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Quels avantages tirés de la multibancarité des entreprises face à l’octroi de crédit ?

Problématique : Quels avantages tirés de la multibancarité des entreprises face à l’octroi de crédit ?

Introduction

 

            Malgré l’apparition considérable des actions de désintermédiation constatées depuis les années 80, les intermédiaires sur le marché financier ont toujours des rôles prépondérants dans le système financier mondial et surtout dans les démarches de financement de l’économie.

 

En effet, l’année 1998 en France, le taux d’endettement au niveau des intermédiaires financiers étaient de 80 %, dont 45 % des crédits octroyés aux entreprises venaient des institutions bancaires. (Nakamura, 1999) En ce sens, les crédits émanant des banques ont une place très importante dans le financement des entreprises, et surtout celles qui ne peuvent accéder au marché financier, tel que les PME.[1]

 

Par ailleurs, les dirigeants d’entreprise décrivent souvent une relation « passionnée » avec les banques, sans doute du fait que ces dernières sont incontournables dans le développement économique des entreprises. Cependant, malgré le fait que beaucoup d’entreprises se disent satisfaites des services et de prestations fournies par les banques, surtout par rapport à l’accès plus facile aux crédits, il est indéniable de constater qu’il y a un traitement asymétrique des clients notamment, en matière de financement. Mais également, beaucoup d’entreprises affirment leur regret quant à la remise en cause de l’aspect relationnel avec l’institution bancaire. Un aspect relationnel qui unissait, cependant, la banque et l’entreprise sur le long terme.

 

À cet égard, avec des besoins de plus en plus conséquents et des enjeux de développement plus accrus, les entreprises ont de plus en plus d’attente vis-à-vis de leurs banques principales. Néanmoins, force est de constater que tous les besoins peuvent ne pas être satisfaits par une seule institution bancaire malgré la profitabilité d’un projet. D’où, la multibancarité des entreprises. Une démarche qui est censée répondre à ces besoins.

 

Pourtant, devant un marché où l’opacité des informations cause l’asymétrie d’information, la différence de traitement dans l’octroi de financement bancaire engendre la multibancarité des entreprises. En effet, malgré le fait qu’une entreprise opte pour une relation avec une banque, l’opacité des informations peut engendrer un comportement négatif de la banque dans l’octroi de crédit. D’où, la multibancarisation de l’entreprise pour subvenir à ses besoins.

 

En soi, cette multibancarité n’est pas tout à fait nuisible pour la banque principale du fait qu’elle ne fait pas perdre totalement le client. Elle pourrait même apporter des avantages conséquents si cette multibancarité est exploitée en vue de fidéliser le client. C’est dans l’optique de travailler sur ce point que nous avons soulevé notre question de départ : quels avantages tirés de la multibancarité des entreprises face à l’octroi de crédit ?

 

En effet, cette question nous semble pertinente pour, d’un côté, justifier la multibancarité des entreprises et d’autre part, afin de trouver les points qui constituent des atouts à cette pratique en vue de fidéliser le client. Par ailleurs, ce sujet nous semble pertinent, car dans la relation banque-entreprise, son optimisation est généralement favorisée par les financements à crédit de la banque.

 

En ce sens, le choix, mais aussi la fidélité d’un client-entreprise peut dépendre de la relation qu’elle a avec sa banque et surtout de la disponibilité et de l’accès au crédit.

 

Ainsi, afin de développer notre travail et apporter une réponse à notre question de départ, notre analyse se concevra sur trois parties. Dans la première partie de notre travail, nous allons voir les notions fondamentales concernant le financement des entreprises et la relation avec les banques.

 

À travers cette première partie, nous pourrons ainsi définir les types de financements d’entreprise et les établissements de crédit. Nous allons également définir les relations existantes entre la banque et l’entreprise pour finir avec les risques perceptibles dans ce type de relation.

 

Dans la deuxième partie du travail, nous allons voir deux aspects de financement des entreprises, à savoir, la monobancarité et la multibancarité. Ce qui nous permettra de différencier ces deux types de financements et de connaitre les principes de leur choix par les entreprises voulant s’acquérir d’un crédit bancaire.

 

Ce qui nous amènera à la troisième partie qui traitera de la fidélisation du client bancaire compte tenu des avantages dans l’octroi de crédit. Une partie qui nous permettra de ce fait de déterminer les avantages des banques face à la multibancarité de leurs clients et des déterminants qui peuvent assurer la fidélité de ces derniers.

Première partie : Revue des notions de base : financement des entreprises et relations bancaires

  • Le financement des entreprises

 

La durée de vie limitée des produits de consommation, l’évolution technologique ainsi que la versatilité et l’exigence de plus en plus pointue des consommateurs amènent les entreprises à rechercher continuellement une adéquation entre la qualité de leurs produits et la demande des clients. La poursuite de ces objectifs oblige donc, dans ce contexte, les entreprises à assurer la disponibilité de leurs ressources. Les charges découlant des activités de l’entreprise poussent cette dernière à rechercher des solutions de financement. Pour être financée, l’entreprise peut avoir deux recours : l’autofinancement, qui est un moyen de financement interne. Le second recours consiste à contracter des dettes, ou bien à augmenter le capital. Ces derniers forment les sources de financement externes. Faire appel à l’un et à l’autre financement détermine, d’une phase à l’autre, la structure financière de l’entreprise.

  • Les différents types d’établissements de crédit

Si l’entreprise décide d’adopter un financement en ayant recours à l’endettement, elle se rapprochera d’un ou plusieurs établissements de crédit.

La France dispose de 589 établissements de crédit agréés au début de l’année 2012[2]. Ils sont répartis dans deux catégories :

  1. Les établissements de crédit à vocation générale

Ce type d’établissement est habilité à distribuer des crédits, à recevoir des fonds de la part du public et enfin, à gérer et à émettre des moyens de paiement.

Cette catégorie regroupe les banques classiques (à l’instar de BNP-Paribas ou  la Société Générale, ou encore LCL, etc.), ainsi que les banques coopératives et mutualistes (le Crédit Mutuel, le Crédit Agricole, la BPCE – née en juillet 2009 de la fusion de la Caisse d’Epargne et de la Banque Populaire).

On dénombre en France 309 établissements de crédit à vocation générale.

  1. Les établissements de crédit spécialisés

Comme leur nom l’indique, ces établissements sont surtout habilités à effectuer des opérations financières d’un caractère spécial. Trois sous-catégories se distinguent dans cette rubrique : les sociétés financières, les caisses de crédit municipal et enfin les institutions financières spécialisées.

  • les sociétés financières

Ce type d’établissement bancaire ne peut abriter des comptes de dépôt à vue, et doit recevoir des comptes ayant un minimum de deux ans de terme. Leur domaine de spécialité concerne le crédit-bail immobilier et mobilier, le crédit à la consommation, le crédit aux entreprises, les cautions et garanties, l’affacturage,…

Les sociétés financières sont généralement des filiales d’établissements bancaires à caractère généralistes. En 2012, 277 sociétés financières sont recensées.

A titre d’exemple, Cetelem est spécialisé dans le crédit à la consommation, et c’est une branche de la BNP.

  • les caisses de crédit municipal

Ce sont des établissements publics locaux. Ils se sont spécialisés dans les prêts sur gages corporels et monopolisent le secteur. En France, il en existe 18.

Notons que le prêt sur gage corporel se définit comme le fait de disposer d’une somme d’argent en échange du dépôt d’un objet ayant de la valeur.

  • les institutions financières spécialisées

L’Etat confie aux trois organes qui les composent une mission d’intérêt public permanente.

La première institution, la Caisse de garantie du logement locatif social contribue à prévenir les difficultés financières et à redresser les sociétés d’économie mixte qui participent à des activités locatives sociales, ainsi que les organismes d’habitations à loyer modéré. Des concours financiers permettent à cette institution d’assurer sa principale mission.[3]

La seconde, l’Agence française de développement ou AFD, qui est une institution financière publique, assure le soutien économique, participe à la lutte contre la pauvreté et contribue à la valorisation des biens publics mondiaux de l’Outre-mer, des pays émergents et des pays en développement.

Enfin, Euronext Paris est l’organe de gestion de la Bourse de Paris. L’organisation et le fonctionnement de cette dernière relèvent donc de cette entreprise. Par ailleurs, cette institution fait en sorte que les investisseurs disposent de toutes les informations nécessaires pour leurs activités.

