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Dynamisme Économique de l’Afrique et Perspectives des Médias Audiovisuels : Étude de Cas du Rwanda et Benchmark Continental

Introduction

Ces dernières années, l’Afrique fait preuve d’un grand dynamisme économique. Le continent a affiché une « remarquable résilience » face à la crise économique mondiale de la dernière décennie. En effet, malgré la morosité de l’activité mondiale, l’Afrique a connu une croissance moyenne de 4 % en 2013, ce qui dépasse celle du monde de 1 point. Son produit intérieur brut (PIB) est prévu augmenter de 4,8 % en 2014 et de 5,7 % en 2015. En Afrique subsaharienne, cette croissance s’est notamment chiffrée à 5 % en 2013. Elle est prévue à 5,8 % en 2014. L’Afrique de l’Ouest est la zone la plus dynamique du continent avec une croissance de plus de 7 % en 2014 et 2015. Le Sierra Leone tire les chiffres à la hausse grâce à ses exportations de fer et de minerai. En Afrique de l’Est, les performances sont tout aussi appréciables avec une croissance de l’ordre de 6 % en 2014 et 2015.A noter que dans cette région, les PIB de l’Ethiopie, de la Tanzanie, de l’Ouganda, et du Rwanda ont progressé de 6,5 % à 7,5 % ces deux dernières années.

Ce constat nous conduit à nous interroger sur les impacts de ces avancées économiques sur l’industrie de l’audiovisuel en Afrique. Pour répondre à cette question, cette étude s’intéressera à l’évolution des médias audiovisuels en Afrique et les opportunités futures de ce marché. Dans cette optique, il paraît intéressant de présenter en premier lieu ce que sont les médias audiovisuels, leurs fonctions et les influences qu’ils peuvent avoir sur les différents aspects de la vie d’un pays. Par la suite, il convient de situer l’étude et de présenter un aperçu du panorama des médias audiovisuels en Afrique. C’est-ce qui nous permettra de distinguer les différentes sortes et les catégories de médias déjà présents sur le continent, à savoir les organes publics, privés et internationaux. Pour pouvoir identifier de manière plus précise des exemples du potentiel de développement des médias audiovisuels en Afrique, le deuxième chapitre de cette étude abordera plus particulièrement le cas du Rwanda. Nous essayerons de comprendre l’environnement dans lequel cette industrie évolue, et d’en déduire les forces, les faiblesses, les menaces et les opportunités. Dans la troisième partie, nous tenterons d’effectuer un benchmark externe des réalités rwandaises avec ce qui se passe ailleurs sur le continent. Pour ce faire, nous tiendrons compte de l’environnement dans lequel évoluent les médias camerounais et sénégalais. C’est ce qui nous permettra par la suite d’énoncer des recommandations pour le développement de ce secteur en Afrique.    

  • Présentation des médias audiovisuels

Par définition, un média désigne « une technique ou un ensemble de techniques permettant aux hommes de communiquer l’expression de leur pensée, quelles que soient la forme et la finalité de cette expression[1] ». Cela inclut les journaux et l’ensemble de la presse écrite, la radio, la télévision, internet, les magazines, le cinéma, les affichages, les CD, les livres, le courrier entre autres.

Les termes « médias audiovisuels » désignent pour leur part les outils de communication recourant au son et/ou à l’image pour informer, divertir ou éduquer le grand public. Les plus populaires restent la radio et la télévision, bien qu’il en existe actuellement de nouvelles formes comme l’Internet et les services interactifs. Ce sont également d’importants vecteurs d’épanouissement de la société, en plus d’être un catalyseur du rapprochement des individus, des peuples et des civilisations.

  • La radiodiffusion

La radiodiffusion est une forme de radiocommunication, qui consiste en l’émission de signaux par l’intermédiaire d’ondes électromagnétiques pouvant être reçues directement par le public. Contrairement aux idées reçues, en plus des émissions sonores, ce service peut comprendre des émissions de télévision ou d’autres genres d’émission. Cette étude se limitera cependant à la définition que s’en fait le grand public qui est l’ « actionde radiodiffuser, de transmettre par la radio; émission et diffusion du son au moyen des ondes hertziennes […] En partic. la technique qui en permet la réalisation et qui est perçue comme un massmédia[2]». Ce qui suppose l’acception de la définition de la radio proposée par P.Méton comme « un organisme (privé ou public) chargé de diffuser régulièrement des programmes sonores variés destinés à toute personne possédant un appareil récepteur [3]».

  • La télévision

La télévision désigne la « transmission à distance, par voie hertzienne, d’images non permanentes d’objets fixes ou mobiles, généralement accompagnées de sons; ensemble des procédés et des techniques mis en œuvre pour assurer cette forme de télécommunication [4]». Les contenus transmis sont appelés programmes télévisés (émissions, films et séquences publicitaires). La distribution de ces programmes peut s’effectuer selon le niveau d’avancée technologique, de manière analogique ou numérique. La transmission s’effectue par ondes radioélectriques ou par réseau câblé.

  • Internet

Internet est aujourd’hui considéré comme le médium audiovisuel le plus puissant en raison de la diversité des formats de données qu’il peut transmettre, de la rapidité de la communication des informations qu’il permet, et de son nombre d’utilisateurs qui ne cesse de croître. Internet se définit notamment comme un « réseau mondial de télécommunication reliant entre eux des ordinateurs ou des réseaux locaux et permettant l’acheminement de données numérisées de toutes sortes (messages électroniques, textes, images, sons, etc.)[5] ».

