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Quelles sont les raisons pour lesquelles une grande partie de la population boude les instances de participation mises en place par la politique de la ville, et comment les conseils citoyen pourraient conduire à remobiliser les habitants dans la vie politique locale ?

Thème : Politique de la ville

 

Problématique : Quelles sont les raisons pour lesquelles une grande partie de la population boude les instances de participation mises en place par la politique de la ville, et comment les conseils citoyen pourraient conduire à remobiliser les habitants dans la vie politique locale ?

 

Plan

 

Introduction

Partie 1.       Manque de participation des habitants à la politique de la ville

1.1.      La notion de « participation habitante »

1.1.1.       La participation habitante : une nécessité ?

1.1.2.       Repère historique

1.1.3.       Analyse conceptuelle

1.1.4.       Enjeux de la participation habitante

1.2.      Les paradoxes de la participation

1.3.      Enjeux de la démocratie participative locale

Partie 2.       Les conseils citoyens comme moyens pour remobiliser la participation des habitants

2.1.      Genèse de la loi de programmation et de cohésion urbaine de 2014

2.2.      Participation des habitants à la « politique de la ville »

2.2.1.       Politique de la ville : cadre général

2.2.2.       Le programme national de renouvellement urbain

2.3.      Les conseils citoyens

2.3.1.       Principes généraux régissant l’action des conseils citoyens

2.3.2.       Mission des conseils citoyens

2.3.3.       Mise en place des conseils citoyens

2.3.4.       Cadre organisationnel et fonctionnel

2.3.5.       Accompagnement et formation des conseils citoyens

2.4.      Analyse critique

2.4.1.       Enjeux de l’information

2.4.2.       Enjeux du tirage au sort

2.4.3.       Enjeux de la co-construction

Partie 3.       Etude de cas : le quartier des Moulins

3.1.      Méthodologie

3.2.      Présentation et analyse des existants

3.2.1.       Le quartier des Moulins

3.2.2.       Les existants en matière de participation habitante

3.3.      Recommandations pour la mise en place du Conseil citoyen

3.3.1.       Proposition pour la mise en place du Conseil citoyen

3.3.2.       Le fonds de participation des habitants

Conclusion

Bibliographie

 

 

Introduction

 

« Tout le monde » reconnait l’importance de faire participer les habitants à l’action publique, surtout lorsque celle-ci les concernent directement. L’Etat construit presque systématiquement ses discours autours de cette question de participation, du moins dans le cadre de la communication politique pour rester le plus longtemps possible au pouvoir. Mais, qu’en est-il de la concrétisation de ces discours ? Les citoyens français ont maintes fois répondu à cette question à travers notamment de forts taux d’abstention lorsqu’il s’agit de mettre en place des dispositifs « représentatifs ».

 

Pourtant, depuis l’histoire de la « politique de la ville », cette notion de participation n’a cessé d’être d’actualité. Ainsi, de nombreux dispositifs devant agir dans cette participation ont été érigés, l’un après l’autre, peut-être une démonstration de la « bonne volonté » de l’Etat à trouver la voie salvatrice sur ce domaine. Mais, ce discours toujours accentué de la nécessité de cette participation ne témoigne-t-il pas déjà d’un sérieux problème dans ce domaine ? La recherche incessante du meilleur dispositif pour une réelle mobilisation des habitants autours des actions publiques ne montre-t-elle pas la faiblesse des solutions apportées jusqu’alors ? Mais, est-il vraiment légitime de parler de bonne volonté, ou bien les représentants des autorités publiques ont quelque chose à perdre dans le partage du pouvoir à différents niveaux avec les habitants à travers d’autres structures ?

 

Une situation apparait parlante, toujours dans cette question de participation des habitants à la construction de la politique de la ville : ce sont surtout les individus qui vivent dans la précarité qui sont les plus éloignés des instances de participation mises en place. La pauvreté est-elle un facteur de différenciation entre citoyens actifs et passifs ? En tout cas, il faut reconnaitre l’existence persistante d’une classe dirigeante, issue d’une catégorie sociale aisée, donc généralement éloignée de la réalité que vivent ces habitants des quartiers dits « populaires » et désormais qualifiés comme « prioritaires » dans la « politique de la ville ». Sans encore approfondir ce qui est vraiment entendu par « participation habitante », tout cela donne déjà des idées sur les problèmes d’efficacité des dispositifs participatifs « institués » par l’Etat comme étant la concrétisation de ses promesses dans ce sens.

 

Il faut aussi admettre que le défaut de participation est un phénomène auto-renforçant. La faiblesse d’un dispositif mis en place à partir d’en haut dans la mobilisation des habitants autour de la politique de la ville ne fait que les éloigner davantage de ce dispositif. Il est attendu qu’un discours promettant un énième dispositif de ce genre n’apporte concrètement rien de positif dans le rapport des pouvoirs politiques avec les gouvernés. Y-a-t-il une autre alternative, ou bien existe-t-il une possibilité de rompre avec cette culture de l’échec ? D’ailleurs, une nouvelle loi vient de mettre au point un tout nouveau dispositif nommé « Conseil citoyen ». La vraie question est la suivante : qu’est-ce que ce dispositif pourrait apporter pour créer cette rupture avec le passé malheureux ?

 

C’est dans cette multitude de questionnements qu’a été formulée la problématique de la présente étude : Quelles sont les raisons pour lesquelles une grande partie de la population boude les instances de participation mises en place par la politique de la ville, et comment les conseils citoyen pourraient conduire à remobiliser les habitants dans la vie politique locale ?

 

Pour répondre à cette question centrale, le présent mémoire est divisé en trois parties (correspondant à trois étapes de la recherche) :

 

  • Dans un premier temps, il convient d’appréhender le concept-clé de l’étude qu’est la « participation habitante » et les problèmes rencontrés avec les différents dispositifs qui se sont succédés jusqu’alors en vue de faire participer les habitants à la vie politique ;

 

  • Dans un deuxième temps, il y a lieu de se focaliser sur ce nouveau dispositif participatif avec une analyse descriptive mais aussi critique ;

 

  • Dans un troisième temps, une étude de cas, celui du quartier des Moulins de la Métropole de Nice Côte d’Azur (Saint-Laurent-du-Var) devrait synthétiser l’étude dans le cadre de la mise en place du Conseil citoyen dans ce quartier.

 

 

Partie 1.        Manque de participation des habitants à la politique de la ville

 

Cette première partie de l’étude cherche principalement à appréhender le concept-clé de « participation » des habitants à la vie politique, surtout à la politique de la ville. Pour mieux comprendre ce concept-clé, il importe de soulever certaines contradictions souvent constatés entre les discours politiques prononcés en faveurs de cette participation habitante par les autorités publiques et les manières plutôt contradictoires utilisées pour concrétiser ces discours dans la réalité. Même si elle peut présenter des points de différence avec le concept de « participation habitante », la notion de « démocratie participative » donne des idées sur les éléments de réflexion à retenir dans la recherche de la voie menant vers une participation effective des habitants aux actions publiques qui les concernent.

 

1.1. La notion de « participation habitante »

 

Sans encore réaliser une analyse conceptuelle de ce qu’il est entendu par « participation habitante » (cf. 1.1.3 Analyse conceptuelle), une notion quelque peu complexe à approfondir, il convient de se proposer dans un premier temps un premier essai de définition pour pouvoir apprécier par la suite la pertinence de cette notion. Maruszak (2015) distingue deux configurations de la participation des habitants sur la scène politique : des dispositifs de participation dits « institutionnalisés » et ceux non-institutionnalisés. Ces derniers renvoient bien entendu à des participations spontanées et généralement informelles, ou tout simplement de tout dispositif ne relevant pas de la participation institutionnalisée. L’auteur définit la participation institutionnalisée des habitants comme « la possibilité qui leur serait donnée de prendre part à la discussion et aux décisions politiques, sous d’autres formes que la seule élection de leurs représentants, afin d’orienter l’action publique dans un sens qui réponde à leurs besoins » (Maruszak, 2015, p. 25). Assez détaillée qu’elle soit cette définition, il faut toutefois reconnaitre qu’elle soulève de nombreux questionnements.

 

Parmi ces questionnements, voici quelques-uns des plus importants qui pourraient permettre de construire un fil conducteur au présent travail de recherche afin d’établir d’abord le cadre général de l’étude :

 

  • A quel point cette participation des habitants dans la vie politique, et plus particulièrement à la politique de la ville, est-elle importante ? Répondre à ce questionnement revient également à mettre un accent sur la pertinence de cette recherche qui vise essentiellement une certaine « amélioration » de cette participation au niveau locale (ville, quartier).

 

  • Quels sont les bases historiques de cette participation ? Autrement dit, où en est-on « actuellement » à ce sujet ?

 

  • Quelles sont les principales composantes devant être incluses dans cette notion complexe ? Une analyse conceptuelle devrait permettre de déterminer les conditions d’émergence d’une « participation habitante » effective.

 

  • Quels sont les enjeux de cette participation habitante ?

 

1.1.1. La participation habitante : une nécessité ?

 

A priori, le pouvoir public reconnait l’indispensabilité de la participation habitante sur le plan politique, et notamment dans le cadre de la politique de la ville. Cette participation des habitants est considérée comme une condition nécessaire (et non suffisante) de succès sur ce point : « Pour réussir, la politique de la ville doit se faire avec les habitants. Les opérations de renouvellement urbain en particulier sont des opérations lourdes qui si elles ne sont pas comprises et appropriées par les habitants peuvent être même contreproductives » (MDFVJS, 2014).

 

Quelques éléments sont avancés pour expliquer cette indispensabilité de la participation des habitants à la politique de la ville (ORIV, 2009) :

 

  • Plus les habitants participent à la politique de la ville, plus ils s’approprient de celle-ci, et ainsi des espaces concernées par cette politique. Cette participation devrait alors permettre aux habitants d’acquérir une représentation convergente et positive vis-à-vis des travaux réalisés : ceux qui participent le plus trouveront ces derniers beaucoup plus pertinents et utiles.

 

  • C’est une manière de restaurer la légitimité et la crédibilité de l’action publique (à travers la représentation positive évoquée précédemment).

 

  • C’est une occasion pour la modernisation des services publics de manière à améliorer les conditions d’accès aux droits et la réponse fournie aux demandes émanant des usagers.

 

  • Cela devrait conduire aussi à une gestion facilitée des espaces sur le long terme dans une logique de responsabilisation en vue d’une réduction des coûts d’entretien. En effet, un bien (commun) approprié par les habitants sera mieux entretenu par ces derniers.

 

  • C’est aussi une façon de reconnaitre que les habitants sont de véritables acteurs et non de simples usagers des espaces publics.

 

  • Enfin, cette participation est censée améliorer les relations entre les habitants et les professionnels car elle implique nécessairement le dialogue entre ces deux parties de la politique de la ville.

 

Blondiaux (2007) va plus loin en soulignant la nécessité d’une instance de participation qui favorise ce qu’il nomme « conflit » : à entendre par là la formation d’un esprit critique, la capacité de contestation, l’aptitude à questionner ce que les autres essaient d’imposer à soi, tout cela pour empêcher l’écueil du projet « tout ficelé » par les élus sans possibilité de négociation avec les habitants. De tel conflit devrait permettre ainsi la responsabilisation politique de l’habitant qui devient alors un « acteur actif » à travers sa participation dans l’élaboration des actions publiques, mettant ainsi fin au modèle de l’habitant passif et assisté (Dubedout, 2011). « En ce sens, la responsabilisation politique des habitants est nécessaire au renforcement de leur pouvoir d’agir » (Maruszak, 2015, p. 47).

 

Il est attendu que de cette participation active des habitants évite le fait que la majorité des habitants s’appuie sur une minorité pour décider à leur place et non eux-mêmes ensemble. Cette responsabilisation ne signifie toutefois pas à une volonté pour le désengagement de la puissance publique. Au lieu de cela, il convient de voir la participation des habitants à la politique comme un appel à une plus importante capacité de ceux-ci à s’organiser et ensuite à agir avec la puissance publique.

 

« La dépossession implique aussi celle de l’expression, des moyens d’expression et de la croyance en l’utilité de l’expression » (Delarue, 1991, p. 86) : cela concerne les habitants des quartiers populaires qui se trouvent en marge et deviennent alors les moins disposés à l’utilisation d’un pouvoir politique. Delarue (1991) rapporte ainsi que l’expression politique est en quelque sorte inversement proportionnelle au niveau de vie : plus un habitant est pauvre, moins il est entendu sur la scène politique. « C’est pourquoi la politique de la ville s’est toujours attachée à ce que la voix des habitants des quartiers populaires puisse être entendue grâce à des instances de participation. Cependant loin d’être une réussite, ces instances se sont souvent révélées peu efficaces, voire elles auraient participé au creusement du fossé entre les habitants plus en marge et le reste de la société » (Maruszak, 2015, p. 7).

 

Si le pouvoir public reconnait l’importance cruciale de la participation des habitants à la politique de la ville, il est important d’en avoir un aperçu à travers un survol historique des différents dispositifs mis en place par l’Etat notamment en ce qui concerne la politique de la ville.

 

1.1.2. Repère historique

 

Il ne s’agit pas de faire une liste chronologique exhaustive des évènements concernant la politique de la ville ; l’idée est plutôt de repérer dans l’histoire les efforts réalisés par l’Etat pour résoudre les problèmes constatés au niveau local, dans les collectivités territoriales.

 

La création de la politique de la ville est située dans les années 1980 à travers d’actions visant le développement social urbain à l’échelle du quartier. Ces actions ont été réalisées pour une requalification des quartiers en difficulté via des dispositifs spécifiques d’intervention. Mais, à cette époque, la notion de participation habitante n’a pas encore de sens car la politique de la ville relevait encore de l’Etat seul. Cette politique s’appuyait donc sur les développements social et urbain avec des objectifs d’amélioration des conditions de vie socioéconomique de ceux qui habitent les quartiers les plus en difficulté. Une géographie dite « prioritaire » a été tracée pour cibler les territoires leurs dysfonctionnements social et urbain

 

Progressivement et dans le cadre de la décentralisation instaurée depuis 1982, les collectivités territoriales ont obtenus des rôles renforcés dans la politique de la ville : l’Etat (central) est toujours présent, mais davantage appuyé par les collectivités territoriales. Parallèlement, durant les deux dernières décennies du XXème siècle, des rapports ont été établis démontrant l’importance d’inclure la question sociale (éducation, solidarité, insertion sociale et professionnelle des jeunes, prévention de la délinquance) dans la politique de la ville. Mais, peu à peu, cette question sociale est délaissée au profit de la question de rénovation urbaine. C’est ainsi que la loi Borloo (2003) place la rénovation urbaine au cœur de la politique de la ville via le Programme National de Rénovation Urbaine (PNRU) qui prévoyait de grandes opérations de réhabilitation et de démolition-construction de logements, d’espaces et d’équipements publics au niveau des « Zones urbaines sensibles ».

