Une entreprise qui choisi bien l’origine douanière de ses marchandises peut minimiser son coût douanier
Sujet : l’origine des marchandises comme instrument de politique commerciale des entreprises industrielles
Thème : Une entreprise qui choisi bien l’origine douanière de ses marchandises peut minimiser son coût douanier
INTRODUCTION
PARTIE I : Les échanges commerciaux internationaux
Chapitre I : Généralité
Chapitre II : la mondialisation et régime de la libre échange entre les Etats membres
Chapitre III : les régimes commerciaux préférentiels
PARTIE II : L’origine des marchandises élément stratégique de l’entreprise
Chapitre I : définition de l’origine
Chapitre II : les règles d’origine
PARTIE III : Discussion et recommandations
Chapitre I : Discussion
Chapitre II : Recommandations
CONCLUSION
INTRODUCTION
A l’heure de la mondialisation, les échanges commerciaux internationaux tiennent une place prépondérante. Les différents Etats cherchent ainsi à harmoniser la notion de valeur de marchandises en douanes et à créer l’harmonisation de la codification des marchandises.
Bien que le problème de l’origine des marchandises remonte à des siècles avant notre époque, il est constaté que la notion d’origine des marchandises prend une ampleur de plus en plus importante aujourd’hui. En effet, ce concept a une fonction capitale dans la stratégie commerciale des entreprises. Or cette notion, même si elle est employée fréquemment par les usagers du commerce international, force est de constater que son application reste délicate due à la définition même du concept ainsi que les règles d’origine qui peuvent être différentes d’un pays à un autre.
La détermination de l’origine reste effectivement une question majeure pour le commerce international pour trois raisons parfaitement connues. Premièrement, la révolution industrielle a entraîné la spécialisation internationale, ce qui signifie que la plupart des marchandises
comportent des éléments d’origine différente, les opérations d’assemblage étant effectuées successivement dans plusieurs pays. Or, il s’agit d’attribuer à ces marchandises une origine unique, d’où des critères variés mais dont aucun ne peut être réellement satisfaisant : le changement de position tarifaire, la liste de transformations ou ouvraisons, la valeur ajoutée.
Deuxièmement, le développement des techniques protectionnistes et de défense commerciale (restrictions quantitatives ; obstacles techniques au commerce ; embargo ; boycott ; mesures anti-dumping ; mesures antisubventions ; etc.) a renforcé considérablement l’intérêt lié à l’attribution de l’origine, l’efficacité même de ces techniques en dépendant étroitement.
Troisièmement, la prolifération des régimes préférentiels qui ruine pour une bonne part le mythe de la clause de la nation la plus favorisée a accru l’importance de la détermination de l’origine et fait naître de nouvelles règles : l’exigence du transport direct, la nécessité de documents particuliers d’accompagnement et surtout un éclatement de la notion d’origine, chaque accord fixant une notion d’origine particulière.
Problématique
L’Origine de la marchandise est avec l’espèce tarifaire et la valeur, un des paramètres douaniers essentiel pour déterminer la réglementation douanière applicable aux marchandises exportées ou importées : taux de droit et taxe, contingents, exigence documentaires.
La mondialisation des économies pousse les entreprises à modifier la structure de production : Les flux industriel s’internationalisent, la problématique de l’origine des marchandises s’impose comme faisant partie intégrante de la stratégie de l’entreprise
Méthodologie
Une ligne bien définie a été utilisée pour étudier le thème soumis à notre réflexion : c’est la méthode de résolution des problèmes. Celle-ci peut se résumer par les étapes suivantes :
Etape 1 : Identifier les problèmes.
Cette phase consiste à recenser tous les problèmes concernant le domaine à traiter. Comme outils, nous avons utilisé la remue méninge.
Etape 2 : Poser le problème à résoudre.
Il s’agit de choisir le problème sur lequel portera l’action c’est-à-dire préciser les bornes du problème et cerner les activités qui s’y impliquent. C’est également évaluer l’étendue du travail et déterminer ses frontières.
Etape 3 : Collecter des informations.
Le champ de l’étude ayant été défini, cette étape consiste à rechercher les informations relatives au problème. Les collectes de données sont effectuées à travers des documents des revues , ouvrages , site Internet . Les informations collectées sont classées afin de dégager les idées essentielles
Etape 4: Mettre en oeuvre.
Cette phase a consistée à analyser et étudier les informations recueillies dans le but de répondre au problématique posé par le travail.
L’origine des marchandises étant un facteur important dans les échanges commerciaux internationaux, ces derniers sont étudiés dans la première partie du travail.
La recherche du profit étant le moteur de toute entreprise commerciale, il s’avère nécessaire de voir comment l’origine des marchandises peut être considérée comme un élément stratégique de l’entreprise (partie II).
PARTIE I : Les échanges commerciaux internationaux
Chapitre I : Généralité
L’objet des échanges commerciaux est les marchandises et les services. Les échanges de marchandises (matières premières, produits agricoles, textiles et vêtements, produits électroniques, etc.) sont plus courants dans le commerce mais actuellement on assiste à l’apparition de la libéralisation des services dans le commerce international.
Adam SMITH fut le précurseur de la théorie du principe de la libre échange. Selon cet auteur chaque pays devrait se concentrer sur la production de ce qu’il peut produire au mieux et ensuite échanger ces produits contre ceux qui lui manquent. Pour cela, il faudra supprimer ou tout au moins baisser toutes les barrières aux échanges quelle que soit leur nature. Bien que cette théorie ne fait pas l’unanimité, bon nombre de pays tentent de l’appliquer et a conduit à l’apparition de la mondialisation. La libéralisation des échanges commerciaux internationaux a entraîné une guerre d’une autre nature, c’est-à-dire commerciale entre différent pays qui se disputent impitoyablement le marché en défendant au maximum leurs intérêts économiques.
Avec la création de l’OMC en 1994 un accord qui permet de gérer l’organisation et la réglementation du commerce international a vu le jour.
De cet accord se dégagent les deux grands principes sur lesquels se fondent les échanges commerciaux internationaux :
-la protection douanière exclusive qui rassemble plusieurs éléments fondamentaux comme la législation des droits de douane, leur réduction progressive, l’interdiction des principes des barrières non tarifaires ;
-la non discrimination c’est-à-dire l’égalité de traitement entre les produits tout en distinguant le traitement de la nation la plus favorisée du traitement national.
Avec ces principes, l’OMC veut encadrer les échanges commerciaux. Mais l’OMD ( l’Organisation Mondiale des Douanes) s’implique également dans le processus d’échange. Cette institution a pour sa part la tâche d’étudier les domaines relatifs à la coopération douanière. Pour cela, il élabore des projets de conventions et leurs amendements suivis des recommandations pour en assurer l’interprétation ainsi que l’application uniforme des conventions.
L’OMC et l’OMD sont ainsi des organisations qu veillent au bon déroulement des échanges commerciaux internationaux.
Malgré l’existence de ces deux institutions, il existe beaucoup d’autres problèmes liés à la pratique du commerce international .Parmi ces problèmes on peut citer la mondialisation et l’application des régimes commerciaux préférentiels.
Chapitre II : la mondialisation et les régimes commerciaux préferentiels
Mondialisation
La mondialisation signifie l’accroissement des mouvements de biens, de services, de main-d’œuvre, de technologie et de capital à l’échelle internationale. Elle désigne initialement le seul mouvement d’extension des marchés des produits industriels à l’échelle des blocs géopolitiques de la Guerre froide. La genèse du terme explique que ce processus soit le plus souvent envisagé sous le seul aspect de la mondialisation économique, développement des échanges de biens et de services, accentuée depuis la fin des années 1980 par la création de marchés financiers au niveau mondial
Les débuts du XXe siècle sont marqués par une méfiance croissante à l’égard des échanges mondiaux, entraînant le repli de nombreux pays sur eux-mêmes au détriment du processus de mondialisation.
- Le phénomène commence dans le secteur où les échanges étaient les plus importants, celui de flux humains. En mettant en place de quotas à l’immigration (1911 pour les asiatiques, 1921 pour les autres populations), les États-Unis arrêtent brutalement le flux le plus important, tandis que les révolutions russes privent l’Europe d’un important partenaire commercial et financier.
- La plupart des pays érigent alors d’importantes barrières douanières dans le but de protéger leur économie. Ce brusque cloisonnement des échanges matériels et financiers est un facteur essentiel de la crise des années 1930, qui marque le point d’arrêt quasi-total de la mondialisation.
- Le rejet de ce processus dépasse alors le simple plan économique pour s’étendre à la politique, avec l’effondrement de la Société des Nations et un refus des cultures étrangères et des étrangers eux-mêmes qui tourne souvent à la xénophobie.
L’évaluation des conséquences de la mondialisation économique comprend plusieurs volets, très contrastés selon la richesse du pays considéré.
Pays riches
Pour les pays riches, la mondialisation économique comporte deux bénéfices essentiels. Le premier profite au consommateur, qui a accès à un éventail plus large de biens (diversité) à un prix plus faible que s’ils étaient fabriqués dans le pays même. Quantitativement, cet effet est considérable, et peut être appréhendé en additionnant les gains des consommateurs à l’achat de produits textiles chinois. Le second bénéfice profite aux détenteurs du capital, qui obtiennent un meilleur rendement de leurs capitaux.
Les pays riches vivent en revanche la délocalisation de leurs industries intensives en main-d’œuvre peu qualifiée, ainsi que de la concurrence accrue entre pays riches eux-mêmes. Quantitativement peu importants, ces effets posent cependant des problèmes du fait qu’ils sont localisés, touchant particulièrement certains individus ou certaines régions, alors que les gains sont répartis sur l’ensemble de la population. Ceci dit, la part de la population active en concurrence avec la main-d’œuvre peu qualifiée des pays en voie de développement n’est seulement que de 3%.
Cependant, les niveaux scientifiques et technologiques de la Chine et de l’Inde se rapprochent très vite des standards occidentaux, et la qualité des télécommunications font que la concurrence directe des populations actives concerne maintenant les classes moyennes (délocalisation des centres d’appel par exemple), et les ingénieurs (tous les grands groupes de logiciels ont une antenne en plein essor en Inde).
Certaines études quantitatives économétriques tentant d’évaluer ces deux aspects seraient arrivées à la conclusion que les gains des pays riches à la division internationale du travail sont supérieurs aux pertes (délocalisations, désindustrialisation). Le problème des pays riches face à la mondialisation économique serait donc avant tout un problème de répartition de gains afin de pouvoir indemniser les perdants en leur accordant une part des gains proportionnée à leur perte.
Toutefois certains contestent ces études, leur objectivité, leurs auteurs et leurs conclusions. Ces opposants estiment pour leur part que la mondialisation n’a pas été porteuse de croissance en Europe, qu’elle aurait plutôt été génératrice d’iniquités et de dégâts environnementaux, de concurrence désastreuse (de leur point de vue) entre États en matière de réglementation, de protection sociale, de fiscalité et d’éducation, aboutissant à un dumping social et à l’inefficacité locale des mouvements sociaux (le pouvoir politique de proximité ne pouvant leur donner satisfaction). Selon cette analyse la mondialisation ferait obstacle à la « lutte des classes » et risquerait à terme de détruire les protections sociales mises en place dans les États développés.
Nouveaux pays industrialisés
Jusqu’à la crise asiatique, les nouveaux pays industrialisés semblaient les grands gagnants de la mondialisation économique. Profitant d’une main d’œuvre qualifiée et à faible coût, ils ont bénéficié d’investissements très importants en provenance des pays riches comme l’aide financière apportée au Japon par les États-Unis après la seconde guerre mondiale, ce qui leur a permis de construire une économie moderne et un système de formation solide, de sortir de la pauvreté. La crise asiatique a cependant montré l’étendue de leur dépendance à l’égard de marchés financiers prompts à l’emballement spéculatif comme à la panique.
Le bilan de la mondialisation économique pour ces pays est ainsi très contrasté, avec d’un côté des pays, comme la Corée du Sud ou Taïwan définitivement classés parmi les pays riches, d’autres, Thaïlande, Philippines, ont du mal à se remettre de la volatilité des investissements, et d’autres encore bénéficient très largement de la mondialisation au niveau du pays, mais avec une répartition très inégale de ces gains (Brésil, Chine).
Pays pauvres
Au niveau économique, les pays les plus pauvres restent largement en dehors du processus de mondialisation. Celui-ci requiert en effet des institutions stables, un respect du droit de la propriété privée, une absence de corruption ainsi qu’un certain développement humain (santé et éducation) que ne présentent pas la plupart de ces pays. Leur ressource économique principale, l’agriculture, reste dominée par les stratégies protectionnistes des pays riches, sauf pour les cultures propres aux pays pauvres.
Au vu de ces analyses, il apparaît que les pays riches sont favorisés par la mondialisation ce qui n’est pas le cas pour les pays pauvres. Il est évident que les problèmes des pays développés et ceux des pays en développement sont différents. Toutefois, pour que les
échanges commerciaux internationaux apportent des bénéfices pour toutes les nations il convient de procéder périodiquement à l’amélioration de certains mécanismes. Ainsi, par exemple, les pays en développement demandent depuis plusieurs décennies la suppression des subventions agricoles accordées par les gouvernements des pays développés aux agriculteurs occidentaux. Ce dossier avance avec d’énormes difficultés car, comme c’est souvent le cas, les intérêts des pays sont fort contradictoires.
En d’autres termes les intérêts offensifs de certains Etats se confrontent avec les intérêts défensifs des autres.
Régime de la libre échange entre les Etats membres
L’objectif du programme de libération des échanges commerciaux est d’établir progressivement une union douanière entre les Etats membre. Cette union douanière implique l’élimination totale des droits et taxes d’effets équivalents, des obstacles non tarifaires et l’établissement d’un tarif extérieur commun.
C’est pourquoi dès sa création, la CEDEAO par exemple a opté pour une libéralisation total des produits du cru et de l’artisanat traditionnel. Dans cette optique, les produits du cru et de l’artisanat traditionnel doivent circuler librement entre les Etats membres en franchise de tous droits et taxes d’effets équivalents sans restriction quantitative ou administrative. Pour obtenir la franchise, les produits du cru et de l’artisanat traditionnel doivent remplir les conditions suivantes :
– être originaires d’un Etat Membre ;
– être repris dans la liste des produits annexés aux décisions portant libéralisation de ces produits ;
– être accompagnés d’un certificat d’origine et d’une déclaration d’exportation
Le commerce de ces produits est libéré de toutes entraves tarifaires ou non à leur entrée dans un Etat membre. Cette mesure s’explique par l’importance de ces produits, notamment ceux agricoles, dans la vie des populations ; les mettre au même pied d’égalité que les productions intérieures de même espèce devrait permettre aux populations de la zone sahélienne de pouvoir disposer, à des prix relativement moins élevés des produits alimentaires en provenance des côtes.
Mais ces dispositions importantes ont-elles produits l’effet escompté ?
Les statistiques officielles laissent apparaître que 10 à 15 % des échanges des pays membres sont réalisés à l’intérieur de l’espace des Etats membres. Ce taux reste faible mais donne un peu d’espoir par rapport au fait qu’il était à peine de 2% à sa création. A l’heure actuelle, selon William AMPONSAH, professeur associé de commerce international et de développement à l’Université d’Etat de la Caroline du Nord, « les accords régionaux se caractérisant par des échanges restreints, dépendent des produits primaires et représentent un commerce limité entre pays membres ». Cela s’explique par le fait que la plupart des pays exportent des matières premières et non des produits finis si bien que les importations africaines les intéressent peu.