  • Autres formes de médias audiovisuels

A part les formes de médias audiovisuels cités plus haut, il en existe également d’autres formes qui sont côtoyés au quotidien par le public, mais qui ne sont pas pourtant reconnus par le grand nombre comme tel. Il s’agit en général des médias audiovisuels destinés au divertissement comme la presse écrite, le cinéma, les documentaires, la musique, et aussi le théâtre.

Ces dernières années, les services de médias audiovisuels à la demande se sont aussi beaucoup développés. Cette forme de médium s’apparente à la télévision, à la différence près qu’il offre à l’utilisateur la possibilité de visionner, sur un poste de télévision ou un ordinateur, de manière gratuite ou payante, des programmes audiovisuels au moment qu’il choisit et uniquement sur sa demande[6].

  • Les fonctions des médias audiovisuels

Informer, divertir et éduquer, tels sont les principaux fonctions des médias audiovisuels. Il en existe cependant toujours des effets secondaires, qui peuvent être bonnes ou mauvaises, selon l’influence du média sur la vie des individus et de la société, et ce, aussi bien sur le plan politique, économique que social.

  • Informer, divertir et éduquer

La diffusion de l’information constitue la principale fonction de tout médium, dont les médias audiovisuels. L’objectif étant d’informer rapidement et le plus largement possible le grand public des faits « importants » et des évènements qui se déroulent dans la localité, le pays et le monde entier. Pour gagner en efficacité dans la réalisation de cette mission, le diffuseur doit disposer d’une équipe de journalistes pour collecter les informations, les éditer et les transmettre. Les médias audiovisuels peuvent également aider le public à comprendre l’actualité en interprétant les faits. Ils permettent d’étudier les différentes réactions face aux évènements afin que l’audience puisse s’en faire une opinion.

Les médias audiovisuels permettent également de divertir et d’éduquer les individus à travers ces programmes et les messages qu’ils transmettent. Ils peuvent par exemple servir à promouvoir la santé et les droits du citoyen, le civisme, ou à partager des connaissances.

  • Les impacts des médias audiovisuels sur la vie des gens

Le développement des médias audiovisuels n’est pas sans impact sur la vie des individus. Ils ont en effet la possibilité d’influencer les décisions et les choix des individus. Leur impact sur la vie politique, économique ou encore sociale n’est pas négligeable.

  • Influence des médias audiovisuels dans la société

Les médias audiovisuels sont très présents dans les sociétés actuelles. Dans la réalisation de leur mission principale, qui est de présenter les informations et de divertir le grand nombre, ils ont le pouvoir de créer une sorte de pensée commune. Le fait est que la pensée la plus médiatisée devient dominante, les gens pensant que c’est celle qui est partagée par le plus grand nombre de personnes.

Edward Barnays fut l’un des premiers à avoir constaté l’immense potentiel des médias audiovisuels pour standardiser les pensées : « Le cinéma américain est le plus grand transporteur inconscient de propagande dans le monde aujourd’hui. C’est un grand distributeur d’idées et d’opinions. Le cinéma peut standardiser les idées et habitudes d’une nation. Parce que les images sont faites pour satisfaire les demandes du marché, elles reflètent, soulignent, et même exagèrent les grandes tendances populaires, plutôt que de stimuler de nouvelles idées et opinions. Le cinéma use des idées et des faits qui sont en vogue. Tandis que les journaux cherchent à offrir les faits, il[le cinéma]cherche à offrir du divertissement. » (Edward Bernays, Propagande, 1928).

Par leur nature omniprésente, les médias audiovisuels créent un environnement vivant dans lequel la population évolue sur des bases journalières. Ils définissent ainsi la norme et excluent l’indésirable « de la même manière que les chevaux de trait portent des œillères afin de ne voir que ce qui est devant eux, les masses ne peuvent voir que là où elles sont supposées voir [7]».

Cet effet de masse peut bien sûr être positif ou négatif selon la nature des informations diffusées au grand nombre. Les médias audiovisuels peuvent par exemple contribuer à la promotion de la santé et des droits du citoyen, tout comme ils ont le pouvoir d’encourager des comportements à risque ou des modes de vie malsains.

  • Influence des médias audiovisuels sur la vie politique

En politique, les médias audiovisuels se doivent d’assurer la circulation des opinions, leur confrontation, et leurs limites ou leurs insuffisances[8], du moins dans un pays démocratique. Cette fonction leur donne une grande influence sur la vie politique du pays. Raison pour laquelle ils sont qualifiés de « Quatrième pouvoir », les trois autres étant le judiciaire, le législatif et l’exécutif. C’est-ce qui explique aussi pourquoi les gouvernements dans les dictatures tentent par tous les moyens de contrôler les informations diffusées, guidant les médias vers les informations qui leur sont favorables et censurant celles qui jouent en leur défaveur.

Un exemple de l’influence des médias audiovisuels sur la vie politique : le faux charnier de Timisoara[9], en 1989, en Roumanie. Il s’agit également de la plus importante tromperie depuis l’invention de la télévision[10]. En fait, les opposants au pouvoir ont filmé puis diffusé de faux charniers en incriminant les dirigeants. Bénéficiant de la sympathie du peuple et de l’opinion internationale grâce à ces images, les opposants en ont profité pour mener un coup d’Etat. La supercherie n’a été découverte que plus tard.

Le succès rapide du soulèvement populaire dans les pays du sud de la méditerranée[11], également connus comme le « Printemps arabe » constitue également un exemple récent de l’influence des médias audiovisuels (plus précisément d’Internet et des réseaux sociaux) sur la vie politique.

