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APPRENDRE PAR LA PEDAGOGIE COOPERATIVE EN FORMATION MUSICALE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

APPRENDRE PAR LA PEDAGOGIE COOPERATIVE

EN FORMATION MUSICALE

 

 

Résumé : A travers cet article, nous voulons mettre en lumière une forme de pédagogie apparue dans le système éducatif : la pédagogie coopérative. Connaître le fondement de cette forme de pédagogie, en vérifier la pertinence pour le cas de la formation musicale, identifier les leviers de sa mise en œuvre et son développement, tels sont les objectifs de cet écrit. L’intérêt vient en réponse au problème de démotivation ou d’agressivité des élèves et à la nécessité de les rendre acteurs de leur apprentissage.

 

 

Mots clés : Pédagogie coopérative, coopération, apprentissage

 

 

Sommaire

 

 

 

INTRODUCTION

 

 

PARTIE 1 : GENERALITES SUR LA PEDAGOGIE COOPÉRATIVE

1.1 Origines et valeurs

 

1.2 Principes de base

 

1.3 Démarches de mise en œuvre

1.3.1 Etape 1 : Expression-écoute

1.3.2 Etape 2 : Confrontation-négociation

1.3.3 Etape 3 : Action concertée

1.3.4 Etape 4 : Evaluation commune

 

 

PARTIE 2 : INTERETS DE LA PEDAGOGIE COOPÉRATIVE EN FORMATION MUSICALE

 

  • Intérêt pour l’enfant dans le cadre son développement personnel

2.1.1 Comprendre l’enfant

2.1.2 Bienfaits de la pédagogie coopérative sur le développement personnel de l’enfant

 

  • Intérêt pour l’apprentissage en formation musicale

 

  • Intérêt pour les tiers

2.3.1 Intérêt pour l’enseignant

2.3.2 Intérêt pour les parents

2.3.3 Intérêt pour l’école de musique

2.3.4 Intérêt pour la communauté

 

 

PARTIE 3 : LES CONDITIONS DE REUSSITE D’UNE PEDAGOGIE COOPÉRATIVE EN FORMATION MUSICALE

 

3.1 Pré-requis dans la composition de la classe

3.1.1 Les apprenants

3.1.2 L’enseignant et le climat

 

3.2 Démarches pour un bon démarrage

3.2.1 Composition des groupes

3.2.2 Organisation de la coopération

3.2.3 Contrôle de la coopération

 

 

3.3 Comment motiver les enfants à la pédagogie coopérative

3.3.1 Notion de projet collectif

3.3.2 Monter un projet collectif

 

 

CONCLUSION

 

 

BIBLIOGRAPHIE ET WEBOGRAPHIE

 

 

 

 

 

 

 

INTRODUCTION

 

 

Depuis toujours, l’apprentissage de la musique intéresse bon nombre de gens et ce dès la plus tendre enfance. Preuve à cela, rien qu’en France, nous pouvons compter plusieurs centaines d’écoles de musique depuis les écoles municipales, nationales, ou les conservatoires et la musique est même une des principales activités parascolaires les plus prisées par les enfants.

 

Généralement, la musique s’y enseigne aux enfants de la manière traditionnelle, c’est-à-dire d’un côté le professeur dispensant les cours et de l’autre les apprenants chacun avec leur instrument en essayant de s’appliquer comme il le peut. Chaque enfant bénéficie ainsi d’un encadrement et d’un suivi individuels par le professeur.

 

Avec l’évolution des techniques de pédagogie, la formation musicale n’échappe pas à ces réformes. En effet, la pédagogie coopérative s’insert actuellement comme un tournant inévitable. Par définition, la pédagogie coopérative repose sur une philosophie de l’instruction qui positionne l’élève en tant qu’acteur de ses apprentissages, capable de participer à l’élaboration de ses compétences en coopération avec l’enseignant et ses pairs. L’acquisition des connaissances résulte alors d’une « collaboration du maître et des élèves, et des élèves entre eux, au sein d’équipes de travail »[1].

 

Dans quelle mesure adopter la pédagogie coopérative serait-elle pertinente pour une formation musicale ? Les questions intermédiaires à se demander sont :

  • D’où vient et en quoi consiste la pédagogie coopérative ? comment cela s’organise-t-il ?
  • En quoi est-ce pertinent dans l’apprentissage des enfants dans le cadre d’une formation musicale ?
  • Quels en sont les intérêts pour le professeur, les parents ou encore l’école de musique elle-même ?
  • Quels sont les pré-requis et/ou conditions de réussite d’une telle méthode d’enseignement dans cette situation précise et comment motiver les apprenants?

