En quoi le rôle éducatif de l’infirmière libérale améliore la prise en charge des patients colostomisés?
Mémoire de fin d’études – UE 5.6.S6 –
« En quoi le rôle éducatif de l’infirmière libérale
améliore la prise en charge
des patients colostomisés? »
Etudiant :
Directeur de mémoire :
« Il s’agit d’un travail personnel et il ne peut faire l’objet d’une publication en tout ou partie sans l’accord de son auteur »
MOTS DE REMERCIEMENTS
TABLE DES MATIERES
I – ANALYSE CONCEPTUELLE
I – La costolomie et le patient costolomisé
I.I.1 – Brève description de la costolomie
I.I.1.a. Généralités sur la chirurgie de stomie
I.I.1.b. Les principaux types de colostomie
I.I.1.c. Etude de cas spécifique : la colostomie définitive gauche suite à un cancer de rectum
Le cancer du rectum
La colostomie définitive gauche
I.I.2 – Le patient costolomisé
Le deuil avec la santé et l’image corporelle
Les spécificités du patient costolomisé
– La dépression
– Le déni
– La révolte
– La nécessité d’acceptation de la maladie
– Les conséquences financières d’une colostomie définitive
I.I.3 – Les attentes d’un patient costolomisé dans leur prise en charge
Le soulagement de la douleur et des facteurs gênants :
– L’accompagnement du patient et de sa famille : Soutien moral, psychologique et spirituel
– L’éducation
II – L’infirmier et la prise en charge de patients costolomisés
II.I.1 –L’infirmier à domicile dans la prise en charge de patients costolomisés
II.I.2 – Aspect psychologique du rôle éducatif de l’infirmier à domicile
Le concept d’éducation
Les différents aspects de l’éducation
-L’aspect physique
-L’aspect psychologique
Finalités de l’éducation en général
II – DEVELOPPEMENT DU ROLE PSYCHOLOGIQUE DE L’EDUCATION DANS LA PRISE EN CHARGE DE PATIENTS COLOSTOMISES, UNE PRISE EN CHARGE PARTICULIERE
II.I.- La nécessité d’adaptation de l’éducation psychologique par l’infirmier libéral en fonction du patient
II.I.1 – Une éducation conforme aux caractéristiques et effets de la costolomie sur le patient
II.I.2 – Une attention particulière aux demandes du patient
II.I.2.a. De l’alliance thérapeutique
II.I.2.b. La nécessité d’une alliance thérapeutique
II.I.3 – Une éducation ralliant apprentissage et soutien
II.I.3.a. Les divers aspects de l’éducation
L’aspect « apprentissage » de l’éducation
L’aspect « soutien » de l’éducation : la prise en charge psychologique et la relation d’aide
II.I.3.b. Les étapes de l’éducation du patient
L’élaboration d’un diagnostic éducatif
Définition du programme d’éducation
La définition des compétences d’auto soins et de sécurité du patient
II.II – Caractéristiques principales de l’éducation psychologique des patients costolomisés
II.II.1 – Les effets psychologiques et sociaux de la colostomie
Les conséquences psychologiques
Les conséquences sociales
II.II.2. L’éducation psychologie adaptée aux conséquences réelles de la colostomie
II.II.2 a. Une éducation psychologique pour la santé
II.II.2.b – Une éducation psychologique du patient à la prise en charge de sa maladie
II.III – L’éducation des patients costolomisés, une éducation psychologique particulière : Prise en charge technique et relationnelle
II.III.1 – L’exigence d’un professionnalisme absolu : les soins techniques
II.III.2 – Un professionnalisme marié à des compétences personnelles dans le domaine de la prise en charge
La capacité d’écoute
L’empathie
La disponibilité
II.III.3 – Les difficultés à surmonter dans l’éducation psychologique des patients costolomisés
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
INTRODUCTION
Les formules habituelles de politesse, de salutations et de remerciements sont actuellement à la portée de tous et pratiquées dans le cadre des relations humaines. Signes de savoir vivre, elles se manifestent automatiquement et même sans besoin de rappel particulier. Mais dans un cadre plus précis qu’est la médecine et la relation avec les patients, les attentes des patients dépassent largement ces formules pratiques et habituelles, depuis l’accueil, jusqu’à la prise en charge des patients, les personnels médicaux, et en particulier l’infirmier, a un rôle important à jouer vis-à-vis des patients.
De la bonne prise en charge des patients dépendra l’efficacité réelle du traitement, ladite prise en charge a le pouvoir de faciliter ou de compliquer la relation entre le patient et le collaborateur de l’établissement qui le reçoit.
La santé est une richesse que l’Etat lui-même qualifie de service public. La recherche de rétablissement de sa santé est primordiale chez une personne souffrante, et constitue une obligation de service public pour tout le personnel médical (et cela même si ce personnel exerce au sein d’une clinique privée, la question de la santé étant elle-même un service public).
Et dans le cadre de cette recherche de la santé, de cette prise en charge des patients, force est de constater que les infirmiers jouent un rôle important. Les infirmiers tiennent plusieurs rôles dans ladite prise en charge, si on ne cite que le rôle éducatif, le rôle psychologique. Mais de toutes ces fonctions, il a été constaté que c’est le rôle éducatif qui tient la place la plus importante dans l’amélioration de la prise en charge des patients colostomisés, du fait de la particularité de la maladie et de ses effets sur le patient.
L’infirmier qui sera considéré dans le cadre de ce travail sera essentiellement l’infirmier libéral. L’infirmier libéral exerce les mêmes fonctions qui sont reconnus à tous les infirmiers, mais sauf que, travailler dans un établissement de soins de répond pas toujours à l’attente de tous les infirmiers, certains d’entre eux décident de quitter l’hôpital et exercer d’une façon libérale, d’où l’appellation : infirmier libéral. Et, à la grande différence de ses collègues hospitaliers, l’infirmier libéral exerce dans un cabinet (constitué de plusieurs consœurs et confrères ou d’autres professionnels de santé) et il se déplace au domicile des patients pour prodiguer ses soins.
A côté de ces spécificités des conditions d’exercice de l’infirmier libéral, (la spécificité réside essentiellement dans le fait que l’infirmier peut se déplacer chez son patient quand cela est nécessaire, ce qui implique une relation plus rapprochée que dans le cadre des prises en charge dans un établissement de soins), la colostomie est aussi une maladie particulière emportant des effets particuliers sur les patients, surtout du fait que c’est une maladie chronique.
L’infirmier doit travailler non seulement l’état psychologique de son patient et de ses proches pour qu’ils admettent et apprenent à connaitre la maladie, mais il doit aussi identifier et apprendre à connaitre les besoins et les réactions de son patient dans le long processus « d’acceptation » de la maladie.
Et justement, la problématique à laquelle il convient de répondre dans le cadre de cette étude est celle de savoir : « en quoi le rôle éducatif de l’infirmer libéral améliore la prise en charge des patients colostomisés ? ».
Et avant de parvenir à cette question de départ ou question problématique, plusieurs questionnements ont été nés au cours de mes expériences sur la situation de départ, notamment :
-Dans quelle mesure l’éducation et la prise en charge psychologique par l’infirmier peut-elle concrètement aider le patient à accepter sa stomie ?
