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En quoi l’accompagnement d’un enseignant stagiaire d’histoire –géographique à la mise en place d’une démarche fondée sur la pédagogie explicite pour l’aider à faire rédiger ses élèves peut-elle contribuer à sa construction professionnelle ?

Nouvelle problématique : En quoi l’accompagnement d’un enseignant stagiaire d’histoire –géographique à la mise en place d’une démarche fondée sur la pédagogie explicite pour l’aider à faire rédiger ses élèves peut-elle contribuer à sa construction professionnelle ?

Introduction

Avant de pouvoir exercer le métier d’enseignant, le candidat est amené à faire des alternances entre formation permettant d’acquérir un savoir savant et un stage dans le lieu d’exercice du métier pour acquérir le savoir d’expérience. A l’issue de sa formation, l’étudiant se trouve dans une situation hybride dans laquelle, il n’est pas tout à fait étudiant, mais pas encore totalement enseignant. Pour devenir un enseignant titulaire, les candidats doivent encore valider son année de stage. Pour l’accompagner dans cette démarche, le stagiaire est accompagné par un maître de stage qui deviendra alors son accompagnateur. C’est ce processus d’accompagnement permettant de faire passer l’individu du statut « hybride » vers le statut d’enseignant dont il est question dans cette réflexion.

J’enseigne l’histoire-géographie depuis 1992 d’abord au collège et puis, 10 ans au lycée. Depuis de nombreuses années, je suis également formatrice. Après une longue interruption, j’ai recommencé à accueillir depuis l’année scolaire 2015 – 2016, des stagiaires. Ce statut de tuteur revêt un double enjeu : accompagner la stagiaire tout en préparant la Certification d’Aptitude à la Fonction de Formateur Académique (CAFFA). C’est donc une occasion pour moi pour remettre en question mes propres pratiques d’enseignement et ma démarche d’accompagnement. Le but est de la rendre plus efficace afin que ma stagiaire acquière toutes les compétences et les gestes professionnels qui feront d’elle une enseignante capable d’appréhender toute la complexité du métier d’enseignant, tout en étant apte à porter un regard réflexif sur ses pratiques.

Apprendre à apprendre est un processus complexe. La stagiaire doit d’abord comprendre les stratégies de transmission des contenus disciplinaires ainsi que les processus d’apprentissage des élèves, leur mise en activité et la résolution de difficultés en classe. Face à la complexité de cette tâche, il est clair qu’accompagner ne s’improvise pas. En tant que tuteur, je dois mener à bien cet accompagnement. Ainsi, notre premier axe de travail est de déterminer les compétences à développer chez le stagiaire. Par la suite, nous sommes amenés à déterminer les démarches d’accompagnement à mettre en place pour que l’enseignant novice acquière toutes ces compétences.

La présente analyse va tenter de répondre à la question inaugurale suivante : En quoi l’accompagnement d’un enseignant stagiaire d’histoire –géographique à la mise en place d’une démarche fondée sur la pédagogie explicite pour l’aider à faire rédiger ses élèves peut-elle contribuer à sa construction professionnelle ? Pour répondre à cette question, nous proposons de faire une méta-analyse, d’analyser les différentes approches développées par les autres tuteurs pour inculquer à leurs stagiaires, les compétences nécessaires pour faire écrire les élèves en matière d’histoire géographie.

Ainsi, dans la première partie consacrée à l’analyse théorique, nous allons déterminer en premier lieu le principe d’accompagnement des enseignants stagiaires. Et comme la politique d’éducation nationale tend à éradiquer les exclusions en classe et favorise en ce sens la formation de classe hétérogène, nous allons voir les différents enjeux de l’enseignement d’une classe hétérogène. Par la suite, nous allons développer les problèmes relatifs à la tâche d’écriture en histoire géographie aussi bien  pour l’élève, que pour le stagiaire et enfin, pour l’accompagnateur. La deuxième partie de notre étude va porter sur l’analyse des différentes approches menées par les enseignants pour faire face aux enjeux de l’hétérogénéité des élèves et à la difficulté de la tâche d’écriture. Cela va être suivi d’une discussion.

  1. Cadre théorique
  2. L’accompagnement du stagiaire
  3. Principes de l’accompagnement

L’accompagnement correspond à un processus qui « implique pour un enseignant initié et plus chevronné de mener une action éducative auprès d’un collègue moins expérimenté en vue de promouvoir son développement sur les plans personnels et professionnels » (Desbiens et al., 2009 : 13). Cette démarche pourrait également être considérée comme étant « une recherche de type collaboratif entre praticien et chercheur permettant d’ajuster des actions en fonction des contraintes du contexte qui sont analysées avec l’enseignant » (Jorro, 2013 : 108). Outre à cela, il s’agit d’une démarche réflexive pouvant être scindée en plusieurs étapes selon Jorro : l’action, l’analyse des résultats, le discernement des points d’amélioration, la décision pour améliorer l’action et la mise en œuvre de celle-ci. En parlant alors d’une démarche de recherche collaborative, l’accompagnement des enseignants stagiaires s’inscrit dans la construction concertée et acceptée par les deux parties d’une stratégie pour acquérir les savoirs permettant d’exercer la fonction d’enseignant (Jorro, 2013 : 108).

Dans un contexte de professionnalisation des enseignants stagiaires, leur accompagnement sur terrain est suggéré pour qu’ils acquièrent la réflexivité nécessaire pour leurs pratiques enseignantes. L’accompagnement des enseignants stagiaires a pour objectif de confronter les expériences professionnelles vécues par le stagiaire sur terrain, avec leurs acquis théoriques, découlant de leurs formations antérieures. En effet, ce qui est observé sur terrain peut être complètement différent de ce qui est attendu suite à la maîtrise de connaissances théoriques (Perez-Roux, 2012 : 98 – 100). Cette situation peut mettre le stagiaire dans un désarroi et là, il aura besoin d’être accompagné pour qu’il sache maîtriser la situation et adopter la bonne posture, faire preuve de réflexivité pour améliorer ses pratiques enseignantes.

De manière générale, les stagiaires maîtrisent les connaissances théoriques. Mais encore faut-il qu’ils parviennent à les mobiliser et à les utiliser en fonction de la situation qui se présente. L’accompagnement consiste donc à aider l’enseignant stagiaire dans son apprentissage pour qu’il devienne un sujet capable d’adopter la bonne posture face à une circonstance précise. La réalisation de cet accompagnement se fait en trois étapes : la phase d’accueil du stagiaire, l’intégration de celui-ci dans son lieu de formation et la formation proprement dite. Cette dernière phase consiste d’abord à faire des pratiques en classe, puis d’analyser par la suite, les différentes pratiques adoptées en classe (Ciavaldini – Cartaut, 2012 : 21-23).

La réflexion sur les différentes pratiques pédagogiques constitue une pratique clé dans l’accompagnement des stagiaires et dans l’acquisition de savoirs pour enseigner. L’accompagnateur aide l’accompagné dans cette réflexion. Mais en même temps, l’individu apprenant fait également sa réflexion personnelle et fait preuve d’autonomie et de créativité (Guillemette et Lapointe, 2011 : 21). La réflexion se base sur la constatation de faits réels en classe. L’expérience vécue par le stagiaire va alors l’aider à comprendre, réfléchir, expliquer et évaluer ses propres pratiques professionnelles[1]. En d’autres termes, le stagiaire est amené à faire une autoanalyse et à revoir constamment ses pratiques professionnelles et dans cette démarche, il est accompagné par un expert représenté par l’accompagnateur, ainsi que par ses pairs qui vont également lui apporter plus d’éléments de réflexion (Perez-Roux, 2012 : 101-103).

Bien que l’accompagnement soit centré sur le stagiaire, il existe un autre acteur qui joue un rôle crucial dans cette démarche : il s’agit de l’accompagnateur. Ce dernier va près de l’accompagné pour le soutenir. Pour que son accompagnement réussisse, il doit savoir les orientations et les intentions de l’accompagné sans chercher toutefois à influencer celui-ci. Trois approches peuvent être adoptées par l’accompagnateur : l’approche directive, l’approche collaborative et l’approche non directive (Van Nieuwenhoven et Colognesi, 2013 : 126 – 128).

L’accompagnement suppose que l’accompagnateur ajuste sa posture en fonction de la situation qui se présente et en fonction du profil et des attentes de celui qu’il accompagne. De même, compte tenu du fait que les acquis de l’accompagné évoluent au fur et à mesure qu’il avance dans son expérience professionnelle, ses attentes en matière d’accompagnement évolue aussi[2]. L’accompagné aussi dans son rôle doit faire des échanges avec son accompagnateur. Ce dernier contrôle ses activités. Mais dans certains cas, les stagiaires n’osent pas discuter les propositions tenues par le tuteur par peur de donner une image négative d’eux-mêmes envers l’accompagnateur (Perez-Roux, 2012 : 109).