 

Il est important de noter que cette loi de 2003 se focalise sur la notion de « mixité sociale » (une volonté de « casser les ghettos ») avec la programmation mixte de logements, ainsi que la réduction du chômage et le décrochage scolaire. Sous-entendu dans cette loi, « les problèmes sociaux des quartiers populaires seraient issus de l’environnement dans lequel vivent leurs habitants » (Maruszak, 2015, p. 8). Il faut dire que cette notion de « mixité sociale » date déjà des années 1990 dans le contexte de rénovation urbaine dans le sens d’un rattrapage social et économique des quartiers en difficultés. Idéalement, la mixité sociale a comme ambition une égalité de tous les citoyens en ce qui concerne l’accès aux institutions, ce qui devrait constituer une source de légitimité politique ainsi que d’un fort lien social (Schnapper, 2005). L’idée était de « diffuser » des modèles sociaux relatifs aux classes moyennes, de soutenir ainsi le développement économique local, et de neutraliser la ségrégation spatiale, tout cela grâce à un mélange de catégories sociales. La concentration spatiale des familles les plus défavorisés économiquement et socialement devrait alors être réduite. La proximité spatiale entre les différentes catégories sociales a été notamment recherchée dans la diversification de l’habitat (Lelevrier, 2013).

 

Cependant, la mixité sociale recherchée ne s’est produite que très partiellement dans la pratique (Lelevrier, 2013) :

 

  • La proximité spatiale instaurée n’a pas permis d’instaurer les échanges tant espérées entre les habitants, de même qu’elle n’a pas enrayé la représentation négative attribuée à des quartiers. Les opérations de démolition-reconstruction-relogement n’ont pas vraiment dispersé les habitants les plus pauvres qui se sont relogés pour la plupart dans leur propre quartier. De plus, il a été constaté une fuite des familles plus aisées, ce qui a engendré une nouvelle concentration de la pauvreté.

 

  • « De plus, en condamnant toute forme de différences, considérée comme un repli sur soi, une inégalité, la mixité sociale concourt plutôt à renvoyer une image négative du quartier et de ses habitants »(Maruszak, 2015, p. 10). La mixité cherche l’uniformité via le modèle de la classe moyenne mais ne vise pas à utiliser les forces existantes et faisant la particularité d’un territoire : la politique de la ville qui se base sur la mixité sociale ignore l’identité de ses bénéficiaires, c’est-à-dire les habitants et leurs quartiers respectifs.

 

  • Il faut aussi citer le caractère bureaucratique et descendant de la politique de la ville, malgré le fait qu’elle a été conçue pour y intégrer la participation des habitants dans sa mise en œuvre(Dubedout, 2011). En effet, les pouvoirs publics (l’Etat et les municipalités) se réservent pratiquement toujours de la légitimité des interventions dans la vie locale malgré de nombreux mouvements qui montrent le souhait des habitants et des associations locales d’en être des acteurs principaux. A citer à titre d’exemple des ateliers populaires d’urbanisme qui interpellaient les pouvoirs publics au sujet de la réhabilitation d’habitat dégradé des années 1970 ; il y a aussi le collectif « Justice pour le Petit Bard » (un quartier de la ville de Montpelier) qui voulait se faire entendre dans les projets de rénovation urbaine pour que les habitants puissent profiter mieux des actions menées (en 2001) ; un dernier exemple concerne le collectif ACLEFEU créé à la suite des émeutes de 2005, ainsi que la Coordination nationale Pas Sans Nous à partir de 2014, qui revendiquaient une remontée de la parole des habitants des quartiers populaires vers les institutions. Ces différents mouvements « restent majoritairement ignorés » (Maruszak, 2015, p. 11).

 

Par la suite, et jusqu’au milieu de la première décennie du XXIème siècle, la politique de la ville est en quelque sorte reléguée en arrière-plan, une période très chargée de révoltes et d’émeutes urbaines qui remettaient alors au-devant de la scène politique et médiatique l’importance de l’appellation « quartiers populaires ». Emerge ainsi une « crise » de la démocratie représentative à travers de fort taux d’abstention surtout dans les quartiers les plus pauvres. C’est ensuite que les « contrats urbains de cohésion sociale » remplaçaient les « contrats de ville » en 2007, insistant sur l’éducation et l’emploi (notamment des jeunes), sur l’intégration et sur la lutte contre la discrimination. En 2011, de nouvelles orientations politiques ont été définies dans le but de pallier aux inégalités identifiées comme persistantes entre différents territoires dans le cadre de la préparation pour les contrats urbains suivants.

 

Finalement, il importe de citer le rapport « Citoyenneté et pouvoir d’agir dans les quartiers populaires » remis en 2013 par Bacqué et Mechmache (2014) qui propose une analyse critique du concept de participation habitante, entendu souvent comme le simple fait d’informer les habitants au lieu d’une véritable implication dans l’élaboration de politiques publiques. Dans un sens, c’est ce rapport qui sert en quelque sorte de base pour une nouvelle loi de référence pour la politique de la ville, la loi de programmation et de cohésion urbaine du 21 février 2014[1].

 

1.1.3. Analyse conceptuelle

 

Maruszak (2015) propose de distinguer le concept de « participation habitante » à celui de « démocratie participative » :

 

  • D’un côté, la démocratie participative est le fruit d’une série de mesures expérimentales ou législatives instaurées par la haut-hiérarchie, des mesures qui ne renouvellent la participation des habitants dans la scène politique que très partiellement. Selon Blondiaux(2007), cette démocratie participative ou « exigence participative » ne pourrait pas être assimilée suffisamment aux dynamiques locales et populaires. La démocratie participative prend la forme d’une participation institutionnalisée car celle-ci est généralement initiée par le pouvoir institutionnel de l’Etat et ne retient souvent que les propositions des instances représentatives.

 

  • D’un autre côté, la notion de « participation habitante » désigne un degré plus élevé de participation : c’est une participation dite « ascendante » car émanant des initiatives populaires parvenant à se faire entendre auprès des instances représentatives. C’est d’ailleurs le terme employé dans le rapport de Bacqué et Mechmache(2014) qui souligne la complexité dans la définition de cette notion.

 

Pour sa part, Maruszak (2015) avance une double définition complémentaire et non exclusive de « participation habitante ». D’une part, c’est « une participation qui reconnaît et entend les savoirs des habitants et les inclut dans le processus d’élaboration des politiques publiques, du début jusqu’à la phase d’évaluation » (p. 13). Cette participation fait en sorte que le projet de ville soit un projet partagé retissant le lien social. D’autre part, « c’est aussi une participation qui mêle dynamiques institutionnelles et dynamiques citoyennes, dans la mesure où institutions et habitants travaillent ensemble, mais aussi où les habitants sont force d’interpellation des pouvoirs publics » (ibid.).

 

Hannoyer et Madelin (2013) soulignent que la participation consiste d’abord en une réhabilitation de la politique en accordant la possibilité aux habitants d’avoir des influences réelles sur les actions publiques. Ces auteurs affirment que le système représentatif ne permet pas une telle participation. En effet, les représentants élus sont pour la plupart issus des classes aisées, ce qui implique un problème de représentativité de la population, surtout pour les habitants des quartiers populaires. De plus, les dispositifs de consultation relatifs au système représentatif, dont le vote, ne sont pratiquement utilisés que pour relever les opinions du public sur des programmes politiques, donc préalablement élaborés, sans laisser de place à d’autres avis.

 

Les habitants ne sont pas en mesure de participer à des projets qui les concernent pourtant, l’essentiel des décisions reviennent généralement aux représentants. En pratique, le représentant n’a pas l’obligation de tenir compte des points de vue des habitants, de même que ceux-ci n’ont pas de pouvoir formel pour faire entendre leurs revendications. Cette situation engendre alors un sentiment d’impuissance de la part des habitants, les rendant souvent sceptiques et indifférents vis-à-vis de la vie politique (locale ou nationale). C’est donc un des facteurs majeurs de l’abstention et de la crise politique. « L’enjeu de la participation serait alors de créer un lien entre les instances de consultation et les instances de décision en donnant à l’habitant un pouvoir d’agir sur les décisions, et ainsi de réhabiliter la politique aux yeux des habitants » (Maruszak, 2015, p. 26).

 

Monbeig (2007) veut définir la participation habitante en citant quatre composantes essentielles devant être réunies afin de pouvoir parler d’une réelle prise en compte de la parole habitante :

 

  • L’information des habitants car ils devrait d’abord prendre connaissance de toute action publique afin de pouvoir prendre part au débat à ce propos.

 

  • La consultation des habitants afin de considérer leurs opinions et d’intégrer celles-ci dans la décision à prendre par la suite.

 

  • L’implication des habitants, c’est-à-dire leur participation à la réalisation des actions en question.

 

  • L’évaluation à laquelle les habitants devraient être des acteurs actifs : ils devraient pouvoir mesurer ce qui a été réalisé par rapport à ce qui a été annoncé de manière à juger de l’effectivité de leur participation.

 

Dans cette perspective, la participation habitante devrait être entendue comme un complément du système représentatif et non pas comme un substitut de celui-ci. Ainsi, sans remettre en cause les pouvoirs des élus (et ainsi du système démocratique existant), l’idée est d’associer de manière active les habitants à tout projet les concernant, de l’élaboration jusqu’à la réalisation.

 

Dans le même sens, Blanc (1999) parle plutôt de « degrés » de participation dépendant de la redistribution du pouvoir à l’endroit des habitants. L’information (« descendante ») des habitants est ainsi établie comme un préalable à une véritable participation. La consultation des habitants constitue ensuite le premier degré de la participation, suivant des procédés pour recueillir des informations allant dans le sens opposée de l’étape préalable. Pour une participation de ce niveau, les autorités publiques réalisent une remontée des suggestions et critiques, mais conservent seules la faculté de décision : les autorités sont alors libre de tenir en compte ou non les informations qui leur parviennent par la consultation.

 

Mais, il arrive que la participation dépasse l’étape de consultation pour embrasser celle de la concertation : à ce degré supérieur au précédent, il y a une certaine redistribution du pouvoir aux habitants pour leur permettre de négocier, de débattre les inflexions au projet initialement présenté. Il est rare que les mouvements de contestation menés par les habitants et/ou les associations locales aboutissent à une concertation ; mais, paradoxalement, la crédibilité des résultats d’une concertation « octroyée » par les pouvoirs publics est souvent à douter : « il est rare de voir des responsables se dessaisir volontairement d’une parcelle de leur autorité et se mettre volontairement en situation de faiblesse » (Blanc, 1999, p. 181).

 

La codécision (et « cogestion ») est un degré supplémentaire de la participation correspondant à l’association des habitants à la prise des décisions (et à la gestion des projets considérés). Cette étape « donne aux habitants un réel pouvoir de décision, sur tout ou partie d’un projet » (ORIV, 2009, p. 2). Il est encore plus rare de voir toutes ces étapes intégrées à la participation des habitants à la politique de la ville. Le rapport de Bacqué et Mechmache (2014) avance que la participation des habitants devrait atteindre ce degré supérieur pour être effective : « L’horizon dans lequel nous souhaitons inscrire ce rapport est celui d’une participation qui aille au-delà de la communication ou de la concertation autour de projets et de politiques publiques, qui prennent en compte à la fois les enjeux de pouvoir, les inégalités et la conflictualité dans le débat démocratique, dans une perspective de transformation sociale » (p. 19).

 

De ce fait, ce rapport critique la définition de la participation instituée en France jusqu’alors que les auteurs considèrent comme imprécise quant aux marges de manœuvre que les pouvoirs publics veulent accorder aux habitants. Par ailleurs, ils dénoncent que les dispositifs jusque-là mis en place sont davantage informatifs plutôt que consultatifs, et encore moins décisionnels. Finalement, la participation en France est qualifiée de « sans enjeux et sans effet » (Bacqué & Mechmache, 2014, p. 23) par ce rapport, faisant alors oublier le premier rôle de la politique de la ville : requalification des  quartiers populaires et réduction des exclusions des jeunes et plus précaires (Maruszak, 2015).

 

1.1.4. Enjeux de la participation habitante

 

Les enjeux de la participation habitante résident pour l’essentiel dans le fait d’annoncer solennellement l’existence de celle-ci alors qu’il n’en est pas vraiment ainsi dans la réalité. Probablement, l’une des composantes de cette incohérence dans le discours et la réalité effective se trouve dans la forme « institutionnalisée » même des dispositifs participatifs existants (à citer par exemple, dans cet ordre, les conseils consultatifs des jeunes, les conseils de quartier, etc.). En effet, avec leur caractère « institutionnel », ces dispositifs tendent à faire ignorer toute autre forme non-institutionnalisée d’initiative locale, et par l’occasion, s’écartent des vraies dynamiques de la population du quartier. Cela donne lieu à un double mouvement opposé. D’une part, il y a les initiatives des acteurs locaux qui tentent d’obtenir une place reconnue par le pouvoir public dans l’élaboration de la politique de la ville, mais n’obtenant pas finalement gain de cause. D’autre part, les autorités publiques « met en place » d’autres instances dites « de participation », mais la démarche descendante même dans leur déploiement compromette déjà le sens attribué au concept de « participation ».

