conclue souvent à un échec, et du compromis d’arbitrage et de la sentence arbitrale[23]. Bien que l’arbitrage ne considère que la matière arbitrale, il faut savoir qu’il est également et surtout sans doute, fonction de la qualité des parties.

 

  1. La qualité des parties

 

  1. Les commerçants

Si l’arbitrage est réservé à la matière commerciale, seuls les commerçants devraient dés lors pouvoir recourir au procédé. En principe, le commerçant est celui qui s’adonne à des activités commerciales, à des actes de commerce de façon continue et en en faisant sa profession habituelle. Néanmoins, le principe retenu est la commercialité de la matière et non la profession commerciale de la personne. Autant qu’il s’agit de matière commerciale, elle peut être soumise à l’arbitrage, sans considération de la qualité des parties.

Mais dans ce sens, la loi saoudienne, le décret royal, exhorte les personnes publiques à recourir aux procédés de l’arbitrage ou de la conciliation. Cette quasi-interdiction est clairement affirmée par ledit décret.

Par ailleurs, il est difficile de traiter avec un Etat dans une procédure d’arbitrage. La raison en est la prépondérance que la personnalité de l’Etat a. Ce dernier dispose de prérogatives de puissances publiques qui peuvent peser très lourd dans les négociations. L’autre partie risque fort bien d’être dés le départ dans une situation d’infériorité face aux prérogatives de l’Etat.

 

  1. L’Etat, acteur du commerce international

Dansla pratique, l’Etat est souvent le premier acteur du commerce international. I s’agit du premier potentiel qui peut s’adonner à une telle activité et d’une façon durable. Certes, l’Etat est considéré comme acteur du commerce international, mais il ne peut être considéré comme commerçant. Ce n’est pas la personnalité des parties qui est visée néanmoins mais la nature des actes. Ces actes peuvent être de nature commerciale[24].

Dans cette optique, nous pouvons retenir une affaire saoudienne qui a fait l’objet d’un arbitrage, une affaire entre l’Etat saoudien et une entreprise américaine, l’affaire Aramco citée précédemment.

En l’espèce, il s’agissait d’un contrat de concession établi entre le gouvernement d’Arabie saoudite et l’Arabian American Oil Company. Un accord a été également conclu entre le gouvernement saoudien et M. Onassis pour le transport maritime du pétrole en provenance de l’Arabie saoudite. Le prétendu M. Onassis a argué d’une exclusivité pour le transport de tout pétrole en provenance de l’Etat saoudien, une prétention que l’Aramco a refusé d’honorer.

Dans cette affaire, l’une des parties à la convention, à la concession était un Etat, ce qui rendait les choses plus difficiles. Un accord d’arbitrage a été signé par les parties le 23 février 1955. Il n’est pas rare que des conventions mettant en relation un Etat et un particulier fassent l’objet d’un arbitrage. Ne citerons-nous ici que la sentence de Walter D. Hines et le fameux arrêt de Wimbledon.

Le litige portait sur une prétendue exclusivité de transport accordé à M. Onassis selon ce dernier et le gouvernement saoudien. La société Aramco n’ayant voulu accéder à cette demande, les différends ont surgi. Il appartenait au Tribunal arbitral désigné de trancher sur la question.

Mais avant de trancher au fond de l’affaire, le Tribunal arbitral devait asseoir son autorité. Etait-il compétent pour connaitre d’une affaire reliant un particulier et un gouvernement au nom d’un Etat ? La question relevait du droit international public. En effet, un Etat possède  des prérogatives de puissances publiques, des prérogatives exorbitantes du droit commun. Ces prérogatives accordent des droits ne relevant que d’un Etat, notamment le contrôle de la circulation maritime et l’accès aux eaux territoriales ainsi que d’accorder son pavillon à un navire.

Le Tribunal arbitral ne devait pas être compétent pour connaitre de ces aspects des relations. Mais ne s’agissant point d’une affaire entre Etats, le Tribunal arbitral en a jugé de bon droit être compétent et pouvoir trancher sur la question, et sur la base du droit international public, tout en s’appuyant sur les précédents de la Cour internationale de Justice.

Au final, le Tribunal arbitral a considéré les textes hanbalites de l’Arabie saoudite pour désigner l’aspect économique et commercial de l’affaire pour asseoir sa compétence et appliquer la sentence qui a donné tort au gouvernement de l’Arabie saoudite et écarter toute éventualité d’exclusivité de M. Onassis pour le transport du pétrole.

En définitive et pour clore cette jurisprudence, même si l’une des parties est un Etat disposant de prérogatives de puissance publique, tant que l’affaire relève d’une relation commerciale, le Tribunal arbitral est compétent pour trancher sur les litiges. L’Etat est dés lors considéré comme tout autre acteur du commerce international.

 

  1. L’arbitrage entre deux Etats

L’arbitrage entre deux Etats n’est pas chose nouvelle. En réalité, ce règlement de différend a été l’objet même de la convention de La Haye de 1907. « L’arbitrage international a pour objet le règlement de litiges entre les États par des juges de leur choix et sur la base du respect du droit ». Telle est la définition posée par l’article 37 de cette convention de La Haye.

L’arbitrage s’inscrivait naturellement dans le règlement pacifique des différends entre les Etats. Il est du choix des Etats de prouver une certaine solidarité internationale pour préserver une paix mondiale en adoptant un système de justice équitable qui ne dépend pas d’une justice étatique.

Mais ce qui nous intéresse ici, c’est le recours à l’arbitrage entre deux Etas dans le cadre d’une coopération économique, d’une relation d’affaire. L’Etat est considéré comme un acteur du commerce international.

La première remarque que l’on évoquera ici est l’échec qu’a connu le compromis d’arbitrage entre les deux Etats, l’Angleterre et l’Arabie saoudite. Le compromis avait concédé aux arbitres nommés de procéder à une délimitation des zones d’influence et de contrôle. En effet, les deux Etats se disputaient la main mise sur le pétrole de l’Oasis, une zone qui n’a été règlementée par aucune législation étatique spécifique.

Même si une tracée des zones de contrôle a été effectuée par le Tribunal arbitral, elle n’a eu pour effet par la suite qu’à un autre problème, notamment la multiplication de tentatives de coup d’Etat.

Ce qu’il faut retenir dans cette affaire de l’Oasis de Buraïmi, c’est que la conciliation et l’arbitrage sont difficiles d’application dans une matière politique ou administrative, surtout lorsqu’il est question de souveraineté entre deux Etats. Cet aspect de litige ne doit relever que des instances faites à ce sujet, notamment sous l’aile des nations unies avec la Cour internationale de justice.