L’acceptation de la stomie ou de la maladie est-elle vraiment envisageable ? Quels seraient les véritables missions de l’infirmier pour que cela soit possible ?
-Dans le cadre de leur mission, l’infirmier doit-il adapter la prise en charge psychologique, la durée de prise en charge, à chaque type de patient ? Ou est-ce-que tous les patients colostomisés nécessitent-ils tous la même prise en charge ?
En effet, plusieurs motivations ont été à la source du choix de ce thème, motivations aussi bien personnelles que professionnelles :
Premièrement, le but de cette étude est de pouvoir communiquer à mes paires plus de connaissances sur les modes de prise en charge des patients colostomisés. Cela va dans l’amélioration de la profession d’infirmier en général, et une meilleure compréhension de cette maladie particulière chez les infirmiers.
En secundo, la réalisation de cette étude et de ces recherches serait bénéfique et enrichissant pour mes connaissances personnelles, et améliorerait mes comportements dans la prise en charge de patients colostomisés. En d’autres termes, cette étude me permettrait de me perfectionner tout en perfectionnant les autres.
Aussi, afin de donner réponse à la question de départ problématique, et de concrétiser mes motivations, cette étude sera axée vers deux parties principales.
La première partie sera une étude conceptuelle, présentant comme intérêt l’approfondissement de la maladie traitée et des rôles des infirmiers en général.
La deuxième partie s’intéressera à l’aspect psychologique du rôle éducatif de l’infirmier dans le cadre de la prise en charge de patients colostomisés.
I – ANALYSE CONCEPTUELLE
I – La costolomie et le patient costolomisé
I.I.1 – Brève description de la costolomie
I.I.1.a. Généralités sur la chirurgie de stomie
A la suite de la constatation d’une maladie appelée Maladie de Crohn, d’une maladie intestinale ou du cancer de l’intestin, un individu doit subir une chirurgie intestinale appelée colostomie, qui consiste principalement à amputer la dernière partie de l’intestin de la personne atteinte de la maladie. En résumé, il s’agit d’accoler l’intestin à la peau sur laquelle on pratique une stomie, une ouverture par laquelle les matières fécales peuvent être évacuées dans un appareillage constitué d’un sac et d’une collerette munie d’un adhésif très efficace afin de retenir fermement le sac à la peau. En d’autres termes, lors d’une opération de colostomie, une partie du gros intestin (côlon) est abouchée (amenée) à la surface de l’abdomen afin de former une stomie (ouverture). La colostomie est généralement réalisée sur la partie gauche de l’abdomen mais dans certains cas, elle peut se trouver à droite.
Les appareillages de stomie ont été conçus de façon à neutraliser les odeurs désagréables de l’intestin. La pose de ces appareillages nécessite un grand autosoin chez les patients car lesdits appareils doivent être remplacés hebdomadairement, si les sacs de stomie doivent être vidés plusieurs fois dans une journée.
I.I.1.b. Les principaux types de colostomie
On distingue généralement deux types de colostomies : la colostomie terminale et la colostomie latérale.
-La colostomie terminale
Ce type de colostomie consiste à enlever une partie du gros intestin ou du rectum, après cet enlèvement, la partie restante est abouchée à la surface de l’abdomen afin de former une stomie. C’est la colostomie terminale, qui peut être aussi bien temporaire que permanente, selon que la partie enlevée peut être ou non reconstituée.
-La colostomie latérale
Dans le cas d’une colostomie latérale, l’intestin est porté au niveau de la peau et y est maintenu grâce à une baguette de stomie. Ce type de stomie est généralement temporaire pendant une opération chirurgicale de l’intestin du patient.
Mais force est de constater que quel que soit le type de stomie, tous les patients colostomisés sont confrontés aux mêmes angoisses.
I.I.1.b. Etude de cas spécifique : la colostomie définitive gauche suite à un cancer de rectum
Dans le cadre de cette étude, j’ai décidé de me concentrer plus particulièrement sur le cas de la colostomie définitive gauche qui a été mise en place suite à un cancer de rectum.
En effet, c’est souvent une intervention qui répond à des programmes de chirurgie bien définis, et elle est généralement connue quelques temps avant la date effective de l’intervention, ce qui laisse l’infirmier dans la possibilité de débuter la prise en charge par une prise en charge pré opératoire.
Pour la chirurgie de pose de la stomie définitive, le patient est hospitalisé pendant 15 jours dans la plupart des cas.
- Le cancer du rectum
Le cancer du rectum est généralement défini comme un adénocarcinome au niveau du rectum[1], ce dernier est perçu comme une tumeur maligne développée aux dépens d’un épithélium cylindrique glandulaire[2]. Et le cancer, quant à lui est défini comme : une tumeur liée à la prolifération, à la fois anarchique et indéfinie, d’un clone cellulaire conduisant à la destruction du tissu originel, à l’extension locale, régionale et générale de la tumeur et à la mort de l’individu en l’absence de traitement.[3]
Les patients rencontrés dans le traitement du cancer du rectum représente toutes les âges, et les deux sexes, c’est un cas de cancer qui atteint généralement 36.000 personnes par an, et se situe au second rang des principales causes de cancer chez les femmes.
Suite à l’opération de ce cancer, la pose d’une stomie définitive est fort probable (même si le médecin essaie toujours d’éviter au maximum une stomie définitive, ce qui n’est malheureusement pas toujours possible). En effet, pendant l’opération visant à enlever les cellules cancéreuses, il est effectué une chirurgie abdomino-périnéale ou une partie du rectum sera enlevée, et c’est justement au niveau de cette partie enlevée que sera posée la stomie définitive. La stomie ne sera pas définitive mais uniquement provisoire si l’intégralité du rectum a pu être conservée par le chirurgien, ce qui est un cas rare.
- La colostomie définitive gauche
La colostomie définitive gauche est une opération qui consiste à la mise en place d’un anus artificiel en abouchant à l’extérieur le côlon descendant ou iliaque[4].
La mise en place d’une stomie modifie généralement la fréquence et l’état et la qualité des selles du patient, mais dans le cas d’une colostomie définitive gauche, le patient aura des selles comme des personnes non stomisées (plus dures), et la fréquence reste aussi normale (une fois par jour sauf en dehors des cas particuliers).
La colostomie peut être en effet provisoire ou définitive, mais dans notre cas de colostomie définitive, le patient aura plus de difficultés à accepter sa stomie, vu qu’elle sera obligée de la porter à vie. C’est ainsi que les rôles et les interventions des infirmiers, libéraux en particulier, revêtent toutes leurs importances.
Aussi, il est constaté que la colostomie définitive gauche est doublement spécifique, du fait de sa pérennité, et du fait du cancer qui y est lié. C’est la principale raison pour laquelle, pour ce cas de stomie si particulier, le patient a le plus besoin d’accompagnement, d’une relation d’aide harmonieuse, afin qu’il puisse parvenir à l’acceptation de sa stomie et acquérir une certaine indépendance dans l’administration personnelle des soins.