 

Pour ce faire et aux moyens de recherches documentaires sur le sujet, cet écrit retracera tout d’abord la théorie détaillée de ce que nous appelons « pédagogie coopérative » en précisant les origines et valeurs, les principes de base et la mise en œuvre. Ensuite, en cadrant avec la situation de formation musicale, nous allons identifier l’intérêt de cette forme de pédagogie sur l’apprentissage de l’enfant et son développement personnel, les intérêts pour le professeur et voire même les parents et l’école de musique par extension. Enfin, nous terminerons sur les conditions de réussite de cette démarche.

 

 

 

 

 

PARTIE 1 : THEORIE DE LA PEDAGOGIE COOPÉRATIVE

 

 

1.1 Origines et valeurs

Etant avant tout une forme de pédagogie active par laquelle l’enfant devient acteur de son apprentissage, la pédagogie coopérative est le résultat de plusieurs traditions :

  • John Dewey (1859-1952) : philosophe et psychologue américain, il est l’initiateur des méthodes actives en pédagogie. Selon lui, l’individu cherche spontanément à se développer et à atteindre un haut niveau de réalisation personnelle : l’école doit lui fournir les moyens de se réaliser. Sa doctrine est le fameux learning by doing, apprendre en faisant et non en écoutant comme la pédagogie traditionnelle.
  • Ovide Decroly (1871-1973) : médecin, psychologue et pédagogue belge, il fait de l’intérêt de l’enfant le levier par excellence de son développement. Sa pédagogie vise à donner une grande importance à la dimension affective de l’enfant en utilisant ses intérêts afin de renforcer sa motivation et donner sens à l’enseignement. Il considère également qu’une connaissance est intégrée lorsque l’enfant l’a lui-même découverte et exprimée.
  • Célestin Freinet (1896-1966) : selon cet instituteur, rendre les élèves actifs est primordial. Il développe un système reposant sur trois dimensions :
  • la classe est organisée en coopérative (pédagogie coopérative)
  • les connaissances s’élaborent dans des projets d’action ou de recherche (pédagogie de projet);
  • l’école produit et diffuse ses propres instruments de travail (ex. : le journal scolaire).

 

La coopération de son côté est, à l’origine, un système économique et social, une réponse à un besoin, un manque ressenti dans une structure économique. C’est « l’association volontaire d’usagers ou de producteurs au sein d’une entreprise commune, gérée par eux-mêmes, sur la base de l’égalité de leurs droits ou obligations, dans le but non de réaliser un profit, mais de se rendre service ». Être coopérateur, c’est travailler avec les autres en acceptant que le produit de cette coopération appartienne à tous, communautairement. Le système coopératif assure l’entraide, la liberté de faire, de dire et de penser au sein du groupe, tout en garantissant le respect de chaque individu.

 

La pédagogie coopérative tire ainsi ses origines de ce principe de coopération. L’expression « cooperative learning » s’est répandue depuis 1970 aux Etats-Unis et ensuite partout dans le monde suivant cette même logique impliquant la communication entre personnes cherchant à atteindre un but commun. Elle se différencie des pédagogies, encore largement majoritaires, où les apprenants sont en rivalité les uns avec les autres (competitive learning) ou cherchent à atteindre, seuls, leurs objectifs sans se soucier de leurs condisciples (individualistic learning).

 

 

1.2 Principes de base

Pour le cas de la pédagogie coopérative, les apprenants sont généralement rassemblés en petits groupes, et coopéreront pour atteindre, individuellement et solidairement, les objectifs qu’ils se sont, ou qui leur ont été assignés. Une attention particulière sera accordée quant à la manière dont les équipes de travail sont composées, la manière dont la coopération y est organisée et dont son fonctionnement est contrôlé.

 

Pour résumer, la pédagogie coopérative repose sur les principes suivants :

  • des interactions simultanées constructives en petits groupes hétérogènes,
  • une interdépendance positive entre les apprenants,
  • une responsabilité individuelle et coopérative,
  • un entraînement explicite des habiletés coopératives indispensables à un fonctionnement de groupe efficace,
  • la discussion et l’évaluation des processus de groupe.

 

 

1.3 Démarches de mise en œuvre

La pédagogie coopérative est une méthode qui s’insert en quatre étapes à savoir :

  • L’étape de l’expression-écoute,
  • L’étape de la confrontation-négociation,
  • L’étape de l’action concertée,
  • Et finalement, l’étape de l’évaluation commune.