  1. Rôles du tuteur

L’accompagnement des enseignants stagiaires est assuré par des enseignants expérimentés qui deviennent leurs tuteurs. Ces derniers peuvent également être appelés conseillers pédagogiques ou maîtres de stage. Le tuteur est une personne ressource qui détient les connaissances, les compétences mais également les savoirs lui permettant de transférer ses acquis à son enseignant stagiaire. En tant qu’accompagnateur, il est amené non pas à agir à la place du stagiaire, mais à agir pour et avec lui. Cela demande l’installation d’une certaine relation entre lui et son stagiaire dans un contexte particulier qu’est la situation au sein de l’établissement scolaire. Cette forme de relation constitue une situation de service (Brau-Antony et Mieusset, 2013 : 28). Le tuteur est donc à la fois un guide, un médiateur entre les élèves et le stagiaire, mais également, entre celui-ci et ses pairs. Entre autres, le tuteur est un observateur et un évaluateur des pratiques professionnelles de l’enseignant stagiaire[3].

Il appartient au tuteur d’établir premièrement une relation de confiance avec l’enseignant stagiaire pour permettre les échanges. Cette relation de confiance encourage l’accompagnateur ainsi que l’accompagné à s’exprimer librement et à faire des échanges, tout en ayant un respect mutuel. Il est à noter que la relation de confiance ne peut exister à moins qu’il n’y ait une transparence (Van Nieuwenhoven et Colognesi, 2013 : 130). La dimension affective joue un rôle important dans les échanges entre accompagnateur et accompagné et en ce sens, le tuteur a de nombreuses responsabilités. C’est ce climat de confiance qui va encourager l’accompagné à montrer devant son maître de stage ses pratiques professionnelles. Or, cela n’est pas sans risque ni se fait sans heurts du côté de l’enseignant novice (Jorro, 2013 : 109).

Le tuteur a pour rôle d’accueillir le stagiaire au sein de l’établissement et de l’intégrer au sein de l’équipe pédagogique. Il intervient entre autres, dans l’accompagnement réflexif de l’enseignant stagiaire c’est-à-dire, dans la prise de recul et la réflexion sur les pratiques professionnelles du stagiaire. L’accompagnateur évalue la progression de son stagiaire et fait un rapport écrit au directeur de l’établissement. Il discute par la suite avec les formateurs et les employeurs pour déterminer si effectivement, le stagiaire peut enseigner (Brau-Antony et Mieusset, 2013 : 27-28). L’accompagnateur joue dans ce cas, un rôle crucial dans l’évaluation du stagiaire et dans la reconnaissance de celui-ci comme étant une personne détenant toutes les ressources nécessaire pour la réalisation du métier. Mais cette reconnaissance fait appel une fois de plus aux échanges entre le tuteur et l’accompagné et à une autre aptitude de l’accompagnateur : sa capacité à prendre du recul par rapport à ses propres pratiques afin de donner place au jeune stagiaire d’agir et de s’exprimer[4].

L’accompagnement réflexif fait par le tuteur se base sur les recherches qu’il a déjà faites auparavant et sur les observations de l’accompagné. Il tient une place particulière parce qu’il n’agit pas de manière directive. Il n’influence aucunement les réponses du stagiaire. Par contre, il pose souvent des questions à son stagiaire afin de stimules les réflexions de celui-ci. Ces questions servent entre autres à déterminer le niveau de progression de l’individu qu’il encadre (Guillemette et Lapointe, 2011 : 22). En même temps, le tuteur accompagne son stagiaire à acquérir les gestes et les postures professionnelles. Il n’intervient certes pas pour influencer le stagiaire, mais à concevoir avec lui des stratégies permettant de faire face aux différentes situations rencontrées en classe[5]. Il fait donc des observations et des réflexions à partir des pratiques professionnelles appliquées et de les déployer afin d’en faire une origine de savoir d’expériences (Desbiens et al., 2009 : 10).

Le maître de stage est également un compagnon du stagiaire pour résoudre les problèmes. Par ailleurs, ce fait a été mentionné par les accompagnés comme étant une des raisons pour laquelle, les enseignants novices apprécient les tuteurs. Il est évident que les novices se heurtent à différents problèmes, mais le maître de stage lui, leur aide à surmonter les épreuves et leur donne des conseils[6]. Le tuteur doit alors montrer plusieurs postures en fonction de la situation qui se présente et du caractère de la personne qu’il accompagne. D’abord, il se place comme étant un conseiller et une personne qui donne son soutien à l’accompagné. Parfois même, certains maîtres de stage font des actions à la place de leurs accompagnés. Le tuteur doit être assez proche de l’enseignant novice pour que celui-ci se confie à lui, mais suffisamment distant pour que celui-ci devienne autonome. Enfin, le maître de stage peut aussi être considéré comme étant un passeur dont le rôle est d’écouter son stagiaire (Jorro, 2013 : 110).

  1. Enjeux de l’accompagnement

L’accompagnement du tuteur peut être non productif puisque la vocation première du tuteur est d’enseigner des élèves et non pas d’accompagner des stagiaires (Brau-Antony et Mieusset, 2013 : 28). Certes, l’accompagnateur est une personne expérimentée mais ses expériences professionnelles dans le domaine de l’enseignement ne peuvent pas suffire pour former un enseignant stagiaire. Cela demande en effet des compétences spécifiques (Van Nieuwenhoven et Colognesi, 2013 : 120).  L’enjeu de l’accompagnement réside de ce fait, sur la sélection du tuteur lui-même. La formation initiale du tuteur ne lui permet pas d’avoir les compétences requises pour accompagner mais d’un autre côté, les compétences et les acquis provenant de ses années d’expériences sont également difficiles à évaluer (Desbiens et al., 2009 : 14).

Pour l’accompagnateur, la difficulté à accompagner l’individu réside même sur le contenu de cet accompagnement et sur la démarche à suivre pour l’accomplir. Une étude menée auprès des tuteurs a mis en évidence le fait que les accompagnateurs hésitent souvent à choisir entre la réalisation d’un accompagnement centré sur la recherche et sur les observations, ou un sur un mode d’accompagnement centré sur la formation suivie par le stagiaire, et en tenant compte dans ce cas, les références et les standards établis pour qu’un stagiaire devienne un enseignant[7].

Outre à cela, les accompagnateurs des enseignants stagiaires se plaignent d’un manque de contrat clair permettant de définir les rôles et les contributions de chaque acteur dans le cadre de l’accompagnement. A cela s’ajoute l’insuffisance de temps pour échanger avec le stagiaire avant son stage. Les tuteurs estiment en effet, que cette phase est nécessaire afin d’établir une bonne relation et afin d’intégrer le stagiaire au sein de l’équipe pédagogique (Van Nieuwenhoven et Colognesi, 2013 : 134).

L’accompagnement s’avère difficile lorsque le stagiaire montre de nombreuses difficultés à maîtriser la situation. Certes, en tant que novice, il n’est pas au courant de toutes les situations qui sont susceptibles de se présenter en classe. L’accompagnateur intervient alors pour lui faire découvrir les différents cas possibles. Mais si certains stagiaires arrivent à comprendre aisément la situation et à la maîtriser, d’autres n’y parviennent pas. Dans certains cas, les expériences négatives se répètent. Par conséquent, les élèves qui sont sous sa responsabilité tendent à douter de la performance du novice. Cela peut entraîner la classe toute entière à ne pas accorder sa confiance au stagiaire. Désemparée, au lieu de chercher une solution à la situation, le stagiaire va tendre à attendre que l’accompagnateur lui dicte la conduite à suivre, la posture à adopter pour gérer les élèves. Cette réaction provient de sa perte de confiance en lui-même. Or, l’accompagnateur ne dirige pas l’accompagné, mais va dans le même sens que lui (Perez-Roux, 2012 : 109). En ce sens, l’accompagné devrait faire preuve d’autonomie pour trouver une alternative et l’accompagnateur le soutient dans son initiative et le conseille.

A l’instar de la différence qui existe au sein d’une classe, toutes les personnes encadrées par le maître de stage ont aussi des caractères très différents. Chaque stagiaire est unique et a sa propre histoire et ses expériences professionnelles et personnelles antérieures qui pourraient influencer sa vision des choses et ses pratiques professionnelles. L’enjeu pour le tuteur est donc de discerner l’unicité de chaque élève et de lui donner un accompagnement qui puisse répondre à ses attentes. D’autre part, les expériences antérieures de l’accompagné peuvent dans certains cas avoir une emprise sur son apprentissage et dans ce cas, l’accompagnateur doit encore discerner cela (Desbiens et al., 2009 : 11).

Il existe entre autres, l’enjeu relatif à la probabilité de rupture entre ce qui est acquis par l’enseignant stagiaire dans le cadre de sa formation et les réalités rencontrées dans la classe. A cela s’ajoute la difficulté pour les tuteurs d’observer sans interruption les pratiques des stagiaires. Par conséquent, il peut y avoir des biais dans leurs reculs et les conseils qu’ils donnent aux stagiaires (Desbiens et al., 2009 : 15).