  • La théorie du financement hiérarchique

Dans le processus par lequel une entreprise se dote de moyens financiers pour ses investissements, une hiérarchie a été établie : la « pecking order theory », pensée par Myers et Majluf[4]. Sur le premier palier, nous distinguons la capacité de l’entreprise à s’autofinancer. Puis, l’entreprise peut recourir à l’endettement pour se financer. Et enfin, elle peut également disposer des capitaux propres.

Le financement hiérarchique de Myers (1984) stipule que les dirigeants d’entreprise vont diversifier leurs sources de financement et en prioriser certaines par rapport à d’autres, et ceci selon les périodes.

  1. Le financement interne

C’est ainsi que la priorité sera donnée au financement interne. Il s’agira du recours à l’autofinancement, ou à l’utilisation des liquidités en excédent dans la trésorerie (également appelée « financial slack »).

  1. Les dividendes

Les dirigeants peuvent également financer leur entreprise en ajustant la politique de dividendes. Cette opération se base sur une analyse des investissements combinée à l’étude de la volatilité.

  1. L’émission de titres

Les entreprises peuvent, en dernier lieu, recourir à l’émission des titres les moins risqués, dans un premier temps. Il s’agira par exemple d’une dette comportant peu de risques et dotée de garanties, ou bien de titres hybrides, ou même de dette risquée.

Dans ce contexte, il apparaît que ce sont les entreprises qualifiées de plus rentables qui ont recours aux dettes[5].

  • La théorie de Myers et le financement des entreprises

Un bref résumé des études et théories liées au financement hiérarchique des entreprises font ressortir que les entreprises donnent la priorité au financement interne, avant de faire appel au financement externe. Et lorsque les dirigeants décident d’user d’un financement externe, ils donnent la préférence au financement par les dettes comparé au recours aux fonds propres[6].

Il peut donc en être déduit que les dirigeants décident au final d’opter pour une structure financière dans laquelle les dettes sont prédominantes, ceci dans le but de continuer à garder le contrôle de leurs entreprises. Cette stratégie est largement adoptée par les dirigeants de PME, qui sont, selon Saint-Pierre et Bahri[7] (2003), vulnérables à la perte de pouvoir qu’entraîne le financement grâce aux fonds propres.

 

  • L’octroi de garantie

Trois études se sont penchées sur le lien entre l’octroi de garantie et le fait d’obtenir un financement bancaire pour les entreprises : celle de RAM[8], de Bukvic et Bartlett[9], et enfin celle d’Inderst et Muller[10].

Plusieurs banques posent comme condition sine qua non à l’obtention de crédit l’action d’offrir ses biens comme garantie. Les risques de pertes monétaires sont ainsi réduits car les établissements bancaires pourront alors faire prévaloir leur droit de liquidation des actifs matériels si l’emprunteur présente un défaut de paiement.

Sur un autre point, la variable ratio de dette totale / actif total présente un effet positif sur la chance pour une entreprise de voir s’attribuer un financement bancaire[11]. C’est-à-dire que les probabilités d’obtenir un prêt sont proportionnelles à l’importance de l’endettement d’une entreprise : plus important sera l’endettement, plus forte sera la chance d’être financé.

Cette conclusion a de quoi surprendre ; en effet, St-Pierre a mené une étude[12] selon laquelle le risque financier de l’entreprise pourrait être fortement influé par le financement par dette. Ceci peut s’expliquer par les charges que l’endettement engendre. Par ailleurs, le contrat de crédit oblige les entreprises emprunteuses au respect des engagements prévus. Dans le cas contraire, ainsi qu’il a été mentionné plus haut, la banque peut exiger que l’entreprise soit liquidée afin de rembourser les dettes contractées. Behr et Güttler corroborent cette thèse grâce à une étude qu’ils ont effectuée en 2007[13].

  • La relation de crédit : point théorique

Deux acteurs sont au centre du marché bancaire : les établissements de crédit et les particuliers ou les entreprises. Les objectifs de chacun de ces acteurs ne convergent pas toujours vers le même point. Si l’établissement de crédit souhaite optimiser le profit moyen espéré, celui qui emprunte quant à lui, accroître le rendement espéré grâce à l’investissement.

Entre ces deux acteurs s’établit ce qui est appelé une relation d’agence. Cette relation est définie comme un contrat pour lequel une personne (l’agent) est engagée par une autre ou plusieurs personnes (le principal) afin d’opérer en son nom une activité quelconque qui requiert du principal qu’il délègue à l’agent un certain pouvoir de décision[14].

Les bénéfices potentiels que les deux acteurs peuvent retirer de cette coopération se trouvent réduites à cause des divergences de buts. De ce fait, cette relation génère des conflits, qui eux-mêmes génèrent des coûts. Ces derniers se nomment coûts de transaction et coûts d’agence.

Les conflits générés par cette relation d’agence peuvent trouver leur origine dans la manière d’allouer les décisions prévalant le système de création de valeurs. Les antagonismes peuvent également venir de l’attribution de la valeur créée.

Ainsi, les conflits s’expliquent par l’asymétrie d’information, l’opportunisme de l’agent et du principal, et enfin par l’incertitude[15].

  • L’asymétrie de l’information

Lorsque l’emprunteur dispose de plus d’infirmations que n’en détiennent  les bailleurs sur son entreprise, nous sommes face à une asymétrie d’information, ainsi que le définit Fraser et al. (2001)[16]. Les dirigeants ont une meilleure connaissance de leur état financier ainsi que du contexte d’affaires et des opportunités qui sont à leur portée, comparés aux bailleurs. L’asymétrie d’information a lieu quand le dirigeant choisit de ne pas mettre à la disposition du prêteur des données sur son entreprise, pour plusieurs raisons[17]. Le risque moral ainsi que le risque de non sélection est accru par cette situation informationnelle.

Afin de supprimer cette asymétrie, les établissements bancaires réclament donc divers documents et informations relatives aux entreprises. Et ils leur font également subir une évaluation critique (pas toujours positive) de la faible quantité et de la qualité moindre des informations que les dirigeants leur fournissent[18].

  1. La quantité de l’information

Saint-Pierre (1999) avance que le manque de compétences, l’ignorance des procédures demandées, la fiscalité, la concurrence ou encore le coût de la production peuvent constituer autant de raisons qui poussent les dirigeants d’entreprise à ne pas lever le voile sur la totalité des informations qu’ils possèdent sur leur entreprise quand le banquier le leur demande.

Sur la liste des documents  les plus demandés aux PME par les banques européennes figurent le compte de résultat et le bilan. Il est pourtant constaté que ce type d’information n’est fourni que par 60% des entreprises[19].

La même étude met également en lumière le fait que les dirigeants d’entreprise remettent aux établissements bancaires des rapports financiers qui relatent de leurs activités passées. Or, les banques doivent disposer, afin d’évaluer la capacité de remboursement des entreprises et pour apprécier les flux monétaires, de l’information financière future.

Précision est également donnée sur le caractère non complet de l’information fournie par les entreprises, surtout celles se rapportant à l’information stratégique. Pour ce qui est de l’information informelle (compétences de l’entrepreneur, rapport des PME avec les autres créanciers, avec les autres partenaires, …) le manque de notoriété des PME et leur taille modeste la rendent peu disponible.

  1. La qualité de l’information

Une information précise et fiable n’est pas facile à obtenir de la part des entreprises, surtout des PME. En effet, les audits sont assez rares concernant leur information financière. Wynant et Hatch[20] (1991) ont établi que sur 1539 dossiers de crédits touchant les PME, presque la totalité (95% exactement) ne fait l’objet d’aucune vérification. L’Observatoire européen des PME quant à lui a mentionné que l’information donnée par les PME présente moins de sophistication, de structure et est validée de moindre manière comparée à celle mise à disposition par des entreprises de plus grande envergure[21] (2003).

Fasano et Gfeller[22] (2003), en évaluant les défis et les difficultés que rencontrent les établissements bancaires dans leur rapport avec les PME ont établi que les documents relatifs à leur demande de crédit présentent un flagrant défaut de qualité. Et ce manque de qualité est à l’origine d’un grand blocage dans l’évaluation de leur dossier. Un pourcentage élevé des banquiers interrogés dans cette même étude (92%) ont observé que cette défaillance de qualité constitue pour eux des problèmes considérables ou de grands défis.

Il en ressort que les banquiers s’accordent à dire que l’information financière est primordiale : sur un score total de 5 points, ils ont noté l’importance de cette dernière à 4,3 concernant l’information future, et à 4,1 pour l’information passée. Comparée à ces données, ils ont évalué à 2,8 la qualité des informations présentées par les dirigeants d’entreprise[23].