  • Influence des médias audiovisuels sur la vie économique

Sur le plan économique, la force des médias audiovisuels réside dans la communication publicitaire. Le fait est que les médias audiovisuels tirent leurs revenus non pas de leur public, mais des publicitaires qui souhaitent vendre leurs produits à ce même public. Dans cette optique, ils peuvent être observés comme une activité économique comme les autres, avec des coûts d’exploitation, des charges, des objectifs de vente et de rentabilité, évoluant dans un cadre réglementaire.

Il faut cependant aussi noter que les médias audiovisuels contribuent à la dynamisation de l’économie, d’une part, en offrant aux entreprises un canal de communication qui leur permet d’atteindre et de toucher leurs cibles ; d’autre part, en influençant le choix des consommateurs et en encourageant les actes d’achat. Cela favorise le développement et la croissance des entreprises, ce qui génère à son tour des effets bénéfiques sur l’économie en générale.

Le fait est que les médias audiovisuels jouent un rôle crucial dans notre société de consommation de masse[12]. Ce sont eux qui incitent à consommer à travers les publicités et les modèles de perfection qu’elles imposent : « Si l’homme et la femme sont heureux, ils ne consomment pas. C’est la frustration qui est la base du désir de consommation. Aussi, faut-il leur offrir d’inaccessibles modèles de beauté et de richesse, afin que la frustration les mène sur le chemin des achats. » Michel Piquemal[13]. C’est-ce qui explique d’ailleurs pourquoi les entreprises investissent des sommes colossales en communication et en campagne publicitaire.

Les médias audiovisuels ont aussi le pouvoir de conditionner leurs publics afin que chacun devienne un consommateur docile. Ce conditionnement s’effectue par l’intermédiaire de la publicité. Des études font état de cette influence de la publicité audiovisuelle sur les enfants qui constituent les cibles privilégiés des marketeurs. En effet, les spécialistes du marketing ont le pouvoir de dicter implicitement aux enfants le comportement à suivre à travers la publicité audiovisuelle (des voix douces ou joyeuses qui donnent une vision d’un monde parfait avec un produit spécifique, des images colorées). Etant quotidiennement exposés à ces messages[14], les enfants deviennent des consommateurs dociles. Leurs parents, qui ne souhaitent que leur faire plaisir, seront évidemment disposés à satisfaire leurs choix et leurs goûts.

A noter qu’un média audiovisuel s’organise le plus souvent autour de l’un des trois modèles d’affaires suivant, en prenant l’exemple de la télévision :

  • Le modèle des chaînes privées gratuites, qui tirent essentiellement leurs ressources de la publicité. Il s’agit d’un marché biface avec d’un côté les téléspectateurs qui ne paient aucun abonnement pour accéder aux contenus diffusés par la chaîne, et de l’autre, les annonceurs qui achètent des espaces publicitaires au média. Les véritables clients de la chaîne privée gratuite sont donc les entreprises qui souhaitent faire connaître leurs produits, dont l’objectif est de toucher la cible la plus large possible au meilleur prix. Le média sert ainsi d’intermédiaire en lui offrant une audience. C’est la taille de cette audience qui déterminera les tarifs de diffusion des publicités. Ce mode de financement par la publicité pousse les chaînes privées gratuites à viser le public le plus large possible.
  • Le modèle des chaînes privées à péage, qui se financent essentiellement grâce aux abonnements des téléspectateurs. Les chaînes des bouquets satellitaires payants tels que CanalSat fonctionnent notamment suivant ce modèle. Radicalement distinct du modèle précédent, les chaînes privées à péage doivent adopter une stratégie commerciale totalement différente. Elles doivent maximiser la satisfaction des téléspectateurs en leur offrant des contenus à forte valeur ajoutée (compétitions sportives en exclusivité, films et séries à succès diffusés en première exclusivité…) afin d’accroître la disposition à payer des abonnés.
  • Le modèle des chaînes publiques qui sont en grande partie financées par les recettes commerciales et les ressources publiques.

 

  • Panorama des médias audiovisuels en Afrique

Les paysages audiovisuels connaissent d’importants changements en Afrique. Ils sont la plupart du temps dominés par les radios. En 1975, Babacar Sine a écrit : « La radio a fait depuis relativement bien longtemps irruption dans la vie quotidienne de l’Africain; sans doute est-ce le medium le plus courant et le plus populaire du point de vue de son audience[15] ». En revanche, la télévision est encore peu présente, surtout en zones rurales, en raison de problèmes d’électrification, d’équipements et aussi d’alphabétisation. La radio est ainsi devenue un mass media, alors que la télévision peut encore être qualifiée de class media.

Les tableaux ci-dessous offrent notamment un aperçu du taux de pénétration de ces médias audiovisuels en Afrique :

 

Année 2002 Bénin Burkina Faso Cameroun Mali Mauritanie Sénégal
Ménages avec radio, milliers 968 1 150 1 560 1 250 245 850

 

% ménages avec radio, 2002 90,6 65,4 54,2 71,2 50,3 73,5

 

Union Internationale des Télécommunications, 2004 : « Indicateurs des télécommunications africaines 2004 »

www.itu.int

Ce tableau révèle que le paysage radiophonique est en pleine expansion dans la plupart des pays. Le taux d’équipement reste cependant encore faible dans de nombreux pays.

