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Dans quelle mesure les sorties culturelles favorisent-elles l’apprentissage et l’intégration des migrants (primo-arrivants) ?

Thème : Programme socio-culturel et intégration en France des migrants (primo-arrivants)

 

Problématique : Dans quelle mesure les sorties culturelles favorisent-elles l’apprentissage et l’intégration des migrants (primo-arrivants) ?

 

Plan

 

Introduction

 

Partie 1.       Partie théorique

 

1.1       Intégration des primo-arrivants

1.1.1    Concepts clés

1.1.1.1     Migration, migrant, primo-arrivant

1.1.1.2     Intégration, assimilation, insertion

1.1.2    Cadre juridique : des droits et obligations

1.1.2.1     La langue française

1.1.2.2     Intégration sociale/codes sociaux

1.1.2.3     Intégration économique : formation professionnelle et emploi

1.1.3    Enjeux socioculturels de l’immigration/migration : difficultés d’intégration

1.1.3.1     Crises identitaire et socioculturelle

1.1.3.2     L’altérité, l’acculturation, la pluri-culturalité, l’interculturalité

1.1.4    Politique pour l’ouverture culturelle aux primo-arrivants

1.1.4.1     Le public migrant (primo-arrivant) et leurs besoins

1.1.4.2     Politique et moyens mis en œuvre

1.1.4.3     Place officielle de la composante culturelle dans les cours de français pour primo-arrivants

1.1.4.4     Difficultés de réalisation

 

1.2       Programme socioculturel : un support à l’intégration des primo-arrivants

1.2.1    Importance des programmes socioculturels

1.2.1.1     Immersion socioculturelle : Connaissances et pratiques sur l’environnement socioculturel français

1.2.1.2     Médiation culturelle et interculturelle : aider à l’appropriation de la culture française.

1.2.1.3     Repère pour travailler l’identité dans un nouvel environnement

1.2.2    Sorties culturelles

1.2.2.1     Les sorties culturelles

1.2.2.2     Les sorties culturelles et l’intégration

1.2.2.3     Les sorties culturelles et l’apprentissage

 

Partie 2.       Partie pratique : exemple des sorties culturelles de l’association Kolone

 

2.1       Programme socioculturel d’une Association

2.1.1.1     L’association

2.1.1.2     Population cible de l’étude

2.1.1.3     Les sorties culturelles étudiées

 

2.2       Corpus et Méthodologie  (de quoi ? revoir le titre par la suite)

2.2.1    Les hypothèses

2.2.2    Choix des moyens d’investigation

2.2.3    Les questionnaires/ guides d’entretien

 

2.3       Analyse des résultats et recommandations

2.3.1    Résultats

2.3.1.1     Présentation des résultats

2.3.1.2     Analyse des résultats

2.3.2    Recommandations

 

Conclusion

Bibliographie

 

 

Introduction

 

Il faut reconnaitre que le modèle français d’intégration est relativement complexe, à l’aune de quelques caractéristiques illustrant historiquement les états des lieux. La France serait (au moins pour certains observateurs) un pays d’immigration depuis le XIXème siècle, bien qu’elle aurait longtemps nié cette réalité[1]. En fait, il est possible de distinguer trois types de flux migratoires vers la France, avant que l’immigration ait surtout une tendance d’origine extra-européenne[2] :

 

  • Ceux qualifiés d’européens de proximité, essentiellement provenant de pays voisins (surtout de Belgique, d’Italie, d’Espagne, de Pologne et de Portugal) ;

 

  • Des flux issus d’anciennes colonies françaises (surtout du Maghreb et d’Afrique au sud du Sahara) ;

 

  • et le reste du monde (notamment des Turcs et des Sri Lankais).

 

Le visage de l’intégration à la française des migrants a connu divers changements caractéristiques, un phénomène qui n’a pas été sans conséquence sur l’opinion politique et celle du public français sur la question. Ainsi, dans les XIXème et à l’entrée du XXème siècle, l’immigration vers l’Hexagone revêtait une forte capacité d’assimilation avec un accent sur l’identité nationale, une politique de naturalisation assez « rapide » envers les enfants d’immigrés, et des dispositifs puissants d’intégration. Progressivement, l’immigration devient davantage familiale : rapprochement familial plus précisément, après que l’Etat a mis fin à une vague d’immigration de main d’œuvres (dans les années 70). Les conservateurs ont alors insisté sur un problème de « non-maîtrise » des flux migratoires vers le pays.

 

Pour ce qui est de la structure des populations de migrants à l’intérieur du territoire français, le phénomène d’immigration/migration d’étrangers vers la France se concentre de plus en plus fort, géographiquement parlant. En quelque sorte, les plus anciens habitants dans des quartiers massivement couverts par les immigrants/migrants se sentaient alors dépossédés de leurs territoires, alors qu’ils (ces anciens habitants) seraient probablement aussi des descendants (plus ou moins lointains) de plus anciennes immigrations. De plus, la scène a été de plus en plus dramatisée par la dénonciation à l’endroit de la « ghettoïsation » de plusieurs quartiers non maîtrisés « dominés » par des immigrants et la discrimination vis-à-vis de certaines minorités de migrants dans la société française[3].

 

Ce bref survol du contexte de l’immigration/migration en France donne déjà une idée sur les problèmes qu’ont connu (et que continueront de connaitre) les migrants sur le sol français. Parfois, l’immigration/migration devient un sujet sensible (voire tabou) jusqu’à être instrumentalisée pour nourrir un sentiment de xénophobie et de racisme. L’Etat tente de reprendre les affaires en main en affirmant des principes caractérisant le modèle français en la matière, ce qui implique une attitude plus ou moins sévère de la politique concernant l’immigration/migration[4] :

 

  • Le principe d’égalité qui veut neutraliser les déterminismes de religion, de race ou de classe ;

 

  • Le rejet de la logique de minorité qui insiste sur une société composée d’individus et non de communautés ;

 

  • Un minimum d’approbation à l’égard de certaines spécificités relatives aux origines, dont la différence culturelle, par exemple.

 

Il n’est pas question de rentrer en profondeur dans les débats politiques qui incitent à une prise de position subjective. En fait, quasiment toutes les parties qui participent à ces échanges de points de vue avec des fonds politiques sur les questions de l’immigration en France reconnaissent (au moins) une chose : il ne faut pas nier le droit des migrants (dont les primo-arrivants) à des conditions favorables à leur intégration. C’est dans ce sens que la maîtrise de la langue française est prise comme une sorte de conditions d’intégration.

 

En effet, la condition concernant la maîtrise de la langue française devrait surtout être considérée positivement comme un outil offert pour faciliter l’intégration, plutôt que comme contrainte pour réprimer les cibles de cette mesure. Toutefois, les leaders d’opinions s’accordent sur le fait que les contraintes et les exigences, ainsi que les méthodes pour l’apprentissage du Français devraient être différentes suivant le public concerné. L’existence du « Français Langue Etrangère » affirme et confirme cette évidence, c’est-à-dire que les étrangers devraient bénéficier d’une autre façon d’apprendre cette langue que celle avec les natifs de langue maternelle.

 

Toutes ces mises en contexte sur la situation des primo-arrivants (notamment des jeunes) en France démontrent l’interaction forte entre l’apprentissage de la langue française et l’intégration de ces individus. Ignorer les problèmes auxquels sont confrontés ces primo-arrivants dans leurs nouvelles sociétés d’accueil affectera inévitablement leur capacité d’assimiler cet apprentissage. C’est dans ce souci qu’il est proposé d’étudier ces deux réalités (intégration et apprentissage du Français) en prenant en compte leur relation, non seulement au sens juridique du terme mais surtout dans la pratique. Désormais, la maîtrise de la langue du pays se pose à la fois comme fin et moyen dans le cadre de l’intégration : c’est un objectif à atteindre pour chaque primo-arrivant mais également un outil pour sa véritable intégration (en tant que postulant à la citoyenneté française, en l’occurrence).

 

Par ailleurs, il faut également admettre qu’il existe (aussi) une sorte d’inégalité sur la capacité d’accès des migrants à cet apprentissage, de manière analogue aux problèmes qu’ils rencontrent en matière d’intégration. Sans surprise, ce sont surtout ceux qui supportent davantage de difficultés dans leur intégration dans la société française qui ont surtout des obstacles majeurs dans l’apprentissage du Français (mais pas forcément). Ainsi, il est fréquent qu’un jeune primo-arrivant (voire adulte) soit encore analphabète au moment de sa demande d’intégration, ce qui complique vraisemblablement sa situation. L’Etat est presque continuellement conscientisé par un nombre important d’associations qui militent et œuvrent pour améliorer les conditions d’intégration et d’apprentissage de langue de ces primo-arrivants.

 

En outre, l’appréciation par les bénéficiaires des services offerts par ces associations se trouverait affecter par ces conditions. De mauvaises conditions pourraient vraisemblablement constituer un frein à la motivation des apprenants. De cette manière, ces derniers pourraient être tentés de trouver d’autres alternatives aux solutions proposées formellement en matière d’intégration et d’apprentissage du Français. En guise d’exemple, le repli communautaire et la xénophobie d’une part, et l’inactivité ou le développement d’activité clandestine ou illicite (difficultés économiques, dont professionnelles) d’une autre part, sont autant de conséquences possibles de l’échec de l’intégration et (de l’échec) de l’apprentissage de la langue du pays.

 

En ce qui concerne les méthodes et moyens utilisés pour réussir l’apprentissage et l’intégration, nombreux sont ceux (méthodes et moyens) qui se basent sur des principes de pédagogie directe. Au niveau des associations qui se sont spécialisées dans le domaine de l’enseignement des primo-arrivants, l’utilisation d’outils interactifs est vivement encouragée et développée. Ces outils ont surtout des composantes sociales et culturelles, et c’est notamment dans le domaine scolaire qu’ils sont les plus utilisés. Plus de la majorité des associations qui œuvrent dans la prise en charge des primo-arrivants planifient régulièrement des sorties culturelles, étant reconnue l’efficacité perçue de cet outil particulier pour le cas des enfants primo-arrivants qui intègrent les écoles en France.

 

C’est dans cette optique que la présente étude se concentre sur une question centrale : Dans quelle mesure les sorties culturelles favorisent-ils l’apprentissage du Français et l’intégration des primo-arrivants ? Il s’agit alors de faire des analyses théoriques et empiriques sur les apports des sorties culturelles sur le domaine pédagogique/didactique, d’une part, et sur les différents aspects socioculturels (voire économiques et autres) de la vie des primo-arrivants dans la société d’accueil, d’autre part.

 

Pour répondre à cette problématique, le présent document est structuré en deux parties distinctes :

 

  • La première partie se concentre sur les aspects théoriques de la problématique : le cadre juridique et social de l’étude, la place de la composante culturelle et les influences estimées des programmes socioculturels dans le processus d’intégration et dans l’apprentissage du français pour les primo-arrivants.

 

  • La seconde partie se concentre sur des analyses pratiques de la question centrale : il s’agit plus précisément d’étudier les impacts positifs des sorties culturelles réalisées par une association (œuvrant pour l’apprentissage et l’intégration des primo-arrivants) sur les apprenants bénéficiaires.

 

 

Partie 1.        Partie théorique

 

Cette première partie cherche à établir le cadre général de l’étude : l’intégration des primo-arrivants et ses principales composantes, dont l’apprentissage linguistique en particulier. Cette partie abordera également la place et les apports théoriques des programmes socioculturels dans cet apprentissage et dans l’intégration. Désormais, la présente étude se focalisera essentiellement sur le cas des sorties culturelles en tant qu’outils d’appui potentiel à l’apprentissage linguistique et favorisant l’intégration.

 

1.1   Intégration des primo-arrivants

 

Il est d’abord important d’appréhender les notions essentielles relatives à l’intégration des primo-arrivants avant de parler ensuite de ses enjeux socioculturels et surtout de l’importance de la composante culturelle sur ce domaine.

 

1.1.1   Concepts clés

 

1.1.1.1     Migration, migrant, primo-arrivant

 

Avant d’aller plus loin, il est d’abord important d’apporter quelques précisions sur le périmètre de l’étude en définissant les termes « migration », « migrant » et « primo-arrivant ». Michel Picouet reconnait que la définition de la migration est une notion très relative étant donné qu’elle « implique le déplacement dans l’espace, mais tous les déplacements ne sont pas nécessairement des migrations »[5]. Migration est ainsi une question d’espace et de temps, et plus précisément une question de mesure : à partir de quelle distance, et de quelle durée, pourrait-on parler de migration. Pour cela, il convient de tenir compte des définitions proposées par l’Organisation des Nations-Unies (ONU) : « La migration maintenant concerne le passage des frontières politiques et administratives pour un minimum de temps » [6]. Ainsi, il n’existerait pas de définition objective de la migration, du moins en ce qui concerne la dimension temporelle. En fait, l’ONU propose une distinction entre migration interne et migration internationale : la première serait un mouvement entre deux zones nécessairement à l’intérieur d’un pays (entre deux provinces, deux districts, deux municipalités) tandis que la seconde concerne « une relocation territoriale des personnes entre les états-nations »[7]. La présente étude considère le cas de la migration internationale.

 

Aussi, l’ONU opte pour une définition de « migrant » plus large qui va au-delà du cadre de pays de naissance, mais relative au domaine professionnel en désignant les travailleurs qui ne sont pas « ressortissants » du pays où ils exercent leurs activités : « les personnes qui vont exercer, exercent ou ont exercé une activité rémunérée dans un Etat dont elles ne sont pas ressortissantes »[8].

 

Il est possible de classer les migrants selon les motifs qui les ont conduit à quitter leur pays d’origine (ou pays où ils sont ressortissants) : problèmes de conflits (politiques, ethniques, etc.), persécution politique, difficultés économiques, recherche de travail, etc. Cela met en évidence plusieurs formes de migration internationale, mais cette dernière peut également être classée suivant les statuts légaux des migrants : migration irrégulière, libre immigration, ou migration contrôlée[9]. Le primo-arrivant est un cas particulier de migrant désignant une personne qui arrive pour la première fois dans un pays. Il n’existerait pas encore de définition officielle qui détermine la durée au-delà de laquelle une personne résidant en France ne serait plus considérée comme un primo-arrivant (contrairement à la Belgique qui identifie comme primo-arrivants ceux qui « séjournent en Belgique depuis moins de 3 ans et qui disposent d’un titre de séjour de plus de 3 mois »[10]).

 

1.1.1.2     Intégration, assimilation, insertion

 

D’une manière générale, l’intégration implique une certaine stabilité au niveau d’un groupe social, une communauté, une société, étant donné que l’organisation sociale aura tendance à disparaitre en l’absence d’un certain degré d’intégration « sans un certain niveau d’intégration, l’organisation sociale ne peut pas exister »[11]. Dans cette optique, l’intégration a plusieurs composantes essentielles en terme organisationnel, telles que l’esprit de solidarité, les institutions (dont des règles et normes), le partage de travail, etc. Dominique Schnapper définit l’intégration comme « les divers processus par lesquels les immigrés, comme l’ensemble de la population réunie dans une entité nationale, participent à la vie sociale »[12]. De ce qui précède, l’intégration des migrants est un « cas particulier de l’intégration nationale »[13].

 

En outre, il convient d’accorder de l’intérêt à des distinctions que certains auteurs mentionnent entre les trois termes : « assimilation », « intégration » et « insertion ». Dragos Chilea plaide ainsi la distinction suivante[14] :

 

  • L’assimilation est une adhésion totale du migrant aux normes de la société d’installation : l’identité et les spécificités culturelles de celui-ci se campent alors dans le domaine privé. L’assimilation est alors un processus qui a comme finalité logique l’acquisition de la nationalité du pays d’accueil.

 

  • L’intégration renvoi plutôt à une dynamique d’échange entre le migrant et la société d’accueil. Les différences peuvent être maintenues à côté des contraintes imposées par les règles, les valeurs et les éléments essentiels de l’unité et de l’intégrité de la société d’accueil[15].

 

  • L’insertion diffère de l’intégration sur la question identitaire : le migrant pourrait alors garder son identité d’origine avec une reconnaissance de ses spécificités culturelles (ce qui semble être le cas du Québec, par exemple) ; il faut tout de même que le migrant respecte les valeurs et règles régissant la société d’installation.

 

La présente étude se focalise essentiellement sur le cas de l’intégration des migrants nouvellement arrivés sur le territoire français depuis une période de deux ans, au maximum. Ce choix assez arbitraire tient surtout sa raison sur le fait que la plupart des associations qui œuvrent pour l’intégration tiennent compte de cette durée. Il importe aussi d’apprécier le cadre réglementaire régissant cette catégorie de personnes.

 

1.1.2  Cadre juridique : des droits et obligations

 

Les dispositions législatives et réglementaires concernant les droits et obligations des étrangers en France sont énoncées par le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA). Plus particulièrement, les questions abordant directement l’intégration des primo-arrivants qui intéressent la présente étude sont explicitées par les articles L311-9, L311-9-1 et L311-9-2 sur les « Dispositions relatives à l’intégration dans la société française » ainsi que les articles R311-19 à R311-30 sur les « Dispositions relatives au contrat d’accueil et d’intégration ».

 

Il faut comprendre que le primo-arrivant, dès son arrivé en France, prépare son « intégration républicaine ». Cette dernière impose à l’intéressé la conclusion avec l’Etat français d’un Contrat d’Accueil et d’Intégration (CAI). Un des points majeurs de ce contrat souligne la participation du primo-arrivant à suivre quelques formations (suivant ses besoins) dans le but de favoriser son intégration : Formation linguistique (de la langue française), formation civique, et informations sur la vie en France.

 

Sans entrer dans les détails, il convient de mentionner que ces dispositions ne s’appliquent pas à tout étranger arrivé en France : généralement, sont dispensés de la signature du CAI les ressortissants des pays membres de l’Union Européenne, ceux de la Confédération suisse et ceux des Etats parties de l’accord sur l’Espace Economique Européen. Si nécessaire, le contrat doit être rédigé et remis au primo-arrivant dans la langue qu’il comprend. Par ailleurs, outre les formations et informations citées ci-dessus, les parents ayant bénéficié du regroupement familial doivent aussi suivre une formation concernant les droits et obligation des parents en France.

 

Le non-respect des engagements par un primo-arrivant (dont la non-participation aux formations) peut entrainer la résiliation du contrat par le préfet : cela risque alors de remettre en cause la demande de renouvellement du titre de séjour de l’intéressé. Une attestation nominative qui récapitule la réalisation du contrat est délivrée par l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration (OFII).

 

1.1.2.1     La langue française

 

Pour la préparation à l’intégration, le primo-arrivant nécessairement âgé d’au moins 16 ans doit passer une évaluation de son niveau de connaissance pratique de la langue française. Au terme de cette évaluation (orale et écrite) à l’occasion de l’entretien individuel du primo-arrivant avec un représentant de l’OFII, lorsque le besoin en est confirmé[16], le migrant est obligé à suivre l’apprentissage du Français. La durée de cette formation linguistique dépend des résultats du test de niveau qui évalue « les capacités d’expression et de compréhension concernant les actes de la vie courante »[17], mais cette durée ne devrait pas excéder 400 heures. Un organisme capable d’assurer la formation est alors proposé au migrant par l’OFII.

 

L’intéressé doit passer un examen à la fin de sa formation linguistique et la réussite est sanctionnée par un diplôme de l’éducation nationale : le Diplôme Initial de Langue Française (DILF) validant un premier niveau de maîtrise du Français, qualifiant un utilisateur élémentaire, soit le niveau A.1.1 du CECR (cadre européen commun de référence)[18]. Il faut préciser que les frais de formation sont pris en charge entièrement par l’OFII. Dans le cadre du renouvellement du titre de séjour en France du primo-arrivant, pendant la durée de vie du contrat (un an, généralement), l’administration publique tient compte du respect des engagements établis lors de la signature de l’accord. Ainsi, l’organisme chargé de la formation informe aussi l’OFII de l’assiduité de l’apprenant. Il faut également mentionner que l’étranger ne bénéficie de la gratuité de l’examen relatif à l’apprentissage de la langue qu’une seule fois.

 

Pour la plupart des primo-arrivants bénéficiant de ce dispositif d’apprentissage, il apparait que la langue se trouve au centre d’une problématique importante : la langue pourrait être « source d’angoisse »[19]. Un jeune primo-arrivant se verrait alors imposer par la société d’accueil une langue qu’il ne maîtrise pas et qui aurait peu de valeur pour lui (au moins, relativement à sa langue d’origine). Cet individu risque donc d’apprécier cette situation comme une renonciation de sa culture d’origine et le conduit à manifester une résistance, une paresse dans l’accomplissement de ses obligations (dans le cadre du CAI). Les difficultés que le primo-arrivant rencontre dans sa formation linguistique pourraient alors masquer devant lui la légitimité de cet apprentissage et les bénéfices qu’il devrait en tirer dans sa nouvelle vie. Il est même probable que cette nouvelle langue qu’il est obligé de maîtriser et la culture de la société d’accueil en général reflètent, connotent, une image négative dans cette vision assez pessimiste. Les organismes chargés de la formation linguistique pour ces primo-arrivants devraient alors tenir compte de cet enjeu culturel dans leur mission.

 

1.1.2.2     Intégration sociale/codes sociaux

 

L’article R311-22 du CESEDA stipule que la « formation civique […] comporte la présentation des institutions françaises et des valeurs de la République ». Il s’agit alors de formation sur l’environnement juridique dont le primo-arrivant a besoin pour sa vie quotidienne. La formation tourne autour des droits et obligations de tout résidant sur le territoire français, dont l’organisation et le fonctionnement de l’Etat et des Collectivités locales[20]. En outre, l’article R311-26 précise que le primo-arrivant doit bénéficier d’une session d’information concernant la vie pratique en France. Cette session d’information modulable suivant les besoins du primo-arrivant comprend aussi des informations pratiques telles que l’accès au service public et la vie associative dans la société française. En somme, il s’agit de transmettre un ensemble de codes dont le primo-arrivant aura besoin dans son intégration dans la société d’installation[21].

 

Les codes sociaux ont une importante dimension culturelle avec une forte interdépendance avec le processus d’intégration et les composantes de celui-ci. En fait, quand un migrant arrive pour la première fois dans la nouvelle société qui l’accueil, il sent que certaines valeurs importantes dans sa vie (antérieure) sont menacées, en quelque sorte. Ces valeurs sont essentiellement relatives à sa culture d’origine. Désormais, il est obligé d’apprendre des règles et des normes régissant cette nouvelle société, et d’abandonner certaines (règles et normes) de la société qu’il vient de quitter. D’ailleurs, l’ensemble des règles et normes, qu’elles soient explicites ou non, constituent le code social qui influe sur les usages comportementaux dans une société donnée[22]. Toute société dispose de ses propres règles et normes sociales qui conditionnent les comportements de ses membres.

 

Plus en profondeur, les normes constituant les codes sociaux et qui font consensus au sein de la majorité des membres d’une société se déclinent ensuite en valeurs. Désormais, la valeur est une déclinaison offrant des possibilités, une marge de manœuvre occasionnant de multiples options à l’individu pour se conformer aux normes de la société[23]. Par exemple, avec la norme « famille », les membres d’une société où cette norme existe peuvent choisir entre les valeurs « mariage » ou bien « union libre ». Tout cela démontre déjà qu’une réussite dans l’intégration ne doit pas mépriser l’apprentissage de ces codes : pour qu’un primo-arrivant ait la reconnaissance de sa société d’accueil, et trouve ainsi sa place au sein de cette dernière, il faut qu’il maîtrise les codes sociaux communs de cette société. De ce fait, les codes sociaux ont un rôle protecteur pour les membres d’un groupe, mais surtout un rôle intégrateur pour l’ensemble de ces membres.