 

 

  • 2 : Le dénouement de l’arbitrage

 

 

L’arbitrage, s’il aboutit, donne naissance à une sentence arbitrale. C’est la décision du Tribunal arbitral, des arbitres. Cette sentence a force de chose jugée en principe mais dans la réalité nous verrons une certaine disparité ou une disparité certaine.

 

  1. La certification de l’arbitrage

 

La certification de l’arbitrage, du compromis d’arbitrage doit être obtenue auprès de l’organe judiciaire initialement compétent pour pouvoir espérer son exécution ultérieurement. Le compromis doit contenir plusieurs énonciations qui seront considérées pour cette certification, et notamment l’objet de l’arbitrage.

Cet objet doit être conforme aux prescriptions de la loi saoudienne. Nous avons déjà longuement débattu sur cet objet matière arbitrable. Ainsi nous tournerons nous vers le lieu de l’arbitrage et le droit applicable.

 

  1. Le lieu de l’arbitrage

 

Le lieu de l’arbitrage est librement choisi par les parties. Ce lieu est prévu avec la clause d’arbitrage insérée dans le contrat. Les parties s’engagent à soumettre leurs différends à un Tribunal arbitral qui siègera à un lieu donné. Avec cette désignation du lieu de l’arbitrage, les parties désignent également les arbitres qui seront nommés par eux-mêmes.

Mais pour la législation saoudienne, une clause d’arbitrabilité des différends insérée dans le contrat n’est pas suffisante. Il faut un compromis distinct du contrat. La loi offre deux possibilités aux parties. Soit les parties contractent le compromis d’arbitrage en même temps que le contrat lui-même, soit les parties peuvent dresser un compromis ultérieurement.

En principe, les parties peuvent choisir librement, et les arbitres et le lieu de l’arbitrage. Elles peuvent désigner un autre lieu en dehors du territoire saoudien ou sur le territoire saoudien. Mais le risque réside dans l’homologation par la justice saoudienne du compromis d’arbitrage.

En effet, les compromis d’arbitrage doivent être antérieurement homologués par l’organe[25] initialement compétent pour connaitre de l’affaire. Cette homologation est le garant de l’exécution de la sentence qui sera prononcée par les arbitres.

Les parties peuvent se voir leur compromis rejeté si elles ont choisi un autre lieu en dehors du territoire saoudien. La loi saoudienne prévoit que l’arbitrage doit être fait dans la langue arabe. Mais en choisissant un autre Etat, cette langue arabe peut être rejetée. Le système saoudien e l’arbitrage tient à garder le contrôle sur ce point et garde également cette méfiance envers les autres systèmes d’arbitrage saoudien reste très interne.

L’autre tenant de l’arbitrage en Arabie saoudite est la confession musulmane des arbitres. Cette condition est principale car les sentences doivent être en accord avec la Shari’a. Seuls un musulman peut être connaisseur de la loi islamique. C’est également pour cela que les juges, les Cadis, sont des sortants d’université charaïque.

Nous pouvons envisager qu’un arbitrage en dehors du territoire saoudien mais dans la région arabe peut être homologué puisqu’il y a de forte chance que la procédure soit celle de la législation saoudienne. En dehors de ceci, le compromis d’arbitrage se confronte la majorité du temps à un refus de certification, ce qui rend difficile l’exécution de la sentence prononcée.

 

  1. Le droit applicable

 

Dans son principe, l’arbitrage offre la plus grande liberté de choix possible aux parties et aux arbitres. Le compromis peut contenir des indications du souhait des parties de soumettre leur différend à un droit de leur choix. Dans ce cas, c’est ce droit qui prime et qui doit être appliqué.

Mais il arrive que les parties n’aient pas exprimé de choix quant au droit applicable. Dans ce cas, la tache de désigner la loi à appliquer revient souverainement aux arbitres. Pour cela, les arbitres doivent tenir compte des aspirations des parties lors de la rédaction du compromis ou du contrat en question. Les arbitres peuvent se tourner vers la loi du pays hôte de la procédure pour désigner celle-ci applicable. Mais l’appréciation des arbitres est très large.

Mais encore une fois, la législation saoudienne est très méfiante envers les autres systèmes. Le décret royal organisant l’arbitrage en Arabie saoudite est sévère et offre un monopole au droit saoudien. Un autre droit appliqué par les arbitres ou choisi par les parties, peut être source de rejet quant à l’exécution de la sentence prononcée.

 

  1. L’exécution de la sentence arbitrale

 

 

Les sentences arbitrales doivent être déposées auprès de l’organe judiciaire initialement compétent pour connaître le litige dans un délai de 5 jours[26]. Les pouvoirs judiciaires étatiques ne sont pas étrangers à toute la procédure d’arbitrage, du début à la fin, de l’acte d’arbitrage à l’exécution de la sentence.

L’exécution de la sentence arbitrale en Arabie saoudite est fonction de la certification par l’organe judiciaire initialement compétent pour connaitre de l’affaire du compromis d’arbitrage ou de l’acte d’arbitrage. Cette solution présente un double intérêt, l’un positif et l’autre négatif.

D’abord, la certification de l’acte d’arbitrage présente comme intérêt majeur l’écartement de la procédure d’exequatur. Un acte d’arbitrage dûment certifié offre la possibilité d’exécution immédiate de la sentence prononcée par le tribunal arbitral.

L’acte d’arbitrage contient un objet spécifique, ce qui rend la tâche plus aisée pour délimiter l’objet de l’arbitrage ainsi que la mission des arbitres. Cette situation diminue les cas de recours en annulation contre la sentence par la suite.

Quand l’objet de l’arbitrage est déterminé et accepté par l’organe judiciaire, la sentence arbitrale obtient ipso facto force de chose jugée et devient exécutoire entre les parties. Cette force exécutoire de la sentence est la même que celle d’un jugement rendu par un tribunal, une juridiction étatique.

Par contre, pour les actes d’arbitrage qui n’ont reçu de certification de la part de l’organe initialement compétent, aucune exécution ne peut être garantie. En réalité, le rejet sera le principe. C’est d’ailleurs le problème des investisseurs étrangers qui voient habituellement leur sentence paralysée par la justice saoudienne.

 

  • 3 : Le recours en annulation de la sentence

 

 

  1. La procédure en annulation

 

La loi sur l’arbitrage, en son article 19[27] offre la possibilité de recourir à une annulation de la sentence devant l’organe judiciaire initialement compétent. Mais les auteurs semblent ne pas être convaincus par cette loi. En effet, l’ordre judiciaire saoudien étant très dispersé, aucune formation judiciaire n’existe sur le recours en annulation des sentences arbitrales[28].

Le juge garde toute sa main mise dans la procédure d’arbitrage. Il contrôle toutes les démarches de l’instance. C’est également lui qui ordonne l’exécution de la sentence après avoir vérifié que la sentence ne heurte aucune disposition de l’ordre juridique et l’ordre public saoudien[29].