  1. L’opportunisme des acteurs de la relation d’agence

L’opportunisme est le facteur qui explique principalement les coûts de transaction. Il s’agit de l’action de rechercher son intérêt propre, de l’effort fourni et évalué afin de déguiser, tromper, choquer, désinformer, omettre, ou encore induire un autre agent en erreur[24].

Ce comportement opportuniste est considéré comme une stratégie, et il est pensé par Williamson comme inhérent à la nature humaine[25].

En effet, l’agent use de tout et est uniquement motivé par des intérêts purement individuels, sans craindre de léser l’autre acteur. Il n’hésite pas en cela à avoir recours à la ruse, à la tricherie, au vol, au mensonge, à la mauvaise foi ou à tous les autres subtils procédés de duperie[26].

  • L’incertitude

            L’incertitude, comparée au risque, est définie par Knight comme une caractéristique primordiale de situation[27]. Dans ce contexte, l’individu constate que les conséquences de ses décisions (déjà arrêtées ou no encore prises) sont facteurs d’éléments externes qui ne peuvent être appréhendés et prévus avec certitude[28].

Cette cause de conflit entre agent et principal renvoie aux situations qui ne peuvent être mesurées de manière exactes. Le risque peut par contre faire l’objet de probabilités et de calculs dont les spéculations seront « objectives ». Le risque a lieu au moment où il est possible de la quantifier.

  • Les risques et le financement bancaire

La banque, quand elle joue son rôle de prêteur, est tenue de ne pas prendre de risques. Elle n’accordera donc les fonds que si l’emprunteur est apte à rembourser le prêt qu’il contracte, et cette capacité se devra d’être élevée. Le principal souci de la banque prêteuse est donc de conserver le capital. Elle aura également pour mission de maintenir la capacité de remboursement de l’entreprise emprunteuse. Ceci ne va pas de soi car l’entreprise comporte des risques qui pourraient l’amener à ne pas honorer ses engagements envers la banque.

Quant aux dirigeants d’entreprise, ils considèrent le risque comme un élément naturel faisant partie de leur activité quotidienne et qui constitue chacun de leur projet. Cet état d’esprit est décrit par Amour et Gasse[29] (2000) qui qualifient les dirigeants d’êtres pleins de passion prenant des risques mesurés.

En ayant des manières de voir dissemblables, banque et entreprise font naître des conflits qui engendrent une évaluation erronée du risque et de l’importance de ce risque. La banque présente une nette tendance à contrôler le risque en se focalisant sur le rendement. Par contre, l’entreprise tient le contrôle du rendement par un balisage du niveau de risque[30]. La différence des informations et des perceptions des deux parties est ainsi fortement accentuée, engendrant des tensions dans leur rapport.

  1. Le risque d’anti-séléction

Cette situation  est observée lorsque des entreprises emprunteuses qui peuvent générer un haut risque se voient octroyer des crédits selon les mêmes termes que des sociétés qui représentent un risque de moindre importance. Ceci est le fait d’une évaluation comportant peu d’exactitude concernant le niveau de risque et de compétences des emprunteurs.

D’une part, le risque d’anti-sélection est facteur du fait que l’emprunteur est un grand inconnu pour le financeur. Et d’autre part, quand l’emprunteur remplit les demandes de financement, il n’accorde pas, pour une raison ou pour une autre, assez d’importance à la qualité de l’information qu’il fournit.

Quand les prêteurs ne disposent pas d’informations suffisantes ou précises sur les entreprises qui empruntent, ils peuvent être amenées à choisir des clients de manière inadéquate, ou bien être induites en erreur et faire bénéficier à toutes les entreprises des conditions de prêts et un taux d’intérêts semblables. Ce fait tend, d’un côté, à inciter les emprunts risqués et, de l’autre, à démotiver les entreprises solvables.

Les situations évoquées élèvent les coûts des crédits accordées aux entreprises et accroissent le risque de crédit. Ceci participe à amoindrir l’offre de financement aux entreprises. Et lorsque l’emprunt est accordé, les exigences liées aux crédits sont perçues comme étant trop sévères.

 

  1. Les types de risque liés à la capacité de remboursement

Le premier type de risque est le risque de crédit. Le second groupe rassemble les risques inhérents aux activités d’une firme. Pour ce second type, cinq sous-catégories ont été recensées.

  • Le risque global

Il est facteur des caractéristiques spécifiques de l’entreprise (PME). Ces caractéristiques peuvent avoir une influence sur l’ensemble des activités et accroître le risque total. Nous pouvons citer comme caractéristiques propres à chaque entreprise l’importance de sa taille, la phase de croissance dans laquelle elle se trouve…

  • Le risque de gestion

Celui-ci est associé aux activités de gestion. Ces dernières ont un impact sur la performance de la société. Parmi ces activités, citons les activités liées à la planification, la circulation de l’information au sein et entre les différents services ainsi que leur gestion…

  • Le risque technologique et opérationnel

Ce risque est en lien avec l’approvisionnement, la gestion et la transformation des stocks.

  • Le risque commercial

Ce quatrième risque concerne les contextes qui ont une incidence sur l’entrée d’argent et le chiffre d’affaire de l’entreprise[31].

  • Le risque concernant l’entrepreneur

            Ce dernier risque, enfin, fait référence au niveau de compétence du dirigeant d’entreprise. Il est également lié à l’étendue de son expérience en matière de gestion d’entreprise et à la profondeur de ses connaissances en affaires[32]. L’appartenance à l’un ou à l’autre sexe prédisposerait également l’entrepreneur à des risques[33].

  1. Le risque moral et le risque de crédit

Parmi les nombreuses conséquences qu’entraînent les asymétries d’information entre fournisseurs de capitaux et dirigeants d’entreprise, nous pouvons citer les conflits d’intérêts et l’adoption de stratégies peu optimales. Ces dernières se traduisant généralement par un surinvestissement ou son contraire.

La difficulté de mesure du risque moral et la capacité d’anticipation du risque d’anti-sélection par les banquiers figurent également dans la liste des suites d’une asymétrie informationnelle.

  • Le risque moral

            Les emprunteurs peuvent ne pas respecter les engagements stipulés dans le contrat de prêt : c’est le risque moral. Ce risque peut s’expliquer par le fait que les chefs d’entreprise emploient les fonds du prêt pour d’autres projets comportant plus de risques dans l’espoir d’obtenir un rendement plus intéressant.

Ils peuvent également allouer le crédit obtenu à des actions plus urgentes ou même à de nouveaux projets[34]. Parfois, le risque qu’ils utilisent les fonds du prêt pour des exigences personnelles est présent[35].

  • Le risque de crédit

Le risque de crédit s’en trouve ainsi augmenté pour les fournisseurs de capitaux. La banque peut alors exiger des garanties personnelles de la part des dirigeants-propriétaires.

Ceci est entrepris afin de réduire le risque. Mais cette demande de garantie constitue un obstacle supplémentaire pour l’octroi de crédit bancaire par les PME, surtout pour les entreprises nouvellement créées.

 

 

Deuxième partie : 

  • Financement des entreprises : la monobancarité

 

  • Le concept de banque principale et monobancarité

            Pour aborder la monobancarité, il sera tout d’abord nécessaire d’expliciter la notion de banque principale, avant de définir puis de passer en revue les théories existantes sur cette relation particulière entre un établissement bancaire et l’entreprise.

  • La banque principale

            La « main bank » ou banque principale est un concept qui vient du Japon. Il s’agit là de la banque actionnaire majoritaire et principale créancière de l’entreprise partenaire, si on se réfère aux contraintes imposées par la réglementation bancaire quant à la prise de participation dans les firmes.

Dans le système financier allemand, la banque principale présente le même statut que la Hausbank ou « banque-maison ». Il est question de l’établissement bancaire partenaire de l’entreprise durant la totalité de son cycle de vie. Cette banque accompagne la société en étant actionnaire, créancier, conseiller et propose au client un panel de services très élargi : opération sur titre, garantie, escompte, crédit, virement, etc.[36]

La littérature française pour sa part insiste principalement sur les avantages en termes d’informations que la banque principale pourrait avoir à sa disposition concernant l’entreprise, comparées à celles dont disposent les autres créanciers d’une firme.

La littérature qui prévaut dans l’Hexagone souligne également la possibilité d’une implication de la banque principale dans l’actionnariat de l’entreprise[37].

  • La monobancarité

                        La monobancarité est, pour entreprise, définie comme le fait d’entretenir une relation financière exclusive avec un seul établissement bancaire.