 

Il faut alors comprendre que pour un primo-arrivant, l’intégration est une question de déconstruction et de construction. Ainsi, une personne est rattachée à des comportements caractéristiques à la société (dits « habitus ») où elle vit : c’est une intériorisation des codes sociaux de cette société par cette personne, et parfois de manière non-consciente. Arrivé dans une autre société, cet individu a besoin d’abord de déconstruire plusieurs codes sociaux afin de pouvoir intégrer ceux de la société d’installation, tels que certaines pratiques sociales qui ne sont pas très usuelles dans sa culture d’origine[24]. D’ailleurs, il est très important de connaitre que c’est via les relations sociales, la collectivité, des activités communes dans la société que le code social se construit. Tout formateur, enseignant, médiateur interculturel, … et tout acteur intervenant dans le cadre de l’intégration des primo-arrivants doit alors mettre au premier plan ce processus de déconstruction et de construction (des codes sociaux). Lors d’une visite de musée, par exemple, ce ne sont pas tous les primo-arrivants qui sont habitués à de telles pratiques : c’est un rôle de l’enseignant de transmettre les « bons » codes (respect du silence dans un musée, par exemple) à ces nouveaux membres de la société.

 

Il n’existerait pas de typologie de codes sociaux, puisque ceux-ci se déclinent suivant les situations et le milieu dans lesquels vit un individu. Le processus de socialisation conduit une personne à acquérir, à apprendre et à intérioriser des codes. En revanche, il est intéressant de citer quelques-uns des codes auxquels les acteurs de l’accompagnement des primo-arrivants ont et devraient avoir l’habitude de manier : les codes de politesse, de l’habillement, de la langue, de comportement. Il est clair que ces déclinaisons de codes sont relatives à la société dans laquelle évolue un individu.

 

1.1.2.3     Intégration économique : formation professionnelle et emploi

 

L’article R311-26 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile souligne qu’un bilan de compétences professionnelles est proposé à des étrangers désirant s’installer en France. Outre la connaissance et la valorisation des qualifications, des expériences et compétences professionnelles, l’objectif prioritaire de ce bilan de compétences et l’intégration professionnelle du primo-arrivant pour lui permettre l’épanouissement sur le plan socioéconomique. En effet, en plus d’une ressource financière plus ou moins stable qu’un emploi devrait lui procurer, cela améliore également son statut social (estime de soi et reconnaissance par les autres). Dans ce cadre, l’OFII travaille en partenariat avec Pôle Emploi afin d’intégrer le primo-arrivant comme demandeur d’emploi, un droit de tout citoyen français.

 

En fait, l’intégration du primo-arrivant devrait se faire sur quelques principales dimensions distinctes mais interdépendantes, dont économique, sociale et culturelle[25]. Même s’il n’est pas toujours vérifié que l’échec dans l’intégration économique entraine forcément des problèmes sérieux dans l’intégration culturelle, il faut tout de même admettre que la réussite dans la première pourrait être un facteur important dans la promotion de la seconde. Cependant, il est souvent constaté des exemples qui manifestent des échecs de l’intégration malgré les améliorations des dispositifs d’accueil des primo-arrivants en France. Pierre Salama regrette désormais une forme de discrimination dont sont victime les migrants avec des taux d’emploi généralement inférieurs à celui des nationaux, le taux d’emploi pouvant être considéré comme un indicateur de mesure du degré d’intégration d’un individu[26]. Aussi, les jeunes migrants connaissent un problème d’orientation fondamentale dans leurs parcours académique et professionnel : des jeunes migrants issus de « quartiers difficiles » à forte communauté étrangère sont souvent orientés vers des formations professionnelles à cycle court, alors que d’autres jeunes nationaux ayant obtenu des résultats scolaires identiques (à ceux des migrants) sont plutôt orientés vers des formations à cycle long. En outre, ces deux catégories de jeunes n’ont pas la même probabilité d’intégration professionnelle après leurs études, en défaveur des migrants.

 

Ces faits nourrissent les débats concernant les politiques de discrimination positive à l’égard de ces catégories de personnes relativement défavorisées. Les tenants de cette option insistent sur le fait que ces politiques permettent de concrétiser la proclamation de l’égalité (donc en terme réel) pour tous dans leur finalité. De leur côté, les opposants à ces politiques montrent entre autres l’inégalité formelle que ces dernières risquent d’engendrer qui serait contraire au principe républicain d’accès égal aux droits. Sans se noyer dans ces débats, il y a lieu seulement de dévoiler que le primo-arrivant vit dans un contexte économique difficile qui ne favorise pas pleinement son intégration dans sa globalité. A titre d’illustration (année 2011)[27] :

 

  • 25,4% des primo-arrivants (pays n’appartenant pas à l’Espace Economique Européen) sont encore en chômage, contre 8,5% pour la population non-immigrée ;

 

  • Le taux de chômage des primo-arrivants ont progressé de 33% (contre 25% pour l’ensemble de la population française) entre 2008 et 2011 ;

 

  • 44% de ces étrangers ont un niveau d’étude inférieur ou égal au 1er cycle universitaire (contre 27% seulement pour la population totale.

 

1.1.3  Enjeux socioculturels de l’immigration/migration : difficultés d’intégration

 

Philippe Blanchet définit la culture comme « un ensemble de données, de principes et de conventions qui guident les comportements des acteurs sociaux et qui constituent la grille d’analyse sur la base de laquelle ils interprètent les comportements d’autrui »[28]. Pour l’interprétation de ces comportements, dont les pratiques linguistiques font parties, la connaissance tient une place primordiale dans la culture. Mais la définition ci-dessus insiste aussi sur des actions au niveau de la mise en œuvre de la culture dans le cadre d’une interaction entre deux milieux culturels différents. L’intégration en général et l’apprentissage de la langue du pays d’accueil en particulier doivent alors faire face à des possibilités de distorsion dans lesquelles le migrant pourrait rencontrer de sérieuses difficultés.

 

1.1.3.1     Crises identitaire et socioculturelle

 

L’identité culturelle pourrait être définie comme sentiment d’appartenance à une communauté : ce sentiment étant conscient et faisant l’objet de reconnaissance par cette communauté mais aussi par d’autres groupes extérieurs. Il est important de remarquer qu’un individu (surtout pour le cas d’un migrant) pourrait appartenir à plusieurs communautés à la fois et pourrait avoir de multiples identités, formant ainsi un tout nuancé et complexe.

 

En toute légitimité, l’intégration selon les principes qui prévalent en France implique une reconnaissance identitaire, c’est-à-dire « une connaissance de soi, de ses origines, et c’est cette connaissance qui permet une intégration réfléchie, assumée et donc réussie »[29]. Toutefois, cette intégration n’est pas toujours en cohérence avec le maintien des pratiques culturelles qui ne sont pas conformes aux règles régissant la société d’accueil ; d’ailleurs, le maintien intégral des pratiques culturelles de la société d’origine des migrants pourrait entrainer le repli identitaire et la marginalisation communautaire. En fait, il faut appréhender l’identité comme « processus » et « configuration dynamique » qui évolue et change selon les circonstances : d’où, les concepts d’identité actuelle, d’identité voulue[30] ; ces deux derniers éléments ainsi que l’environnement social confectionnent la projection de l’identité culturelle d’un primo-arrivant (dans la société d’accueil). Il faut alors comprendre qu’un primo-arrivant est généralement confronté à une crise identitaire générée par ses identités relatives à sa culture d’origine et celles que la société d’installation veut lui attribuer.

 

Marie-Hélène Buffet décrit ainsi trois grandes stratégies identitaires potentielles marquant cette crise identitaire que beaucoup des migrants ont connue en France au cours de l’histoire[31] (comparables aux stratégies d’acculturation, cf. infra : 1.1.3.2 L’altérité, l’acculturation, la pluri-culturalité, l’interculturalité) :

 

  • Un minimum de sociabilité avec la société d’installation accompagné d’un maintien de relations étroites avec le pays d’origine ;

 

  • Une conscience d’appartenance aux communautés étrangères (d’étrangers) plutôt qu’avec la société d’origine (d’où identité de la diaspora) ;

 

  • Un sentiment de conservatisme culturel c’est-à-dire des conditions sociales marginalisées pour se détacher de la société d’installation surtout lorsque des évènements historiques négatifs ont marqués la migration.

 

Cette crise identitaire pourrait alors avoir des impacts sur certains éléments de l’intégration, dont sur le langage et sur le territoire : émergence des langues des cités et des « ghettos linguistiques ».

 

En outre, il faut également parler des enjeux des expressions culturelles en matière identitaire et d’intégration. Ainsi, l’expression artistique, par exemple, est un moyen utilisé par des (artistes) migrants pour exprimer leurs appréciations de la société d’accueil ; mais ils utilisent aussi cette expression culturelle pour construire leur place dans cette nouvelle société. Il est possible d’admettre que les expressions culturelles soient un instrument utilisé par les primo-arrivants pour se frayer un passage entre la culture du pays d’origine et celle de la société d’installation. Souvent, les migrants artistes laissent entrevoir à travers d’expression culturelle dans un cadre associatif qu’ils sont en pleine jouissance de leur appartenance à la société française tout en exposant une identité et une culture spécifique. Tout cela donne des idées sur les rôles de premier ordre que joue la culture dans le processus d’intégration.

 

1.1.3.2     L’altérité, l’acculturation, la pluri-culturalité, l’interculturalité

 

Un migrant se trouve entre deux communautés culturelles distinctes : celle qu’il vient de « quitter » et celle qu’il devra intégrer. De ce fait, l’intégration et l’apprentissage de la langue du pays d’accueil sont fortement dépendants de l’appréciation par ce migrant (et des moyens qu’il utilise dans cette appréciation) de cette autre société, cette autre culture. En effet, cette appréciation détermine la stratégie d’acculturation que ce sujet va adopter, cette dernière étant définie par Redfield, Linton et Herskowits comme « l’ensemble des phénomènes résultant du contact direct et continu entre des groupes d’individus de cultures différentes, avec des changements subséquents dans les types de cultures originales de l’un ou des deux groupes »[32]. Aussi et pour aller plus loin, l’intégration peut impliquer l’acculturation qui est le processus qui procurerait chez un individu le sentiment de faire partie intégrale de la société d’accueil : les natifs et les migrants doivent alors partager certains traits communs. Quatre voies s’offrent alors à un primo-arrivant comme stratégies d’acculturation[33] :

 

  • L’assimilation consiste à s’éloigner des composants de la culture d’origine pour adopter ceux de la société d’accueil ;

 

  • L’intégration (en tant que stratégie d’acculturation, se distingue donc de l’intégration au sens de la présente étude) concerne le maintien des éléments de la culture d’origine tout en essayant d’épouser les nouveaux relatifs au pays hôte ;

 

  • La séparation est une attitude plutôt conservatrice envers les héritages culturels du pays d’origine au détriment des échanges avec ceux de la société d’installation.

 

  • La marginalisation est une stratégie adoptée par les migrants qui n’établissent quasiment pas de relation, ni avec sa culture d’origine, ni avec celle du pays d’accueil.

 

Ces stratégies sont alors fonction du degré de relation que le migrant décide d’entretenir avec sa culture d’origine, et du degré d’ouverture qu’il est prêt à faire vis-à-vis de la culture de son pays d’accueil. Il est possible d’affirmer que le succès dans l’intégration (au sens de la présente étude) et l’apprentissage dépend de la stratégie d’acculturation adopté par le primo-arrivant : par exemple, il est ambigu de considérer comme intégration réussie celle d’un migrant ayant choisi la marginalisation comme stratégie d’acculturation. Il est également intéressant de mentionner quelques variables psychosociales ou sociodémographiques déterminantes pour le choix de cette stratégie[34] : la satisfaction de vie suivant une autoévaluation positive des conditions d’existence, l’identité culturelle étant donnée la liaison entre identité et appartenance au groupe, l’estime de soi, et les valeurs avec leur rôle dans l’orientation comportementale et sociale d’un individu. A titre d’exemple, Pierre Salama[35] cite quelques freins à l’intégration des immigrés/migrants tels que discrimination économique, ségrégation urbaine, enseignement inadapté, quartiers défavorisés, etc.

 

Tout cela semble présupposer que le migrant est en train de reconstruire son avenir dans un environnement pluriculturel[36]. Mais cette notion de « pluriculturalisme » (dont la biculturalité) reste un sujet de discussion entre des natifs aux esprits plutôt conservateurs dans une volonté d’affirmer et de protéger des valeurs « anciennes » de la culture française, d’un côté, et ceux qui accordent plus d’importance à la médiation interculturelle dans le souci de favoriser l’intégration des migrants[37]. Il n’est nullement question de prendre position dans de tel débat autant que possible afin de garder un esprit d’analyse objective pour la présente étude. En tout cas, il faut souligner que toutes ces données démontrent à quel point la nouvelle vie du primo-arrivant lui offre des options inconfortables mais déterminants pour sa vie sociétale.

 

Les primo-arrivants comme les nationaux expérimentent l’altérité, une double altérité où les premiers sont « les autres » des seconds, et inversement[38]. Mais ce phénomène prend parfois une dimension négative en défaveur des primo-arrivants qui sont d’ailleurs les « minorités ». Cette dimension négative de l’altérité pourrait faire dévier les choix de ces « minorités » vers des stratégies qui entraveraient le processus d’intégration et l’apprentissage[39].

 

Quant à la notion d’interculturalité ou bien d’approche interculturelle, elle se focalise sur les évènements relatifs aux relations entre des individus issus de milieux culturels différents, même en partie. Il s’agit alors de méthodologie et de principes d’actions utilisés pour apprécier les difficultés concernant de telle interaction[40]. Plus précisément, l’approche interculturelle cherche à prévenir et à identifier des éventuelles confusions et les problèmes de communication qui trouvent nécessairement leur origine dans les écarts de schèmes interprétatifs résultant des différences culturelles. Comme solution, cette approche vise l’intégration de ces différences (l’altérité) dans les moyens d’enseignement, dans l’apprentissage et les outils relationnels pédagogiques. De cette manière, l’apprentissage de langue étrangère devrait contribuer à une éducation visant à promouvoir une meilleure compréhension mutuelle entre les différents participants.

 

Il faut préciser que la langue est juste un élément majeur caractérisant un milieu culturel, ce qui veut dire que deux interlocuteurs pourraient ne pas appartenir à une même communauté culturelle, bien qu’ils partagent une seule langue. Entretemps, il faut reconnaitre que la culture n’est nullement dissociable de la langue. D’une part, une langue communique et véhicule les concepts culturels de la communauté qui la parle, exprimant ainsi une vision d’un environnement qui pourrait être significativement différente de celle exprimée par une autre langue. Dans la traduction, par exemple, il faut s’attendre à de non-accords entre les termes employés dans deux langues différentes. D’une autre part, les pratiques linguistiques sont fortement influencées par la culture. Lorsqu’il est par exemple demandé à un migrant de raconter quelque chose en utilisant la langue de la société d’accueil, il pourrait toujours être amené à employer des figures ou symboles qu’il a l’habitude d’employer dans la communauté d’où il vient.

 

Devant les difficultés que pourraient rencontrer les primo-arrivants dans le processus d’intégration, et surtout concernant l’apprentissage du français, il existe des moyens spécifiques destinés à les aider, notamment en utilisant la composante culturelle.

 

1.1.4  Politique pour l’ouverture culturelle aux primo-arrivants

 

Il est logique de considérer d’abord les cibles (les primo-arrivants) avant de penser à d’éventuels moyens et méthodes qui correspondraient à leurs besoins identifiés, toujours en matière d’intégration et d’apprentissage linguistique.

 

1.1.4.1     Le public migrant (primo-arrivant) et leurs besoins

 

La migration se transforme au fil du temps compte tenu des origines des primo-arrivants qui se diversifient de plus en plus. Toutefois, ceux-ci peuvent être appréciés suivant quelques classements intéressants permettant aussi d’identifier leurs besoins respectifs :

 

  • Selon les origines géographiques, les primo-arrivants viennent surtout du Maghreb ; mais plusieurs viennent aussi de l’Afrique subsaharienne dont la plupart sont faiblement scolarisés. Il semble que les arrivées issues de certains pays voisins de la France (Italie, Espagne et Portugal[41]) diminuent, surtout que ces pays deviennent à leur tour des terres d’immigration. Désormais, les autres continents (Asie et Amérique latine, en l’occurrence) fournissent de plus en plus de migrants à la France (surtout des chinois), avec des pays non francophones. Cela dit, l’apprentissage du Français peut être considéré comme une nécessité de premier ordre pour les primo-arrivants (surtout pour ceux qui viennent des pays non francophones).

 

  • Selon la trajectoire, les primo-arrivants sont issus d’origines sociales très diverses, en passant par des analphabètes avec une difficulté financière, venant des campagnes de leurs pays d’origines (bénéficiant du regroupement familial, par exemple) jusqu’à des gens de haute qualification mais qui ont fui les conflits internes de leurs pays. Aussi, leurs besoins sont associés à leurs projets migratoires (politiques, économiques, etc.).

 

  • Selon le niveau de scolarisation/formation, il y a des jeunes non scolarisés mais ne sont plus soumis à l’obligation scolaire sur le territoire français (étant donné leur âge), et ceux qui ont un niveau scolaire acceptable mais nécessitant tout de même une formation linguistique renforcée.

 

Par ailleurs, le référentiel du « Français Langue d’Intégration » (FLI) identifie quelques spécificités caractérisant les primo-arrivants, en général[42] :

 

  • Ils devraient être en immersion linguistique dans la société d’installation, non pas sur des motifs nécessairement pédagogiques (dans le cadre d’une étude académique, par exemple), mais tout simplement pour des logiques sociales (pour pouvoir communiquer aisément avec les autres membres de la société) ;

 

  • Ils optent pour une installation définitive, ou tout au moins de manière durable ; cela insiste sur la différence en termes de relations avec la société française entre leur cas et ceux des étudiants ou des touristes qui ne font que passer ;

 

  • Plusieurs d’entre eux ont connu une faible scolarisation, et cela rend difficile leur apprentissage à l’écrit (en moyenne, 39% à 41% des primo-arrivants de sexe masculin ont un niveau inférieur ou égal au cycle primaire au moment de leurs migrations en France)[43];

 

  • Ils sont très diverses par leurs passés (vies personnelles, professionnelles, parcours académiques, … très différentes), outre leurs origines multiples. Ils sont rassemblés ensuite dans des groupes très hétérogènes pour bénéficier notamment de la formation linguistique, avec au moins un but commun : l’intégration.

 

L’institutionnalisation du FLI est en quelque sorte une réponse au besoin de formation linguistique dans ces contextes assez difficiles (évoqués ci-dessus), émanant de ce public particulier.

 

1.1.4.2     Politique et moyens mis en œuvre

 

Désormais, parler de politique et de moyen pour l’intégration, et plus particulièrement pour l’apprentissage du français, revient à mettre en évidence le FLI : ce dernier a été déployé pour répondre à un objectif précis et pour une politique linguistique bien déterminée. En fait, il n’est pas question uniquement de démarches didactiques puisqu’il y a d’abord la nécessité d’apprendre la langue du pays d’accueil afin d’avancer plus facilement dans le processus d’intégration. De là s’explique la raison d’être du FLI, étant entendu que le FLE et le FLS (principalement) n’apparaissent plus vraiment compatibles aux circonstances de l’intégration. En fait, le FLE désigne une approche didactique destinée à des publics pour lesquels le français n’est pas la langue maternelle : le français constitue alors une langue étrangère (par opposition à langue maternelle), du point de vue de l’apprenant et du pays d’où ce dernier vient. En revanche, le FLS indique une situation particulière où le français n’est pas la langue dominante du point de vue de l’apprenant (dans ses pratiques) bien qu’elle a une position dominante dans le pays d’origine de cet apprenant (en tant que langue officielle ou co-officielle)[44].

 

Partageant les mêmes bases théoriques et méthodologiques avec le FLE/FLS, le FLI est destiné à un public d’adultes (ou jeunes-adultes), en insistant sur la finalité de l’apprentissage (qui est l’intégration). Ainsi, pour ce public, le français ne devrait plus être considéré comme langue étrangère bien que toutes les actions visant à faire approprier cette langue aux primo-arrivants n’impliquent pas l’abandon de leurs langues d’origine. L’apprentissage du français ne devrait en aucun cas être pris comme démarcher pour l’effacement de la culture d’origine d’un apprenant puisque le FLI veut conduire à un plurilinguisme additionnel (plutôt que soustractif). Le FLI « est une construction de compétences socio-langagières et de répertoires langagiers qui doit faciliter l’intégration sociale, économique et citoyenne »[45].

 

Au regard des primo-arrivants, l’apprentissage de la langue française cherche principalement le développement de leurs compétences en matière de communication verbale. Plus particulièrement, la formation linguistique insiste sur les capacités dans les dimensions relationnelles suivantes[46] :

 

  • Relations de transaction et de services dans les domaines publics et privés ;

 

  • Relations interpersonnelles dans les contacts de la vie quotidienne ;

 

  • Relations professionnelles ;

 

  • Circonstances de communication médiatisées, c’est-à-dire des messages seulement lus ou entendus à travers des supports divers (annonce, boîte vocale, etc.).

 

Plus simplement, l’apprentissage de la langue s’insère dans une logique politique qui vise la satisfaction des besoins quotidiens des primo-arrivants de manière à développer leur autonomie dans plusieurs contextes socioéconomiques du pays d’accueil. Autrement dit, il s’agit de fournir aux migrants les connaissances et savoir-faire socio-langagiers afin qu’ils puissent jouir d’un environnement social acceptable avec les natifs de France. Pour atteindre cet objectif principal en matière d’intégration, la formation linguistique doit comprendre des tâches réalisées faisant intervenir la communication pratique dans les diverses dimensions relationnelles décrites plus haut. Les apprenants sont alors mis dans une situation d’immersion en insistant sur les aspects « socio-langagiers » des travaux pratiques et activités réalisés afin que ces apprenants puissent établir une relation de bon voisinage avec les autres membres de la société d’installation.

 

Toujours en matière de FLI, il est aussi important de parler de quelques-unes des compétences attendues du formateur FLI, notamment lorsqu’il intervient face aux apprenants ; donc, entre autres :

 

  • Le formateur doit maîtriser la dynamique du groupe (d’apprenants) qui est, à rappeler, composé d’individus issus de contextes socioculturels très variés : il est chargé de l’organisation de toute coopération à l’intérieur de chaque groupe, d’autant plus que chaque apprenant doit se sentir motivés et valorisés à travers leurs spécificités culturelles.

 

  • Le formateur doit être capable de profiter de toute circonstance pour mettre en évidence les spécificités socioculturelles et langagières françaises, dans un contexte de formation linguistique.

 

  • Le formateur doit accompagner les apprenants dans la comparaison des spécificités socioculturelles et langagières française avec celles des sociétés d’origines de ces apprenants : usages, organisation de la vie, coutumes et traditions, principe politique. Cela devrait conduire les primo-arrivants à pouvoir surmonter les éventuels obstacles générés par les différences afin de pouvoir s’intégrer comme membres de plein droit à la société française.

 

  • Le formateur doit proposer des dispositifs d’apprentissage qui facilitent la distinction des liens entre les simulations et les réalités dans les activités pratiques.

 

Tout cela donne déjà des aperçus de l’importance du domaine social mais également celui du culturel dans l’apprentissage du français comme langue d’intégration. A noter que le formateur doit aussi accompagner les apprenants dans les activités d’évaluation de leurs progrès, dont en matière d’interaction collective et sociale (notamment dans la dialogue interculturel) ainsi que dans la compréhension de la culture française et des codes sociaux. Il est alors très important d’apprécier la place de la composante culturelle dans le cadre de cet apprentissage linguistique.