Signalons également qu’avec la procédure rigoureuse que la loi sur l’arbitrage en Arabie saoudite prévoit, rares sont les recours en annulation des sentences. Entendons nous qu’il s’agit d’un arbitrage interne. La rareté des recours en annulation se fonde sur la simplicité de l’acte d’arbitrage.

 

  1. Les causes d’annulation

 

La loi sur l’arbitrage est muette sur les motifs d’annulation d’une sentence. Mais la jurisprudence saoudienne retient pour principale, sinon dire unique cause d’annulation d’une sentence arbitrale le non-respect de l’objet déterminé par l’acte d’arbitrage suivant les prescriptions de l’article 5 de ladite loi.

L’acte d’arbitrage contient une indication de l’objet soumis à arbitrage. Cet objet étant fixé en amont, les arbitres y sont liés. Ils ne doivent pas sortir de ce contexte. Mais si les arbitres portent une réflexion ou prononcent une sentence qui sort de la ligne de cet objet, la sentence pourra être annulée[30].

L’article 19 de la loi est très ambigu sur le recours en annulation et se contente de poser le délai pour formuler le recours auprès de l’organe judiciaire initialement compétent. Il ne contient aucune indication quant aux motifs qui pourront être invoqués. L’annulation sera prononcée si l’organe judiciaire trouve le bien fondé de  la demande. Encore une fois, tout est cas d’espèce

Habituellement, les juridictions étatiques ne doivent pas revenir sur le fond du problème mais trancher des recours sur la base de la forme. Mais la loi étant très ambigüe et très vaste, un recours en annulation au fond peut être reçu par l’organe judiciaire. C’est ainsi par exemple qu’un recours sur la base d’une condamnation au paiement de dommages-intérêts a pu être accueilli par les juges étatiques. Pourtant, il s’agit d’un motif lié au fond[31]. La chambre commerciale avait annulé partiellement la sentence sur ce point.

Les juridictions étatiques saoudiennes se gardent la possibilité de revenir sur les questions de fond, ce qui est une atteinte à l’esprit même de l’institution d’arbitrage. Cette situation démontre la précarité de l’arbitrage et le vide de tout son sens et de son efficacité en Arabie saoudite et la prédominance des institutions étatiques.

 

 

 

Chapitre III : L’exécution des sentences étrangères en Arabie saoudite

 

 

Nous nous sommes penchés sur l’arbitrage au niveau interne dans le chapitre précédent. Des spécificités réelles peuvent être perçues sur cet arbitrage interne en Arabie saoudite. La principale cause de cette spécificité est l’omniprésence du juge à chaque étape de l’instance d’arbitrage, depuis la mise en place du tribunal arbitral jusqu’à l’exécution des sentences prononcées. Il y a également la prépondérance de la loi islamique, la Shari’a qui reste la principale loi saoudienne qui ne peut être écartée sous aucun prétexte.

Si l’arbitrage interne est autant encadré par les instances étatiques, nous pouvons nous attendre d’ores et déjà à une plus grande fermeté vis-à-vis de l’arbitrage international. Le système saoudien, de ses expériences précédentes en matière d’arbitrage international, est très méfiant par rapport aux sentences étrangères. Il tient surtout à garder une main mise sur les jugements et les sentences qui pourraient être exécutés.

Mais le pays a ratifié la convention de New York de 1958 sur la reconnaissance et l’exécution des sentences étrangères. De ce fait, il existe deux points, en contradiction, dans le système saoudien. D’un coté, en vertu de la convention de New York, aucun problème ne devrait en principe se poser sur l’exécution des sentences étrangères. De l’autre coté, il existe encore cette grande méfiance de l’Arabie saoudite face aux sentences étrangères et cette volonté ultime de garder le contrôle total sur l’ordre juridique et les jugements, y compris les sentences arbitrales étrangères.

 

 

Section 1 : Les conditions d’application de la Convention en Arabie saoudite

 

La seule ratification de la convention de New York devrait être la seule condition de son application. Les contractants acceptent de ce fait de contribuer à l’effacement des barrières de différences de système juridique pour promouvoir le commerce international, et par là même la promotion de l’arbitrage dans la pratique mondiale de règlement des différends.

La lacune que présente la convention de New York réside dans sa difficulté de mise en application. Si les juges Holtzman et Schwebel[32]  avaient projeté la mise en place d’une instance internationale d’arbitrage, nous en sommes encore loin. Les sentences arbitrales sont encore sujettes à l’exequatur des juridictions étatiques. Les conditions sont celles des Etats hôtes de l’exécution des sentences.

La convention de New York a permis aux Etats contractants d’effectuer certaines réserves, notamment le réserve de commercialité et la réserve de réciprocité. Mais dans la reconnaissance des sentences étrangères, l’ordre public interne reste également l’une des conditions essentielles de reconnaissance des sentences.

 

  • 1 : La commercialité des matières

 

Il est permis aux Etats ratifiant la convention d’émettre une réserve de commercialité qui exclut l’application de la convention aux matières autres que commerciales[33]. Il s’agit d’une volonté qui peut s’expliquer par des raisons d’ordre pratique et formel. En effet, les Etats tiennent à garder une entière souveraineté sur certaine matières, notamment en ce qui concerne des matières pénales, civiles, ou encore civiques.

Pour sa part, l’Arabie saoudite n’a pas tenu à exprimer cette volonté de réserve. La raison en est qu’il n’existe pas ce clivage certain entre la matière commerciale et les autres matières. En effet, l’ordre juridique saoudien ne distingue pas la matière commerciale des autres branches du droit. Il existe une certaine homogénéité, jusqu’à une interférence entre toutes les branches du droit.

Si l’Arabie saoudite a omis de déclarer cette réserve de réciprocité, nous pouvons considérer que d’autres matières peuvent faire l’objet d’arbitrage et d’autres sentences qui ne seraient pas basées sur une affaire commerciale pourront faire l’objet d’une demande de reconnaissance et d’exécution en Arabie. Seulement, il existe certaines restrictions sur la matière arbitrable et conciliable en Arabie. Il s’agit par exemple de la matière pénale, ou de la matière relevant du statut de la personne.

Il en va de soi même dés lors que la sentence qui nécessite une reconnaissance et une exécution en Arabie saoudite ne peut relever que d’un différend d’ordre commercial. Il s’agit d’ailleurs de l’essence même de l’arbitrage.

 

  • 2 : La réserve de réciprocité

 

La réserve de réciprocité évoquée par la Convention de New York signifie qu’un Etat ayant ratifié la convention peut consentir à la reconnaissance et à l’exécution des seules sentences ayant été prononcées sur le territoire d’un pays contractant de la convention de 1958. Cette réserve est prévue par l’art I-3 sus cité.