 

Chacune de ces étapes sera détaillée dans les prochains paragraphes.

 

1.3.1 Etape 1 : Expression-écoute

Cette première étape est le point de départ de la pédagogie coopérative et consiste à reconnaître et situer l’enfant comme enfant-personne dans toutes ses composantes affective, physique, intellectuelle, morale…).  Pour ce faire, il est nécessaire d’établir un climat de confiance où l’on reconnaisse les désirs, les besoins, les représentations des savoirs de chacun et où chacun a le droit de s’exprimer, le droit de se tromper, le droit d’être écouté, le droit d’être différent, le droit de rêver… Grâce à cette confiance, l’expression naît peu à peu. L’enfant a conscience d’appartenir à un groupe où il est reconnu et respecté : il peut dire et « se dire ». Les apprentissages seront nourris de cette matière première qui engage la totalité de la personne.

 

1.3.2 Etape 2 : Confrontation-négociation

Après cette première prise en compte de soi, de l’autre et du groupe intervient la prise en compte des désirs, des besoins avec l’autre pour arriver à un accord. C’est l’émergence des différences pour qu’elles soient prises en considération, pour les faire exister afin qu’elles enrichissent chacun. Le nœud central de l’acte coopératif s’agit, pour chaque personne, d’argumenter pour s’affirmer, de se décentrer ensuite pour comprendre l’autre, de décider jusqu’où et comment elle peut modifier ses besoins, de choisir ce à quoi elle peut renoncer de ses propres demandes initiales afin de coïncider avec l’autre dans l’action commune. Ainsi fait, le groupe arrive à un accord sur un projet d’action mobilisateur d’énergies ; un contrat peut être établi : chacun sait ce qu’il doit faire, où, quand, comment, pourquoi et chacun connaît le rôle des autres.

 

1.3.3 Etape 3 : Action concertée

Une fois les savoirs déclarés, ceux-ci sont maintenant soumis à l’épreuve de l’action. Et encore,  il faut gérer l’activité elle-même où les savoir-faire vont être confrontés, mais aussi les relations qui ne tarderont pas à être déstabilisées… Les situations seront diverses : entraide, tutorat, parité, division du travail. Elles donneront naissance à de nombreuses interactions entre savoirs et savoir-faire qui déboucheront sur la production attendue. Le langage médiateur, fortement sollicité, continuera son œuvre de conceptualisation.

 

 

1.3.4 Etape 4 : Evaluation commune

Enfin, cette dernière étape est celle où chacun peut mesurer l’écart avec ses attentes initiales, où le groupe peut vérifier si ses objectifs sont atteints, analyser les difficultés rencontrées, imaginer des solutions, poser un nouveau questionnement… L’enfant éprouve le plaisir de la satisfaction de ses désirs de départ et est stimulé pour oser avoir et exprimer de nouveaux désirs.

 

 

 

 

PARTIE 2 : INTERETS DE LA PEDAGOGIE COOPÉRATIVE EN FORMATION MUSICALE

 

 

Après cette théorie sur le fondement et la mise en œuvre de la pédagogie coopérative, cette deuxième partie aura pour objectif de déterminer la pertinence réelle de cette forme de pédagogie sur l’apprentissage dans le cadre d’une formation musicale.

 

Pour cela, nous allons en identifier l’intérêt pour l’enfant lui-même dans son développement personnel, pour son apprentissage, mais également pour les tiers dont le professeur, les parents et même l’école de musique.

 

 

  • Intérêt pour l’enfant dans le cadre de son développement personnel

Pour bien comprendre l’intérêt et le fonctionnement de la pédagogie sur l’enfant, il est tout d’abord nécessaire de comprendre l’enfant, comment il fonctionne et reçoit les nouvelles connaissances.

 

2.1.1 Comprendre l’enfant

En tant que personne, l’enfant répond aux mêmes notions de besoins régissant tout être humain suivant la logique de Maslow. Cette logique définit l’homme comme un tout présentant des aspects physiologiques (organisation du corps physiologique et biologique), psychologiques et sociologiques (sécurité, appartenance, reconnaissance) et spirituels (dépassement). Une hiérarchie existe au sein de ces différents besoins. En effet, la satisfaction des besoins physiologiques doit précéder toute tentative de satisfaction des besoins de protection (sécurité) ; lesquels doivent être satisfaits avant les besoins d’amour (appartenance), qui précèdent les besoins d’estime de soi (reconnaissance) ; au sommet de la pyramide se trouvent les besoins spirituels (dépassement). La psychologie de l’enfant est différente de celle de l’adulte dans le sens où il se trouve encore dans la phase où il se cherche, commence son apprentissage et est plus perméable à de nouveaux savoirs, savoir-faire et savoir-être.