 

1.1.4.3     Place officielle de la composante culturelle dans les cours de français pour primo-arrivants

 

Pour bien appréhender la problématique concernant la place de la composante culturelle dans l’apprentissage du français, il convient de comprendre le concept de « compétence culturelle ». Cross définit ce concept comme « un ensemble cohérent de comportements, d‘attitudes et de politiques qui s‘intègrent dans un système, une organisation ou entre des professionnels, et qui habilitent ce système, cette organisation ou ces professionnels à travailler de façon efficace dans des situations transculturelles »[47]. En fait, Christian Puren[48] insiste sur une définition de la « compétence culturelle » à travers les composantes de ce concept que sont :

 

  • La composante transculturelle qui est la capacité à distinguer l’humanisme à travers les expressions culturelles aussi diverses ;

 

  • La composante métaculturelle qui insiste sur les connaissances culturelles mobilisées et extraites des supports documentaires disponibles : il s’agit alors essentiellement de capacité à réaliser des actions en termes d’appréciation, de comparaison, de transposition, de commentaires, etc. sur ces connaissances ;

 

  • La composante interculturelle qui met en évidence la capacité de gestion des communications ponctuelles (passagères) entre des individus issus de cultures différentes : il consiste surtout à repérer les éventuels éléments d’incompréhension ou de mécompréhension relatifs aux représentations d’une culture par une autre ;

 

  • La composante pluriculturelle qui est la capacité à gérer le côté culturel dans une communauté multiculturelle, à entretenir des attitudes et comportements favorables à la cohabitation dans la diversité culturelle ;

 

  • La composante co-culturelle qui souligne la capacité à promouvoir un environnement propice à des actions communes dans un groupe composé d’individus de cultures différentes.

 

Il faut comprendre que ces diverses composantes de la compétence culturelle se combinent suivant les circonstances qui font appel à elles. A titre d’exemple, pour le cas d’un primo-arrivant qui doit apprendre à vivre et à travailler en France : il sera amené à assurer des contacts interculturels (composante interculturelle) qui l’aidera ensuite dans son intégration dans une société où vivent des individus issus de plusieurs cultures (au moins deux : la sienne et celle de la société d’accueil) ; ainsi il doit gérer le vivre ensemble avec ces personnes d’autre(s) culture(s) (composante pluriculturelle) et mener des projets avec ces membres de sa société d’installation (composante co-culturelle).

 

Dans le cadre de l’apprentissage du Français pour l’intégration du primo-arrivant, le formateur est investi de plusieurs missions et fonctions, dont entre autres :

 

  • L’enseignement des langues et cultures étrangères et non seulement celles relatives à la culture française. De ce fait, le formateur est chargé de développer l’aptitude des primo-arrivants à communiquer à l’oral dans une logique de compréhension, d’interaction et d’expression en continu dans divers contextes de l’environnement socioculturel français.

 

  • L’enseignement de la langue française incluant une bonne compréhension de ses usages, des codes sociaux et des codes culturels de cette société d’accueil pour les primo-arrivants.

 

Ainsi, le formateur doit remettre en cause certains stéréotypes chez les apprenants et doit travailler avec des approches interculturelle et transculturelle. En effet, le primo-arrivant a besoin d’accompagnement pour prendre une distance par rapport à sa propre culture, se décentrer vis-à-vis de certaines certitudes acquises, développer un esprit critique, actualiser ses propres connaissances (dont culturelles) et accroitre sa compétence culturelle dans le cadre de son intégration. En quelque sorte, les acteurs en charge de la formation linguistiques doivent aussi jouer le rôle de médiateur culturel/interculturel.

 

Conséquemment, le référentiel FLI est explicite en ce qui concerne les connaissances et compétences attendues du formateur linguistique : « Avoir des connaissances sur les cultures, adopter une démarche interculturelle, transculturelle ou co-culturelle dans son enseignement, objectiver les comportements en milieu plurilingue et pluriculturel, avec pour objectif l’intégration à la société française »[49]. En somme, il est clair que la composante culturelle se trouve au cœur de l’enseignement de la langue aux primo-arrivants, un des éléments conditionnant leur intégration dans la société française.

 

Aussi, les ateliers sociolinguistiques (ASL dans lesquels interviennent des bénévoles dans les associations prenant en charge la formation linguistique des primo-arrivants) constituent un moyen devant permettre aux apprenants d’acquérir les connaissances nécessaires sur le domaine socioculturel. Les ASL sont des actions spécifiques, à travers l’apprentissage linguistique, visant à soutenir le processus d’intégration de manière à favoriser l’implication des participants dans leur nouvel environnement social. Les intervenants doivent alors traduire en tâches pédagogiques les situations de la vie sociale pour développer la compétence à communiquer des apprenants, la connaissance des codes sociaux et culturels de la société françaises, etc. Les « sorties socioculturelles » peuvent alors constituer des éléments pédagogiques très intéressants et très bénéfiques pour les bénéficiaires de la formation linguistique pour insister sur la composante sociale d’une part, et la composante culturelle d’une autre part. De ce fait, le référentiel FLI cite à plusieurs endroits l’effectivité de ces « sorties et visites prévues avec les apprenants dans le cadre des actions proposées »[50]. Cependant, l’exploitation de cette voie (sorties culturelles) n’est pas systématique (ni même proposée dans le cadre du FLE/FLS) par toutes les organismes prenant en charge l’apprentissage du français aux primo-arrivants. Cela est dû à plusieurs problèmes qui sont souvent relatifs aux associations concernées, mais également aux bénéficiaires des actions de formation linguistique.

 

1.1.4.4     Difficultés de réalisation

 

Il existe quelques problèmes sur l’utilisation des sorties (socio)culturelles comme outils pédagogiques et didactiques dans l’apprentissage du français pour les primo-arrivants. Il ne s’agit pas de dresser une liste exhaustive de toutes les difficultés : il s’agit surtout de montrer l’existence de ces dernières et les alternatives pouvant être prises pour résoudre ces problèmes éventuels.

 

1.1.4.4.1    Problèmes de moyens

 

Dans un premier temps, il faut admettre que les primo-arrivants ont parfois des problèmes de moyens (nécessairement financiers) pour participer à des activités payantes (les frais de la formation linguistique étant désormais pris en charge par l’Etat). De ce fait, plusieurs des « sorties socioculturelles » (telles que la sortie « bateau mouche », par exemple) se heurtent à ce problème de moyen. Cependant, une des solutions à la disposition des associations œuvrant pour l’apprentissage du français aux migrants est le développement de partenariats avec certains organismes (publics, essentiellement). De tels partenariats (dorénavant cité par le référentiel FLI)[51] permettent de réaliser des sorties intéressantes telles que la visite de musée, de bibliothèque, certains spectacles, etc. de manière gratuite. Il faut donc souligner que ce problème existe mais il est seulement relatif, compte tenu des solutions en termes de partenariats qui s’offrent aux acteurs de la formation linguistique.

 

1.1.4.4.2    Manque de temps

 

Ce problème est bien réel étant donné que le temps nécessaire à la réalisation d’une ou de plusieurs sorties socioculturelles peut bouleverser l’emploi du temps. A rappeler que le volume horaire relatif à la formation d’un primo-arrivant est plus ou moins fixé préalablement. Cela impose alors aux responsables d’une association optant pour la réalisation de sorties socioculturelles de réorganiser de façon optimale l’ensemble de leurs activités. Il est aussi possible d’effectuer ces sorties en dehors des heures préalablement fixées pour la formation linguistique, mais il faudrait dans ce cas trouver un compromis avec chaque apprenant puisque ces activités (sorties) peuvent aussi avoir des impacts importants dans l’organisation de sa vie privée (problème d’emploi du temps) : outre leurs activités personnelles et éventuellement professionnelles, les primo-arrivants peuvent être également dans l’obligation de suivre d’autres formations, par exemple.

 

1.1.4.4.3    Insuffisance de formation et/ou d’informations du formateur sur les pratiques socioculturelles

 

En effet, les activités de sorties socioculturelles (et la prise en compte de la composante culturelle en tant qu’élément quasi-central de l’apprentissage du français) ne sont explicitement promues qu’avec le FLI. Il faut reconnaitre que l’organisation et la prise en main d’une sortie culturelle (visite de musée, par exemple) ne va pas de soi : comme tout outil pédagogique, cela nécessite un minimum de connaissances pratiques pour le responsable afin que l’activité réalisée soit vraiment bénéfique dans l’atteinte des objectifs fixés. Il n’existe pas beaucoup d’offres de formation (et de supports de formation) spécialisées dans ce domaine pour les formateurs linguistiques. Cela ne veut pas pourtant dire que les outils et les voies pouvant être exploités dans ce sens n’existe pas. Pour l’exemple de la visite d’un musée (le musée Carnavalet de Paris, par exemple), il est possible de planifier des activités sur mesure avec le conférencier du musée, relatives à une thématique préalablement définie.

 

1.1.4.4.4    Hésitation concernant la cohérence entre apprentissage et sorties culturelles

 

L’essence du problème est surtout attribuée à la méconnaissance des liens forts entre l’apprentissage linguistique et les sorties culturelles. Du coup, il faudrait encore réaliser plus d’effort en termes de formation et d’informations sur les importants apports des sorties socioculturelles à la réussite dans les cours de langue (cf. 1.2.2.3 Les sorties culturelles et l’apprentissage).

 

1.1.4.4.5    Anticipation d’un manque de motivation ou des freins dans la participation des apprenants

 

Sur ce point, la question de la représentation est surtout l’origine de l’impasse. De son côté, le formateur pourrait être tenté de « penser » et décider à la place des apprenants en se permettant de juger et conclure que tels programmes socioculturels ne leur intéressent pas, ne leur conviennent pas, ne répondraient pas à leurs besoins. Or, il faut comprendre que le besoin est d’abord un élément subjectif, c’est-à-dire que deux individus ayant des caractéristiques similaires peuvent éprouver des besoins différents. Ainsi, le formateur serait amené à élaborer « tout seul » l’ensemble des activités relatives à la formation linguistique sans la moindre consultation des apprenants pour appréhender au moins leurs besoins. Le formateur devrait lui aussi prendre une distance avec ses certitudes pour se détourner de certain a priori à propos des primo-arrivants qui nuiront probablement à l’apprentissage de la langue et au processus d’intégration.

 

De leur côté, les apprenants peuvent faire une autoreprésentation négative sur la réalisation de telles sorties socioculturelles. Plusieurs primo-arrivants peuvent « s’estimer » qu’ils n’ont pas vraiment le droit d’aller à tel ou tel musée, que telles activités ne leur sont pas destinées (puisqu’ils sont des étrangers, puisqu’ils n’ont pas leur place dans ces lieux, etc.), qu’ils devraient plutôt en profiter en dehors de cette formation linguistique, qu’ils n’ont pas les moyens pour s’offrir une visite de musée, etc. Or, ces activités visent aussi leur autonomie pour qu’ils retrouvent leur place dans la société française. Il est alors dans le rôle du formateur d’aider les apprenants à changer éventuellement cette représentation.

 

1.1.4.4.6    Déplacements

 

Ceci est une particularité des problèmes de moyens que peuvent rencontrer les associations et les apprenants. En effet, l’organisation du déplacement est un élément spécifique à toute sortie. L’appréciation d’un certain nombre de difficultés dans ce type d’activités peut décourager ces associations et apprenants : problème de transport, les coûts de déplacement, le temps dépensé. L’organisation est d’autant plus difficile lorsque l’association concernée est plus loin de la ville alors qu’elle opte pour une visite de musée, par exemple. Mais il faudrait aussi penser que toutes ces difficultés pourraient également être utilisées comme moteur pour jouir davantage des bénéfices offerts par une sortie socioculturelle. Avec une bonne organisation, cela pourrait aider les primo-arrivants à mieux connaitre les problèmes/obstacles existants dans la vie sociale en France et les meilleurs moyens pour les surmonter. Par exemple, les primo-arrivants peuvent profiter d’une sortie pour apprendre à trouver les bons itinéraires pour parvenir à un musée (prendre les moyens de transport adéquat, se situer par rapport à certains repères, etc. Tout cela nécessite une approche plus en profondeur du programme socioculturel en tant qu’outil dans le processus d’intégration des primo-arrivants, et plus particulièrement dans la formation linguistique destinée à ce public.

 

1.2   Programme socioculturel : un support à l’intégration des primo-arrivants

 

Avant d’étudier le cas particulier des sorties culturelles, il convient d’abord d’apprécier les bénéfices à tirer de l’utilisation du programme socioculturel comme support à l’apprentissage du français au sens de l’intégration. Sans trop s’attarder sur la notion de programme socioculturel, il convient de considérer comme tel toute tâche réalisée dans le cadre de la formation linguistique qui implique la composante sociale et la composante culturelle : ateliers, rencontres, sorties, etc.

 

1.2.1  Importance des programmes socioculturels

 

Trois points sont considérés pour appréhender cette importance, pour se convaincre de l’utilité de cet outil qui n’est pas très familier des acteurs du FLE/FLS : l’immersion socioculturelle, la médiation culturelle/interculturelle, et la déconstruction/construction identitaire[52].

 

1.2.1.1     Immersion socioculturelle : Connaissances et pratiques sur l’environnement socioculturel français

 

Les moyens employés pour aider les primo-arrivants dans leur processus d’intégration (et dans l’apprentissage linguistique) devraient avoir plus d’efficacité en utilisant davantage l’immersion socioculturelle. Cette dernière consiste à mettre les apprenants en contact direct avec la société d’accueil par des moyens insistant sur les composantes culturelle et sociale (des pratiques culturelles, par exemple). Il s’agit ainsi d’un complément pratique des cours théoriques réalisés essentiellement en salle de formation. L’objectif principal de cette approche par immersion est d’ailleurs le développement de la compétence socio-langagière et de la compétence culturelle des apprenants.

 

En faisant des analyses comparatives avec les dispositifs québécois en matière d’apprentissage du français pour l’intégration des primo-arrivants, les programmes socioculturels cherchent à travers l’immersion socioculturelle la mise en contact des apprenants avec les « repères socioculturels ». Dans le Programme-cadre de français utilisé en Québec (un équivalent du référentiel FLI en France)[53], ces repères socioculturels sont des éléments d’information sur la société d’accueil pour faciliter le traitement des codes sociaux et culturels (services de transport en commun d’une ville, les festivals, les arts, etc.). Un programme de sortie culturelle doit, par exemple, faire comprendre aux apprenants l’utilité pratique des connaissances acquises sur les codes de comportement relatifs à la société française (le respect du silence dans certains lieux publics, tels que musée, église, …, par exemple). Certes, un apprenant aura probablement l’occasion de pratiquer lui-même ses acquis de la formation linguistique, et cela de façon individuelle et sans l’appui des formateurs. Mais les programmes socioculturels tiennent un rôle de facilitateur, de motivateur, et d’accélérateur de cette mise en contact pour une pratique plus réussie car faisant l’objet d’assistance de la part des formateurs.

 

A cette mise en contact avec les repères culturels relatifs à la société française s’ajoute l’appréciation des valeurs de la République française mais d’une autre manière via les programmes socioculturels. Par exemple, les apprenants pourraient ainsi appréhender l’importance de la laïcité de l’Etat en France à travers une visite guidée dans un musée : ils peuvent ainsi survoler l’histoire de la France et voir comment la séparation de l’église et l’Etat constitue un élément important dans la fondation de la République française. Le Programme-Cadre de Français au Québec indique que les repères culturels et les valeurs communes (valeurs de la République pour la France) sont des composants de l’intégration culturelle (au moins dans le cadre de la formation linguistique pour les primo-arrivants). Cela devrait illustrer également la réalité de l’intégration dans la société française. Plus simplement, les programmes socioculturels (une complémentarité entre la composante sociale et la composante culturelle) devraient être un outil important à exploiter dans l’apprentissage du français dans le contexte de l’intégration des primo-arrivants.

 

1.2.1.2     Médiation culturelle et interculturelle : aider à l’appropriation de la culture française.

 

Il ne faut pas oublier que les conditions de la rencontre entre un primo-arrivant et les membres de sa société d’accueil constituent un préalable à la qualité de son intégration. Les cours théoriques dispensés en classe donnent d’abord les connaissances nécessaires pour préparer les apprenants à acquérir et/ou à renforcer leurs capacités pour affronter les réalités de telle rencontre. En apportant à ses apprenants les éléments nécessaires pour mieux comprendre l’environnement socioculturel français, le formateur joue en quelque sorte le rôle de médiateur culturel : promouvoir l’accès de ces apprenants à la culture française. Les programmes socioculturels sont ensuite censés offrir un cadre réel pour la pratique de ces connaissances acquises, créer des opportunités d’interactions sociales entre les primo-arrivants et les membres de la société française, sous la supervision d’un ou de plusieurs formateurs. Ces programmes socioculturels sont d’autant plus utiles alors pour les apprenants que pour les formateurs dans le contexte de formation linguistique et d’intégration :

 

  • D’un côté, c’est une occasion s’offrant aux apprenants pour se décentrer par rapport à leurs propres cultures afin de découvrir une autre à travers d’autres moyens que les cours théoriques.

 

Désormais, la finalité de la formation linguistique pour les primo-arrivants implique bien plus le côté pratique (priorise la composante interculturelle de la compétence culturelle) de la communication à l’oral plutôt que le côté didactique (insistant sur la composante métaculturelle : bonnes « connaissances » de la culture d’autrui). Mais il faut comprendre que pareille pratique n’est pas sans danger si l’apprenant considéré s’exerce tout seul (sans assistance du formateur) suivant sa compétence culturelle : A la suite d’une sortie culturelle occasionnant une rencontre avec des natifs, par exemple, des interprétations erronées peuvent créer des distorsions entre ces natifs et un primo-arrivant, du fait de leur diversité culturelle. Le formateur, en tant qu’encadreur du programme socioculturel, peut donc être amené à jouer un rôle de médiateur interculturel dans ce contexte particulier.

 

Les programmes socioculturels dans le contexte de formation linguistique pour primo-arrivants tiennent alors une place particulièrement importante dans les étapes de l’intégration : l’accueil de ces migrants, leurs premiers contacts avec les autres membres de la société française. Dans ce sens, la médiation interculturelle opère surtout du côté des primo-arrivants pour leur permettre une bonne compréhension du nouvel environnement socioculturel.

 

  • D’un autre côté, les programmes socioculturels constituent un outil très intéressant pour le formateur pour évaluer et suivre l’évolution de ses apprenants concernant leur compétence culturelle et leur compétence langagière.

 

Le formateur devrait aussi profiter de ces programmes pour mieux connaitre ses apprenants avec leurs besoins afin de procéder à un éventuel recadrage dans ses manières d’agir pour transmettre les savoirs, savoir-faire et savoir-vivre. Il ne faut pas oublier que les primo-arrivants composant un groupe d’apprenants sont très différents les uns par rapport aux autres, même pour ceux issus d’une même culture d’origine. Les programmes culturels ont alors un rôle d’actualisateur : d’une part, ils servent pour la mise à jour des éléments d’apprentissage, mais d’une autre part, ils déconstruisent la tendance du formateur à standardiser ses méthodes d’enseignement. En somme, le programme socioculturel est un outil de médiation, à la fois culturelle et interculturelle, au service de la formation linguistique pour l’intégration.

 

1.2.1.3     Construction/déconstruction identitaire : Repère pour travailler l’identité dans un nouvel environnement

 

Le programme socioculturel devrait s’inscrire aussi dans une (autre) étape de l’intégration, toute aussi importante que l’accueil et les premiers contacts. Il est question surtout d’intégration sociale et économique (dont professionnelle) des primo-arrivants. Ces derniers ne sont pas de simples touristes qui s’intéressent seulement à des rencontres éphémères : il ne s’agit pas uniquement de découvrir et de respecter des différences culturelles dans la société d’installation, mais surtout de chercher à pérenniser les contacts et la cohabitation avec les membres de cette société. Dans ce cadre, le programme socioculturel devrait servir à quelque chose dans la déconstruction identitaire et la construction d’une nouvelle identité pour un primo-arrivant. Plus particulièrement, de tel programme devrait être un moyen pour accompagner l’intéressé dans le processus d’acculturation.

 

Désormais, le primo-arrivant est devant une double interrogation : sur le maintien de ses caractéristiques culturelles avec une identité associée à celles-ci d’une part, et sur l’établissement de liens avec la société d’accueil, d’autre part. Le remaniement identitaire en question, c’est-à-dire l’acculturation, se déroule dans une relation asymétrique qui concerne essentiellement la modification de la culture du sujet (primo-arrivant) pour l’adapter à celle du pays d’installation. Le processus d’acculturation dépend principalement de cinq paramètres : de l’origine de cette acculturation (endogène/exogène au sujet), sa vitesse de réalisation, son étendue (nombre d’éléments subissant la transformation), sa profondeur (niveau/degré de différence) et sa « reliabilité » (concordance de la transformation avec le contexte)[54]. Un changement exogène, plus rapide, plus étendu, plus profond et non reliable entrainera une instabilité identitaire (sous forme de crise). Pour établir alors un équilibre identitaire en termes de valeurs et de représentations auxquelles s’identifient le primo-arrivant, il faut une cohérence entre les fonctions pragmatiques et ontologiques de l’identité. La fonction pragmatique concerne l’adaptation avec le nouvel environnement (composantes co-culturelle et pluriculturelle) et la fonction ontologique est la référence aux valeurs et représentations fondamentales pour la reconnaissance de l’individu (composante transculturelle)[55]. En fait, le programme socioculturel vise entre autres à l’orientation du primo-arrivant dans son choix sur les valeurs et représentations sur lesquelles vont se baser son identité ainsi qu’à son adaptation aux contextes de la société française.

 

En effet, un programme socioculturel est une mise en contexte des groupes d’apprenants, leur ensemble constituant d’emblée une véritable société/microsociété multilingue et multiculturelle. Le programme consiste à amener ces individus à cohabiter et à réaliser ensemble un certain nombre de projets. Cette mise en contexte proche de celui de la société d’accueil[56] est une sorte de laboratoire dans lequel les apprenants peuvent apprécier les conséquences de leurs actes (leurs choix). Ceci devrait les aider à mieux choisir alors leurs stratégies d’acculturation.

 

En conclusion, le programme socioculturel est un outil à exploiter par les formateurs pour plus de cohérence dans l’ensemble des actions entreprises pour l’apprentissage du français et surtout pour l’intégration. La présente étude concerne plus particulièrement les sorties culturelles, leur place dans le processus d’intégration.

 

1.2.2  Sorties culturelles

 

Après un aperçu généralisé de l’importance des programmes socioculturels (cf. 1.2 Programme socioculturel : un support à l’intégration des primo-arrivants) dans la formation linguistique et l’intégration des primo-arrivants, il importe de se concentrer sur un aspect particulier de ces programmes : les sorties culturelles.

 

1.2.2.1     Les sorties culturelles

 

Il n’y a quasiment aucune étude explicite dédiée à l’importance didactique et pédagogique des sorties culturelles dans leur ensemble/généralité, bien qu’il existe quand même des discussions sur quelques activités particulières pouvant être classées dans cette dénomination « sortie culturelle » (sortie au théâtre[57], par exemple). Il convient alors de définir en premier lieu le champ devant être couvert par les sorties culturelles.

 

Le domaine des « sorties » ne devrait pas présenter un problème majeur dès lors qu’il est compris que cela fait référence à des évènements et lieux non fréquentés par les intéressés dans le cadre de leurs activités habituelles (essentiellement, professionnelles et de formation). Dans le cadre de la présente étude, les sorties devraient surtout être prises par rapport aux activités habituelles relatives à l’apprentissage du français (les sorties sont alors des activités en dehors du cours formel), et plus précisément par rapport aux lieux où se déroule habituellement la formation (les sorties se déroulent donc en dehors des salles de formation, nécessairement). C’est surtout le domaine entendu par « culturelles » qui nécessite plus de précision, d’autant plus que la définition du concept « culture » peut être différent d’un auteur à un autre.