Quand il s’agit de régime de financement, les relations sont évaluées sous l’angle transactionnel ou relationnel. Dans le cas d’une monobancarité de l’entreprise, c’est le côté relationnel qui prévaut sur le transactionnel.

En effet, la monobancarité d’une entreprise lie cette dernière à sa banque en tant que banque de proximité ou encore de banque à l’engagement. Petersen et Rajan[38] parlent d’une relation de clientèle particulière qui s’intensifie au fil du temps.

Cette relation de clientèle bancaire présuppose donc que de nombreuses interactions entre l’entreprise et sa banque permettent à cette dernière de disposer d’informations de qualité et de données confidentielles sur l’entreprise partenaire[39].

  • Les théories existantes sur les conditions de crédit et monobancarité

Dans la relation de clientèle monobancaire, les deux acteurs ont des attentes différentes. Si la banque recherche avant tout l’assurance du remboursement du crédit qu’elle a accordée, l’entreprise quant à elle désire s’assurer que dans le futur, ses conditions d’accès au crédit soient facilitées.[40] Quand une telle relation s’établit, la banque dispose au final d’un avantage informationnel non négligeable.

  1. Rationnement de crédit et monobancarité

Roosa et Hodgman avancent que le financement monobancaire pourrait prémunir l’entreprise contre un rationnement du crédit[41]. La banque, effectivement, a développé une somme d’informations subjectives concernant l’entreprise[42], qui lui permettrait de ne pas réduire l’emprunt demandé.

  1. Asymétrie d’information et monobancarité

La banque peut également, grâce à la relation clientèle monobancaire, réduire considérablement les coûts engagés dans la collecte d’informations sur l’entreprise emprunteuse, et ainsi amoindrir les asymétries d’information.

Et quand une asymétrie informationnelle est néanmoins présente, le contrôle du risque est plus aisé et son évaluation améliorée grâce à la monobancarité[43].

  1. Effet de réputation et monobancarité

Par ailleurs, quand une entreprise est nouvellement créée, elle ne bénéficie pas encore d’une « réputation » et sa banque ne dispose pas d’informations recueillies « de l’extérieur » la concernant.

De ce fait, quand elle désire emprunter de l’argent pour financer ses activités, l’entreprise doit contracter les prêts avec des taux d’intérêts conséquents et des garanties. Mais plus le temps avance, moins cette entreprise déjà « établie » usera de garanties importantes. Les premières réussites permettront à la firme d’accéder plus facilement au crédit[44].

Ainsi, l’effet de réputation entraine l’entreprise à être plus encline à entreprendre des projets d’investissement qui servent mieux les banques contre les problèmes de risque moral[45].

  1. Capture informationnelle et monobancarité

Il est convenu que la relation de clientèle exclusive permet d’annuler les problèmes que pose le risque moral inhérent aux agissements de l’emprunteur. Mais du côté du prêteur, les faits démontrent que la relation exclusive entre un client et un établissement bancaire génère un risque moral en lien avec le comportement de la banque[46].

La « capture informationnelle »  ou « hold up informationnel » est ce pouvoir de monopole qu’exerce le créancier sur l’emprunteur. Elle consiste à appliquer un taux d’intérêt important. Il s’agit en fait pour le prêteur d’extraire une sorte de « rente informationnelle ».

Mis à part ce hold-up, Komai a abordé le refinancement systématique et le problème qu’il engendre. Il s’agit en substance de la contrainte budgétaire atténuée ou « soft-budget constraint »[47].

  • Les services bancaires proposés dans le cas d’une offre / demande de prêt pour un client monobancaire

 

  1. L’évaluation de crédit pour le financement bancaire

Chaque établissement bancaire possède son propre modèle d’évaluation de crédit. Chaque banque accorde donc une importance plus ou moins forte à chacun des critères d’évaluation qui constitue son modèle.

Le point commun à toutes les banques se situe néanmoins, dans l’évaluation du risque de défaut de paiement des emprunteurs. Cette analyse vise à amoindrir autant que faire se peut le risque de pertes financières pour la banque. Seront donc pris en compte tous les risques qui influent sur l’aptitude d’une entreprise à rembourser son emprunt dans les délais. Et ces risques déterminent les décisions de financement d’un établissement bancaire.

  • Financement des entreprises : la multibancarité

 

  • La multibancarisation

A la fin de l’année 2012, 78,4 millions de comptes bancaires sont dénombrés sur le territoire français. Ce nombre présente une croissance infime de l’ordre de 1% chaque année. L’on estime que ce chiffre avoisine les 80 millions dans le courant de l’année 2014, dont à peu près 10 millions appartiendraient aux entreprises[48].

Les données recueillies fin juillet 2014 émanant de l’administration fiscale française parlent de 92 millions de comptes courants bancaires ainsi que de comptes actifs de particuliers, notamment des comptes chèques postaux.

Une cinquantaine de millions d’individus disposent, en 2014, d’un compte bancaire ou plus (soit 99% des Français ayant 18 ans et plus). La Fédération Bancaire Française, quant à elle, estime que 23% de la population française sont titulaires d’un compte courant bancaire dans plusieurs établissements.

La multibancarisation est définie comme « le phénomène par lequel un individu est client de plusieurs établissements bancaires »[49].

La tendance à disposer de plusieurs comptes bancaires a connu un grand essor depuis les années 1990. Les études effectuées en 2004 ont permis d’estimer que 40 à 50% des familles ont ouvert des comptes dans au moins deux établissements bancaires.

Grâce à ce phénomène, la pression concurrentielle entre les établissements bancaires s’est accrue. Ceci s’observe surtout sur la pression concernant les taux de crédits immobiliers. En effet, l’attribution du compte principal dépend presque entièrement de l’importance de ce taux.

  • Les facteurs externes de la multibancarisation

Qu’est-ce qui pourrait pousser une entreprise à ouvrir plusieurs comptes dans des établissements bancaires différents ?

Quand une entreprise souhaite obtenir des financements, elle décide généralement d’adopter un portefeuille de dettes diversifié à cause de la structure existante de système bancaire et de son désir de se protéger contre le hold-up informationnel.

  1. Capture informationnelle et banque principale

            L’entreprise entretient un lien durable avec sa banque principale. Cette dernière détient une part non négligeable concernant son endettement global. L’établissement bancaire principal dispose en théorie d’informations de premier ordre concernant l’entreprise, comparé aux autres créanciers actionnaires ou non actionnaires[50].

Sharpe a analysé que l’avantage en termes d’informations à disposition de cette banque principale aura comme issue possible une capture informationnelle[51]. Comme relaté plus haut, cette situation consiste pour la banque à imposer des conditions de crédit très peu avantageuses pour la firme en demande de financement.

Ainsi, l’entreprise choisira de recourir à des sources multiples de financement afin de se prémunir d’une extraction de rente informationnelle exercée par l’établissement bancaire. Mais adopter cette conduite engendre d’importants coûts de transaction. Avoir deux comptes bancaires est, selon certains chercheurs[52], une stratégie suffisante si l’entreprise désire ne pas être victime de capture informationnelle.

D’autres études[53] quant à elles avancent que de nombreux relatons de crédit sont autant de moyens pour une entreprise d’apprécier les conditions de financement offertes par chacun des établissements financiers, pour ensuite opter pour celles qui s’adaptent le plus à ses demandes et à ses contraintes.

  •  Structure du système bancaire et multibancarisation

Que ce soit sur le territoire européen qu’américain, on a remarqué un aspect très évolutif de la mutlibancarité. Cela s’est surtout développé avec la stratégie d’intensification de l’environnement concurrentiel sur le marché bancaire à partir des années 80. À l’instar de la plupart des PME françaises qui tissent des relations de proximités avec 2 ou 3 institutions bancaires.[54] (Refait, 2003)

Il est à constater que la multibancarité est principalement due à un manque voir une incapacité pour une seule banque de répondre aux attentes d’une entreprise. Cela peut se refléter par un besoin d’emprunt d’un montant conséquent ou encore des besoins de prestations de niveau international. À cet égard, le besoin de multibancarité pour l’entreprise peut dépendre de sa taille et de son âge, mais aussi de l’envergure de ses activités.  Parallèlement, elle peut aussi se justifier par la taille de la banque et la répartition de ses succursales et institutions représentantes à travers un territoire ou des zones géographiques. Egalement, elle peut dépendre des offres de cette dernière et de ses spécialisations.[55][56] (Lefilliatre, 2002 ; Berger et al., 2001)

De ce fait, on verra dans cette section les facteurs de la multibancarisation qui peuvent être dus a des facteurs internes à l’entreprise, mais aussi, les offres octroyées par les banques.