 

2.1.2 Bienfaits de la pédagogie coopérative sur le développement personnel de l’enfant

Du fait de cette grande perméabilité de l’enfant aux éléments nouveaux qui rentrent dans sa vie, le choix d’une méthode pédagogique lorsqu’il s’agit d’enseigner des enfants est d’autant plus délicate dans la mesure où le savoir-être, le comportement de l’enseignant, le climat et l’ambiance de la classe peuvent influencer l’enfant.

 

Aussi, l’objectif de la pédagogie coopérative est avant toute chose d’instaurer un climat de confiance et de sécurité au sein de l’enfant, ceci permettant de répondre à ses besoins premiers de protection et physiologiques.

 

Ensuite, en travaillant au sein d’un groupe, l’enfant apprend le respect des autres et la communication avec les autres. Cette intégration au sein d’un groupe et la socialisation permettent de satisfaire le deuxième niveau de besoins qui est le besoin d’appartenance.

 

Tout apprentissage requiert discipline. La discipline peut s’obtenir de deux différents moyens : par la force (discipline imposée) ou par la motivation (discipline influencée). La pédagogie coopérative, plus précisément, favorise la prise d’initiative, la prise de décision en développant des aptitudes de prise de décision, d’entraide et de résolution de problèmes. Peu à peu, l’enfant prend conscience de lui-même agissant pour lui-même et pour le groupe, acquérant ces nouvelles aptitudes à la décision et la prise d’initiative. A ce stade, il satisfait ses besoins d’estime de soi.

 

La conscientisation et la réflexion amènent chez les élèves une diminution progressive de comportements indésirables, de l’agressivité et de la violence. Pour ce faire, plusieurs méthodes sont appliquées :

  • Organiser des jeux pour une meilleure connaissance des élèves entre eux, une meilleure écoute, un respect mutuel, une plus grande confiance en soi et dans le regard des autres,
  • Créer les possibilités d’une expression libre, créer des espaces d’écoute,
  • Dialoguer et mettre en place les conditions d’une parole libérée et confiante, sans jugement de valeur et ou l’erreur est possible,
  • Rendre capable les élèves de lire, analyser et comprendre les comportements, les attitudes de chacun,
  • Donner des limites : limite du règlement intérieur de l’école, limite d’un règlement de classe avec ses parts non négociables et négociables,

 

Enfin, cette pédagogie correspond à une conception nouvelle des droits et du statut de l’enfant dans le cadre scolaire. L’élève devient un citoyen « en construction », capable d’assumer des responsabilités, libre de prendre des initiatives et d’aider ceux qui sont en difficulté, capable de se dépasser.

 

 

En résumé, la pédagogie coopérative permet ainsi à l’enfant de :

  • prendre en compte les différences et les respecter,
  • développer l’esprit d’initiative,
  • développer la participation, l’autonomie et la responsabilité,
  • apprendre à coopérer.

 

De plus, cette méthode d’enseignement pousse l’enfant à se construire et développer une estime de soi car il est ainsi reconnu dans le groupe comme une personne, est respecté, entendu et écouté, est capable de réussite et de progrès et a une image positive de lui-même.

 

 

  • Intérêt pour l’apprentissage en formation musicale

Depuis longtemps, il a été compris en termes de communication qu’il est toujours différent d’apprendre par ses pairs dans la mesure où les connaissances ainsi obtenues ne sont pas imposées mais sont transmises dans un code et un canal de communication que l’émetteur et le récepteur partagent et maîtrisent. En faisant le lien avec la pédagogie, apprendre avec ses pairs signifie ainsi que les informations sont mieux entendues, mieux comprises, ont davantage de chance d’être appliquées avec la bonne volonté des apprenants et ont donc plus chance d’être retenues également. Les enfants peuvent s’échanger des conseils ou mêmes des outils plus concrets tels des partitions de musique qu’ils aiment et qui s’accordent avec les notes ou les thématiques étudiées.