Cette réserve de réciprocité ne pose pas réellement de problème. Elle est légitime. Il appartient aux Etats de reconnaitre les sentences prononcées dans un Etat contractant. Mais cette réserve est d’autant plus importante pour les pays arabes tels que l’Arabie saoudite face aux conflits qui persistent entre le monde arabe et Israël. Les Etats arabes, notamment l’Arabie saoudite refuse de reconnaitre l’Etat d’Israël, et inversement. Les pays arabes refusent de reconnaitre les sentences arbitrales qui pourraient être prononcées en Israël.

 

  • 3 : L’ordre public saoudien

 

La dernière composante et non la moindre dans cette conditionnalité de la reconnaissance des sentences étrangères est l’ordre public. La convention de New York attribue encore toute son importance à l’ordre public interne de chaque Etat.

Les sentences arbitrales étrangères ne doivent pas heurter l’ordre public saoudien pour bénéficier de la reconnaissance et l’exécution. Le Diwan al Mazalem est souverain pour connaitre de cet ordre public saoudien. Il est le garant de l’intégrité des décisions, jugements et sentences appliqués dans le pays.

L’exemple que l’on pourrait citer est l’arbitrage d’un différend d’une instance gouvernementale. L’article 8 du décret saoudien du 25 mai 1985, une « instance gouvernementale » ne peut souscrire une clause d’arbitrage qu’avec l’accord préalable du gouvernement saoudien. L’exigence d’une autorisation préalable vise toute personne morale de droit public saoudien, y compris les sociétés nationales. Le cocontractant étranger doit s’assurer de l’existence de cette autorisation. L’autorisation est une condition d’ordre public.

Il en est également ainsi quand la sentence prononcée porte sur le paiement d’un intérêt. L’ordre public saoudien est très strict quant au respect de la loi islamique sur la prohibition de la Riba qui n’est autre que l’intérêt. Le Diwan al Mazalem condamne à chaque fois les sentences portant sur des intérêts[34].

En définitive, le Diwan al Mazalem qui est le tribunal en charge de connaitre des sentences arbitrales étrangères, a toute latitude pour connaitre des raisons d’ordre public pour écarter l’exécution des sentences arbitrales. Le Diwan al Mazalem se base toujours sur la législation saoudienne et les coutumes locales pour trancher des demandes d’exequatur. Ce qui implique un grand risque d’inexécution la plupart du temps.

 

 

Section 2 : La reconnaissance et l’exécution des sentences étrangères

 

Pour reconnaitre la sentence et reconnaitre son exécution, le Diwan al Mazalem se tourne vers trois points, la validité de la convention d’arbitrage, la régularité du tribunal arbitral, et bien évidemment la conformité de la sentence à la Shari’a. Ce dernier contrôle renforce la position selon laquelle la justice saoudienne garde encore une main mise réelle sur l’arbitrage.

 

  • 1 : La validité de la convention d’arbitrage

 

  1. La nécessité de l’acte d’arbitrage

 

En vertu de la convention de New York de 1958 ratifiée par l’Arabie saoudite, la juridiction saoudienne ne devrait plus en principe pouvoir retoucher le fond du litige. La seule tache demandée au Diwan al Mazalem est la forme et la régularité des procédures.

En premier lieu, le Diwan al Mazalem doit se prononcer sur la validité de la convention d’arbitrage. Est-ce que la volonté des parties a été respectée ? Le système saoudien ne distingue pas l’arbitrage international de l’arbitrage interne. Ceci peut être favorable dans certains cas, mais ne pas l’être dans d’autres. Précisément en ce qui concerne la procédure, la loi saoudienne invoque la nécessité d’établir un acte d’arbitrage séparé du contrat source de litige. L’insertion d’une simple clause d’arbitrage dans le contrat initial ne suffit pas pour le droit saoudien.

Cette première remarque est très importante car la pratique du commerce international actuel est la simple insertion d’une clause permettant la mise en place d’un règlement des différends par un arbitrage. La loi saoudienne ne disposant aucunement de l’arbitrage international, c’est la règlementation en matière d’arbitrage interne que le Diwan al Mazalem appliquera. Dans la plupart des cas, l’acte d’arbitrage fera défaut.

Néanmoins, par la convention de New York ratifiée par l’Arabie saoudite, ces conditionnalités devraient être écartées. En effet, l’essence même de l’arbitrage doit être son indépendance vis-à-vis des juridictions étatiques ainsi que le respect de la volonté des parties. L’arbitrage international doit être dissocié de l’arbitrage interne. Les conditions de certification par l’organe judiciaire initialement compétent de la convention d’arbitrage doit être écartée.

 

 

  1. Les conséquences des prescriptions de la loi saoudienne

 

Cette situation n’est pas sans conséquence. L’acte d’arbitrage que la loi saoudienne pose comme condition de validité de l’arbitrage, doit comporter des indications précises quant à l’objet de l’arbitrage. L’objet de l’arbitrage doit être précis et clair. Les arbitres sont tenus de se conformer et de se limiter à cet objet déterminé.

Le Diwan al Mazalem acquiert ainsi une large possibilité de manœuvre pour refuser l’exécution d’une sentence arbitrale sur le territoire saoudien. En effet, la Convention de New York précise que les mêmes règles doivent être appliquées pour les sentences étrangères au même titre que les sentences prononcées sur le territoire national. En Arabie, c’est la loi sur l’arbitrage de 1984 qui recevra application. Les sentences qui demandent une exécution en Arabie doivent être conformes aux prescriptions de la loi saoudienne sur l’arbitrage.

En droit saoudien, les parties peuvent convenir, compromettre par un acte d’arbitrage la soumission des différends devant des arbitres. Cet acte peut être rédigé au moment de la conclusion du contrat en question, ou ultérieurement. L’important est l’existence d’un tel acte. Cette convention est la garantie de la volonté expresse des parties. Sans cette manifestation de volonté, l’arbitrage est caduc.

La convention de New York exige également la passation d’une convention d’arbitrage entre les parties, une convention qui doit être dûment signée par les parties. La convention de 1958 a précisé en son article II. Mais cette convention donne un large pouvoir aux parties de délimiter les différends à arbitrer. Les parties peuvent entendre soumettre à l’arbitrage tous les différends naissant des rapports. Ce qui peut créer une confusion devant le Diwan al Mazalem qui doit vérifier la conformité de l’objet, objet qui doit être précisé.