Selon la Banque Mondiale, trois quarts des exportations intracommunautaires proviennent de
trois (3) pays que sont la Cote d’Ivoire, le Ghana et le Nigeria. Il s’agit surtout de produits
primaires. Le pétrole représente à lui seul 30% de ces échanges et le coton, le bétail sur pied,
Le maïs et le cacao 18%. Dans une moindre mesure, le poisson frais, les légumes, le thé et le sucre sont aussi exportés. Les produits manufacturés représentent 15% de ces échanges. D’après une étude récente de la Banque Mondiale intitulée `’que s’agit-il du fil médicament, du fer et de l’acier, des produits chimiques et machines-outils ? `’, la majorité des exportations d’un pays membre vers les autres membres de la Communauté se limite souvent à quelques produits de base.
Il apparaît donc que la part des produits du cru dans le commerce intracommunautaire, bien que leur circulation soit libre, est relativement faible par rapport à l’ensemble des échanges. Il faut remarquer donc qu’un des objectifs fondamentaux de la Communauté cités à l’article 3 du Traité sur le développement des échanges des produits agricoles reste encore incertain.
En effet, les statistiques évoquées montrent qu’il n’y a pas eu développement des échanges de nouveaux produits agricoles, mais libéralisation pour des produits dont le commerce est ancestral. Ceci peut s’expliquer par le fait que la nature a spécialisé chaque Etat dans la production des produits primaires, ce qui limite fortement la circulation des produits alimentaires auxquels les populations ne sont pas encore habituées. Des campagnes nationales d’informations pourraient conduire à une variation des habitudes alimentaires et intensifier la demande d’un certain nombre de produits. De telles campagnes sont d’autant plus urgentes que depuis trois (3) décennies déjà, les pays du sahel n’arrivent plus à nourrir leurs populations avec leurs productions traditionnelles (mil, sorgho, mais…)
On considère comme originaires, les produits du cru extraits de la mer par des bateaux immatriculés dans un Etat Membre. Cette disposition parait en contradiction avec la notion d’origine communautaire qui se dégage de la production ou l’obtention du produit originaire de la Communauté.
Certains accords permettent aux chalutiers des multinationales de se faire immatriculer dans un Etat membre et de déverser leurs récoltes marines, à peu de frais, dans un Etat membre de la CEDEAO au détriment des petites unités industrielles ou artisanales de pêche existantes dans les pays côtiers.
C’est pourquoi sans distinction, la farine de manioc, le bois scié, le café tonifié, produits nécessitant une forte valeur ajoutée, ont été confondus avec le miel naturel, le tabac brut …. Cette conception devait permettre d’englober le maximum de produits afin de libérer leur circulation. Malheureusement les statistiques évoquées ci-dessus montrent que seuls quelques produits de la longue liste intéressent les opérateurs économiques encore imprégnés de l’organisation coloniale des échanges ouest africains.
En conclusion, on peut retenir que si la volonté d’intensifier les échanges des produits du cru et de l’artisanat traditionnel est clairement exprimée dans le Traité par la liberté totale de leur circulation, on constate dans la pratique que ces échanges restent encore faibles et se limitent à quelques produits dont la nécessité dans la situation actuelle n’est pas toujours évidente (noix de cola par exemple).
Dans la perspective d’une meilleure utilisation des ressources des sols et du sous-sol de la sous région, une politique de coopération dans le domaine des produits primaires, devrait privilégier l’autosuffisance alimentaire des populations de la Communauté. La Communauté étant bâtie sur la solidarité, il convient d’utiliser au maximum les potentialités agricoles, quel que soit le lieu où elles se trouvent, pour encourager le développement de la production agricole, vivrière en particulier, car l’expérience des puissances occidentales montre que ce sont également des puissances agricoles.
Pendant longtemps, les pays sous-développés ont pensé qu’il leur suffisait d’accélérer leur développement industriel pour rattraper leur « retard » sur les pays développés. Les Etats de la CEDEAO par exemple n’ont pas échappé à cette conception et ont conçu un mécanisme qui devait favoriser l’essor industriel de ses membres. C’est le régime préférentiel appliqué par le moyen de la Taxe Préférentielle Communautaire (TPC).
Chapitre III : Les régimes commerciaux préférentiels
Du point de vue juridique l’octroi du régime préférentiel peut prendre une forme conventionnelle (réciproque) ou non conventionnelle (unilatérale). Cette situation a conduit à la prolifération des régimes préférentiels.
Le régime préférentiel prévoit qu’un pays ou une union de pays décide quelles marchandises et de quelle origine bénéficieront de préférences (faveurs) à leur importation. En d’autres termes l’application du régime préférentiel se traduit par la distinction entre les marchandises qui disposent et celles qui ne disposent pas d’un traitement préférentiel (privilégié) à l’importation. Cela peut signifier qu’une marchandise similaire peut subir un traitement tarifaire et non tarifaire complètement différent en fonction de son origine. Autrement dit, la marchandise qui possède une origine préférentielle « rencontrera » à son importation moins de barrières d’ordre tarifaire et non tarifaire par rapport à une marchandise d’origine non préférentielle.
En prenant comme exemple, le cas de la CEDEAO (Communauté Economique Des Etats de l’Afrique de l’Ouest), le chapitre VIII intitulé « la coopération dans le domaine du commerce, des douanes, de la fiscalité, des statistiques, de la monnaie et des paiements » dispose en son article 36 que les produits du cru et de l’artisanat traditionnel originaire des Etats membres de la Communauté ne sont soumis à aucun droit à l’importation et à aucune restriction quantitative au sein de la région. L’importation de ces produits à l’intérieur de la Communauté ne fait pas l’objet d’une compensation pour perte de recette.
Pour étayer cette volonté communautaire, le protocole de la Conférence des Chefs d’Etats et de Gouvernement sur la libre circulation des marchandises dispose que « l’objectif du programme de libération des échanges commerciaux de la CEDEAO est d’établir progressivement au cours d’une période de 15 ans, à partir de sa mise en place c’est-à-dire le 1er janvier 1990 une union douanière entre les Etats membres de la Communauté. Cette Union douanière implique l’élimination totale des droits et taxes d’effets équivalents, des obstacles non tarifaires et l’établissement d’un tarif extérieur commun ».
C’est pourquoi dès sa création, la CEDEAO a opté pour une libéralisation totale des produits
du cru et de l’artisanat traditionnel. Dans cette optique, les produits du cru et de l’artisanat
traditionnel doivent circuler librement entre les Etats membres en franchise de tous droits et taxes d’effets équivalents sans restriction quantitative ou administrative. Pour obtenir la franchise, les produits du cru et de l’artisanat traditionnel doivent remplir les conditions suivantes :
– être originaires d’un Etats Membres ;
– être repris dans la liste des produits annexés aux décisions portant libéralisation de ces produits ;
– être accompagnés d’un certificat d’origine et d’une déclaration d’exportation.
Le commerce de ces produits est libéré de toutes entraves tarifaires ou non à leur entrée dans un Etat membre. Cette mesure s’explique par l’importance de ces produits, notamment ceux agricoles, dans la vie des populations ; les mettre au même pied d’égalité que les productions intérieures de même espèce devrait permettre aux populations de la zone sahélienne de pouvoir disposer, à des prix relativement moins élevés des produits alimentaires en provenance des côtes.
Mais ces dispositions importantes ont-elles produits l’effet escompté ?
Les statistiques officielles de la CEDEAO laissent apparaître que 10 à 15 % des échanges des pays membres sont réalisés à l’intérieur de l’espace de la CEDEAO. Ce taux reste faible mais donne un peu d’espoir par rapport au fait qu’il était à peine de 2% à sa création. A l’heure actuelle, selon William AMPONSAH, professeur associé de commerce international et de développement à l’Université d’Etat de la Caroline du Nord, « les accords régionaux se caractérisant par des échanges restreints, dépendent des produits primaires et représentent un commerce limité entre pays membres ». Cela s’explique par le fait que la plupart des pays exportent des matières premières et non des produits finis10 si bien que les importations africaines les intéressent peu.
Selon la Banque Mondiale, trois quarts des exportations intracommunautaires proviennent de
trois (3) pays que sont la Cote d’Ivoire, le Ghana et le Nigeria. Il s’agit surtout de produits
primaires. Le pétrole représente à lui seul 30% de ces échanges et le coton, le bétail sur pied,
Se référer au protocole n° A/DEC/1 5/5/1980 sur la libre circulation de marchandises signé par la conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement
Voir supra sur les entraves au développement du commerce,
le maïs et le cacao 18%. Dans une moindre mesure, le poisson frais, les légumes, le thé et le sucre sont aussi exportés. Les produits manufacturés représentent 15% de ces échanges. D’après une étude récente de la Banque Mondiale intitulée `’que s’agit-il du fil médicament, du fer et de l’acier, des produits chimiques et machines-outils ? `’, la majorité des exportations d’un pays membres vers les autres membres de la Communauté se limite souvent à quelques produits de base.
Il apparaît donc que la part des produits du cru dans le commerce intracommunautaire, bien que leur circulation soit libre, est relativement faible par rapport à l’ensemble des échanges. Il faut remarquer donc qu’un des objectifs fondamentaux de la Communauté cités à l’article 3 du Traité sur le développement des échanges des produits agricoles reste encore incertain.
En effet, les statistiques évoquées montrent qu’il n’y a pas eu développement des échanges de nouveaux produits agricoles, mais libéralisation pour des produits dont le commerce est ancestral. Ceci peut s’expliquer par le fait que la nature a spécialisé chaque Etat dans la production des produits primaires, ce qui limite fortement la circulation des produits alimentaires auxquels les populations ne sont pas encore habituées. Des campagnes nationales d’informations pourraient conduire à une variation des habitudes alimentaires et intensifier la demande d’un certain nombre de produits. De telles campagnes sont d’autant plus urgentes que depuis trois (3) décennies déjà, les pays du sahel n’arrivent plus à nourrir leurs populations avec leurs productions traditionnelles (mil, sorgho, mais…)
Conformément aux dispositions de l’article A/DEC/15/5/80 des Chefs d’Etats et de Gouvernement et l’article 7 du Règlement C/REG/3 /4/02 portant immatriculations des entreprises, l’on considère comme originaires, les produits du cru extraits de la mer par des bâteaux immatriculés dans un Etat Membre. Cette disposition parait en contradiction avec la notion d’origine communautaire qui se dégage de la production ou l’obtention du produit originaire de la Communauté.
Cet article A/DEC/. 15/5/80 permet aux chalutiers des multinationales de se faire immatriculer dans un Etat membre et de déverser leurs récoltes marines, à peu de frais, dans un Etat membre de la CEDEAO au détriment des petites unités industrielles ou artisanales de pêche existantes dans les pays côtiers. Les rédacteurs du Traité ont voulu promouvoir des produits primaires ou artisanaux pour la production desquels il n’y a pas eu de transformation
industrielle. C’est pourquoi sans distinction, la farine de manioc, le bois scié, le café tonifié, produits nécessitant une forte valeur ajoutée, ont été confondus avec le miel naturel, le tabac brut …. Cette conception devait permettre d’englober le maximum de produits afin de libérer leur circulation. Malheureusement les statistiques évoquées ci-dessus montrent que seuls quelques produits de la longue liste intéressent les opérateurs économiques encore imprégnés de l’organisation coloniale des échanges ouest africains.
En conclusion, on peut retenir que si la volonté d’intensifier les échanges des produits du cru et de l’artisanat traditionnel est clairement exprimée dans le Traité par la liberté totale de leur circulation, on constate dans la pratique que ces échanges restent encore faibles et se limitent à quelques produits dont la nécessité dans la situation actuelle n’est pas toujours évidente (noix de cola par exemple).
Dans la perspective d’une meilleure utilisation des ressources des sols et du sous-sol de la sous région, une politique de coopération dans le domaine des produits primaires, devrait privilégier l’autosuffisance alimentaire des populations de la Communauté. La Communauté étant bâtie sur la solidarité, il convient d’utiliser au maximum les potentialités agricoles, quel que soit le lieu où elles se trouvent, pour encourager le développement de la production agricole, vivrière en particulier, car l’expérience des puissances occidentales montre que ce sont également des puissances agricoles. Le développement industriel des Etats de la CEDEAO ne pourra pas se faire sans leur développement agricole.
Pendant longtemps, les pays sous-développés ont pensé qu’il leur suffisait d’accélérer leur développement industriel pour rattraper leur « retard » sur les pays développés. Les Etats de la CEDEAO n’ont pas échappé à cette conception et ont conçu un mécanisme qui devait favoriser l’essor industriel de ses membres. C’est le régime préférentiel appliqué par le moyen de la Taxe Préférentielle Communautaire (TPC).
Un des objectifs fondamentaux du Traité instituant la CEDEAO est de développer les
échanges des produits agricoles et industriels entre les Etats membres dans une zone de libre
Les objectifs et le fonctionnement du régime préférentiel
Le régime préférentiel spécial matérialisé par la Taxe Préférentielle Communautaire (TPC) est considéré comme la pierre angulaire du système de coopération institué par la CEDEAO pour le développement des échanges des produits industriels. Le commerce de ces produits est régi par les chapitres VIII et suivants du Traité Révisé, complété par les dispositions de la décision A/DEC/1 5/5/80 du 28 mai 1980 relative à la libéralisation des échanges.
Le chapitre VIII et la décision A/DEC/1 5/5/80 du 28 mai 1980 posent le principe du régime préférentiel spécial. En effet, les produits industriels originaires peuvent bénéficier pour les exportations dans les autres Etats membres, d’un régime préférentiel reposant sur la substitution d’une taxe dite « Taxe de Préférence Communautaire » à l’ensemble des droits et taxes d’effets équivalents perçus à l’importation dans chaque Etat membre.
Les produits industriels pour bénéficier du traitement préférentiel doivent remplir les conditions suivantes :
– être originaires d’un Etat membre ;
– être agréés ;
– être accompagnés d’un certificat d’originaire et d’une déclaration d’exportation.
La Taxe de Préférence Communautaire est liquidée et perçue dans l’Etat membre importateur au lieu et place des droits et taxes d’entrées auxquels elle se substitue. Les objectifs de la TPC peuvent se résumer comme suit :
- intensifier les échanges intracommunautaires des produits industriels ;
- V’ accélérer l’industrialisation des pays membres ;
- protéger les industries naissantes dans chaque Etat membre.
Pour l’application de cette préférence spéciale, la notion de produits originaires est fondamentale. Le protocole A/P1/03 du 25 novembre 2005 de Dakar relatif à la définition de produits originaires dispose que « sont considérés comme produits originaires des Etats Membres,
a)les produits de l’agriculture, de l’élevage, de la pêche, de la forêt, de l’usine, de l’énergie entièrement obtenus dans l’espace communautaire. Par ailleurs les marchandises fabriquées en zone franche ou sous régime économique particulier entraînant la suspension ou l’exonération partielle ou totale des droits d’entrée ne doivent pas bénéficier de la qualité originaire.
b)les produits entièrement obtenus dans l’espace communautaire, les non entièrement ayant subis une transformation ou une ouvraison substantielle qui peut se mesurer par le changement de position tarifaire ou le critère de la valeur ajoutée, à savoir que dans la fabrication de ces produits, les matières utilisées ont reçu une valeur ajoutée d’au moins 30% du prix de revient ex-usine hors taxe ; les produits industriels obtenus à partir de matières premières d’origine étrangères dont la valeur ajoutée est égale au moins à 30% du prix de revient ex-usine hors taxe de produits ».
La TPC est un régime douanier préférentiel spécial qui permet aux produits industriels originaires de bénéficier d’un taux d’importation plus faible que celui appliqué aux produits similaires importés des pays tiers ou même de la Communauté, mais qui n’ont pas été agréés à ce régime. Le taux de la TPC dans certains cas est nul. C’est aussi une taxe fiscale, quant il n’est pas nul, permettant aux Etats membres importateurs de se procurer des recettes budgétaires par la perception directe de la taxe sur les produits entrant dans leur territoire.