 

Toutefois, il convient d’étudier une définition de « culture » proposée par Guy Rocher, inspirée de celle de Tylor : « ensemble lié de manières de penser, de sentir et d’agir plus ou moins formalisées qui, étant apprises et partagées par une pluralité de personnes, servent, d’une manière à la fois objective et symbolique, à constituer ces personnes en une collectivité particulière et distincte »[58]. Cette définition met en évidence des caractéristiques de la culture, essentiellement du point de vue sociologique et anthropologique, dont entre autres :

 

  • C’est un ensemble attaché des manières de penser, de sentir et d’agir : les connaissances objectives (correspondant à la réalité objective) et subjectives (dont les croyances, les idées et les pensées) sont alors inclues dans cet ensemble. La culture concerne alors toute activité cognitive, affective ou conative ;

 

  • Ces manières de penser, de sentir et d’agir sont plus ou moins formalisées, faisant référence alors à des codes, des normes, des formules rituelles, etc. ;

 

  • La culture (au sens sociologique du terme) est partagée par une pluralité de personne : les notions de collectivité et de consensus importent beaucoup étant entendu qu’il est nécessairement question de « groupe ».

 

  • Cette culture se transmet par l’apprentissage (question d’héritage), ce qui la distingue de la « nature » (question d’hérédité).

 

Une activité dite « culturelle » est évidemment relative à cette culture : la culture doit donc être relative à un groupe bien déterminé. Il faut préciser qu’il est possible de rencontrer plusieurs groupes au sein d’une même société (pluriculturelle). Les activités culturelles sont ainsi des activités qui mettent en évidence la dimension « culture » dans les actions entreprises. Les sorties culturelles pourraient correspondre alors à toute sortie dont une ou plusieurs activités culturelles en constituent l’essence : Sortie au cinéma, visite de musée, spectacle/concert, visite de théâtre, etc. De par la grande variété, pratiquement non dénombrable, des sorties culturelles, il faut admettre que les influences attendues d’une sortie culturelle devraient être différentes d’une autre, autant sur l’intégration des primo-arrivant en général que sur l’apprentissage du français par ces derniers en particulier.

 

1.2.2.2     Les sorties culturelles et l’intégration

 

Quelques principaux apports des sorties culturelles à l’intégration qui sont réalisées dans le cadre de la formation linguistique sont présentés ci-après. Il est attendu que les apports d’une sortie culturelle pourraient être différents de ceux d’une autre : seront alors considérées dans cette sous-section les sorties qui devraient avoir des impacts positifs et significatifs sur le processus d’intégration.

 

1.2.2.2.1    Ouvrir sur l’environnement

 

Ces sorties constituent en premier lieu pour les primo-arrivants une porte ouverte vers des endroits dont ils n’ont pas encore accès auparavant : ils n’en connaissaient pas l’existence, ils n’ont pas encore pensé d’y aller, ils pensaient qu’ils ne pourraient pas y accéder, ou y aller ne les intéressent pas jusque-là. Ces sorties sont alors des voies pour leur permettre de se construire des expériences positives à partir de la visite d’un lieu particulier : en tant que membres à part entière de cette nouvelle société qu’ils sont en train d’intégrer, ils devront user de leur droit d’accès à tout lieu pouvant être visité par les autres membres.

 

Il est possible que les différences socioculturelles entre sa société d’origine et son actuelle société d’accueil soient une des principales raisons qui a empêché un primo-arrivant de visiter un certain lieu (un musée, par exemple). C’est alors un moyen pour déconstruire certaines habitudes ainsi que des manières de penser et d’agir du primo-arrivant : franchir les seuils qu’il n’oserait point dépasser dans son pays d’origine est une étape déterminante dans son intégration dans la nouvelle société. Ce serait une manifestation publique (et reconnue par lui-même et par les autres membres de la société) des changements de représentations concernant le primo-arrivant considéré : d’une part, en le voyant dans les endroits qu’ils fréquentent en tant que membres de la société française, les natifs (entre autres) devraient voir moins de différence entre eux et le primo-arrivant ; et d’autre part, ce dernier aurait conscience de ses droits (de mettre les pieds dans tel ou tel endroit comme tout membre de la société) et ainsi cela lui permettrait de se sentir « appartenir » à cette société d’accueil dont il est a priori éloigné . Il est attendu qu’après une ou quelques séances de sorties culturelles, le primo-arrivant aura plus de courage et d’initiative à fréquenter de tels lieux, et d’autres encore : il aura intégré les codes relatifs au fonctionnement de ces lieux.

 

1.2.2.2.2    Développer la curiosité et la sensibilité intellectuelles/permettre une ouverture culturelle pour une meilleure insertion sociale, professionnelle et citoyenne

 

Les activités culturelles comme la sortie culturelle est censée apporter un savoir (quelque chose d’intellectuel) à un sujet. Dans une étude réalisée par CREDOC (Centre de Recherche pour l’Étude et l’Observation des Conditions de Vie – www.credoc.fr) concernant la curiosité scientifique et le développement de connaissances de la population française, il est constaté que ces deux variables s’influencent mutuellement. Il est par exemple révélé que la pratique dite « régulière » a fortement influencé l’intérêt d’un individu à développer davantage ses connaissances relatives à cette pratique : la réparation d’un véhicule provoque l’intérêt porté à la mécanique, par exemple. Il arrive même que la curiosité qui en découle s’intensifie jusqu’à devenir une véritable passion pour le sujet. En retour, ce sont surtout ceux qui se proclament « être scientifique » (par le goût des matières scientifiques, par exemple) qui optent le plus pour une visite de musée scientifique[59].

 

A l’aune de ces exemples, il est logique de penser de manière analogue que les sorties culturelles devraient éveiller chez les apprenants une certaine curiosité sur les éléments nouveaux qu’ils découvrent dans ces activités. D’un côté, il est attendu qu’une sortie culturelle (visite de musée, par exemple) incite les apprenants à vouloir connaitre davantage ces éléments qui caractérisent sa « nouvelle » société : il est légitime pour le membre d’une société de chercher à développer sa sensibilité pour les éléments relatifs à sa « propre culture ». La sortie culturelle vise l’établissement de liaisons entre les primo-arrivants et les composantes culturelles de la société française, c’est-à-dire l’appropriation de la culture française par ces derniers. Cette appropriation devrait renforcer considérablement la motivation de ces migrants pour leur intégration, ce qui constitue un argument de taille pour surmonter les éventuels obstacles à cette intégration.

 

D’un autre côté, la sortie culturelle est un moyen pour permettre aux apprenants de découvrir les existants de la société d’accueil. Il est par exemple possible de réaliser une sortie de cinéma pour projeter un film/documentaire exposant (même implicitement) certains métiers pouvant intéresser certains primo-arrivants (après avoir étudié préalablement leurs centres d’intérêt à partir d’une enquête auprès d’eux, par exemple). La sortie culturelle pourrait alors être un outil d’aide à l’orientation des migrants dans leurs vies socioéconomiques.

 

1.2.2.2.3    Favoriser l’autonomie

 

L’autonomie, essentiellement en matière de formation (mais également sur le plan économique), peut même être prise comme indicateur de l’intégration d’un primo-arrivant : plus ce dernier arrive à se débrouiller tout seul dans la communication avec les autres membres de la société d’accueil, plus il trouve et affirme sa place au sein de cette société. En fait, la sortie culturelle a aussi pour mission de créer et d’entretenir chez les apprenants un esprit d’initiative et de créativité (culturelle, d’abord). Dans une sortie pour une visite théâtrale, par exemple, le formateur pourrait faire participer les apprenants (même indirectement) à l’élaboration d’un texte, ou tout simplement discuter les représentations qu’ils ont appréciées. De la sorte, le formateur les encourage à mieux argumenter leurs idées, une approche devant permettre à chaque apprenant d’avoir confiance en lui-même.

 

Cette expérimentation pourrait être réalisée à plusieurs autres types de sorties culturelles, telles que sortie cinéma, visite de musée, etc. D’ailleurs, ces sorties culturelles sont aussi des mises en contextes (différents de celui des salles de formation) à travers lesquels les apprenants pourraient pratiquer leurs connaissances (acquises lors des cours de langue) de manière plus autonome. Lors d’une sortie, par exemple, le formateur peut amener les apprenants à rencontrer une personne étrangère à la classe : ils sont alors dans des conditions les obligeant à utiliser leurs propres compétences en matière linguistique. Aussi, de telles sorties devraient être une occasion pour valoriser les compétences des apprenants (savoir, savoir-faire, savoir-vivre) : c’est un outil de suivi-évaluation pour la reconnaissance de ces apprenants. « Ainsi, la participation à des actions culturelles a pour effet, […] de renforcer la confiance en soi et les interactions entre le rapport à soi et le rapport aux autres. Elle permet de dépasser ses peurs, ses freins et des barrières. Elle valorise les compétences existantes ou acquises au cours de l’action, dans un processus dynamique. »[60] La sortie culturelle est alors un cadre propice au développement de l’autonomie des primo-arrivants.

 

1.2.2.2.4    Offrir une expérimentation de la vie dans la cité

 

Un groupe d’apprenants est une microsociété multiculturelle et multilingue, mais cherchant à atteindre des objectifs communs : apprendre une même langue et appréhender les compétences leur permettant de s’intégrer à la société française. La formation apprend à ces apprenants les bases théoriques de la vie dans cette société. Certains d’entre eux peuvent hésiter à pratiquer les connaissances acquises ainsi, par peur de résultats qui risquent d’être désagréables s’ils ne maîtriseraient pas parfaitement certains éléments (les codes sociaux, par exemple). La sortie culturelle est alors une sorte de laboratoire permettant à chaque apprenant d’expérimenter la vie dans cette société : à chaque combinaison d’actions réalisée à travers la sortie culturelle correspond un résultat qui reflète celui que le primo-arrivant va obtenir probablement dans sa « véritable vie » dans la cité.

 

1.2.2.2.5    Diversification d’activités (socioculturelles) impliquant une capacité plus importante de supporter les problèmes rencontrés/apprécier des moments agréables dans la vie sociale

 

« Sortir des lieux d’apprentissage habituels, aller à la rencontre d’artistes et découvrir différentes formes de culture sont des moments importants ; ils sont exprimés avec fierté et plaisir (…) »[61]. Les sorties culturelles devraient ainsi permettre aux primo-arrivants d’oublier certains de leurs problèmes et profiter des bienfaits de la vie en société, du plaisir d’être ensemble avec les autres apprenants et les éventuels invités. Cela devrait renforcer l’idée qu’au-delà des difficultés de la vie, notamment dans une société qui n’est pas encore bien connue (comme celle que le primo-arrivant vient de quitter), il y a toujours des possibilités de jouir de la vie commune.

 

Aussi, les apprenants pourront également profiter de ces activités pour partager davantage entre eux leurs expériences, notamment leurs problèmes et difficultés rencontrés dans leur migration. Certes, le formateur peut organiser des activités autres que les sorties culturelles pour permettre aux apprenants de s’exprimer ainsi. Mais il faut admettre que ces sorties offrent un espace (temps et lieux) plus important moins restrictif afin que les primo-arrivants bénéficient encore plus des bienfaits de ce programme (partage lors d’une soirée de camping, par exemple). Chacun pourrait alors voir qu’il n’est pas (ou n’est plus) seul, au moins par la connaissance que ses semblables reconnaissent ses expériences, mais surtout le soutiennent dans ses efforts pour surmonter les obstacles (surtout les obstacles dans le processus d’intégration). Chacun pourraient profiter des expériences des autres pour se frayer un chemin à travers les difficultés : c’est une occasion pour partager les « bons » conseils.

 

1.2.2.2.6    Renforcer les liens et la cohésion sociale

 

Les sorties culturelles organisées dans le cadre de la formation linguistique constituent aussi un moyen pour les primo-arrivants pour nouer des liens sociaux, non seulement entre eux mais également avec les autres membres de leur société d’installation. Outre les contacts avec les autres apprenants (les collaborateurs, les membres de la petite société d’apprenants), ces sorties occasionnent des rencontres avec d’autres personnes : ce sont des possibilités pour communiquer et établir des relations avec les membres de la société d’accueil. Les sorties culturelles ouvrent l’environnement socioculturel des primo-arrivants avec des inconnus, mais des inconnus qui pourraient être leurs voisins, leurs collaborateurs, des membres de leur famille. Ces activités pourraient alors renforcer le processus d’intégration.

 

1.2.2.2.7    Atténuer la tendance au repli et le communautarisme négatif

 

La sortie culturelle est une sorte de vitrine offrant aux apprenants une vue agréable de la société qui est en train de les accueillir, en insistant sur l’aspect collectif de l’appréciation positive. En effet, il ne faut pas oublier qu’un primo-arrivant est en train de reconstruire son identité dans cette nouvelle société, et une vision négative de cette dernière impactera sur sa stratégie d’acculturation. Soulignant ainsi le vivre ensemble, la sortie culturelle est comme un pont reliant la petite communauté d’apprenants avec la société d’accueil.

 

Il a été démontré par René Kaës[62] que lorsqu’une personne ne peut plus communiquer avec son groupe d’appartenance habituel dans un contexte de difficulté et d’angoisse du fait de sa qualité d’étranger, son identité devient de plus en plus instable : cette personne fera un va-et-vient entre recourir à ses références culturelles habituelles et nier celles-ci pour se fondre dans une nouvelle communauté. Une sortie culturelle devrait alors permettre à chaque primo-arrivant un remaniement identitaire plus en douceur, un processus d’acculturation plus ou moins dirigé, du fait de la présence de plusieurs individus cherchant à atteindre un même but : l’intégration.

 

De plus, les éléments de la sortie pourraient amplifier ses bienfaits sur la construction identitaire du primo-arrivant. A titre d’exemple, dans une sortie pour un festival de l’écrit, les apprenants pourraient être incités à écrire quelque chose qui sera par la suite lu par un acteur/comédien. Une telle participation est un moyen pour les faire sortir de l’anonymat et leur apporte ainsi un sentiment d’être reconnu, un instrument pour forger leurs nouvelles identités. D’autres sorties culturelles pourraient aussi occasionner la rencontre avec des personnalités importantes : elles pourraient être vécues par les primo-arrivants comme une reconnaissance à leur endroit.

 

1.2.2.3     Les sorties culturelles et l’apprentissage

 

Il ne faut pas oublier que l’objectif principal de l’apprentissage de la langue du pays d’accueil par un primo-arrivant, en particulier, est la pleine capacité de la communication active de ce dernier dans cette langue. Les rôles tenus par les sorties culturelles devraient être discutés à travers leurs apports potentiels sur le plan pédagogique et didactique.

 

1.2.2.3.1    Motiver l’apprentissage

 

Lorsque les apprenants participent à une sortie culturelle, il s’agit probablement, et même avant la question de l’apprentissage, de profiter des moments agréables occasionnés par le programme. La motivation à participer à une sortie (à cause du plaisir recherché dans cette activité) offre une opportunité plus importante pour l’apprentissage même si au départ, la motivation pour cet apprentissage peut être relativement faible. L’esprit ouvert grâce à cette motivation devrait être plus sensible et plus disposé à recevoir d’autres connaissances.

 

Il faut comprendre que la motivation est l’ensemble des facteurs en dehors du rationnel et du conscient responsables des conduites humaines[63]. D’ailleurs, cette motivation est en fonction de certains besoins émanant d’un individu. De manière générale, l’homme cherche consciemment à satisfaire ses besoins propres à travers une vision rationnelle de son environnement ; et pourtant, plusieurs aspects du comportement humain, dont l’amour, l’affection, l’honneur, etc. n’ont pas vraiment des bases objectivement raisonnables. C’est surtout l’élément fournissant le plus de réponses aux besoins éprouvés par un individu qui le rend plus motivé. D’ailleurs, il est possible pour le primo-arrivant de percevoir dans une sortie culturelle plusieurs éléments correspondant à ses attentes, notamment par la présence des autres individus qui le comprennent mieux dans ses situations : de l’affection/amour, une appartenance à un groupe dynamique, de l’estime de soi et de la reconnaissance par les autres ; ces attentes peuvent se résumer en un besoin d’amour et d’appartenance (suivant le pyramide de Maslow)[64], cherchant sa satisfaction dans un partage entre ami/collaborateur. Ces exemples peuvent être beaucoup plus manifestes dans le cadre d’une sortie culturelle où les apprenants réalisent ensemble un projet d’intérêt général tout en insistant sur l’importance de chacun (une des raisons d’être de la sortie étant le renforcement de la capacité et l’autonomie de chaque apprenant à communiquer dans la langue française).

 

En revanche, il faut souligner qu’une telle motivation, surtout concernant le transfert de celle-ci vers le domaine de l’apprentissage, dépend de plusieurs paramètres. Principalement, il est important que les apprenants voient dans la sortie culturelle à réaliser un réel sens par rapport à leurs autres besoins (autres que le besoin d’apprendre). Une étude (par enquête, par exemple) préalable pourrait se révéler utile pour apprécier les motivations de ces apprenants, bien avant la conception du programme. Aussi et surtout, il est important que les apprenants s’approprient ce programme de manière à générer une participation active, une affection et de l’émotion, de l’initiative chez eux, celles-ci étant des facteurs importants de motivation. Pour cette appropriation, le formateur a intérêt à accorder de la marge de manœuvre aux apprenants dans la conception et la réalisation du programme de sortie.

 

1.2.2.3.2    Favoriser l’ouverture intellectuelle et la culture générale

 

La sortie culturelle est une occasion pour faire découvrir aux apprenants un cadre sensiblement différent de leur entourage habituel. Pour favoriser l’ouverture intellectuelle et la culture générale, il faut développer le sens critique des apprenants pour éveiller davantage la curiosité, l’interrogation et l’ouverture d’esprit. Or, il apparait que le véritable sens critique « ne peut pas se développer par un apprentissage classique, il faut incorporer un rapport à la culture »[65]. La sortie culturelle travaille dans ce sens.

 

Lors d’une sortie au théâtre ou de cinéma, par exemple, il est important de demander à chaque apprenant ses avis et ses appréciations (ce qu’il a aimé et ce qu’il n’a pas apprécié) sans apporter de jugement. Habitué à s’exprimer ainsi, l’apprenant cherchera sans doute à fonder ses propos sur des éléments plus objectifs et cela l’amènera à ouvrir encore les esprits pour puiser plus de connaissances.

 

1.2.2.3.3    Obtenir la dynamique des groupes de participants

 

Bien que la sortie culturelle favorise l’autonomie de chacun, ce type d’activité devrait aussi développer l’esprit d’équipe chez les apprenants. Le fait de sortir du cadre habituel de l’apprentissage conduit ces derniers à réagir différemment dans de nouveaux contextes. Mais ces apprenants sont toujours sollicités (voire contraints) pour travailler de concert afin d’atteindre des objectifs communs. Chaque membre d’un groupe d’apprenants devrait alors tenir une place particulière (au sein de ce groupe) et un rôle déterminé (explicitement ou non). Par exemple, dans une sortie au théâtre, chaque membre d’un groupe de participants peut être amené à tenir un rôle correspondant à un personnage dans une pièce : le bon déroulement de l’activité dépend de la participation active de chacun, et donc une incitation à l’ensemble du groupe de s’entraider. La contribution de chacun est très importante à chaque changement de contexte (suivant les sorties culturelles réalisées) même si la place et les rôles tenus sont susceptibles de changer selon les circonstances : l’inactivité d’un membre du groupe sera vite détecté par les autres qui chercheront alors les moyens pour l’aider à reprendre sa place afin que l’équilibre du groupe soit maintenu. Cela donne à ces apprenants une occasion de s’entraider, se reconnaitre, partager leurs connaissances, … dans le cadre de l’apprentissage.

 

1.2.2.3.4    Promouvoir l’échange linguistique

 

Le choix du type de sortie à réaliser conditionne les effets de celle-ci sur le développement de l’échange linguistique : une sortie au théâtre avec participation active de chacun pourrait favoriser beaucoup plus l’échange linguistique qu’une visite de musée. Il faut admettre que cet échange linguistique est un des meilleurs outils pour joindre les cours théoriques aux exercices pratiques. Les sorties offrent un cadre adapté et intéressant pour l’échange linguistique, c’est-à-dire, plus de temps et d’espace sans trop se soucier de certaines contraintes (emploi du temps, nécessairement), la présence du formateur qui n’intervient généralement que de manière implicite/indirecte (les apprenants chercheront surtout à faire de l’autocorrection plutôt que d’attendre les remarques du formateur, tout en sachant qu’il est attentif à tout ce qu’ils font).

 

De plus, il existe des activités culturelles qui permettent explicitement aux apprenants de s’exprimer sur un sujet, voire de s’impliquer dans des discussions collectives. Par exemple : L’association Belleville organise mensuellement des projections de films dans le cadre de la formation linguistique suivies de discussions auxquelles les apprenants peuvent participer. La présence d’autres personnes étrangères à la formation devrait casser le rythme avec l’apprentissage habituel (en salle de formation), mais les invités devraient être des personnes favoriseront cet échange et la participation de tous (le partenariat avec des organismes/associations spécialisés dans l’apprentissage linguistique est très important).

 

1.2.2.3.5    Profiter des occasions pour apprendre dans un autre environnement, dans des apprentissages informels

 

Il faut insister sur la place importante des apprentissages informels dans la formation linguistique. De plus, ce type d’apprentissage ne devrait pas seulement être pris comme accessoire mais surtout un complément, voire un élément essentiel de l’apprentissage formel. Plus simplement, les cours réguliers réalisés dans les salles de formation sont qualifiés de « formels », tandis que les sorties culturelles occasionnent un cadre d’apprentissage « informel ». En s’appuyant sur le cas de l’alphabétisation des adultes, Jean-Claude Passeron explique que « avant même d’inciter à la lecture cultivée, il faut tout d’abord inciter à lire, […] admettre (et se féliciter) que des groupes sociaux puissent sortir de l’illettrisme sans pour autant se convertir à la lecture littéraire […] toutes les lectures ouvrent des portes qui font communiquer avec d’autres demeures, une fois que l’aisance dans le plaisir de lire a mis un lecteur en mouvement »[66]. De manière analogue, l’apprentissage informel (dont avec la sortie culturelle) pourrait être un élément moteur du programme formel ; cela laisse même penser que c’est le caractère informel de l’environnement d’apprentissage dans de tel élément qui est surtout intéressant sur ce point.

 

De ce fait, il pourrait être encore plus bénéfique de ne pas limiter les sorties culturelles à des pratiques plus ou moins « institutionnalisées », c’est-à-dire essentiellement relatives à la culture savante (musée, théâtre, etc.). Edris Abdel Sayed a ainsi démontré que les pratiques culturelles considérées comme « informelles » (promenades, bateau mouche, vie associative, etc.) favorise l’apprentissage (de l’écrit, dans son contexte particulier) : « les apprentissages vont au-delà des connaissances scolaires puisqu’ils ont un impact sur la vie quotidienne, familiale, professionnelle, pratique et ont pour principal enjeu l’autonomie de la personne »[67].

 

 

En somme, les programmes socioculturels en général et les sorties culturelles en particulier constitue un outil puissant à exploiter par les acteurs de la formation linguistique dans le cadre de l’intégration des primo-arrivants.

 

 

Partie 2.        Partie pratique : exemple des sorties culturelles de l’association Kolone

 

Cette partie tient à expliciter la réalité concernant les éventuels apports des sorties culturelles dans l’apprentissage du français, dans le cadre du processus d’intégration des primo-arrivants. En fait, il s’agit d’étude empirique réalisée sur la base des activités réalisées par une Association qui œuvre pour l’intégration de ce public particulier.

 

2.1   Programme socioculturel d’une Association

 

Désormais, les informations utilisées dans cette partie sont issues d’expériences vécues à travers une des associations qui ont choisi d’intégrer la composante culturelle dans l’apprentissage de la langue aux primo-arrivants.