  1. L’hétérogénéité des élèves
  2. Les différentes manifestations de l’hétérogénéité des élèves

Selon Le Prévost (2010 : 57-58), « la notion d’hétérogénéité se définit a minima en rapport aux écarts de niveaux scolaires au sein d’une classe, souvent attribués aux évolutions dues à la massification de l’enseignement, à la suppression de certains paliers d’orientation, à la disparition progressive du redoublement, au collège unique, etc. Au-delà de cette acception minimale, le terme se trouve employé aussi bien pour signifier la diversité des décisions et processus organisationnels générant, régulant ou prévenant cette hétérogénéité des groupes-classes (…) que pour rendre compte de la pluralité des profils des élèves. (…). Il est donc le plus fréquemment question, dans l’utilisation du terme « hétérogénéité », de la diversité des formes des systèmes éducatifs et/ou des écarts et de la variété des performances des élèves ». L’auteure montre déjà à travers cette définition que l’hétérogénéité des élèves renvoie à la notion de pluralités, de la coexistence et de la cohabitation entre élèves présentant des profils, des niveaux intellectuel et social.

L’hétérogénéité en classe se manifeste de différentes manières : il peut s’agir d’une hétérogénéité sociale ou culturelle. Cela suppose que les élèves qui constituent une classe sont issus de milieux sociaux différents et ont un niveau de vie mais également des connaissances générales, ainsi que des aptitudes très différentes[8]. De même, les comportements qu’ils vont montrer à l’école varient également. Ainsi, au sein d’une même classe, l’enseignant peut trouver des élèves calmes et des élèves turbulents, des élèves bavards et des élèves silencieux, des disciplinés et des indisciplinés, des élèves avides de savoirs et d’autres qui adoptent un sentiment de rejet envers le savoir, etc.

La différence sociale se manifeste elle, par la présence au sein d’une même classe d’enfants issus de milieux favorisés et d’autres issus de milieux défavorisés, des élèves ayant des problèmes familiaux graves et d’autres qui n’en ont pas. Mais si la cohabitation entre ces élèves vise à éviter les inégalités sociales et la domination d’un groupe sur un autre, il faut admettre que les rapports entre ces deux groupes sont dans la grande majorité des cas, tendus. Parfois, ces tensions amènent à des bagarres et des affrontements en classe, contraignant l’enseignant à adopter une sanction pour toute la classe afin de rétablir l’ordre (Sanchez-Mazas et Fernandez-Iglesias, 2011 : 38 – 40).

Mais il est difficile d’aborder la notion d’hétérogénéité sans mentionner la différence culturelle entre les élèves qui composent une classe. Une classe hétérogène peut comprendre des élèves issues de différents pays, de différentes ethnies mais qui sont amenés à interagir dans un même lieu de socialisation. Ces différences culturelles ne constituent pas les principales sources de création de groupes spécifiques ou des clans au sein de l’école. Il s’agit plutôt pour les différents groupes de maintenir ces différences afin de ne pas perdre son identité lors des échanges inéluctables en classe (Sanchez-Mazas et Fernandez-Iglesias, 2011 : 39).

  1. Impacts pédagogiques de l’hétérogénéité des élèves

L’hétérogénéité a été rapportée par de nombreux enseignants comme étant une source de difficultés. En effet, il s’avère parfois pénible pour l’enseignant de réduire les écarts entre les individus et de trouver un moyen pour les accompagner en classe, afin que ceux qui n’ont pas trop de difficultés à apprendre puissent suivre et acquérir les connaissances acquises par leurs camarades. Les enseignants ont des comportements différents face aux élèves : ceux qui sont brillants à l’école sont encouragés par les enseignants. Les élèves moins brillants ou qui présentent des difficultés pour apprendre ne bénéficient pas toujours de ces encouragements. Au contraire, ils reçoivent des remarques négatives. Il est nécessaire de mentionner que les élèves les plus vulnérables sont également ceux qui sont les plus sensibles aux changements des comportements des enseignants. Ainsi, les différences de traitement entre pairs peuvent directement être discernées par eux, conduisant au renforcement des écarts entre les élèves dans une même classe[9].

Pour résoudre les problèmes découlant de l’hétérogénéité des classes, les systèmes scolaires ont créé la pédagogie différenciée définie par Przesmycki cité par Eïto[10]comme étant «  une pédagogie individualisée qui reconnaît l’élève comme une personne ayant ses représentations propres de la situation de formation ; une pédagogie variée qui s’oppose au mythe identitaire d’un modèle culturel unique d’un enseignement uniformisé. Elle tient compte des différents rythmes d’apprentissage, des différents processus cognitifs mobilisés dans l’acquisition de connaissances, ainsi que des différences psychologiques et socioculturelles des élèves ».Cette définition revient à souligner l’importance que l’enseignant suive un à un les élèves afin qu’il puisse comprendre leurs potentiels et leurs faiblesses et d’apporter leurs aides à l’enfant en difficulté.

Il faut noter cependant, que la pédagogie différenciée est installée en classe depuis longtemps. En effet, chaque élève a ses spécificités et en ce sens, il est impossible pour l’enseignant de traiter tous ses élèves de la même manière. Inconsciemment, l’enseignant va adopter des postures différentes en fonction du profil et des caractères de son élève. Dans ce cadre, il est impossible d’installer une classe homogène parce que chaque élève a ses spécificités et en ce sens, la pédagogie et les démarches mises en œuvre par l’enseignant pour transmettre le savoir à ses élèves varie en fonction de l’élève ainsi que des caractéristiques de la classe elle-même. Dans cette démarche, l’enseignant retient principalement le fait que tout élève peut apprendre, s’adapter à son environnement et détient aussi certaines connaissances qu’il va enrichir en classe. Dans une situation d’apprentissage, les élèves ont droit à faire des erreurs mais il appartient à leurs enseignants de les aider à progresser dans leur environnement scolaire[11].

Prendre compte de l’hétérogénéité en classe nécessite la prise en compte de l’individu et de ses caractéristiques, son unicité. Et pourtant, force est de constater que cela est quasi-impossible en classe car, l’enseignant n’enseigne pas une seule personne mais plusieurs personnes à la fois. Quand un élève pose une question par exemple, l’enseignant ne peut que donner une réponse pouvant être comprise par toute la classe et ce, peu importe leur différence de degré de compréhension, de culture, etc. (Werler, 2011 : 8). Pour l’enseignant, il s’agit de faire en sorte qu’il y ait une différenciation permettant de rendre compte des caractères des élèves. Par exemple, au sein d’une même classe, l’enseignant peut assigner des tâches différentes selon que l’élève présente des difficultés d’apprentissage ou non. La tâche à attribuer devrait dépendre des capacités de la personne. Selon les capacités de l’individu, l’enseignant peut lui faire faire des exercices avec ses pairs ou personnellement. Enfin, la différenciation peut porter sur la création de groupes ou de binômes[12].

Une autre étude menée au niveau d’un établissement scolaire comptant une soixantaine de classe et 106 enseignants a rapporté quelques démarches entreprises par les enseignants pour favoriser la différenciation dans le cadre de la pédagogie différenciée. Les élèves montrent des capacités d’assimilation différentes en matière de lecture et de mathématiques. Ainsi, pour apprendre la lecture, l’enseignant a fractionné la tâche de lecture. Dans cette optique, une partie des élèves se charge du repérage visuel et auditif tandis que d’autres assurent la lecture des syllabes, des mots ou des phrases. En mathématique, l’enseignant a conçu des exercices et des problèmes différents. Ainsi, les élèves habiles en la matière se chargent de faire des exercices plus difficiles, ceux qui sont moins habiles font des tâches plus légères (Forget et Lehraus, 2015 : 77).

  1. La gestion de l’hétérogénéité en milieu scolaire

La gestion de l’hétérogénéité de la classe passe par l’identification des facteurs cognitifs et culturels qui influencent la différence entre la capacité des élèves à apprendre et à assimiler ce que les enseignants leur enseignent. Les différences devraient être considérées comme étant des ressources à valoriser (Le Prévost, 2010 : 59-61). La valorisation de la différence suggère que les individus dans leurs unicités soient pris en compte et que les échanges entre les personnes présentant des performances diverses puissent échanger. Dans cette optique, même au sein de la classe, l’enseignant peut opter par exemple pour la création de petits groupes de travail qui vont réfléchir et travailler sur une tâche particulière[13]. Parfois, les groupes se forment en fonction de l’affinité mais il est également possible de mélanger les individus pour que les échanges soient plus fructueux. Pour chaque groupe, il faut un représentant qui va communiquer les résultats du groupe et dynamiser l’équipe.