La TPC présente également d’autres caractéristiques :
– son taux n’est pas unique ; selon le protocole A/DEC/15/5/1980 à Lomé relatif à la libéralisation « le taux est fixé dans chaque cas par la décision d’agrément du produit concerné ». Le taux varie donc en fonction des préférences tarifaires que les Etats membres décident de s’accorder mutuellement ; il peut ainsi être différent d’un produit à un autre, d’une entreprise à l’autre ; le principe de la réciprocité ne joue donc pas, tout comme la clause de la Nation la plus favorisée.
– le régime de la TPC n’est pas accordé de façon définitive : l’agrément peut être simplement assorti d’un délai pendant lequel il ne peut faire l’objet de révision.
– la décision d’agrément peut accorder une clause d’exclusivité pendant la
durée de laquelle les produits similaires fabriqués dans un Etats membre ne pourraient être agréés.
– l’agrément ne peut être retiré que par le Conseil des Ministres sur demande motivée d’un Etat membre. Pour prétendre ou bénéficier de la TPC, le demandeur de l’agrément doit remplir les conditions de forme et de fond prévues au Traité.
La décision d’octroi de l’agrément
Les articles de 1er à 8 de la Décision C /DEC/3/6/88 portant définition de la procédure d’agrément des produits industriels et entreprises issues de la Conférence des Chefs d’Etats et de Gouvernement du 21 juin 1988 à Lomé dispose : « les entreprises qui désirent bénéficier de la préférence communautaire doivent présenter une demande d’agrément à leurs autorités compétentes qui la transmettent au Secrétariat Général de la CEDEAO( aujourd’hui présidence de la Commission CEDEAO), après avoir été retenu comme produit qui répond au critère d’origine et devant bénéficier de l’avantage. Cette demande est établie sous la forme d’un dossier type qui reprend tous les renseignements successibles de permettre de reconnaître si le produit dont l’agrément est sollicité peut être considéré comme originaire de la Communauté. La présidence de la Commission CEDEAO procède au dépouillement et à l’étude des ces dossiers en vue de leur soumission à la commission commerce, des douanes, de l’immigration, des questions monétaires et des paiements lors de ses réunions de mai / juin aux fins d’examen et de recommandation au Conseil des ministres qui décide de l’octroi de l’agrément ; dans le cas contraire, le dossier est renvoyé à l’entreprise par l’intermédiaire des autorités compétentes ».
La condition essentielle pour l’octroi du bénéfice du régime préférentiel, est celle de l’origine communautaire des produits. L’origine communautaire n’est reconnue, au niveau des experts, que dans les conditions, déjà citée et prévues à l’article 8 de la décision du protocole relatif à la définition de la procédure de l’agrément. L’agrément est accordé pour un taux de TPC déterminé .Ce taux est déterminé en fonction de plusieurs critères ; il sera tenu compte notamment :
– du montant de la fiscalité applicable, dans chacun des Etats membres, à des produits similaires importés de pays tiers ;
– de l’utilisation ou non de matières premières communautaires ;
– de l’existence ou non, dans la zone, de plusieurs entreprises opérant des fabrications similaires ;
– La nécessité d’assurer aux industries des pays enclavés (Burkina Faso, Mali, Niger) une certaine préférence par rapport aux industries similaires des Etats côtiers, celles-ci bénéficiant d’avantage en matière d’infrastructures économiques.
Les effets de l’agrément au régime de la TPC
L’application d’un régime préférentiel conduit à d’importantes pertes fiscales pour l’Etat importateur. En effet, la perception par un pays de droit d’entrée sur la plupart des produits importés, plus qu’une mesure protectionniste, est un moyen parmi d’autres d’accroître les recettes budgétaires.
La convention UDEAO du 06 juin 1966 préconisait de ne taxer les produits originaires que de moitié, ce qui entraînait une perte équivalente de recettes budgétaires pour les Etats. Avec le régime de la TPC, les pays importateurs accroissent leurs recettes car non seulement ils perçoivent immédiatement la taxe d’entrée (TPC), mais aussi le mécanisme de compensation leur permet de toucher la totalité des recettes qu’ils auraient normalement perçues s’ils appliquaient la fiscalité de droit commun. La fiscalité de porte étant plus faible que celle du droit commun, les consommateurs des Etats importateurs devraient bénéficier d’un prix de vente plus avantageux que celui d’un produit similaire importé d’un pays tiers.
Pour les pays exportateurs, les effets de l’application du régime de la TPC sont multiples. Pour l’Etat, plus il exporte dans la Communauté des produits agréés, plus ses charges budgétaires sont importantes car sa contribution au Fonds Communautaire de Coopération, de Compensation et de Développement dépend du rapport entre ses exportations et l’ensemble des exportations dans la Communauté. Cette charge peut être compensée par l’accroissement et le développement de la production dus à l’ouverture des marchés de la CEDEAO, ce qui aboutit à des économies d’échelle.
L’originalité du système institué par le Traité pour favoriser le développement des échanges intra-communautaires de produits industriels, réside dans le Fonds de Coopération, de Compensation et de Développement.
Des accords similaires ont été établis dans les pays asiatiques entre la Chine et l’ASEAN (l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est). Dans le cadre de l’accord sur le libre-échange Chine-ASEAN, chaque partie fournira à l’autre un accès préférentiel à son marché de services, incluant les services commerciaux et le tourisme.
D’ici 2015, une exonération des droits de douane sera appliquée à 90% des produits circulant entre la Chine et les quatre nouveaux membres de l’ASEAN (le Cambodge, le Laos, le Myanmar et le Vietnam).
Les cinq pays fondateurs de l’ASEAN à savoir l’Indonésie, la Malaisie, les Philippines, Singapour et la Thaïlande, ainsi que le Brunei vont diminuer les droits de douane sur les importations chinoises de 12,8% à 0,6%.
De son côté, la Chine a réduit les droits de douane moyens sur les marchandises en provenance de l’ASEAN qui passent de 9,8% à 0,1%.
Il est ainsi constaté que l’introduction de régime préférentiel dans le circuit commercial international est un tournant important dans l’opération d’importation.
Par conséquent, les opérateurs économiques sont conduits souvent à se poser la question
concernant l’obtention pour leurs marchandises d’un régime préférentiel par rapport au pays d’importation, ce qui leur permettrait de réduire la dette douanière et surtout de bénéficier d’un régime non tarifaire moins contraignant.
PARTIE II : L’origine des marchandises élément stratégique de l’entreprise
Chapitre I : définition de l’origine
Il n’existe pas de définition internationale de l’origine bien que l’on distingue deux régimes: le préférentiel et le non préférentiel. En préférentiel, tout est basé sur des accords bilatéraux ou multilatéraux. En non préférentiel, chaque pays applique ses propres règles même si au sein de certaines unions économiques régionales les règles non préférentielles sont harmonisées pour l’ensemble des Etats Parties à ces Unions.
Il s’agit de ne pas confondre origine et provenance (dernier pays par lequel a transité la marchandise). Les règles d’origine visent à déterminer la «nationalité» d’une marchandise. La détermination du pays d’origine est avec la classification et l’évaluation en douane, un élément essentiel pour établir le montant des droits de douanes et des taxes à percevoir. L’origine permettra s’il y a lieu de déterminer l’application éventuelle des mesures de politique commerciale (quotas, droits antidumping, embargo…).
Il existe plusieurs méthodes et critères pour déterminer l’origine d’une marchandise. Si le critère de la transformation substantielle est universellement accepté, le critère du changement de classification tarifaire, le critère de la valeur ajoutée et le critère relatif aux opérations de fabrication ou de transformation sont également appliqués.
Du point de vue historique, jusqu’au XVIIIème siècle la notion d’origine des marchandises connaît un développement modeste dans le cadre du commerce international. L’explication tiendrait au fait que la plupart des marchandises ont été obtenues dans un seul pays sans entraîner les capacités industrielles, la force de travail, la matière première, etc., d’un autre Etat. A cette époque la notion en question est surtout employée pour établir les statistiques de commerce extérieur et pour satisfaire la curiosité des intéressés. Par exemple, en achetant une assiette chinoise au XVIIème siècle, ce qui comptait pour le preneur est plutôt l’exotisme lié au fait qu’elle venait de Chine.
Le début du XVIIIème siècle marque une nouvelle étape dans le développement de la notion d’origine des marchandises. Cette période continue jusqu’à la fin du XIXème siècle et est liée au développement de la navigation maritime et à l’application des mesures tarifaires. Pour donner un exemple, on peut se référer à la loi française sur les finances du 28 avril 1816. Cette loi a pris pour base des droits différentiels appliqués selon l’origine et les conditions de transport des marchandises. Ainsi, le législateur français poursuivait l’objectif selon lequel les navires français devaient chercher les marchandises étrangères au pays de production. En
revanche si les marchandises étaient importées par un navire étranger, elles étaient soumises à des droits de douane plus élevés. L’application des droits de douane différentiels a eu comme effet le développement de la marine française, car les marchandises bénéficiaient des droits de douane préférentiels à leur importation sur le territoire français à condition qu’elles soient transportées du pays de production vers la France par des bateaux français. A cette époque il était difficile d’imaginer que cette « différenciation » des taux des droits de douane donne naissance plus tard au « régime d’origine » préférentielle.
Du point de vue douanier il est d’usage de lier l’origine des marchandises au territoire d’un pays. Curieusement, les tentatives de définir le pays d’origine des marchandises ne sont pas si nombreuses. Parmi les premières figure celle de J. MOLIÉRAC qui date des années
trente du XXème siècle. D’après lui, « le pays d’origine est celui où la marchandise a été récoltée s’il s’agit d’un produit naturel ou fabriqué s’il s’agit d’un produit manufacturé ». Le même auteur ajoute que « fréquemment, des produits font l’objet de transformations successives dans des pays différents ; des produits d’origines différentes sont assemblés et travaillés dans un autre pays ». Il précise également que « lorsqu’un produit a subi
une transformation complète dans un pays, il est considéré comme originaire de ce pays, et lorsque la transformation est incomplète, il semble logique de le considérer comme originaire du pays où il a acquis la plus grande partie de sa valeur ».
Il n’est pas rare de voir l’origine des marchandises attachée au territoire d’un ensemble de pays qui forment un territoire douanier commun comme c’est le cas de la C.E., par exemple.
D’après une définition plus récente, l’origine d’une marchandise peut être comprise comme le « lien géographique et économique qui unit la marchandise à un pays ou à un groupe de pays dans lequel elle a été produite ou fabriquée ». Une définition similaire a été présentée par le
Professeur Claude J. BERR et Henri TRÉMEAU qui montrent que l’origine de la marchandise peut être définie comme le « lien géographique qui unit cette marchandise à un pays donné dont elle est réputée issue ».
L’origine des marchandises, ajoutent-t-ils, « est une notion abstraite dont le contenu varie suivant de nombreuses considérations, généralement tirées d’objectifs de politique commerciale ». Par la suite ces auteurs ont dégagé une théorie selon laquelle l’origine des marchandises semble ne pouvoir être définie que par voie de réglementation unilatérale. A ce sujet Mme Catherine TEULE-MARTIN ajoute que « la détermination du pays d’origine des marchandises fait partie de la stratégie commerciale de l’Etat ou d’un groupe d’Etats ». Afin de réaliser cette « stratégie », précise-telle, « l’importateur peut bénéficier des régimes tarifaires préférentiels résultant d’accords d’association ou de libre-échange ou, au contraire, se voir appliquer des mesures de contrôle du commerce extérieur ». Pour M. Jean-Michel GRAVE l’origine des marchandises « n’est qu’un facteur sur la base duquel des mesures inspirées par des politiques variées vont ou ne vont pas s’appliquer ».
Selon cet auteur « c’est bien là le problème fondamental pour qui veut définir l’origine : on peut difficilement envisager en toute indépendance des mesures dont elle conditionne l’application et de ses effets sur cette application ». Enfin, il est opportun de mentionner que la détermination du pays d’origine des marchandises s’appuie sur les « règles d’origine ». A cet égard, MM. Franklin DEHOUSSE et Philippe VINCENT montrent que les règles d’origine sont les « règles spécifiques attribuant une origine nationale à un produit afin de mettre en œuvre les réglementations commerciales »
L’étape suivante du développement de la notion d’origine des marchandises se caractérise par la division internationale du travail ce qui devait entraîner la baisse des prix, au moins en théorie. Cette division a eu comme effet la spécialisation internationale qui se traduisait par le fait que les pays ne fabriquaient pas tous les mêmes produits et qu’ils échangeaient entre eux leur production. Dans ces conditions la déclaration de l’origine des marchandises prend une importance considérable car l’établissement des statistiques du commerce extérieur, tout comme l’application des mesures tarifaires et non tarifaires, reposent sur l’origine.
La loi française du 28 avril 1816 a directement lié le pays d’origine des marchandises aux conditions de transport. On retrouve ici les premières racines de « l’application du système connu aujourd’hui sous le nom de transport direct. Ainsi, les tabacs de Saint Christophe et autres îles de l’Amérique, venant directement des colonies françaises, était tarifés à 4 livres le cent pesant, tandis que les tabacs de Virginie, du Brésil et autres pays étrangers acquittaient un droit de 13 livres
Par « régime d’origine » on pourrait entendre la totalité des réglementations nationales, régionales ou internationales applicables en matière d’origine des marchandises.
Enfin, l’étape moderne concernant l’évolution de la notion d’origine est marquée par le fait que de nos jours le régime d’origine préférentielle s’est affirmé comme un élément incontournable des échanges commerciaux internationaux
Les pays développés, qui sont en règle générale les donateurs de préférences, ne s’efforceraient pas de soutenir les pays en développement, qui sont traditionnellement les
bénéficiaires des préférences, sans avoir la possibilité de satisfaire leurs propres intérêts
d’ordre économique ou politique. Du point de vue économique, l’octroi par les pays
développés d’un régime préférentiel non conventionnel n’est pas avantageux, sauf s’il
s’agit de l’importation de la matière première, par exemple. C’est souvent l’aspect
politique qui prend le relais. En clair, lorsque les pays donateurs de préférences accordent
le régime préférentiel non conventionnel (non réciproque), ils obtiennent en revanche un
moyen supplémentaire d’influencer la politique des pays bénéficiaires (en ce sens un
proverbe africain montre que la main qui reçoit est toujours en dessous de celle qui
donne). Toutefois, il serait naïf de croire que les marchandises originaires des pays en
développement pénétreront sans difficulté sur le marché des pays développés, sauf dans le
cas de la matière première et des marchandises dont la production est moins souhaitable
dans les pays d’importation (raisons écologiques, par exemple).
Chapitre II : les règles d’origine
Définition
Les règles d’origine sont les critères permettant de déterminer le pays d’origine d’un produit. Elles sont importantes du fait que les droits et restrictions applicables dépendent dans bien des cas de la provenance des produits importés.
On constate une grande diversité dans la pratique des gouvernements en matière de règles d’origine. Si le critère de la transformation substantielle est universellement accepté, certains gouvernements appliquent le critère du changement de classification tarifaire, d’autres le critère du pourcentage ad valorem et d’autres encore le critère de l’opération de fabrication ou d’ouvraison. Dans une économie qui se mondialise, il est devenu encore plus important d’introduire un certain degré d’harmonisation dans les pratiques des Membres qui appliquent ces critères.