 

Mise à part ce fait, il est indéniable que l’apprentissage de la musique est chose bien particulière car à la différence d’apprentissage d’un quelconque savoir,  la musique fait appel aux sens artistiques et donc créateurs de l’enfant ainsi qu’une grande part d’émotion de sa part. La liberté et l’autodiscipline ainsi procurés par la pédagogie coopérative évitent l’inhibition de ces sens qui sont essentiels à l’apprentissage de l’enfant, lui permettant d’être plus réceptif à la musique en s’épanouissant pleinement. De plus, l’enfant pourra développer son savoir-faire personnel en sachant s’accorder au groupe pour former un ensemble homogène et harmonieux, but de la musique.

 

En somme, la pédagogie coopérative stimule la motivation de l’enfant à se développer techniquement lui-même tout en s’accordant avec la notion de groupe, notion essentielle dans une formation musicale. Toute notion de compétition et donc d’agressivité est ainsi bannie. Chaque enfant évolue avec le groupe. Par extension, la réussite de la pédagogie coopérative pour la formation musicale se détermine par le fait qu’elle permet de :

  • lutter contre l’échec scolaire,
  • donner les savoirs à tous,
  • coopérer pour apprendre,
  • motiver et concerner l’élève en le rendant acteur de ses apprentissages.

 

 

  • Intérêt pour les tiers

Nous avons ainsi vu que la pédagogie coopérative est bénéfique pour l’enfant à la fois pour son développement personnel mais aussi dans le cadre de son apprentissage technique. Mais ce n’est pas tout ; des intérêts pour les tiers dont notamment l’enseignant, les parents, l’école de musique et même la communauté peuvent être identifiés.

 

2.3.1 Intérêt pour l’enseignant

Dans le cadre de la pédagogie coopérative, le rôle des acteurs de l’enseignement change. L’enfant, au lieu d’être un récepteur passif aux enseignements inculqués par l’enseignant devient acteur de son apprentissage, venant en aide aux autres enfants en difficulté. Les rôles sont ainsi partagés entre l’enseignant et les apprenants. Par ailleurs, l’enseignant se retrouve en face d’apprenants motivés, responsables, proactifs et le niveau du groupe est relativement homogène. L’enseignement et le suivi se retrouvent ainsi facilités.

 

2.3.2 Intérêt pour les parents

Pour les parents, quoi de plus satisfaisant que d’avoir un enfant à la fois doué techniquement et disposant des meilleures qualités humaines que sont la prise d’initiative, le sens des responsabilités et du devoir, la motivation de se dépasser et le souci d’autrui et du groupe. Les parents peuvent ainsi se féliciter d’avoir inscrit l’enfant à un cours qui lui permette de se construire et s’épanouir à la fois tout en exerçant une activité qui lui plaise.

 

2.3.3 Intérêt pour l’école de musique

L’école de musique adoptant cette forme de pédagogie devient une référence dans l’initiation des nouvelles générations aux valeurs fondamentales personnelles outre le fait de produire des apprenants, des musiciens dans ce cas-ci, doués. Ceci répond adéquatement aux objectifs que tout centre d’enseignement devrait s’assigner.

 

2.3.4 Intérêt pour la communauté

Une des raisons de l’intérêt que portent les institutions éducatives officielles aux Etats-Unis à la pédagogie coopérative tient au rôle que celle-ci peut jouer, et qu’elle joue effectivement, dans le domaine de l’intégration raciale. En effet, les enfants apprendront dès leur plus jeune âge à évoluer dans un univers de groupe pouvant être multiculturel.

 

 

Cette deuxième partie nous a permis de voir que la pédagogie coopérative, non loin d’être uniquement une nouvelle forme de pédagogie « tendance » et qu’il faille appliquer par duplication pour ne pas se sentir dépassé dans le monde de l’enseignement, procure de réels intérêts que ce soit pour l’enfant, ses parents et même l’école de musique et la communauté. La pédagogie coopérative, toutefois, ne s’improvise pas et surtout ne s’impose pas. Des enfants peuvent toujours faire le choix de ne pas parler, de ne pas se livrer spontanément aux autres ou de préférer une relation individuelle avec l’enseignant. La partie suivante nous détaillera les conditions de réussite et les pré-requis pour une bonne instauration et un bon démarrage de cette forme d’enseignement.

 

 

 

 

 

PARTIE 3 : LES CONDITIONS DE REUSSITE D’UNE PEDAGOGIE COOPÉRATIVE EN FORMATION MUSICALE

 

 

La pédagogie coopérative ne s’improvise pas et ne s’impose pas au risque de se heurter à l’incompréhension, l’indifférence et même à l’agressivité des apprenants. Ainsi, il faut d’abord tenir compte de la composition de la classe et évaluer la faisabilité d’une telle pédagogie. Ce n’est qu’après qu’il va falloir respecter les démarches nécessaires à son instauration et à son démarrage.