 

Certes, l’anarchie pourrait constituer un facteur d’échec lorsqu’il s’agit de mobiliser le plus grand nombre, surtout qu’il s’agit d’opinions, de vie politique. Il est incontestablement requis un minimum de cohérence dans la démarche à entamer dans ce sens. Mais, il semble que le juste milieu n’a pas encore été trouvé car la procédure de participation a presque toujours été largement cadrée par l’Etat, et les mouvements ascendants sont alors neutralisés systématiquement. En fin de compte, les habitants sont appelés à être présents, non pas pour participer à la construction d’un projet qui les concerne, mais plutôt pour manifester leur position vis-à-vis de ce projet préalablement construit.

 

Les savoirs qualifiés « d’ordinaire » et « d’usage » des habitants se heurtent aussi au savoir « expert » des élus et professionnels qui travaillent pour le compte de l’Etat (Deboulet & Nez, 2013). Les habitants sont considérés comme des simples usagers, et leur contribution à l’action politique doit se limiter légitimement à ce « savoir d’usage ». Cela ne tient pas alors compte de la multitude des rôles qu’ils jouent dans leur milieu : travailleurs, membres d’une communauté, individus actifs au sein de leurs familles, voire des militants dans des structures associatives et/ou politiques, etc. Il leur est souvent reproché de défendre leurs intérêts personnels, comparés aux élus et techniciens qui auraient toujours une vue objective pour l’intérêt général.

 

Une inégalité manifeste est souvent constatée, même dans les instances représentatives : ce sont surtout ceux qui vivent dans la précarité qui sont les plus éloignés de la vie sociopolitique. Cela est notamment appréciable dans l’élaboration de la liste électorale, écartant par exemple des vrais habitants du quartier tels que des personnes d’origine étrangère, les non-diplômés, les jeunes, et parfois aussi les femmes, les immigrés, les chômeurs et les handicapés (Carrel, 2004). « Finalement, ce sont les mêmes qui sont présents dans les instances de participation : des individus au capital social et politique plus ou moins important, informés et souvent membres d’une structure associative ou politique » (Maruszak, 2015, p. 38). Les ressources sociales et financières sont alors des composantes dominantes qui imposent un déséquilibre permanent dans le processus décisionnel : ceux qui ont les « moyens » s’assoient facilement autour de la table de décision à la place des habitants (Balazard, 2015).

 

C’est tout juste dans ce problème d’inégalité d’accès au pouvoir de décision et en vue d’une participation bien plus profonde qu’un complément de la démocratie représentative que la notion de « pouvoir d’agir » prend tout son sens. « Elle fait de l’habitant des quartiers populaires non plus un problème, mais une partie de la solution qui conduit à l’amélioration de la vie dans les quartiers populaires » (Maruszak, 2015, p. 40). Développer le pouvoir d’agir, c’est renforcer les capacités d’action des habitants sur leur environnement, ceux-ci devant prendre part dans l’action publique. Cela implique le renforcement de leurs capacités de contestation et d’initiative, une extension de leur marge de manœuvre de manière à faire entendre et valoir leurs intérêts. Cela se traduit également par la dotation de moyens d’autonomie aux habitants les plus précaires afin que ceux-ci puissent voir leurs droits à la participation dans des conditions respectant l’équilibre du pouvoir.

 

Tout cela donne déjà des idées sur le contraste entre une participation théorique annoncée et ce qui est véritablement effectif dans la pratique. Désormais, ce contraste s’inscrit dans de nombreux paradoxes à propos de la participation des habitants à la vie politique, notamment en ce qui concerne la politique de la ville.

 

1.2. Les paradoxes de la participation

 

Pour enrichir encore la compréhension de ce qu’est une véritable participation habitante, une analyse critique du passé offre des perspectives intéressantes. Une piste à privilégier pour y parvenir serait probablement le « Rapport Dubedout » remis en 1983 par le maire de Grenoble d’alors au Président de la République. En vue d’une nouvelle gouvernance locale s’appuyant sur l’établissement d’un projet recevant la concertation de l’ensemble des membres de la société, Dubedout (2011) met en lumière la défaillance du programme national « Habitat et vie Sociale » (1977-1981) censé être la base de la participation des habitants à la vie politique de la ville.

 

Ainsi, Dubedout (2011) parle de participation « artificielle », réduisant les habitants à un rôle d’assistés, de simples témoins vis-à-vis d’un changement qui s’opèrent dans leurs quartiers. L’auteur veut souligner le manque de participation active de ces habitants dans la politique de la ville et appelle à la mise en place de nouveaux dispositifs de participation. Les différents dispositifs de participation qui ont été mis en place n’avaient aucun caractère obligatoire, néanmoins, encore faut-il noter qu’ils ne dépendaient pas seulement des dynamiques des citoyens mais également (et surtout) de la volonté des municipalités à voir s’organiser des initiatives de groupement d’habitants. L’Etat a tenté ainsi de promouvoir « la participation du public au projet d’élaboration des projets d’aménagement ou d’équipement d’intérêt national » avec la loi Barnier de 1995[2] ; la mise en place obligatoire des conseils des quartiers au niveau des Communes ayant plus de 80 000 habitants a ensuite été instaurée par la loi Vaillant du 27 février 2002.

 

A première vue, les objectifs de ces différentes dispositions prises par l’Etat apparaissent nobles, mais elles ne restent pas moins institutionnalisées, descendantes et initiées par le pouvoir public sans provenir d’une demande expresse de la population. En fait, lorsque de telle offre de participation ne rencontre pas une demande formalisée émanant des habitants, l’utilité de cette offre est remise en question puisqu’elle n’a pas fait l’objet d’une appropriation explicite et une utilisation durable par les habitants. Carrel (2004) mentionne la notion « d’injonction participative » pour signaler le caractère obligatoire (une obligation émanant du pouvoir central) de la participation des habitants dans la vie politique, une participation imposée qui n’accorde pas de place réelle pour les véritables initiatives habitantes. Les habitants sont maintenus à un rôle simplement consultatif, sans toucher au pouvoir décisionnel. Ils n’ont ni possibilité d’évoquer une contreproposition, ni compétence pour manifester leur éventuelle désaccord devant des projets préconçus en amont, des décisions déjà prises par d’autres en leur nom. D’où, la participation des habitants est généralement réduite à l’information (Monbeig, 2007).

 

Par ailleurs, le terme « participation » est souvent utilisé dans les discours politiques dans le but de légitimer les actions des élus, une sorte de faire-valoir pour ces derniers, un moyen très prisé dans la communication politique. « Ces dispositifs [de représentation] sont davantage le fruit d’une obligation morale des élus à légitimer leurs actions par les habitants plutôt que faire de celle-ci un véritable acte démocratique » (Maruszak, 2015, p. 29). Lorsqu’un élu arrive au pouvoir, la concrétisation d’une promesse est reléguée au second plan car les instances représentatives en place sont souvent issues des catégories socioprofessionnelles très différentes des habitants, ignorant pour l’essentiel leurs vraies conditions de vie, leurs besoins réels. « L’absence de participation large semble se produire avec la même régularité dans les municipalités alliées au gouvernement du moment que dans celles qui s’identifient à l’opposition » (Dion, 1984, p. 132).

 

Blanc (1999) utilise des mots encore plus forts pour illustrer un paradoxe de la participation : « Vanter en public les bienfaits de la participation est un rituel obligatoire, Pourtant, sa mise en œuvre fait très peur » (p. 182). Le constat de Crozier et Thoenig (1975) renforcent ces propos : « Les maires, les conseillers généraux, les responsables administratifs pensent tous également que la population est incapable de dire son mot dans la gestion des affaires qui la concernent sauf de façon irresponsable ou pour faire valoir ses intérêts particuliers » (p. 13).

 

En outre, comme le mentionne Dubedout (2011) la participation des habitants dans la vie politique repose pour la plupart du temps sur une illusion, celle d’une communauté de quartier solidaire et homogène. Or, il faut reconnaitre que les visions des habitants vis-à-vis de l’avenir de leur quartier sont généralement divergentes, d’autant plus qu’ils s’opposent sur les solutions à apporter face à un problème. D’habitude, leurs discours sont axés sur l’opposition évoquée entre « bons et mauvais voisins » : ceux qui prennent la parole se considèrent désormais comme les défenseurs de l’intérêt général tout en dénonçant « les autres » (dont les jeunes, les chômeurs, les étrangers, les drogués, etc.) comme les sources de problème de leur quartier. Certaines réunions de concertation voient s’exprimer des suggestions pour faire éloigner les « gêneurs » sans quoi il n’y aurait point de véritable réhabilitation du quartier (Blanc, 1999).

 

« Même si elles se gardent de le dire publiquement, les autorités locale partagent souvent cette vision et c’est le sens des tentatives de « rééquilibrage » de la composition sociologique du quartier » (Blanc, 1999, p. 183), la fameuse notion de « mixité sociale ». Ainsi, l’Aide personnalisée au logement (APL) devait permettre l’installation ou le maintien des ménages aux situations économiques précaires dans le quartier réhabilité. Mais, cela fait fuir en quelque sorte les autres catégories de ménages. D’ailleurs, les familles aux ressources les plus faibles voient une sorte de « menace » dans la réhabilitation, estimant qu’une meilleure condition aura certainement des prix plus chers, le cas échéant, ces habitants vont alors devoir partir sans savoir dans quelle direction. D’où, ces derniers trouvent que le statu quo constitue l’option la plus avantageuse, c’est-à-dire qu’ils ne sont pas incités à participer à tout débat projetant un meilleur avenir pour leur quartier.

 

Enfin, pour citer un dernier paradoxe dans la participation des habitants dans la vie politique, il convient de se référer aux conflits de voisinage (déjà évoqués plus haut : « bons et mauvais voisins »). La participation est souvent pratiquée de manière très restrictive car ces conflits ne permettent pas toujours de déboucher sur un consensus lorsqu’il s’agit de débattre pour une solution optimale. Certains élus décident alors de ne faire participer que des habitants ne voyant pas l’utilité d’une opération. « Pourtant, contrairement aux idées reçues, la dynamique du conflit favorise la communication » (Blanc, 1999, p. 184). En effet, c’est ce conflit même qui devrait être le facteur majeur d’introduction du débat : « L’information circulera d’autant mieux que les partenaires du drame urbain seront plus différents dans leurs rôles, mieux groupés et plus antagonistes […]. Le dialogue suppose la dialectique des oppositions » (Ledrut & Giami, 1968, p. 228).

 

En somme, l’essentiel de ces paradoxes de la participation se résume ainsi : les habitants sont invités à manifester librement leurs revendications, mais celles-ci sont rarement entendues. Cela s’illustre par exemple dans la culpabilisation des habitants, le recours à l’autorité des professionnels, ou encore le renvoi à une autre instance qui est souvent abstraite (dont l’accès est difficile).

 

1.3. Enjeux de la démocratie participative locale

 

« L’activité politique consiste à déterminer le bien commun et à long terme d’une communauté […] La démocratie vise à mettre tous les membres de la communauté sur un pied d’égalité pour influer sur la définition de ce bien commun » (Blanc, 1999, p. 186). Or, le bien commun au niveau local risque d’être considéré à tort comme un intérêt particulier par ceux qui sont au niveau supérieur. Les conflits identifiés au niveau local servent souvent de prétexte pour confier au niveau national le soin de déterminer le bien commun, ce qui est généralement appelé « intérêt général ». En fait, « un bien commun local légitime peut être sous-estimé en haut lieu, par simple méconnaissance des spécificités du terrain ou par calcul stratégique » (ibid., p. 187).

 

D’ailleurs, il y a une certaine opposition entre expertise et démocratie dans le sens où il y a un fossé entre ceux qui sont habilités du fait de leur compétence et les citoyens ordinaires qui sont exclus du débat car considérés comme incompétents. La démocratie représentative veut que des techniciens donnent leurs avis et conseillent les élus, ces derniers restant les vrais décideurs. Mais, il n’est pas toujours ainsi car ces deux types d’acteurs s’influencent mutuellement et fortement. « Plus généralement, on peut considérer la démocratie représentative locale comme une transaction bipolaire entre deux principes de légitimité concurrents, le suffrage universel et la connaissance, mais aussi comme une transaction entre le niveau local et le niveau national » (ibid.).

 

En outre, la politique est conçue (du moins dans le modèle de la démocratie représentative de Schumpeter, 1943, cité par Blanc, 1999) comme une transaction entre les divers intérêts particuliers existants. Dans un sens, la démocratie représentative réduit la motivation des citoyens à participer activement dans les actions publiques : les habitants ont tendance à déléguer tous leurs rôles à leurs représentants une fois que ceux-ci ont été élus. La démocratie participative entre alors en scène pour réinstaurer l’intervention des citoyens dans la vie politique. Néanmoins, le nombre des habitants qui répondent présents à l’invitation à participer reste très faible, avec toujours un défaut au niveau de la représentativité de la population. La démocratie participative a alors comme véritable défi d’inclure dans les débats les inégalités souvent mises à l’écart au profit d’une homogénéité qui s’exprime bien pour défendre les intérêts particuliers d’une minorité de la classe aisée.

 

Devant l’antagonisme entre la démocratie représentative et la démocratie participative, Blanc (1999) introduit la notion de « démocratie participative locale » pour tenter de « greffer » la participation sur la représentation dans une transaction tripolaire entre les élus, les experts, et les militants. L’auteur en conclut que « donner à tous l’accès à une contre-expertise autonome est une condition nécessaire, mais non suffisante, pour la qualité du débat démocratique » (p. 189).

 

Ainsi, la participation au débat public implique aux habitants d’apprendre ce qu’est la « citoyenneté active », c’est-à-dire apprendre à compter avec non seulement ceux qui sont favorables à un projet mais également avec ceux qui en sont contres. C’est agir démocratiquement au sein d’une communauté. Cet apprentissage doit conférer aux individus quatre traits essentiels d’une compétence démocratique. D’abord, chacun doit être en capacité de « s’exprimer » pour faire valoir ses droits. Mais, pour éviter le corporatisme, la citoyenneté suppose aussi une « écoute » pour savoir et reconnaitre la légitimité des attentes différentes des siennes. Il est nécessaire en suite « d’arbitrer » pour trouver un consensus, ou au moins réduire l’écart entre les prétentions contraires en présence. Enfin, la compétence démocratique doit aller au-delà de la délibération pour passer à l’acte, invitant les habitants à « s’engager » pour participer à la mise en œuvre de l’action. « Si les habitants d’un quartier ne sont plus des sujets passifs mais des citoyens actifs et organisés, cela bouleverse les conditions d’exercice du pouvoir local » (Blanc, 1999, p. 190).