L’utilisation des règles d’origine
Les règles d’origine sont utilisées:
– aux fins de l’application de mesures ou d’instruments de politique commerciale tels que les droits antidumping et les mesures de sauvegarde;
– aux fins de déterminer si les produits importés doivent bénéficier du traitement de la nation la plus favorisée (NPF) ou d’un traitement préférentiel;
– à des fins statistiques;
– aux fins de l’application de prescriptions d’étiquetage et de marquage; et
– aux fins des marchés publics.
Le GATT ne contenant pas de règles spécifiques pour régir la détermination du pays d’origine des marchandises entrant dans le commerce international, chaque partie contractante était libre de déterminer ses propres règles d’origine et pouvait même appliquer des règles d’origine différentes selon les objectifs de la réglementation.
Chaque État membre importateur détermine, conformément aux dispositions de sa législation, et aux fins d’application de la clause de la nation la plus favorisée (et d’autres dispositions du GATT) si, en fait, les marchandises proviennent d’un pays donné.
Intérêt de l’harmonisation des règles d’origine
Il est reconnu par tous les pays que l’harmonisation des règles d’origine, c’est-à-dire la définition de règles d’origine qui seraient appliquées par tous les pays et qui seraient partout les mêmes quel que soit le but dans lequel elles sont appliquées faciliterait les échanges internationaux. En fait, utilisées abusivement, les règles d’origine peuvent se transformer elles-mêmes en de véritables instruments de politique commerciale, alors qu’elles ne devraient être qu’un moyen de faciliter le fonctionnement de tels instruments. Compte tenu de la diversité des règles d’origine, toutefois, cette harmonisation est un exercice complexe.
En 1981, le secrétariat du GATT a préparé une note sur les règles d’origine et, en novembre 1982, les Ministres ont décidé d’étudier les règles d’origine utilisées par les PARTIES CONTRACTANTES du GATT. Il n’y a guère eu d’autres travaux entrepris dans ce domaine jusque pendant les négociations du Cycle d’Uruguay. Vers la fin des années 80, l’évolution survenue dans trois domaines importants a contribué à focaliser l’attention sur les problèmes posés par les règles d’origine:
– On a assisté tout d’abord à une multiplication des arrangements commerciaux préférentiels, y compris des arrangements régionaux dotés de leurs propres règles d’origine;
– Deuxièmement, il y a eu une augmentation du nombre de différends relatifs à l’origine liés à certains arrangements contingentaires tels que l’Arrangement multifibres et les « autolimitations » des exportations d’acier ;
– Enfin, il y a eu un recours accru aux lois antidumping avec, parallèlement, une multiplication des plaintes pour tentative d’échapper aux droits antidumping par l’utilisation d’installations implantées dans des pays tiers.
Prenons en exemple l’accord de cycle d’Uruguay
L’augmentation du nombre et de l’importance des règles d’origine a amené les négociateurs du Cycle d’Uruguay à s’attaquer à cette question au cours des négociations.
Objectifs de l’Accord
L’Accord sur les règles d’origine vise à harmoniser les règles d’origine non préférentielles et à veiller à ce que ces règles ne créent pas en elles-mêmes des obstacles non nécessaires au commerce. L’Accord définit un programme de travail pour l’harmonisation des règles d’origine à entreprendre après l’entrée en vigueur de l’Accord sur l’Organisation mondiale du commerce (OMC) conjointement avec l’Organisation mondiale des douanes (OMD.
Principes généraux
Jusqu’à ce que le programme triennal d’harmonisation soit achevé, les Membres doivent veiller à ce que leurs règles d’origine soient transparentes, qu’elles soient administrées d’une manière cohérente, uniforme, impartiale et raisonnable et qu’elles se fondent sur un critère positif.
Champ d’application: toutes les règles d’origine non préférentielles
L’article premier de l’Accord définit les règles d’origine comme étant les lois, réglementations et déterminations administratives d’application générale appliquées pour déterminer le pays d’origine des marchandises à l’exception de celles relatives à l’octroi de préférences tarifaires. L’Accord ne couvre donc que les règles d’origine utilisées dans les instruments non préférentiels de politique commerciale tels que les droits antidumping et compensateurs, les mesures de sauvegarde, la réglementation relative au marquage de l’origine et les restrictions quantitatives ou contingents tarifaires discriminatoires, ainsi que les règles d’origine utilisées pour les statistiques commerciales et les marchés publics. Il est toutefois prévu que les déterminations établies aux fins de la définition de la « branche de production nationale » ou des « produits similaires d’une branche de production nationale » ne sont pas visées par l’Accord.
Institutions
Comité des règles d’origine
L’Accord institue, dans le cadre de l’OMC, un Comité des règles d’origine ouvert à tous les Membres de l’OMC. Ce comité se réunit au moins une fois par an et est chargé d’examiner la mise en œuvre et le fonctionnement des accords (article 4:1.)
Comité technique des règles d’origine
Un Comité technique des règles d’origine est institué sous les auspices de l’Organisation mondiale des douanes (anciennement Conseil de coopération douanière). Il a pour principales fonctions a) de conduire les travaux d’harmonisation et b) de s’occuper de toute question concernant des problèmes techniques relatifs aux règles d’origine. Ce comité se réunit au moins une fois par an et est ouvert à tous les Membres de l’OMC; les autres Membres de l’Organisation mondiale des douanes et le Secrétariat de l’OMC peuvent participer à ses réunions en qualité d’observateurs (article 4:2 et Annexe I).
PARTIE III : Discussions et recommandations
Chapitre I : Discussion
IMPACT DE L’ORIGINE DE MARCHANDISE SUR L’ACQUISITION DE PROFIT
Origine des marchandises du point de vue commerciale
Dans la pratique commerciale, deux paramètres à savoir l’appellation d’origine et le marquage d’origine ont une importance particulière pour la clientèle.
L’appellation d’origine
Ce paramètre permet de distinguer les marchandises tout comme la marque ou l’indication de provenance. Elle se propose comme objectif d’individualiser un produit en lui donnant de la valeur.
L’appellation d’origine peut être considérée comme un signe distinctif de la marchandise qui permet de maintenir et d’élargir la clientèle. En effet il se forme rapidement, un climat de confiance en faveur du produit par son appellation d’origine. Si les clients sont satisfaits de ce produit, ce signe distinctif apporte une valeur ajoutée importante au produit commercialisé. La marque de fabrique, de commerce ou de service est un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale.
Les marques ont une importance économique considérable car elles permettent d’attirer de nouveaux clients et, par conséquent, faire de la concurrence aux autres entreprises du même secteur. Pour qu’une marque soit considérée valable, le signe choisi doit être disponible, distinctif, il ne doit pas être déceptif, ni contraire à l’ordre public ni aux bonnes mœurs. Un exemple concerne le fromage « Roquefort ». Il était protégé par une Charte Royale
accordée par Charles V ; en 1350 les ordonnances de Jean Le Bon interdisaient aux taverniers de donner au vin « le nom d’un autre pays que celui où il est récolté.
En créant de la valeur pour la marchandise, l’appellation d’origine permet de protéger non seulement le produit mais également les producteurs. Par exemple, il est extrêmement difficile de concevoir dans la région de Bordeaux un projet d’aménagement urbain qui toucherait la parcelle d’un vigneron dont le vin possède l’appellation d’origine. car cette appellation, une fois octroyée, est protégée par l’Etat.
La seconde caractéristique tient au fait que la protection de l’appellation d’origine intéresse également les consommateurs car ils obtiennent la garantie de trouver dans le commerce un produit de qualité originale, donc un produit unique. Par exemple : la marque adidas est une valeur sûre pour la clientèle. Ainsi si l’entreprise lance un nouveau produit par exemple un appareil electro ménager « ADIDAS », elle n’aura pas du mal à faire accepter la marchandise auprès des consommateurs.
L’examen de la notion d’appellation d’origine. permet d’observer qu’elle donne des indications sur la qualité du produit tout en permettant de l’identifier par le sol, le climat et le savoir-faire. Cependant, on constate l’absence d’une définition commune de l’appellation d’origine. En effet, le contenu technique de celle-ci varie en fonction de la réglementation nationale, communautaire ou internationale dans ce domaine.
Le marquage d’origine
Afin d’exercer pleinement sa liberté de choix le consommateur doit être bien informé103 sur les produits qui lui sont proposés à la vente. Le marquage d’origine se propose donc comme objectif d’informer les consommateurs sur le pays dans lequel le produit a été obtenu. Cette technique est considérée comme l’un des facteurs de transparence du marché. Elle contribue, en effet, au développement de la concurrence qui est le moteur du développement économique. L’information des consommateurs apparaît alors comme l’un des moyens de prévention des inconvénients et des déconvenues de l’opération de consommation.
Aujourd’hui l’obligation d’informer incombe aux professionnels (producteurs, vendeurs, etc.). Il est considéré qu’ils sont bien placés pour informer les consommateurs sur les produits. Cette information doit être exacte et ne doit en aucun cas être trompeuse ou mensongère car toute information précontractuelle de nature « obscure ou ambiguë s’interprète contre le vendeur »
Le marquage d’origine n’est qu’un élément parmi ceux (poids, date de fabrication, délai d’expiration, prix, etc.) qui informent les consommateurs. Le marquage d’origine (made in) des marchandises est un facteur qui aide à la décision d’achat des consommateurs. Par exemple : un produit made in China n’est pas forcement gage de bonne qualité alors que les produits made in France ou made in USA en est le contraire. Ainsi le marquage d’origine peut conduire à l’augmentation des prix génératrice de profits pour les vendeurs.
Or dans la plupart des pays le marquage d’origine n’est pas obligatoire. L’apposition de la mention « made in » est alors laissée à la libre appréciation des entreprises. En d’autres termes celles-ci sont libres d’apposer une telle mention sur leurs produits lorsqu’elles y trouvent un avantage commercial. En revanche, lorsqu’il fait l’objet de l’attention des pouvoirs publics, le marquage d’origine relève d’une réglementation qui trouve ses sources sur le plan international, communautaire et national.
Origine des marchandises en relation avec les techniques douanières
Afin d’examiner la notion d’origine des marchandises il est nécessaire d’aborder la notion de provenance et celle de libre pratique. Ces notions relèvent du vocabulaire douanier spécialisé et sont considérées comme les notions les plus proches de celle d’origine.
L’origine et la provenance
L’origine d’une marchandise ne doit pas être confondue avec sa provenance. Par opposition avec la notion d’origine, qui pourrait être regardée comme une liaison géographique entre une marchandise et un pays donné, la notion de provenance se réfère uniquement aux conditions
d’acheminement de la marchandise vers le pays d’importation. Cette notion n’a pas encore fait l’objet d’une définition normative rigide. D’une manière générale le pays de provenance est celui « d’où les marchandises ont été expédiées directement à destination du territoire douanier ».
Cette notion vise en effet « le pays dans lequel a commencé le dernier transport de la marchandise ». Autrement dit, la provenance des marchandises concerne uniquement le pays d’où a commencé la dernière opération de transport (transport direct lorsqu’il s’agit d’importations de marchandises d’origine préférentielle) vers le pays d’importation.
Par exemple, les marchandises fabriquées en Chine, expédiées vers la Russie puis importées sur le territoire de la C.E. gardent toujours leur origine chinoise. En revanche elles sont considérées de provenance russe. Or le plus souvent le pays d’origine des marchandises coïncide avec le pays de provenance comme c’est le cas des marchandises fabriquées en
Chine et importées directement sur le territoire communautaire.
L’importateur doit donc bien comprendre la réglementation douanière concernant les règles d’origine des marchandises dans le pays de provenance pour savoir si l’opération commerciale est avantageuse ou non.
L’origine et la libre pratique
La libre pratique est une notion strictement communautaire. Autrement dit, la mise en libre pratique d’une marchandise non communautaire a comme conséquence l’octroi du statut
de marchandise communautaire. La mise en libre pratique « comporte l’application des mesures de politique commerciale, l’accomplissement des autres formalités prévues pour l’importation d’une marchandise ainsi que l’application des droits légalement dus ».
Suite à l’apparition des premiers cas de grippe aviaire, la plupart des pays y ont réagi en introduisant des prohibitions fondées sur des mesures sanitaires exceptionnelles prises en vue de protéger la santé publique. Les Etats qui ont introduit ces prohibitions d’ordre exceptionnel ont utilisé la notion d’origine des marchandises mais également celle de provenance. Par exemple, l’importation des poulets américains sur le territoire communautaire se verra refusée dans le cas où ces animaux auront séjourné pendant quelques jours au Vietnam (pays contaminé à l’époque) avant d’être abattus et cela pendant l’épidémie de la grippe aviaire.
En d’autres termes il faut distinguer une marchandise d’origine communautaire (ce qui
veut dire marchandise produite ou obtenue sur le territoire communautaire) d’une marchandise tierce qui acquiert le statut de marchandise communautaire grâce à sa mise en libre pratique et qui garde son origine initiale. Par exemple, un micro-ordinateur d’origine japonaise est introduit sur le territoire communautaire par le port de Rotterdam et mis en libre
pratique aux Pays-Bas (cela signifie que par rapport à cette marchandise toutes les formalités douanières ont été accomplies) ; cédée ensuite à un revendeur français, à l’expédition ou bien à la destination, cette marchandise garde son origine japonaise.
La mise en libre pratique, ne peut changer l’origine des marchandises extracommunautaires. Certes, ces marchandises peuvent acquérir le statut de marchandises communautaires mais elles restent, malgré tout, des marchandises originaires des pays tiers.
Origine douanière des marchandises
Dans les échanges commerciaux internationaux le calcul des droits de douane, l’application des mesures non tarifaires et l’établissement des statistiques du commerce extérieur sont des données importantes.
Le classement tarifaire consiste à trouver la position tarifaire qui correspondrait au mieux à une marchandise donnée. En d’autres termes l’opération de classement se réduit à la recherche de la position tarifaire sous laquelle la marchandise est reprise dans la nomenclature la nomenclature est une liste exhaustive de produits de toute nature énumérés dans un certain ordre.
Il faut tenir compte du fait que le classement tarifaire de la marchandise est d’une importance considérable car il conditionne le montant des droits de douane et l’application des mesures non tarifaires.
En effet, il n’est pas rare d’observer un lien entre le classement des marchandises selon la nomenclature et l’application des mesures tarifaires et de certaines mesures non tarifaires qui se fondent sur l’origine. En fait, l’opération de classement devient d’une importance majeure lorsque les doutes s’installent quant au classement de la marchandise sous une position tarifaire ou sous une autre. Dans ce cas l’importateur peut se trouver facilement dans une situation très délicate. Il pourrait s’agir du fait que l’une des deux positions tarifaires en concurrence n’accorde pas le bénéfice du régime d’origine préférentielle. Par conséquent, cela peut changer toutes les données de l’opération d’importation, mettant directement en cause sa rentabilité. Il suffit d’imaginer, par exemple, qu’un produit d’origine chinoise classé comme « accessoire musical » soit classé comme « appareil destiné à mesurer la fréquence du son », ce nouveau classement l’empêchant de bénéficier d’un traitement préférentiel. De même on peut se demander si le fromage frais qui se présentait en forme emballée comme pâte ou une masse compacte est une « pâte à tartiner laitière » ou bien un « fromage râpé »
Un autre exemple concerne certains vêtements qui prétendaient à être classés comme « pyjamas » mais qui finalement ont été reclassés comme « pantalons et hauts », ce nouveau reclassement conduisant au recalcule à la hausse des droits dus. Selon un autre exemple, il est relativement facile de se tromper sur la position tarifaire à déclarer lorsque le même produit prétend à être classé comme « chemise de nuit » ou comme « robe de fibres textiles synthétiques ». Dans la même logique on peut se poser la question si la carte réseau relève de la catégorie des « ordinateurs » ou du « matériel de télécommunication » ? On peut se demander enfin comment procéder pour trouver la bonne position tarifaire des appareils dites à « fonctions multiples » (téléphones qui photographient ; appareils photos qui filment ; PDA qui remplissent les fonctions d’un ordinateur mais qui peuvent aussi être dotés d’un GPS ; appareils qui peuvent à la fois imprimer, scanner, télécopier et photocopier ; etc.). Dans ce dernier cas il faudrait se poser la question concernant le « caractère essentiel » du produit ou alors celle visant la « fonction principale » de l’appareil.