I.I.2 – Le patient costolomisé
- Le deuil avec la santé et l’image corporelle
La pratique de la chirurgie de stomie est généralement motivée par l’annonce d’un cancer du rectum, généralement défini comme un adénocarcinome au niveau du rectum qui est une tumeur maligne développée aux dépens d’un épithélium cylindrique glandulaire. Le cancer du rectum se situe au 3ème rang des cancers chez l’homme et au 2ème rang chez la femme, ce qui fait que la colostomie est une maladie fréquente. Il touche aussi bien les hommes que les femmes et survient à tout âge, malgré une forte augmentation de l’incidence après 50 ans.
C’est un cancer dans le sens ou le cancer est défini comme étant une « tumeur liée à la prolifération, à la fois anarchique et indéfinie, d’un clone cellulaire emportant destruction du tissu originel, à l’extension locale, régionale et générale de la tumeur et à la mort de l’individu en l’absence de traitement. »
Aussi, la colostomie est assimilée à cette maladie grave qu’est le cancer. C’est la raison pour laquelle la personne qui la subit doit nécessairement faire le deuil avec sa santé, les traitements sont souvent longs, et parfois même à vie. Le patient doit savoir s’y adapter.
La réalisation d’une opération de colostomie entraine aussi des répercussions qui sont extérieurement visibles, c’est ainsi que le patient ayant subi telle opération doit savoir faire un deuil de son image corporelle, l’apposition d’appareillages rendent des signes visibles de la maladie, et la nécessité d’entretien périodique des appareillages rappelle à chaque instant la maladie. L’apposition même d’appareillages, éléments d’extranéité au corps humain, porte atteinte à l’image corporelle. C’est ainsi que le patient ayant subi une opération de stomie et qui en porte les marques extérieures doivent savoir s’adapter à cette nouvelle présentation de son corps.
- Les spécificités du patient costolomisé
La colostomie est une maladie particulière, du fait même de son assimilation au cancer, et du fait des signes extérieurs qu’elle engendre.
Le rapport de l’OMS ou Organisation Mondiale de la Santé au cours de l’année 2005 a recensé plus de 10 millions de cas de cancer dans le monde. Mais force est de constater que peu importe la forme dans laquelle il se présente, le cancer est une des maladies les plus dévastatrices dans le monde, aussi bien le malade que sa famille ne sont épargnés de ses conséquences graves. Dans les pays pauvres comme dans les pays riches, le combat contre le cancer est encore un grand défi pour le malade et sa famille. Selon toujours le rapport de l’OMS au cours de l’année 2005, cette maladie incurable (arrivé à un certain stade) est une première raison de la hausse du taux de mortalité dans le monde. Sur un total de 58 millions de décès recensés au niveau mondial, 7,6 millions (soit 13%) seraient dus à cette pathologie. Le cancer du côlon est au 3ème rang avec une fréquence de 945 000 nouveaux cas par an dont 50% des patients diagnostiqués décèdent.
Aussi, le cancer, et donc la colostomie, est une maladie particulièrement grave, et la connaissance de cette gravité est généralisée auprès de tous les patients.
Cette particularité de la maladie fait que les patients qui les supportent présentent des signes aussi particuliers, tels que la dépression, le déni, le révolte devant la reconnaissance de la nécessité d’acceptation de la maladie.
- La dépression
Certes, les douleurs engendrées par la maladie sont principalement physiques, mais force est de constater que la colostomie est une maladie particulière, et qui présentent des signes particuliers, et qui a de ce fait d’importantes répercussions au niveau psychologique. L’annonce du diagnostic, la pose d’appareillages, les entretiens journaliers des appareillages, ont des effets considérables sur la force psychologique du patient, et peut même mener jusqu’à la dépression.
Cette dépression peut être engendrée dès la fin de l’intervention chirurgicale, grand nombre de personnes portant une stomie, avant d’avoir été formé à l’auto soin, ressentent un sentiment de peur, peur de faire des fuites, peur de se salir, de se sentir mauvais. Et surtout que l’excrétion est une fonction hautement intime à l’espèce humaine, cette nouvelle forme d’excrétion nécessite une grande capacité d’adaptation, et devant ces peurs et chocs émotionnels, la dépression s’instaure facilement.
- Le déni
Le déni est le silence, l’absence de réactivité à tous les besoins engendrés par la maladie. C’est ainsi qu’il est fréquent que le patient, pris par une crise d’angoisse, refuse d’apprendre les soins quotidiens à sa stomie, refuse de procéder à un diagnostic qui s’avère nécessaire. C’est ainsi que l’infirmier a un rôle important à jouer, car telle réaction est parfois normale et souvent rencontrée chez plusieurs patients.
- La révolte
La révolte est ce refus d’accepter que l’on puisse porter de la stomie. En effet, il y a généralement deux types de réactions des patients suite à une opération de colostomie : ceux qui acceptent facilement de s’adapter à leur nouvelle vie et qui ont la volonté d’apprendre les soins nécessaires à leur stomie pour faire évoluer leur auto prise en charge, et il y a d’un autre côté ceux qui refusent d’accepter leur stomie et qui ont de ce fait de grandes difficultés d’adaptation à la maladie, nombreux cas de patients présentant ce déni peuvent être recensés.
Aussi, la révolte est une réaction presque pratique dans tous les cas vu que la pose de stomie engendre obligatoirement une modification des habitudes de vie quotidiennes, exposant le patient à des obligations permanentes d’auto prise en charge., ce grand nombre de charges qui lui incombent, en plus de la douleur, le fait réfléchir sur la révolte : c’est injuste, pourquoi cela ne tombe que sur moi … C’est justement dans ce cadre que la prise en charge dispensée par l’infirmier retrouve toute sa nécessité.
- La nécessité d’acceptation de la maladie
L’acceptation est une première étape de l’aboutissement du processus de soins chez les patients colostomisés. L’acceptation est le fait de prendre la maladie comme faisant désormais partie de son quotidien, le fait de savoir s’adapter à la nouvelle vie avec la maladie, le fait d’accepter de changer ses habitudes, de prendre en charge la maladie.
L’acceptation est une étape particulièrement importante pour les patients colostomisés car elle signifie ouverture d’esprit, et volonté d’être prise en charge et de se dispenser des auto soins.
Du fait de ces particularités des réactions que peuvent avoir les patients, le rôle de l’infirmier qui les prend en charge doivent aussi répondre à ces attentes particulières, la vision commune étant l’aboutissement du processus de soins, et dispenser la meilleure prise en charge au patient.
En effet, dans le domaine de la médecine, il ne doit pas y avoir de principes de prise en charge standards, la prise en charge doit être « adaptée » au cas spécifique de chaque maladie, de chaque patient.
- Les conséquences financières d’une colostomie définitive
Il est certain que toute maladie engendre de conséquences financières toujours non négligeables au niveau du patient et de sa famille. Dans le cas d’une colostomie définitive, le patient (du moins pendant la période d’opération) a dû arrêter ses activités professionnelles, ce qui fait que les ressources d’argent vont diminuer, alors que les dépenses liées à l’opération et surtout post opératoires seront inévitables. Et le montant de ces dépenses seront d’autant plus accentuées si la stomie est à vie, car la présence d’une personne qui prend en charge, l’invalidité professionnel du patient, ont des répercussions assez graves sur sa vie en général et celle de sa famille.