 

Toujours dans le cadre de cette démocratie participative, faut-il toujours insister sur la qualité de la médiation entre les autorités locales et les habitants. Il apparait que ceux qui tiennent le rôle de médiateur devraient avoir un certain professionnalisme du fait de leur double compétence, politique et technique : en effet, ce sont eux qui traduisent les aspects techniques d’un projet pour les rendre compréhensibles pour les habitants, mais les médiateurs aident aussi ces habitants à s’exprimer mieux pour être entendus par les techniciens et les élus. « La mise en place de médiateurs n’est pas une garantie de réussite, elle n’en est pas moins un bon indice de la volonté politique concrète de favoriser l’expression des habitants et les progrès de la démocratie » (ibid., p. 192).

 

 

En conclusion, la participation des habitants dans la vie politique est complexe dans sa mise en œuvre. On parle ainsi de son caractère qualifié « d’incantatoire » : « de nombreux travaux mettent en avant le caractère itératif et prescriptif de la participation et ses avancées limitées sur le terrain » (ORIV, 2009, p. 3). Il y a aussi une certaine peur du politique : les habitants ne souhaitent qu’une véritable participation à l’action publique qui les concerne, mais ils hésitent quant à leur capacité d’exprimer leurs besoins, d’autant plus qu’ils voient leurs discours transformés en réalité très rarement. La complexité de la participation habitante vient également de la nécessité de concilier les aspects techniques avec le contexte politique dans lequel s’inscrit cette participation. En tout cas, une partie des problèmes sur le thème est relative à la notion même de participation dont la définition est souvent ambigüe de sorte à nourrir la confusion et empêchant un réel équilibre de pouvoir décisionnel entre les autorités locales et les habitants. Un défi majeur consiste alors à mettre en place des dispositifs de participation sans nuire à la signification véritable de cette notion-clé.

 

 

Partie 2.        Les conseils citoyens comme moyens pour remobiliser la participation des habitants

 

« La loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014[3] pré­voit de franchir une étape supplémentaire avec l’instauration d’une coconstruction de la politique de la ville « s’appuyant sur la mise en place de conseils citoyens » dans tous les contrats de ville (article 1er) et la mise en place d’une « maison du projet » pour chaque projet de renouvellement urbain (article 2) » (MDFVJS, 2014, p. 3). Pour ce qui concerne la maison du projet, cette loi explique qu’il s’agit d’un « lieu d’accueil » devant permettre au « conseil citoyen » de « s’informer et échanger avec les personnalités extérieures, construire et formaliser qu’il souhaite porter pour le projet de territoire et l’aménagement urbain du quartier, associer plus largement les habitants à la co-élaboration du projet » (MDFVJS, 2014, p. 15). Il est clair alors que l’essentiel des moyens offerts par cette loi pour une participation habitante effective réside dans ce dispositif qu’elle nomme « Conseil citoyen ».

 

Ce n’est pas la première fois qu’un tel dispositif a été mis en place, mais les apports de tous les dispositifs déployés avant celui-ci dans l’effectivité de la participation des habitants à la politique de la ville ont été quelque peu compromettants. Il convient alors, avant même d’apprécier les différentes composantes légales du Conseil citoyen, de tenir compte des éléments ayant conduit à sa conception. Une analyse critique de ce nouveau dispositif s’impose aussi.

 

2.1. Genèse de la loi de programmation et de cohésion urbaine de 2014

 

Principalement, c’est le « Rapport Bacqué-Mechmache » (Bacqué & Mechmache, 2014) qui est présenté comme l’outil de référence dans l’élaboration de cette loi de février 2014 (dite « Loi Lamy »). Les auteurs de ce rapport proposent une vue critique des différents dispositifs relatifs à la participation des habitants sur les politiques publiques mis en place jusque-là, puis mettent en avant la nécessité d’un renouveau d’une véritable participation habitante. « L’horizon dans lequel nous souhaitons inscrire ce rapport est celui d’une participation qui aille au-delà de la communication ou de la concertation autour de projets et de politiques publiques, qui prennent en compte à la fois les enjeux de pouvoir, les inégalités et la conflictualité dans le débat démocratique, dans une perspective de transformation sociale » (Bacqué & Mechmache, 2014, p. 19). Ainsi, les auteurs ont pointé du doigt l’imprécision dans la définition française de cette notion de participation, avec comme conséquence une tendance à associer cette notion à celle d’information des habitants plutôt qu’à considérer effectivement leurs savoirs et leurs propositions.

 

Le Rapport Bacqué-Mechmache propose ainsi cinq axes de travail pour renforcer la participation habitante, dans un « un empowerment à la française » mettant les habitants au cœur d’une politique de la ville co-élaborée (Bacqué & Mechmache, 2014) :

 

  • Soutenir le développement du « pouvoir d’agir » (démarche d’empowerment) : cela consiste à encourager l’autonomie de la société civile dans les quartiers considérés comme prioritaires par la reconnaissance des initiatives citoyennes et par la dotation pour ces quartiers des moyens dont ils ont besoin pour se développer. Cet axe devrait favoriser l’émergence d’un contre-pouvoir et d’espaces-critiques, mais aussi permettre le droit à l’interpellation.

 

  • Mettre les citoyens au centre des services publics, de manière à mieux prendre en compte les opinions des usagers et à réaffirmer le rôle des structures intermédiaires, tels que des points d’appui qui participent à la production des services publics. Il est alors attendu une transformation du regard vis-à-vis des habitants, une vision qui sort de la logique du chiffre et bureaucratique.

 

  • Démocratiser la politique de la ville en donnant aux habitants la place qui devrait leur revenir à toutes les phases du contrat de la ville, et à tous les niveaux de décision.

 

  • Changer l’image des quartiers, évitant le discours qui réduit les quartiers aux « ghettos » caractérisés par des problèmes, mais plutôt reconnaissant la complexité de ces quartiers par la mise en évidence des éléments positifs qu’ils contiennent, comme les innovations, la solidarité, les formes d’expression, etc.

 

  • Opter pour un renversement de la démarche par la formation et par la co-formation (et non plus les démarches d’encadrement). « Un fossé social s’est creusé entre les agents de la fonction publique territoriale et les salariés associatifs, dont la diversité ethnique est faible, et les habitants des quartiers populaires, dont la situation sociale est méconnue par ces professionnels et élus. L’échange par le dialogue entre les techniciens, bénévoles et citoyens est primordial et doit être à double sens »(IREV, 2013).

 

Pour répondre à ces cinq axes, les auteurs du rapport proposent la mise en place des tables locales de concertation, appelées aussi tables de quartiers, qui auront pour vocation de réunir les différentes associations de quartier au sein d’un même lieu de débat et d’échange. Cela donnera alors une opportunité pour ces associations de discuter, de coordonner des actions et de concevoir un projet commun pour le quartier ainsi qu’au sein des dispositifs de pilotage du contrat de ville. Ces tables de quartiers sont désormais inspirées d’un modèle étranger, celui des tables de concertation communautaires de la ville de Montréal, soutenues financièrement par la municipalité. Ces tables de quartiers sont donc une alternative nécessaire au dialogue à établir entre les habitants et le pouvoir public.

 

Aussi, le Rapport Bacqué-Mechmache a beaucoup influencé l’élaboration de la loi Lamy en introduisant des concepts tels que la « co-construction », le « pouvoir d’agir », la « co-formation ». Cette dernière consiste à former les habitants à la participation en leur mettant à disposition des moyens pour avoir du poids sur l’action publique, d’une part, et à former les élus et les techniciens de la ville pour une évolution positive de leur fonctionnement et de leur culture professionnelle et politique, d’autre part. C’est de cette manière que ces deux parties (habitants et élus-techniciens) peuvent construire ensemble (co-construction) et de manière efficace la politique de la ville. Toutefois, il apparait que cette notion de co-construction est un peu réductrice car elle fait oublier en quelque sorte le principe de « codécision » dans la loi du février 2014, alors que cela fait partie des éléments-clés avancés dans le Rapport Bacqué-Mechmache. Cette absence de la codécision dans cette loi « installe un flou sur les acteurs qui seraient aptes à prendre la décision finale dans l’action publique » (Maruszak, 2015, p. 33). En outre, à la place des tables locales de concertation mises en avant par ce rapport, la loi de 2014 instaure plutôt les Conseils citoyens. Avant de s’étaler plus sur ces omissions différenciant le Rapport Bacqué-Mechmache avec cette loi, il convient de se pencher davantage sur la question de la participation des habitants à la politique de la ville comme elle a été conçue dans cette nouvelle loi.

 

2.2. Participation des habitants à la « politique de la ville »

 

« La participation des habitants est inscrite depuis son origine dans les principes de la politique de la ville » (ORIV, 2009, p. 2). Dans les années 70, cette participation a été axée sur le cadre de la vie, puis sur l’amélioration du cadre de vie et/ou une appropriation de l’environnement quotidien des habitants, dans les années 80 avec les programmes « Habitat et Vie Sociale » ou encore le « Développement Social des Quartiers ». A partir de 1993, la participation des habitants a été définie comme l’une des principales notions du contrat de la ville. En 1998, cette participation a même été imposée comme condition à la signature des contrats de ville 2000-2006 par l’Etat. Cette dimension a ensuite reprise en 2006, sans toutefois poser un cadre de mise en œuvre précis. Tout cela met l’accent sur le fait que la politique de la ville constitue le cadre de réalisation de cette participation.

 

2.2.1. Politique de la ville : cadre général

 

Blanc (1999) remarque que la « politique de la ville » est elle-même une expression paradoxale « puisqu’elle ne désigne ni une politique municipale, ni une politique « urbaine » au sens habituel », mais plutôt « plusieurs programmes successifs » comme « l’Habitat et vie sociale de 1977 », le « Développement social des quartiers » de 1982, les « Contrats de ville » au tournant de l’année 2000 (p. 178). Aussi, la politique de la ville est vue comme une politique transversale (locale globale) en essayant de mettre de la cohérence entre des actions relatives à la réhabilitation des logements avec celles associés pour résoudre les problèmes sociaux dans certains quartiers. La place de la concertation dans la politique de la ville dans ces différents programmes énumérés ci-dessus est, elle aussi, ambigüe. La loi de février 2014 tente alors d’apporter un nouveau souffle pour la participation active des habitants dans la politique de la ville.

 

L’article premier de cette loi fixe le cadre général de la politique de la ville            par la confirmation d’un double objectif attribué à celle-ci : améliorer la condition de vie des habitants des quartiers, d’une part, et réduire les écarts de développement entre les quartiers dits « prioritaires » et les autres territoires d’autre part (ORIV, 2014). Les « contrats de ville » sont alors les moyens destinés à mettre en œuvre cette politique, dans lesquels ce double objectif se décline en un ensemble d’objectifs « en tenant compte de la diversité des territoires et leurs ressources » (Article premier) :

 

  • D’un côté, il y a des objectifs vis-à-vis des personnes telles que ceux pour la tranquillité publique, l’insertion sociale, culturelle et professionnelle des habitants, etc.

 

  • D’un autre côté, il y a des objectifs au regard des lieux comme relatifs à la mixité fonctionnelle, à l’intégration urbaine des quartiers, etc.

 

Cette loi insiste aussi sur des objectifs n’ayant pas été, ou seulement peu pris en compte par les dispositifs antérieurs, tels que ceux relatifs à l’accès au service public et à la lutte anti-discrimination. L’article premier confirme également les principes qui structurent la politique de la ville, à savoir : le partenariat entre les collectivités territoriales et l’Etat, l’implication nécessaire des politiques de droit commun préalablement à toute mobilisation de crédits spécifiques, et la participation des habitants en mettant en œuvre un processus de co-construction. La mesure de l’atteinte des objectifs est confiée à un Observatoire national de la politique de la ville (remplaçant l’observatoire national des zones urbaines sensibles) avec un rôle élargi, entre autres à l’évaluation des moyens mobilisés, à l’évaluation de la mise en œuvre opérationnelle, à l’analyse des discriminations entre les deux sexes, etc.

 

2.2.2. Le programme national de renouvellement urbain

 

Le Programme National de Rénovation Urbaine (PNRU) pose la participation des habitants au projet comme condition préalable. Or, en 2006, une étude menée par Donzelot pour le compte de l’Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (ANRU) a fait état de certaines limites dans cette participation : « malgré la diversité des pratiques et la bonne volonté d’un grand nombre d’élus locaux, les pratiques développées localement au titre de la concertation visent essentiellement à informer les habitants ou au mieux à les consulter sur les projets arrêtés par les pouvoirs publics » (CES, 2006, p. 1).

 

Le comité interministériel des villes réuni le 19 février 2013 a réitéré la réussite du PNRU. A côté de ce succès évoqué, le PNRU n’a toutefois pas permis de satisfaire à l’ensemble des besoins mis en évidence en termes de rénovation urbaine car il existe encore plusieurs quartiers insuffisamment ou non encore traités. Face à ce constat, ce comité a décidé de lancer à partir de 2014 une autre génération de projets de renouvellement urbain qui doivent s’inscrire dans le cadre des contrats de ville. L’objectif de cette relance est de répondre au mieux aux enjeux des quartiers qui seraient alors définis comme prioritaires (Article 2 de la loi de février 2014). En tout cas, la démarche de co-construction (devant traduire l’effectivité de la participation des habitants dans la politique de la ville, suivant les modalités définies dans les contrats de ville) s’appuie essentiellement sur la mise en place des Conseils citoyens (Article premier de cette loi).

 

2.3. Les conseils citoyens

 

Il importe dans un premier temps de faire un survol des dispositions relatives à ce dispositif particulier censé être au cœur de la participation habitante.