 

  • 2 : La régularité du tribunal arbitral

 

La régularité de la constitution du Tribunal arbitral est le second sujet sur lequel le Diwan al Mazalem doit se pencher. Selon les prescriptions de la loi saoudienne, autant que toutes les législations sur l’arbitrage, le Tribunal arbitral peut être constitué d’un arbitre unique ou d’un nombre impair d’arbitre. Mais le ou les arbitres sont désignés par les parties.

La pratique internationale de l’arbitrage ne soumet aucune condition de restriction quant à la nomination des arbitres. Elle laisse le libre choix aux parties. C’est cette entière liberté qui est la condition de nomination des arbitres.

Mais la législation saoudienne n’est pas aussi souple et tempère ce libre choix des arbitres. Le choix est tempéré par la religion de l’arbitre. Les prescriptions saoudiennes n’imposent pas une nationalité de l’arbitre nommé. Mais elles imposent la confession musulmane de l’arbitre. Cette considération peut être source de conflit lors de la demande d’exécution devant le Diwan al Mazalem.

 

  • 3 : Le contrôle de conformité à la Shari’a

 

Le système saoudien reste très méfiant vis-à-vis des sentences arbitrales étrangères. Le Diwan al Mazalem procède à une vérification de conformité de la sentence à la Shari’a. La Shari’a reste la plus grande source du droit saoudien. Toutes les lois doivent être en accord avec les prescriptions de la Shari’a.

Les sentences arbitrales, même celles prononcées en dehors du territoire saoudien, ne doivent pas heurter les prescriptions de la Shari’a. Les juges saoudiens sont des spécialistes sortant d’universités charaïques. Leur tache première est de condamner les lois qui sont contraires à la loi islamique.

Le fait est que le système arabe, le système saoudien, présente cet aspect qui déroge aux coutumes occidentales. Toute la mentalité saoudienne tourne autour de l’Islam, la religion et le droit musulman.

C’est ainsi que nous réciterons l’exemple de la sentence étrangère qui prévoira le paiement d’un intérêt. Cette sentence risque fort de ne jamais acquérir une exécution sur le territoire saoudien, une disposition qui est fondamentalement prohibée par la Shari’a, l’interdiction du Riba.

 

 

Conclusion

Nous ne pouvons ignorer les efforts de l’Arabie saoudite pour la mise en place d’un système d’arbitrage cohérent. Le pays s’est doté d’instrument juridique à part pour connaitre de l’institution d’arbitrage. Si l’arbitrage a déjà été pratiqué depuis des centaines d’année, 1984 fut le moment pour le pays d’institutionnaliser de façon juridique l’arbitrage.

 

  1. De l’arbitrage interne

L’arbitrage est désormais reconnu par l’Arabie saoudite comme une des formes de règlement des litiges. Mais la procédure reste encore très spécifique. En effet, si dans la pratique de l’arbitrage, la volonté des parties est vastement reconnue quant aux choix des arbitres et au droit applicable, la législation saoudienne est encore très ferme sur la question. La liberté de choix est reconnue aux parties.

Mais la loi tempère cette liberté en exigeant que le ou les arbitres nommés soient de confession musulmane. Nous reconnaitrons que la loi saoudienne a fait l’effort de bannir les barrières de la nationalité. Mais le fait est que le rôle d’arbitre est encore étroitement sous le contrôle des juridictions étatiques. Les arbitres, au même titre que les cadis, les juges, doivent être des connaisseurs en matière de Shari’a.

En effet, l’Arabie saoudite tient à garder cette prépondérance de la Shari’a qui est restée la loi suprême du pays au même titre que la constitution. Tout l’ordre juridique saoudien repose sur son respect. Les cadis doivent juger sur la base de la Shari’a, le contrôle de légalité est le contrôle de conformité à la Shari’a.

Il se démontre ainsi qu’un arbitre non musulman ne peut saisir les prescriptions et les intentions de la loi islamique. Le travail d’arbitre reste attaché intimement à la religion. D’ailleurs, l’Islam peut être à la fois considéré comme la religion et le droit musulman[35]. Il en résulte l’exclusion de la possibilité d’arbitrage par des non musulmans.

L’autre point que nous pouvons évoquer ici est la place des femmes dans l’arbitrage en Arabie. Il n’existe pas de clivage entre le droit et la religion. La religion musulmane n’est pas encore arrivée à un stade d’accepter un rôle important des femmes dans la vie sociale. La femme reste avant tout au service de son mari. Comme le soutiens encore René DAVID, « En certains pays, où l’arbitrage est étroitement intégré à la justice étatique, on peut exclure les femmes parce qu’elles ne peuvent pas dans ces pays être juge ou parce qu’elles n’ont pas une pleine capacité civile ».

Sur la question de la procédure, l’arbitrage est également encore très lourd en Arabie saoudite. Si le but de l’arbitrage est la simplicité dans le règlement des différends entre acteurs du commerce, cette finalité est encore loin d’être atteinte. La juridiction étatique joue encore un rôle très prépondérant tout au long de la procédure. L’organe judiciaire initialement compétent doit intervenir pour connaitre de l’acte d’arbitrage entre les parties. L’acte d’arbitrage doit être certifié par les juridictions étatiques. Ces dernières ont la possibilité de rejeter la convention d’arbitrage.

Mais ce système présente néanmoins un avantage, il permet de retrouver moins de recours en annulation des sentences prononcées. En effet, les parties conviennent à l’avance l’objet de l’arbitrage limitant les pouvoirs des arbitres et faciliter le travail de ces derniers ainsi que celui des juges de l’exequatur.

En principe, le recours à l’arbitrage suppose une fuite d’entre les mains des juges étatiques des litiges. Ces derniers ont la simple mission de vérifier les procédures d’arbitrage. Mais la justice étatique doit encore connaitre de la sentence arbitrale prononcée. Un contrôle doit encore être effectué par le juge sur la conformité, et de la procédure et de la sentence elle-même. Il existe dès lors cette pluralité de procédures qui alourdit les parties. Pourtant l’essence de l’arbitrage est la simplicité et la rapidité.

 

  1. De l’arbitrage international

L’Arabie saoudite a ratifié la convention de New York sur la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères qui est le premier pilier de l’arbitrage international. La volonté politique de participer à la promotion de l’arbitrage international se retrouve ici. Mais cette volonté doit se manifester davantage.

La loi sur l’arbitrage de 1984 ne fait aucune distinction entre l’arbitrage interne et l’arbitrage international. Au premier regard, cette situation peut être interprétée comme l’application autant à l’arbitrage interne qu’à l’arbitrage international de la loi.[36]

La réalité est que le droit saoudien reste encore méfiant vis-à-vis de l’arbitrage international fort de son expérience si nous n’évoquerons que l’affaire ARAMCO qui a opposé le gouvernement saoudien à une société étrangère. Le système saoudien tente  de garder une main mise et un contrôle entier sur les sentences arbitrales, que ce soit interne ou internationale.