En conclusion l’application du régime d’origine préférentielle ou non préférentielle dépend parfois de l’opération de classement tarifaire qui est important pour l’acquisition des profits.
Le traitement douanier des marchandises
La stratégie commerciale d’une entreprise pourrait se concevoir comme un ensemble de mesures qui se proposent comme objectif de restreindre les dépenses et d’accroître les bénéfices. Toutefois la réussite de la stratégie ne peut se séparer de la politique commerciale de l’Etat. La politique commerciale emploie divers outils tels que les mesures tarifaires et non tarifaires. Ces mesures ne sont que des instruments qui permettent la réalisation de la politique commerciale. Or la politique commerciale ne repose pas uniquement sur les mesures tarifaires et non tarifaires. Elle comprend également les règles de détermination de l’origine des marchandises, de la valeur des marchandises en douane, les accords commerciaux de nature conventionnelle ou non conventionnelle, etc. En effet, toute mesure qui concerne directement ou indirectement le commerce des marchandises relève de la politique commerciale.
Toute entreprise soucieuse du succès de sa stratégie commerciale doit savoir se positionner par rapport à la politique commerciale adoptée par le pays où elle investit.
Impact de l’application du régime préférentiel
Les opérateurs économiques qui pratiquent les échanges commerciaux internationaux de marchandises se trouvent souvent dans une situation assez délicate. D’un côté, les marges liées à la production sont de plus en plus modestes suite à la modernisation, à la robotisation, etc. De l’autre côté, l’uniformisation du coût de production dans divers pays oblige les entreprises à s’intéresser à la taxation préférentielle.
Il ne laisse aucun doute que les taux des droits de douane appliqués à l’importation dépendent étroitement de l’origine des marchandises : pour des marchandises similaires bénéficiant dans le premier cas d’un traitement préférentiel et dans le second cas d’un traitement non préférentiel, les taux des droits de douane ne seront pas les mêmes. Cela explique d’ailleurs la raison pour laquelle les opérateurs économiques cherchent à bénéficier d’un régime préférentiel à l’importation. Ainsi, les entreprises essayent de s’accommoder au nouveau
climat qui règne dans le commerce international. Celui-ci les oblige à prendre en compte l’origine des marchandises bien avant le déroulement de l’opération d’importation.
Un avantage certain pour les entreprises concerne leur délocalisation. Ce processus prend d’ailleurs une ampleur considérable pour les pays occidentaux car il permet de diminuer les coûts de production dus à la faiblesse de salaires des mains d’œuvres, l’absence de revendication syndicale….par exemple : le salaire d’un ouvrier Chinois, Indien, Africain est beaucoup moins elévé par rapport aux salaires des ouvriers Français. La délocalisation est également avantagée grâce à l’application droite de douanes préférentielles, souvent à taux zéro, à condition que l’opérateur économique apporte la preuve de l’origine préférentielle de celle-ci par rapport au pays d’importation. Par exemple, tout en sachant que les marchandises originaires d’un pays membre de la C.E. sont fortement taxées à leur importation sur le territoire de la Fédération russe, une entreprise française pourrait envisager de délocaliser la ligne de production en Moldavie, ce qui permettrait au produit fini d’acquérir
l’origine moldave. Par la suite cette marchandise bénéficiera d’un régime préférentiel de nature conventionnelle à son importation sur le territoire douanier russe.
Risques liés aux jouissances du régime préferentiel
Il ne fait aucun doute que la notion d’origine préférentielle des marchandises a pris une place clé dans le commerce international. Les intérêts qui s’attachent à cette notion tiennent à l’application des mesures d’ordre tarifaire et non tarifaire qui diffèrent considérablement en fonction de l’origine des marchandises. Il va de soi que les opérateurs économiques sont toujours à la recherche d’un régime d’origine préférentielle par rapport au pays d’importation.
Or la prolifération des régimes préférentiels, vivement encouragée et encourageant pour l’entreprise, fait que cette matière devient de plus en plus difficilement maîtrisable par les opérateurs économiques. De ce fait, les importateurs recourent souvent aux intermédiaires « dont il leur est difficile de s’assurer qu’ils ont une parfaite connaissance des règles du jeu ». Par conséquent, les entreprises courent le risque de se voir reprocher, même quelques années plus tard, d’avoir présenté une fausse déclaration d’origine auprès des autorités douanières du pays d’importation.
L’activité des opérateurs économiques est sérieusement perturbée à cause de la complexité des règles d’origine. Ni le critère de « transformation substantielle » employé par les règles non préférentielles, ni le critère de « transformation suffisante » ou celui de « produits
suffisamment ouvrés ou transformés » employés par les règles préférentielles, ne satisfont aux exigences actuelles du commerce international. Ainsi la déclaration de l’origine peut entraîner un sérieux handicap pour l’opérateur économique dans le cas où les autorités douanières établiraient que l’origine déclarée ne correspond pas à celle réelle. Déclarer l’origine des marchandises devient donc une opération à grand risque, surtout que la fausse déclaration de l’origine est sévèrement punie
Il relève de l’intérêt de l’importateur de faire en sorte que les marchandises soumises à l’importation puissent passer plus facilement la barrière tarifaire et la barrière non tarifaire. Il apparaît alors que l’origine des marchandises joue un rôle capital car l’application des mesures tarifaires et de certaines mesures non tarifaires repose sur l’origine. Par conséquent, certains opérateurs économiques prennent le risque de frauder sur l’origine afin de pouvoir afficher des prix plus compétitifs : cette technique consiste à faire passer une marchandise d’origine non préférentielle pour une marchandise d’origine préférentielle.
On observe sans difficultés qu’un simple « changement » d’origine peut s’avérer très « rentable ». On peut même dire que l’intérêt de frauder lors de la déclaration de l’origine
caractérise les échanges commerciaux internationaux modernes.
Dans l’affaire « chemisettes », un entrepreneur français a été poursuivi car il a importé en France, le 23 juillet 1982, en connaissance de cause, 23000 chemisettes en les déclarant originaires d’Italie. En réalité ces marchandises n’avaient fait que transiter par le territoire italien. L’enquête a établi que ces marchandises étaient d’origine turque. Cette déclaration
frauduleuse a eu pour but d’échapper à l’application des mesures d’ordre tarifaire et non tarifaire. Il faut préciser également qu’en vue de dissimuler l’origine turque des marchandises, l’opérateur économique a apposé des étiquettes portant les mots « made in Italy ».
Dans le contexte d’une autre affaire, « langues de boeuf », le contrôle des services vétérinaires du port du Havre a établi que les langues de boeuf congelées ont été destinées à la société française « Brittania » et qu’elles étaient déclarées originaires d’Argentine. En réalité cette
marchandise était originaire du Brésil d’où son importation était interdite aux termes des décisions prises par la Commission européenne pour des raisons sanitaires. L’enquête a constaté vingt cinq autres importations de la même marchandise pour le compte de la même société et cela au cours de la période comprise entre le 25 avril 1994 et le 23 août 1995. Ces
importations n’ont pu être réalisées qu’en déclarant une fausse origine des marchandises.
Un autre exemple peut être décrit. Dans l’affaire de la « porcelaine chinoise » la société de droit français « SMT » a été poursuivie car elle a importé à plusieurs reprises entre 1995
et 1999 de la porcelaine d’origine chinoise tout en la déclarant originaire du Bangladesh, d’Inde et de Singapour. Les déclarations frauduleuses de l’origine ont eu pour but et pour effet d’obtenir des avantages à l’importation et d’éluder l’application des mesures de prohibition liées à la production d’une licence à l’importation.
L’importation du « linge de table » se trouve au centre de l’attention d’une autre affaire. A l’époque des faits deux sociétés liées en affaires, « Kaufmann frères » et « Meslay textiles », ont procédé à de nombreuses importations en France entre le 2 janvier 1964 et le 4 juillet
1966 de linge de table, en déclarant ces marchandises sous origine Hong- Kong. En réalité, les linges de table étaient originaires de l’Irlande. Ces marchandises ont été temporairement admises à Hong-Kong en vue de leur apposer une légère broderie. Toutefois, pour que le linge de table acquière l’origine Hong-Kong, apposer une légère broderie est considéré comme
insuffisant. En effet il fallait démontrer que la broderie apposée a fait augmenter d’au moins 50% la valeur de la marchandise, ce qui n’était pas le cas. Néanmoins, en toute connaissance de cause les importateurs ont recouru à des fausses déclarations de l’origine.
Les affaires présentées dans l’exemple ci-dessus montrent les risques quant à l’utilisation de régime préférentiel. Les opérateurs économiques dans leur effort désespéré à accroître indéfiniment le profit sont tentés purement et simplement de déclarer l’origine la plus avantageuse par rapport au pays d’importation. Cependant un tel procédé peut à la fin ruiné l’entreprise à cause des sanctions encourues.
Les entreprises peuvent également courir des risques sans qu’ils les réellement voulu à cause de « la négligence » des partenaires économique.
Par exemple, une entreprise italienne a procédé à l’importation en Italie depuis Hong-Kong de plusieurs lots d’appareils radio à transistors. Chaque fois que ces marchandises franchissaient la frontière douanière communautaire elles étaient déclarées originaires de Hong-Kong ; les certificats d’origine correspondants justifiaient ce fait. Ces certificats étaient émis par l’autorité compétente du pays d’exportation. C’est pour cette raison que l’importateur ne pouvait pas se douter du fait que les marchandises importées ne correspondaient pas aux critères nécessaires en vue d’acquérir l’origine Hong-Kong. Il faut préciser qu’à l’époque (1971-1972) des faits l’origine Hong-Kong concernant les appareils radio à transistors donnait droit à un traitement préférentiel à l’importation sur le territoire de la C.E. Suite à un contrôle a posteriori effectué par l’administration italienne, il a été établi que les marchandises en question ne correspondaient pas aux critères communautaires leur permettant d’acquérir l’origine Hong-Kong. En conséquence, l’importateur s’est vu reprocher d’avoir déclaré une fausse origine, d’où les poursuites correspondantes.
Il ne laisse aucun doute que le mécanisme de déclaration de l’origine des marchandises présente un fort degré d’insécurité pour les opérateurs économiques. Ce mécanisme fonctionne de telle façon que les importateurs ne sont pas à l’abri des poursuites. Dans la plupart des cas les opérateurs économiques ignorent même que les problèmes liés à la
déclaration de l’origine peuvent les concerner directement.
Toujours sur le même thème, la société « Carrefour France » a acheté des bicyclettes à la société française « Veleclair ». Les certificats d’origine attestaient le fait que ces marchandises étaient d’origine chinoise. Suite à une vérification, le service des douanes françaises a constaté que la proportion de composants non chinois des bicyclettes excédait le seuil fixé par la réglementation douanière européenne. Par conséquent, la société « Carrefour » a reçu un procès-verbal valant notification d’infraction pour avoir indûment obtenu une exonération des droits de douane.
Dans une autre affaire, dans le courant des années 1991 et 1992, un opérateur économique français a effectué 43 importations d’autoradios en les déclarant sous origine indonésienne. L’importateur était en possession des certificats d’origine délivrés par les autorités indonésiennes compétentes, rien n’indiquant sur une autre origine. Suite à une mission effectuée par les représentants de la Commission européenne, il a été constaté que les autoradios en question étaient fabriqués à 55% à partir de composants d’origine de la Corée du Sud. Par conséquent, l’origine sud-coréenne des autoradios a été reconnue. Ce fait a mis
l’importateur français dans une situation difficile. Il s’est vu reprocher le fait d’avoir déclaré la fausse origine des marchandises.
Bref, les affaires présentées ci-dessus montrent les difficultés qui peuvent être rencontrées suite à la déclaration de l’origine, même si l’importateur se croit en dehors de toute fraude sur l’origine.
Les obstacles à l’application des régimes préférentiels
– En matière d’échanges internationaux, la doctrine libérale repose sur le libre échange, ce qui favorise les Etats développés grâce au jeu de l’avantage comparatif. La doctrine protectionniste (adoptée par les Etats sous développés en général et même certains Etats développés), quant à elle, s’oppose à la première et considère que l’optimum national ne peut être atteint dans tous les cas par la concurrence pure et parfaite. Par exemple certains pays d’Afrique pour protéger leur économie applique la taxe professionnelle communautaire. Le taux de cette taxe est constamment majoré. Les produits du cru et de l’artisanat traditionnel qui en principe, circulent en franchise de tous droits et taxes d’entrée, sont parfois imposés.
L’agrément à cette taxe permet aux produits bénéficiaires de ce régime d’être plus compétitifs au niveau des prix. La taxe permet de protéger les produits industriels communautaires contre ceux de l’extérieur. Nous constatons malheureusement que des Etats, et pas des moindres, empruntent cette voie.
Le protectionnisme constitue la barrière principale à la libre échange. C’est une politique économique interventionniste menée par un État dans le but de protéger son économie contre la concurrence des autres États. Les mesures protectionnistes consistent essentiellement à freiner les importations (barrières douanières, normes contraignantes, freins administratifs…), encourager les exportations (subventions diverses, incitations fiscales), privilégier les entreprises nationales dans les appels d’offres de marchés publics, empêcher les investisseurs étrangers de prendre le contrôle d’entreprises nationales…
Pour appliquer le protectionnisme, les Etats agissent sur le droit des douanes. Pour cela, ils taxent les produits importés afin d’augmenter leur prix, et ainsi diminuer la quantité achetée par les consommateurs.
Exemples :
En janvier 2009, les États-Unis ont triplé les droits de douane qu’ils appliquent sur le roquefort, tout en portant à 100% les droits de douane sur d’autres produits européens (chocolats, jus de fruit, légumes, fruits, chewing-gums…).
Cet exemple montre que le protectionnisme handicape l’acquisition de profit due à l’origine des marchandises.
– une autre mesure protectionniste concerne le dédouanement. Il s’agit d’alourdir les procédures administratives pour les importations (obligation de remplir des documents administratifs compliqués, longue période de blocage en douane, etc.).
Exemples :
– En 1982, la France a mis en place ce système pour réduire les importations de magnétoscopes en provenance du Japon. Ces derniers devaient être dédouanés à Poitiers.
Ici encore, l’origine des marchandises constitue un handicap au développement du commerce.
– les normes techniques et sanitaires sont également des outils utilisés par les Etats protectionnistes. Ces normes correspondent à un cahier des charges (types de traitements autorisés -ou obligatoires- pour les produits agricoles, etc.) qu’un produit doit remplir pour pouvoir être vendu dans un pays.
Exemples : L’Union européenne interdit les importations de bœuf aux hormones
– la limitation de la quantité des produits importés en provenance d’origine spécifique est une barrière à la libre échange. Exemples :
1- Pour la période allant du 15 décembre 2008 au 31 décembre 2010, l’Indonésie a mis en place des « licences d’importations » sur cinq cents produits (électronique, jouets, textiles, certaines denrées alimentaires).
2- quotas de l’Union européenne sur l’acier ukrainien (supprimés en mai 2008)
3- l’accord Multifibre (supprimé en 2005) établissait une limite (pour chaque pays et chaque produit) des textiles qui pouvaient être importés dans l’Union européenne. Lorsqu’il fut supprimé en 2005, on a assisté à une forte hausse des importations de textile provenant de Chine, au détriment de celles en provenance de la Tunisie et du Maroc.