Pour pallier à cela, le gouvernement a mis en place un système d’allocation pour personnes handicapées. En effet, l’allocation pour adulte handicapé (AAH) est une somme qui est versée régulièrement par l’Etat à un individu incapable, dans le but de lui garantir un revenu minimum, et sous réserve de certaines conditions, souvent liées à l’âge, au degré d’invalidité …[5]
I.I.3 – Les attentes d’un patient costolomisé dans leur prise en charge
Le patient colostomisé, au lendemain de son opération chirurgicale, est confronté à un mélange de sentiments et de réactions (dans la plupart du temps tous négatifs). La présence d’un infirmier retrouve ainsi toute son utilité, afin que ces visions négatives soient toutes positivées.
En effet, l’infirmier est responsable de l’accueil du patient, et est tenu de bien accomplir ce rôle pour le bon déroulement du processus de soins. Cet accueil peut être défini comme étant le premier contact qu’a une personne désirant être soignée avec le personnel de l’établissement de soin. Aussi, pour que l’accueil puisse commencer, il faut d’abord que la personne qui sera accueillie « accepte » d’être en contact avec l’infirmier. Mais face aux diverses réactions citées ci-dessus(le déni, la révolte, le non acceptation de la maladie), il incombe généralement à l’infirmier le rôle de favoriser ce premier contact. Mais l’accueil du patient ne se limite point à ce premier contact, il s’ensuit durant le déroulement du soin pendant le séjour du patient au sein de l’établissement.
Dans le cadre de cet accueil et de cet accompagnement, les attentes des patients colostomisés sont essentiellement :
- – Le soulagement de la douleur et des facteurs gênants :
La prise en charge de la douleur est une obligation essentielle à laquelle est assujetti l’ensemble du personnel médical. Cette prise en charge de la douleur peut être faite via des actions médicales ou non médicales, compte tenu de l’état de santé et du niveau d’acceptation de la maladie par le patient. L’infirmier juge l’opportunité de ses interventions, mais son obligation essentielle est celle de faire accepter la maladie au patient, et de faire aboutir les traitements adaptés à sa colostomie. Par exemple, la pose d’appareillages, éléments nouveaux qui seront intégrés au corps du patient, peut dans la plupart des cas, engendrer des gênes particulières, l’infirmier doit ainsi faire en sorte que ces appareillages soient « acceptés » par le patient, qu’il apprenne à vivre avec, afin qu’ils ne constituent pas de gênes au bon déroulement de sa vie quotidienne.
- L’accompagnement du patient et de sa famille : Soutien moral, psychologique et spirituel
Force est de constater que les actions entreprises par l’infirmier ne doivent pas être adressées uniquement au patient, mais aussi à sa famille, qui a aussi besoin de cette prise en charge.
C’est ainsi que les différents types de soutien doivent être apportés non seulement au patient, mais aussi et surtout à sa famille, et cela entre dans le cadre de l’accompagnement. L’infirmier doit épauler le patient et sa famille pour traverser les moments difficiles, en apportant un soutien individuel pour les plus fragiles et un soutien collectif qui accentuera la cohésion familiale.
- L’éducation
L’éducation est un élément nécessaire à l’auto soin et à l’auto prise en charge. En effet, la colostomie engendre des entretiens permanents (si on ne cite par exemple que le rechange de la poche), alors que l’infirmier ne sera pas toujours présent, c’est ainsi que le patient (avec l’aide d’un de ses proches par exemple) devra être initié à l’auto soin, pour acquérir un certain niveau de dépendance, et cela aide beaucoup à l’acceptation même de la maladie.
II – L’infirmier et la prise en charge de patients costolomisés
L’infirmier a un rôle important à jouer dans le cadre de la prise en charge des patients, il doit être celui qui dispense les soins, qui explique les diagnostics médicaux, qui apporte soutien et réconfort, et qui est toujours présent dans l’accompagnement du patient. Et justement, devant la nécessité de cette présence, force est de constater que le rôle de l’infirmier à domicile sera pris en considération dans le cadre de cette étude de la prise en charge par les infirmiers.
II.I.1 –L’infirmier à domicile dans la prise en charge de patients costolomisés
L’infirmier libéral est en effet un infirmier comme tous les autres, qui dispense des soins, qui prend en charge les patients, mais la seule différence avec ces autres infirmiers est qu’il travaille de façon libérale. Ce qui signifie qu’il ne travaille pas dans un centre hospitalier ni un établissement de soins, mais exerce sa profession de façon privée, dans un cabinet habituellement, et se déplace au domicile de ses patients en cas de nécessité.
C’est ainsi que l’infirmier libéral peut être sollicité à tout moment par le patient colostomisé, il est plus disponible, plus réactif à ses attentes, vu qu’il a cette possibilité de se déplacer à domicile pour prodiguer des soins.
II.I.2 – Aspect psychologique du rôle éducatif de l’infirmier à domicile
- Le concept d’éducation
L’éducation est une mission qui incombe à tout infirmier, vis-à-vis de tous les patients, conformément au décret infirmier du 29 Juillet 2004[6]. Elle peut être définie comme « l’action de développer les facultés morales, physiques et intellectuelles d’un être humain[7] ».
Le Professeur Deccache de 1989 a avancé une définition plus précise de l’éducation dans le domaine de la santé, en précisant que: « L’éducation du patient est un processus par étapes, intégré dans la démarche de soins, comprenant un ensemble d’activités organisées de sensibilisation, d’information, d’apprentissage et d’aide psychologique et sociale, concernant la maladie, les traitements, les soins, l’organisation et procédures hospitalières, les comportements de santé et ceux liés à la maladie et destinées à aider le patient (et sa famille) à comprendre la maladie et les traitements, collaborer aux soins, prendre en charge son état de santé et favoriser un retour aux activités normales »[8]
Face à cette mission d’éducation qui lui incombe, l’infirmier peut être confronté à différents types d’éducation.
- Les différents aspects de l’éducation
-L’aspect physique
L’aspect physique de l’éducation consiste à la mise en œuvre de tous les moyens afin que le patient accepte le deuil avec son ancien corps, et accepte de vivre avec sa stomie. Mais cette acceptation physique de la maladie commence d’abord par une acceptation psychologique.
-L’aspect psychologique
Les résultats d’un diagnostic annonçant la nécessité d’une intervention chirurgicale peut mettre le patient dans un état de choc, accompagné d’une anxiété, d’une peur de ce que va être sa nouvelle vie après l’intervention. C’est à partir de cette intervention chirurgicale que le patient doit faire le deuil de sa santé, et en général, de son ancienne vie. Il sera désormais affecté à une nouvelle carrure, une nouvelle vie, avec sa stomie.