Comme les résultats et les performances des élèves sont différents dans une classe hétérogène, alors les enseignants ciblent et accompagnent particulièrement les élèves qui ont des difficultés d’apprentissage. L’enseignant doit dans ce cas faire preuve de flexibilité afin de pouvoir aider l’élève. Cette démarche est retrouvée en Suisse, mais également dans de nombreux pays scandinaves. Il n’est pas rare entre autres que les cantons suisses optent pour la création de classes spécialisées pour accueillir les élèves ayant des difficultés scolaires. Mais ces classes spécialisées se trouvent dans la même école que les classes ordinaires. Dans les pays anglo-saxons par contre, pour faire face à l’hétérogénéité des élèves, optent pour une organisation des classes en fonction des niveaux des élèves. Mais les résultats ne sont pas probants. Les pays germaniques pour leur part, optent pour une organisation en filière pour faire face à l’hétérogénéité (Dubois-Shaik et Dupriez, 2013 : 116-118). Dans le cadre de la prise en compte de la différenciation entre les élèves, les enseignants et les établissements peuvent concevoir des approches de gestion différentes. Le tableau suivant illustre quelques-unes d’entre elles

Tableau 1 : Les variables de différenciation des activités des élèves en classe hétérogène (source : http://www.ac-grenoble.fr/ien.g4/IMG/pdf/Diaporama_Atelier_Formation_differenciation_pedagogique.pdf)

Gestion des tâches respectant les capacités Objectifs
Faire varier la complexité de la tâche : notion de contrats (plan de travail)

Les élèves travaillent sur des compétences communes à des niveaux différents

Adapter le niveau d’exigence

Permettre à l’élève de réussir

Gestion du temps Objectifs
Faire varier la durée de l’activité

– Les élèves effectuent une même tâche, la durée de l’activité peut varier.

– Les élèves effectuent des différentes tâches, la durée de l’activité peut varier

Adapter la durée en fonction des capacités des élèves

Développer l’autonomie

Fixer un temps déterminé : les élèves effectuent la même tâche, la durée est la même pour tous Donner des repères
Mesurer la durée de l’activité avec l’élève : pour une tâche donnée, certains élèves mesurent la durée d’exécution Améliorer la rapidité d’exécution
Choisir des plages horaires dans l’emploi du temps en fonction des activités Tenir compte du rythme des élèves
Les organisations (regroupements flexibles) Objectifs
Groupe homogène

Les élèves sont regroupés en fonction de leurs capacités et/ou de leurs besoins

Apporter une aide ponctuelle

Remédier (groupe de besoin)

Groupe hétérogène

Les élèves sont regroupés selon leurs affinités ou sur commande de l’enseignant

Favoriser l’entraide et les procédures
Binôme homogène

Les élèves ont des compétences et des procédures proches

Favoriser interactions et les procédures
Binôme hétérogène : tutorat

Un élève aide un autre sur la base du volontariat des deux

Favoriser l’entraide
Autres propositions

–          Voisinage : chaque élève alterne avec son voisin une phase de question/ réponse ou de corrections

–          …

Responsabiliser

 

  1. Analyse des difficultés pour faire écrire les élèves en histoire-géographie
  2. Les problèmes relatifs à l’hétérogénéité des élèves

L’hétérogénéité des élèves rend difficile l’accompagnement de ceux-ci dans la tâche d’écriture. Le rapport à l’écrit et la capacité de l’élève à écrire un texte en histoire géographie sont influencés par la place que sa famille accorde à l’écrit. L’hétérogénéité se manifeste entre autres dans la performance des élèves dans l’écriture. Or, cette performance dépend de sa préparation à l’écriture et à sa culture générale. Et au sein d’une classe, les élèves ont des niveaux différents de préparation à la production écrite (Marin, 2011 : 130), ce qui fait que les enseignants doivent discerner à l’avance ce niveau de préparation et cibler les élèves les plus vulnérables.

L’hétérogénéité en classe en effet est source de difficultés car, ils éprouvent de nombreux manques à combler : « manque de connaissances, manque de travail, manque de motivation, manque d’efforts, manque d’attention, manque de méthode, manque d’intelligence, etc. »[14] Devant cette situation, l’enseignant doit donc discerner les manques de chaque individu et l’aider à rattraper ce manque. Dans une classe hétérogène, l’enseignant est amené à faire preuve d’une grande adaptabilité. Et pourtant, les stagiaires n’ont pas un degré élevé d’adaptabilité face à la situation. Et devant cette faille, ils peuvent développer une image peu valorisante d’eux-mêmes, les conduisant non pas à trouver une alternative mais à se résigner sur leur sort (Perez-Roux, 2012 : 110).

  1. Les problèmes relatifs à la complexité de la tâche d’écriture

Avant d’aborder les problèmes relatifs à la complexité de la tâche d’écriture, il semble important de comprendre ce qu’est l’écriture elle-même et les différentes étapes mobilisées avant d’obtenir une production écrite. La recherche en psycholinguisitique a mis en lumière le fait qu’écrire correspond à « transformer des informations référentielles en une trace linguistique linéaire, respectant une visée communicative ». Et en ce sens, elle déploie plusieurs disciplines dont le référentiel, la linguistique et la pragmatique. La mémoire du scripteur constitue entre autres, un des facteurs influençant sa capacité à écrire. Il doit en effet se remémorer tout ce qu’il a appris, et les utiliser. Il doit être apte à faire en sorte que ses idées ne soient pas exprimées de manière illogique et désordonnée. Outre à cela, il doit faire preuve de créativité pour donner un texte unique et agréable à lire. Il doit avoir un niveau assez élevé en vocabulaire pour ne pas utiliser les mêmes mots et ne pas alourdir par conséquent, le texte qu’il écrit. Par ailleurs, il n’est pas seulement  amené à considérer le fond, mais également la forme. Et vu sous cet angle, la tâche d’écriture est loin d’être un geste anodin. Dans ce cadre, il semblerait difficile pour l’enseignant d’inculquer cette pratique aux élèves[15].

La tâche d’écriture est une démarche complexe dans la mesure où l’élève mobilise tous ses acquis en classe dans la matière étudiée, ainsi que dans d’autres disciplines notamment la maîtrise de la grammaire et de vocabulaire français. Vu sous cet angle, il est nécessaire que les élèves soient préparés à la production écrite. Et pourtant, une enquête auprès d’enseignants a permis de constater que cette phase de préparation à l’écrit n’existe pas. Il faut noter cependant que d’autres s’y prêtent mais rarement. Quand l’enseignant prépare l’élève à la production écrite, la préparation à cette tâche passe par différentes étapes : la recherche d’idées et d’arguments pouvant être exploitées et/ou la rédaction d’un plan. Ces premières démarches sont réalisées en classe, mais la suite devient un devoir à la maison. Or, les parents d’élèves n’arrivent pas toujours à aider leurs enfants à faire leur devoir. De plus, de retour en classe, toutes les productions des élèves ne sont pas corrigées. Très peu de temps seulement est consacré à la correction des écrits des élèves (Zetili, 2010 : 164 – 166).

Outre à cela, pour pouvoir écrire correctement, les élèves doivent comprendre le sens des mots, les utiliser à bon escient et faire en sorte que les phrases et les paragraphes qu’ils écrivent soient cohérents. Les enseignants font même un débat sur la hiérarchie entre les différentes étapes à suivre pour inculquer aux élèves l’écriture. En effet, chaque individu a son propre rapport à l’écriture et chaque enseignant aborde de différentes manières les stratégies à suivre pour favoriser la production écrite chez leurs élèves. Pour certains, il s’agit de servir eux-mêmes d’exemples aux élèves en réalisant avec eux une production écrite. Dans ce cas, les élèves sont amenés à imiter ce que fait leur enseignant. Pour d’autres, l’apprentissage de l’écriture passe directement par l’écriture pour que l’élève devienne un bon scripteur. Mais à la fin, les enseignants admettent que la tâche d’écriture est une tâche complexe et en ce sens, devrait être divisée en plusieurs étapes pour la rendre plus accessible à l’élève[16]. Pour l’enseignant, il s’agit d’aider l’élève à construire le texte pendant la planification, la mise en texte et la révision[17].

La méta-analyse faite sur des recherches auprès d’enseignants américains a prouvé que les problèmes relatifs à la tâche d’écriture commencent dès le primaire et au fur et à mesure de son parcours scolaire, l’élève va éprouver des difficultés pour écrire. Ainsi, certains enseignants au collège n’ont pas insisté sur le rappel des règles grammaticales, mais sur l’instruction des élèves à combiner des phrases. Puis, ils montrent un modèle à suivre pour les élèves. Comme résultat, la qualité des productions écrites par les élèves s’est améliorée. Le résultat est le même lorsque les élèves suivent des guides pour l’écriture, ou quand l’enseignant propose la préparation à l’écriture, l’entraide entre les élèves pour la réalisation de la tâche (Graham et al., 2012 : 880).