 

 

3.1 Pré-requis dans la composition de la classe

La classe est prise dans ce contexte comme l’ensemble composé des apprenants, mais aussi de l’enseignant, du climat et de l’environnement dans l’espace de travail.

 

3.1.1 Les apprenants

Concernant les apprenants, le développement de la coopération dépend de l’âge des enfants, de leur maturité (degrés de responsabilité, d’autonomie, de sociabilité), de leur passé scolaire.

 

3.1.2 L’enseignant et le climat

A part les qualités pré-requises des apprenants, ce développement de la coopération dépend également de l’expérience préalable du maître. Rappelons, tout d’abord, que la décision d’installer dans la classe des rapports de coopération est un choix délibéré de l’adulte responsable qui entend respecter les valeurs des Droits de l’Homme et de l’Enfant.

 

Installer des rapports de coopération passe, d’abord, par la mise en place d’un climat de confiance où chacun sait qu’il est reconnu et respecté. Le message doit être clair : « Nous allons travailler ensemble, dans le plus grand respect de chacun, avec le maximum de justice. »

 

Installer des rapports de coopération ne signifie pas que l’adulte abandonne ses responsabilités, au contraire. Il doit en particulier, assurer la présentation et le respect des contraintes institutionnelles (Instructions Officielles, programmes …) et des contraintes émanant de l’environnement.

 

Le maître doit assurer à la fois les fonctions d’animateur et de gestionnaire des relations, des projets d’activités, des apprentissages. L’animateur est le catalyseur des relations dans le groupe. Il est donc chargé de faciliter l’expression, la communication, d’aider à la prise en compte des émotions, de l’affectivité, d’aider à la régulation des comportements individuels, mais aussi de faire émerger des règles de vie, d’assurer le règlement des conflits.

 

Il doit être capable de se décentrer, d’avoir une attitude accompagnatrice, explicative, et non directive ou autoritaire. Il veillera notamment à arrêter net la première moquerie gratuite, une marque de racisme, toute agression physique ou morale. Le gestionnaire est le catalyseur des projets d’activités. Il gèrera (ou aidera à gérer) les finances, les matériaux, les outils, les compétences, l’espace, le temps… Il favorisera la mise en place d’un champ d’expérimentation riche et ouvert.

 

 

Les fonctions d’animateur et de gestionnaire serviront tout autant dans les apprentissages. Il s’agira de :

  • former et organiser les groupes,
  • favoriser l’expression, la communication, la décentration, la réflexion en acceptant l’erreur, en jugeant les actes et non les personnes.

 

Il faudra enfin assurer comme dans toute pédagogie, les fonctions du spécialiste disciplinaire, de l’expert, mais en cohérence avec la démarche coopérative :

  • apporter (ou choisir dans le vécu du groupe) des situations ouvertes qui aient du sens pour l’enfant,
  • apporter les connaissances indispensables au bon moment,
  • guider si le besoin s’en fait sentir,
  • encourager la « mastication » du savoir,
  • assurer la réappropriation individuelle du travail fait en groupe,
  • assurer les réinvestissements à travers de nouvelles situations,
  • assurer les évaluations.

 

 

Enfin, le développement de la coopération dépendra des habitudes dans l’école, de l’environnement social, des attentes des parents et des conditions matérielles …

 

 

3.2 Démarches pour un bon démarrage

Trois phases résument les démarches essentielles à un bon démarrage de la coopération. Il s’agit de :

1) prendre conscience et développer des valeurs sous-jacentes à la coopération, créer un climat affectif positif en classe,

2) apprendre à coopérer, construire des habiletés de coopération, développer l’esprit d’équipe,

3) coopérer pour apprendre au travers de conflits sociocognitifs, de verbalisations, d’échafaudages de connaissances.

 

Des précisions supplémentaires méritent néanmoins d’être ajoutées, concernant la composition des groupes, l’organisation de la coopération et le contrôle de la coopération.

 

3.2.1 Composition des groupes

Il s’agit avant tout de mettre ensemble des individus aux profils très divers ; des gens de cultures, de races et de milieux sociaux différents, mais aussi qui n’ont, face à l’apprentissage, pas les mêmes facilités ou les mêmes problèmes. Cette diversité est considérée comme le « carburant » même d’une coopération efficace et enrichissante.