 

2.3.1. Principes généraux régissant l’action des conseils citoyens

 

L’action des Conseils citoyens est guidée par des principes généraux, à savoir :

 

  • La liberté : le Conseil citoyen est censé favoriser la libre expression, une assurance quant à la possibilité pour chaque membre d’émettre des propositions et des avis sur tout thème soumis à débat ;

 

  • L’égalité : c’est la prise en compte de la parole de chacun des membres du Conseil. En cas d’absence de consensus entre les différentes propositions émises, c’est la position adoptée par la majorité qui est portée par le Conseil tout en faisant mention des opinions divergentes et des autres alternatives émises durant le débat ;

 

  • La fraternité : chaque membre s’engage avec les autres, dans une démarche collective et solidaire, à œuvrer en faveur de leur quartier au bénéfice de l’ensemble des habitants ;

 

  • La laïcité : « il ne saurait y être toléré d’actes prosélytes ou manifestement contraires à la liberté de conscience de ses membres »(MDFVJS, 2014, p. 4) ;

 

  • La neutralité : cela renvoi à l’autonomie et l’indépendance à l’égard de tout parti politique, syndicat, association cultuelle ou groupe de pression opposé au principe de pluralité ;

 

  • La souplesse : cela implique la considération du contexte local ; en fait, le cadre de référence guide dans la mise en œuvre du processus de co-construction, mais n’impose aucun modèle type pour ne pas entraver la mobilisation et l’implication des habitants ;

 

  • L’indépendance qui devrait être garantie par la mise à disposition du Conseil des ressources dont il a besoin ;

 

  • La pluralité pour assurer la richesse des positions que le Conseil porte ; cette pluralité impose désormais une bonne représentativité des habitants, surtout ceux éloignés des instances de concertation classiques ;

 

  • La parité : le Conseil citoyen est composé des représentants des associations et des acteurs locaux d’une part, et des représentants des habitants (tirés au sort) d’autre part, tout en respectant la représentation égale homme-femme ;

 

  • La proximité et la citoyenneté : le Conseil est une expression de la mobilisation citoyenne au niveau d’un quartier ;

 

  • La co-construction : les habitants et les acteurs du quartier sont envisagés comme des partenaires associés à la conception, au pilotage et à l’évaluation des contrats de ville.

 

2.3.2. Mission des conseils citoyens

 

Trois principales missions sont confiées au Conseil citoyen :

 

  • Favoriser l’expression des habitants auprès des acteurs institutionnels (le Conseil devant se positionner de manière stratégique auprès de ces derniers pour légitimer cette expression), c’est-à-dire valoriser l’expression libre des habitants, sans discrimination de points de vue dans leur diversité en considérant entre autres ceux qui ont habituellement eu moins la parole sur la scène politique.

 

  • Constituer un espace favorisant la co-construction des contrats de ville à toutes les phases de la démarche contractuelle (non seulement à l’élaboration, mais aussi au pilotage et à l’évaluation des contrats de ville à travers des représentants), et concernant tous les volets de ces contrats et tous les dispositifs susceptibles d’y être liés.

 

  • Stimuler et appuyer les initiatives citoyennes (les pratiques émergentes, s’appuyant sur des expérimentations existantes). Ainsi des projets développés dans le cadre des contrats de ville pourront être initiés par le Conseil puis confié à une autre structure, porté par des habitants non membre du Conseil, ou encore porté par le Conseil directement.

 

« Favoriser la prise de parole, garantir la place des habitants dans toutes les instances de pilotage du contrat de ville, créer un espace de propositions et d’initiative à partir des besoins des habitants, mais aussi assurer le renouvellement démocratique et la recréation d’un lien trop souvent distendu entre les habitants et les institutions, tels sont les objectifs de ces conseils » (MDFVJS, 2014, p. 3). Principalement alors, le Conseil citoyen est mis en place pour conforter la mobilisation citoyenne existante, et assurer les conditions nécessaires à toute autre initiative de ce genre.

 

2.3.3. Mise en place des conseils citoyens

 

Dans une optique d’inscription aux dynamiques participatives déjà existantes au niveau local (quartier), la mise en place du Conseil citoyen doit tenir compte de celles-ci et les valoriser. Ainsi, cette mise en place devrait s’appuyer sur des expérimentations en cours, telles que celles des tables de quartiers. A cet effet, il devrait y avoir lieu un recensement des pratiques participatives existantes sous la responsabilité des représentants de l’autorité publique locaux. Ce repérage et analyse des démarches relatives à ces pratiques consiste à prévoir les éventuelles modalités de représentation de ces dynamiques participatives locales au niveau du Conseil citoyen, à réfléchir aux modalités d’articulation de ces dernières avec celui-ci, et à garantir l’effectivité de l’association des habitants et des acteurs locaux à la conception des contrats de ville en attendant la constitution formelle du Conseil citoyen.

 

Durant ce temps de diagnostic doit être réalisé un travail de sensibilisation et de promotion des dynamiques locales existantes susceptibles d’intégrer le Conseil citoyen qui est en train d’être mis en place. De manière à éviter la concurrence entre différentes instances participatives existantes, il est prévu que, « dans chaque commune soumise à l’obligation de création d’un conseil de quartier, le maire peut décider que le conseil citoyen se substitue au conseil de quartier » (article L2143-1 du Code Général des Collectivités Territoriales).

 

Par ailleurs, le Conseil citoyen doit être composé de deux catégories de membres : d’une part, un collège « habitants » qui doit constituer au moins la moitié des membres (respectant le principe de la représentativité de la population du quartier ainsi que la parité homme-femme tout en accordant une grande place aux jeunes) et, d’autre part, un collège « associations et acteurs locaux » qui représentent les associations et collectifs implantés dans le quartier ainsi que d’acteurs du terrain qui exercent une activité au sein de ce quartier. « Afin de garantir la représentation de l’ensemble de la population au sein du collège « habitants », la méthode du tirage au sort a été prévue par la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine » (MDFVJS, 2014, p. 9). Parallèlement, un appel à candidature doit être diffusé largement à l’endroit des associations et acteurs locaux pouvant faire partie de l’autre collège, et le tirage au sort tranchera au cas où le nombre des volontaires dépassent la part réservée à ce collège.

 

La liste des membres du Conseil est ensuite communiquée au préfet qui consulte alors le maire et le président d’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) pour vérification de la compatibilité de cette liste avec les normes imposées dans le cadre de référence. Outre cette reconnaissance légale devant être obtenue de la part de ces élus locaux, le Conseil citoyen doit être conforme au contrat de ville en question qui détermine d’ailleurs le nombre de Conseils citoyens à créer dans le territoire (soit un par quartier prioritaire), les modalités de participation du Conseil dans le pilotage des projets, les modalités et conditions de financement du Conseil, ainsi que les modalités d’animation et d’accompagnement que bénéficient les membres de celui-ci. « Il est proposé une durée de mandat de trois ans mais les modalités du mandat sont à définir localement » (ORIV, 2014, p. 9).

 

2.3.4. Cadre organisationnel et fonctionnel

 

Le Conseil citoyen peut porter le statut d’une association nouvellement constituée à cette occasion, ou bien celui d’une personne morale préexistante. Ainsi, le maire peut être amené à décider de substituer le conseil de quartier par le Conseil citoyen. En tout cas, la structure doit respecter les principes du cadre de référence défini pour le Conseil citoyen. Un règlement intérieur ou une charte doit être élaboré, précisant entre autres le rôle du Conseil dans le contrat de ville, les modalités d’organisation et de financement de cette structure (par exemple : les instances internes, les modalités pour désigner ces instances et les représentants au niveau des instances de pilotage, etc.). Aussi, le Conseil citoyen peut se réunir, soit en séances plénières notamment pour débattre sur les orientations prioritaires ou encore sur le programme de travail du Conseil, soit en commissions restreintes sur des thématiques particulières pour suivre les orientations ayant été proposées par le Conseil, par exemple.

 

« Afin de permettre l’association des habitants à son élaboration, le conseil citoyen sera idéalement installé avant la signature du contrat de ville » (MDFVJS, 2014, p. 13). Mais, au cas où de telle mise en place ne semble pas être envisageable vis-à-vis des échéances fixées, il peut être choisi d’intégrer à titre provisoire dans le Conseil citoyen les dynamiques participatives existantes en attendant que soit installé dans les meilleurs délais le Conseil en question suivant les modalités évoquées ci-dessus.

 

2.3.5. Accompagnement et formation des conseils citoyens

 

Les partenaires institutionnels du contrat de ville sont tenus de fournir au Conseil à travers ses représentants les documents associés à l’élaboration, le pilotage et l’évaluation du contrat de ville, « de façon à recueillir les avis et proposition du Conseil » (MDFVJS, 2014, p. 15). Par ailleurs, ce dernier peut faire appel à l’expertise de personnalités extérieures dans les domaines qui relèvent de leurs compétences. Aussi, le Conseil peut demander à des représentants de l’autorité publique partenaire du contrat de ville de se tenir présents à une réunion d’information pour les habitants. En outre, une « maison de projet » doit être mise en place pour chaque projet de renouvellement urbain afin de permettre la co-construction de ce projet.

 

De plus, des actions de formation peuvent être organisées pour trois types d’acteurs : les membres du Conseil citoyen « pour favoriser la prise en compte de l’expertise d’usage dans la prise de décision » (MDFVJS, 2014, p. 16), les acteurs institutionnels pour un meilleur accompagnement des dynamiques participatives, et les animateurs ou structures d’appui concernant la démarche du Conseil. En fait, dans le cadre de la démarche pour la mise en place du Conseil en tenant compte les dynamiques participatives locales, il est possible de s’appuyer, soit sur un binôme « chef de projet municipal – délégué du préfet » (sans pour autant que ce binôme ne se substitue au Conseil), soit aux adultes-relais, soit encore à la mobilisation du « service civique ». Enfin, il y a lieu de mentionner que le Conseil citoyen est susceptible d’être animé et coordonné par des tiers neutres ayant une capacité dans la mobilisation des habitants, la mise en valeur de l’expression de ces derniers sans devenir leur porte-parole, le soutien à l’élaboration et à la mise en place de projets.

 

Il faut dire que le législateur a voulu réunir les ingrédients nécessaires à une véritable participation des habitants à la politique de la ville. Toutefois, il y a lieu de tenir compte de certains aspects qui mettent en évidence l’imperfection de ce nouveau dispositif de participation institutionnalisé.

 

2.4. Analyse critique

 

Il y a deux différences majeures entre la « table locale de concertation » et le Conseil citoyen. D’une part, il y a l’institutionnalisation quant à la composition de ce dernier, n’étant donc pas le résultat d’une alliance construite de façon « naturelle » entre acteurs locaux. D’autre part, le caractère « obligatoire » du Conseil citoyen le place de nouveau (avec les autres dispositifs participatifs l’ayant précédé) comme un dispositif instauré par l’Etat. Cette double différence s’accompagne aussi de trois types d’enjeux majeurs qui méritent d’être soulevés : concernant l’information, le tirage au sort, et la co-construction.

 

2.4.1. Enjeux de l’information

 

Incontestablement, la communication et le partage équilibré des informations, notamment concernant les enjeux du projet de ville et ses fortes implications sur les conditions de vie de la population, constituent un préalable à la mobilisation des habitants. Le Conseil citoyen n’échappe pas à cette règle : ce dispositif n’apporterait rien de nouveau et de pertinent, pas plus que tous les autres dispositifs ayant existé auparavant, si les habitants sont réellement mobilisés autour de celui-ci. Or, Maruszak (2015) constat un manque crucial d’information et de communication dans ce sens ; les habitants ne reçoivent pas les informations relatives aux projets de collectivités, voire sur la mise en place du Conseil citoyen, de manière efficace.

 

En effet, les stratégies de communication menées autour du Conseil citoyen se reflètent sur les pages internet des collectivités. Ces pages ne donnent que peu d’explication surtout sur l’intérêt pour les habitants de ce nouveau dispositif participatif. Cependant, il apparait que ces pages internet constituent le point de départ utilisé pour mobiliser les habitants de nombreuses communes car il n’existe pratiquement aucun autre support pertinent pour communiquer sur l’existence et l’essence du Conseil citoyen. De plus, ces pages internet semblent être l’unique moyen permettant aux habitants de ces communes d’avoir accès au bulletin d’inscription pour participer au Conseil citoyen quand cela ne résulte pas d’un tirage au sort[4]. « D’après l’observation des sites internet des mairies, une grande partie d’entre elles utilisent ce type de communication en ligne, bien qu’elle soit souvent complétée par d’autres moyens d’information, notamment par des tracts distribués dans les boites aux lettres » (Maruszak, 2015, p. 47). D’autres communes utilisent des vocabulaires très techniques mais peu expliqués dans la présentation du nouveau dispositif de participation : « quartiers prioritaires », « politique de la ville », « dynamiques citoyennes », « expertise partagée », etc. Cette faiblesse au niveau de la diffusion de l’information ne pourra que laisser une partie importante des habitants dans l’ignorance, ce qui empêche la mobilisation locale effective.

 

Pourtant, il est démontré à travers les exemples de nombreuses autres communes qu’il est possible de faire mieux avec d’autres moyens de communication : distribution de flyers, envoi des bulletins d’inscription par courrier, voire le porte-à-porte effectué par des élus, acteurs associatifs ou des médiateurs (comme c’est par exemple le cas de la ville de Bologne-sur-Mer). Sans faire d’efforts conséquents en matière de communication, « seuls ceux déjà familiarisés aux dispositifs de participation, où assez curieux pour venir compléter les informations manquantes peuvent se mobiliser, ce qui laisse une grande partie des habitants en marge du dispositif » (ibid., p.48). Il faut comprendre que les gens n’ont pas l’habitude de venir participer à une réunion publique, surtout lorsqu’ils n’ont pas d’information préalable leur expliquant en quoi cela leur pourrait être bénéfique.

 

Il faut aussi parler d’une « information à plusieurs vitesses » en fonction des acteurs, un partage non-équitable des informations à l’endroit des acteurs devant participer aux travaux de mise en place du Conseil citoyen. C’est alors le cas de certaines villes comme Toulouse et Angers où les représentants institutionnels ont tendance à « choisir » les acteurs qu’ils veulent participer aux travaux relatifs au contrat de ville. Par ailleurs, il y a également un manque de communication au sein même du Conseil citoyen comme celui des Hauts de Poissy du fait d’un certain climat de défiance entre les membres : une partie de ceux-ci agit seule sans que les autres membres en soient informés, et une autre partie bloque la transmission d’information sur les dates de réunions du comité de pilotage du contrat de ville, par exemple (l’échec du dispositif participatif se manifeste dans le retrait de certains membres).