  1. Les problèmes relatifs à la rédaction d’un texte sur un sujet d’histoire géographie

Le travail d’écriture en histoire géographie amène l’élève non seulement à citer les différents évènements dans leur ordre chronologique, mais à faire aussi des analyses dans une situation donnée. Les enseignants ont relevé les problèmes suivants en matière de rédaction en histoire géographie : le vocabulaire et la difficulté à créer des phrases à partir de ce qu’ils pensent tout en veillant à ne pas oublier l’enchaînement chronologique et logique des évènements. Pour ce faire, l’élève peut se fonder sur quelques récits historiques établis par des témoins des faits par exemple. Mais dans cette approche, plusieurs récits peuvent exister et servir d’argument dans les idées annoncées par l’élève dans son écrit. Pourtant, ces récits n’ont pas la même valeur. Certaines sont plus fiables et plus solides que d’autres. Ainsi, le travail d’écriture en histoire géographie pousse l’élève à distinguer les éléments les plus pertinents pour les intégrer dans sa production écrite. Mais même le récit historique peut encore comporter des failles. D’abord, certains d’entre eux sont issus de témoin qui n’a pas forcément été pris en compte au moment des faits et dans ce cas, l’enseignant doit contextualiser[18].

Vu la faille au niveau de l’utilisation exclusive d’un seul outil pour apprendre l’histoire géographie aux élèves, les enseignants optent pour d’autres outils comme les livres d’histoires, les documentaires, etc. Afin de pouvoir écrire, l’élève doit donc beaucoup lire. Et pourtant, force est de constater que les livres ainsi présentés sont aussi variés que les élèves peuvent parfois se perdre dans la suite logique des évènements et dans le discernement des informations les plus pertinentes. Les élèves sont invités non seulement à lire mais aussi à interpréter ce qu’ils lisent dans ces documents écrits. L’enseignant les aide dans cette démarche en développant chez eux l’esprit critique et favorise leur compréhension du texte et des évènements. Au cas où des informations manquent dans le livre, l’enseignant pourrait le mentionner pour aider les élèves (Bickford III, 2013 : 61).

  1. La notion de pédagogie explicite

La pédagogie explicite peut être considérée comme étant « une transmission de savoirs […] l’acquisition d’habiletés et de compétences par l’élève. Pour cela, il tente de réaliser le difficile équilibre entre le « teaching » (l’enseignement) et le « learning » (l’apprentissage). »[19] Ainsi par rapport à la pédagogie classique, la pédagogie explicite met plus de pression sur l’enseignant qui va devoir gérer cette équilibre mais aussi expliquer aux élèves les buts de l’apprentissage ainsi que les principales idées à transmettre aux élèves. Or, pour pouvoir transmettre ces différentes informations, l’enseignant doit d’une part connaître les niveaux des élèves et établir une stratégie d’apprentissage. Pour aider l’élève à assimiler ce qu’il dit, il peut concevoir différents dispositifs tels que les maquettes, les vidéos, les diaporamas, etc.[20]

La pédagogie explicite consiste pour l’enseignant, à expliquer à l’élève les concepts, les stratégies, les procédures et les démarches à suivre pour atteindre un objectif. Les explications se font oralement pour que les élèves comprennent mieux. Ces dernières se réfèrent aux différentes questions que l’élève peut se poser et l’aide de ce fait à comprendre ce qui se passe lors de la réalisation d’une tâche. En d’autres termes, l’enseignant donne un modèle à suivre aux élèves. Par la suite, ces derniers vont réaliser la tâche de manière autonome. Cependant, pendant qu’ils s’affairent à réaliser la tâche, les interactions peuvent encore se produire. Par ailleurs, ces interactions permettent à l’enseignant d’évaluer si l’élève a réellement compris ce qui est attendu de lui ou non et d’agir par conséquent. Le but de cette pédagogie est de construire une représentation positive de ce que l’élève apprend.

Dans la pédagogie traditionnelle, l’enseignant transfère le contenu c’est-à-dire les savoirs, les informations sur la matière aux élèves. Dans la pédagogie explicite par contre, c’est la matière elle-même qui est expliquée à l’élève. Le modelage constitue dans ce cadre, une pratique très fréquente pour faire comprendre la matière aux élèves. Par la suite, l’enseignant dirige les élèves à suivre le modèle précédemment réalisé et enfin, d’agir de manière autonome[21]. Ces différentes étapes sont schématisées comme suit :

Figure 1 : Les différentes étapes de la pédagogie explicite (source : Bissonnette et Richard, 2001 : 82)

La pédagogie explicite a été rapportée efficace pour aider les élèves en difficulté. Ces derniers requièrent en effet un encadrement rapproché et des processus de consolidation afin de les aider à mémoriser ce qu’ils ont appris. Elle a été testée sur l’apprentissage de matières de base comme le français ou les mathématiques[22], mais également des sciences, de l’histoire, de la lecture. Elle peut aider les élèves issus de milieux défavorisés, mais également les élèves plus brillants[23].

  1. Analyse empirique
  2. Accompagner l’enseignant stagiaire par la mise en place d’une démarche d’observation

L’observation est une démarche importante dans l’acquisition d’une posture d’enseignant. Le binôme accompagnateur – accompagné observe des pratiques réelles et interagit entre eux pour le développement professionnel du stagiaire (Lacourse et Maubant, 2009 : 7). Il s’agit d’une démarche importante dans l’acquisition d’une expérience de la classe. Dans cette optique, il n’est plus question de se baser sur l’observation et la focalisation sur un seul fait, mais de s’ouvrir à toutes les possibilités qui peuvent se présenter en classe. La salle de classe devient alors le lieu et le contexte d’observation de l’accompagnateur et de son stagiaire. Pour ce faire, le binôme peut utiliser des enregistrements vidéo des cours. Cette démarche demande de l’investissement en termes d’équipements.

Mais si l’observation directe en classe permet de réagir instantanément, il s’avère difficile pour les deux compagnons de revenir sur un fait intéressant. En enregistrant ce qui s’est passé en classe, le binôme peut prendre du recul avant de revoir sous un autre angle, leurs pratiques en classe et réajuster leurs postures devant des situations similaires. Des chercheurs affirment entre autres, que l’enregistrement vidéo pourrait également servir au stagiaire à connaître les différentes situations d’apprentissage sans être contraints d’intervenir ou d’enseigner directement dans les salles de classe. L’observation à l’aide d’un enregistrement vidéo épargne alors certaines situations pouvant être vexantes pour l’accompagnateur et l’accompagné[24].

L’observation aussi demande certaines habiletés de la part de l’enseignant stagiaire pour être efficace. Il doit être apte à déceler les différentes possibilités et de tirer des leçons à partir de ce qu’il observe. Mais tout comme deux personnes peuvent avoir des visions et des interprétations d’un même fait, l’accompagnateur et l’accompagné peuvent aussi avoir des idées différentes face à une même situation problématique. Les recherches en pédagogie ont montré que si l’accompagnateur l’invite à observer une situation, beaucoup de faits échappent au stagiaire. Il semble difficile pour eux de discerner toutes les situations d’enseignement-apprentissage. Pour un enseignant expérimenté, il est plus aisé de trouver les problèmes posés par un comportement des élèves même s’ils ne s’expriment pas.

A travers les expressions corporelles des élèves et du climat en classe, il peut déjà déterminer les problèmes et les postures à adopter dans de tels cas. Les stagiaires eux, n’arrivent pas à observer ces choses à moins que l’accompagnateur ne leur montre ce qu’il faut observer. Les stagiaires tendent plus à faire des observations de surface qu’à approfondir ce qu’ils voient. Ainsi, dans la plupart des cas, leurs observations et leurs réflexions se limitent aux caractéristiques des élèves et la gestion des classes en cas de perturbations. Parfois, ils font des réflexions focalisées sur des éléments globaux de la posture de l’enseignant et en ce sens, ne peuvent pousser plus loin leurs réflexions[25].

Si la vidéo constitue un outil d’optimisation de l’observation faite par l’enseignant, elle comporte aussi des failles. En effet, il existe toujours des faits qui échappent à l’observateur. C’est la raison pour laquelle, l’observation par la vidéo pourrait être complétée par une observation in situ au cours de laquelle, l’observateur est mis dans l’ambiance de la classe. De ce fait, il va pouvoir trouver les détails, comme les comportements des élèves par exemple, pendant la tâche d’écriture. Il a été rapporté en effet que l’observation des comportements et des postures des élèves pendant la tâche va aider l’enseignant à ajuster sa posture. En d’autres termes, pour le stagiaire, il ne s’agit pas uniquement de se focaliser sur la posture et sur ce que fait l’enseignant accompagnateur, mais se focaliser principalement sur les élèves pour qui, l’éducation est conçue.