Malgré la ratification de la convention de New York, la reconnaissance et l’exécution des sentences étrangères restent encore difficile en Arabie saoudite. Mais le cas de l’Arabie saoudite n’est pas isolé. La mise en œuvre de la convention de New York reste difficile.

Au final, si nous nous sommes posés la question dans la première ligne de ce travail l’arbitrage est-il une justice de riche, nous pouvons affirmer que ce soit en occident ou en orient, en Arabie saoudite, l’arbitrage a acquis sa place dans le règlement de différends, au niveau interne et au niveau international. L’arbitrage s’est établi dans les mœurs et la pratique de tous. Il se vulgarise et devient un des outils premiers du quotidien des professionnels. Néanmoins, le droit de l’arbitrage, en Arabie saoudite peut être amélioré sur plusieurs plans. Mais le changement le plus important est le changement politique et de vision vis-à-vis de l’institution.

L’arbitrage  est appelé à devenir une juridiction d’exception indépendante de toute influence étatique, indépendante de juridictions étatiques. Mais l’Arabie saoudite est encore loin de cette finalité. Le Diwan al Mazalem tient à préserver toute ses facultés de contrôle étroit sur l’ordre juridictionnel pour conserver la conformité de toutes les décisions à la Shari’a. Mais la question est : est-ce que ce contrôle s’opère dans cette finalité ou dans le seul but d’écarter le système occidental ?

Les conventions ratifiées démontrent une volonté indéniable du chemin parcouru par l’Arabie saoudite. Mais au-delà de la simple ratification, il faut s’affranchir de cette méfiance qui est ancrée dans le système saoudien pour s’apercevoir de toute l’utilité, de tout l’intérêt  ainsi que de toute l’opportunité que peut offrir l’arbitrage.

 

 

 

 

Annexe

 

 

LOI SUR L’ARBITRAGE

LOI N° M/46 DU 19 AVRIL 1984

 

Article 1

L’accord sur le recours à l’arbitrage est permis pour un litige précis qui a déjà eu lieu. Est également permis l’accord préalable sur l’arbitrage pour tout litige pouvant survenir en raison de l’exécution d’un contrat déterminé.

 

Article 2

L’arbitrage n’est pas permis pour les questions qui ne sont pas susceptibles d’être réglées par une conciliation. La convention d’arbitrage n’est valable qu’à la condition d’avoir la capacité d’agir.

 

Article 3

Les organismes publics ne sont autorisés à compromettre pour régler leurs litiges avec autrui qu’après l’acceptation du président du conseil des ministres. La solution de cet article peut être modifiée par une décision du conseil des ministres.

 

Article 4

L’arbitre doit être expérimenté, d’une bonne conduite personnelle et ayant la capacité d’agir. En cas de pluralité d’arbitres, leur nombre doit être impair.

 

Article 5

Les parties au litige doivent déposer l’acte d’arbitrage auprès de l’organe judiciaire 2 originairement compétent pour connaître le différend. Cet acte d’arbitrage doit être signé par les parties ou par leurs représentants officiels délégués spécialement pour cette mission ainsi que par les arbitres. Il doit y être précisé l’objet du litige, les noms des parties et ce qui prouve leur acceptation de la mission arbitrale. Les copies des pièces concernant le différend doivent y être jointes.

 

Article 6

L’organe judiciaire originairement compétent pour connaître le litige se charge de la réception des demandes d’arbitrage et décide ou non de certifier l’acte d’arbitrage.

 

Article 7

Si les parties ont consenti la convention d’arbitrage avant la survenance du litige ou si la décision certifiant l’acte d’arbitrage pour un litige déjà survenu a été prise, l’arbitrage ne peut se dérouler que conformément à cette loi.

 

Article 8

Le greffier de l’organe judiciaire originairement compétent pour connaître le litige se charge des convocations et notifications prévues par cette loi.

 

Article 9

Le règlement du litige par l’arbitrage doit avoir lieu conformément au délai déterminé dans l’acte d’arbitrage sauf en cas d’accord sur sa prolongation. Si les parties n’ont pas déterminé de délai, le tribunal arbitral 3 doit rendre sa sentence dans un délai de 90 jours à compter de la date à laquelle l’acte d’arbitrage a été certifié.

Le dépassement de ce délai permet à toute partie au litige de soumettre cette irrégularité à l’organe judiciaire originairement compétent pour connaître le litige. Celui-ci peut décider soit de trancher le litige soit de prolonger le délai de l’arbitrage.

 

Article 10

Si les parties au litige n’ont pas désigné d’arbitre ou si l’une d’elles s’est abstenue de désigner l’arbitre alors qu’il lui incombe seul de le désigner ; ou si un ou plusieurs arbitres refusent d’accomplir sa mission ou démissionnent alors qu’aucune stipulation spéciale de la part des parties n’a été consentie, l’organe judiciaire originairement compétent pour connaître le litige désigne l’arbitre ou les arbitres à la demande de la partie concernée. L’examen de cette demande doit être effectué en présence de l’autre partie au litige ou en son absence si, après avoir été convoquée, n’a pas comparu. La décision en désignation de l’arbitre ne sera pas susceptible de recours.

 

Article 11

L’arbitre ne peut être révoqué que par un consentement mutuel des parties. L’arbitre révoqué ne peut demander des dommages et intérêts que s’il avait entrepris sa mission avant sa révocation et que celle-ci ne soit pas due à une faute de sa part.

Il n’est pas autorisé de récuser l’arbitre que pour des causes survenant ou apparaissant après le dépôt de l’acte d’arbitrage.

 

Article 12

La récusation de l’arbitre se proclame pour les mêmes causes de la récusation du juge. La demande en récusation se présente à l’organe judiciaire originairement compétent pour connaître le litige dans un délai de 5 jours à compter de la date à laquelle sa désignation a été notifiée à l’autre partie ou de la date de la survenance ou de l’apparition de la cause de la récusation.

La demande en récusation sera tranchée dans une audience qui se tient à cette fin à laquelle les parties et l’arbitre concerné sont invités à comparaître.

 

Article 13

La procédure arbitrale ne se termine pas par le décès d’une partie à l’arbitrage, mais le délai de l’arbitrage se prolonge de 30 jours sauf si le tribunal arbitral le prolonge d’un délai plus long.

 

Article 14

Le délai de l’arbitrage se prolonge de 30 jours en cas de désignation d’un arbitre en remplacement de l’arbitre démissionnaire, récusé ou révoqué.

 

Article 15

Le tribunal arbitral peut, par une décision votée à la majorité et motivée, prolonger la durée de l’arbitrage pour de motifs liés à l’objet du litige.