 

2.1.1  L’association

 

L’organisme en question est l’Association[68] Kolone qui propose des cours de français à des jeunes migrants en France. L’Association, créée en 2011, a pour vocation l’accueil des étrangers de l’ensemble de la Région Île de France à travers des formations linguistiques ainsi que des activités culturelles destinées à favoriser l’échange et l’intégration de ces étrangers dans la société française. En effet, Kolone privilégie certaines notions relatives à l’intégration, telles que l’accueil, le seuil, et l’espace de transition. Ayant son siège à Paris, dans le 19ème arrondissement, cette Association exerce dans les 19ème et 10ème arrondissements (Paris des Faubourgs). D’ailleurs, « Kolone » est emprunté du nom d’un faubourg de la Grèce antique (à Athènes) où les étrangers en demande d’asile étaient accueillis et trouvaient protection.

 

Principalement, les cours de français visent à améliorer la communication orale (mais également écrite) des apprenants, ainsi qu’à faire découvrir à ces derniers la société qui les accueille, poussant leur développement en termes d’autonomie et de socialisation. En outre, Kolone cherche à promouvoir l’insertion professionnelle de ces apprenants dans la formation linguistique que cette Association propose, tout en favorisant le « développement de la confiance en soi et travail interculturel via une pratique créative »[69]. Ainsi, une meilleure maîtrise du français accélère le processus d’intégration des bénéficiaires de la formation linguistique par le fait que cela favorise leur entrée en formation professionnelle (par exemple) et leur accès à l’emploi, en l’occurrence. De plus, Kolone entretient un partenariat avec plusieurs entités dans le territoire où l’Association travaille, c’est-à-dire un réseau susceptible de soutenir les jeunes apprenants dans leurs insertions professionnelle et sociale.

 

Outre l’apprentissage linguistique, l’Association œuvre pour l’initiation des apprenants sur les différents aspects pratiques et culturels de la société française. Plus directement, Kolone planifie souvent ses activités de manière à favoriser les relations des apprenants avec les jeunes français habitant les quartiers de ses champs d’action : ces mises en relation se concrétisent généralement par l’élaboration d’activités communes, explicitant ainsi l’intégration socio-culturelle des migrants.

 

L’Association ne dispose pas de local propre, et les cours sont effectués dans des structures partenaires du Nord-Est parisien. Les cours sont dispensés par une formatrice (salariée de l’Association) avec un volume horaire de 6 heures par semaine, en moyenne.

 

Du côté financier, l’année 2013 a été marquée par une consolidation de la situation de l’Association avec un apport de fonds propres provenant de ses prestations (auprès de ses partenaires). En outre, l’Association est aussi financée par la DASES (Direction des Affaires Sociales, de l’Enfance et de la Santés) ainsi que par la DPVI (Délégation à la Politique de la Ville et à l’Intégration) à travers le Contrat Urbain de cohésion Sociale qui intéresse le quartier Flandre. Plusieurs autres associations et entités soutiennent également l’Association Kolone, dont la Mairie de Paris, le Conseil régional de la région Île de France, le Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement (CCFD) terre Solidaire, le Cinq du cent quatre-Paris (soutenant les projets artistiques amateurs des habitants des 18ème et 19ème arrondissements.

 

2.1.2  Population cible de l’étude

 

Bien évidemment, la population concernée par l’étude est constituée par les bénéficiaires des activités de l’Association Kolone. En fait, cette dernière a choisi de privilégier le cas des étrangers n’ayant pas accès aux dispositifs publics (notamment, l’OFII), soit du fait que ces cibles sont des demandeurs d’asiles, soit à cause de leur situation non-encore régularisée. L’Association Kolone a été constituée au niveau d’une structure appelée « Antenne Jeune » Flandre » de la Mairie de Paris destinée aux jeunes migrants du territoire. La plupart de cette population concernée est en situation d’errance et de précarité : plusieurs de ces jeunes migrants ne peuvent pas alors accéder aux dispositifs publics de formation linguistique. Cette formation devrait alors un moyen plus qu’indispensable pour la stabilisation et l’ancrage de ce public assez fragile dans la société d’accueil.

 

L’âge (16 à 30 ans) est l’unique condition pour bénéficier des prestations offertes par Kolone aux migrants. Ces migrants étant désormais composés essentiellement de primo-arrivants, bien que plusieurs ont déjà vécu sur le territoire français depuis plus d’une année[70] (moins de deux ans, tout de même). Par ailleurs, d’autres jeunes dont la situation est plus stable bénéficient aussi des actions de l’Association. Même si les activités peuvent se dérouler principalement dans les 18ème et 19ème arrondissements, le lieu de résidence ne constitue pas un critère de sélection : certains d’entre les apprenants sont sans domicile fixe, et la plupart viennent de Paris (surtout Nord-Est) et de l’Île de France.

 

Le public cible est majoritairement masculin, mais la mixité est en croissance. La majeure partie des apprenants sont âgés de plus de 18 ans, avec une moyenne dominante de 25 ans. Une dizaine de jeunes n’ont pas encore été scolarisés dans leurs pays d’origine. La majorité d’entre eux sont des demandeurs d’asile en France, et plusieurs ont eu le statut de réfugié au cours de l’année de leur formation et sont en recherche d’emploi. A côté des demandeurs d’emploi évoquant un besoin manifeste d’amélioration de leur compétence en matière linguistique, ceux qui ont déjà du travail souhaitent poursuivre le cours de français, étant entendue son extrême utilité dans leur vie (surtout professionnelle).

 

En outre, les pays d’origine des apprenants sont plutôt diversifiés, dont majoritairement d’Asie et d’Afrique quoi qu’il n’y a plus d’origine dominante. Quelques migrants viennent des pays de l’Union Européenne (Espagne, Portugal, Grèce, Royaume-Uni) mais bien plus rarement pour une année de formation.

 

En somme, la population cible de l’étude (mais aussi, et d’abord, celle de l’Association) est un public de jeune primo-arrivants isolés, en situation de précarité et éprouvant un besoin crucial de formation linguistique pour leur socialisation, et in fine, leur intégration dans la société française. Six (6) d’entre eux suivent aussi les cours de langue dispensés par les autres associations. Certains sont scolarisés et cherchent alors une forme de soutien scolaire. Il est intéressant de mentionner que la plupart de ceux qui donnent le cours de français au sein de cette Association sont aussi des jeunes étudiants en Master de Didactique des Langues. Aussi, Kolone accueille également des étudiants de nationalités autres que française, sous convention de stage (venant de Chine, de Vietnam, de Pologne, de Brésil, d’Algérie et de Pérou). Cela dit, l’Association Kolone est un cadre de rencontre, une microsociété de jeunes enseignants et apprenants, dans un contexte interculturel très particulier devant insister sur la composante culturelle de ses activités.

 

2.1.3  Les sorties culturelles étudiées

 

Avant d’exposer les sorties culturelles organisées par l’Association Kolone qui constitueront le cadre de la présente étude, il convient d’abord d’apprécier la place de la composante culturelle dans cette Association.

 

2.1.3.1     La place de la composante culturelle dans l’Association

 

Manifestement, l’Association Kolone semble donner plus d’espace aux activités culturelles et interculturelles dans les moyens qu’elle utilise pour la formation linguistique. Il apparait que la composante culturelle est considérée comme un outil pour favoriser et renforcer le processus de socialisation et d’intégration des jeunes primo-arrivants. Ainsi, depuis 2013, l’Association a ouvert un atelier hebdomadaire qui se base sur la traduction et l’échange plurilinguistique, appelée « Métamorphose ».

 

Il est intéressant de parler brièvement de cet atelier du fait de l’importance de la place de la culture (au moins au niveau de la dimension linguistique) accordée dans l’apprentissage. En fait, il s’agit de faire lire en français un poème (« l’aurore s’allume » de Victor Hugo, pour l’année 2015) par les apprenants et leur demander ensuite de traduire le poème dans leurs langues maternelles[71]. Cet atelier donne lieu annuellement à une restitution plurilingue sous diverses formes, laissant ainsi entrevoir que l’Association ne méprise pas la composante culturelle dans la formation linguistique.

 

Désormais, des sorties culturelles ont été organisées pour les apprenants, bien que ces sorties occupent moins les activités d’appui aux cours par rapport à l’atelier Métamorphose. Officiellement, l’Association Kolone reconnait que l’accès des primo-arrivants à la culture française fait partie du processus d’intégration. La dimension culturelle revêt alors deux importantes formes dans les activités à réaliser par l’Association : usage des lieux culturels (dont visite de musée, spectacles, etc.) et participation au parcours créatif (grâce à des ateliers). Cependant, avec cette vision favorable à l’utilisation des sorties culturelles dans le parcours d’intégration, l’Association ne veut pas formaliser ou institutionnaliser (par des principes et normes explicites) cette utilisation comme outil « indispensable » à l’apprentissage : elle laisse le soin de juger la pertinence de l’usage de ce type d’activités au formateur/formatrice.

 

2.1.3.2     Les sorties culturelles de l’Association

 

Une entrevue avec la Directrice de l’Association a mis en exergue les éléments suivants, notamment sur la place des sorties culturelles dans l’apprentissage linguistique proposé aux apprenants-primo-arrivants :

 

  • L’Association Kolone ne se démarque pas des autres associations de son genre au sujet des sorties culturelles : ce type d’activités est très développé par presque toutes les associations œuvrant dans la formation linguistique pour l’intégration des migrants.

 

  • Les sorties organisées par l’Association dépend des offres proposées par les partenaires à partir des annonces et calendrier qu’elle reçoit, étant donné qu’elle appartient au « champ social ».

 

  • Outre cet accès au « champ social », le choix des sorties à organiser dépend essentiellement des coûts qui leur sont associés : le choix est notamment orienté vers les sorties « gratuites » ou à tarifs réduits. Il s’agit notamment de permettre aux apprenants (dorénavant, ceux-ci sont en difficulté sur le plan socioéconomique) l’accès à des choses auxquelles ils ne seraient point en mesure d’obtenir à plein tarif.

 

  • C’est la formatrice et la directrice de l’Association qui choisissent les sorties à organiser, sans la sollicitation des avis des apprenants. Le choix est surtout laissé à l’appréciation de la formatrice de l’Association, son point de vue sur la « concordance » des sorties avec les cours.

 

  • Très peu de sorties ont été jusqu’alors préparées à l’avance avec les apprenants.

 

Sans vouloir indiquer formellement la place des sorties culturelles dans les démarches didactiques/pédagogiques, la Directrice de l’Association insiste que les sorties ne sont pas intégrées au cours, c’est-à-dire qu’elles n’ont pas de lien nécessairement explicite avec l’apprentissage, à priori. Ce responsable souligne que ces sorties répondent entre autres à deux grands motifs :

 

  • D’un côté, et d’abord, c’est un moyen pour « faire plaisir » aux apprenants, une occasion pour passer un bon moment ensemble, entre stagiaires et formatrice. C’est une opportunité offerte aux apprenants de découvrir des lieux auxquels ils n’ont pas vraiment accès en dehors du cadre de la formation linguistique.

 

  • D’un autre côté, elles sont organisées compte tenu de leur utilité pour les apprenants en tenant compte de l’appréciation des acteurs de l’association (dont la Directrice et la formatrice). Ainsi, ces acteurs pensent que les sorties aux bibliothèques devraient être utiles pour les stagiaires du fait que cela donne à ces derniers la motivation de fréquenter davantage de tel endroit devant favoriser leur développement intellectuel et leur culture générale.

 

En tout cas, l’Association admet que les sorties culturelles sont également choisis selon les intérêts des apprenants vis-à-vis de ces activités. Au niveau de l’Association, les stagiaires aimeraient surtout les sorties favorisant l’interculturel, telles que la visite du musée de l’histoire de l’immigration, étant entendu que cela les concerne directement. Aussi, la sortie à la grande galerie de l’évolution est une exposition assez spectaculaire avec des thèmes qui touche l’humanité en général (transculturel), et cela intéresserait beaucoup également les apprenants de l’Association. Le type de sorties culturelles le plus fréquemment organisés pour les apprenants de l’Association Kolone est le spectacle, grâce à une convention signée avec le Cent-quatre[72] sur des projets artistiques et culturels.

 

L’intérêt des apprenants sont mis au premier plan car les expériences ont indiqué que le seul but de présenter la culture de l’autre rend ennuyeuses parfois les sorties organisées (l’altérité ne devrait alors se borner sur la présentation seulement de la culture française sans accorder la moindre importance à la culture d’origine d’un apprenant). En revanche, une visite qui touche (même en partie) la culture de l’apprenant (la Mésopotamie au Musée du Louvres, par exemple) engendre plus de motivation et moins de passivité chez celui-ci.

 

L’Association a toujours organisé des sorties (culturelles) depuis son ouverture, mais elles ne constituent pas quelque chose de « primordial » pour l’Association. Elle associe seulement ce type d’activités à un élément supplémentaire, considéré comme « un plus ». Autrement dit, les cours pourraient très bien fonctionner sans sorties culturelles. Plus précisément, dans la politique de l’Association, il n’y a pas de place particulière accordée à ces sorties, et elles ne font pas partie intégrante de manière formelle du fonctionnement de l’Association.

 

Il faut quand même remarquer deux points importants qui donne encore plus de légitimité à l’étude des sorties culturelles comme outil didactique (d’appui au cours, à l’enseignement formel) :

 

  • Il est constaté que les activités de groupes telles qu’elles se manifestent à travers les sorties culturelles constituent des aides précieuses à une catégorie de primo-arrivants très fragilisés (du fait de leur situation très précaires, souvent en errance, alors qu’ils sont en train de développer leurs stratégies d’acculturation) pour qu’ils reprennent confiance en eux-mêmes ;

 

  • Pour certains d’entre les primo-arrivants bénéficiaires de la formation linguistique, les cours dispensés par l’Association Kolone sont l’un des rares occasions leur permettant d’exprimer en français. Ces individus auraient alors besoin d’étendre cet espace où ils pourraient non seulement parler la langue de la société d’accueil, mais surtout être considérés dans leurs capacités intellectuelles avec beaucoup plus de reconnaissance. Les sorties culturelles devraient être un élément menant à de tel objectif.

 

L’année de formation 2015 est la première fois où les sorties culturelles sont « didactisées » dans l’Association Kolone, c’est-à-dire une expérimentation de ces activités culturelles en tant qu’outil d’appui pour l’apprentissage linguistique. Cette démarche expérimentale a été initialisée dans le cadre de la présente étude, durant un stage réalisé au sein de l’Association. Dans le cadre de cette recherche expérimentale, deux sorties ont alors été choisies et organisées : une visite de la Grande Galerie de l’Evolution et une visite du musée de l’histoire de l’immigration.

 

 

2.2   Corpus et Méthodologie de l’étude empirique

Il convient d’abord de présenter les hypothèses formulées et à vérifier dans cette étude empirique, puis de parler des choix méthodologiques appropriés à cela.

 

2.2.1  Les hypothèses

 

Cette étude empirique cherche à répondre à la problématique initialement posée de manière pratique, c’est-à-dire avec des analyses de données relatives à des situations réelles. A rappeler que cette question centrale s’énonce comme suit : Dans quelle mesure les sorties culturelles favorisent-elles l’apprentissage et l’intégration des migrants (primo-arrivants) ? Cette problématique s’intéresse alors aux apports des sorties culturelles organisées pour les apprenants de la formation linguistique, à deux niveaux qui se superposent :

 

  • D’un côté, les impacts positifs que les sorties culturelles pourraient éventuellement avoir sur le processus d’intégration en général. D’où, une première hypothèse générale à vérifier :

 

Hypothèse générale H1 : Les sorties culturelles réalisées dans le cadre de l’apprentissage linguistique établissent des conditions relativement plus favorables au processus d’intégration des primo-arrivants.

 

A l’aune des éléments théoriques présentés dans la partie précédente (Partie théorique), cette hypothèse générale peut être développée en plusieurs sous-hypothèses :

 

  • H1a : Les sorties culturelles dans le contexte de la formation linguistique pour l’intégration des primo-arrivants améliorent la vision de ces derniers vis-à-vis de la société d’accueil.

 

  • H1b : Ces sorties culturelles permettent une meilleure insertion sociale, professionnelle et citoyenne des primo-arrivants poussée essentiellement par une volonté plus affirmée de vivre en France.

 

  • H1c : Ces sorties culturelles accroissent la sociabilité, l’aptitude à vivre en société, des primo-arrivants.

 

  • H1d : Ces sorties culturelles peuvent être des préalables pour l’ouverture des primo-arrivants sur son nouvel environnement, une manifestation de leur volonté de jouir des droits attribués aux citoyens français.

 

  • D’un autre côté, les sorties culturelles devraient apporter quelque chose de positif et significatif dans l’apprentissage linguistique (insistant alors sur les outils didactiques ou pédagogiques). Cela permet donc de formuler une seconde hypothèse générale :

 

Hypothèse générale H2 : L’utilisation des sorties culturelles dans le cadre de la formation linguistique pour les primo-arrivants améliore l’efficacité des outils d’apprentissage linguistique formel.

 

De manière analogue à la première hypothèse générale, la seconde peut être décomposée en plusieurs sous-hypothèses :

 

  • H2a : La réalisation des sorties culturelles dans le cadre de formation linguistique stimule davantage la motivation d’apprentissage des apprenants.

 

  • H2b : Ces sorties culturelles améliorent la vision des primo-arrivants à l’égard de la langue française.

 

  • H2c : Ces sorties favorisent le dynamisme, l’échange linguistique, et la participation de chacun dans les exercices pratiques.

 

  • H2c : Ces sorties permettent aux apprenants de pratiquer le français en dehors (et donc, en plus) du cadres des cours de français.

 

Ces différentes hypothèses sont alors à vérifier pour apprécier les éventuelles effets positifs des sorties culturelles, et sur l’intégration en général, et sur l’apprentissage du français en particulier.

 

2.2.2  Choix des moyens d’investigation

 

Le choix des moyens d’investigation n’a pas été tellement simple : d’un côté, il s’agit surtout de vérifier un certain nombre d’hypothèses qui présupposent quelques éléments de réponses (à valider), ce qui implique une étude quantitative. Cela pose le problème d’échantillonnage et ainsi de représentativité des échantillons, puisque le nombre d’enquêtés disponibles est désormais très limité. D’un autre côté, il ne faudrait pas se limiter aux éléments de réponses présupposés (issus de la recherche documentaire, dans la partie théorique) : il est important de déterminer d’autres éventuels apports des sorties culturelles à l’apprentissage linguistique et à l’intégration. De ce fait, il convient de réaliser une étude qualitative, en posant des questions essentiellement ouvertes/semi-ouvertes. Or, il s’avère que les primo-arrivants devant répondre à ce genre de question ont encore d’énorme difficulté à s’exprimer en français, à formuler les « bonnes » réponses. Du coup, il a fallu trouver un compromis entre étude quantitative et qualitative, avec des questions plus faciles à répondre pour les participants à l’étude.

 

Plusieurs questionnaires ont alors été élaborés et distribués à un groupe d’apprenants : les questionnaires ont alors été auto-administrés. Des questionnaires ont été distribués au début de l’apprentissage (lors de l’accueil des apprenants) et à la fin de la formation. Les autres questionnaires sont relatifs directement aux sorties organisées par l’Association pour ce groupe d’apprenants (cf. infra – 2.2.3 Les questionnaires).

 

2.2.2.1     Les sorties culturelles réalisées dans le cadre de l’étude

 

L’étude empirique (et ainsi, la vérification des hypothèses formulées ci-dessus) se base sur les informations collectées lors de deux (2) sorties culturelles préparées et réalisées pour un groupe d’apprenants de l’Association Kolone.

 

  • Première sortie : à la Grande Galerie de l’Evolution

 

La Grande Galerie de l’Evolution fait partie des 12 sites du Muséum National d’Histoire Naturelle, qui se situe dans les Jardins des Plantes. Brièvement, la Grande Galerie de l’Evolution (appelée Galerie de Zoologie entre 1889 et 1994, date de sa réouverture) expose en permanence des milliers de spécimens dans une spectaculaire architecture. Comme son nom l’indique, le musée retrace des points importants de l’évolution des espèces naturelles, une exposition saisissante et bouleversante sur la place de l’Homme dans la biodiversité fragile. La visite de ce musée, qui accueille quelques centaines de milliers d’admirateurs chaque année, insiste sur la composante transculturelle de la compétence culturelle. C’est un spectacle devant éveiller l’importance d’un individu en tant qu’être supérieur et responsable dans tout environnement où il vit : quelle que soit sa société d’installation (qu’il soit migrant ou non), la présence d’un individu en tant qu’humain est toujours importante, avant même d’apprécier ses influences sur son milieu. En outre, une des missions attribuées à la Grande Galerie de l’Evolution concerne l’enseignement et la pédagogie.

 

  • Deuxième sortie : au Musée national de l’histoire et des cultures de l’immigration

 

Se trouvant à l’Est de Paris, dans le Palais de la Porte Dorée, ce musée a été inauguré en 2014 après sept (7) ans d’ouverture. En fait, le Musée de l’histoire de l’immigration collecte, conserve et expose une collection de l’histoire, des cultures et des arts de l’immigration. Cela offre alors une autre manière d’apprécier l’histoire de la France en insistant sur la part tenue par les immigrés dans la construction économique, sociale et culturelle de ce pays. Plutôt que de s’arrêter sur l’interculturel dans l’immigration, la visite de ce musée souligne la place des composantes métaculturelle (importance des connaissances de la culture étrangère, dont celle du pays d’accueil pour un immigré), pluriculturelle (vivre avec les individus d’autres cultures), et co-culturelle (agir dans un projet commun avec les natifs).

 

Certes, ces deux sorties semblent constituer des cadres intéressants pour l’étude des apports des sorties culturelles à l’apprentissage du français et pour l’intégration. Mais, il y a lieu de préciser que le choix de ces deux sorties n’a pas été attribué, ni à la stagiaire qui a conduit la présente étude empirique, ni aux apprenants qui participaient à ces sorties. Avant même l’arrivée de la stagiaire dans l’Association (et donc, avant une perspective d’étude des éventuelles relations entre les sorties culturelles et l’intégration), les responsables (de cette Association) le choix de ces deux lieux (Grande Galerie de l’Evolution et Musée de l’Histoire de l’Immigration) aurait déjà été fixé.

 

En général, les sorties se sont bien passées. La première sortie, à la Grande Galerie de l’Evolution a vraisemblablement intéressé les apprenants : en quelque sorte, ils étaient émerveillés par l’exposition. Une bonne ambiance a caractérisé la sortie, surtout lorsque les apprenants faisaient des comparaisons entre les animaux exposés et ceux qui se trouveraient dans leurs pays d’origine respectifs. Le fait de trouver des animaux qui existent aussi dans leurs pays d’origine a rendu ces apprenants beaucoup plus concernés et impliqués dans la visite : ils n’ont pas hésité à en parler avec les autres apprenants. Chacun s’est montré également très actifs pendant la visite dans la réalisation d’une petite tâche qui lui a été préalablement confiée : remplir la fiche d’identité d’un animal (cf. Annexe 3). De plus, ils ont posé beaucoup de question durant la visite, et se sont montré très touchés par l’exposition des animaux disparus : Apparemment, la sortie leur a permis d’avoir une prise de conscience plus importante de l’évolution des espèces animales ainsi que la responsabilité de l’Homme de par ses actions sur le milieu naturel.