– Les autorités d’un pays peuvent chercher à protéger certaines activités (considérées comme stratégiques) contre les prises de participation par des investisseurs étrangers.
Exemples :
1- En avril 2008, l’Allemagne a adopté une loi qui rend nécessaire une autorisation pour « tout investissement supérieur à 25% du capital d’une entreprise dans le domaine des « infrastructures stratégiques » et dès lors que l' »intérêt national » est en jeu »
2- En avril 2008, la Russie a adopté une loi qui rend nécessaire une autorisation pour « tout investissement supérieur à 25% du capital des entreprises de quarante-deux « secteurs stratégiques » (nucléaire, pétrole, mines, pêche, édition…) »
3- Depuis octobre 2007, une loi promulguée aux États-Unis instaure que « tout achat ou implantation d’entreprise par des fonds étrangers peut être interdit dès lors qu’il « met en cause la sécurité nationale » »
4- En 2006, les États-Unis ont interdit que P&O (société propriétaire des ports de Baltimore, Philadelphie et New York) soit rachetée par une entreprise de Dubaï
5- Le 30 décembre 2005, la France a décrété qu’une autorisation serait désormais nécessaire « pour tout investissement touchant à l’ « intérêt national » dans onze secteurs : défense, produits chimiques, technologies « duales » (pouvant servir au militaire comme au civil), etc. »
6- En 2005, les États-Unis ont interdit que la compagnie pétrolière américaine Unocal soit rachetée par le groupe chinois Cnooc
– Un pays peut instituer dans les politiques de passation des marchés publics une préférence pour les produits fabriqués localement (ou pour les services des entreprises locales).
Exemples : Les États-Unis ont instauré une clause « acheter américain » (Buy American Act) pour leurs marchés publics
LES ÉTUDES D’IMPACT SUR LA LIBÉRALISATION COMMERCIALE SUR LES PAYS
Dans le présent paragraphe, il est important d’exposer les différents impacts des APE (Accord de Partenariat économique) qui ont été mis en avant dans les études réalisées par des experts indépendants, des centres de recherche et des organisations de la société civile. Depuis que la Commission européenne a proposé de remplacer les préférences commerciales unilatérales par des zones de libre-échange avec les États ACP.
Depuis 2001, les PMA (pays moins avancés) peuvent bénéficier de l’initiative « Tout sauf les armes » selon laquelle tous les produits couverts par cette initiative exceptés les armes, peuvent entrer sur le marché communautaire en franchise de douane et libre de tout contingentement.
D’après Jean-Claude Lefort, deux raisons majeures expliquent le fait que les droits de douane constituent une source de revenu importante pour les États africains. La première raison est que les droits de douane constituent les seuls instruments de politique agricole et industrielle à la disposition de pays pauvres, qui ne disposent que de faibles ressources pour investir dans ces secteurs clés et sont donc contraints de se contenter de les protéger. La seconde raison avancée par l’auteur est que, « compte tenu de leur situation économique et sociale, caractérisée par un nombre élevé de familles d’agriculteurs, dont la seule perspective est d’assurer leur autosubsistance alimentaire, et par la taille considérable du secteur informel, les taxes à l’importation représentent un optimum fiscal et budgétaire pour ces pays été un des principaux sujets de discord ». Une rapide présentation des impacts des APE s’avère dès lors utile dans la mesure où elle rend compte des inquiétudes qu’un tel projet (les APE) a suscité tant au niveau de la société civile qu’au niveau des États membres. Par ailleurs, la nécessité d’énumérer succinctement les impacts des APE se justifie par l’importance qu’ont revêtu les études d’impacts en tant qu’outil d’aide à la décision pour les négociateurs des pays ACP. Ainsi, comme le précise la Commission économique pour l’Afrique de l’ONU dans son étude d’impacts des APE sur l’Afrique.
Avant de présenter un rapide panorama des impacts des APE mis en avant dans les diverses études, il est utile d’énoncer quelques remarques. Tout d’abord, il est important de préciser la nature théorique des études d’impacts dans la mesure où elles ont été effectuées sur base d’hypothèses ou de simulations sur les économies de ces pays. En outre, l’ECDPM évoque également les contraintes méthodologiques, telles la faible quantité et qualité de données disponibles, auxquelles les études ont été confrontées dans leur travail. D’autre part, l’ECDPM insiste également sur le fait que si toutes les études d’impacts s’accordent à dire que les APE auront un impact significatif sur les économies des Etats membres, ceux-ci varient grandement d’une région à l’autre et d’un pays à l’autre, démontrant de la sorte le caractère fortement hétérogène des régions considérées
Primo, toutes les études s’accordent sur l’importance de la perte de recettes
douanières consécutives à la réduction des entraves aux échanges dans un APE.
Malgré l’importance que revêtait l’élaboration d’études d’impacts pour les États ACP, Jean-Claude Lefort déplore qu’il n’existât toujours pas en 2006 d’étude de référence sur l’impact du libre-échange procédant à une analyse détaillée, pays par pays et région par région. En conséquence, le député explique que les pays ACP ont été contraints de lancer eux-mêmes le processus d’évaluation en ordre dispersé et dans la mesure de leurs moyens. En outre, Monsieur Lefort précise que l’étude menée par le célèbre cabinet de consultant PriceWaterhouseCoopers (à la demande de la Commission européenne), s’est avérée extrêmement décevante sans compter le fait que le rapport final n’offrait qu’ « une vision partielle et partiale des défis posés par les APE ».
Dans son rapport d’information adressé à l’assemblée nationale française, le député Jean-Claude Lefort explique que la perte de recettes douanières n’est pas considéré par la Commission européenne comme un problème majeur. En effet, selon l’auteur, pour la direction générale du commerce de la Commission, « la croissance supplémentaire qu’apporteront les APE compensera les pertes douanières. » Ainsi, pour la DG commerce, le choc budgétaire résultant des APE est un faux problème qu’il faut relativiser. Selon l’analyse de la DG commerce, un problème budgétaire peut se poser, mais celui-ci ne sera pas immédiat en raison de l’étalement dans le temps du démantèlement tarifaire.
Ainsi, selon Commission économique pour l’Afrique de l’ONU, « compte tenu de la place qu’occupent les importations de l’UE dans ces pays et de la dépendance de la majorité des pays africains à l’égard des recettes fiscales, le démantèlement tarifaire entraînera dans tous les cas une baisse considérable des revenus. » En outre, plusieurs études mettent en garde contre les impacts que ces pertes de recettes pourraient avoir sur les dépenses publiques, car des gouvernements qui ne parviendraient pas à compenser cette perte par d’autres formes de recettes n’auraient d’autre choix que de réduire leurs dépenses, ce qui mettraient finalement les secteurs sociaux en danger. Comme nous l’avons précisé ci-dessus, les pertes de recettes douanières varient d’une région à l’autre et d’un pays à l’autre en fonction de l’importance qu’occupe les pays développés en tant que partenaire commercial.
Secundo, les études prévoient que l’abaissement des recettes douanières accroisse le flux des échanges et principalement les exportations des pays developpés sur les marchés. À l’inverse, le marché communautaire étant déjà totalement ouvert (96,5 % de l’ensemble des importations des ACP par exemple ont un accès au marché communautaire en franchise de douane) aux pays ACP, la suppression des droits de douane au titre d’un APE n’aurait qu’un effet limité sur les exportations des ACP vers l’UE. La concurrence accrue des producteurs étrangers risquerait de perturber des secteurs économiques nationaux. Ainsi Cécilia Bellora évoque dans son étude que les agricultures des pays ACP sont moins compétitives que celles de l’Europe et que l’ouverture des marchés ACP aux produits européens « pourrait causer l’élimination d’une très grande partie des productions en posant de sérieux problèmes en termes de souveraineté alimentaire et de conséquences sociales puisque 63 % de la population active des ACP est agricole. » En outre, la Commission économique pour l’Afrique de l’ONU, affirme également dans son étude que le risque de désindustrialisation est réel.
Dans la région de l’Afrique orientale et australe, les pays qui subiront les pertes les plus importantes sont le Kenya, le Soudan, Maurice, l’Ethiopie, la République démocratique du Congo et les Seychelles. Au sein de la CEDEAO, le Nigeria perdra 427 millions de dollars, le Ghana 194 millions de dollars et la Côte d’Ivoire plus de 112 millions de dollars. Les membres de la CEMAC qui subiront les pertes les pus importantes sont le Cameroun, la République du Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale et le Tchad. En ce qui concerne la SADC, les effets seront significatifs pour le Botswana et le Swaziland, tandis que pour les pays de la SACU, l’Angola perdrait 103,2 millions de dollars, la Tanzanie 32,5 millions de dollars et le Mozambique 7,6 millions de dollars..
Comment les pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique peuvent-ils majorité des industries de l’Afrique subsaharienne connaîtront une réduction de leur production. Ce recul sera plus marqué dans les secteurs considérés comme étant à la base de l’industrialisation, à savoir les industries à intensité technologique faible ou moyenne, l’industrie lourde, les vêtements et les textiles. »
Nous finirons par mentionner le risque de désintégration régionale induit par les APE. La Commission économique pour l’Afrique de l’ONU (CEA) prévoit que les APE auront pour effet de renforcer les échanges de l’UE sur les marchés régionaux africains, mais qu’une partie de ces gains proviendront en réalité d’un détournement des courants d’échanges au détriment du reste du monde et du groupement constitué par la communauté économique régionale et l’Accord de partenariat économique lui-même. La CEA en conclut dès lors qu’ « à moins de prendre des mesures de compensation claires, les APE risquent de compromettre sérieusement les gains acquis jusqu’à présent dans le cadre du processus d’intégration du continent. »
Finalement, la conclusion de nombreuses études d’impact est que la libéralisation du commerce seule n’est pas une condition suffisante pour garantir des niveaux plus élevés d’échanges et/ou de développement durable au niveau économique, environnemental et social. On peut dire sans politiques ni ressources adéquates pour s’ajuster, promouvoir la transformation économique nécessaire, produire et commercialiser leurs marchandises de manière concurrentielle, les pays en voie de développement ont peu de chances de profiter des nouveaux accords de libre-échange avec les pays industrialisés .
Impact sur l’avenir
On ne peut se montrer que sceptique par rapport au processus actuel d’harmonisation des règles d’origine non préférentielle. En effet, ce scepticisme est nourri par la présence dans ce domaine d’intérêts contradictoires exprimés par divers Etats et cela indifféremment du fait
qu’il s’agisse de pays développés, de pays en transition ou de pays en développement. Il s’ensuit que sur le plan international il sera extrêmement difficile de s’entendre sur une notion commune de l’origine. On peut comprendre alors que les travaux d’harmonisation des règles d’origine entrepris dans le cadre de l’O.M.D./O.M.C. avancent avec d’énormes difficultés. On observe même un certain essoufflement de ces travaux. Pour se rendre compte de leur « avancement » on propose de citer, par exemple, le Rapport du Président du Comité des règles d’origine de l’O.M.C. n° G/RO/52 du 15 juillet 2002. Il résulte du point 2.1 de ce document qu’en juin 1999, lorsque le C.T.R.O. de l’O.M.D. a présenté les résultats provisoires de ses travaux techniques sur le programme de travail pour l’harmonisation, questions concernant les produits spécifiques devaient être encore examinées. On apprend que le rythme avec lequel progresse le travail d’harmonisation a commencé à s’accélérer depuis novembre 2000. Ainsi, le point 2.2 de ce document montre que 8 questions ont été résolues en 2000, 300 questions en 2001 et 18 questions dans la 1ère moitié de 2002. Toutefois à la fin du mois de juin 2002, parmi les questions résolues devaient encore être approuvées par le C.R.O. de l’O.M.C.
Il est à noter que la nature des travaux, souvent confidentielle, ne permet pas d’indiquer le nombre exact de questions résolues depuis juillet 2002. Cette situation est compréhensible car les intérêts les plus intimes des Etats en matière de commerce international sont en jeu. Il va de soi que les informations émanant de l’O.M.D. et de l’O.M.C. sur ce sujet sont indisponibles pour les chercheurs. Or un fait est sûr : la finalisation des travaux d’harmonisation des règles d’origine non préférentielle prévue pour le 20 juillet 1998 est repoussée sans cesse à cause de la nature extrêmement complexe des ceux-ci. Ce retard considérable témoigne de l’impasse dans lequel se trouvent ces travaux.
Le fait que les règles d’origine soient liées à la souveraineté des Etats complique d’une manière significative le processus d’harmonisation. Même si l’Annexe III de l’Accord concernant les règles d’origine non préférentielle verra le jour, il est vraisemblable que celle-ci devienne la pierre d’achoppement des échanges commerciaux internationaux. De plus,
il faut tenir compte du fait que la mise en œuvre de cette annexe demanderait des dizaines de milliers de pages d’interprétation. Cela compliquerait énormément son utilisation, ce que inquiète beaucoup les acteurs du commerce international.
Discussion sur le système actuel
Partant du fait que la notion d’origine se fonde sur le critère technique qui s’avère peu satisfaisant par rapport aux exigences modernes du commerce international et que les règles employées par ce critère (changement de position tarifaire, liste de transformations conférant ou non le caractère originaire aux produits non originaires, règle ad valorem) sont de plus en plus complexes et difficilement applicables, on peut se demander si le temps n’est pas venu de remettre en question les fondements du système actuel. Une telle réforme nécessiterait des efforts considérables car la notion d’origine des marchandises constitue sans doute l’élément clé de l’opération d’importation. Il faudrait sortir d’un cadre strictement technique
pour repenser le mécanisme de détermination de l’origine à partir d’autres
Le rattachement de l’origine à un critère économique (concept économique) permet de porter un regard différent sur le problème d’origine des marchandises. On propose de partir d’une analyse économique des données actuelles du commerce international. La plus grande part des
échanges commerciaux internationaux est le fait d’entreprises liées en affaires. A l’échelle planétaire, les chiffres concernant le processus de fusion entre les opérateurs économiques835 sont impressionnants. Ainsi, le nombre global de fusions a connu une hausse de 350% entre 1975 et 2000. A cet égard le Comité de l’O.C.D.E. sur le droit et la politique de concurrence note que « les deux grandes tendances actuelles sont la croissance ininterrompue des opérations de fusion à travers le monde et l’augmentation des fusions transnationales ».
Le concept économique d’origine pourrait être attaché à la conduite de l’opération et non pas aux procédés techniques qu’elle a mis en oeuvre. En d’autres termes, lorsqu’une marchandise est produite dans un pays sous la direction économique d’une entreprise établie dans un autre
Etat, il est plus conforme à la réalité de considérer cette marchandise comme originaire de cet Etat. Par exemple, lorsque « I.B.M. Chine » exporte des ordinateurs portables vers la C.E., ne peut-on imaginer que ces ordinateurs, conçus aux Etats-Unis, fabriqués selon la technologie
américaine et sous contrôle américain, soient considérés comme d’origine américaine ? Selon la même logique il en résulte que les voitures de marque « Mercedes » fabriquées en Turquie et exportées ensuite vers les Etats-Unis pourraient être considérées comme d’origine allemande. Il s’agirait alors de rattacher l’origine des marchandises au pays du « maître
de l’opération économique ».