  • Les facteurs internes de la multibancarisation
  1. L’âge et la taille de l’entreprise

 

Selon la notion de l’intermédiation financière, l’exclusivité du lien existant entre une banque et une entreprise est un déterminant essentiel afin de permettre de réaliser et de partager les économies d’échelles pour les entreprises.  Par ailleurs, les entreprises qui ont une image reflétant une grande opacité des informations ne seront pas capables d’assurer une diversification des sources de financement au niveau des institutions bancaires étant donné que les charges financières occasionnées sont élevées. En effet,  les institutions bancaires supportent les charges élevées de collecte d’informations au niveau des entreprises, ainsi que du traitement de ces dernières.

À cet égard, afin de réduire les charges financières, les entreprises de petite taille sont parfois contraintes de diminuer le nombre de banques pour assurer leur financement. Et selon Berger et al. en 2001, plus les entreprises présentent de l’opacité par rapport à leurs informations, plus elles réduisent les charges dans les transactions financières. En conséquence, l’âge et la taille d’une entité peuvent être perçus comme des facteurs de la multibancarité de l’entreprise.

  • Le facteur : taille

La taille pour une entité peut être considérée comme un indice pertinent du niveau d’opacité des informations. En ce sens qu’une entreprise de grande envergure a des informations plus transparentes. Aussi, plus l’envergure de l’entité est conséquente, moins elle a des soucis au niveau informationnel. Par conséquent, plus elle est transparente, plus elle opte pour des financements à travers un nombre plus élevé de banques.

Dans ce cadre, du point de vue théorique, d’un premier abord, on constate que les besoins de financement d’une entreprise dépendent de sa taille et plus cette dernière est grande, plus elle aura un besoin conséquent. En effet, si l’on se reflète aux écrits de Ongena et Smith en 2000, dans une entreprise de grande taille, le besoin de financement est considérable et « une grande entreprise est supposée avoir des besoins de financement importants nécessitant une variété de services financiers qui ne peuvent être accordés par une seule banque. »[57]

Ensuite, la multibancarisation chez l’entreprise peut engendrer des charges qui permettent la maintenance du lien avec des banques multiples. Ces charges sont entre autres, celles en relation avec les investissements en temps et en matériels. En effet, une entreprise dans sa relation bancaire doit entretenir une relation minimale et régulière avec les institutions bancaires auxquelles elle est liée. Pour l’entreprise, la maintenance et l’entretien de ces relations engendrent des charges qui, cumulées, deviennent très importantes. À cet égard, une entreprise de petite ou moyenne taille n’est pas en mesure de s’acquitter de ces charges.

Enfin, suivant l’offre et les prestations de la banque, il est à constater que la multibancarité des entreprises est positive pour les institutions bancaires. Surtout, dans le cadre d’un financement de projets à risque. De ce fait, la multibancarisation pour diversifier les sources de financement est plus adéquate pour une entreprise de grande taille et où les risques concernant les investissements bancaires sont perçus comme conséquents. Et d’après d’Auria et al. en 1999, « la multibancarité est un système d’assurance mutuelle des banques leur permettant de partager le risque entre elles en accordant chacune un faible montant à l’entreprise. »[58]

En somme, en considérant les besoins de financement des entreprises ainsi que les charges engendrées par l’entretien de la relation bancaire, mais aussi, par rapport au niveau de risque perçu par les banques, la taille est un facteur pertinent dans le choix de la multibancarisation.

  • Le facteur : âge

L’âge d’une société est également un déterminant qui définit la multibancarité. En effet, du point de vue théorique, les analystes affirment que durant le lancement des activités de l’entreprise, c’est-à-dire durant ces premières années de fonctionnement, cette dernière ne dispose pas de nombre élevé de banques.[59] (Farinha, Santos, 2000)

Durant les premières années d’activités d’une entité, elle est surtout sujette à des soucis informationnels qui sont en relation avec son âge encore jeune. Cela également parce que dans les débuts de son existence, l’entreprise n’est pas encore expérimentée et son image ne reflète pas encore une bonne notoriété.

Dans ce cadre, avec le temps elle acquiert de l’expérience et développe sa taille. Et avec ce développement, elle aura la possibilité de varier ses sources de financement au niveau des banques. En conséquence, « il existe un cycle de vie des relations bancaires de l’entreprise. »[60] À cet égard, l’âge est un déterminant qui peut conduire l’entreprise à multiplier le nombre de relations bancaire.

 

  1. Investissements et confidentialité des informations

 

En outre, par rapport aux investissements de l’entreprise, une banque s’assure de l’évaluation des risques concernant les activités de cette dernière.[61] En ce sens qu’il est important pour une banque d’avoir les informations concernant la réalisation des projets d’investissement d’une entreprise afin de se rassurer par rapport aux conditions financières et aux offres de prêts que l’institution bancaire a octroyée. À cet égard, une institution bancaire est en possession des informations relatives à l’entreprise durant toute la période de l’emprunt.

Néanmoins, un projet d’investissement à l’égard de l’entreprise pour une banque doit considérer une confidentialité totale des informations. Ainsi, l’échange informationnel entre la banque et l’entreprise devra se faire en toute discrétion. À d’autres égards, le principe de financement bancaire devra être garant de la limitation des risques concernant les fuites informationnelles.

Par ailleurs, la confidentialité informationnelle est également essentielle pour une firme, car elle lui permet de garantir la réussite dans sa démarche d’innovation. Néanmoins, la firme aura aussi tendance à limiter les informations à diffuser, comme celles qui peuvent intéresser ses concurrents. D’un autre côté, choisir la multibancarité se fait également en fonction de la qualité d’une entreprise.[62] En effet, selon Yosha « le degré de communication des informations confidentielles des entreprises dépend de leurs options stratégiques et de leur structure financière. »[63]

À cet égard, dans le type de financement, l’entreprise diffusera des informations selon que le financement soit multilatéral ou bilatéral.

Dans le cadre d’un financement multilatéral, afin de convaincre les investisseurs bancaires, l’entreprise transmettra toutes les informations concernant sa performance et sa crédibilité. Cependant, ces informations peuvent être diffusées aux concurrents de cette dernière. De ce point de vue, le financement multilatéral est relatif à la multibancarisation, tandis que le financement bilatéral concerne les entreprises qui optent pour la monobancarité. En effet, les entreprises qui optent pour une relation bancaire unique sont plus sensibles aux informations qu’elles diffusent.

 

  • Les services bancaires proposés dans le cas d’une offre / demande de prêt pour un client multibancaire : existe-t-il une différence tangible et notable comparé au client monobancaire ?

 

  • Les services et les offres pour un prêt destiné à un client multibancaire

L’octroi d’un prêt considère deux aspects : d’un côté, il y a le prêt relationnel et le prêt transactionnel, de l’autre. L’aspect du financement ou du prêt dépend ainsi, de la forme de l’information issue de l’institution bancaire.

De ce fait, il s’agit de prêt relationnel, selon Boot en 2000, quand la relation existante entre la banque et l’entreprise est large, mais aussi, lorsqu’il y a des financements à répétition dans le temps. Cet aspect est également existant dès lors que l’information que la banque détient est de nature confidentielle et dont l’entreprise privilégie l’accès et la détention à sa banque. À cet égard, les informations sur l’entreprise sont accessibles pour la banque et non pour les investisseurs.

Par ailleurs, selon Berger et Udell en 2002, le prêt relationnel octroyé par la banque se base sur une relation qui se construit sur le long terme avec l’entreprise. À cet égard, l’institution bancaire qui offre ce type de prêt est appelée « banque à l’engagement. » En ce sens, la relation construite entre l’entreprise et la banque permet à cette dernière de faire la collecte de données qualitatives ou de données soft par rapport à l’entreprise. Ces données concernent les informations considérées par l’entreprise comme étant personnelles et privées, mais aussi, des informations tenues secrètes et confidentielles.

Pour ce qui est de l’offre de prêt transactionnel, le financement se base sur une relation entre la banque et l’entreprise qui est de courte durée. De ce fait, le flux d’information entreprise-banque est moins dense. En outre, du fait d’une relation à courte durée, les institutions bancaires ne vont collecter que des données quantitatives au niveau de l’entreprise. Des données aussi appelées, informations hard.