 

La deuxième sortie (au Musée de l’Histoire de l’Immigration) a été également passionnante pour les apprenants, bien que quelques-uns l’ont trouvé un peu émouvante car la visite du Musée leur a probablement ravivé les souvenirs concernant leurs propres immigrations. Dès fois, ils se sont identifiés à certains personnages racontés dans les histoires et les témoignages durant cette sortie, et ils ont trouvé aussi des objets venant de leurs pays d’origine. Bien que cette sortie a été préparée avec les apprenants (comme celle de la Grande Galerie de l’Evolution), leur niveau de maîtrise de la langue française (encore faible) leur a posé un problème d’incompréhension : ils ont été quelque peu débordé par des informations en abondance sur l’histoire de l’immigration. Néanmoins, ils ont manifesté leur admiration pour la créativité et l’imagination des immigrés à travers notamment leurs œuvres d’art exposées au Musée. Plus particulièrement, la plupart des apprenants se sont étonnés d’apprendre que les premiers immigrés vers la France étaient essentiellement constitués d’Européens, et non pas d’Afrique et d’Asie comme la majorité de ces apprenants le pensaient auparavant (ils estimaient que les européens n’ont pas besoin d’émigrer en France).

 

2.2.2.2     Les participants

 

Il s’agit d’un groupe de dix (10) apprenants (6 hommes et 4 femmes), presque tous des primo-arrivants (arrivés en France depuis moins de deux ans). Ce sont des jeunes adultes, généralement âgés entre 18 et 25 ans dont la plupart ont déjà reçu une scolarisation dans leurs pays d’origine, bien que certains soient quand même assez faiblement scolarisés. Aucun d’entre eux ne suit une formation linguistique dans d’autre association. Ces apprenants viennent tous d’Afrique et d’Asie : Sénégal, Népal, Bangladesh, Chine, etc.

 

2.2.2.3     Difficultés rencontrées dans l’étude

 

Il faudrait noter quelques-unes des difficultés rencontrées notamment dans les investigations dans cette étude empirique :

 

  • Etant donné que la présente étude a été réalisée dans le contexte d’un stage effectué au sein de l’Association Kolone, le temps disponible pour les investigations (qui sont d’ailleurs relatives à ce stage) est très limité. Il aurait été plus intéressant avec des informations plus riche de se baser sur des sorties culturelles plus nombreuses, mais finalement, la contrainte « temps » n’a permis d’en réaliser que deux.

 

  • Il est très probable que certains apprenants n’ont pas eu assez de recul pour répondre à certaines questions. Par exemple, lorsqu’il leur est demandé explicitement s’ils pensent que les sorties sont nécessaires pour leur intégration, les apprenants auraient peut-être besoin d’aide pour bien situer les sorties dans leur parcours d’intégration. Or, un problème d’emploi du temps très serré n’a pas permis à la stagiaire d’assister ces apprenants à répondre de manière adéquate à toutes les questions.

 

  • Il est évident de penser également que les apprenants n’ont pas par endroit une bonne compréhension de certaines questions (selon les individus). Ces apprenants risquent alors de répondre au hasard à ces questions (dont la plupart sont formulées sous formes d’options à choisir, surtout entre « oui » et « non ») ce qui pourrait fausser les résultats des enquêtes. Par exemple, il est remarqué que certains apprenants ont manifestement copié les réponses de leurs amis. Tel que dans la difficulté évoquée précédemment, ce problème de compréhension de certaines questions aurait pu être résolu si la stagiaire disposait plus de temps pour accompagner les apprenants à répondre à ces questions.

 

  • En relation avec les difficultés qu’éprouvent les apprenants à répondre aux questions, il a fallu souvent attendre longtemps avant qu’ils ne restituent les questionnaires (outre d’autres raisons telles que l’absence, l’oubli, etc.).

 

2.2.3  Les questionnaires

 

Comme indiqué un peu plus haut, deux grands types de questionnaires ont été élaborés :

 

  • Au début et à la fin du stage (cf. Annexe 1)

 

Au début du stage, une enquête a été réalisée auprès des apprenants (le questionnaire est alors administré par le responsable aux apprenants) : elle consiste à relever les opinions, les premières impressions des jeunes primo-arrivants concernant la vie et la culture en France. Plus en détail, le questionnaire comporte 18 questions (cf. Annexe 1.1) destinées à recueillir des informations sur les points suivants (liste non-exhaustive) : la perception que chaque apprenant a de la France, de la vie en France, de la population française, de la culture française, de la langue française relativement à sa société et sa culture d’origine. L’enquête soulève aussi certains points, tels que l’expérience de chaque apprenant en tant que primo-arrivant en France (perception de l’accueil, les difficultés rencontrées en France), sa pratique de sortie en dehors de l’Association, sa pratique du français en dehors des cours dispensés par l’Association.

 

A la fin du stage, une autre enquête a été effectuée pour déterminer les apports des sorties culturelles selon les apprenants. Pour cela, plusieurs questions de l’enquête en début de stage reviennent dans le questionnaire à la fin du stage pour apprécier les éventuels changements (qui se seraient opérés durant le stage). Il y a des questions qui demandent directement les avis des apprenants concernant les apports des sorties réalisées (dans l’Association), les améliorations qu’ils proposent pour ces sorties.

 

  • Avant et après chaque sortie

 

Avant chaque sortie, un cours est réservé à la préparation de la visite, à travers quelques activités particulières autour du thème de la sortie. Il s’agit d’abord de présenter aux apprenants le lieu à visiter, avec parfois de petit échange à l’oral. Ensuite, il leur est demandé d’accomplir une petite « tâche » durant la sortie, d’autant plus qu’il est très important de garder chaque apprenant actif pendant la visite. Aussi, les apprenants sont invités à répondre à un questionnaire avant même la sortie : il s’agit surtout d’apprécier leurs connaissances du lieu à visiter.

 

Après chaque sortie, un questionnaire est distribué : il s’agit d’une sorte de conscientisation sur ce que les apprenants auraient appris, découvert, etc. Un autre cours aurait dû être consacré après chaque sortie réalisée pour la présentation des tâches/devoirs qu’ils ont faits. Cette séance aurait permis aussi d’aider les apprenants à répondre au questionnaire (de l’après-sortie).

 

Finalement, les informations pour l’étude empirique sont issues de deux enquêtes (au début et à la fin du stage) et de quatre questionnaires auto-administrés (avant et après chaque sortie réalisée). La section suivante est consacrée surtout à la présentation de ces résultats et leur analyse.

 

2.3   Analyse des résultats et recommandations

 

Dans un premier temps, il y a lieu de présenter et d’analyser les informations recueillies par les enquêtes et les questionnaires auto-administrés. Des recommandations seront ensuite émises en conséquence.

 

2.3.1  Résultats des investigations

 

2.3.1.1     Présentation des résultats

 

Les résultats des investigations sont appréciables à travers six tableaux (cf. Annexe 2) correspondant aux enquêtes de début et de fin de stage ainsi qu’aux questionnaires relatifs aux deux sorties réalisées. Il s’agit alors des réponses fournies par un groupe de dix (10) apprenants dont sept (7) asiatiques et trois (3) africains. En tout, les informations servant de base à l’étude empirique sont les réponses aux 58 questions données par ces dix (10) apprenants.

 

En début du stage, les apprenants asiatiques (de ce groupe) se sont installés en France pendant une période d’au moins une année (jusqu’à 2 ans et demi pour un bengali), tandis que les africains n’ont été sur le territoire français qu’au plus une année.

 

 

Figure 1 – Pays d’origine des apprenants

A remarquer que les apprenants d’origine asiatique sont issus de pays relativement plus voisins que ceux d’Afrique (cf. Figure 1 – Pays d’origine des apprenants). Toutefois, cette relative proximité ne semble pas constituer nécessairement un facteur de rapprochement entre les apprenants. En effet, les réponses données par des individus dont les pays d’origine sont géographiquement proches sont très variées (cela est constaté surtout pour les questions plus ouvertes). Par exemple, pour les apprenants issus de pays voisins tels que l’Iran et l’Afghanistan, lorsqu’il leur est demandé d’indiquer l’élément culturel qui les a surpris/marqués le plus dès leur arrivée en France, le premier (Iran) se concentre sur la population française tandis que le second (Afghanistan) met l’accent sur la nature (biodiversité). A l’inverse, des apprenants dont les pays sont relativement éloignés (l’un de l’autre) tels que le Bangladesh et le Soudan, il arrive que ces individus donnent des réponses similaires. Il est alors possible de dire qu’il n’y a pas de corrélation manifeste entre les réponses et les origines des apprenants, à l’exception du fait que certains apprenants copient quelque fois les réponses des autres.

 

Sur le plan culturel, il est intéressant de remarquer que ces apprenants sont très observateurs quant à leur nouvel environnement et les pratiques culturelles dans sa nouvelle société. La plupart d’entre eux ont cité au moins trois différences manifestes entre leurs pays d’origine et la société française, ce qui n’est pas vraiment surprenant puisqu’ils se sont tous établi en France durant au moins 7 mois avant leur formation linguistique. Presque tous les éléments cités par les apprenants pour marquer la différence entre leurs pays d’origine respectifs et la France sont des composantes de la « culture » (en se référant à la définition de « culture » par Guy Rocher[73], par exemple) : nourriture, liberté, tradition, embrassade dans la rue, etc. Mais ce caractère observateur indique tout de même qu’ils ne sont point indifférents à la question de différence culturelle entre son pays d’origine et la société française : par exemple, certains portent leur attention sur des comportements qui leur sont inhabituels jusque-là (s’embrasser dans la rue, fumer en place publique), un autre sur les habits (des « français ») qu’il qualifie de « bizarres ».

 

Par ailleurs, ces primo-arrivants semblent manifester une appréciation « un peu trop moyenne » envers la France, la population française, la langue française et la vie en France. Tous ont attribué des notes juste au-dessus de la moyenne pour les quatre questions[74] leur demandant s’ils « aiment la France », s’ils « aiment le peuple français », s’ils « aiment vivre en France », et s’ils « aiment la langue française », avec respectivement des notes moyennes (sur dix) : 6, 6.1, 5.6 et 6.4 (cf. Figure 2)[75]. D’ailleurs, il est probable qu’il existe une corrélation entre ces quatre variables (relatives à ces quatre questions) : ceux qui accordent des notes élevées pour l’une des variables donnent généralement des notes importantes pour les trois autres. Cette corrélation est surtout visible entre les variables « Aimer la France » et « Aimer vivre en France » (presque les mêmes notes accordées par chaque apprenant).

 

Figure 2 – Appréciation par les apprenants de la France (Aimer la Fr), la vie en France (Vivre en Fr), le peuple français (Peuple fr) et la langue française (Langue fr)

 

Cela semble vouloir confirmer que 9 sur les 10 apprenants ont répondu qu’ils veulent rester en France[76], ce qui pourrait signifier que l’intégration fait partie des objectifs poursuivis par ces apprenants. Par conséquent, il peut être possible de considérer que ces quatre variables sont des facteurs qui influencent l’intégration d’un primo-arrivant.

 

En outre, les apprenants sont aussi très attentionnés sur la qualité de vie en France, en comparant le cadre qui conditionne cette qualité de vie par rapport à celui de leurs pays d’origines respectifs :

 

  • L’environnement politico-juridique : ils apprécieraient la liberté, les droits de l’Homme, la démocratie, la situation des femmes dans la société française. Deux primo-arrivants (venant de Népal et de Sénégal) ont toutefois indiqué « l’Administration » (publique probablement), comme point négatif de la France (sans expliquer pourquoi)

 

  • Le cadre socio-économique : ils apprécient également les aides (qui leur sont fournies par l’Administration publique, en l’occurrence), ainsi que le système sanitaire, éducatif, de sécurité et de transport en France. En revanche, ils ont mis en évidence des éléments qu’ils désignent comme points négatifs sur ces domaines qui les concernent plus directement, tels que le chômage, le problème de logement, le faible niveau du pouvoir d’achat (au moins en ce qui les concerne) et le racisme.

 

  • Le « paysage » (la beauté de certains endroits) qui attire de nombreux touristes en France.

 

Toutes ces informations devraient être analysées en tenant compte du contexte dans lequel vivent les apprenants : une situation de relative précarité socioéconomique. En effet, leurs principales difficultés dans la vie en France concernent l’argent, le logement et le travail mais aussi la solitude (plusieurs n’ont pas d’amis en France), l’adaptation (pas de précision sur cette élément) et la pratique de la langue française.

 

2.3.1.2     Analyse des résultats

 

L’analyse des informations recueillies sera effectuée suivant les hypothèses préalablement formulées afin de répondre convenablement à la problématique de l’étude (concernant les apports des sorties culturelles à l’apprentissage linguistique et à l’intégration des primo-arrivants).

 

2.3.1.2.1    Les sorties culturelles et l’intégration des primo-arrivants

 

Sous-hypothèse H1a : Représentation de la France

 

D’abord, lors des enquêtes en début et en fin de stage, chaque apprenant a été demandé d’évaluer sa représentation de la France en répondant à la question « aimez-vous la France ? » par une attribution de note entre 1 et 10 (selon son appréciation vis-à-vis de ce pays). Ainsi, en comparant les notes attribuées en début et en fin de stage, il est constaté que la représentation que chaque apprenant s’est fait de la France (c’est-à-dire, la vision de chaque apprenant vis-à-vis de la société française) a connu une amélioration (cf. Figure 3). En effet, cette amélioration est observée pour tous les apprenants, avec un écart moyen entre les notes en fin et celles en début de stage (donc une progression moyenne) égal à 0.8[77]. Il s’agit alors d’une amélioration générale et unanime entre tous les apprenants.

 

Tout de même, il faut admettre que cette amélioration de la vision des apprenants vis-à-vis de la France peut être due aux influences de plusieurs facteurs (autres que la réalisation de sortie culturelle). Par exemple, il est fortement probable que la progression d’un primo-arrivant dans la maîtrise du français soit un des éléments qui ont influencé considérablement sa représentation de la France, étant donné que le problème de maîtrise de cette langue a été évoqué par les apprenants comme l’un de leurs principaux problèmes durant leur installation en France.

 

Néanmoins, les éléments suivants permettent de dire que les sorties culturelles ont contribué à cette amélioration de la représentation de France par les apprenants :

 

  • Après la visite du musée de l’histoire de l’immigration, huit (8) apprenants sur dix (10) ont affirmé que cette sortie a changé leur opinion sur l’immigration et sept (7) d’entre eux voient alors l’immigration comme quelque chose de positif (cf. Tableau 1). Il est donc possible de dire que les sorties culturelles ont aidé les primo-arrivants à se construire (même en partie) une idée positive concernant leur migration en France.

 

  • Au moins trois apprenants ont reconnu directement que les sorties culturelles les ont aidé à « mieux s’intégrer » dans la société française (même si ces affirmations n’ont pas fait l’objet d’explication plus détaillée).

 

Figure 3 – Représentation de la France aux yeux des apprenants en début et en fin de stage (suivant les notes qu’ils ont attribuées)

 

Positif Négatif
Changement d’opinion 7 2(*)
Pas de changement d’opinion 0 2

Tableau 1 – Effets de la sortie au musée de l’histoire de l’immigration sur l’opinion des apprenants et leurs représentations de l’immigration (positif/négatif)

 (*) Un apprenant a indiqué qu’il voyait l’immigration comme quelque chose de positif et négatif à la fois.

 

Il est ainsi possible de valider la première sous-hypothèse H1a selon laquelle, les sorties culturelles dans le contexte de formation linguistique pour l’intégration des primo-arrivants améliorent la vision de ces derniers vis-à-vis de la société d’installation.

 

Sous-hypothèse H1b : Volonté de s’installer en France

 

Ensuite et de manière analogue à la sous-hypothèse précédente, les apprenants ont également attribuée des notes (en début et en fin de stage) relatives à leurs représentations de la vie en France (en répondant à la question : « aimez-vous vivre en France ? »). L’écart des notes moyennes en début (6.1) et en fin de stage (6.9) est le même que pour la représentation de la France (« Aimer la France » et « Aimer vivre en France » sont désormais deux variables très corrélées). Cependant, cette amélioration de la vision de la vie en France n’a pas été générale (cf. Figure 4) : l’inverse est constaté pour l’apprenant n°4 (venant d’Iran) tandis que le statu quo est observé pour les apprenants n°7 et n°8 (venant de Soudan, tous les deux). En revanche, il semble que la baisse de note attribuée par l’apprenant n°4 n’implique pas forcément une détérioration significative de la représentation de cet individu vis-à-vis de la vie en France : cet apprenant a indiqué en fin de stage que les sorties culturelles l’ont aidé à mieux vivre en France.

 

 

Figure 4 – Représentation de la vie en France aux yeux des apprenants en début et en fin de stage

Quatre (4) apprenants ont laissé entendre que les sorties culturelles ont contribué à leur « mieux vivre en France ». Aussi, si en début de stage, 9 apprenants ont manifesté leur volonté de vivre en France, tous ont annoncé qu’ils se sentent mieux en France que dans leurs pays d’origine respectifs en fin de stage. En conclusion, il est possible de dire que les sorties culturelles ont contribué à l’insertion (sociale, citoyenne, etc.) des primo-arrivants : ils veulent vraiment vivre (et confirment cette volonté) dans cette société d’installation, d’où la validation de la sous-hypothèse H1b.

 

Sous-hypothèse H1c : Sociabilité, aptitude à vivre dans la société française

 

Concernant la représentation que les apprenants se font du peuple français (cf. Figure 5), celle-ci a aussi connu une amélioration : en moyenne, les notes attribuées par les apprenants relatives à leurs appréciations du peuple français ont progressé de 0.9 points (de 5.6 en début à 6.5 en fin de stage).

Figure 5 – Représentation du peuple français aux yeux des apprenants en début et en fin de stage

Parmi les apports que les apprenants ont attribués aux sorties culturelles figurent les éléments suivants :

 

  • Une compréhension plus étendue/approfondie de la société française, impliquant alors une meilleure assimilation des codes sociaux en France. Les sorties culturelles auraient donc constitué un cadre pour un apprentissage pratique de ces codes ; à remarquer que cet apprentissage n’est pas forcément lié directement aux lieux ou aux thèmes de ces sorties (par exemple, il est possible d’apprendre certaines règles et normes de la société à travers les conduites à tenir dans des lieux tels que les musées). Les sorties culturelles auraient alors constitué un outil pour renforcer la compétence culturelle des apprenants à travers la composante métaculturelle (connaissances culturelles), en l’occurrence.

 

  • Moins de stéréotypes sur les français : l’amélioration de la représentation du peuple français est aussi constatée chez l’apprenant (n°4, cf. Figure 5) qui indiquait en début de stage que le « racisme » est un point négatif caractérisant la France. Les stéréotypes pourraient venir de la solitude des primo-arrivants : plusieurs d’entre eux ont déclaré en début de stage qu’ils n’ont pas d’amis en France. Les sorties culturelles ont été des occasions pour sortir de cette solitude en rencontrant d’autres apprenants et en réalisant avec eux quelque chose de positif/agréable. En fait, l’apprenant qui a évoqué le « racisme » était le seul qui n’a pas encore réalisé de sortie avant le début de sa formation linguistique. Les sorties culturelles auraient donc aidé les primo-arrivants à lever certaines incompréhensions engendrées par les représentations préalables de la culture française ainsi que par les interprétations réalisées sur la base de leurs propres cultures d’origine (composante interculturelle de la compétence culturelle).

 

Explicitement, certains apprenants ont déclaré que les sorties culturelles les ont permis de « faire davantage connaissance avec les autres » et de « voir les autres apprenants dans un autre cadre » (autre cadre que les cours de français). Ces sorties ont alors développé la sociabilité et la capacité à vivre en société chez les primo-arrivants, surtout en prenant le groupe d’apprenants comme une microsociété assimilée à la société française qui est aussi cosmopolite selon ces apprenants[78] : la sous-hypothèse H1c est validée.

 

Sous-hypothèse H1d : Pour l’ouverture au nouvel environnement, une manifestation de la volonté de jouir des droits attribués aux citoyens français

 

Les apprenants témoignent aussi que les sorties culturelles leur ont constitué des occasions pour sortir de la maison, pour mieux connaitre la ville (Paris) et pour découvrir de nouveaux lieux (à visiter). D’ailleurs, tous ces apprenants ont affirmé qu’ils aiment faire de la sortie et presque tous ont déjà réalisé ce type d’activités en France (à l’exception de l’apprenant n°4, venu d’Iran). Apparemment, les primo-arrivants sont familiers d’un certain nombre de lieux de sorties (en France), à savoir le parc, le restaurant et le cinéma. L’enquête en début du stage montre que ces individus veulent faire des sorties aussi diversifiées que possible, surtout dans des lieux qu’ils n’ont pas encore visités jusque-là (par exemple : le tour Eifel, le bateau-mouche, le spectacle, etc. pour quelqu’un qui ne visitait que le parc et le restaurant jusque-là, apprenant n°1[79]).

 

Plusieurs apprenants ont révélé qu’ils ont l’intention de revisiter la Grande galerie de l’évolution et le Musée de l’histoire de l’Immigration (cette fois, en dehors du cadre de l’Association Kolone). Ces sorties ouvrent alors la porte vers d’autres lieux à visiter pour les apprenants, ces sorties leur ont motivé de jouir davantage de leurs droits, dont celui de visiter les endroits que tout membre de la société française a accès : tous les apprenants ont répondu par l’affirmatif lorsqu’il leur est demandé après la visite de la Grande galerie de l’évolution si cette sortie leur a donné envie de visiter les autres galeries du musée. Les apprenants ont été moins enthousiastes lorsqu’il s’agit de visiter d’autres musées après la sortie au Musée de l’histoire de l’immigration (probablement à cause du faible intérêt de quelques apprenants pour ce genre d’endroit) ; mais une large majorité (8 sur les 10 apprenants) a manifesté leur volonté d’aller visiter d’autres musées (en dehors du cadre de l’Association). Tout cela confirme l’idée que ces sorties culturelles peuvent être des préalables pour l’ouverture des primo-arrivants sur son nouvel environnement, une manifestation de leur volonté de jouir des droits attribués aux citoyens français : validation de la sous-hypothèse H1d.

 

 

En somme, comme toutes les sous-hypothèses H1a à H1d sont vérifiées, la première hypothèse est alors validée, celle qui suppose que les sorties culturelles réalisées dans le cadre de l’apprentissage linguistique établissent des conditions relativement plus favorables au processus d’intégration des primo-arrivants. Il importe aussi de vérifier les éventuelles relations fonctionnelles entre ces sorties culturelles et l’apprentissage linguistique des primo-arrivants.

 

 

2.3.1.2.2    Les sorties culturelles et l’apprentissage linguistique des primo-arrivants

 

Sous-hypothèse H2a : Motivation pour l’apprentissage

 

Les apprenants ont indiqué leur motivation à participer aux sorties de l’Association puisqu’il s’agit d’occasion pour « passer un bon moment » et de « voir les autres apprenants dans un autre cadre » (que les cours habituels). Il apparait aussi que cette motivation (qui s’est focalisé sur le plaisir et l’agréable, peut-être au début) s’est ensuite répandue sur d’autres domaine, dont le culturel et le cognitif : ces apprenants ont aussi déclaré que les sorties culturelles ont « amélioré leur culture générale » et leurs connaissances.

 

En prenant l’exemple de la sortie à la Grande galerie de l’évolution, tous les apprenants ont répondu qu’ils ont « aimé » cette sortie, qu’ils ont « appris des choses » (nouvelles) durant la visite et qu’ils ont été « impressionné par l’exposition ». Tous ces apprenants ont déjà visité un zoo dans leurs pays d’origine respectifs, mais ils ont été animé par l’envie de découvrir un lieu qu’il ne connaissait pas encore jusque-là : cet intérêt porté à cette sortie a ainsi influencé leur curiosité et a renforcé leur motivation pour apprendre des choses nouvelles. D’ailleurs, une séance de préparation de cette sortie leur a permis d’imaginer ce qu’est la Grande galerie de l’évolution, et a donc renforcer davantage leur motivation (d’apprentissage, en l’occurrence).

 

La sous-hypothèse H2a (première sous-hypothèse concernant l’apprentissage) est alors validée : La réalisation des sorties culturelles dans le cadre de formation linguistique stimule davantage la motivation d’apprentissage des apprenants.