C’est à ce stade du traitement que l’aspect psychologique de l’éducation dispensé par l’infirmier trouve toute son importance. Pour cela, il doit faire preuve d’écoute, d’empathie et entretenir un dialogue permanent avec le patient, afin de recueillir son état d’âme, et de l’éduquer psychologiquement à l’acceptation de sa maladie. En effet, le patient peut avoir diverses réactions, mais ce sont autant de réactions normales suite à l’opération chirurgicale, tout le personnel de soins, et en particulier l’infirmier, doit aider le patient à retrouver son ancienne personnalité, grâce à une relation d’aide, d’accompagnement.
Dans le cadre de ce changement de comportements du patient à la suite d’une opération de colostomie, Fabregas a affirmé que : « Le patient colostomisé ne change pas de personnalité après son intervention. Comme tout être humain, il éprouve la nécessité d’être aidé, accompagné, pour faire face à sa nouvelle situation et retrouver son autonomie et sa dignité »[9]. Et afin de mener à bien cette éducation psychologique, l’infirmier doit mettre en œuvre plusieurs techniques, à savoir :
- Le soutien
- L’acceptation
- L’écoute
- La relation d’aide
- Finalités de l’éducation en général
Dans le cas des patients colostomisés, les deux finalités principales de l’éducation sont l’acceptation de la prise en charge de la maladie par le patient, et l’acquisition d’une certaine autonomie dans le cadre de l’auto soin.
II – DEVELOPPEMENT DU ROLE PSYCHOLOGIQUE DE L’EDUCATION DANS LA PRISE EN CHARGE DE PATIENTS COLOSTOMISES, UNE PRISE EN CHARGE PARTICULIERE
La mise en œuvre de la prise en charge éducative du patient répond généralement à trois objectifs bien déterminés. Dans un premier temps, les infirmiers doivent effectuer les soins techniques après une chirurgie post opératoires, et transmettre les bases de la réalisation de ces soins techniques au patient, le second objectif est l’éducation du patient proprement dite afin qu’il puisse ultérieurement se prendre en charge, et le dernier objectif est de permettre la reprise de la vie sociale du patient.
Et force est de constater que dans le cadre de la mise en œuvre de cette prise en charge psychologique et éducative, l’infirmier ne choisit pas uniquement le patient comme cible, mais doit aussi prendre en compte la famille et les proches du patient.
II.I.- La nécessité d’adaptation de l’éducation psychologique par l’infirmier libéral en fonction du patient
II.I.1 – Une éducation conforme aux caractéristiques et effets de la costolomie sur le patient
Les différentes enquêtes qui ont été réalisées ont montré que, dans l’unanimité des cas, l’acceptation de la colostomie est une étape difficile pour le patient, ceci est un avis partagé par tous les infirmiers, quelle que soit leur niveau d’expérience et de familiarisation avec la maladie. Et pour y parvenir, l’intervention de l’infirmier trouve toute son importance.
Les infirmiers libéraux qui ont été interviewés ont essayé de démontrer que, quel que soit le type de soins administré, chaque patient est unique. Aussi, pour plusieurs patients tous atteints de colostomie, les réactions, le niveau d’acceptation, et le ressentiment sont tous différents d’un patient à un autre, et force est de constater que l’infirmier ne saura se détacher de ces éléments variables pour guider son intervention. L’efficacité des interventions de l’infirmier réside essentiellement dans la prise en compte de chacune de ces spécificités du patient.
Ce qui signifie qu’il n’existe pas de modèle de prise en charge standard qui puisse être applicable à tous les patients colostomisés, l’infirmier libéral est tenu d’adapter sa prise en charge en fonction des besoins et des difficultés de chaque patient.
Il est toutefois important de souligner qu’il est plus facile de dispenser des soins à domicile que dans un centre hospitalier, d’où l’importance de l’intervention des infirmiers libéraux dans le traitement de la stomie. En effet, les soins à domicile sont plus avantageux sous plusieurs angles :
- A domicile, il existe une plus large choix de matériels que dans des hôpitaux, et les conditions de rechange des poches sont beaucoup plus confortables
- Aller vers le domicile du patient est déjà un premier signe de rapprochement, ce qui facilitera d’autant plus la relation d’aide et le processus de soins.
Autant de bonnes raisons qui font que la prise en charge à domicile aide beaucoup plus à l’acceptation de la colostomie par le patient, par rapport à une prise en charge dans un centre hospitalier.
II.I.2 – Une attention particulière aux demandes du patient
Dans le cadre de l’accomplissement de sa prise en charge, comme précisé ci-dessus, l’infirmier ne doit pas appliquer « à l’aveuglette » les principes généraux de prise en charge, certes, il doit se référer à ces principes de base dans ses actions, mais doit essentiellement prendre en compte les cas spécifiques de chaque patient.
La prise en charge est principalement technique, dans le cas où elle vise l’aboutissement du processus de soins, mais force est de constater que la prise en charge n’est pas que technique, elle est surtout relationnelle. Une prise en charge technique et éducative ne saura avoir ses pleins effets que par une considération relationnelle entre le patient et l’infirmier.
Aussi, force est de constater que l’harmonisation de la relation d’aide entre le patient et l’infirmier ne saurait être mise en place que par la voie d’une alliance thérapeutique.
II.I.2.a. De l’alliance thérapeutique
L’alliance thérapeutique est un processus interactionnel initié par un soignant pour un besoin identifié du patient. Les deux parties travaillent ensemble à l’atteinte d’un objectif commun en tenant compte de l’état de santé actuel du patient, le stade de développement de sa pathologie.
Une définition du dictionnaire du mot « thérapeutique » se réfère à la notion de guérison, et le mot« alliance » implique un accord, l’union ou la fusion des efforts. Aussi, l’alliance thérapeutique signifie union des efforts de la famille et du thérapeute dans la guérison du patient. Dans la détermination de l’essence de l’alliance thérapeutique, Sigmund Freud affirme que : « avant qu’un transfert sûr, un rapport favorable, aient été établis chez le patient. Le premier but de l’analyse est d’attacher l’analysé à son traitement et à la personne du praticien»[10].
Aussi, le but de l’alliance thérapeutique est d’instaurer une relation d’aide harmonieuse entre la famille du patient, le patient lui même et l’infirmier qui le prend en charge afin qu’ils puissent travailler ensemble dans le processus de l’acceptation de sa maladie par le patient.
Mais la mise en œuvre de cette alliance thérapeutique doit suivre quelques phases.
-Le premier contact entre les deux protagonistes est appelée alliance initiale. De cette relation primaire peut être analysée les issues possibles du traitement. En effet, plus l’alliance thérapeutique est renforcée et harmonieuse, plus les chances d’aboutissement et d’efficacité même du traitement de soins sont grandes.
-Peut aussi être pris en compte l’alliance thérapeutique au cours du traitement, cela entre dans le cadre de la réalisation du traitement thérapeutique même.
II.I.2.b. La nécessité d’une alliance thérapeutique
En effet, l’alliance a pris une place considérable dans le processus de traitement ces dernières années, son utilité et son rôle sont de plus en plus reconnus dans le domaine du traitement des patients, et cela dans plusieurs domaines et contextes, on peut par exemple citer les domaines relatifs aux psychothérapies psychanalytiques, peu importe leur durée et leur nature.