 

Année 2002 Bénin Burkina Faso Cameroun Mali Mauritanie Sénégal

 

Ménages avec

télévision, milliers

210 120 510 260 100 330

 

% ménages avec

Télévision

19,7 6,8 17,7 14,8 20,5 28,5

 

Union Internationale des Télécommunications, 2004 : « Indicateurs des télécommunications africaines 2004 »

www.itu.int

Ce deuxième tableau révèle pour sa part le faible taux d’équipement des pays africains en télévision ce qui constitue un frein à l’expansion de ce médium.

Les paysages audiovisuels africains se caractérisent également par une forte disparité entre les médias publics et les médias privés, et une large diffusion des médias internationaux diffusés par voie satellitaire.

 

  • Les médias publics

Une bonne proportion des médias audiovisuels – particulièrement la radio et la télévision – dans le monde appartient à des gouvernements ou à des Etats, d’où l’expression « médias publics ». Il semble cependant utile de souligner la distinction entre un média de service public et un média d’Etat.

Les médias de service public désignent une radio ou une télévision qui utilise des fonds publics pour diffuser ses émissions dans l’intérêt de l’ensemble du public[16]. Souvent, ce genre de média est établi par la loi et n’a pas de but lucratif. Il n’est donc pas tributaire de la publicité. Il se doit évidemment d’être impartial et ne doit soutenir aucun parti en particulier. L’UNESCO en donne la définition suivante : « La radiotélévision de service public est conçue, financée et contrôlée par le public, pour le public. Elle n’est ni commerciale ni étatique, libre de toute ingérence politique et de toute pression de la part de forces commerciales [17]».

Voici les principes largement acceptés qui permettent de qualifier un média de service public :

  • l’universalité de l’accès (géographique),
  • l’universalité de l’intérêt (goûts et intérêts généraux),
  • des dispositions spéciales pour les minorités,
  • la contribution au sentiment d’identité nationale et de la communauté,
  • l’indépendance vis-à-vis des intérêts personnels,
  • le financement direct et l’universalité du paiement,
  • la concurrence en termes de qualité plutôt que de quantité,
  • des directives qui offrent une plus grande liberté aux producteurs audiovisuels, au lieu de la restreindre.

Contrairement à cela, les médias d’État appartiennent comme son appellation l’indique à l’État et sont gérés par le gouvernement en place. Ils sont généralement financés avec des fonds public. Egalement à but non lucratif, ils assument certes une fonction de service public, mais sont pour l’essentiel des instruments de propagande de l’État ou du gouvernement.

La plupart des Etats africains, sinon tous, possèdent des chaînes de radio et de télévision de service public, qui diffusent leurs émissions à l’envergure nationale. Outre leurs vocations premières qui sont d’informer, d’éduquer et de divertir la population, l’histoire politique de l’Afrique depuis les indépendances laisse apparaître la détermination des gouvernements de contrôler et d’instrumentaliser ces médias[18], et ce, en dépit du vent de démocratisation qui a soufflé sur le continent au début des années 90. Cette main basse du pouvoir politique sur les médias publics trahit des mœurs autoritaristes, les gouvernements étant conscients du pouvoir réel de ces médias sur l’opinion publique.

 

  • Les médias privés

A la différence des médias publics, sont qualifiées de médias privés les structures à but lucratif. Les médias privés ne reçoivent pas de subventions publiques, ni de budget de la part de l’Etat ou du gouvernement. Ils subsistent uniquement grâce aux recettes commerciales. Ils appartiennent le plus souvent à des particuliers ou sont sous le contrôle d’une société, auquel cas ils sont qualifiés de sociétés de médias.

Dans la majorité des cas, les médias privés sont autorisés à diffuser uniquement après obtention d’une licence renouvelable accordée par une autorité publique. Les termes de cette licence peuvent être plus ou moins normatifs ou contraignants. Ils fixent le plus souvent des conditions de diffusion des actualités et affaires courantes, les directives sur le type de couverture électorale possibles…. Ils incluent également dans la plupart des cas une composante explicite de service public (le titulaire de la licence devra par exemple proposer des programmes d’éducation des électeurs en période électorale…).

En Afrique, on peut dire que d’importants changements se sont opérés ces dernières décennies. Le monopole d’Etat des médias a été brisé sous la pression de mouvements de démocratisation[19]. Aujourd’hui, les médias privés affichent une forte présence dans la quasi-totalité des pays africains. Des stations de radio privées émettent sur des zones de couverture relativement restreintes. Des évolutions semblables sont palpables dans le domaine de la télévision. On note également la privatisation de nombreuses chaînes et le développement de la télévision par câble, par satellite ou par stations de retransmission.

Pour le cas des radios privées en particulier, leur mise en place a permis d’étendre la couverture et l’accès à l’information aux populations pauvres, urbaines et péri-urbaines. On note également la multiplication des radios rurales et communautaires, des supports qui diffusent essentiellement des informations de fond liées au développement et à l’éducation (santé, éducation des enfants, économie…).

En ce qui concerne la télévision, des chaînes privées se créent dans la plupart des pays africains. Elles bousculent le changement et poussent les chaînes publiques à se réveiller, à changer d’orientation et à diversifier leurs émissions. Elles sont en revanche confrontées à des problèmes majeurs de financement et de commercialisation. Faute de ressources financières et matérielles suffisantes pour produire leurs propres émissions, elles ne font que retransmettre des programmes de puissantes chaînes de télévision occidentales.