 

Sous-hypothèse H2b : Représentation de la langue française

 

Concernant la représentation de la langue française que chaque apprenant se fait, il faut reconnaitre que l’évolution n’est pas comparable à celle de la représentation de « la France » ou de « la vie en France ». En effet, les notes attribuées par les apprenants en répondant à la question « aimez-vous la langue française ? » ont connu une amélioration relativement moindre, avec une moyenne de 0.3 (les notes sont en moyennes de 6.4 en début et de 6.7 en fin de stage). Aussi, cette amélioration est attribuée à trois apprenants seulement (cf. Figure 6). Il est difficile alors de conclure si les sorties culturelles ont contribuées à améliorer la vision des apprenants à l’égard de la langue française. Tout au plus, il convient de dire que ces sorties pourraient contribuer à maintenir cette représentation (de la langue française) à un certain « niveau » malgré une situation difficile (dans la précarité) pour les primo-arrivants dans un pays où ils sont obligés de parler en français (une langue qu’ils n’ont pas encore maîtrisée) : presque tous les apprenants n’ont pas connu de détérioration de cette représentation (à l’exception de l’apprenant n°2).

 

Figure 6 – Représentation de la langue française aux yeux des apprenants en début et en fin de stage

 

Ainsi, il n’y a pas de conclusion sur les influences que les sorties culturelles pourraient avoir sur la représentation de la langue française. La sous-hypothèse H2b n’est pas alors validée (mais cette sous-hypothèse n’est pas non plus infirmée).

 

Sous-hypothèse H2c : Dynamisme, échange linguistique et participation aux exercices pratiques

 

Concernant la pratique du français, il est important de mentionner que pratiquement tous les apprenants ont été actifs durant les deux sorties réalisées (à la Grande galerie de l’évolution et au Musée de l’histoire de l’immigration). Le dynamisme et l’échange linguistique observé pendant ces sorties seraient probablement dus à au moins deux éléments :

 

  • D’une part, les tâches qui ont été confiées à ces apprenants durant les visites : répondre à des questions relatives à chaque visite et remplir des fiches ; ces tâches leur ont obligé de mener des investigations plus poussées (et ne pas se contenter de suivre et d’écouter le guide), de s’entraider (dynamisme du groupe) et d’échanger plus activement entre eux et avec d’autres personnes (de la galerie, du musée).

 

  • D’autre part, les intérêts des apprenants vis-à-vis des thèmes de ces sorties : la sortie à la Grande galerie de l’évolution a touché leur sens de responsabilité en tant qu’être humain face à la nature ; la sortie au Musée de l’histoire de l’immigration concerne plus particulièrement leur cas en tant que migrant. Ils ont alors participé activement en posant des questions et en partageant leurs opinions et leurs expériences.

 

Comme tous les apprenants l’ont fait remarquer, les sorties culturelles ont été des « occasions pour pratiquer le français ». Ces sorties constituent alors un cadre propice au dynamisme, à l’échange linguistique et à la participation de chacun aux exercices pratiques : la sous-hypothèse H2c est alors validée.

 

Sous-hypothèse H2d : Pratique du français en dehors du cadre des cours

 

En conséquence (à la sous-hypothèse précédente), les sorties culturelles est un moyen pour cette pratique du français en dehors du cadre habituel du cours linguistique : pour la quasi-totalité des apprenants, les sorties de l’Association sont l’une des rares occasions qui leur ont permis de pratiquer le français en dehors du cours dispensé par cette Association. Ces sorties sont même l’unique cadre pour cette pratique pour quatre des dix apprenants puisqu’ils n’ont « pas d’amis français » en France. La dernière sous-hypothèse H2d est ainsi validée.

 

 

En somme, bien que la sous-hypothèse H2b (concernant l’influence des sorties culturelles sur la représentation de la langue française pour les apprenants) n’a pas été validée les autres sous-hypothèses soutiennent la deuxième hypothèse générale : L’utilisation des sorties culturelles dans le cadre de la formation linguistique pour les primo-arrivants améliore l’efficacité des outils d’apprentissage linguistique formel. En effet, la non-validation de H2b n’implique pas que ces sorties culturelles n’ont aucune influence ou ont une influence négative sur la représentation de la langue française : il convient d’approfondir cette question dans d’autres études (en se basant sur les résultats de la présente étude), en prenant en compte d’autres variables comme le genre de sorties culturelles ou encore les thèmes sur lesquels se basent ces sorties, par exemple. Tout de même, il importe de réaliser quelques remarques sur les sorties réalisées en vue d’une amélioration et ainsi pour que les sorties culturelles aient plus d’influences positives sur l’intégration et l’apprentissage linguistique des primo-arrivants.

 

 

2.3.1.3  Analyse critique des sorties

 

Les apprenants sont généralement motivés à participer aux sorties réalisées dans le cadre de l’Association Kolone. Mais il apparait que les deux sorties réalisées sont plutôt différentes l’une de l’autre, non seulement sur leurs composantes (les thèmes, les objets, les lieux, etc.) mais également concernant leurs effets sur les apprenants :

 

  • La sortie à la Grande galerie de l’évolution semble favoriser davantage la composante transculturelle de la composante culturelle. Cette sortie insiste sur le côté « humaniste » des participants, en tant que « Homme » responsable sur son milieu. En quelque sorte, la visite de la Grande galerie de l’évolution a atténué (voire, a fait oublier) les différences culturelles que les primo-arrivants ont éprouvés, au moins pendant la visite. Cette sortie pourrait alors mettre en évidence le fait qu’une société (dont la société française) est d’abord constituée d’êtres humains avant de parler d’origine et de diversité culturelle.

 

  • La sortie au Musée de l’histoire de l’immigration a vraisemblablement mis l’accent sur la composante métaculturelle de la composante culturelle. Il s’agit surtout de nourrir les connaissances culturelles des participants. Cette sortie pourrait même être perçue comme une mise en évidence des différences culturelles qui existent dans la société française à travers l’immigration.

 

Les apprenants ont senti qu’ils sont impliqués dans ces deux sorties mais de différentes manières. Dans la première sortie, c’est le côté humaniste de chacun qui a été éveillé : la sortie semble avoir rempli sa mission par cette immersion qui n’est pas nécessairement une démarche didactique mais plutôt socioculturelle. En effet, les apports cognitifs de cette sortie sont assez limités (voire pauvres) : deux apprenants seulement se sont souvenu d’un nom d’animaux exposés dans la galerie. En revanche, l’implication sociale des apprenants (en se considérant socialement et solidairement responsables des actions de l’Homme sur l’environnement) est importante : tous les apprenants se sont focalisés sur la disparition d’animaux à cause de l’Homme.

 

Dans la deuxième sortie, l’implication des apprenants en tant que migrants aurait peut-être favorisé les activités cognitives : les apprenants ont mémorisé plusieurs éléments relatifs à la visite du musée (les pays d’origine des immigrés qui se sont établis en France, par exemple). Avec un thème très pointu et concernant directement les primo-arrivants, cette sortie a même permis de changer les opinions de ces derniers vis-à-vis de l’immigration. D’un côté, cette sortie pourrait éveiller la nostalgie concernant l’immigration et les propres expériences des primo-arrivants : dans ce cas, il est important de veiller à ce que cette nostalgie ne constitue pas un frein à l’intégration de ces migrants (en choisissant des stratégies d’acculturation défavorables à cette intégration). D’un autre côté, ils pourraient profiter des expériences des anciens immigrés pour se projeter en avant vers leur (les primo-arrivants) propre intégration.

 

Le choix des sorties culturelles devraient alors tenir compte des objectifs en termes de renforcement de la compétence culturelle des apprenants. Autrement dit, il est important que les différentes sorties réalisées soient complémentaires et renforcent suffisamment la compétence culturelle de chaque apprenant au regard des différentes composantes de celle-ci. Il est préférable alors de varier autant que possible les types de sorties à réaliser de sorte à ne pas se focaliser uniquement sur certaines composantes de la compétence culturelle au détriment ou en méprisant d’autres composantes. Quelques recommandations sont alors émises dans la section suivante, non seulement à l’endroit de l’Association Kolone qui envisage de faire une troisième sortie pour ses apprenants (pour l’année 2015), mais aussi pour tous les acteurs qui œuvrent dans l’intégration des primo-arrivants à travers l’apprentissage linguistique.

 

2.3.2  Recommandations

 

Dans un premier temps, les recommandations s’adressent plus particulièrement à l’Association concernant ses activités en matière de sortie culturelle. Ensuite, il importe aussi d’apporter quelques suggestions à l’endroit de certains acteurs qui œuvrent pour l’intégration des primo-arrivants.

 

Plus explicitement, les deux sorties réalisées par l’Association Kolone pour les apprenants au titre de l’année 2015 favorisent les composantes transculturelle (Grande galerie de l’évolution) et métaculturelle (Musée de l’histoire de l’immigration) de la compétence culturelle. Il faut dire que cela n’implique pas que les autres composantes sont totalement méprisées. Ainsi, les rencontres entre eux et avec d’autres individus (non-issus de l’Association) dans le cadre de ces deux sorties ont sûrement agit sur la capacité des apprenants à gérer les phénomènes de contact entre différentes cultures, notamment lorsque l’apprenant est amené à se communiquer avec autrui (poser des questions, expliquer ou partager quelque chose durant les visites) : le fait de participer activement à une sortie pourrait alors renforcer la compétence « interculturelle » de l’apprenant (c’est-à-dire, la composante interculturelle de la compétence culturelle). Mais il convient de compléter ces deux sorties par une troisième qui devraient mettre plus d’accent sur les autres composantes, dont concernant la pluriculturelle et la co-culturelle. Il ne faut pas oublier qu’il s’agit aussi d’apprentissage du français (compétence langagière) et non seulement d’intégration.

 

Pour cela, il est recommandé d’opter pour une sortie qui pourrait favoriser le « vivre ensemble » et la « culture d’action commune » entre les apprenants, voire avec des personnes en dehors de l’Association. Par exemple, une sortie de camping pourrait aider les apprenants à développer davantage leur esprit d’équipe et non seulement le vivre ensemble au niveau d’un groupe multiculturel. De même, la participation des apprenants à une activité culturelle (une sortie au théâtre, par exemple) pourrait être bénéfique de manière à favoriser le dynamisme de groupe et l’échange linguistique. Il serait encore plus intéressant si les sorties soient organiser de manière à promouvoir les rencontres avec des individus autres que ceux de l’Association : d’un côté, il faut que les apprenants puissent communiquer avec n’importe quel membre de la société française ; et d’un autre côté, il ne faut pas que les sorties culturelles deviennent un instrument du communautarisme en marge de la société française (c’est-à-dire une communauté qui s’écarte de cette société).

 

Par ailleurs, quelques apprenants ont fait remarquer que la visite du Musée de l’histoire de l’immigration ne leur intéressait pas vraiment par rapport à la sortie à la Grande galerie de l’évolution. Pour améliorer l’efficacité des sorties (c’est-à-dire avec plus d’effets positifs pour l’apprentissage linguistique et pour l’intégration), il est recommandé d’accorder une certaine marge de manœuvre au responsable chargé de préparer et de conduire ces sorties. De même, les apprenants devraient également pouvoir choisir sur une liste proposée par l’association les sorties à réaliser pour agir sur leur motivation.

 

Il faudrait également penser à optimiser la réalisation de ces sorties culturelles. Jusque-là, ces sorties sont seulement conçues comme des activités de loisir en marge de la formation linguistique ; l’organisation d’une sortie ne prend pas explicitement en compte les bénéfices qu’elle devrait apporter en matière d’intégration des primo-arrivants. Pourtant, la réalisation d’une sortie est couteuse, au moins en termes de temps, d’autant plus que les coûts ne doivent pas être appréciés vis-à-vis de l’Association uniquement (les apprenants dépensent leurs temps pour participer à la sortie, le partenaire de l’Association prend aussi en charge certains coûts financiers de la sortie). L’Association devrait alors considérer ces sorties culturelles comme des investissements qui doivent produire des bénéfices conséquents pour son activité principale (formation linguistique pour l’intégration des primo-arrivants).

 

Ainsi, les suggestions suivantes sont adressées à tout organisme qui œuvre pour l’intégration des primo-arrivants, notamment par le biais de la formation linguistique :

 

  • Accorder plus de place à la composante culturelle et plus particulièrement à la sortie culturelle : Pour cela il faudrait accorder un peu plus de considération à cette dernière et ne pas seulement la voir comme un accessoire indépendant de l’apprentissage linguistique et de l’intégration. Il importe d’intégrer même les sorties culturelles dans les programmes de formation de l’organisme.

 

  • De leur côté, tous les acteurs de l’organisme (coordinateurs, formateurs, stagiaires-bénévoles) devraient travailler en concert pour qu’il y ait plus de cohérence et de complémentarité entre les actions entreprises : l’apprentissage formel (les cours et pratiques habituels) d’une part et les sorties culturelles d’autre part. Des manifestations attendues de cette coordination d’actions entre les différents acteurs sont, par exemple, la collaboration entre le formateur de langue et le responsable des sorties, un peu plus d’espace-temps pour les préparations avant les sorties et pour les comptes rendus après ces sorties. En effet, si l’Association Kolone aurait accordé plus de temps pour la préparation des sorties, les apprenants auraient moins souffert du problème d’incompréhension que quelques-uns ont évoqués lors de la visite du Musée de l’histoire de l’immigration.

 

Aussi, la considération des sorties culturelles comme supports à l’intégration et à l’apprentissage des primo-arrivants devrait faire l’objet de partage entre les différents organismes qui opèrent sur ces domaines. Il s’agit alors de partage d’expériences et des travaux de recherches destinés à promouvoir et à améliorer l’utilisation de ces supports. En effet, les associations qui ont déjà intégré les sorties dans leurs programmes de manière régulière devraient expérimenter les apports de ces sorties pour leur activité principale (formation linguistique pour l’intégration) : des rencontres devraient ensuite être organisées régulièrement pour communiquer les résultats obtenus de ces expériences. Ces rencontres devraient également rassembler les « opérateurs socioculturels » (médiateurs culturels, organisateurs de spectacles, producteurs, artistes, etc.) susceptibles de conclure un partenariat avec ces organismes : plus les associations témoignent des bénéfices obtenus avec les sorties culturelles, plus ces « opérateurs socioculturels » seront motivés à conclure de tel partenariat. Les organismes auront alors à leur disposition des offres plus intéressantes car plus diversifiées et plus orientées vers les objectifs de ces associations.

 

 

En somme, les sorties culturelles peuvent être des supports très importants pour l’apprentissage linguistique et pour l’intégration des primo-arrivants. Les associations qui dispensent des formations linguistiques pour les migrants ne devraient pas sous-estimer les apports que ces sorties culturelles pour leurs activités.

 

 

Conclusion

 

L’intégration des primo-arrivants dans la société française n’est pas seulement une question politique et socioéconomique puisque la composante culturelle peut influer significativement sur le processus d’intégration. Certes, les dispositifs mis en place pour l’intégration de ces migrants en France, dont la formation linguistique et la formation civique font partie, insiste sur l’intégration sociale et professionnelle de ces individus. Mais il faut comprendre que les primo-arrivants font face à une crise identitaire qui influence leurs choix en matière de stratégie d’acculturation ainsi que sur certains éléments de l’intégration dont le langage. Il faut aussi souligner que ce dernier est indissociable à la culture, ce qui implique que l’apprentissage linguistique des primo-arrivants devrait tenir compte de la composante culturelle dans les approches didactiques.

 

En réponse aux besoins d’apprentissage linguistique de ces primo-arrivants, le Français Langue d’Intégration (FLI) est un dispositif qui vise surtout le développement de leurs compétences en matière de communication verbale. Le FLI devrait alors fournir à ces individus les connaissances et savoir-faire socio-langagier leur permettant de jouir d’un environnement acceptable avec les membres de la société française. La spécificité de la formation de la langue française pour les primo-arrivants, qui est une étape cruciale de leur intégration, implique que la compétence culturelle devrait être une composante majeure des outils à utiliser dans cet apprentissage. Ainsi, les organismes en charge de telle formation devraient considérer l’importance des programmes socioculturels par le fait que ces derniers permettent d’établir un cadre d’immersion favorable à l’acquisition de connaissances pratiques relatives à l’environnement socioculturel français. En quelque sorte, ces programmes peuvent aussi être des outils de médiation culturelle et interculturelle au service de la formation linguistique pour l’intégration. Mais ces programmes peuvent également servir pour accompagner les primo-arrivants dans leur processus d’acculturation (déconstruction et construction identitaire). En prenant le cas particulier des sorties culturelles (comme programmes socioculturels), celles-ci pourraient avoir des impacts positifs et significatifs sur le processus d’intégration des primo-arrivants en général, ainsi que sur leur apprentissage linguistique en particulier.

 

Pour analyser ces impacts, une étude empirique a été réalisée sur un échantillon de dix primo-arrivants, bénéficiaires d’une formation linguistique dispensée par une association, et sur la base de deux sorties culturelles (à la Grande galerie de l’évolution et la Musée de l’histoire de l’immigration). Il est constaté que les sorties culturelles dans le contexte d’apprentissage linguistique des primo-arrivants améliorent leur vision vis-à-vis de la société française, Aussi, ces sorties permettent une meilleure insertion sociale, citoyenne et professionnelle de ce public particulier par une volonté plus affirmée de vivre en France. Ces sorties culturelles sont également des moyens permettant d’accroitre la sociabilité de ces migrants, et elles peuvent aussi constituer des préalables pour l’ouverture de ces individus sur leur nouvel environnement (ce qui peut être considéré comme une manifestation de leur volonté de jouir des droits attribués aux citoyens français). En d’autres termes, ces sorties culturelles établissent des conditions relativement plus favorables au processus d’intégration des primo-arrivants.

 

Concernant l’apprentissage linguistique, la réalisation de ces sorties culturelles stimule davantage la motivation d’apprentissage des apprenants, favorise le dynamisme et l’échange linguistique de ces derniers, et leur permet de pratiquer le français en dehors du cadre des cours de langue. En somme, l’utilisation des sorties culturelles dans le cadre de la formation linguistique pour les primo-arrivants améliore l’efficacité des outils d’apprentissage formel.

 

Tout de même, il faut reconnaitre que certains éléments constituent des limites pour la présente étude. Entre autres, il faut citer la taille assez petite de l’échantillon d’apprenants qui ont participé à l’étude, le manque de temps pour s’assurer de l’exactitude des informations recueillies auprès de ces individus, et le nombre de sorties étudiées très limité. L’utilisation des résultats de cette étude devrait alors tenir compte de ces limites. Il convient de considérer la présente étude comme un préalable à des travaux de recherche qui devraient notamment approfondir les éventuelles influences des sorties culturelles sur la représentation qu’un primo-arrivant se fait de la langue française. Pour cela, il est important de prendre en compte plusieurs paramètres tels que le genre et le nombre de sorties, l’implication de l’intéressé dans les activités relatives aux sorties, la place de la pratique du français dans ces activités, etc.

 

 

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Annexes

 

Annexe 1 : Questionnaires

 

 

Annexe 1.1 – Questionnaire d’enquête en début de stage

 

 

Annexe 1.2 – Questionnaires de préparation de la sortie à la Grande Galerie de l’évolution

 

 

Annexe 1.3 – Questionnaires après la sortie à la Grande Galerie de l’évolution

 

 

Annexe 1.4 – Questionnaire de préparation de la sortie au Musée de l’histoire de l’immigration

 

 

Annexe 1.5 – Questionnaire après la sortie au Musée de l’histoire de l’immigration

 

 

Annexe 1.6 – Questionnaire d’enquête en fin de stage

 

 

Annexe 2 : Réponses aux questionnaires

 

Annexe 2.1 – Enquête en début du stage

 

Pays (1) Ressemblance pays Elément culturel marquant (2) (3) (4) (5) (6) (7) (8) (9) Difficultés rencontrées en France Positif (10) Faites des sorties en dehors de l’Association Pratiquez le français en dehors des cours Sorties désirées
1 Bangla­desh 24 La culture, la nourriture. En France, il y a plus de liberté, de sécurité. Les droits de l’Homme sont importants en France Il y a beaucoup d’étrangers en à Paris qui viennent de tous les pays. C’est bien   5 5 6 Oui 6 Non Rester La langue, pas d’argent Positif : la liberté, les droits de l’Homme, sécurité
Négatif : Chômage
Oui Oui, promenade au parc, restaurant autre : chez des amis Non Tour Eiffel, bateau, spectacle, pique-nique, cinéma
2 Sri Lanka 18 les traditions Les gens fument beaucoup dans la rue 6 6 5 Oui 7 Non Rester Difficulté à se débrouiller au quotidien car je ne comprends pas la langue Positif : les aides, le système de santé, la liberté, les droits de l’Homme
Négatif : le chômage, le logement, la vie chère
Oui Oui, promenade au parc Pas beaucoup Cinéma, cirque, zoo, château
3 Bangla­desh 30 en France il y a des aides, bcp d’associations. Et le système de santé. Les gens ici s’embrassent dans la rue Les Gens s’embrassent dans la rue. J’étais très choqué 5 5 5 Oui 5 Non Rester Je travaille beaucoup et gagne pas beaucoup d’argent Positif: paysage, éducation, la santé
Négatif: le logement, le racisme
Oui Oui, cinéma, promenade au Parc, restaurant Pas beaucoup Tout est intéressant
4 Iran 24 Il y a beaucoup d’étrangers, de nationalités en France. La nourriture n’est pas la même, c’est pas les mêmes traditions A paris il n y a pas beaucoup de français. Il y a beaucoup d’étrangers. Je pensais que des gens avec des yeux bleus et des cheveux blonds mais pas du tout. Ça m’a beaucoup surpris 7 7 5 Oui 6 Non Rester Je ne connais personne ici, je n’ai pas d’amis c’est difficile. Du mal à m’habituer à la vie en France La situation des femmes, la liberté
Négatif : le racisme
Oui Non Oui avec les amis, quand je fais les courses atelier cuisine, Musé, bateau sur seine, zoo
5 Afgha­nistan 12   Il y a pas beaucoup de nature 5 5 6 Oui 6 Non Rester C’est difficile de vivre tout seul ici sans la famille sans les amis, chômage Positif: la liberté, les droits de l’Homme, sécurité
Négatif : le chômage, le logement
Oui oui, promenade au parc, restaurant Non Toutes les sorties
6 Chine 12 Les gens parlent beaucoup en France Les immeubles sont très beaux. Il y a de beaux endroits 6 6 5 Pareil 6 Non Ne sais pas Je ne parle pas bien le français, je ne peux pas pratiquer la langue Positif: le système de santé, les paysages
Négative: la vie chère
Oui Oui, promenade au parc  autre: sport Non Je n’ai pas d’amis français Toutes les sorties
7 Soudan 7 Beaucoup de formules de politesse en France. C’est pas la même culture de mon pays Les gens s’embrassent dans la rue et ça m’a beaucoup surpris 6 6 5 Oui 7 Non Rester Quand je suis arrivé, je dormais dans la rue c’était très difficile mais maintenant ça va mieux Positif: la liberté, les droits de l’Homme, la démocratie, sécurité Oui Oui promenade au parc, restaurant Non Je n’ai pas d’amis français Spectacle, cirque, zoo, Match
8 Soudan 7 Les gens en France s’embrassent partout, il y a pas ca dans mon pays.  Il y a beaucoup de sécurité ici La même chose 7 7 6 Oui 7 Non Rester Le français est difficile Positif: Il y a des aides, le système de santé, l’éducation, la démocratie, sécurité
Négatif : l’administration, le logement
Oui Oui, promenade au parc, restaurant pas beaucoup, quand je sors faire les courses, des papiers, au travail… Match, pique-nique
9 Népal 24 c’est un pays riche la France et il y a beaucoup de touristes et des choses à visiter, il y a pas beaucoup de ressemblances avec mon pays Il y a des gens qui s’habillent bizarrement 8 9 7 Oui 8 Non Rester Dans une situation instable, chômage Positif: le système de santé, l’éducation, les transports
Négatif : l’administration, le logement
Oui Oui, promenade au parc, cinéma, restaurant Pas beaucoup, un peu avec les amis et quand je sors faire les courses Musée, bateau sur la Seine, zoo, pique-nique
10 Sénégal 12 le temps, la nourriture, la culture Il y a beaucoup de moyens de transport c’est très bien mais c’est cher 5 5 6 Oui 6 Non Rester problèmes d’argent Positif : l’éducation, la démocratie
Négatif : le monde, le chômage
Oui oui, promenade au parc Pas beaucoup, je n’ai personne avec qui pratiquer la langue Toutes les sorties