 

Il existe également une tendance des acteurs institutionnels à mobiliser les habitants, non pas autour du Conseil citoyen, mais plutôt vers d’autres dispositifs. C’est par exemple le cas à Grenoble où la municipalité communique largement sur un dispositif qu’elle a mis en place en septembre 2014 nommé Conseil citoyen indépendant, alors qu’il n’y a que très peu d’information véhiculée sur les Conseils citoyens relatifs à la politique de la ville (les « tables des quartiers » selon les grenoblois). La confusion est nourrie entre ces deux dispositifs quant à leurs noms, leurs modalités de composition (tirage au sort de la moitié de leurs membres). « Les mêmes questions ont été soulevées pour le site d’Angers où des conseils de quartier ont été mis en place au même moment que les conseils citoyens, mais en bénéficiant d’une information plus large et de meilleurs moyens de communication : des bulletins de candidature aux conseils de quartier ont été envoyés par courrier quand ceux pour les conseils citoyens n’étaient disponibles que sur le site internet de la mairie » (Maruszak, 2015, p. 51).

 

La communication joue ainsi un rôle central dans la mobilisation des habitants autour du dispositif de participation, une première condition à une implication de ceux-ci dans la politique de la ville. La réussite ou l’échec du Conseil citoyen à faire participer activement les habitants aux actions publiques les concernant dépendent en partie de la communication et de l’information. En fait, les modalités de composition du Conseil citoyen influent largement aussi la motivation de ces habitants à intégrer même ce nouveau dispositif participatif.

 

2.4.2. Enjeux du tirage au sort

 

L’utilisation du tirage au sort dans la mise en place du Conseil citoyen est argumentée par le fait que cela devrait permettre la mobilisation des individus habituellement éloignés des instances de participation. En fait, Sintomer (2012) avance un motif de représentativité dans le choix du tirage au sort, faisant en sorte que les éléments obtenus de cette manière constituent des « corps des représentants [qui] ressemblerait par ses caractéristiques au peuple tout entier » (p. 3). C’est en quelque sorte une assurance de l’égalité de participation politique entre les habitants. Le pouvoir public (à travers le cadre de référence sur le Conseil citoyen) est aussi de cet avis : « Afin de garantir la représentation de l’ensemble de la population au sein du collège « habitants », la méthode du tirage au sort a été prévue par la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine » (MDFVJS, 2014, p. 9).

 

La limite de l’usage du tirage au sort dans la composition du Conseil citoyen réside dans le choix de la liste servant de base à cette méthode. Si le cadre de référence relatif au Conseil citoyen fait une énumération « non-exhaustive » des répertoires et fichiers pouvant être utilisés à cet effet pour compléter la liste électorale, de nombreuses communes ne font appel qu’à la seule liste électorale, d’autres mêmes n’utilisent que la liste des habitants volontaires à faire partie des membres du Conseil.

 

En théorie, en faisant abstraction de ces problèmes dans le choix des listes de base au tirage au sort, celui-ci devrait permettre la mobilisation de ceux qui n’ont pas envie ou encore ceux qui n’osent pas s’impliquer dans les actions publiques. Aussi, pour limiter l’injonction de participation, les personnes tirées au sort ne sont pas soumises à l’obligation de participer au Conseil citoyen : elles ont le droit de se retirer. De ce fait, « le résultat du tirage au sort sur la mobilisation des plus éloignés n’est pas convaincant puisque de nombreuses sources ont mis en avant le désengagement progressif des personnes tirées au sort dans les travaux des Conseils citoyens » (Maruszak, 2015, pp. 53-54).

 

En effet, il y a même des localités qui ne sont point parvenues à convaincre les personnes tirées au sort d’intégrer le Conseil citoyen, comme c’est le cas par exemple des Hauts de Poissy. Maruszak (2015) avance une explication : « il s’agit d’une conséquence des inégalités de capital politique et militant entre participants aux conseils citoyens, entre les participants tirés au sort et les volontaires, généralement habitués des dispositifs de participation ou au capital politique et militant plus élevé » (ibid., p.54). L’auteur pense donc que l’égalité entre les différents membres du Conseil devrait être mieux garantie si le collège « habitants » ne serait composé que de citoyens tirés au sort (et non également de volontaires), ce qui pourrait élargir la mobilisation aux individus les moins habitués à la participation politique.

 

2.4.3. Enjeux de la co-construction

 

L’emploi du terme « co-construction » dans la politique de la ville met l’accent sur une volonté d’intégrer les savoirs et compétences des habitants pris comme usagers de l’espace public dans l’élaboration des projets locaux. Mais, la reconnaissance du savoir d’usage des habitants n’est pas suffisante pour modifier le rapport de forces entre les acteurs de l’action publique, de manière à faire participer activement la population locale, surtout que ce savoir d’usage est généralement soumis à une forte subjectivité : un individu a toujours tendance à s’exprimer en son propre nom plutôt qu’au nom de la collectivité. Par ailleurs, il faut admettre que les habitants disposent bien plus qu’un savoir usage : ainsi, Deboulet et Nez (2013) définissent ce qu’elles nomment « savoirs citoyens » comme « l’ensemble des connaissances, expériences et techniques, c’est-à-dire non seulement les savoirs au sens strict du terme mais aussi les savoir-faire que peut mobiliser un acteur qui n’a un statut ni d’élu, ni de professionnel lorsqu’il intervient dans les questions urbaines » (Deboulet & Nez, 2013, p. 16). Ces savoirs sont classés en « savoirs d’usage », « savoirs techniques » (relatifs au milieu professionnel des habitants) et « savoirs politiques ou militants » (pour des personnes membres d’une association de quartier ou d’un parti politique, par exemple).

 

Mais, en principe, ces savoirs citoyens sont considérés comme des « savoirs profanes » face aux « savoirs experts » des professionnels. D’où une perte (ou du moins une réduction) de la légitimité de ces savoirs citoyens dans l’élaboration des actions publiques ; le pouvoir est alors attribué à ceux qui sont habiles à parler et à agir (que sont les élus et les professionnels). « Dans une réunion de quartier rassemblant élus, professionnels et habitants, les habitants sont souvent assis face à des élus et professionnels, sur le modèle d’une assemblée qui écoute des experts, et non pas dans une logique d’échanges à égalité entre acteurs. Ce schéma est très courant et montre une hiérarchie persistante entre les différents acteurs » (Maruszak, 2015, p. 56). Afin de limiter l’enjeu politique généré par cette situation pourtant assez banale (certains acteurs sont surtout habiles à soutenir leurs intérêts personnels plutôt que l’intérêt général), la loi Lamy insiste sur l’indépendance du Conseil citoyen vis-à-vis des pouvoirs publics, de sorte à permettre une véritable co-construction.

 

Néanmoins, de telle indépendance n’est pas toujours respectée, tel qu’il en est dans certaines communes où le maire aurait imposé des membres à intégrer dans le Conseil et que cet élu aurait lui-même choisi : ainsi, le quartier du Clos-les-Roses à Compiègne peut être cité en exemple. Il y a des localités (comme la ville de Lyon) qui déploient les Conseils citoyens sur la base du modèle des conseils de quartier dans lesquels les élus ont la possibilité de siéger. Cette non-application de la loi à propos de l’indépendance du Conseil citoyen pourrait constituer un entrave à la liberté de parole des habitants, et ainsi remettant en question la reconnaissance de leurs savoirs dans le cadre de la co-construction.

 

Toujours à propos de cette co-construction, les associations ont pour vocation d’être des relais des « savoirs habitants » et donc de constituer un élément permettant un rapport de forces beaucoup plus équilibré entre les habitants et les acteurs politiques et professionnels dans l’élaboration des projets publics. Cependant, une première limite dans ce rôle de relais vient de « l’expertise associative » conduisant les associations à leur professionnalisation, c’est-à-dire la qualification professionnelle que les membres de ces associations devraient disposer du fait des exigences techniques et pratiques de leur (associations) cadre d’action. De plus, le cadre réglementaire organisant les associations est régi par une logique d’appel d’offre conduisant en quelque sorte à une perte d’autonomie de celles-ci : en effet, plutôt que de s’attendre à des subventions sans contrepartie, il s’agit pour elles de répondre à une commande publique faisant en sorte que leurs actions soient subordonnées à l’Etat suivant une logique de délégation de service public. Les associations s’éloignent progressivement du « terrain » car la professionnalisation de leurs membres (qui se focalisent davantage sur des tâches administratives) réduit les actions qu’elles mènent auprès de la population. Ces associations pourraient être obligées de mettre en veilleuse les initiatives des habitants si les « bailleurs de fonds institutionnels » (qu’est l’Etat) ont des avis contraires à celles-ci.

 

En outre, le calendrier ministériel pourrait constituer également un facteur freinant le processus de co-construction. En fait, les Conseils citoyens tardent à se mettre en place dans certaines villes, alors qu’il existe une contrainte temps relativement serrée que le Ministère concerné impose aux collectivités. De peur que les engagements sur la cohésion sociale, le développement économique et urbain relatif au contrat de ville ne soient débattus trop rapidement et reléguant au second plan la concertation avec les habitants, le Ministère en question a émis le rappel ci-après à l’endroit des préfets de Départements et de Régions : « A défaut d’une installation effective des conseils citoyens avant la signature des contrats de ville, il vous appartiendra de rechercher, en concertation avec les collectivités locales, les associations de quartier et les différents acteurs locaux, les modalités les plus appropriées d’association des habitants, notamment les jeunes, à l’élaboration des contrats de ville et de fixer l’échéance de leur création » (Circulaire du 15 octobre 2014 relative aux modalités de mise en œuvre des contrats de ville de nouvelle génération, p.5). De nombreux contrats de ville ont ainsi été renvoyés car qualifiés d’incomplets, et la signature des contrats de ville a été repoussée à une date ultérieure.

 

« Bien que repoussés, les délais imposés pour la signature des contrats de ville ne correspondent pas à ceux nécessaires à l’instauration d’une réelle dynamique de participation habitante et de co-élaboration des contrats de ville » (Maruszak, 2015, p. 62). En effet, la mise en place du Conseil citoyen ainsi que les débats relatifs au projet de ville exigent, en principe, un temps long. Les instances représentatives locales ont tendance à élaborer, voire à décider « par avance » sur certains points pour « rattraper » le temps relativement court imposé par le calendrier du Ministère. Les habitants et les acteurs locaux sont quelque peu exclus de l’élaboration du contrat de ville.

 

Outre la nécessité de pallier au retard dans l’élaboration des projets de ville, la volonté de faire participer les habitants a conduit certaines communes à créer des initiatives participatives. A citer à titre d’exemple les cas d’Echirolles et de Toulouse où ces initiatives ont pris la forme de rencontre, de réunions publiques  confrontant les orientations de ce que seront les contrats de ville avec les avis des acteurs des quartiers populaires. Mais, il s’avère que les élus qui ont préparé à l’avance ces rencontres ont trié les acteurs qu’ils ont voulu y participer, la liste de ces participants n’ayant pas été communiquée. Tout cela remet en question l’effectivité de l’application du principe de co-construction dans ces démarches.

 

Le cadre de référence relatif au Conseil citoyen stipule ne pas imposer de « modèle type » dans la mise en œuvre du processus de co-construction, car cela risque d’entraver la mobilisation citoyenne (MDFVJS, 2014). Mais, il y a des exemples, comme celui de la ville de Marseille qui a imposé une « charte d’engagements réciproques » définissant les modalités de lancement des Conseils citoyens sans obtenir la concertation des habitants.

 

 

En conclusion, il faut admettre une certaine volonté de réformer l’environnement participatif des habitants de la part de l’Etat ; du moins, ce qui semble être le cas en appréciant la loi mettant en place le Conseil citoyen pour une meilleure participation des habitants dans l’élaboration de la politique de la ville. Mais, la logique traditionnellement descendante de la politique publique est difficile à inverser, même à travers ces textes de lois explicitement formulés dans ce sens. Il faut alors dire que la demande accrue des habitants et des associations et acteurs locaux de co-construire le contrat de ville à travers le Conseil citoyen ne rencontre pas toujours une offre favorable de la part des représentants locaux de l’Etat. Une cause de la réticence de certains élus à la participation effective et active des habitants résiderait probablement dans une crainte de ces instances représentatives d’être mises à l’écart.

 

 

Partie 3.        Etude de cas : le quartier des Moulins

 

Cette troisième partie se focalise sur une étude de cas de mise en place du Conseil citoyen dans un quartier de la Métropole de Nice. En fait, bien que ce nouveau dispositif de participation présente quelques éléments relatant son imperfection, il constitue néanmoins une opportunité d’au moins améliorer la représentation des habitants vis-à-vis de la politique de la ville. Plus encore, ce dispositif devrait constituer un moyen puissant pour mettre en valeur les initiatives existantes en termes de mobilisation citoyenne, ce qui est une piste à suivre pour favoriser la participation habitante.

 

3.1. Méthodologie

 

Deux grandes étapes ont été suivies dans la réalisation de la présente étude de cas qui cherche désormais la voie la plus optimale pour la mise en place du Conseil citoyen de manière à avoir une forte mobilisation des habitants autour de ce dispositif participatif, et in fine générer une réelle participation habitante :

 

  • En premier lieu, il a fallu faire l’inventaire des existants, surtout concernant les initiatives déjà en place (cela étant indiqué comme un préalable à de telle mise en place, selon le cadre de référence pour le Conseil citoyen) ;

 

  • En deuxième lieu, des recommandations ont été formulées sur la base des informations ainsi obtenues dans l’étape précédente. Ces recommandations resteront des propositions : (bien entendu) seuls les habitants et les acteurs locaux auront la décision finale quant à l’application de ces préconisations.

 

3.2. Présentation et analyse des existants

 

Avant de s’intéresser plus particulièrement à la question de la participation dans le quartier des Moulins, il convient de présenter d’abord le territoire à étudier.

 

3.2.1. Le quartier des Moulins

 

Le quartier des Moulins se trouve dans la ville de Nice (Commune du Saint-Laurent-du-Var), Département des Alpes-Maritimes, Région de Provence Alpes Côte d’Azur. L’IRIS des Moulins constitue la partie la plus importante des territoires qualifiés de prioritaires. Le quartier compte 6 620 habitants ayant un revenu médian de 8 700 euros.