 

3.2.2 Organisation de la coopération

Le travail peut être divisé horizontalement ou verticalement.

  • Division / répartition horizontale : Les membres du groupe se partagent les tâches. Ainsi, il y aura le « lecteur » – le « vérificateur de la compréhension » – le « stimulateur de participation » – l’« élaborateur de connaissance »…  Chacun assume sa responsabilité vis à vis des autres et pour les autres, ont pour but de permettre au groupe d’atteindre ses objectifs.
  • Division / répartition verticale : La subdivision doit être conçue de manière à ce que chacun ne puisse réaliser sa part que si les autres réalisent la leur.

 

Ces différentes modalités d’organisation ne sont efficaces que si tous les membres du groupe pratiquent un certain nombre de « vertus » coopératives, c’est-à-dire ils doivent apprendre à se connaître les uns les autres, à se faire confiance, à se parler, à s’apprécier, à s’entraider. Ils doivent être conscients de leurs responsabilités vis-à-vis des autres et de leur devoir de leur donner les informations, les explications et les encouragements nécessaires.
Le développement de ces qualités « sociales » ne doit pas être laissé au hasard. Elles doivent être enseignées par le professeur qui vérifie si elles sont correctement exercées par tous.

 

3.2.3 Contrôle de la coopération

Il doit être permanent et porter sur chaque aspect et sur chaque personne. Il est fait à la fois par les membres du groupe eux-mêmes et par l’enseignant, selon des méthodes qui peuvent être très variées. Ces techniques sont le plus souvent appliquées dans un esprit libéral (insistance sur la liberté et la responsabilité personnelle) mais parfois, hélas, répressif (recours à des contrôles punitifs et à un véritable système de surveillance réciproque des individus). Selon les cas d’espèce, elles donnent donc une impression de liberté ou… d’embrigadement. Il n’en demeure pas moins qu’elles se montrent efficaces tant pour l’apprentissage que dans la perspective plus large de la capacité des individus à communiquer dans un environnement social caractérisé par la diversité.

 

 

3.3 Comment motiver les enfants à la pédagogie coopérative

Les enfants ayant les pré-requis nécessaires, un bon démarrage de la pédagogie assuré, comment entretenir maintenant cet esprit de coopération tout en apprenant ? En effet, la motivation des apprenants à la participation tout au long de la formation conditionne la réussite de la pédagogie coopérative. Aussi, il est nécessaire de déterminer des activités qui auront pour but d’entretenir cette motivation.

 

3.3.1 Notion de projet collectif

Une des méthodes que nous pouvons considérer et qui trouve sa pertinence dans le cadre d’une formation musicale en l’associant à la pédagogie coopérative est la notion de projet collectif. Selon le Glossaire des termes de technologie éducative édité par l’Unesco, « le projet est une activité pratique signifiante, à valeur éducative, visant un ou plusieurs objectifs de compréhension précis. Elle implique des recherches, la résolution de problèmes et souvent, l’utilisation d’objets concrets. Une telle activité est planifiée et menée à bien par les élèves et l’enseignant dans un contexte naturel et vrai ».

 

Aussi, le moyen d’action du projet est fondé sur la motivation des élèves, suscitée par l’aboutissement à une réalisation concrète, traduite en objectifs et en programmation. Il induit un ensemble de tâches dans lesquelles tous les élèves peuvent s’impliquer et jouer un rôle actif, qui peut varier en fonction de leurs moyens et intérêts. La mise en œuvre d’un projet permet d’atteindre des objectifs d’apprentissage identifiables, de développer des savoirs, savoir-faire et savoir-être liés à la gestion de projet ainsi que la socialisation des apprenants. Grâce à cela, l’élève est motivé à élaborer le projet auquel il adhère. Il vit activement toutes les étapes avec une volonté de réussir et d’en voir la réalisation.

 

3.3.2 Monter un projet collectif

Dans l’idéal, ce sont les élèves qui font le choix du projet puisqu’il s’agit de les impliquer personnellement, mais la plupart du temps, il est proposé par l’enseignant. Le projet peut naître d’une opportunité ou d’un événement d’origine externe (concours, projet interscolaire…), d’une situation provoquée par l’enseignant ou encore d’un projet dans lequel l’école est engagée (projet d’établissement).