Dans la tâche d’écriture qui nous intéresse par exemple, des études ont montré que plus les élèves font des pauses et plus leurs productions sont de mauvaise qualité. Chez les bons scripteurs, les pauses sont moins fréquents et leur durée plus courtes parce qu’ils les utilisent pour réfléchir sur ce qu’ils vont écrire après. De l’autre côté, chez les élèves présentant des difficultés pour écrire, les pauses sont longues parce qu’ils ne trouvent plus rien à écrire et se focalisent sur ce qu’ils ont déjà écrit. Ils cherchent plutôt à corriger les fautes dans ce qu’ils ont écrits au lieu de se concentrer sur la possibilité de poursuivre l’écriture. Cela apprend à l’enseignant que la production écrite pourrait requérir dans certains cas à la compréhension des différents faits qui se passe chez eux lorsqu’ils écrivent[26].

En d’autres termes, il s’agit d’optimiser la façon d’observer des enseignants stagiaires voire même, à faire une rupture avec la démarche d’observation adoptée jusque là. L’observation de la situation scolaire ne devrait plus être une habitude chez les stagiaires, ni se baser sur les rapports faits par les stagiaires aînés. Mais l’observation n’est pas une démarche anodine, ni un geste simple. C’est la raison pour laquelle, il serait intéressant d’apprendre les stagiaires à faire des observations tout au long de leurs parcours de formation (Ria et al., 2009 : 106).

  1. L’apport du numérique pour aider à produire de l’écrit en histoire-géographie

Le numérique semble avoir modifié le rapport des élèves et de la société en général, à l’écrit. En effet, les jeunes d’aujourd’hui ne sont pas à l’aise avec l’écrit et trouvent cette pratique complètement démodée. Par ailleurs, il existe une différence notable entre l’écriture électronique réalisée par les élèves lorsqu’ils écrivent des mails ou des messages et l’écriture scolaire, plus formel et demandant plus d’efforts. Et pourtant, le numérique fait partie intégrante de la société actuelle. Il est donc dérisoire d’empêcher les élèves à vivre et à utiliser les outils numériques. Au contraire, il serait intéressant d’intégrer ces outils dans l’apprentissage de l’écriture. L’enseignant pourrait commencer par exemple par interpeller les élèves sur les écarts entre les écrits électroniques et les écrits classiques. Mais c’est également une opportunité pour les enseignants de faire une écriture collaborative. En utilisant l’ordinateur comme support, les enseignants et les élèves semblent plus motivés à faire des écrits[27].

Certains établissements mettent à la disposition des enseignants et de leurs élèves un tableau interactif qui va permettre les échanges entre l’enseignant et les élèves et les entre les élèves. Cela constitue un moyen pour stimuler l’élève à participer en classe et de ne pas s’isoler devant son ordinateur. Cet outil numérique permet entre autres d’afficher et de rendre visible par toute la classe les écrits de chaque élève. Cette approche permet d’une part d’enlever la peur suscitée par l’action d’écrire puisqu’il est conscient que tous ses camarades passent aussi cette épreuve mais en même temps, c’est un outil permettant d’enlever la peur de faire des erreurs chez les élèves. Etant donné qu’ils peuvent voir les erreurs de leurs camarades, ils sont aussi conscients du fait que ce sont des choses qui peuvent être corrigées, mais c’est la participation qui est important. Puis, le tableau interactif permet entre autres aux élèves d’éviter de faire des griffonnages ou des ratures dans leurs cahiers. Ces ratures montrent en effet les erreurs faites par l’élève, ce qui fait qu’ils ont honte de montrer leurs écrits aux autres. Avec l’outil numérique, ils peuvent très facilement effacer les fautes (Becchetti-Bizot, 2012 : 44).

En ce qui concerne la recherche et le tri des documents fiables à valoriser dans son travail, le travail de l’élève peut également être facilité par le recours à l’outil numérique. Ce dernier propose des liens et une quantité importante d’informations que l’élève peut regarder et exploiter. Outres les documents d’histoire géographie, l’élève peut entre autres y voir des documents sur les architectures textuelles, les variations grammaticales, etc. ce dont il a besoin pour pouvoir écrire correctement. Mais comme l’élève n’est plus encombré par de nombreux documents sur des supports papiers, il peut être plus motivé pour lire et pour écrire (Becchetti-Bizot, 2012 : 45).

Mais bien que le numérique pourrait être d’une grande aide dans l’enseignement et plus particulièrement, dans la tâche d’écriture, il comporte aussi quelques limites. D’une part, il demande une certaine compétence de la part des enseignants pour manipuler l’outil numérique et ensuite, pour inculquer les élèves à le manipuler et à l’utiliser comme étant un outil de développement culturel. Or, cela demande une formation spécifique pour l’enseignant et une familiarisation assez tôt pour l’élève (Becchetti-Bizot, 2012 : 47).

  1. Former l’enseignant stagiaire à l’approche par la pédagogie explicite

L’enseignement explicite a été rapporté comme étant une des approches pour améliorer l’enseignement des élèves à l’écriture. Pour ce faire, l’enseignant apprend aux élèves à construire un plan et à maîtriser la rédaction de différents types de textes. L’instruction des stratégies d’écriture par l’enseignant semble particulièrement bénéfique pour l’élève. Il s’avère indispensable par la suite, que les élèves apprennent non seulement les différentes stratégies d’écriture, mais aussi à les exploiter à bon escient. Mais comme la tâche d’écriture demande une certaine autonomie de la part de l’élève, il pourrait être intéressant de développer leur créativité. Comme les élèves se heurtent souvent à des problèmes de structuration du texte, l’instruction explicite pourrait les aider à comprendre les démarches pour structurer le texte (Graham et al., 2012 : 889). L’enseignant pourrait modéliser par exemple les différentes structures du texte et les exposer aux élèves pour inspirer ceux-ci. Mais à la fin, les élèves devraient être aptes à agir de manière autonome.

Puis, il y a la nécessité d’évaluer la production écrite des élèves. Notre revue de littérature a montré que nombre d’enseignants accompagnent les élèves pendant les premières phases de la rédaction d’un texte en histoire-géographie en faisant par exemple, le plan et en avançant les principales idées. Mais tout de suite après, la tâche d’écrire elle-même, qui est la plus délicate, est devenue un devoir à la maison. C’est en quelque sorte, une démarche qui va donner l’impression aux élèves d’être livrés à eux-mêmes. Encore, lorsqu’ils rentrent en classe, le professeur contrôle que tous les élèves ont rendu leurs écrits, sans les corriger tous. Et devant ce fait, l’élève pourrait être démotivé.

Ainsi, la démarche d’évaluation des productions écrites ne devrait aucunement être négligée. Pour les élèves, le moment de remettre leurs écrits à l’enseignant est particulièrement éprouvant. En effet, ils redoutent les feedbacks négatifs que le professeur pourrait émettre à l’endroit de leurs travaux. Dans ce cadre, il pourrait être plus intéressant d’insister sur les points forts de l’élève que de se cantonner sur ses points faibles afin de le motiver à s’améliorer et à continuer à écrire pour se perfectionner. La reconnaissance des efforts des élèves et leur encouragement peuvent se faire de manière très simple mais percutante. Par exemple, devant un texte original, l’enseignant peut alors lire devant toute la classe l’œuvre. Cela encourage son auteur, mais stimule aussi le reste des élèves à faire de même (Jorro, 2013 : 113-115).

Comme les élèves sont beaucoup plus motivés à la tâche lorsqu’ils s’entraident entre eux, il pourrait donc être intéressant de développer les activités collectives lors de la production écrite. Par ailleurs, les échanges entre pairs parviennent toujours à améliorer la qualité des résultats (Graham et al., 2012 : 890). Lors des productions écrites, dans la grande majorité des cas, les échanges entre professeur et élève sont favorisés au détriment des échanges entre les pairs. De même, les propos tenus par l’enseignant pendant les cours d’histoire géographie et surtout, pendant la phase de production écrite, visent surtout à corriger les erreurs faites par l’élève mais ne concourent pas ou peu à l’interprétation par l’élève (Jorro, 2013 : 109). Et pourtant, si nous acceptons que l’hétérogénéité devrait être exploitée comme étant une ressource, alors les échanges entre pairs sont à favoriser. Nous pensons en effet, que chaque élève a ses propres qualités et en discutant avec ses pairs, il peut améliorer ses acquis.

  1. Discussion

La tâche d’écriture est une procédure complexe dans laquelle, les élèves doivent déployer toutes leurs connaissances dans différentes disciplines pour construire des phrases, argumenter les idées et construire des paragraphes. C’est un processus long, qui demande beaucoup de temps et d’efforts de la part des élèves. Pour l’enseignant, il s’agit surtout de déceler les différences entre les élèves et de donner des appuis particuliers aux élèves montrant des difficultés par rapport à leurs pairs pour comprendre ce qui est attendu d’eux et les démarches à suivre pour atteindre cet objectif. L’appui aux élèves les plus vulnérables ne veut pas pour autant dire que l’enseignant va délaisser les élèves qui font des efforts qui arrivent très bien à obtenir les résultats escomptés. Pour le maître de stage, l’enjeu de l’apprentissage des élèves à faire une production écrite en histoire-géographie réside principalement sur la conscientisation du stagiaire sur la complexité de la tâche d’écriture et sur les différentes situations pouvant se présenter en cours d’histoire géographie.