On propose de retenir provisoirement ce terme le temps de trouver une formule mieux adaptée. Il est à noter cependant que par « maître de l’opération économique » on pourrait entendre le centre de prise de décisions du complexe économique qui peut signifier le point
d’« ancrage » (lieu où les décisions du complexe économique sont prises habituellement) de ce centre par rapport à un pays. Par exemple, l’entreprise américaine « Coca-Cola » commande la production de la boisson à une unité de production au Brésil. Selon le critère technique employé actuellement le produit fini obtiendra l’origine brésilienne. Or la
décision de produire cette boisson appartient à un opérateur économique américain. Le contrôle de la chaîne de production et la technologie sont Américaines. Ainsi, selon le concept économique d’origine, le produit fini sera considéré comme d’origine américaine. En d’autres termes la boisson « Coca-Cola » prendra la même origine que le pays du « maître de l’opération économique ». Par conséquent, à l’importation de « Coca- Cola » sur le territoire douanier communautaire, par exemple, cette marchandise sera déclarée sous origine américaine, d’où l’application des mesures d’ordre tarifaire et non tarifaire liées au régime d’origine non préférentielle.
On objectera évidemment que cette approche ruine en grande partie l’intérêt lié aux régimes préférentiels. Par exemple, les appareils photos de la marque japonaise Canon fabriqués à Singapour en vue d’être importés dans la C.E. s’en verraient exclus. Mais ne s’agit-il pas de
restituer aux régimes préférentiels leur véritable vocation d’encouragement au développement des industries des pays en développement ? En tout cas, cela limiterait le risque de fraude (quel est alors l’intérêt de produire dans un pays exotique tout en sachant que le produit fini ne pourra pas bénéficier de l’origine de ce pays ?) et découragerait les délocalisations, en tout cas celles qui ne visent qu’à profiter des régimes préférentiels actuels.
L’application du concept économique d’origine des marchandises représente une tâche extrêmement difficile. En ce sens il conviendrait d’apporter quelques précisions. Pour commencer il faut se demander comment procéder lorsque le produit sera importé dans le pays du « maître de l’opération économique » ? Revenant à l’exemple « Coca- Cola », il s’agirait d’importer cette boisson produite au Brésil mais considérée tout de même d’origine américaine selon le nouveau concept. Aujourd’hui le régime d’importation prévoit l’introduction des marchandises étrangères sur un territoire douanier en appliquant des
mesures tarifaires et non tarifaires. Or le régime douanier d’importation ne permet pas d’appliquer ces mesures par rapport aux marchandises indigènes. Il est compréhensible que ce régime douanier n’ait pas été conçu pour répondre à ces besoins, ce qui nécessitera sans doute certains ajustements.
La mise en marche du concept économique d’origine pourrait se heurter également à de nombreuses difficultés liées notamment à l’application des mesures de protection et de défense commerciale. On peut admettre, par exemple, qu’un complexe métallurgique situé sur le territoire de la Fédération russe fasse partie d’un groupe américain. Les barres d’acier produites par ce complexe peuvent faire l’objet de l’application des droits antidumping à leur importation sur le territoire des Etats-Unis. Selon le concept économique d’origine les barres d’acier se verront attribuer une origine américaine. Comment procéder alors au moment de l’importation de ces marchandises d’origine américaine (produites en Russie) aux Etats-
Unis ? Il est clair que l’Etat importateur préfère de ne pas perdre l’occasion de percevoir les droits antidumping. Pourtant, le mécanisme antidumping ne prévoit pas l’application de ces droits par rapport aux marchandises indigènes. Autrement dit, les autorités américaines ne peuvent pas appliquer les droits antidumping aux produits américains. Il en résulte que le passage d’un concept technique d’origine vers celui économique devrait être accompagné par une réforme globale concernant la plupart des mécanismes du commerce international. En principe, l’application des mesures antidumping, mesures compensatoires, contingents répartis par pays, etc., se verront concernés.
Il faut ensuite poser une question fondamentale quant à l’application de ce nouveau concept. Il s’agit de comprendre comment procéder dans le cas où dans la production des marchandises ont participé deux ou plusieurs entreprises chacune d’entre elles possédant son propre
centre de prise de décisions. On propose de prendre l’exemple de fabrication d’un appareil photo reflex dont l’objectif est de marque « Carl Zeiss » (société allemande) alors que le boîtier est de marque « Canon » (société japonaise). Ces deux éléments constitutifs de l’appareil photo ont été fabriqués en Chine. Selon le concept technique d’origine employé
actuellement, l’appareil sera considéré comme d’origine chinoise. Or, selon le concept économique, l’origine des deux pays – à savoir celle de l’Allemagne et du Japon – se mettrait en concurrence.
Il est à noter que l’un des buts du concept économique d’origine est d’échapper aux procédés techniques complexes afin de déterminer l’origine des marchandises. Il faudrait alors, surtout si les conditions techniques le permettent, écarter la voie selon laquelle il serait nécessaire
de s’intéresser à la valeur de chaque pièce constitutive de la marchandise839. Revenant à l’exemple présenté ci-dessus, au moment de l’importation l’objectif pourrait alors être déclaré sous origine allemande, tandis que le boîtier sous origine japonaise. Dans des cas similaires, il est plus conforme à la réalité que chaque élément constitutif de la marchandise garde sa propre origine, à condition qu’à lui seul cet élément puisse être qualifié de produit fini840.
Or cette dernière approche pourrait rencontrer des difficultés lorsqu’il s’agit de produits dont les éléments constitutifs ne peuvent pas
être séparés. Par exemple, dans la production d’une crème parfumée de visage, le parfum vient d’une société chilienne alors que les autres ingrédients sont fournis par une société française, le tout étant mélangé et emballé en Inde. La question est de savoir quelle origine prendra le produit fini selon le concept économique d’origine des marchandises ? L’origine
des deux pays est en concurrence : il s’agit d’attribuer au produit fini soit l’origine chilienne, soit l’origine française. Soit les deux !
Il est vrai que les acteurs du commerce international se sont habitués à une origine unique des marchandises. Suivant cette logique la marchandise devrait acquérir l’origine d’un seul pays, ce qui renvoie directement dans un cadre technique de détermination de l’origine. En d’autres termes on risque de revenir en arrière sans pour autant atteindre l’objectif de la réforme. Or, pourquoi ne pas s’intéresser alors à une double origine, ce qui est connu depuis longtemps dans le domaine de la nationalité des personnes ?
Selon l’exemple donné ci-dessus, la marchandise produite en Inde se verra attribuer une origine franco-chilienne. Il faut reconnaître la nouveauté de cette approche. Cependant, le problème qui apparaît est de savoir comment appliquer les mesures d’ordre tarifaire et non tarifaire au moment de l’importation de la marchandise possédant une double origine
(franco-chilienne) sur le territoire douanier canadien, par exemple. Il pourrait s’agir de taxer séparément à la frontière canadienne la valeur française puis celle chilienne trouvées dans le produit fini. La situation peut s’avérer plus complexe sur le plan de l’application des mesures de politique commerciale. Par exemple, l’interdiction par le Canada des produits d’entretien de la peau d’origine française conduira inévitablement vers l’interdiction complète d’importer la « crème de visage » même si une partie de ce produit est d’origine chilienne. Cependant, l’occasion de voir une marchandise possédant une double origine ne se présentera que très
rarement car la plupart des opérations économiques sont le fait des entreprises liées en affaires, celles-ci ayant en règle générale un seul et unique centre de prise de décisions du complexe économique « ancré » dans un pays déterminé.
Au regard du paragraphe précédent, il n’est pas inutile de rappeler que le rattachement de l’origine à un critère économique permet d’aller beaucoup plus loin. Il s’agirait de rattacher l’origine non pas au territoire du pays du « maître de l’opération économique » mais à
l’entreprise qui conduit l’opération de fabrication. Toutefois il faut reconnaître le fait que lier l’origine de la marchandise à une entreprise bouleversera profondément l’organisation entière des échanges commerciaux internationaux. Cependant cette approche paraît avoir
certaines chances de trouver sa place dans le paysage économique contemporain. A cet égard il suffit de mentionner que la politique ultralibérale qui favorise les privatisations massives des entreprises d’Etat (compagnies de chemins de fer, autoroutes, compagnies de télécommunications, médias, compagnies énergétiques, etc.) tout comme la prolifération du nombre d’entreprises privées dans des secteurs traditionnellement étatiques (prison, sécurité, santé, etc.) diminuera inévitablement, à long terme, le rôle et le pouvoir de l’Etat dont la notion se vide progressivement de sa substance. Il faut donc s’attendre à ce que les gros groupes financiers aient plus de pouvoir que les pays, qui deviennent quant à eux de plus en plus affaiblis (dette extérieure, déficit démocratique, etc.). Dans ces conditions il n’est pas à écarter le recours à la notion d’« entreprise d’origine des marchandises ». Par exemple, selon cette notion la boisson Coca-Cola prendra l’origine de l’entreprise Coca-Cola (made in Coca-Cola), de même que l’acier produit par l’entreprise Mital acquerra l’origine de cet opérateur économique (Made in Mital). Or bien que le rattachement de l’origine à un critère économique paraît une solution séduisante dans son principe, elle reste malgré tout assez difficile à mettre en œuvre et ne peut pas être envisagée comme solution d’ensemble.
Chapitre II : recommandations
Il est intéressant d’attirer l’attention des acteurs qui participent aux échanges commerciaux internationaux sur les changements à entreprendre dans le domaine de l’origine des marchandises. et l’attitude à adopter vis-à-vis des régimes préférentiels.
Quels sont alors les remèdes qui peuvent être apportés aux insatisfactions actuelles concernant l’application de la notion d’origine des marchandises ? Il s’agit d’une question très complexe. On peut cependant essayer de contribuer à la réflexion générale. On propose d’examiner les tentatives de réforme concernant l’origine des marchandises. Des réformes ont été avancés pour résoudre le problème.
Dans un article paru en 1966, dont un passage a été cité par M. J.-M. GRAVE, il était écrit que « la définition de l’origine est un problème difficile à appréhender ; il n’a d’ailleurs jamais reçu de solutions satisfaisantes dans aucun pays : les règles en la matière procèdent généralement d’une création administrative dictée par les besoins et les circonstances, marquée par le pragmatisme et l’arbitraire ». Une quarantaine d’années plus tard, cela reste encore vrai. Il est compréhensible alors que dans ces conditions la recherche d’une définition internationale de l’origine se heurte à de nombreuses difficultés. En attendant que cette définition voie le jour, il faudra mettre l’accent sur la sécurisation de l’origine, ce qui permettrait aux opérateurs économiques d’avoir plus de confiance lors de la déclaration de l’origine des marchandises.
Ces dernières décennies le commerce international s’est proposé d’harmoniser la valeur des marchandises en douane. Toutefois, la question de l’harmonisation des règles d’origine aurait dû passer avant tout au premier plan. En même temps, le retard considérable pris par la notion d’origine apporte un fort degré d’insécurité aux échanges commerciaux internationaux.
Le G.A.T.T. de 1947, qui est considéré à juste titre comme le fondement juridique moderne des échanges commerciaux internationaux, a sous-estimé la question de l’origine des marchandises. L’article IX de cet accord ne se prononce que sur le marquage de l’origine à des fins de protection des consommateurs. Cependant, ce n’est pas uniquement sur le marquage que devaient se concentrer les efforts internationaux.
Comme on le sait, actuellement chaque pays ou union de pays applique ses propres règles d’origine qui restent difficilement compréhensibles et largement arbitraires. On comprend bien la position des opérateurs économiques qui demandent des règles claires et transparentes.
Les acteurs du commerce international mettent beaucoup d’espoir dans l’harmonisation internationale des règles d’origine. Logiquement, dès que les travaux d’harmonisation seront achevés, ils devront tous appliquer les mêmes règles. Or ces travaux avancent avec d’énormes difficultés.
L’accord sur les règles d’origine,dans le volet concernant la détermination de pays d’origine des marchandises recourent à une distinction traditionnelle entre les marchandises entièrement obtenues dans un pays et les marchandises à la production desquelles sont intervenues deux ou plusieurs pays. Dans ce dernier cas la détermination de l’origine se fonde sur le critère de la transformation substantielle qui emploie la règle du changement de position tarifaire, les listes de transformations qui confèrent ou non le caractère originaire aux produits non originaires, et la règle ad valorem. Ensuite, il a été fait un essai pour apporter quelques précisions concernant, par exemple, les opérations qui ne contribuent en rien ou qui ne contribuent que faiblement à donner aux marchandises leurs caractéristiques ou propriétés essentielles ; l’origine des accessoires et des pièces de rechange ,l’origine des emballages, la règle du transport direct etc. Le texte apporte également des recommandations concernant la preuve documentaire de l’origine et le contrôle de ces preuves
L’examen des normes de la Convention de Kyoto révisée permet d’observer qu’elles restent fort vagues pour servir de fondement au processus d’harmonisation des règles d’origine. Ainsi le texte de cette annexe ne se prononce pas sur le critère primaire à employer concernant la transformation substantielle (changement de position tarifaire ; liste de transformations qui confèrent ou non le caractère originaire aux produits non originaires ; critère ad valorem). Il en résulte que chaque pays est libre de choisir et d’appliquer le critère primaire qu’il préfère et de la façon qu’il préfère. A cet égard, par exemple, la C.E. emploie des critères primaires différents concernant les produits textiles (changement de position tarifaire) et les produits autres que les matières textiles754 (liste de transformations qui confèrent ou non le caractère originaire aux produits non originaires).
En outre, l’Accord sur les règles d’origine (accord) qui fait partie de l’Annexe 1A de l’Accord instituant l’O.M.C. du 15 avril 1994 représente l’aboutissement de longues années de négociations entre les pays Membres du G.A.T.T./O.M.C. dans ce domaine. Or cet accord ne représente qu’une modeste tentative de résoudre la question de l’origine.
Enfin une tentative d’harmonisers les régles d’origine non préférentielle ont été avancée par les Etats Membres du G.A.T.T./O.M.C. qui ont convenu que par « règles d’origine non préférentielle » s’entendront « des lois, réglementations et déterminations administratives d’application générale appliquées par tout Membre pour déterminer le pays d’origine des
marchandises, à condition que ces règles d’origine ne soient pas liées à des régimes commerciaux contractuels ou autonomes qui donnent lieu à l’octroi de préférences tarifaires »756. Le texte de l’accord prévoit que les travaux d’harmonisation des règles d’origine doivent être réalisés par le Comité technique des règles d’origine757 (C.T.R.O.) de l’O.M.D. et le
Comité des règles d’origine (C.R.O.) de l’O.M.C.
L’objectif de l’accord est de parvenir à une harmonisation des règles d’origine non préférentielle758 et de faire en sorte que ces règles ne créent pas d’obstacles au commerce international. Selon le texte du §1 de l’article 9 de l’accord, les règles d’origine harmonisées devraient : « être appliquées de manière égale » ; « être objectives, compréhensibles et
prévisibles » ; « ne pas être utilisées comme des instruments visant à favoriser, directement ou indirectement, la réalisation des objectifs en matière de commerce » ; « pouvoir être administrées d’une manière cohérente, uniforme, impartiale et raisonnable » ; « être cohérentes et fondées sur un critère positif ».
Pour mener à bien le programme d’harmonisation des règles d’origine le C.T.R.O., d’un commun accord avec le C.R.O., a mis au point une architecture globale. Celle-ci sert à établir la façon dont les critères concernant la détermination de l’origine seront appliqués. Il est à noter que, sur le fond, l’Accord sur les règles d’origine a repris la structure de l’Annexe D1 de la Convention internationale pour la simplification et l’harmonisation des régimes douaniers. Selon l’accord, les règles d’origine non préférentielle s’appuieront sur deux critères. Il s’agit du critère des « marchandises entièrement obtenues dans un pays » qui ne pose pas, en règle générale, de problèmes d’application à l’exception des produits maritimes et celui de la « transformation substantielle » appliqué lorsque deux ou plusieurs pays interviennent à la production d’une marchandise.