 

  • Les médias internationaux

Les médias internationaux désignent « des agences de presse, des chaînes de télévision, des radios, des organes de presse écrite et des sites Internet d’information dont la particularité est de traiter l’actualité internationale, sous un angle généraliste ou spécialisé (actualité économique et financière par exemple)[20]. »

Ces dernières années, de plus en plus de médias internationaux s’intéressent à l’Afrique. Slate Afrique, la version française de Slate, un site consacré à l’actualité africaine et à la diaspora, le magazine Le Point à travers le Point Afrique, Canal+ avec sa chaîne africaine A+, le groupe Lagardère avec la radio Vibe à Dakar au Sénégal, ou encore Le Monde Afrique, l’édition thématique consacrée à l’actualité panafricaine de Le Monde… font partie des médias francophones présents sur le continent. Le Huffington Post s’est également joint à cette dynamique avec la création du HuffPost Maghreb en Tunisie, en Algérie et au Maroc ainsi que la chaîne Euronews, qui prévoit de lancer durant l’été 2015 Africanews, qui se veut être la toute première chaîne d’information multilingue panafricaine faite par des Africains et pour des Africains.

Les chaînes anglo-saxonnes ne sont pas aussi en reste. Les chaînes BBC et CNBC ou l’agence de presse turque Anadolu émettent déjà leurs émissions sur le continent. Ils y publient des dépêches en français et en d’autres langues (anglais, arabe, russe, turc, kurde et bosniaque). Il en est de même pour la chaîne chinoise CCTV (CCTV Africa au Kenya depuis 2012) et l’agence de presse Xinhua.

Cet intérêt des médias internationaux pour l’Afrique s’explique principalement par la santé économique du continent qui est plus qu’encourageante (le FMI prévoit un taux de croissance d’environ 5,8% en 2015), ainsi que pour son expansion démographique. L’Afrique est ainsi considérée comme un marché à fort potentiel.

 

  • L’audience des médias audiovisuels en Afrique

Par définition, l’audience désigne l’ensemble des personnes touchées par un média ou support de communication. Il peut s’agir de téléspectateurs, d’auditeurs ou des visiteurs d’un site web[21].

Pour tout médium, il est essentiel de mesurer son audience. D’une part, elle permet aux producteurs d’émissions de connaître la popularité de leurs programmes et de concevoir des réalisations qui captivent le public. D’autre part, cette information est déterminante pour la fixation des tarifs publicitaires.

L’audience se détermine notamment par le biais de sondage et d’enquêtes d’opinion pour connaître son public. Il peut aussi se mesurer par la consommation liée à la publicité ou bien par la réaction, par téléphone essentiellement, aux émissions.

Pour le cas de l’Afrique, selon une étude récente menée par le Cabinet d’analyse statistique et économique Afrique (CASE-Afrique), en moyenne 35% de la population s’informe quotidiennement par le biais de la télévision et 25% à la radio. 9% de la même population se connecte quotidiennement à internet et 1,5% lit la presse écrite pour s’informer.

 

  • Politiques et régulations de l’audiovisuel en Afrique

Les années 1990 marquent les plus grandes avancées dans l’histoire du secteur de l’audiovisuel en Afrique. Cette période est également décrite comme celle de « la libéralisation des ondes » qui a conduit à l’émergence de médias privés, des radios communautaires, et à la multiplication des offres de chaînes satellitaires payantes. Cette période coïncide  avec le passage de nombreux pays d’un gouvernement militaire ou de parti unique vers un pouvoir politique multipartite.

Comme partout dans le monde, les politiques et régulations de l’audiovisuel en Afrique se réfèrent aux règles de base de l���utilisation et de gestion des fréquences et du spectre internationale qui lie les Etats membres de l’UIT[22]. C’est cette organisation qui établit le plan de distribution des spectres de fréquences. Les administrations nationales doivent à leur tour s’y conformer lorsqu’elles attribuent des fréquences. On observe en revanche un traitement spécifique de l’audiovisuel public, qui en raison de sa fonction de service public, bénéficie de bandes réservées qui lui permet d’obtenir la gamme dont il a besoin pour atteindre toutes les régions et toutes les populations du pays.

Du point de vue législatif et réglementaire, des organes de régulation ont été instauré dans de nombreux pays d’Afrique. Le régulateur est dans la plupart des cas sous la tutelle du Ministre de l’Information. Des plaintes sont aussi observées dans plusieurs pays africains en ce qui concerne le système d’octroi de licence. Le fait est que le demandeur d’une licence a besoin d’obtenir de multiples autorisations qui doivent être payées. Un autre problème qui se pose dans certains pays en Afrique est celui de la vente des fréquences attribuées par leurs bénéficiaires à d’autres utilisateurs.

Les conditions économiques extrêmement difficiles de nombreux pays obligent par ailleurs les radiodiffuseurs existants à mettre en commun leurs ressources et à conclure des partenariats commerciaux. C’est le cas par exemple du Réseau Africain de l’audiovisuel, créé en 2001 pour relier les sociétés de radiodiffusion publiques du Ghana, du Nigeria, du Kenya, de la Zambie et du Zimbabwe avec un radiodiffuseur britannique afin de réduire les coûts de fourniture des mêmes programmes quotidiens.

 

 

B- Le futur des médias audiovisuels : cas du Rwanda

Pour nous permettre de bien comprendre la situation des médias audiovisuels au Rwanda, il semble essentiel de la situer dans son contexte économique et socio-politique. En effet, l’environnement est un facteur déterminant pour la vie des médias.

 

  • Contexte spécifique du Rwanda

Le Rwanda en bref

Le Rwanda est un pays d’Afrique centrale. Il partage ses frontières avec l’Ouganda au nord, la Tanzanie à l’est, le Burundi au sud, et la République démocratique du Congo à l’ouest. Le pays s’étend sur une superficie de 26 338 km² et sa capitale s’appelle Kigali.