 

Article 16

La sentence arbitrale doit être rendue à la majorité et si la sentence aboutit suite à une conciliation, elle doit être rendue à l’unanimité.

 

Article 17

La sentence doit contenir notamment l’acte d’arbitrage, un résumé des allégations des parties, les pièces qu’elles ont fournies, les motifs de la décision, son prononcé, sa date et les signatures des arbitres. Et si un ou plusieurs arbitres refusent de signer la sentence, cela doit y être mentionné.

 

Article 18

Toutes les sentences du tribunal arbitral doivent être déposées auprès de l’organe judiciaire originairement compétent pour connaître le litige dans un délai de 5 jours. Une copie de la sentence doit être notifiée aux parties qui peuvent présenter leurs oppositions à la sentence devant l’organe judiciaire auprès duquel la sentence a été déposée dans un délai de 15 jours à compter de la date de notification des sentences. A défaut d’une telle opposition, la sentence ne sera susceptible d’aucun recours.

 

Article 19

Si l’une des parties à l’arbitrage a formé une opposition à la sentence pendant le délai précisé par l’article précédent, l’organe judiciaire originairement compétent statuera sur cette opposition. Il peut décider le refus de cette opposition en ordonnant l’exécution de la sentence, comme il peut l’accepter et décide de son bien-fondé.

 

Article 20

La sentence arbitrale est exécutoire lorsqu’elle devient définitive. Cette exécution s’opère par une ordonnance de l’organe judiciaire originairement compétent après avoir vérifié l’absence d’un empêchement légal4 à son exécution.

 

Article 21

Après l’ordonnance en exécution de la sentence selon l’article précédent, la sentence arbitrale revêt une force équivalente à celle que revêt la décision de l’organe judiciaire qu’il l’a rendue exécutoire.

 

Article 22

Par un commun accord, les parties déterminent les honoraires des arbitres. Les sommes restant dues se déposent auprès de l’organe judiciaire originairement compétent dans un délai de 5 jours à compter de la date à la quelle l’acte d’arbitrage a été certifié. Ces sommes seront versées dans un délai d’une semaine à compter de la date de la décision en exécution de la sentence.

 

Article 23

En l’absence d’un accord sur les honoraires des arbitres aboutissant à un différend, celui-ci se règle par l’organe judiciaire originairement compétent par une décision qui ne sera pas susceptible de recours.

 

Article 24

Les actes nécessaires à l’application de cette loi émanent du président du conseil des ministres suite à une proposition du ministre de la justice et après accord avec le ministre du commerce ainsi qu’avec le président de Diwan Al-Mazalem.

 

Article 25

La présente loi se publie au journal officiel et entre en vigueur 30 jours après sa publication.

Bibliographie

 

Ouvrages généraux :

 

 

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René David et Camille Jauffret-Spinosi, Les grands systèmes de droit contemporains, Dalloz, 11e édition, 2002

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Ouvrages spéciaux et articles:

 

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Abdul Hamid El-Ahdab. L’arbitrage dans les pays arabes, Economica Paris 1988

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  2. Skubiszewski, Kluwer 1997
  3. Mezghani, Rapport de synthèse, Actes du 1er Colloque euro-arabe sur l’arbitrage, Port-el-Kantaoui, 1985, LLP ed., 1987

Charles JARROSSON, Aspects de l’arbitrage international dans le droit et la pratique des pays arabes, Rapport de synthèse du Colloque de la Cour de cassation, 13 juin 2007, avec le concours de la Cour d’arbitrage de la Chambre de commerce de Milan

 

Pierre Lalive, Article pour les Mélanges Jacques Robert, pp. 353-363, LE CHOIX DE L’ARBITRE

 

Abou Diab Khattar, Politique étrangère, Année 1989, Volume 54, Numéro 3, p. 529

Le choix des arbitres, Revue de l’arbitrage 1990, pp. 315, 316

 

Nathalie Bernard-Maugiron et Baudouin Dupret , « « Les principes de la sharia sont la source principale de la législation » » http://ema.revues.org/index992.html

 

Textes:

Décret Royal numéro M/46 12 Rajab 1403A.H. 26 avril 1983

Décret Royal M/11 du 29 décembre 1993, Publié dans le journal officiel saoudien – Umm El Qura n.3489 du 21 janvier 1994 (10.08.1414 H)

Convention de New York du 10 juin 1958

Convention de Washington du 18 mars 1965

 

[1] Décret Royal M/11 du 29 décembre 1993 (16.07.1414 H) Publié dans le journal officiel saoudien – Umm El Qura n.3489 du 21 janvier 1994 (10.08.1414 H)

[2] Cette citation a été tirée du roman d’A. Maalouf, Le rocher de Tanios, Grasset, 1993, Le livre de poche, p. 19. Cette citation illustre le rôle qu’avait le Cheikh dans l’empire Ottoman jouant le rôle d’un arbitre.

[3] Ce statut du Roi est consacré en Arabie saoudite par le Nizam al-açaçi du 1er mars 1992 en son article 43 qui précise encore  l’existence du conseil du roi, le Majlis, « Le majlis (conseil) du roi, ainsi que celui du  prince héritier sont ouverts à tout ressortissant désireux de déposer une plainte ou de  réclamer qu’il soit mis  fin à une  injustice qui  le  frappe »

[4] Loi sur l’arbitrage, loi n° M/46 du 19 avril 1984

[5] Voir en ce sens eid rawach* et rezeq el-rayes, professeurs a l’université du roi Saoud (Riyad), le droit de l’arbitrage en Arabie saoudite, réalité et perspectives

[6] Cet aspect du statut de l’arbitre est développé dans le chapitre second de ce mémoire.

[7] En effet, l’histoire permet de voir que bon nombre de sentences ont été prononcées contre la partie arabe, notamment la sentence de l’arbitrage du Cheikh d’Abou Dhabi, ou encore la sentence Aramco que nous develeppons plus dans ce travail.

[8] Adde Fahd Al-Hokbani, Les efforts du Royaume d’Arabie en matière d’arbitrage, in « Actes du colloque sur l’arbitrage du point de vue islamique et international », Jeddah, 20 à 22 mai 2003, p. 48. L’auteur, qui est un magistrat, affirme l’application de la Loi sur les litiges ayant l’élément d’extranéité.