 

Que l’enseignant soit « force de proposition » ne signifie pas qu’il doive définir seul le projet. Il est nécessaire, au départ du projet, qu’il fasse adhérer les élèves à sa proposition en éveillant leur curiosité et en leur laissant un espace d’initiative et de décision.

 

La difficulté réside maintenant sur le choix du projet à mener. Le projet ne sera efficace pour l’apprentissage de l’enfant et du groupe que si celui-ci:

  • est initié à partir des difficultés et des besoins des élèves, soit par le professeur, soit par les étudiants eux-mêmes (individu isolé ou groupe d’individus) ;
  • fait l’objet d’une négociation permettant l’explicitation et la socialisation de l’intention d’action et aboutissant à un consensus explicite entre enseignants et étudiants ;
  • suscite de l’intérêt et de la motivation ;
  • repose sur une approche où la construction des apprentissages se fait par l’action ;
  • permet à l’élève :

– l’acquisition personnelle de savoirs et de savoir-faire nouveaux (apprentissage) ;
– l’acquisition d’une meilleure maîtrise de l’environnement par les réponses au « problème » de départ et par toutes les découvertes engendrées par le processus du projet ;
– l’acquisition d’une meilleure connaissance de soi-même, de ses besoins, de ses limites, de ses manières de fonctionner ;

  • est une aventure qui s’inscrit dans la durée, qui s’enrichit de ses tâtonnements, de ses essais, de ses erreurs, de ses amendements successifs, bref, qui reste aussi susceptible d’évolutions ultérieures ;
  • débouche sur une fabrication concrète ;
  • permet à l’apprenant une prise de responsabilité ;
  • repose sur une autre approche du savoir (le savoir en tant qu’apprentissage plutôt qu’enseignement) ;
  • favorise une autre conception de l’évaluation (bilans, auto-évaluation, évaluation portant sur le travail d’équipe, l’autonomie, la démarche de projet, le savoir-être, évaluation prospective, prévoyant des réinvestissements et des développements possibles…) ;
  • atteint un seuil de difficulté minimum (défi, dimension épique du projet) ;
  • a une dimension coopérative ;
  • permet d’atteindre les objectifs fixés.

 

Aussi, dans le cadre de la formation musicale, l’organisation ou la participation à des spectacles ou concours de musique semblerait indiquée dans le sens où la préparation ne peut se faire qu’avec la coopération de tous, tout le monde évoluant pour le succès de l’ensemble. Enfin, l’événement sera la réalisation concrète qui couronnera le temps et les efforts passés à l’apprentissage. Il sera une source de satisfaction pour les élèves mais également pour les parents. L’école de musique bénéficiera par la même occasion de la meilleure des publicités possibles.

 

 

 

CONCLUSION

 

 

En résumé, il faut ainsi dire que la pédagogie coopérative a plusieurs bienfaits sur l’épanouissement de l’enfant-apprenant impactant en conséquences positives également pour les tiers dont les parents, l’école de musique et même la communauté. La pédagogie coopérative est d’autant plus conseillée dans le cadre de la formation musicale dans la mesure où l’apprentissage de la musique requiert un plus grand champ de liberté, d’action et de créativité, champ pouvant être créé et entretenu de par cette méthode. De plus, apprendre par la pédagogie coopérative en formation musicale permet à l’enfant de se développer tout en évoluant au sein du groupe et pour le groupe pour produire un ensemble harmonieux, objectif particulier de la formation musicale.  Enfin, grâce à la pédagogie coopérative, l’enfant développe outre ses qualités techniques, des qualités sui serviront à son épanouissement personnel, ceci rendant la qualité de l’enseignement procuré par l’école meilleure.

 

Néanmoins, la pédagogie coopérative est loin d’être un remède miracle. En effet, elle nécessite avant tout des conditions favorables à son instauration et à son développement. Ces conditions peuvent concerner d’autant la qualité et la diversité des apprenants que l’expertise de l’enseignant ou encore les habitudes au sein de l’école, le climat en général, le matériel et les ressources disponibles.

 

A part ces conditions de réussite, la pédagogie coopérative est une méthode comportant des règles, des démarches précises et nécessaires à son bon démarrage et sa bonne marche, et pour que les apprenants s’y impliquent de leur plein gré, renforçant ainsi le succès de la méthode. Pour cela, la notion de projet collectif a été proposée comme solution associée à cette pédagogie coopérative pour entretenir la motivation des élèves.

 

 

 

 

 

BIBLIOGRAPHIE ET WEBOGRAPHIE

 

 

 

 

 

[1] Source Wikipédia

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