Telle reconnaissance de l’alliance dans le traitement des patients revient à privilégier l’importance des effets de l’alliance thérapeutique dans le processus de soin :
-Effets vis-à-vis du processus de soin :
L’alliance est un facteur commun à de nombreuses formes de traitement, ce qui signifie qu’elle contribue à l’efficacité, et même à l’efficience de la prise en charge indiquée, notamment via l’amélioration de la relation d’aide entre le patient et l’infirmier libéral.
-Effets sur le patient :
A la suite d’une alliance thérapeutique avec le thérapeute, le patient aura une idée plus claire de sa maladie, et du fait qu’il a succombé à la mort par cette stomie, et sera plus motivé dans la collaboration avec l’infirmier dans l’éducation, la prise en charge de la maladie, et surtout l’acceptation de la maladie. Aussi, l’alliance thérapeutique a un effet important sur le patient colostomisé ayant été le sujet principal de cette alliance thérapeutique.
-Effets sur l’infirmier libéral qui prend en charge le patient colostomisé
La personne qui prend en charge le patient dépressif, comme indiqué ci-dessus, tire profit de cette collaboration par alliance thérapeutique, les efforts sont doublés et convergés, ce qui allège davantage les missions de l’infirmier dans son accompagnement.
II.I.3 – Une éducation ralliant apprentissage et soutien
le Professeur Deccache en 1989 a avancé une définition de l’éducation en affirmant que : « L’éducation du patient est un processus par étapes, intégré dans la démarche de soins, comprenant un ensemble d’activités organisées de sensibilisation, d’information, d’apprentissage et d‘aide psychologique et sociale, concernant la maladie, les traitements, les soins, l’organisation et procédures hospitalières, les comportements de santé et ceux liés à la maladie et destinées à aider le patient (et sa famille) à comprendre la maladie et les traitements, collaborer aux soins, prendre en charge son état de santé et favoriser un retour aux activités normales »[11]
Aussi, de par cette définition, l’éducation comprend deux aspects principaux, l’aspect apprentissage et l’aspect soutien du patient.
II.I.3.a. Les divers aspects de l’éducation
- L’aspect « apprentissage » de l’éducation
L’éducation, comme son nom l’indique, consiste principalement à éduquer le patient. Eduquer, c’est transmettre des savoirs, et dans notre cas spécifique, les savoirs à transmettre ne sont autres que les méthodologies et les techniques de prise en charge de la colostomie. Les personnes à éduquer ne sont pas uniquement les patients, mais également sa famille et ses proches, ce sont en effet les personnes qui leur sont les plus proches et qui puissent les guider dans la dispense des soins.
L’objectif de telle éducation est de permettre au patient d’acquérir un certain niveau d’autonomie, et afin qu’il ne dépend plus à son infirmier pour accomplir les soins essentiels.
- L’aspect « soutien » de l’éducation : la prise en charge psychologique et la relation d’aide
L’aspect relationnel de l’éducation, qui signifie soutien du patient, réside essentiellement en l’aide psychologique du patient, et en l’établissement d’une relation d’aide avec le patient. En effet, la relation d’aide est une relation de soins qui s’établit entre l’infirmier, le patient colostomisé, et la famille du patient, dont l’objectif est de permettre au patient de revivre une situation normale, en acceptant la maladie et la prendre en charge.
Dans la mise en œuvre de cette relation d’aide, l’infirmier dispose de plusieurs instruments, comme les techniques non verbales (toucher, signes de tête, sourire, écoute) et verbales (on peut citer par exemple la reformulation des attentes du patient, afin de lui faire comprendre que ses attentes ont été comprises et seront prises en compte).
II.I.3.b. Les étapes de l’éducation du patient
La mise en œuvre effective de l’éducation nécessite le respect de certaines étapes essentielles qui doivent être respectées par l’infirmier, afin que l’éducation atteigne son objectif qui n’est autre que l’acceptation de sa stomie par le patient, et ensuite la maitrise des gestes techniques de soins pour qu’il soit dépendant.
- L’élaboration d’un diagnostic éducatif
Selon l’H.A.S. (Haute Autorité de la Santé), « …Le diagnostic va permettre de connaître le patient, d’identifier ses besoins et ses attentes, de formuler avec lui les compétences à acquérir et à mobiliser… ». Aussi, ce diagnostic servira de point de repères dans l’état d’avancement de l’acquisition de compétences dans sa propre prise en charge par le patient. Elle détermine également la vision du patient et de l’infirmier dans le déroulement de l’éducation.
- Définition du programme d’éducation
La mise en place de tel programme d’éducation réside dans la prise en compte du cas individuel du patient, essentiellement de son niveau d’acceptation de sa maladie et de sa capacité à s’auto prendre en charge.
- La définition des compétences d’auto soins et de sécurité du patient
L’H.A.S définit les autosoins comme « des décisions que le patient prend avec l’intention de modifier l’effet de sa maladie sur sa santé ».
Aussi, cela signifie que par la mise en œuvre du programme éducatif, l’infirmier doit avoir su sensibiliser son patient à prendre une résolution de s’auto prendre en charge, d’accepter sa maladie, et d’effectuer des actions qui puissent le conduire dans l’amélioration de sa situation de santé.
Aussi, à la fin de l’éducation dispensée par l’infirmier, voici quelques gestes techniques qui doivent être maitrisées par le patient :
-Accomplissement quotidien de ses soins d’hygiène
-Réactions lors d’irritations cutanées
-Capacité à adopter un régime alimentaire adapté à son stomie
-Etre capable de déceler des situations inquiétantes …
Au cours de ces différentes étapes, l’infirmier doit toujours se souvenir que l’éducation ne se limite point au niveau de l’aspect technique, mais l’instauration d’un cadre relationnel harmonieux est aussi une condition importante dans la réalisation du processus de soins.
Force est de constater que la première étape à franchir dans le cadre de la mise en ouvre de cette éducation doit résider essentiellement dans l’acceptation de la maladie par le patient. C’est en effet l’étape la plus importante, et souvent la plus problématique. Et les expériences des infirmiers interviewés ont montré que la fonction libérale de l’infirmier a été un facteur déterminant dans ce long processus d’acceptation de la stomie par les patients, du fait que cette fonction libérale a permis l’établissement d’un relation de soins plus solide avec le patient, et la présence de l’infirmier dans le cadre familial du patient n’a fait que faciliter cette relation d’aide.
II.II – Caractéristiques principales de l’éducation psychologique des patients costolomisés
L’état psychologique d’un patient peut être fragilisé du fait de l’annonce de sa colostomie. En effet, à partir de l’annonce de la nécessité de procéder à la pose d’une stomie, le patient est généralement en état de choc, ce qui provoquera chez lui une grande anxiété et une difficulté d’acceptation de la maladie.
C’est la raison pour laquelle la prise en charge psychologique du patient doit commencer dès cette annonce du diagnostic de stomie. Ceci car, c’est à partir de ce moment que le patient doit faire le deuil avec sa santé, sa présentation physique et son image corporelle, une période souvent difficile qui nécessite la présence et l’aide psychologique de l’entourage, et surtout de l’infirmier qui le prend en charge.