Remuer le passé ne se fait pas sans heurts. Certains élèves peuvent montrer un total désintérêt pour connaître l’histoire qu’ils ont du mal à imaginer vu qu’ils ne l’ont pas vécu. D’autre part, dans une classe hétérogène, les élèves peuvent se dresser contre les apprentissages de l’enseignant. Devant de tels faits, il appartient à l’enseignant novice de faire une bonne observation, une bonne lecture des évènements et des comportements des élèves afin de pouvoir ajuster sa posture et sa stratégie avec les caractéristiques de la classe. Mais dans cette démarche, l’accompagnateur devrait déjà anticiper et attirer l’attention de son stagiaire sur les faits les plus marquants. Il ne s’agit pas de se focaliser uniquement sur la posture et les stratégies établies par l’accompagnateur expérimenté pour maîtriser la classe en cas de perturbations et pour aider les élèves en difficulté, mais de lire également les comportements des élèves.

Nous avons avancé la méthode de l’observation en soulignant que celle-ci peut se faire soit à l’aide d’une vidéo ou directement en classe. La première est un outil qui permet de faire de l’introspection et de revenir autant que voulu sur les faits qui se sont passés en classe. Mais nous cette démarche comporte des risques parce que l’observateur constitué ici par l’accompagné peut ignorer complètement l’ambiance dans la salle de classe et pourtant, ce sera son lieu de travail. Aussi, proposons-nous de faire de ces deux démarches des démarches complémentaires.

Outre à cela, nous avons avancé l’utilisation du numérique et plus particulièrement, du tableau interactif pour aider les élèves à réduire leurs stress et leur timidité lorsqu’ils écrivent. La métaanalyse que nous avons établi a permis de montrer qu’effectivement, le numérique change le rapport de l’individu à l’écriture que ce soit l’enseignant ou l’apprenant. Mais dans une génération numérique, il est important de faire de cet outil, un outil de motivation des élèves. Par la même occasion, le numérique pourrait très bien servir et compléter la pédagogie explicite favorisée par l’accompagnateur. Comme l’enseignant doit établir un modèle à suivre aux élèves et les inculquer à comprendre la matière notamment l’histoire géographie et la démarche d’écriture, le numérique n’est pas à écarter. Au contraire, l’enseignant pourrait s’en servir pour établir son modèle et le diffuser et l’afficher sur les écrans de chaque ordinateur où les élèves sont postés.

Dans notre cas, nous avons observé que les élèves ne veulent pas écrire. D’ailleurs, la stagiaire nous a fait part de cette constatation : « Les élèves ne veulent pas écrire, pas même une ligne, pourtant, s’ils sont là, c’est qu’ils savent le faire ». Cette constatation pourrait à notre avis démontrer deux choses. D’abord, les élèves ne savent plus écrire. Deuxièmement, leur rapport à l’écrit s’est détérioré et ils ne sont plus motivés pour faire des productions écrites. Devant de tels faits, nous pensons que la numérique qui a été rapporté dans notre analyse comme étant un outil innovant pourrait corriger ce rapport négatif à l’écrit. Pour l’accompagnateur, il s’agit d’apprendre à l’accompagné la manipulation des outils numériques et l’intégration et l’exploitation de celui-ci en classe. Dans une démarche de pédagogie explicite, l’accompagnateur pourrait concevoir le modèle avec la participation de son stagiaire mais par la suite, il appartiendra à celui-ci d’inculquer le modèle à l’élève et à les suivre. L’évaluation comme nous l’avons dit, est un point essentiel parce qu’il permet à l’élève d’avoir une certaine forme de reconnaissance de ce qu’il a fait par le professeur.

Les analyses faites par les chercheurs, pédagogues et enseignants suite à l’établissement d’expérience ou de quasi-expériences tendent toutes à souligner l’efficacité de ces approches. Mais pour autant, il nous semble important d’émettre des réserves car si les résultats des recherches psychologiques et pédagogiques donnent des résultats, les réalités sur terrains peuvent parfois être complètement différentes. Par ailleurs, nous n’avons pas décelé de nombreuses études qui prouvent statistiquement l’efficacité de ces approches. Et en les appliquant dans la classe en matière d’histoire géographie, nous ne pouvons être sûr des fiabilités de ces approches qu’en faisant des suivis réguliers pouvant s’étendre de trois à cinq ans. De même, il est nécessaire de faire ce suivi sur un nombre assez conséquent d’élèves pour s’assurer de la fiabilité des résultats. Or, ce que nous avons observé dans le cadre de cette étude, ce sont surtout des études qualitatives qui se basent sur des verbatims racontant les vécus des enseignants d’histoire géographie, ou d’enseignants novices.

Par ailleurs, il nous semble intéressant de prendre en compte le rapport des élèves au numérique. Certes, ces élèves sont tous issus de la même génération numérique. Mais l’histoire personnelle et la vie familiale de ces élèves ne peuvent pas être la même et ce fait va changer de manière plus ou moins conséquente, sur leur rapport à l’écrit mais également, sur leur rapport au numérique. L’accompagnateur devrait dans ce cas signaler son stagiaire sur les possibles impacts de ces différences sur le bon déroulement de l’enseignement explicite portant sur la production écrite en matière d’histoire géographie.

Conclusion

Que ce soit en Europe ou dans d’autres continent, la tâche d’accompagnement est une tâche complexe et pourtant, si importante pour s’assurer de la qualité de l’enseignement donné aux élèves. Peu importe le pays et peu importe que l’établissement soit privé ou public, les accompagnateurs se trouvent confrontés aux mêmes enjeux : développer chez les enseignants novices, les compétences et les savoirs nécessaire à l’exercice du métier d’enseignant. L’accompagnement est une démarche de co-construction et de collaboration, de concertation entre l’accompagnateur et l’accompagné. Mais dans cette démarche, il revient à l’accompagnateur la tâche d’établir un climat de confiance entre lui et la personne qu’il accompagne mais également, d’établir un climat favorable entre l’accompagné et l’ensemble de la classe.

Le stagiaire est un être « hybride » détenant des acquis découlant de sa formation initiale. Mais il est également un être qui doit encore poursuivre sa construction identitaire au sein de l’école qui deviendra son lieu de travail. Mais force est de constater que ce qui est appris au cours de la formation initiale ne coïncide pas toujours avec la réalité observée sur terrain. Dans un contexte d’hétérogénéité, chaque élève est à considérer dans son unicité. De même, la posture de l’enseignant doit aussi changer pour s’adapter en fonction de l’élève qui se tient devant lui, en fonction des caractères générales de la classe qu’il va tenir. Mais avec cela, les besoins en accompagnement de l’enseignant novice vont aussi évoluer et en parallèle, l’accompagnateur doit évoluer en fonction des attentes de son accompagné.

Cette étude nous a permis de mettre en lumière deux choses : la nécessité pour l’accompagnateur d’apprendre son stagiaire à maîtriser la classe d’une part et à avoir une bonne réflexivité en cas de perturbation en classe. Par la suite, il est nécessaire qu’il apprenne à observer les comportements des élèves et à agir par conséquent. Pour apprendre aux élèves à faire des productions écrites, l’accompagnateur peut former le stagiaire à la pédagogie explicite. Dans ce cadre, il est nécessaire que le professeur donne un modèle à imiter par l’élève et le dirige par la suite, pour le laisser accomplir de manière autonome à la fin, la tâche demandée. Pour faciliter cette approche, l’enseignant novice peut se servir d’outils numériques. Mais ces démarches pour être efficientes, doivent être complétées par une observation habile de ce qui se passe en classe. Certes, pour pouvoir enseigner, le novice va observer son accompagnateur en classe. Mais nous avons démontré que ce n’est pas uniquement ce comportement de l’accompagnateur qui devrait être observé, mais aussi, les comportements et les réactions des élèves car c’est pour eux que toutes les initiatives sont prises.

Cette réflexion contribue à offrir des pistes pour améliorer la qualité de l’accompagnement des stagiaires. Elle a permis de mettre en lumière toutes la complexité de la tâche d’accompagnement et les enjeux spécifiques à l’apprentissage de la tâche d’écriture en matière d’histoire-géographie. Nous ne pouvons cependant pas prétendre que cette étude soit exhaustive, car nos observations se sont focalisées sur une stagiaire et que notre collaboration a commencé pendant l’année scolaire 2015 – 2016 et en ce sens, nous n’avons pas encore pris assez de recul quant à l’efficacité des démarches que nous avons proposées.