Suivant ces deux aspects de prêts, la banque se tourne surtout vers un prêt transactionnel pour les clients multibancaires. En ce sens, la banque s’appellera « banque à l’acte » étant donné qu’elle va favoriser les bénéfices à courte période de ses crédits « en ayant recours systématiquement aux garanties et en finançant par conséquent, les entreprises transparentes informationnellement. »[64]

 

  • Différences entre les offres et services pour un client monobancaire et un client multibancaire

 

Les financements octroyés par les banques et les investissements qu’elles effectuent pour une entreprise sont sujets à des conditions. D’après Diamond et Fama, qui ont développé une théorie concernant l’intermédiation bancaire en 1985, ne disposer que d’une seule institution bancaire peut s’avérer être bénéfiques pour les entités qui détiennent leurs informations de manière très confidentielle. De ce fait, la relation d’une entreprise avec une seule banque est une assurance de la réduction de l’asymétrie d’information. En effet, avoir une seule banque principale est une garantie pour l’entreprise qu’elle pourra avoir un meilleur accès à un investissement financier venant de la banque. Un accès à un investissement bancaire qui se fera également avec de meilleures conditions.

Parallèlement, plus une entreprise choisie la multibancarité plus le coût du crédit de banque est élevé. Ce coût étant la principale condition qui favorise l’octroi d’un financement par une banque. Cependant, le souci d’un « hold-up informationnel »[65] qui est très fréquent dans une relation monobancaire et une des principales justifications de la multibancarité chez les entreprises. Il en est de même pour la possibilité de bénéficier des investissements bancaires et des crédits, la relation avec un nombre de banques élevé est « une réponse au rationnement du crédit surtout en présence d’un risque d’illiquidité d’origine bancaire. »[66]

  • La capture d’information

La différence dans les services offerts pour les clients monobancaires et mutlibancaires réside également dans le système de collecte des informations. En effet, une forme de prêt relationnel permet à une banque de disposer de données confidentielles par rapport à une entreprise. Des données qui la privilégient par rapport aux autres banques quant à l’aspect de son offre et l’étude des projets de son client.

En ce sens que vis-à-vis du marché, la disponibilité des informations concernant les informations de l’entreprise évoluera de manière asymétrique. De ce fait, une offre de prêt relationnelle entre la banque et l’entreprise « augmentera le pouvoir de marché de la banque. »[67] En conséquence, un prêt relationnel est un risque pour l’entreprise du fait d’une exposition élevée à une capture informationnelle de l’entreprise par la banque.

 

 

Troisième partie : La banque et la fidélisation du client

  • Des points d’amélioration des conditions de crédit (informations sur le client, etc)

 

  • Une offre de crédit plus disponible

Sur le marché, les banques ainsi que les institutions de crédits œuvrent dans des opérations de « transformation irremplaçable ». En ce sens que si les ménages ont besoin de disposer d’une liquidité élevée, les entreprises, elles, ont besoin d’un financement à la hauteur de leurs investissements et de leurs projets. Cela, en ayant accès à des crédits qui peuvent être d’une durée moyenne ou longue. Dans ce cadre, il est du ressort de la banque d’assurer la transformation de la liquidité des ménages en créance.

D’après notre cadrage théorique, les facteurs qui favorisent la multibancarité sont surtout les paramètres qui rendent l’accès aux crédits difficile dans une situation monobancaire. Toutefois, selon les analyses des auteurs dans le bulletin de la banque de France n° 180, en 2010, « c’est la multibancarité qui a des effets sur l’accès au crédit. » Ce qui suppose que si l’impact de la multibancarisation sur la possibilité d’accès au crédit est favorable, de ce fait, les entités qui ont des soucis d’accès sont les premières à opter pour la multibancarisation. Ou encore, si la possibilité d’accéder au crédit est moindre, on verra une augmentation de la multibancarisation chez les entreprises.

En ce sens, afin de fidéliser son client, la banque aura besoin d’avoir une compréhension plus approfondie de l’environnement sur lequel évolue son client. Il pourra ainsi limiter les risques en octroyant un financement relationnel en échange des informations qui permettront à la banque d’avoir une appréciation plus juste des perspectives de l’entité. Ainsi, les atouts informationnels de la banque concernant son client lui permettront d’avoir une meilleure relation avec ce dernier, et de se positionner plus favorablement devant ses concurrents. Par ailleurs, avec la disponibilité de plus d’information, la banque pourra donner accès facilement à un crédit à l’entreprise cliente. (Diamond, 1984)

Cet aspect de la relation banque/entreprise garantira également une relation sur une longue période entre les deux entités. Ce sera, par ailleurs, un gage pour l’entreprise qu’il n’y aura pas de risque de restriction sur l’accès au crédit. (Jaffee, 1971) Dans ce cadre, comme le souligne Hodgman en 1963, il y aura un avantage dans la relation entre l’institution bancaire et l’entreprise à travers la disponibilité et l’accessibilité du crédit, constituant une relation de dépôt. Le risque dans ce cas se situe au niveau des nouvelles entreprises clientes qui n’ont pas encore de relation sur le long terme avec la banque et qui dans ce cas, ne disposent pas d’un compte de dépôt. Dans ce cas, il est important que la banque fasse fonctionner de manière optimale le marché du crédit. Cela en collectant le maximum d’information sur l’entreprise en tant que créancier, et en cernant au maximum le projet de l’entreprise emprunteuse. Et dans ce sens, en tarifant chaque projet de l’entreprise suivant les risques intrinsèques et afin d’équilibrer l’offre et la demande de capitaux prêtables.

En outre, si auparavant l’entreprise était la seule qui sache la rentabilité prévue sur son projet, il est essentiel que la banque dispose de ces informations et les exploite afin de mesurer de façon correcte les primes de risques qui devront être inclus dans le taux d’intérêt. Un taux qui devra être évalué à juste titre afin de garantir que le prêt est rentable, mais aussi, pour ne pas dissuader l’entreprise emprunteuse à « aller voir ailleurs »[68]. (Nakamura, 1999)

  • Un soutien dans les périodes difficiles

Sur le marché financier, il est constaté que les institutions bancaires ont surtout tendance à user du rationnement à l’égard des entreprises nouvelles et qui ne disposent pas de compte de dépôt. Mais également, elles favorisent ce cas pour les entreprises qui n’ont pas entretenu une relation de longue durée avec la banque. Néanmoins, selon les avis théoriques des spécialistes, la disponibilité de crédit est surtout favorisée à l’égard d’un prêt relationnel, c’est-à-dire avec une relation banque-entreprise qui s’est construite sur le long terme, même si cette dernière est en position difficile.

En ce sens, d’après Boot en 2000, dans le cas où l’entreprise est en difficulté, le financement relationnel est optimisé. En effet, ce type de prêt valorisera la relation de longue durée entre la banque et l’entreprise, permettant ainsi « la renégociation des conditions de contrat de dette. »[69]

De ce fait, dès lors qu’une entreprise se trouve dans une situation économique difficile passagère causée par un choc conjoncturel et que dans cette situation, les risques de non-paiement de ses dettes vis-à-vis de sa banque sont élevés, cette dernière pourrait lui apporter son soutien en octroyant une facilité d’accès au crédit. À cet égard, l’aspect renégociable des contrats de crédits assurera à l’entreprise de disposer d’une aide de liquidité de la part de sa banque, en vue de se remettre sur les rails en cas de situation difficile transitoire.[70]

En somme, le développement de la relation bancaire et l’objectif de développer une relation durable et sur le long terme avec sa banque permettra à l’entreprise d’avoir un accès facilité au crédit et évitera le rationnement des financements et donc, la multibancarité.

Par ailleurs, pour la banque, malgré le risque de collecte d’informations, au fil du temps, elle peut assurer l’optimisation de la capture informationnelle, en assurant le monitoring des entreprises emprunteuses et en évaluant chaque détail de son projet tout en appliquant le taux d’intérêt adapté à chaque projet et selon la situation économique de l’entreprise.

  • Une meilleure collecte des informations

 

Une offre de prêt relationnel débute souvent à partir d’indicateurs pertinents qui sont en possession de la banque, par rapport à l’entité emprunteuse. Cependant, la disponibilité de ces informations est généralement difficile dans le cas où une entreprise est encore jeune sur son marché, ou n’est pas d’envergure, par sa taille. Ces points peuvent être des sources de non-octroi de crédit ou de multibancarisation.

Toutefois, la disponibilité des informations dépend entièrement de l’initiative de l’entreprise emprunteuse, ou de la banque. Mais elle considère également, l’aspect et la nature des risques, que ce soit par rapport à la sélection des institutions bancaires ou le risque moral.