Le Rwanda compte 11 370 425 d’habitants, avec une densité de 430 hab/km². La croissance démographique y est de 2,9 % (EIU, 2011), et l’espérance de vie se situe à 58 ans. Le taux d’alphabétisation est estimé à 70 %.

Le Rwanda fait partie des pays en voie de développement et figure à la 167ème position sur 187 pays selon le classement par Indice de développement humain du PNUD (année 2012).

 

Contexte socio-politique et économique du Rwanda 

Le génocide de 1994, qui a duré une centaine de jours et qui a coûté la vie à 800 000 personnes[23], fut l’un des évènements les plus marquants de l’histoire et de la vie socio-politique rwandaise. Les institutions ainsi que le tissu économique et social du pays en étaient totalement anéanties et ont dû être reconstruites.

Le Front Patriotique Rwandais (FPR) constitue le parti politique le plus populaire du pays. Sept autres partis existent mais ils n’ont pas la même force que le FPR. Le pays est dirigé par Paul Kagame, Président désigné de la République du Rwanda en 2000, puis élu démocratiquement en 2003 avec 95% des suffrages. Il est réélu en 2010 pour un mandat de sept ans avec plus de 90% des suffrages.

Après la guerre, le Rwanda a connu une période calme. Le pays a également pu profiter d’un crédit de génocide provenant des bailleurs internationaux. Ces apports financiers lui ont permis de réaliser une croissance économique considérable. De 2000 à 2010, le pays affiche une croissance économique soutenue et durable : la croissance annuelle du PIB est de 8% en moyenne.

Ce dynamisme économique du Rwanda peut s’expliquer par la bonne tenue du secteur agricole qui bénéficie de conditions climatiques favorables, la croissance des exportations du pays, une demande intérieure soutenue portée par l’expansion du crédit au secteur privé, des réformes économique et sociales profondes (décentralisation, réforme de la justice), et la  politique monétaire de la Banque Nationale du Rwanda qui est très prudente.

Pour autant, des problèmes structurels persistent dans le pays, comme son enclavement, le manque d’infrastructure, l’insuffisance de la productivité agricole et les maigres possibilités de diversification en dehors du secteur primaire, la surpopulation et la pression démographique, le manque de terres, et la faible capacité de l’économie actuelle à créer ou à attirer du capital humain ou financier.

 

Les médias audiovisuels du Rwanda

Malgré les grandes avancées réalisées par le gouvernement rwandais pour ramener la stabilité dans le pays depuis le génocide de 1994, force est de constater qu’il y a très peu de progrès pour accorder plus de liberté à la presse. Le fait est qu’au Rwanda, il existe une sensibilité particulière à propos des médias en raison de la responsabilité de certaines radios et quotidiens dans l’avènement des massacres de 1994.

  • Histoire des médias rwandais avant le génocide de 1994

L’histoire médiatique du Rwanda désigne le journal Kinyamateka comme le premier médium du pays en 1933. C’était une publication catholique imprimée en kinyarwandais. Celle-ci était proche du gouvernement. La première station radio du pays démarre en 1963 : c’était la radio publique Radio Rwanda.

Le premier journal indépendant du pays a été lancé en 1988 par Vincent Rwabukwisi, et fut baptisé Kanguka (réveille-toi !). C’était le « journal le plus critique que le Rwanda ait jamais connu »[24].

Comme dans de nombreux pays africains, les années 1990 ont amené un vent de liberté et d’ouverture de l’espace médiatique au Rwanda. La loi sur la presse de 1991 a établi la liberté de publier. Elle a conduit à ce que les observateurs décrivent comme « l’âge d’or » des médias : jusqu’à 60 petits journaux ont vu le jour, souvent associés aux partis politiques émergents.

La loi de 1991 a également permis la diffusion ouverte, mais en réalité seule la Radio-télévision libre des Mille Collines (RTLM), proche des partisans du gouvernement, était autorisée. Cette dernière a joué un rôle majeur dans l’incitation au massacre de 1994[25].

  • Les médias rwandais après le génocide

Après le massacre, de retour au pays, les journalistes exilés qui avaient dirigé une station du FPR ont redémarré Radio Rwanda en ayant comme mission la promotion de la nouvelle politique d’unité et de réconciliation.

Au fil des années, la radiodiffusion a aussi pris de l’essor. En 2014, le Rwanda compte plus de 30 stations de radio et sept chaînes de télévision[26], dont une chaîne de télévision et huit stations de radio de service publique. Le secteur privé enregistre ainsi 22 stations de radio et quatre chaînes de télévision. D’autres services numériques, fournis par des services de télévision payante existent également (DSTV, CANALSAT, Star Africa Media). Ils distribuent une gamme de chaînes de télévision dans différentes langues dont le français, l’anglais, l’arabe, le portugais, le chinois, etc.

De nombreux petits journaux publient dans le pays : une douzaine d’hebdomadaires ou de journaux occasionnels, dont la plupart n’éditent pas plus de 4 000 exemplaires.

Internet constitue aussi une autre source active d’information au Rwanda. Ces dernières années, les activités des bloggeurs et des médias sociaux ont beaucoup augmenté. Igihe et Kigali Today font parties des sites les plus populaires[27]. Kigali Today fonctionne comme une agence d’information, alimente le contenu de 40 autres sites et a même ouvert une station de radio.