 

  • Période d’installation en France (en mois)
  • Image de la France avant de venir : les apprenants ont tous répondu qu’ils pensaient (tous) « qu’il y avait que des gens aux yeux bleus et cheveux blonds et quand ils sont venus ils ont vu pleins d’origines différentes ».
  • « Aimez-vous la France ? » (note de 1 à 10)
  • « Aimez-vous vivre en France ? » (note de 1 à 10)
  • « Appréciez-vous la population française ? » (note de 1 à 10)
  • « Vous sentez-vous mieux en France que dans votre pays d’origine ? »
  • « Aimez-vous la langue française ? » (note de 1 à 10)
  • « Etes-vous déçu par l’accueil ? »
  • « Voulez-vous rester en France ou retourner dans votre pays d’origine ? »

 

Annexe 2.2 – Préparation de la sortie à la Grande galerie de l’évolution

 

Que pensez-vous du Zoo / cirque (1) (2) (3) (4) A votre avis, c’est quoi (la grande galerie de l’évolution)
1 C’est bien, j’aime beaucoup les animaux Oui Oui Non Non C’est un endroit où il y a des animaux
2 On prive les animaux de liberté et on les enferme dans une cage Oui Oui Non Non Un musée qui montre l’évolution des animaux
3 J’aime beaucoup y aller mais on traite mal les animaux Oui Oui Non Non On voit des animaux
4 Les animaux sont tristes parce qu’ils ne sont pas dans leur milieu naturel Oui Oui Non Non Il y a des animaux dans une Galerie
5 C’est bien Oui Oui Non Non Je ne sais pas
6 C’est super de voir les animaux en vrai comme le tigre le lion… Oui Oui Non Non On voit des animaux dans une galerie
7 C’est bien mais pas pour les animaux Oui Oui Non Non C’est comme un zoo
8 Il y a des zoos bien pour les animaux et il y a des zoos mauvais pour les animaux ca dépend Oui Oui Non Non On parle de l’évolution des animaux
9 On traite bien les animaux Oui Oui Non Non Il y a beaucoup d’animaux mais présentés comme dans un musée
10 Ce n’est pas bien pour les animaux car ils sont enfermés dans une cage Oui Oui Non Non On voit des animaux

 

  • « Y êtes-vous déjà allés dans votre pays ? »
  • « Aimez-vous y aller ? »
  • « Connaissez-vous la Grande Galerie de l’Evolution ? »
  • « L’avez-vous déjà visité ? »

 

Annexe 2.3 – Après la sortie à la Grande galerie de l’évolution

 

(1) (2) (3) Animaux découverts La visite a permis de prendre conscience de : (4) (5)
1 Oui Oui Oui Bcp animaux que je ne connaissais ils y a beaucoup d’animaux disparus et des animaux qui sont en danger. C’est triste Oui Oui
2 Oui Oui Oui Bcp animaux que je ne connaissais J’ai appris comment ont évolué les animaux et qu’il y a beaucoup d’animaux disparus a cause de l’Homme Oui Oui
3 Oui Oui Oui Je ne sais pas L’Homme est responsable de la disparition des animaux à cause de ses activités et la pollution Peut-être Oui
4 Oui Oui Oui Bcp animaux Ils y a beaucoup d’animaux disparus à cause de la pollution et parce que l’Homme tue les animaux Peut-être Oui
5 Oui Oui Oui Je ne sais pas les noms Les animaux sont en danger Peut-être Oui
6 Oui Oui Oui Bcp insectes J’étais surpris de voir tous ces animaux disparus Oui Oui
7 Oui Oui Oui Tous les singes L’évolution des animaux, la responsabilité de l’Homme Peut-être Oui
8 Oui Oui Oui bcp animaux mais me rappelle pas des noms Ils faut faire attention aux animaux parce qu’il y a de plus en plus d’animaux en danger à cause de l’Homme Peut-être Oui
9 Oui Oui Oui Le rorqual qui est une grande baleine Les hommes polluent la terre et maltraitent les animaux, il y en a Presque plus. Oui Oui
10 Oui Oui Oui Le panda et bcp animaux de la mer L’Homme est responsable de la disparition des animaux car il est égoïste Non Oui

 

  • « Avez-vous aimé la Grande Galerie ? »
  • « Avez-vous appris des choses ? »
  • « Avez-vous été impressionné par l’exposition des animaux ? »
  • « Pensez-vous retourner à la Grande Galerie ? »
  • « Est-ce que cela vous a donné envie de visiter les autres galeries du Musée ? »

 

Annexe 2.4 – Préparation de la sortie au Musée de l’histoire de l’immigration

 

(1) (2) Grands musées connus (3) (4) A votre avis, que peut-on y trouver ?
1 Oui Oui Louvres, Musée d’Orsay Non Non Objets sur l’immigration
2 Oui Non Louvres Non Non Des tableaux, des objets sur l’immigration
3 Oui Oui Louvres Non Non Ca parle de l’histoire de l’immigration en France
4 Oui Oui Louvres Non Non Je sais pas
5 Oui Non Louvres Non Non Des choses sur l’immigration
6 Oui Non Louvres, Musée d’Orsay Non Non Des documents, des objets anciens des immigrés
7 Oui Oui Louvres Non Non Objets, des tableaux sur l’immigration
8 Oui Oui Louvres Non Non Choses sur l’immigration
9 Oui Oui Louvres Non Non Ca explique l’immigration en France
10 Oui Oui Louvres Non Non Je sais pas

 

  • « y a –t-il des musées dans votre pays d’origine ? »
  • « y êtes-vous déjà allés ? »
  • « Avez-vous déjà entendu parler du Musée de l’Histoire de l’immigration ? »
  • « L’avez-vous déjà visité ? »

 

Annexe 2.5 – Après la sortie au Musée de l’histoire de l’immigration

 

(1) Avant, vous pensiez que les immigrés viennent d’où Pays d’origine découverts Surpris par l’histoire de l’immigration française ? (2) (3) (4) (5)
1 Oui Afrique, Asie Italien, Roumain, belge, Pologne Oui : autres que d’Af et Asie Oui Positif et Négatif Peut-être Oui
2 Oui Afrique, Asie Italien, belge, iranien Oui : autres que d’Af et Asie Oui Positif Non Oui
3 Oui Afrique, Asie Iranien, allemand Oui : autres que d’Af et Asie Oui Positif Non Oui
4 Oui Afrique, Asie Espagnol, italien, belge Oui : autres que d’Af et Asie Oui Positif Peut-être Oui
5 Oui Afrique, Asie Anglais Oui : autres que d’Af et Asie Oui Positif Oui Oui
6 Oui Afrique, Asie, Europe allemand, espagnol, italien Oui : autres que d’Af et Asie Oui Positif Oui Oui
7 Oui Afrique, Asie belge, portugais, algérien Oui : autres que d’Af et Asie Non Négatif Non Oui
8 Oui Afrique, Asie Italien, Polonais, roumain Oui : autres que d’Af et Asie Oui Positif Oui Non
9 Oui Afrique, Asie italien, allemand Oui : autres que d’Af et Asie Oui Négatif Oui Oui
10 Non Afrique, Asie européens Non Non Négatif Non Non

 

  • « Avez-vous aimé la visite ? »
  • « La visite du Musée a-t-elle change votre opinion sur l’immigration? »
  • « Voyez-vous l’immigration comme qqch de positif ou négatif ? »
  • « Pensez-vous retourner au Musée ? »

 

Annexe 2.6 – Enquête en fin de stage

 

(1) (2) (3) (4) (5) (6) Apports des Sorties de l’Association Ferez-vous des sorties en dehors de l’Association ? (7) (8) (9) (10) Que proposez-vous pour les améliorer ? (11)
1 7 7 7 Oui 7 Oui Sortir de la maison, mieux connaitre la ville, oublier le quotidien, pratiquer le français, voir les autres apprenants dans un autre cadre, passer un bon moment, autre : apprendre des choses Non : prix Oui Oui spectacle, zoo Non je ne sais pas
2 7 7 7 Oui 6 Oui Pratiquer la langue, faire plus connaissance avec les autres, améliorer la culture générale, passer un bon moment Non : manque de temps Oui Oui spectacle Non rien
3 6 6 6 Oui 7 Oui Pratiquer la langue, mieux connaitre la ville, passer un bon moment Non : manque de temps , personne avec qui y aller Oui Oui concert Non rien
4 6 6 6 Oui 7 Oui Pratiquer la langue, mieux connaitre la ville, passer un bon moment, se sentir mieux en France, mieux s’intégrer Manque de temps, a personne avec qui y aller Oui Oui concert Non rien
5 7 7 7 Oui 6 Oui Pratiquer la langue, comprendre la société française, passer un bon moment Non : prix, manque de temps Oui Faire plus spectacle Non rien
6 7 7 6 Oui 6 Oui Pratiquer la langue, voir les autres apprenants dans un autre cadre, passer un bon moment Non : prix, manque de temps Oui Faire plus Zoo Non rien
7 5 6 6 Oui 7 Oui Tout Peut-être Oui Faire plus Zoo Oui Dans les musées,  je ne comprends pas beaucoup de chose
8 6 7 6 Oui 7 Oui Pratiquer la langue, passer un bon moment, faire plus connaissance, améliorer sa culture générale, apprendre de nouvelles choses. Oui j’aime beaucoup Oui Oui musée, bibliothèque, spectacle Oui Il y a des sorties moins intéressantes que les autres
9 10 10 8 Oui 8 Oui Tout Oui  c’est très intéressant Oui Faire plus Spectacle, cinéma , musée Non rien
10 7 6 6 Oui 6 Oui Pratiquer la langue, passer un bon moment, se sentir mieux en France, sortir de la maison  autre : découvrir des choses Peut-être Oui Oui spectacle, concert, zoo Non rien
  • « Aimez-vous la France ? » (note de 1 à 10)
  • « Aimez-vous vivre en France ? » (note de 1 à 10)
  • « Appréciez-vous la population française ? » (note de 1 à 10)
  • « Vous sentez-vous mieux en France que dans votre pays d’origine ? »
  • « Aimez-vous la langue française ? » (note de 1 à 10)
  • « Appréciez-vous les sorties culturelles de l’association ? »
  • « Voulez-vous faire d’autres sorties avec les autres apprenants ? »
  • « Pensez-vous qu’il y a suffisamment de sorties ou bien souhaitez-vous en faire plus souvent ? »
  • « Quelles sont les sorties que vous préférez faire avec l’association? »
  • « Choses que vous n’avez pas aimé dans les sorties que nous avons faites ? »
  • « Pensez-vous que ces sorties sont nécessaires à votre intégration ? » : Ils ont tous répondu que les sorties avec l’association sont nécessaires pour leur intégration (leur permet de pratiquer la langue, sentiment que l’on se soucie d’eux et qu’ils sont entourés et ne sont pas seuls en France) découvrir la ville, se sentir mieux en France et pour passer un bon moment (plaisir). Mais pas toutes les sorties sont intéressantes.

 

 

 

 

 

 

Annexe 3 – Fiche d’identité d’un animal

 

 

[1] Sommaire, J.-C. (2006). La crise du ‘modèle français d’intégration’ – Une proposition d’outil. Vie sociale, 4 (4), p.20

[2] Ibid., p.14.

[3] Salama, P. (2007). Immigration, intégration et diversité culturelle – Rapport pour le Conseil de l’Europe DG IV. Strasbourg: Conseil de l’Europe, p.6.

[4] Sommaire, J.-C. (2006). La crise du ‘modèle français d’intégration’ – Une proposition d’outil. Op.Cit., p.17.

[5] Picouet, M. (1991). Transformations des formes de mobilité dans les années récentes et évolution des approches et méthodes : introduction et commentaires. Dans A. Quesnel, & P. Vimard, Migration, changements sociaux et développement (pp. 13-22). Paris: ORSTOM, p.13.

[6] Voir le glossaire de l’UNESCO avec le terme migrant/migration, sur http://www.unesco.org/new/fr/social-and-human-sciences/themes/international-migration/glossary/migrant/.

[7] Ibid.

[8] Ibid.

[9] Ibid.

[10] Storme, A., Mottin, S., & Godenir, A. (2012). Les primo arrivants : qui sont-ils et quelle place ont-ils dans les politiques d’alphabétisation ? Wallonie: Lire et Écrire en Wallonie, p.4.

[11] L’Unesco inclut deux notions dans la définition de l’intégration : « stabilité à un groupe social » et « acculturation », voir sur le glossaire de l’Unesco (http://www.unesco.org/new/fr/social-and-human-sciences/themes/international-migration/glossary/integration)

[12] Schnapper, D. (1991). La France de l’intégration : sociologie de la nation en 1990. Paris: Gallimard, p.98.

[13] Buffet, M-H. (2001). Culture, actions culturelles et intégration en France des populations immigrées et de leurs enfants – Rapport de recherche bibliographique. Op.cit, p.10.

[14] Chilea, D. (2013). L’immigration comme phénomène majeur de l’évolution de l’intégration européenne. CURENTUL JURIDIC, p.51.

[15] Balleix, C. (2013). La politique migratoire de l’Union européenne. Paris: La documentation Française, p.21.

[16] Le niveau de connaissance de la langue française est évalué avec un test (oral et écrit), ce test est fixé par arrêté. Collectif FLE Marseille Sud-Est. (2015, mai). Le contrat d’accueil et d’intégration. Récupéré sur Collectif FLE Marseille Sud-Est: http://collectif-fle-marseille.over-blog.com/pages/Le-contrat-d-accueil-et-d-integration-cai-3498196.html.

[17] Article R311-23 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

[18] Le DILF est la première étape avant le DELF A1 et le DELF A2 pour les utilisateurs élémentaires, viennent ensuite les DELF B1 et B2 pour les utilisateurs indépendants, puis les DELF C1 et C2 pour les expérimentés.

[19] Lhomme-Rigaud, C., & Désir, P. (2005). Langue et migration. Recherches en psychanalyse, 2(4), p.90.

[20] OFII. (2015). En dehors de la formation linguistique, il y a-t-il d’autres formations obligatoires ? Récupéré sur Le site officiel de l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration: http://www.ofii.fr/tests_197/en_dehors_de_la_formation_linguistique_il_y_a-t-il_d_autres_formations_obligatoires_1041.html

[21] Adami, H., & al. (2011). Référentiel Français Langue d’Intégration. Paris: Direction de l’Accueil, de l’Intégration et de la Citoyenneté, p.14.

[22] Dreyfus-Alphandéry, S., & Bord-Cebron, M. (2014). Codes sociaux – Liens et frontières. Belgique: ADAGE/BNF, p.18.

[23] Ibid., p.21.

[24] Ibid., pp.25-26.

[25] Salama, P. (2007). Immigration, intégration et diversité culturelle – Rapport pour le Conseil de l’Europe DG IV. Op.Cit., p.3.

[26] Ibid., pp.6-7

[27] Gagneron, W., Cronel, A., & Benssusan, C. (2013). Rapport sur l’évaluation de la politique d’accueil des étrangers primo-arrivants (Tome II – Les Annexes). Ministère de l’Intérieur, Ministère des Affaires Sociales. Paris: Inspection Générale de l’Administration, Inspection Générale des Affaires Sociales, pp.41-43.

[28] Blanchet, P. (2004). L’approche interculturelle en didactique du FLE – Cours d’UED de Didactique du Français Langue Étrangère de 3e année de Licences. Rennes 2 Haute Bretagne: Service Universitaire d’Enseignement à Distance, p.7

[29] Haut Conseil à l’Intégration. (1995). Liens culturels et intégration. Rapport au premier ministre. Paris: la Documentation Française, p.22.

[30] Buffet, M-H. (2001). Culture, actions culturelles et intégration en France des populations immigrées et de leurs enfants – Rapport de recherche bibliographique. Paris: DESSID – ENSIB – ADRI, p.26.

[31] Ibid., pp.27-28.

[32] Redfield, R., Linton, R., & Herskowits, M. (1936). Memmorandum for the study of Acculturation. American Anthropologist (38), p.149.

[33] Mokounkolo, R., et Pasquier, D. (2008). Stratégies d’acculturation : cause ou effet des caractéristiques psychosociales ? L’exemple de migrants d’origine algérienne. Les Cahiers Internationaux de Psychologie Sociale, 3(79), pp.57-58.

[34] Ibid., p.58.

[35] Salama, P. (2007). Immigration, intégration et diversité culturelle – Rapport pour le Conseil de l’Europe DG IV. Op.cit., p.3.

[36] L’Unesco parle plutôt de multiculturalisme qui indique l’existence de communautés culturelles différentes au sein d’une société, dans son usage démographique. Voir « multiculturalisme » sur le glossaire de l’Unesco (http://www.unesco.org/new/fr/social-and-human-sciences/themes/international-migration/glossary/multiculturalism)

[37] Voir, par exemple, Bier, B. (2007). Accompagnement éducatif, migrations et identités culturelles. Op.cit., p.6.

[38] Bier, B. (2007). Accompagnement éducatif, migrations et identités culturelles. Op.cit., p.11

[39] Ibid.

[40] Blanchet, P. (2004). L’approche interculturelle en didactique du FLE – Cours d’UED de Didactique du Français Langue Étrangère de 3e année de Licences. Op.cit., p.6.

[41] Bier, B. (2007). Accompagnement éducatif, migrations et identités culturelles. Op.cit., p.3.

[42] Adami, H., & al. (2011). Référentiel Français Langue d’Intégration. Op.Cit., p.9.

[43] Gagneron, W., Cronel, A., & Benssusan, C. (2013). Rapport sur l’évaluation de la politique d’accueil des étrangers primo-arrivants (Tome II – Les Annexes). Op.Cit., p.43.

[44] Adami, H., & al. (2011). Référentiel Français Langue d’Intégration. Op.Cit., p.7.

[45] Ibid., p.10.

[46] Ibid., pp.10-11.

[47] Cross, T. L., Bazron, B. J., Dennis, K. W., & Isaac, M. R. (1989). Toward a Culturally Competent System of Care. Volume 1. Georgetown: National Institute of Mental Health, Child and Adolescent Service Program (CASSP) Technical Assistance Center, Georgetown University Child Development Center, p.13.

[48] Puren, C. (2013). La compétence culturelle et ses composantes. Savoirs et Formations – Recherches & Pratiques (Hors-série), pp.9-12.

[49] Adami, H., & al. (2011). Référentiel Français Langue d’Intégration. Op.cit. p.24.

[50] Ibid., p.19. A voir aussi, concernant « l’accompagnement et suivi », dont la veille didactique où « musées et sorties culturelles » figurent dans les outils didactiques suggérés, p.32.

[51] Ibid., p.16. C’est le coordinateur d’une association qui devrait assurer et pérenniser le partenariat avec des acteurs du territoire pour l’organisation des sorties.

[52] Vinsonneau, G. (2000, novembre). Socialisation et identité. Récupéré sur Sciences Humaines (www.scienceshumaines.com).

[53] Direction des affaires publiques et des communications. (2011). Programme-Cadre de Français pour les personnes immigrantes adultes au Québec. Québec: Ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles, p.12.

[54] Plivard, I. (2010). La pratique de la médiation interculturelle au regard des populations migrantes… et issues de l’immigration. Connexions, 1 (93), pp.27-28.

[55] Ibid., pp.28-27.

[56] Puren confirme que « lorsqu’il s’agit d’un public migrant, la classe est d’emblée, à l’image de la société extérieure à laquelle on les aide à se préparer, un lieu où les enjeux ne sont pas seulement interculturels, mais aussi pluriculturels et co-culturels ». Puren, C. (2013). La compétence culturelle et ses composantes. Op.cit., p.15.

[57] Saada, S., & Payet, A. (2014). Pratiques théâtrales pour primo arrivants et médiation culturelle – Compte-rendu de la formation. Paris: Culture du Coeur – Espace Bénévolat.

[58] Rocher, G. (1995). Introduction à la Sociologie générale. Montréal: Éditions Hurtubise HMH ltée, troisième édition, p.112.

[59] Bigot, R., & al. (2013). La curiosité scientifique des Française et leur désir de développer leurs connaissances. Paris: Crédoc – Collection des Rapports, pp.9, 28, 45.

[60] Abdel Sayed, E. (2009). De l’apport des pratiques culturelles en formation d’adultes peu scolarisés – Thèse de doctorat. Journal de l’Alpha, 180, 65-84, p.76.

[61] Ibid., p.77.

[62] Cité par Lhomme-Rigaud, C., & Désir, P. (2005). Langue et migration. Recherches en psychanalyse, 2(4), p.91.

[63] Quinton, A. (2007, novembre 5). Psychologie d’apprentissage : les motivations. Récupéré sur CRAME – DU de Pédagogie: http://www.crame.u-bordeaux2.fr/pdf/motivations.pdf, p.1.

[64] Maslow, A. (1943). A Theory of Human Motivation. Psychological Review(50), pp.370-396

[65] Villagordo, E. (2008). Pour une dimension anthropologique de l’enseignement de la culture. Tréma(30), 87-100. Récupéré sur http://trema.revues.org/187, p.97.

[66] Passeron, J.-C. (1986, décembre). Les voies d’une démocratisation de la lecture. Les Actes de Lecture(16)

[67] Abdel Sayed, E. (2009). De l’apport des pratiques culturelles en formation d’adultes peu scolarisés – Thèse de doctorat. Op,Cit., p72.

[68] Le terme « Association » (avec une majuscule) désignera l’organisme dont le nom est « Kolone » dans le présent document, sauf mention contraire explicite.

[69] Association Kolone, sur le site infoMIE.net, url : http://infomie.net/spip.php?article1043, date de consultation : 18 mai 2015.

[70] Le dispositif dans les pays voisins, tels que le Belgique, définit les jeunes primo-arrivants comme ceux dont la période d’installation dans la société d’accueil ne dépasse pas une année (12 mois).

[71] Auparavant, depuis 2013, un épisode de l’Odyssée d’Homère a été lu, traduit, calligraphié et enregistré par les participants à l’atelier Métamorphose. Pour plus d’informations : http://kolonelecinq.tumblr.com/a%20propos.

[72] Pour plus d’informations sur l’espace artistique de service public « Cent-Quatre » : http://www.104.fr/centquatre/qui-sommes-nous/centquatre.html.

[73] Rocher, G. (1995). Introduction à la Sociologie générale. Op.Cit., p.112

[74] Questions n°6, 7, 8 et 10 de l’enquête en début de stage (cf. Annexe 1.1).

[75] Néanmoins, une note juste au-dessus de la moyenne n’est pas suffisante pour affirmer qu’un apprenant apprécie vraiment la France ou la vie en France.

[76] Question n°12 de l’enquête en début de stage (cf. Annexe 1.1).

[77] Moyenne des notes attribuées par les apprenants en début de stage : 6 ; celle en fin de stage : 6.8.

[78] Tous les apprenants racontaient qu’avant leur arrivée en France, ils imaginaient que les français ont tous des « yeux bleus et des cheveux blonds », alors que ces apprenants ont découvert ensuite que la société française est formée de très nombreux étrangers.

[79] Réponses à la question « Quelles sorties auriez-vous envie de faire ? Que voulez-vous découvrir en France ? » (Q.18) de l’enquête en début de stage (cf. Annexe 1.1).

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