Toutefois, on ne saurait définir l’éducation psychologique adapté au cas de la colostomie sans avoir déterminé les réelles conséquences de cette maladie sur la psychologie et la vie sociale du patient. Vu que chaque patient, même atteints d’une même maladie, présente des réactions différentes, qu’il convient de les prendre en charge par rapport à ces ressentiments spécifiques.
II.II.1 – Les effets psychologiques et sociaux de la colostomie
- Les conséquences psychologiques
Les conséquences psychologiques d’une chirurgie de stomie sont nombreuses, et cela dès l’annonce même du diagnostic de la nécessité d’une chirurgie de colostomie. L’explication de la chirurgie peut engendrer chez le patient une connotation de gravité, du fait que c’est la dernière des solutions pour la maintenir en vie, ce qui créé naturellement un sentiment de stress et d’anxiété, d’incertitude par rapport à la nouvelle vie avec la colostomie. Le patient ressent aussi souvent un sentiment de honte, et se sent comme une charge pour les personnes qui l’entourent, surtout que son incapacité est liée au système d’excrétion, une fonction hautement intime, ce qui peut provoquer un sentiment de saleté. Tels sont les sentiments qui véhiculent dans l’esprit du patient avant l’opération.
Mais après l’opération, ces sentiments péjoratifs demeurent. La mise en place d’un nouvel élément qui est désormais rattaché à son corps créé un sentiment de peur chez le patient, peur de ne pas savoir manipuler les matériels, peur d’avoir des fuites, peur d’affronter sa famille vu qu’il sera en incapacité.
La majorité des personnes stomisées ont du mal à reprendre normalement leurs anciennes vies après l’opération, certains vivent avec sans accepter réellement la maladie, et d’autres, la minorité, arrivent à accepter et à vivre avec leur stomie. Autant de réactions diversifiées mais qui sont généralement négatives, l’acceptation de la stomie est l’étape la plus difficile du processus de soins du fait des conséquences psychologiques graves qui se rattache à la maladie.
- Les conséquences sociales
La modification de l’image corporelle, nécessitée par la mise en place d’une stomie, peut provoquer un sentiment d’inacceptation de sa nouvelle image par le patient, il se sentira dévalorisé, différent des autres. Le sentiment de dépendance provoqué par la colostomie est un grand facteur gênant la réinsertion sociale de la personne colostomisée.
La réinsertion sociale se fait progressivement de l’hôpital au domicile, puis du domicile au cercle élargi des relations sociales. A noter que plus la personne colostomisée a une image valorisée d’elle-même, plus cette confiance va gagner son entourage et vice versa : une famille, qui offre pleinement son soutien vers son proche, va regagner l’estime d’elle-même.
II.II.2. L’éducation psychologie adaptée aux conséquences réelles de la colostomie
II.II.2 a. Une éducation psychologique pour la santé
Le premier objectif de l’éducation psychologique du patient est la santé, en tant qu’infirmier, toutes les actions entreprises par ce personnel médical doit être principalement et en premier lieu converger vers la recherche de la santé du patient. Plus le patient regagne confiance en lui-même, plus il va vers l’acceptation puis la prise en charge de sa stomie. L’infirmier doit toutefois expliquer au patient que la stomie ne doit pas représenter un handicap, une personne portant une stomie peut être dépendant et est capable de faire des auto soins, et de vivre une vie quotidienne normale comme toutes les autres personnes non porteuses de stomie.
II.II.2.b – Une éducation psychologique du patient à la prise en charge de sa maladie
La pose de la stomie nécessite le changement des poches à une fréquence presque quotidienne, ce qui fait que si la personne stomisée n’est pas capable de se dispenser des auto soins, son degré de dépendance envers l’infirmier et ses proches vont augmenter, et sa chance d’acceptation de sa maladie reste minime. Aussi, pour que le patient parvienne à vivre convenablement avec sa stomie, l’éducation psychologique dispensée par l’infirmier est d’une grande utilité, ce dernier doit le soutenir et l’encourager dans la mise en œuvre de cet apprentissage, tel est le but du volet psychologique de l’éducation.
II.III – L’éducation des patients costolomisés, une éducation psychologique particulière : Prise en charge technique et relationnelle
Dans cette partie, il sera question de démontrer que l’éducation psychologique dispensée aux patients colostomisés est une éducation particulière, du fait du degré de professionnalisme, et donc de compétences professionnelles qu’elle appelle, en plus des compétences personnelles que doit disposer l’infirmier libéral.
II.III.1 – L’exigence d’un professionnalisme absolu : les soins techniques
La prise en charge d’un patient colostomisé nécessite une grande connaissance du domaine, et donc une formation particulière en plus de la formation générale en infirmier. Les infirmiers libéraux qui prennent en charge des patients colostomisés ont généralement subi des formations spécifiques en colostomie, qui ont été renforcées par les expériences professionnelles. Telles formations sont utiles du fait que c’est une maladie particulière, qui présente des signes extérieurement visibles, et en plus de cela, c’est une maladie qui nécessite une grande connaissance de la prise en charge, vu que ces connaissances devront être ensuite transmises au patient.
II.III.2 – Un professionnalisme marié à des compétences personnelles dans le domaine de la prise en charge
Les acquis professionnels ne sont pas suffisants pour développer une éducation psychologique réellement adaptée aux besoins des patients colostomisés. Du fait que c’est une maladie particulière, car a des effets psychologiques non négligeables ci-dessus démontrés, l’infirmier libéral doit développer ses compétences personnelles dans la cadre de la prise en charge, dont notamment :
- La capacité d’écoute
La capacité d’écoute est la faculté pour un infirmier d’être attentif aux attentes, aux sentiments particuliers de son patient. Pour le cas des infirmiers libéraux, cette capacité d’écoute est plus favorisée que chez les infirmiers exerçant dans un établissement de soins. Ceci car, les infirmiers libéraux peuvent se déplacer au domicile de leurs patients, ce qui fait que ces derniers vont se sentir plus proche de lui, du fait qu’ils intègrent leurs espaces familiaux, ce qui favorisera davantage la relation de communication entre les deux acteurs dans la relation de soins.
- L’empathie
L’empathie n’est autre que ce partage d’émotions et pensées avec autrui, d’être capable, au-delà même de la compréhension, de faire la distinction entre notre propre situation et celle d’un patient par exemple. C’est en essayant de se mettre à la place du patient, d’essayer de comprendre ses maux ainsi que ses attentes, que l’infirmier libéral peut aussi comprendre les ressentiments du patient, et ce qu’il pourra faire pour qu’il parvienne à l’acceptation de sa stomie.
- La disponibilité
La disponibilité est la possibilité pour un infirmier d’être présent quand il le faut. La disponibilité est spécialement reconnue aux infirmiers libéraux du fait que la mobilité est au centre de leurs principes.
Autant de raisons qui nous conduit vers le constat selon lequel la fonction libérale de l’infirmier est un facteur important dans le processus d’acceptation de sa stomie par le patient. C’est en étant libéral que l’infirmier peut avoir plus de disponibilité, pour favoriser une relation d’écoute et de partage avec le patient, et ressentir un sentiment d’empathie, autant d’éléments qu’il convient de combiner avec les connaissances techniques pour parvenir à l’acceptation de sa stomie par le patient.