L’accès internet reste en revanche encore limité dans le pays. Selon les chiffres du MHC (Media High Council), en 2011, seul 5% du pays disposait d’une connexion ADSL ou haut-débit, tandis que la connexion internet mobile s’élevait à 40%. De nombreux cybercafés se développement cependant dans le pays, surtout en milieu urbain, offrant une plus grande accessibilité de la population à ce média.

  • La disponibilité des médias et l’accès à l’information au Rwanda

En ce qui concerne la consommation des médias au Rwanda, c’est-à-dire la disponibilité et l’accessibilité à l’information[28] fournie par les médias dans les langues que l’auditoire peut lire, entendre et comprendre, le baromètre des médias réalisé par le PNUD, publié en 2012, révèle une large couverture des médias publics.

La radiodiffusion se révèle notamment être accessible au public plus que tout autre type de média. Radio Rwanda, détenue par le radiodiffuseur public, peut être réceptionné dans quasiment tout le pays[29]. Elle est disponible pour une très forte proportion de personnes (96,5%). Les radios communautaires et les radios privés sont disponibles pour respectivement (92,7%) et (80,4%) de la population.

La télévision publique (Rwanda Télévision), couvre également une large zone. Elle touche jusqu’à 62,7% de la population, tandis que seul (3,6%) de la population accèdent à des stations privées.

La différence entre la disponibilité des médias publics et privés est tout aussi palpable en matière de presse écrite. Celles-ci ne touchent que, respectivement, 34,6% et 15,6% de la population.

 

Source : Rwanda Media Barometer[30], Décembre 2012

 

La forte prédominance de la radiodiffusion s’explique, d’une part, par le fait que la radio nationale traditionnelle (Radio Rwanda) émet depuis les années 1960 et qu’elle a déjà pu établir un bon nombre d’antennes dans différentes parties du pays. D’autre part, beaucoup de stations de radio communautaires existent et émettent au niveau des districts, couvrant dans l’ensemble quasiment tout le pays. Enfin, les émissions de certains radiodiffuseurs internationaux, comme BBC et VOA, ont une couverture nationale.

Pour ce qui est de l’accessibilité des consommateurs aux médias, c’est-à-dire leur capacité à payer pour l’information et / ou pour acquérir un récepteur, force est de constater que la situation économique de la majorité des ménages rend difficile l’accès aux médias. La grande majorité des ménages ont accès �� la radio, par un poste de radio ou par le biais de téléphone portable avec radio intégrée. Au contraire, ceux qui possèdent un poste de télévision sont bien rares[31]. Ceci s’explique à la fois par la contrainte de ressources financières et la mauvaise connectivité en électricité dans le pays. Les téléviseurs sont largement détenues par les ménages urbains, notamment ceux installés à proximité des centres d’affaires, des usines, des établissements de santé (hôpitaux, centres de santé), des bureaux administratifs tels que les districts et les secteurs.

Le tableau ci-dessous montre le taux de pénétration de ces équipements de réception de l’information dans les ménages rwandais.

 

  Frequency

(Echantillon)

Percent

(Pourcentage)

  Yes No Total Yes No Total
Household with functional TV sets

(Ménage avec un téléviseur fonctionnel)

485 2091 2576 18.8% 81.2% 100.0%
Households with functional radio sets

(Ménage avec un poste de radio fonctionnel)

2219 373 2592 85.6% 14.4% 100.0%
Household with at least a member having a functional cell phone

(Ménage avec au moins un membre possédant un téléphone portable)

1989 599 2588 76.9% 23.1% 100.0%
Household with at least a member having a functional cell phone with incorporated radio

(Ménage avec au moins un membre possédant un téléphone portable avec radio intégrée)

1574 999 2573 61.2% 38.8% 100.0%

Source : Rwanda Media Barometer, Décembre 2012

Pour ce qui est du coût d’accessibilité de ces équipements, les postes de radio et les téléphones portables se révèlent être les outils les plus abordables. En effet, bien que leur qualité, plus précisément leur durabilité, reste discutable, certains petits postes de radio coûtent RWF 1000 (un peu moins de 2 USD). Les mobiles bons marchés, fabriqués en Chine et en Corée, prolifèrent également dans le pays. En revanche, les postes de télévision et Internet sont les plus chers. Pour ce dernier, la difficulté d’accessibilité des ménages s’explique par le fait la difficulté financière de l’acquisition d’un ordinateur ou d’un téléphone mobile disposant d’une option de connectivité web.

 

  • Les médias sociaux au Rwanda

Bien que le taux de pénétration d’Internet reste encore faible au Rwanda. Force est de constater un important essor des médias sociaux dans la société rwandaise. Selon le baromètre des médias, en 2012, déjà 9,4% de la population utilisaient ce médium pour s’informer, et cette tendance est en hausse. Le développement des réseaux sociaux est notamment en train de bouleverser l’univers médiatique du pays. Sans surprise, Facebook est le réseau social le plus utilisé dans le pays. Suivi de près par Twitter, qui est largement utilisé par les personnalités de haut rang du pays, dont le président Paul Kagame. Les utilisateurs de ces réseaux sociaux sont essentiellement des jeunes.

Le schéma ci-dessous offre un aperçu de l’usage des réseaux sociaux au Rwanda.

 

 

Source : Rwanda Media Barometer, Décembre 2012

 

  • Etude del’environnement des médiasaudiovisuels au Rwanda

Afin de pouvoir présenter les opportunités qui se présentent aux médias audiovisuels rwandais, il est important d’étudier au préalable le contexte politico-légal, économique, social, et technologique de l’environnement dans lequel ils évoluent.