Des études supplémentaires et quantitatives devraient alors être entreprises afin de suivre sur plusieurs années, l’efficacité de la pédagogie explicite sur l’aptitude des élèves à écrire un texte sur l’histoire géographie. D’autre part, nous sommes amenés à vérifier sur un nombre conséquent l’adoption de la pédagogie explicite et les résultats qu’ils en ont obtenu. Certes, nous avons démontré dans le cadre de l’analyse des pratiques faites par les autres enseignants et dans d’autres pays que la pédagogie explicite peut effectivement être une alternative pour inculquer la production écrite des élèves. Mais encore faut-il étayer par des résultats statistiques les propos tenus dans notre établissement.

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  • Marin, B. 2011. « Ecrits premiers, seconds, métascripturaux : des signes à la conquête de l’abstraction », Le français aujourd’hui, 3 (174) : 129 – 134.
  • Perez-Roux, T. 2012. « Développer la réflexivité dans la formation initiale des enseignants ? Enjeux des dispositifs d’analyse de pratiques et conditions de mise en œuvre dans deux contextes de formation en France », Formation et pratiques d’enseignement en questions, (15) : 97 – 118.
  • Ria, L., Serres, G. et Leblanc, S. 2009. « De l’observation vidéo à l’observation in situ du travail enseignant en milieu difficile : étude des effets sur des professeurs stagiaires », Revue suisse des sciences de l’éducation, 31 (3) : 105 – 120.
  • Sanchez-Mazas, M. et Fernandez-Iglesias, R. 2011. « L’interculturel à l’épreuve de l’action : comment équiper les enseignant face au public scolaire hétérogène ? » Alterstice, 1 (1) : 35 – 46.
  • Van Nieuwenhoven, C. et Colognesi, S. 2013. « Une recherche collaborative autour des difficultés des maîtres de stage à accompagner leur stagiaire », Interacções, 27 : 118 – 138.
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  • Zetili, A. 2010. « Quelles pratiques de classe pour enseigner la production écrite ? » Synergie Algérie, (9) : 159 – 172.

[1] Wattiez, R. Viser la professionnalisation dans l’accompagnement des stagiaires dans les Hautes Ecoles, catégorie pédagogique, http://www.changement-egalite.be/etude_acc/laccompagnement_angles07.pdf

[2]Wattiez, R. Viser la professionnalisation dans l’accompagnement des stagiaires dans les Hautes Ecoles, catégorie pédagogique, http://www.changement-egalite.be/etude_acc/laccompagnement_angles07.pdf

[3] Lebel, C., Bélair, L. et Goyette, N. 2012. « Accompagnement et reconnaissance professionnelle au service de la persévérance des stagiaires en difficultés », Recherches & éducations, n°7, http://rechercheseducations.revues.org/1374

[4] Lebel, C., Bélair, L. et Goyette, N. 2012. « Accompagnement et reconnaissance professionnelle au service de la persévérance des stagiaires en difficultés », Recherches & éducations, n°7, http://rechercheseducations.revues.org/1374

[5] Lebel, C., Bélair, L. et Goyette, N. 2012. « Accompagnement et reconnaissance professionnelle au service de la persévérance des stagiaires en difficultés », Recherches & éducations, n°7, http://rechercheseducations.revues.org/1374

[6] Feyfant, 2010. « L’apprentissage du métier d’enseignant », Veille scientifique et technologique, n°50, http://ife.ens-lyon.fr/vst/LettreVST/pdf/50-janvier-2010-integrale.pdf

[7] Jorro, A., MaireSandoz, M-O. et Watrelot, M. 2011. « Recherche collaborative et développement professionnel des acteurs », Acte du colloque international INRP sur Le travail enseignant au XXIe siècle, perspectives croisées : didactiques et didactique professionnelle,  du 16 au 18 mars 2011, http://www.inrp.fr/archives/colloques/travail-enseignant/contrib/27.pdf

[8]Breithaupt, S. 2014. « Prendre en compte l’hétérogénéité de la classe et adapter son enseignement : Comment les enseignants primaires en formation pensent-ils l’aide aux élèves en difficulté ? », Actes du congrès de l’Actualité de la recherche en éducation et en formation (AREF), Université de Genève, Septembre 2010., https://plone.unige.ch/aref2010/symposiums-longs/coordinateurs-en-m/personnalisation-et-individualisation-des-parcours-des-eleves-1.-lorganisation-du-travail-scolaire-et-les-pratiques-pedagogiques-entre-differenciation-interne-et-externe/Prendre%20en%20compte%20lheterogeneite.pdf/at_download/file

[9] Galand, B. 2009. Hétérogénéité des élèves et apprentissages : Quelle place pour les pratiques d’enseignement ? Les cahiers de recherche en éducation et formation, n°71, https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00561564

[10]Eïto, D. Un essai de pédagogie différenciée : la pédagogie de contrat, http://espe.univ-reunion.fr/fileadmin/Fichiers/ESPE/bibliotheque/expression/15/Eito.pdf

[11]Robbes, B. 2009. La pédagogie différenciée : historique, problématique, cadre conceptuel et méthodologie de mise en œuvre, http://www.courssegondval.com/uploads/5/1/6/1/51618097/pedagogie_differenciee_par_robbes.pdf

[12] Prendre en compte la diversité des élèves : la différentiation pédagogique, http://neo.snuipp.fr/prendre-en-compte-la-diversite-des,69

[13] Des dispositifs qui facilitent la prise en compte de l’hétérogénéité et la mise en place d’un travail spécifique, dirigé par l’enseignant, avec un petit groupe d’élèves pour impliquer les élèves dans leurs apprentissages et permettre à chacun de progresser, http://www.ac-grenoble.fr/ien.bourgoin3/IMG/Des_dispositifs_pour_orga_travail_specifique-2.doc

[14] Feyfant, A. 2016. « La différenciation pédagogique en classe », Dossier de veille de l’IFE, n°113, http://edupass.hypotheses.org/1066

[15] Musset, M. 2011. « Apprendre à écrire : du mot à l’idée », Dossier d’actualité Veille et analyses, n°62, http://www.inrp.fr/vst/DA/detailsDossier.php?dossier=62&lang=fr

[16] Jorro, A., MaireSandoz, M-O. et Watrelot, M. 2011. « Recherche collaborative et développement professionnel des acteurs », Acte du colloque international INRP sur Le travail enseignant au XXIe siècle, perspectives croisées : didactiques et didactique professionnelle,  du 16 au 18 mars 2011, http://www.inrp.fr/archives/colloques/travail-enseignant/contrib/27.pdf

[17] Musset, M. 2011. « Apprendre à écrire : du mot à l’idée », Dossier d’actualité Veille et analyses, n°62, http://www.inrp.fr/vst/DA/detailsDossier.php?dossier=62&lang=fr

[18] Lalagüe – Dulac, S. 2010. Le retour du récit historique à l’école primaire : politiques éducatives et pratiques courantes. Actes du Congrès international de Didactiques, http://dugi-doc.udg.edu/bitstream/handle/10256/2726/184.pdf?sequence=1

[19] La pédagogie explicite, Qu’est-ce que l’enseignement explicite ? http://www.3evoie.org/telechargementpublic/La%20p%C3%A9dagogie%20explicite%20-%20pr%C3%A9sentation.pdf

[20]Roberge, A. 2015. L’enseignement explicite : une méthode adaptée pour les élèves en difficulté, http://cursus.edu/article/25046/enseignement-explicite-une-methode-adaptee-pour/#.WPpNkFOfdxM

[21] Richard, M. et Bissonnette, S. Sciences cognitives et enseignement explicite, http://www.formapex.com/telechargementpublic/richard2012a.pdf

[22] Roberge, A. 2015. L’enseignement explicite : une méthode adaptée pour les élèves en difficulté, http://cursus.edu/article/25046/enseignement-explicite-une-methode-adaptee-pour/#.WPpNkFOfdxM

[23] Gauthier, C., Bissonnette, S. et Richard, M. L’enseignement explicite, http://www.formapex.com/telechargementpublic/gauthier2007c.pdf

[24] Gaudin, C. et Chaliès, S. 2012. « L’utilisation de la vidéo dans la formation professionnelle des enseignants novices », Revue française de pédagogie, n°178, http://rfp.revues.org/3590

[25] Gaudin, C. et Chaliès, S. 2012. « L’utilisation de la vidéo dans la formation professionnelle des enseignants novices », Revue française de pédagogie, n°178, http://rfp.revues.org/3590

[26] Musset, M. 2011. « Apprendre à écrire : du mot à l’idée », Dossier d’actualité Veille et analyses, n°62, http://www.inrp.fr/vst/DA/detailsDossier.php?dossier=62&lang=fr

[27] Musset, M. 2011. « Apprendre à écrire : du mot à l’idée », Dossier d’actualité Veille et analyses, n°62, http://www.inrp.fr/vst/DA/detailsDossier.php?dossier=62&lang=fr

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