Dans ce cadre, la banque peut « neutraliser » les problèmes d’opacité des informations en :

  • Développant des contrats séparateurs qui permettront d’assurer une sélection naturelle

À travers ce procédé, la banque aura la faculté de gérer les besoins de son client au sein même de l’établissement afin d’éviter la multibancarisation. Cette approche qui est appelée « screening » (Bester, 1985) a la particularité d’assurer l’élimination des offres de la concurrence en se basant sur une limitation du taux d’intérêt, mais aussi ceux sur les garanties. C’est également une stratégie pour l’institution bancaire qui lui permet de définir les entreprises emprunteuses qui ont un risque élevé et celles qui en ont un moindre.

Par ailleurs, la stratégie consiste en une proposition de différentes sortes de contrats où le tarif de la prime et le degré de la franchise « varient en sens inverse. »[71]

Ainsi, l’entreprise emprunteuse aura le choix sur l’offre et selon le choix effectué, la banque saura le niveau de risque associé à l’entité. Dans ce cadre, les entreprises qui ont un risque élevé préfèreront contracter sur des crédits à taux conséquent et dont la garantie est moindre, tandis que les entités qui présentent un risque réduit choisiront une offre à taux moins conséquent et une garantie plus élevée. (Bester, 1985)

En outre, l’institution bancaire peut également favoriser l’utilisation de garanties qui concernent les ressources internes de l’entreprise (actifs), ou les ressources patrimoniales des propriétaires qui dirigent l’entreprise (garanties externes).[72]

Dans ce cadre, la diversification des contrats permettra à la banque de garder son client et de construire une relation avec lui sur le long terme. En fonction de cette relation, elle pourra ainsi collecter des informations qui lui permettront de mieux connaitre l’entreprise et de personnaliser les offres de crédit.

  • Incitant l’entreprise emprunteuse par le « debts convenants »

Cette stratégie est surtout axée sur l’aspect de la limitation des barrières morales. Le contrat à établir, dans ce cas, aura pour but d’inciter l’entité emprunteuse de tenir les engagements faits.

Ce contrat concernera également l’acceptation de convenants ou de termes restrictifs qui serviront pour dissuader l’opportunisme de l’entité emprunteuse.[73] Ces termes du contrat peuvent concerner la politique d’investissement et ainsi, permettre à la banque de réduire les risques de sous investissements et le remplacement d’actifs, mais ils peuvent aussi concerner la politique financière en fixant un taux de crédit maximum. Cette dernière dans le but de réduire les risques de défaillance de l’entreprise emprunteuse et d’un « risque de défaut supérieur à celui qui résultait de l’analyse ex ante du dossier de la firme pour la banque. »[74]

Des termes qui peuvent également impacter la politique de répartition des dividendes afin d’avoir une assurance que le propriétaire ne soutirera pas de l’entité emprunteuse un montant conséquent qui pourrait porter atteinte à l’équilibre financier de cette dernière.

Ces termes peuvent être signalés dans le contrat non seulement pour assurer l’octroi d’un financement de crédit à l’entreprise et en vue de construire une relation durable banque-entreprise, mais aussi ils ont également l’objectif de réduire les risques pour l’institution bancaire.

  • Incitant par la mise à disponibilité de signaux financiers

À cet égard, selon Akerlof en 1970, les entreprises emprunteuses doivent diffuser des signaux concernant leurs projets. Des signaux qui constituent des indicateurs pour la banque concernant les données et informations personnelles de l’entité. Ces signaux contiendront, de ce fait, des paramètres qui permettront à l’institution bancaire d’évaluer le projet et de juger de sa pertinence ou non.

Parmi les informations pertinentes qui devront être collectées par la banque dans ce cadre, on peut citer les apports de capitaux des propriétaires ou encore, la politique de dividende.

De ce fait, l’octroi de crédit peut être effectué même pour les grandes firmes à travers une bonne collecte et une bonne analyse des informations qui peuvent être, les indicateurs concernant l’endettement. En ce sens, un niveau d’endettement élevé peut être considéré soit comme un risque (pour une petite structure), soit un indicateur de forte croissance (pour une entité de grande taille). (Ross, 1977)

Les signaux avant l’octroi de crédit peuvent aussi concerner les apports de capitaux propres par le propriétaire (Leland, Pyle, 1977) En ce sens qu’il y aura moins de risque d’octroi de crédit pour les entreprises dans lesquelles les propriétaires injectent une part conséquente de ses ressources dans un projet. Concernant les indicateurs à travers les dividendes, d’après Bhattacharya en 1979, les dividendes trop conséquents et versés aux actionnaires régulièrement sont des charges élevées pour l’entreprise. Toutefois, la banque peut analyser à travers cette information que l’entreprise est performante autrement elle n’aura pas la possibilité d’assurer un partage conséquent de dividende.

La disponibilité de ces signaux au niveau des banques leur permettra ainsi de catégoriser les clients demandeurs et de personnaliser les offres. Cela, pour éviter la fuite même des grandes entreprises et afin d’avoir à sa disposition des informations qui permettront de construire un lien durable avec l’entreprise.

  • Analyse de la possibilité d’avantages à tirer de la multibancarisation du client

 

  • Promouvoir la gestion de la relation

Sur le marché financier, l’asymétrie d’informations existantes et le caractère non redéployables des ressources peuvent engendrer l’opportunisme des institutions bancaires. Par conséquent, il y aura un risque dépendance des entreprises vis-à-vis de leurs banques concernant ses besoins de financement et suivant la nature de la relation de l’entreprise en tant qu’entité débitrice. Des cas qui sont surtout existants chez les clients monobancaires et les poussent à favoriser la multibancarité.

Cependant, les avantages de la multibancarité peuvent être des atouts indéniables pour une institution bancaire en gérant de façon pertinente l’aspect relationnel avec son client mutlibancaire, mais aussi, en rétablissant la confiance et en favorisant l’engagement mutuel.

En effet, les entreprises tout autant que les institutions bancaires se doivent de développer des attitudes qui assurent « l’émergence de comportements de réciprocité bienveillante. »[75] Un comportement qui se doit d’être optimisé tant dans un financement relationnel que dans un financement transactionnel et par conséquent, pour une entreprise cliente multibancaire ou monobancaire. En ce sens, selon les analyses de spécialistes financiers, le prêt ou le financement relationnel est plus efficace pour garantir la fidélisation du client. Un aspect qui doit être transposé pour les clients multibancaires, de ce fait, afin de renforcer des liens sur le long terme et renforcer la communication. Cela est également le gage d’une confiance mutuelle entre la banque et le client, malgré que multibancaire. D’ailleurs, en renforçant ce lien, la banque aura également plus d’espace pour mesurer les risques sur l’entreprise. (Gardes, Machat, 2011)

En outre, pour une entreprise qui souhaitera avoir plus de financement, il devra optimiser cette relation et s’engager dans une relation de confiance et une relation durable afin de permettre d’avoir des échanges durables.

Ainsi, en acquérant un client multibancaire, une banque peut renforcer ses liens avec ce dernier selon quatre dimensions comme l’a montré Granovetter en 1973, qui sont entre autres, l’intensité de la relation, l’aspect intime ainsi que la durée de la relation, mais aussi, les prestations réciproques. À cet égard, la relation entre la banque et l’entreprise doit se faire valoir à travers le dynamisme du comportement et des échanges sociaux.

Par contre, cette relation devra être conçue tout en considérant les différences des deux entités (intérêt, position, pouvoir) et le niveau de dépendance de chacun qui sont les déterminants des démarches de négociations.

  • Faire profiter de l’accès au crédit dans le cas d’une difficulté transitoire

La collecte d’information est chère pour la banque. Toutefois, les coûts sont répercutés au niveau des entreprises emprunteuses. De ce fait, afin d’éviter ces coûts, les entreprises ont souvent recours à la multibancarité.

Toutefois, une institution bancaire disposant d’un client multibancaire peut être victime d’une difficulté transitoire également. À cet égard, elle risque de ne pas pouvoir assurer le refinancement d’un crédit de son client, qui peut être, cependant, profitable pour la banque. En conséquence, les autres banques peuvent profiter de la situation en révisant à la hausse le crédit octroyé à l’entreprise, mais également, le taux et les primes y afférents.

D’un autre côté, pour une institution bancaire ayant construit une relation de confiance avec une entreprise, rendre disponible un crédit même dans le cas où cette dernière est en difficulté, est faisable. En effet, en ayant développé une relation sur le long terme avec l’entreprise emprunteuse, la banque sera plus sur de son financement et aura des indicateurs et des signaux plus définis sur une entreprise profitable, malgré la difficulté rencontrée par cette dernière.