[9] Voir article de Jean‐Philippe BRAS (Directeur de l’IISMM), « La Shari’a : passé et devenir d’un corpus juridique » fevrier 2008, http://www.iesr.fr

[10] Verset 130 de la sourate (chapitre) III du Coran «Ô croyants, ne pratiquez pas le riba qui va multipliant le double en double, mais craignez Dieu pour réussir dans le droit chemin ». Concernant également le riba dans le Coran, M. Ruimy, La finance islamique : Arnaud Franel éditions, 2008, p. 15

 

[11] Nous pourrons également citer la sentence Ruler of Qatar c. International Marine oil company, ltd rendue en juin 1953 par Sir Alfred Bucknill. Egalement les célèbres affaires B.P. Exploration c. Gouvernement Libyen de 1973 et Texaco c/ Gouvernement Libyen de 1973

[12] L’affaire Aramco entre le Gouvernement saoudien et la société américaine de concession en 1958.

[13] La première innovation a accompagnée la sentence Liamco en Libye en 1980, au Koweit, l’affaire Aminoil c. Gouvernement Koweitien du 24 mai 1982, ces sentences ont eu le mérite d’abolir l’exclusion automatique du droit musulman.

[14] Sur ce sujet, voir Pieter Sanders, L’élaboration de la convention, pour la commémoration des quarante ans de la Convention de New York dans l’édition L’execution des sentences arbitrales en vertu de la convention de New york, expériences et perspectives, édition des nations unies 1999.

[15] Parmi les autres pays arabes, ont ratifié la convention de Washington l’Algérie, le Bahreïn, le Koweït, la Jordanie, Emirats arabes unis, L’Egypte, le Maroc, Oman, Tunisie, Liban et l’Arabie saoudite. Le Yémen a également adhéré à la convention mais ne l’a pas encore ratifié.

[16] Traité de l’arbitrage commercial international, LITEC Paris, 1996, n°752 et 761

[17] Pierre Lalive : Mélanges Jacques Robert, « Libertés », Montchrestien, Paris 1998, pp. 353-363

[18] “It is of fundamental importance that justice should not only be done, but should manifestly be seen to be done”, R. v. Sussex Justices, Ex parte Me Carthy (1924), K.B. 256, 259 (per Lord Hewart, C.J.).

[19] René David, L’arbitrage dans le commerce international, ed. Economica 1982

[20] Voir P. B. Boucher, Paris 1807, chez Arthus-Bertrand, p. 45

[21] Les matières pénales telles que les crimes,  « hodood » ou crimes majeurs définis par le Coran ne peuvent faire l’objet d’arbitrage ni de conciliation. La Shari’a seule doit être appliquée et ce sont les juges saoudiens qui peuvent le plus connaitre d’un tel crime.

[22] Affaire Aramco développée par Suzanne BASTID, Le droit international public dans la sentence Aramco, In Annuaire français de droit international, volume 7, 1961, pp300-311.

[23] Voir Goy Raymond. L’affaire de l’Oasis de Buraïmi. In: Annuaire français de droit international, volume 3, 1957. pp. 188-205

[24] CARABIBER, L’arbitrage international entre gouvernements et particuliers, R.C.A.D.I., t. 76, p. 221-317; JIMENEZ DE ARECHAGA, L’arbitrage entre l’Etat et les sociétés privées étrangères, Mélanges Gilbert GIDEL, p. 367; Martin DOMKE, International arbitration of commercial disputes. Proceedings of the 1960 Institute of private investments abroad, p. 164; S. BASTID, La fonction juridictionnelle dans les relations internationales, Cours de doctorat 1956-57, mult. p. 161 et s.

[25] Le terme organe est ici choisi parce que le système saoudien est complexe, il ne s’agit pas de tribunal mais d’une instance qui se trouve sous le contrôle du ministère touché par l’affaire.

[26] Art 18 de la loi sur l’arbitrage en Arabie saoudite, « Toutes les sentences du tribunal arbitral doivent être déposées auprès de l’organe judiciaire originairement compétent pour connaître le litige dans un délai de 5 jours. Une copie de la sentence doit être notifiée aux parties qui peuvent présenter leurs oppositions à la sentence devant l’organe judiciaire auprès duquel la sentence a été déposée dans un délai de 15 jours à compter de la date de notification des sentences. A défaut d’une telle opposition, la sentence ne sera susceptible d’aucun recours ».

[27]Art 19 de la loi sur l’arbitrage, « Si l’une des parties à l’arbitrage a formé une opposition à la sentence pendant le délai précisé par l’article précédent, l’organe judiciaire originairement compétent statuera sur cette opposition. Il peut décider le refus de cette opposition en ordonnant l’exécution de la sentence, comme il peut l’accepter et décide de son bien-fondé ».

[28] Eid rawach* et Rezeq el-Rayes, professeurs a l’université du roi Saoud (Riyad), le droit de l’arbitrage en Arabie saoudite, réalité et perspectives, pour ces auteurs, la loi sur l’arbitrage en Arabie saoudite présente une carence certaine quant au recours en annulation des sentences arbitrales.

[29]Art 20 de la loi sur l’arbitrage, La sentence arbitrale est exécutoire lorsqu’elle devient définitive. Cette exécution s’opère par une ordonnance de l’organe judiciaire originairement compétent après avoir vérifié l’absence d’un empêchement légal à son exécution.

[30] Un arrêt rendu par la formation d’appel de Diwan Al-Mazalem (arrêt n° 33/4/1993) a posé comme principe d’annuler la sentence arbitrale en cas de dépassement de l’objet de litige tel que précisé dans l’acte d’arbitrage.

[31] Arrêt cité dans la chronique de Mansour Al-Malik, Chronique de jurisprudence relative à l’arbitrage, p13

[32] Voir ROBERT BRINER Président, Cour intemationale d’arbitrage de la Chambre de commerce internationale, Raison d’être et objectifs de la Convention, in L’exécution des sentences arbitrales en vertu de la Convention de New York, Expérience et perspectives, Nations unies New York 1999

[33] Art I-3 de la convention de New York : «Au moment de signer ou de ratifier la présente Convention, d’y adhérer ou de faire la notification d’extension prévue à l’article X, tout Etat pourra, sur la base de la réciprocité, déclarer qu’il appliquera la Convention à la reconnaissance et à l’exécution des seules sentences rendues sur le territoire d’un autre Etat contractant.  Il pourra également déclarer qu’il appliquera la Convention uniquement aux différends issus de rapports de droit, contractuels ou non contractuels, qui sont considérés comme commerciaux par sa loi nationale »

[34] Mansour Al-Malik, Chronique de jurisprudence relative à l’arbitrage, Actes du colloque sur l’arbitrage du point de vue islamique et international, Jeddah, 20 à 22 mai 2003, p. 12.

[35] Jean‐Philippe BRAS (Directeur de l’IISMM), La shari’a : passé et devenir d’un corpus juridique, Institut européen en sciences des religions, Février 2008, http://www.iesr.fr

[36] Eid Rawach* et Rezeq el-Rayes, le droit de l’arbitrage en Arabie saoudite, réalité et perspectives

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