II.III.3 – Les difficultés à surmonter dans l’éducation psychologique des patients costolomisés
Force est de constater que cette aide ou éducation psychologique est toutefois difficile à mettre en œuvre une fois arrivé sur terrain, l’infirmier peut être confronté aux humeurs du patient (dû à l’inacceptation de la maladie : stress, dépression …), l’âge du patient … Ce qui fait que l’infirmier peut faire appel à l’aide de la famille du patient pour surmonter ces difficultés.
En effet, la famille est le point de départ et l’élément essentiel de la vie sociale, c’est au sein de ce petit groupe qu’un individu apprend à entretenir des relations sociales.
Le mot « famille » peut prendre deux sens différents. Au sens restreint, elle regroupe toutes les personnes qui ont ou non des liens de sang mais qui vivent sous le même toit, mais au sens large, elle peut aussi englober toutes les personnes avec lesquelles on a des liens de parenté, comme les oncles, les tantes, les cousins etc …
La présence de la famille du patient est souvent sollicitée, et même recommandée dans de nombreux cas, pourtant il n’existe pas encore actuellement une définition exacte de cette intervention familiale dans le processus de soins. Mais cette présence familiale peut être analysée comme l’intervention d’une équipe « pluridisciplinaire » (les personnels de soins, la famille) dans le cadre de la prise en charge d’une maladie. Et dans ce cadre, les personnels de soins seront chargés de l’administration des soins techniques, et la famille servira pour un soutien moral du patient, deux conditions nécessaires à l’aboutissement de la prise en charge du patient colostomisé.
La triade patient-soignant-famille est de plus en plus requise dans toutes sortes de traitement, et va dans le sens de l’amélioration de l’état du patient, selon une affirmation de A. Deccache : «La présence de la famille concerne la vie quotidienne du patient et son environnement psychosocial, et doit impliquer autant que possible la famille et l’entourage proche.»[12].
En effet, le rôle principal de la famille est d’aider, d’accompagner son proche dans la gestion de la maladie, avec l’aide des personnels médicaux, dont l’objectif primordial est l’acceptation de sa stomie par le patient, et le développement de ses capacités d’auto soins.
CONCLUSION
En résumé, on peut affirmer que la maladie de la colostomie est une maladie particulièrement grave, du fait de ses effets psychologiques et sociaux sur le patient qui subit la stomie. La présence de l’infirmier est ainsi d’une grande utilité, non seulement pour accompagner le patient, mais également et surtout pour l’éduquer. Et cette éducation ne se limite pas au niveau de son aspect technique, mais s’élargit au niveau de ses aspects psychologiques.
Le développement de l’aspect psychologique de l’éducation est un procédé important car la maladie de la stomie est une maladie qui est difficilement acceptable pour le patient. L’exercice de ses compétences professionnelles, ralliées à ces connaissances personnelles en termes de capacité d’écoute, d’empathie et de disponibilité est au centre des principes à appliquer pour que le patient parvienne à cette fameuse acceptation de la stomie, le point de départ pour le développement de l’auto soin et la reprise de la vie normale chez le patient.
Mais dans le cadre de l’exercice de cette éducation psychologique, l’infirmier libéral peut être confronté à des difficultés particulières, dont notamment l’âge, les conditions de vie générales, l’humeur de son patient. Autant de difficultés qu’il doit arriver à surmonter en tant qu’infirmier, mais qu’il n’arrivera toutefois pas à affronter sans l’aide de la famille du patient et un effort de la part du patient lui-même.
Aussi, afin de susciter cet effort du patient, l’infirmier libéral peut engager avec lui une alliance thérapeutique, un procédé actuellement très usité pour développer la relation de communication et la relation d’aide entre l’infirmier et son patient. La mise en place de cette relation harmonieuse par l’alliance thérapeutique n’est toutefois pas possible sans une communication efficace entre le patient, le thérapeute, et la famille du patient. A première vue, communiquer pourra sembler facile du fait que l’être humain a appris à parler depuis son enfance, et donc ne nécessite pas le déploiement d’efforts extraordinaires. Pourtant, dans la relation professionnelle ou médicale dans notre cas, communiquer n’est pas facile car le climat et l’harmonie des relations ne sont pas toujours favorables, comme on le désire, même si tout un chacun est conscient de l’importance de cette communication dans l’alliance thérapeutique.
Aussi, peu importe la difficulté et la complexité de l’alliance thérapeutique, les diverses études menées par des professionnels ont démontré qu’elle est indispensable du fait qu’elle exerce une influence nettement positive sur la motivation de la famille du patient à contribuer favorablement et avec efficacité à la guérison de leur proche et celle du thérapeute à atteindre les objectifs de soins. Telle alliance thérapeutique ne saura toutefois avoir ses pleins effets que par la mise en œuvre d’une communication harmonieuse entre le thérapeute et son patient.
Et en résumé, force est aussi de préciser que la prise en charge psychologique d’un patient colostomisé ne peut être accompli par l’infirmier seul, l’implication de la famille est même recommandée, car s’avère fructueuse.
BIBLIOGRAPHIE
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- Guimbaud R. et al. Soins infirmiers aux personnes atteintes d’affections digestives n°10 : « Nouveaux cahiers de l’infirmière ».Editions Elsevier-Masson. août 2005.
- DELAMARE Jacques. Dictionnaire de l’infirmière. Paris : Maloine, 2002
- DREVET S., JOURNIAC C., et al. Soins IDE II. Démarches relationnelles et éducatives, initiation et stratégie de recherche. Paris : Masson, 2002
- ASSAL J-P., LACROIX A. L’éducation thérapeutique des patients. Nouvelles approches de la maladie chronique. Paris : Vigot, 1998
- FABREGAS B., « 20 ans de stomathérapie », 1999
[1] QUEVAUVILLIERS J./PERLEMUTER L.Dictionnaire Médical de l’Infirmière. Paris : Masson, 2004, p.188.
[2] DELAMARE Jacques. Dictionnaire de l’infirmière. Paris : Maloine, 2002, p.8.
[3] Docteur DAGADA. La cancérogenèse. Cours I.F.S.I. 3ème année, le 14/11/2006.
[4] DELAMARE Jacques. Dictionnaire de l’Infirmière. Paris : Maloine, 2002, p103.
[5] Toutes les informations concernant les allocations pour personnes handicapées disponibles sur : http://vosdroits.service-public.fr
[6] Annexe 3, p 29.
[7] FOUQUET E., NEEFS H.Dictionnaire Encyclopédique, Paris : Hachette, 1997, p601.
[8] 6 DURAND-GASSELIN, Qu’est-ce que l’éducation pour la santé du patient ?
[9] FABREGAS B., « 20 ans de stomathérapie », 1999, Soins n°632, , p20.
[10] Le début du traitement, Freud, 1913
[11] DURAND-GASSELIN, Qu’est-ce que l’éducation pour la santé du patient ? août 2003.
[12] « Quelles pratiques et compétences en éducation du patient ? Recommandations de l’OMS Europe », décembre 1998.
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