  • Développer une relation sur le long terme avec un client multibancaire pour réduire les coûts de monitoring

 

Une institution bancaire qui assure le financement d’une entreprise sur une longue période acquiert indéniablement de l’information sur cette dernière. Un cas qui peut se faire et qui peut être avantageux dans le cadre d’une relation avec un client multibancaire.

En effet,  suivant le besoin du client, sa taille et son âge, le financement peut faire l’objet d’un rationnement sur plusieurs années. Dans ce cadre, il y aura une relation plus durable entre les banques et l’entreprise multibancaire emprunteuse. Par conséquent, les banques auront accès à plus d’information sur les projets de son client et auront la capacité de diminuer les coûts de monitoring concernant les activités de crédit.

Par ailleurs, les institutions bancaires auront également l’avantage :

  • D’avoir des informations concernant les comptes et la trésorerie de l’entreprise emprunteuse. Ces informations lui procureront ainsi des données sur les activités courantes de l’entreprise, ses relations avec le marché et son environnement, les risques de non-paiement ou les profits pouvant se dégager du financement de cette dernière. Cette relation engendrera de ce fait, une réduction des coûts de collecte d’information, profitable pour la banque et l’entreprise, mais aussi, une diminution des coûts de monitoring

 

  • D’avoir une connaissance approfondie des antécédents concernant le remboursement de l’entreprise et les risques probables pour un nouveau financement. De ce fait, avec une visibilité sur l’historique du crédit et du remboursement du client, la banque pourra donner un score concernant le niveau de risque de l’entreprise et la possibilité d’octroi de nouveau crédit. C’est également une opportunité pour la banque et le marché financier de lutter contre les asymétries d’informations

 

 

Conclusion

           

            Si l’on se réfère à la théorie et les théories économiques, il est indéniable de constater que les travaux concernant le crédit bancaire des sociétés sont nombreux. Des travaux qui ont soulevé que le financement bancaire est surtout favorisé chez les petites entreprises.

Par ailleurs, c’est également au niveau de ces types d’entreprise qu’on perçoit généralement une forte relation bancaire, mais également, une transparence des informations moindre. Ce qui rend leurs accès au marché financier, difficiles. De ce fait, la relation des petites entreprises avec leurs banques permet la réduction de l’opacité informationnelle et ainsi, de rendre disponible le financement par crédit pour ces dernières.

Néanmoins, on a remarqué que la mutlibancarisation, c’est-à-dire, la relation  avec un nombre élevé de banques devient de plus en plus courant que ce soit pour les grandes entreprises ou les petites entreprises. Un constat qui est favorisé par le développement de la taille ou l’âge de l’entreprise, mais également ses besoins qui peuvent devenir de plus en plus conséquents avec le temps. Par ces aspects, le financement par une seule banque est vu comme étant limité et le besoin d’avoir une relation avec plusieurs banques constitue une solution pour les entreprises.

Cette situation peut, toutefois, causer une perte de sa clientèle et ainsi, des taux et des primes sur les crédits, pour la banque. A cet égard, il est essentiel qu’elle s’assure de la fidélisation de ses clients multibancaires, en exploitant cette situation. D’où, la formulation de notre question de départ : quels avantages tirés de la multibancarité des entreprises face à l’octroi de crédit ?

Dans notre travail, nous avons ainsi pu dégager les avantages qu’ont les entreprises par rapport à la monobancarité et la multibancarité, concernant le financement de leur projet. Cependant, nous avons également vu que la multibancarité peut engendrer des risques pour la banque. En ce sens qu’elle perdra le monopole de capture informationnelle sur le client et ainsi, des divers avantages concernant la disponibilité des informations des entreprises clientes au niveau des banques.

D’un autre côté, cette démarche est utile pour l’entreprise afin d’éviter justement la monopolisation des informations par une banque et par conséquent, le risque de dépendance qu’aura l’entreprise vis-à-vis d’une seule banque principale. De ce fait, la relation entre les deux entités peut s’amoindrir avec le temps. Le lien n’étant plus que transactionnel et avec une diffusion d’informations limitée.

Cependant, on a vu que la relation entre une banque et une entreprise, malgré le fait de la multibancarité, est toujours importante. Cela, en vue de réduire les risques concernant l’octroi de financement, mais aussi, pour diminuer les divers frais engendrés par le monitoring des activités de crédit ou encore, la collecte formelle des informations. En effet, construire et entretenir une relation durable avec une entreprise est pour la banque une stratégie pour s’acquérir de diverses informations concernant la solvabilité de l’entreprise, tout en partageant les risques au niveau des institutions bancaires choisies par le client pour la couverture de ses besoins de financement bancaire.

De ce fait, afin de fidéliser les clients mutibancaires, le financement ne doit pas rester sur le plan transactionnel. La banque comme l’entreprise devra entretenir des relations sur le long terme. Cela dans le but de personnaliser les offres pour la banque et ainsi, de fidéliser son client, et de s’assurer de la disponibilité de crédit adapté à sa situation, pour l’entreprise, même en cas de difficultés passagères.

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[12] St-Pierre, 1999.

 

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[20] Wynant et Hatch, 1991.

 

[21] Observatoire européen des PME, 2003

 

[22] Fasano et Gfeller, 2003.

 

[23] Ibid.

 

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[46] Sharpe (1990) et Rajan (1992)

 

[47] Kornai (1980)

[48] MERCEREAU Inès, Rapport sur la mise en œuvre technique et opérationnelle de la portabilité bancaire, Décembre 2014. http://www.economie.gouv.fr/files/files/PDF/Rapport-portabilite-bancaire.pdf

 

 

[49] http://www.definitions-marketing.com/Definition-Multibancarisation

[50] Refait, 2003.

[51] Sharpe, 1990.

 

[52] Von Thadden (1994)

 

[53] Rajan, 1992

[54] Refait C., 2003, « la multibancarité des entreprises : Choix du nombre de banques et choix du nombre de banques principales », ed. presses de sciences po, P649-661

[55] Lefilliatre D., 2002, « la multibancarité », Cahiers études et recherches de l’observatoire des entreprises, banque de France

[56] Berger A.N. et al., 2001, « The ability of banks to lend to informationnally opaque small businesses”, Journal of banking and finance, n°25, P 2127-2167

[57] Selon Ongena et Smith en 2000, traduit par Tlili R., 2012, « comment justifier la multibancarité au sein des PME ? », HAL, P 91

[58] D’Auria C., 1999, « Bank interest rates and credit relationships I Italy”, Journal of Banking and finance, 23, P 1067-1093

[59] Farinha L., Santos J., 2000, « switching from single to multiple banking relationships: determinants and implications”, bank for international settlements working paper

[60] Tlili R., 2012, « comment justifier la multibancarité au sein des PME ? », HAL, P 92

[61] Freixas et Rochet, 1998

[62] Yosha, 1995

[63] Cité par Tlili R., 2012, « comment justifier la multibancarité au sein des PME ? », HAL, P 92

[64] Tlili R., 2012, « Comment justifier la multibancarité au sein des PME ? », HAL, P78

[65] Sharpe, 1990

[66] Tlili R., 2012, « comment justifier la multibancarité au sein des PME ? », HAL, P 93

[67] Même source

[68] Nakamura J.L., « la relation banque-PME », Revue d’économie financière, vol.54, P 39-58

[69] Boot A., 2000, « relationship lending: what do we know?”, Journal of financial intermediation, n°9

[70] Boot A., Greenbaum S., Thakor A., 1993, “reputation and discretion in financial contracting”, American Economic review, N°83, P 1163-1185

[71] Tchamabe J., 2012, « relations de crédit et coût de l’endettement : le cas des PME camerounaises », université de Yaoundé II. P 33

[72] Eber N., 2001, « les relations bancaires de long terme : une revue de littérature », revue d’économie politique, vol. 111, n°2, P 195-246

[73] Cieply S ;, Grondin M., 2000, « spécificités des banques dans l’expertise et le contrôle des risques –PME : résultats d’une enquête exploratoire », proposition de communication pour les 17ème journées internationales d’économie monétaire et bancaire

[74] Tchamabe J., 2012, « relations de crédit et coût de l’endettement : le cas des PME camerounaises », université de Yaoundé II. P 33

[75] Gardes N., 2014, « risque d’opportunisme de la banque, le rôle de la compétence relationnelle du dirigeant d’entreprise dans l’accompagnement financier : une application aux PME PMI du secteur aéronautique », 23ème conférence international de management stratégique, Université de Bordeaux IRGO, AIMS

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