Quant à la transformation substantielle, l’accord se prononce en faveur de l’emploi du changement de position tarifaire comme critère primaire.
Toutefois, l’accord prévoit également des critères subsidiaires tels que la règle ad valorem et la liste des opérations de fabrication ou d’ouvraison conférant ou non le caractère originaire (article 9, §2, point c). Les règles d’origine harmonisées feront partie de l’Annexe III qui se verra annexée à l’accord dès que les travaux seront achevés. La future annexe sera composée de définitions, de règles générales, de l’Appendice 1 (définitions des marchandises entièrement obtenues dans un seul pays) et de l’Appendice 2 (règles d’origine par produit spécifique – la transformation substantielle).
Jusqu’à ce que le processus d’harmonisation soit mené à son terme, les pays Membres de l’O.M.C. sont soumis au respect d’un certain nombre de règles qui résultent de l’article 2 de l’accord (période de transition). Il s’agit, par exemple, du fait que les conditions concernant le
critère de la transformation substantielle doivent être clairement définies (point a) ; que les règles d’origine ne doivent pas être utilisées comme instrument de politique commerciale (point b) ; que les règles d’origine doivent être administrées de manière cohérente, uniforme, impartiale et raisonnable (point e) ; que les règles d’origine doivent être fondées sur un
critère positif, tandis que le critère négatif ne pourra être admis que pour clarifier un critère positif (point f) ; que les règles d’origine doivent être rapidement publiées (point g) ; un renseignement contraignant sur l’origine pourrait être demandé par l’opérateur économique bien avant (150 jours) le déroulement de l’opération d’importation760 (point h) ; etc. Ensuite,
l’article 3 de l’accord précise les règles applicables après la période de transition. Ces règles se fondent sur le critère de la transformation substantielle et sont en principe similaires aux règles à respecter pendant la période de transition qui figurent à l’article 2 de l’accord.
L’impossibilité d’harmoniser les règles d’origine préférentielle
Quant aux règles d’origine préférentielle, la question est si complexe qu’actuellement le processus d’harmonisation ne pourrait même pas être envisagé. L’explication tient principalement au fait que chaque pays préfère employer sa propre notion d’origine ce qui relève du domaine de la souveraineté étatique. Toutefois, l’accord comporte une « Déclaration
commune concernant les règles d’origine préférentielle » (Annexe II de l’accord). Le point 2 de cette déclaration essaye au moins de définir les règles d’origine préférentielle qui représentent « des lois, réglementations et déterminations administratives d’application générale appliquées par tout Membre (de l’O.M.C.) pour déterminer si des marchandises sont
admises à bénéficier d’un traitement préférentiel dans le cadre de régimes commerciaux contractuels ou autonomes qui donnent lieu à l’octroi de préférences tarifaires allant au-delà de l’application du §1 de l’article 1er du G.A.T.T. de 1994 (clause de la nation la plus favorisée) ».
La confirmation de l’origine par les autorités consulaires
Il résulte de l’article 5, point a) de la Convention de Vienne sur les relations consulaires que les autorités consulaires doivent protéger les intérêts de l’Etat d’envoi et de ses opérateurs économiques dans l’Etat de résidence. On peut alors admettre que dans le processus de sécurisation de l’origine, qui relève de la protection des intérêts étatiques mais également des opérateurs économiques, un rôle important pourrait être joué par les sections consulaires des pays développés. Suivant cette logique, les marchandises devraient recevoir une confirmation de leur origine délivrée par le consulat du pays où se trouvent les marchandises à exporter. Cette technique peut trouver comme fondement l’idée selon laquelle les marchandises, tout comme les particuliers d’ailleurs, auraient besoin d’une sorte de « visa » » pour entrer sur le territoire d’un pays étranger.
La confirmation de l’origine pourrait prendre alors soit une forme dite de « droit commun » (procédure générale), soit une forme simplifiée, ce qui est déjà connu en matière de dédouanement des marchandises. Ainsi, par exemple, dans le cas où la bonne foi d’un
opérateur économique ne laisse aucun doute, une procédure de confirmation simplifiée de l’origine pourrait lui être appliquée. Or la procédure de confirmation des certificats d’origine par les consulats des pays développés nécessiterait une augmentation considérable des effectifs pour faire face à cette nouvelle mission.
La nouveauté de cette approche conduit à s’intéresser sur la « rentabilité » de la mise en place d’une telle structure. En effet on demande souvent aux services consulaires de dépenser moins par rapport à ce que ces services apportent. Par conséquent les dépenses des autorités consulaires liées à la confirmation de l’origine devraient en principe être couvertes par les opérateurs économiques. Il faut également prendre en compte le fait que la confirmation de l’origine par les autorités consulaires conduirait sans doute à l’augmentation du temps nécessaire pour organiser une opération d’importation ce qui, avec les sommes versées aux consulats pour les services apportés, augmenterait le prix des marchandises sur le marché du pays d’importation. Il est clair que ce surcoût sera supporté par les consommateurs.
Il est vrai que la fausse déclaration de l’origine, commise par préméditation ou par imprudence, peut entièrement paralyser l’activité d’une entreprise, voire la détruire, car les sanctions appliquées s’avèrent souvent assez élevées. En cas de fausse déclaration de l’origine les autorités doivent faire en sorte que l’importateur soit conduit à assumer l’application des sanctions d’ordre financier. Il n’est pas rare que les comptes bancaires soient gelés pour la période de l’enquête puis du procès qui peuvent prendre plusieurs semaines, voire des mois ou des années. La situation se complique si l’on ajoute ici les pertes considérables que peut subir l’importateur pour les contrats non réalisés ou perdus. Par conséquent, la réputation de l’entreprise dans le monde des affaires peut être sérieusement compromise, d’où une perte importante du chiffre d’affaires. Il faut ajouter que suite à une fausse déclaration de l’origine, les entreprises, surtout les petites et les moyennes, n’arrivent que rarement à se remettre.
Comme on a vu dans les développements antérieurs, l’énorme complexité et la non transparence des règles d’origine augmentent d’une manière significative les insatisfactions des acteurs du commerce international. Un soupçon généralisé de fraude pèse sur les opérateurs économiques au moment de la déclaration de l’origine des marchandises et
bien après.
Quelles sont alors les réactions possibles face à ces insatisfactions dans les conditions où chaque pays ou union de pays applique sa propre notion d’origine tandis qu’au niveau international les intérêts des Etats sont trop contradictoires pour que l’on parvienne à une notion d’origine harmonisée ?
On propose donc de s’intéresser aux solutions innovantes concernant la notion d’origine. Il pourrait s’agir, par exemple, d’assurer le risque lié à la déclaration de l’origine. Cependant cette solution ne pourrait pas être retenue comme solution d’ensemble. Pour faire face
aux exigences modernes du commerce international la notion d’origine doit être repensée en profondeur. Autrement dit, la remise en question des fondements du système actuel d’origine demeure nécessaire.
Enfin il faut créer une formule d’assurance beaucoup plus adaptée au contexte pour mieux gèrer le problème. On recommande de se protéger contre les risques liés à la déclaration de l’origine en incluant dans le contrat de vente internationale une clause supplémentaire dite « clause d’origine ». Selon cette clause le vendeur s’engage par rapport à l’importateur (acheteur) quant à l’exactitude des renseignements concernant l’origine des marchandises vendues. Si malgré les renseignements fournis les autorités du pays d’importation constatent que l’origine des marchandises est bien différente de celle qui a été déclarée, l’importateur pourra alors se retourner contre le vendeur. Or les cas où la clause d’origine est acceptée par les vendeurs sont rares dans le commerce international. Il est très difficile pour l’importateur d’arriver à convaincre le vendeur de la nécessité d’inclure une telle clause dans le contrat. Ainsi, dans le cas où des problèmes liés à l’origine apparaissent, l’importateur se voit seul à les affronter, même si sa bonne foi ne laisse pas de doutes. D’où l’intérêt de recourir à l’assurance du risque lié à la déclaration de l’origine ce qui relève de questions de fond, approche qui incite à procéder à l’examen de l’organisation de cette opération.
Les cas où les opérateurs économiques courent des risques en déclarant l’origine des marchandises sont de plus en plus nombreux. Le risque lié à la déclaration de l’origine ne peut pas être écarté malgré le fait que l’importateur se trouve en possession des certificats d’origine délivrés par les autorités des pays d’exportation (Chambres de Commerce, Douanes,
etc.). Comme on a vu plus haut, une fausse déclaration de l’origine peut suffire pour conduire l’entreprise soit au dépôt du bilan, soit générer un sérieux handicap pour l’avenir781. Or ce risque qui apparaît lors de l’opération d’importation pourrait être assuré.
La notion de risque est fondamentale pour l’assurance. Elle domine, sans doute, toute la matière réservée au droit des assurances. L’événement constituant le risque doit posséder un caractère aléatoire, c’est-à-dire qu’il doit être incertain, voire dépendant du hasard. Ainsi, le
risque pourrait être défini comme « un événement incertain qui sera le fait générateur d’un sinistre ». Il s’ensuit que « si un événement n’a aucune chance de se réaliser, ou au contraire s’il est totalement prévisible ou déjà réalisé, il est exclu du champ de l’assurance ». Autrement dit, le risque doit être assurable, ce qui veut dire qu’il pourrait être pris en charge par
l’assureur. Or avant que l’assureur ne se prononce sur l’assurabilité d’un risque, celui-ci doit faire l’objet d’analyses précises et être statistiquement maîtrisable. Il importe également que « la probabilité de sa réalisation ne soit pas trop élevée, faute de quoi l’opération d’assurance perdrait de son intérêt économique ».
Rechercher si un risque est assurable c’est avant tout s’intéresser aux conditions techniques et juridiques de sa couverture par l’assurance. Du point de vue technique, avant de prendre en charge un risque, l’assureur doit avoir la certitude que cette opération est économiquement intéressante pour lui. Du point de vue juridique, le risque peut devenir assurable à condition que son assurabilité ne contrevienne pas à l’ordre public. En d’autres termes, le risque assurable doit avoir un caractère licite. On peut alors supposer que le risque lié à la déclaration de l’origine pourrait réunir facilement les conditions techniques et juridiques
pour être assurable. Ce risque, sous réserve d’être pris en charge par l’assureur, s’inspire des assurances de responsabilité.
Certaines limitations de garanties pourraient être appliquées selon la nature des marchandises. Il s’agit de classer les marchandises en plusieurs groupes en fonction du risque lié à la déclaration de l’origine (du moins élevé au plus élevé). Ainsi, par exemple, les marchandises
entièrement obtenues dans un pays posent, en règle générale, peu de problèmes, à l’exception des produits maritimes. En revanche, le risque lié à la déclaration de l’origine concernant les marchandises à la production desquelles sont intervenus deux ou plusieurs pays sera sans doute plus difficile à gérer. Il se peut que certains assureurs préféreraient ne pas prendre en charge le risque lié à la déclaration de l’origine concernant certains produits qui posent plus de problèmes (produits de haute technologie, par exemple) ou de le prendre en charge contre une surprime d’assurance.
D’autres limitations de garanties pourraient être appliquées selon le pays d’origine des marchandises. Il s’agit plus exactement de classer les pays en fonction de l’indice de confiance attribué par les assureurs. Ainsi, certains Etats pourraient même se voir temporairement exclus du champ de l’assurance car du point de vue de la certification de
l’origine ils peuvent présenter des risques très élevés. Il s’agit notamment des pays en transition et des pays en développement dont les autorités, souvent faute de moyens, n’arrivent pas toujours à assurer le bon déroulement du processus de certification de l’origine. Toutefois, il faut prendre en considération le fait que l’indice de confiance attribué aux pays
par les assureurs n’est qu’une donnée variable. Il faut donc prévoir que certains pays, après avoir renforcé le contrôle sur la chaîne de certification de l’origine, pourront quitter le groupe des Etats dits « inassurables ». D’autres pays, en revanche, pourront passer d’un indice de confiance plus élevé à un autre moins élevé. A cet égard le classement des pays en fonction de l’indice de confiance par rapport au risque lié à la déclaration de l’origine peut retenir comme modèle celui appliqué par la Banque Mondiale afin de classer les pays du point de vue du risque lié à la sécurité des investissements.
D’autres éléments importants doivent être pris en compte. Le plafond de garantie d’assurance du risque lié à la déclaration de l’origine est une donnée variable. Ce plafond dépend, en effet, de la somme qui représente la différence entre les droits dus et les droits payés par
l’importateur.
CONCLUSION
Il est vrai que l’application de plus en plus fréquente des régimes préférentiels a complètement bouleversé la nature des échanges commerciaux internationaux. Ainsi, les opérateurs économiques dépensent souvent leur énergie pour faire en sorte que les marchandises soumises à l’importation puissent bénéficier d’un traitement préférentiel.
Il est à noter que le problème de l’origine concerne dans une mesure plus importante les pays développés, tandis que les pays en transition et le pays en développement se confrontent plutôt avec la réduction de la valeur des marchandises en douane, ce qui se traduit souvent par des pertes considérables pour le budget étatique. Cela peut signifier qu’en matière d’origine les intérêts des pays riches et des pays pauvres ne coïncident que très rarement.
Il faut noter également que malgré les avantages certains de l’utilisation l’origine des marchandises pour acquérir des bénéfices dans la stratégie commerciale de l’entreprise,
ce concept présente également des risques non négligeables.
la notion d’«échanges commerciaux internationaux » est rarement étudiée en elle-même. C’est souvent la notion de « commerce international » qui est employée afin de designer
l’ensemble des règles concernant les échanges de produits. Ainsi, par exemple, l’opération d’importation des marchandises entraîne une série de mesures de routine telles que la présentation de la déclaration douanière, le contrôle physique des marchandises, l’application des mesures non tarifaires, le paiement de la dette douanière, etc. Toutefois, pour faire face
aux exigences modernes du commerce international, les techniques douanières doivent s’adapter constamment. Il s’ensuit que les autorités compétentes doivent prendre toujours en considération la conjoncture de l’économie mondiale tout comme les changements majeurs que connaît le commerce international. A cet égard il convient de rappeler que de nos
jours le volume des échanges des marchandises a augmenté considérablement. Il faut prendre également en compte le fait que souvent il s’agit de l’échange de produits non finis, c’est-à-dire de produits qui doivent encore être travaillés ou assemblés, etc. Il faut aussi ajouter qu’une bonne part des échanges commerciaux internationaux est le fait des entreprises liées en affaires qui possèdent un seul centre de prise de décisions. De plus, la politique de l’Organisation Mondiale du Commerce (O.M.C.) concernant la réduction progressive, voire la suppression des droits de douane, fait que les Etats recourent de plus en plus souvent à
l’application des mesures non tarifaires de nature protectionniste ou défensive. Dans ces conditions il est très important de comprendre la nature des échanges commerciaux internationaux modernes où la notion d’origine des marchandises, dont l’évolution est impressionnante, apparaît comme la clé de voûte des ces échanges.
Le système actuel d’origine des marchandises présente un fort degré d’insécurité pour les opérateurs économiques. Déclarer l’origine devient une opération à grand risque, surtout que les règles d’origine sont d’une grande complexité. Ainsi l’exportateur peut se trouver devant
plusieurs définitions d’origine en fonction du pays où il s’apprête à exporter. Par conséquent les entreprises peuvent encourir des sanctions sévères s’il se trouve que l’origine déclarée ne correspond pas à celle réelle.
Par conséquent, les opérateurs économiques en parallèle avec la recherche de régime préférentiel devrait améliorer la qualité des marchandises, augmenter le niveau de traçabilité de la chaîne de production, investir dans la recherche de nouveaux produits, enfin baisser les prix.
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