 

Figure 1 – Localisation du quartier dans la ville de Nice

Source : Epareca (2015)

 

Le taux de chômage dans le quartier est sensiblement élevé, avec 100% d’accroissement entre 2007 et 2014 : 27% pour les femmes et 31.2% pour les hommes alors que pour la Métropole, ces taux sont respectivement de 12.3% et 12.6%. La qualification moyenne des habitants est relativement faible : 42.9% des femmes et 31.3% des hommes n’ont pas de diplôme contre respectivement 18.4% et 17.9% pour la Métropole. Au niveau du logement, les HLM représentent entre 75% à 100% des logements du quartier alors que cette proportion n’est que de 8.7% sur le territoire métropolitain. Les ménages du quartier dépendent fortement des prestations sociales : 40 à 100% des ménages sont des allocataires CAF dont le revenu est composé au moins à moitié de prestations sociales. Tout cela donne des idées sur les caractéristiques sociales amenant à inclure les Moulins dans la catégorie des quartiers prioritaires.

 

Le contrat de ville 2015-2020 fait état d’un quartier à « forte densité humaine et urbaine » qui souffre d’un enclavement marquant, mais celui-ci serait en passe d’être résolu avec les travaux de rénovation urbaine. Désormais, Le quartier des Moulins se situe au centre du territoire bénéficiant l’opération « Eco-Vallée » de la plaine du Var. Les opérations de démolition et de réhabilitation dont une large partie est actuellement entamée vont sûrement changer le visage de la cité. Parmi les dispositifs ayant été mis en œuvre sur le quartier, on peut citer les établissements scolaires en réseau d’éducation prioritaire, le programme de rénovation urbaine en cours d’exécution (qui devrait être bientôt relayé par un autre nouveau projet), le programme de réussite éducative, l’intégration du quartier dans la zone de sécurité prioritaire.

 

Concernant le Programme de renouvellement urbain (PRU), celui des Moulins est intégré dans le projet OIN Plaine Var qui vise principalement à développer l’activité économique et à favoriser la mixité sociale et fonctionnelle via une ouverture du quartier et la requalification de l’espace public. Plus concrètement, le PRU comporte quatre principaux objectifs :

 

  • Le désenclavement via l’ouverture des voies et par la requalification des espaces publics ;

 

  • L’amélioration et la diversification des habitats ;

 

  • Le redéveloppement économique et commercial ainsi que le développement « des services et des équipements » ;

 

  • L’amélioration et le soutien à l’insertion professionnelle et sociale des habitants du quartier.

 

Parmi les réalisations en cours dans le cadre du PRU, on peut citer : la démolition de 547 logements, la construction de 548 logements sociaux, la réhabilitation de 757 logements sociaux, l’aménagement/équipement des services publics (mairie annexe, centre d’animation et de loisirs, etc.), la « résidentialisation » par une requalification d’immeubles, le relogement de 452 ménages, et le désenclavement par l’ouverture et la création des voies facilitant la circulation dans le quartier.

 

Il y a trois enjeux prioritaires envisagés dans le nouveau contrat de ville pour le quartier des moulins :

 

  • L’accompagnement du nouveau PRU par la mise en place de projets structurants, dont le pôle santé, le chantier d’insertion, la régie de quartier, et la pépinière associative foyer social ;

 

  • La consolidation des interventions pour prévenir les délinquances et améliorer la sécurité publique. Cela concerne également la question de la transversalité à travers l’insertion professionnelle de sorte à lutter contre la discrimination et les freins à l’emploi.

 

  • La poursuite et le renforcement de l’accompagnement professionnel des individus les plus éloignés de l’emploi.

 

3.2.2. Les existants en matière de participation habitante

 

Au niveau du quartier des Moulins, il existe un certain nombre d’associations qui ont déjà œuvré sur le sujet de la participation et apparemment très engagées et actives dans ce sens :

 

  • Association King Boxing : il s’agit d’une association de sports et loisirs ;

 

  • Association « Aide au devoir et animation des Moulins » (ADAM) qui intervient dans certains domaines relatifs à la citoyenneté, l’éducation et l’emploi. Plus précisément, l’Association œuvre en matière de médiation sociale, d’insertion, de parentalité, d’alphabétisation sociale, d’accompagnement à la scolarité, de centre de loisirs, et d’accompagnement vers l’emploi.

 

  • Association « Découverte et partage » ;

 

  • Association « SOS réussite scolaire » ;

 

  • Association « Eveil ton Art ».

 

  • Association « Groupement d’acteurs pour le logement, l’insertion, la citoyenneté et l’emploi » (GALICE), très active notamment en matière de cohésion sociale.

 

Plus particulièrement, les Associations ADAM et GALICE apparaissent être les plus actives dans le quartier. Voici, par exemple, une appréciation émise par France 3 Nice concernant l’Association ADAM : « Donner l’exemple et être présents partout, et toute la journée pour les médiateurs des Moulins. Ils sillonnent le quartier, sont à l’écoute et interviennent pour tenter d’apaiser les tensions. L’association ADAM, aide aux devoirs et va au-delà de l’animation du quartier des Moulins » (Le Hars, 2012).

 

L’Association ADAM a par exemple œuvré dans une action intitulée « Action de mobilisation et de communication au PRU des moulins ». Il s’agit de mobiliser les habitants suivant l’avancement des travaux (dans le cadre du PRU) à travers la sensibilisation à la participation des habitants pour les « cafés chantiers », mais aussi de jouer un rôle d’accompagnement dans le projet (en vue du respect du cadre de vie) et d’information sur le projet réalisés au sein du quartier. L’Association GALICE, de son côté, a par exemple mis en place récemment un atelier intitulé « récit de vie », dans le cadre de l’action « Histoire de migration », permettant aux résidents âgés de plus de 60 ans de témoigner et de se raconter. Une exposition a également été réalisée, ainsi qu’un atelier mémoire et un atelier culturel et social. Ces actions visent principalement non seulement à transmettre l’histoire et la mémoire, mais aussi pour lutter contre l’isolement et la discrimination des résidents, et pour renforcer le lien social et le bien-être de ceux-ci. Une autre action de l’Association GALICE est également intéressante à citer : « Migration et savoirs ». Il s’agit de créer une commission « autonome et dynamique résidant association et institutionnels » dans la mise en place d’ateliers d’échanges en termes de collectif de savoir et de savoir-faire. Cette action a comme principaux objectifs la réappropriation par les résidents d’un espace de vie collectif en permettant aux résidants de devenir bénévoles et acteurs de la vie de foyer (cela concerne plus spécifiquement le foyer « NICEA »), la coordination des actions collectives susceptibles de réduire les inégalités, et le renforcement de l’autonomie et du lien social au niveau du foyer pour motiver la participation des résidents.

 

En revanche, les comités de quartier (ou autres instances similaires) ne sont pas actifs et/ou ne sont pas reconnus par les habitants et les partenaires du territoire prioritaire comme ayant un potentiel de mobilisation citoyenne. Le comité de quartier des Moulins n’aurait pas été assez encouragé pour pouvoir mener des actions devant mobiliser un grand nombre d’habitants. Du côté institutionnel, les actions de mobilisation auprès des habitants ont été financées par la collectivité (Nice Côte d’Azur ou NCA) avant 2012-2013, puis par la Métropole Nice Cote d’Azur après cette période.

 

Il existe un groupe ayant le potentiel d’être le « préfigurateur » du Conseil citoyen dans le quartier des Moulins, formés d’associations et d’institutionnels regroupés au sein d’une plateforme « habitants ». Ce groupe travaille depuis plusieurs années dans le cadre de la Gestion urbaine de proximité. A côté de ce groupe, il y a lieu aussi de considérer deux foyers (regroupant un très grand nombre) d’habitants : les SAGNES et ADOMA NICEA qui se situent à la périphérie du quartier des Moulins. Depuis deux ans, il y a déjà une commission mobilisée par le Fonds de participation des habitants (FPH) pour mener des actions de mobilisation des habitants de la résidence ADOMA NICEA, dont la plupart sont des seniors qui sont à la retraite. En fait, l’Association GALICE réalise un travail de mobilisation en fédérant un nombre important d’habitants dont un noyau très mobilisé d’actions de mobilisations, de convivialité et de solidarité.

 

Ces deux groupes (la plateforme « habitants » et les résidents de ces foyers) sont désormais très engagés dans la mobilisation des habitants et sont mobilisables rapidement. Cela constitue un dispositif d’appui pour la mobilisation des habitants autours du Conseil citoyen, du moins au début (en tout cas, cela représente une solution de mobilisation pérenne des habitants). Il faut noter que dans le quartier des Moulins, les habitants, la politique de la ville et la gestion urbaine de proximité travaillent toujours ensemble notamment sur la question de la formation des habitants.

 

Tous ces éléments devraient alors être considérés dans la mise en place du nouveau dispositif de participation qu’est le Conseil citoyen.

 

3.3. Recommandations pour la mise en place du Conseil citoyen

 

Les recommandations qui seront émises concernent d’abord la mise en place du Conseil citoyen pour qu’il y ait véritablement une participation effective des habitants dans la construction des projets de ville. Mais, il y a lieu aussi de penser à un autre moyen complémentaire à ce dispositif participatif : le Fonds de participation des habitants (FPH).

 

3.3.1. Proposition pour la mise en place du Conseil citoyen

 

La mise en place du Conseil citoyen nécessite, en principe, un temps relativement long afin d’obtenir une véritable concertation des habitants. Dans ce cas, « forcer » cette mise en place dans un délai assez court, surtout pour se conformer au calendrier ministériel, pourrait avoir des effets très néfastes sur la participation habitante attendue avec ce nouveau dispositif participatif. Les expériences (pouvant être qualifiées de malheureuses ?) de tous les autres dispositifs ayant été mis en place jusqu’ici devraient mettre en garde les acteurs impliqués dans l’installation du Conseil citoyen contre toute précipitation stérile. De plus, il faut tenir compte et intégrer dans la mise en place de ce nouveau dispositif toutes les initiatives de mobilisation citoyenne existantes.

 

C’est dans ce contexte qu’il est proposé d’opter d’abord pour un groupe préfigurateur du Conseil citoyen. Autrement dit, plutôt que de se précipiter dans les procédures préconisées a priori par le cadre de référence en matière de composition du Conseil, il apparait plus optimal de s’appuyer dans un premier temps sur ce groupe préfigurateur pour assurer la plus large participation possible des habitants. Comme déjà évoqué plus haut, ce groupe est formé de la plateforme « habitants » (composée d’associations et d’institutionnels) et des foyers SAGNES et ADOMA NICEA).

 

Pour la composition de ce groupe préfigurateur, il est alors possible d’opter pour un volontariat de ces deux groupes (la plateforme et les foyers). En effet, les travaux qu’ils ont déjà effectués et la reconnaissance qu’ils ont préalablement obtenue en conséquence les rendent légitiment aux yeux des habitants ainsi qu’auprès des institutions. Ce groupe préfigurateur d’une quinzaine de membres pourrait être mis en place et opérationnel même en automne 2016. Un acte de volontariat à envoyer par courrier devrait permettre d’établir la liste effective des participants et de faire ensuite valider celle-ci par les instances responsables.

 

En termes d’accompagnement, deux périodes sont à considérer :

 

  • D’une part, pour la période jusqu’à la fin de l’année 2016, il est possible de recourir à un accompagnement mixte (dans le prolongement de la plate-forme habitant et des activités au sein de la résidence ADOMA) : l’accompagnement pourrait alors réalisé par des institutions (l’équipe politique de la ville, et l’équipe de la Gestion urbaine de proximité ou GUP) d’un côté, et par des associations (« Université du citoyen » qui se charge de la formation et l’accompagnement de la plateforme « habitants », GALICE, ADAM) d’autre côté.

 

  • D’autre part, après cette période (c’est-à-dire pour l’année 2016), une réflexion en vue d’un accompagnement « participation des habitants » global comprenant le FPH et le Conseil citoyen pourrait être mise en œuvre. Le choix de la structure porteuse pourrait se faire à l’aide d’un appel à projet.

 

Les étapes suivantes sont proposées pour la mise en place :

 

1ère étape – Groupe préfigurateur : s’appuyer sur la plateforme habitants

 

Pour le mois de septembre 2016, il convient de mettre en œuvre les actions suivantes :

 

  • Organiser une information collective pour la plateforme habitants ;

 

  • Proposer un acte de candidature en vue de la création d’un groupe préfigurateur.

 

2ème étape – Information collective pour le quartier des Moulins, les foyers SAGNES et ADOMA

 

Les actions relatives à cette étape se dérouleront toujours durant le mois de septembre 2016. Cela concerne :

 

  • Une information collective organisée sur le plan technique par le chef de projet, délégué du préfet ;

 

  • Une information collective organisée par différents relais :

 

  • Le groupe préfigurateur lui-même (la plateforme « habitants ») ;

 

  • Les services civiques (cf. infra) ;

 

  • Les associations et partenaires institutionnels du quartier ;

 

Les moyens nécessaires à cet effet sont de deux sortes :

 

  • D’une part, une formation effectuée par « l’Université du citoyen » et par le chef de projet, délégué du préfet à l’attention des habitants, des associations, et des partenaires du quartier ;

 

  • D’autre part, les supports de communication, dont entre autres :

 

  • Des Flyers réalisés par NCA ;

 

  • Le courrier et l’acte de candidature, toujours réalisé par NCA ;

 

  • La diffusion des informations à travers le « magazine des Moulins » (pour les numéros de septembre jusqu’au décembre 2016).

 

3ème étape – La constitution du Conseil citoyen

 

Pour les mois d’octobre et de novembre 2016, voici les actions à réaliser :

 

  • Réception des candidatures ;

 

  • Tirages au sort en présence d’une personne assermentée (service juridique NCA) :

 

  • Un tirage au sort organisé pour les membres de la plateforme, et

 

  • Un tirage au sort organisé pour les habitants des Moulins, des foyers SAGNES et ADOMA.

 

Pour se conformer à la loi concernant la parité homme-femme, il convient de prévoir deux urnes pour chacun des deux tirages au sort du collège « habitants », ainsi qu’une autre urne à réserver pour le collège « association ».

 

Pour les deux derniers mois de l’année 2016, il est question de décider de la forme que devrait prendre le Conseil citoyen. A titre de rappel des dispositions réglementaires, il faut décider du mode de gestion du Conseil citoyen, c’est-à-dire de la création de la structure porteuse de ce dispositif (création ad hoc ou accompagnement par une structure existante. D’où, trois options sont possibles :

 

  • Option 1 : Le Conseil citoyen s’associe à une association existante pour l’accompagner dans le domaine de gestion de l’animation ;

 

  • Option 2 : Le Conseil citoyen crée sa propre structure associative ;

 

  • Option 3 : Il faut rédiger un appel à projet pour la désignation de la structure en charge de l’accompagnement du Conseil citoyen.

 

Dans un souci d’efficacité (une meilleure mobilisation des habitants autour du nouveau dispositif participatif) et d’efficience (une économie de temps), il apparait plus optimal de recourir à une structure associative existante porteuse du Conseil citoyen. Cette mission pourrait être attribuée aux deux associations les plus actives en matière de mobilisation citoyenne dans le quartier des Moulins :

 

  • L’Association ADAM pourrait engager et maintenir une dynamique mobilisatrice ;

 

  • L’Association GALICE serait chargée de l’aspect technique, c’est-à-dire de l’appui méthodologique et en termes de formation.

 

Le poste « d’adulte relais » devrait être également créé, celui-ci ayant pour vocation essentielle d’assurer le lien social et la mobilisation constante des habitants. En effet, il n’y a pas encore de poste d’adulte relais au niveau du quartier des Moulins, alors que le cadre de référence pour le Conseil citoyen prévoit la possibilité de se servir des agents du « service civique » et des « adultes relais » pour relayer les informations. Seules les Associations ADAM, Uni’s cités, Côte d’Azur Habitat (CAH) disposent déjà des agents de service civique dans le quartier, et la politique de la ville pourrait se servir de ces derniers pour être des relais d’information auprès des habitants et des autres acteurs. Ce sont alors des personnes ressources.

 

Cette étape se terminerait par l’officialisation du Conseil citoyen (par un arrêté préfectoral et une délibération du bureau métropolitain).

 

4ème étape – Le lancement du Conseil citoyen

 

Il y a lieu de prévoir deux autres actions :

 

  • Une réunion officielle d’installation du Conseil citoyen en présence des élus et du préfet ;

 

  • Le lancement d’une formation des membres du Conseil réalisée par « l’Université du citoyen » (concernant le rôle, le fonctionnement, les méthodes de travail, la prise de parole, etc.).

 

Deux remarques importantes sont à émettre concernant les moyens nécessaires à la mise en place et au fonctionnement du Conseil citoyen :

 

  • D’une part, il faut prévoir un lieu dédié au fonctionnement du Conseil citoyen ;

 

  • D’autre part, la nouvelle structure requiert de moyens financiers, non seulement pour ses besoins de fonctionnement propre, mais également pour les projets qu’elle pourrait développer.

 

3.3.2. Le fonds de participation des habitants

 

En vertu du principe de la co-construction de la politique de la ville avec les habitants instituée par la loi du février 2014 (relative à la programmation et la cohésion sociale urbaine), la participation de ceux-ci doit être mise en œuvre à travers trois principaux éléments qui sont des actions et outils complémentaires et coordonnés :

 

  • Le conseil citoyen ;

 

  • La maison de projet, là où il y a des projets de renouvellement urbain ; et

 

  • Un Fonds de participation sur chacun des territoires qualifiés de prioritaires.

 

Les principaux objectifs de ce fonds sont :

 

  • La dotation de moyens aux habitants des quartiers prioritaires pour leur permettre de participer activement aux actions relatives à la vie de leurs quartiers ;

 

  • La construction de projets contribuant à l’animation du quartier ;

 

  • L’amélioration du cadre de vie ; et

 

  • L’obtention d’impact positif des moyens utilisés sur le quartier

 

Plus concrètement, le FPH devrait notamment permettre aux habitants non regroupés en association d’être intégrés dans la mobilisation pour leur quartier. Il s’agit d’inciter la construction de micro-projets par les habitants eux-mêmes concernant le développement de l’action collective, le dynamisme du quartier, et les liens sociaux. En principe, toute association ou encore tout groupe d’au minimum trois habitants non-constitué en association présentant un projet répondant à ces objectifs devrait être éligible et recevra une bourse. Le projet en question fera d’abord l’objet d’une appréciation par un jury.

 

Il faut préciser que les aides octroyées à travers le FPH ne doivent correspondre qu’aux dépenses à la réalisation du projet, c’est-à-dire qu’elles ne concernent pas le fonctionnement de la structure participante. D’ailleurs, l’action ainsi financée doit être des microprojets à faibles coûts et à but non lucratif. Le projet peut être de diverse nature, mais il doit systématiquement favoriser le lien social et les échanges sur le quartier (atelier, manifestation culturelle, manifestation sportive, fêtes, sorties, repas du quartier, etc.). Le projet doit être conforme au droit et respecte les principes de la devise républicaine et de laïcité (tout projet à caractère politique ou religieux sera systématiquement rejeté).

 

Sont désormais habilités à être porteurs de projet :

 

  • Les habitants adultes du quartier ;

 

  • Les jeunes mineurs qui devront autorisation parentale et munis d’une attestation d’assurance ;

 

  • Un habitant seul, exceptionnellement, à condition que son projet a un impact conséquent sur le quartier.

 

A propos du fonctionnement du FPH, un comité de pilotage composé des représentants des financeurs, des Etablissement Public de Coopération Intercommunale (EPCI), des associations « référentes » et d’habitants devrait se réunir une fois par an pour évaluer le dispositif et, éventuellement, revoir certaines orientations. En fait, les associations référentes diffusent les informations auprès des habitants et des autres services présents dans le quartier, en œuvrant avec les travailleurs sociaux de la CAF, les chefs de projet et les délégués du préfet. Prioritairement, les centres sociaux et espaces de vie sociale constitue les associations référentes. Mais, d’autres associations qui interviennent dans le quartier peuvent également jouer ce rôle, après approbation des financeurs.

 

En tout cas, en présence du Conseil citoyen, « la mise en place du FPH devra se faire en lien avec cette instance de concertation qui pourra éventuellement constituer le comité de gestion » (Familles de France, 2014).

 

Le dossier de demande de financement peut être demandé par le porteur de projet auprès de l’association référente qui l’enverra ensuite par courrier électronique (ou si besoin, sous forme de dossier imprimé). Le porteur de projet a la possibilité d’obtenir un accompagnement dans sa démarche d’élaboration (du projet) par un service, par une association, par un adulte-relais, et notamment par l’association référente. Tous les projets seront présentés au jury, et à l’issue de la réalisation des projets, leurs porteurs respectifs présenteront également au même jury le bilan de leurs actions.

 

Le jury qui tranchera sur l’éligibilité des microprojets devrait être constitué sur chaque territoire de :

 

  • Membres avec voix délibératives, il s’agit :

 

  • Des habitants ;

 

  • D’un représentant de la CAF ;

 

  • De l’association référente ;

 

  • Membres avec voix consultatives, dont :

 

  • Le délégué du préfet ;

 

  • Un représentant de l’EPCI (Métropole Nice Côte d’Azur) ;

 

  • Un représentant de la Commune (Nice / Saint-Laurent-du-Var) ;

 

Il est encore difficile d’estimer la variété des projets qui naitront avec ce dispositif de financement, bien qu’il existe objectivement des domaines pouvant être considérés comme prioritaires pour le quartier (lien social, emploi, éducation, culture, etc.). En tout cas, cela devrait encourager la créativité des habitants et leur implication davantage dans l’animation du quartier : cela renforce la proactivité des porteurs de projet d’une part, mais le projet lui-même devrait inciter l’ensemble de la population à être un acteur mobilisé et actif de son quartier. Cela ne peut que mobiliser les habitants autour du dispositif central de participation qu’est le Conseil citoyen.

 

Depuis longtemps, des projets ont été réalisés concernant le quartier des Moulins et ceux-ci ont certainement des impacts positifs dans la vie de la population. Mais, l’absence ou le manque de participation effective de la part des habitants dans la politique de la ville ne leur a pas permis l’appropriation de ces travaux réalisés qui apparaissaient seulement comme des actions unilatérales dont la correspondance aux besoins ressentis véritablement par les habitants est toujours remise en question. Le nouveau dispositif de participation à mettre en place, le Conseil citoyen, devrait donc être au-dessus de toute démarche descendante habituelle pour permettre aux initiatives locales de rencontrer les offres d’aides émanant de l’Etat. Partir du bas, en mettant en valeur les existants en termes de participation habitante, est alors une condition sine qua non pour recevoir la reconnaissance des habitants qui considèreront alors les travaux réalisés comme siens et qu’ils protégeront jalousement. Les travaux déjà en cours dans le quartier des Moulins, notamment dans le cadre du PRU, devraient alors être réintégrés dans les actions menées par le Conseil citoyen (en termes de pilotage et d’évaluation) pour garantir la pérennité des œuvres ainsi construites. Il y a lieu de conclure que « la participation des habitants implique de modifier les représentations à la fois des élus, des professionnels de la politique de la ville et des habitants eux-mêmes, de bouleverser les modes d’organisation et d’encourager la capacité d’initiative des habitants des quartiers et leur pouvoir d’agir »[5] (ACSE, 2013).

 

Conclusion

 

La participation habitante est un concept qui insiste sur la nécessité d’une appropriation effective par les habitants des projets qui leur concerne afin qu’ils manifestent par la suite leur reconnaissance, leur soutien et leur protection vis-à-vis des travaux ainsi réalisés. Néanmoins, de nombreux mouvements issus des initiatives locales montrent, non seulement le souhait des habitants de participer effectivement aux actions publiques qui ont des impacts substantiels dans leur vie, mais également qu’il y a de sérieuse lacune sur ce point. Les expériences du passé ont d’ailleurs révélé l’existence permanente de deux mouvements empruntant une voie parallèle mais allant dans les sens contraires. Le premier, descendant, provient de l’Etat qui évoque systématiquement dans les discours des élus la nécessité théorique de faire participer les habitants à la construction des projets de ville. Mais, en pratique, les actions et moyens que l’Etat utilise même pour concrétiser ces discours ne sont pas à la hauteur de ce qu’exige une véritable participation. Cela se réalise au plus, et très souvent, par une « injonction participative » c’est-à-dire une participation imposée pour faire croire que les habitants sont intégrés à l’élaboration des contrats de ville. Le deuxième mouvement, ascendant, émane des habitants à travers des initiatives souvent informelles, d’un savoir qualifié de « profane », un mouvement qui se heurte presque systématiquement à la non-reconnaissance de la part des instances représentatives. Tout cela illustre une difficulté de l’offre de participation à rencontrer la « vraie » demande en la matière. Tous les dispositifs de participations institués jusqu’alors rentrent presque tous dans cette impasse.

 

Une autre opportunité de changer le cours de l’histoire est néanmoins ouverte avec la loi de programmation et de cohésion urbaine de février 2014 qui tient compte des fortes critiques faites sur les points faibles des actions jusque-là réalisées pour la participation des habitants à la politique de la ville. L’essentiel des moyens envisagés pour une réelle « participation habitante » converge vers un tout nouveau dispositif participatif : le Conseil citoyen. Mais, il s’avère que la mise en place de celui-ci est délicate, car il existe toujours un risque pour le rejet de ce dispositif par les habitants.

 

Pour le quartier des Moulins, de la ville de Nice (Commune de Saint-Laurent-du-Var), l’analyse des existants montre rapidement qu’il y a des initiatives locales qui devraient même être le socle de base pour la mise en place du Conseil citoyen. Il faudrait alors, non pas d’intégrer tout simplement ces initiatives dans la composition de la nouvelle structure à créer, mais surtout de partir de celles-ci qui apparaissent comme des véritables expressions habitantes et ayant eu la reconnaissance de la population locale dans leurs actions. Concrètement, ces initiatives sont l’œuvres de quelques associations locales très proches de la population et ayant déjà travaillé largement dans la mobilisation des habitants. Cela conduit même à suggérer de partir d’un groupe préfigurateur (du Conseil citoyen) en s’appuyant sur deux groupes très engagés dans la mobilisation citoyenne. Pour le choix du mode de gestion du Conseil citoyen, Il est aussi recommandé d’opter pour une structure associative existante porteuse ce nouveau dispositif participatif. Cette mise en place et les actions de ce dernier devront aussi soutenir et renforcer par le Fonds de participation des habitants (FPH) promouvant des micro-projets qui favorisent d’ailleurs la participation habitante. Il faut reconnaitre une limite de la présente étude de cas qui ne s’appuie pas sur des expériences probantes de réussites de la mise en place car il est encore trop top pour évaluer la performance du nouveau dispositif à intégrer véritablement les habitants dans l’élaboration des contrats de ville. Désormais, cela constitue une piste de recherche pour approfondir la présente étude : apprécier l’efficacité/performance du Conseil citoyen à mobiliser les habitants dans la politique de la ville.

 

 

Bibliographie

 

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Lois citée dans le document

 

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Loi n°2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité (dite loi Vaillant)

 

Loi n°2003-710 du 1 août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine (dite loi Borloo)

 

Loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement (dite loi Grenelle II, et parfois appelée loi ENE)

 

Loi n°2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine (dite loi Lamy)

 

[1] La loi n° 2014173 du 21 février 2014.

[2] Article L121-1 du code de l’environnement. Modifié par la loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 – art. 246.

[3] Loi 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.

[4] Maruszak (2015) cite par exemple la ville de Savigny-le-Temple qui n’offre que trois informations de manière succincte : les noms des quartiers concernés par la mise en place du Conseil citoyen, « une » phrase courte définissant ce qu’est le Conseil citoyen mais ne donnant aucun détail, une autre phrase qui indique que ce Conseil est mise en œuvre dans le contrat de ville (http://www.savigny-le-temple.fr/content/participez-aux-conseils-citoyens).

[5] Note méthodologique du 15 novembre 2013 sur la participation des habitants à l’attention des sites préfigurateurs des contrats de ville.

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