 

Contexte politico-légal

Sur le plan politico-légal, ces dernières années, on peut dire que le contrôle étatique des médias s’est assoupli au Rwanda. L’article 34 de la Constitution prévoit en effet que la liberté dela presse etd’information est garantie, tant qu’elle ne nuit pas à l’ordre public et aux bonnes mœurs. Des réformes juridiques ont également été entreprises en faveur de la liberté d’expression. Cependant, il existe toujours des restrictions, assorties de sanction sévères, pour les journalistes quine surveillent pas les propos de ce qu’ils rapportent. En effet, les lois sont rédigées en termes vagues. Certes, elles interdisent les discours de haine en réprimant l’« idéologie du génocide» et le « divisionnisme », mais ces termes sont si généraux qu’il en résulte que même l’expression d’opinions ne s’apparentant pas à des discours de haine est traduite comme infraction, et surtout s’il s’agit de critiques du gouvernement, même si elles sont légitimes.

L’assouplissement du contrôle sur les médias et la liberté pour les débats radiophoniques ne suffisent de ce fait pas pour rassurer les journalistes qui craignent toujours les harcèlements et les menaces, ce qui a conduit à la fois à la censure et à l’autocensure des médias rwandais. En effet, le gouvernement est impitoyable contre les critiques et l’opposition. Les lois stipulent notamment de lourdes sanctions  en cas d’insulte à l’encontre d’un fonctionnaire. Le journalisme d’investigation en devient très risqué. Par exemple, le code pénal du pays, en son article 234, prévoit une peine d’emprisonnement pouvant atteindre un an pour toute insulte « par des mots, des gestes, des menaces, des écrits ou des dessins » envers un fonctionnaire ou la police. Ces sanctions sont doublées si l’insulte est proférée au tribunal ou devant le Parlement. Les insultes à l’encontre du président sont même passibles d’une peine pouvant atteindre cinq ans d’emprisonnement, si celles à l’encontre d’un citoyen ordinaire vont jusqu’à deux mois. Les activités de l’armée et la critique à l’encontre du président sont principalement les sujets tabous. Qui plus est, depuis l’après génocide du 1994, une longue liste de détentions, de menaces et de procès de journalistes sont aussi enregistrés dans le pays. Des assassinats sont aussi suspects[32]. Les mois qui ont précédé le scrutin présidentiel d’août 2010, plusieurs médias audiovisuels ont également été suspendus, puis définitivement interdits[33].

Selon Fred Muvunyi, président de la Commission rwandaise des médias pour l’autorégulation de la presse « […] L’autocensure coule comme le sang dans les artères et les veines. Il n’y a pas de censure [directe], mais les journalistes ne font pas certaines choses car ils ne sont pas certains des conséquences »[34]. Pour sa part, Maurice Munyentwari, conseiller juridique du Haut conseil des médias, explique la situation en ces propos « Sur le terrain, les journalistes se censurent à cause de notre passé historique. […]Les lois sont libres, mais nous n’avons pas de journalisme critique ou d’investigation. C’est de l’autocensure.Personne n’est arrêté pour avoir publié un rapport ».

Le tableau suivant offre un aperçu de l’importance de l’autocensure dans les médias par crainte des conséquences.

Responses (Réponses) Frequency (Fréquence) %
Yes
68  
47.2
No
72
50
No response
4  
2.8
Total
144  
100.0%

Source : Rwanda Media Barometer

 

Le Haut Conseil des Médias (MHC)

Le Haut Conseil des Médias est l’organisme de régulation en charge de l’octroi des licences de radio et télédiffusion et des accréditations nécessaires pour travailler en tant que journaliste. Il a aussi pour mission d’initier et de conduireles politiques etles stratégies nationales relatives aux médias. Devant normalement être indépendant, la majorité des membres de cet organisme de régulation sont pourtant désignés par le gouvernement. Cela n’empêche que les interventions de la MHC ont favorisé plusieurs réformes.

En guise d’exemple, en 2011, dans une de ses publications, la MHC a cité une série d’obstacles au journalisme[35] et a dénoncé la culture politique du contrôle ainsi que l’intolérance de certains fonctionnaires de l’État à l’égard des points de vue différents. Ce rapport a déclenché des changements d’attitude, notamment l’adoption de la loi sur l’accès à l’information. Celle-ci oblige les ministères àfournir des informationsà la presse, et permet aux journalistes de faire appel s’ils ne peuvent pas se procurer des informations. Elle établit également des sanctions pour la dissimulation d’informations sans motifs valables.

L’adoption de la nouvelle loi de régulation des médias en 2013 a également établi un plus haut degré de protection pour les journalistes (loi 03/2013 du 08 février 2013). Plusieurs restrictions ont été levées, et le contrôle direct du gouvernement s’est relâché. Les citoyens accèdent à un « droit de réponse » et de rectification. Les journalistes sont autorisés à définir leurs propres normes professionnelles, les photographes n’ont plus besoin de licence, et le MHC n’a plus le pouvoir de suspendre des publications. Depuis, l’organisme s’occupe aussi de formuler des politiques, de faire pression sur le gouvernement pour qu’il promulgue des lois, de surveiller et de promouvoir la liberté de la presse, et de renforcer les capacités des journalistes.

La commission rwandaise des médias (RMC)

Lancée en septembre 2013 à l’initiative des professionnels des médias, cette commission instaure une forme d’autorégulation des journalistes par un code de conduite qu’ils ont eux-mêmes adopté. Elle est mandatée pour faire respecter la déontologie des médias, promouvoir la liberté de la presse, et s’exprimer au nom des médias. Elle conseille également les journalistes sur les situations nécessitant de présenter des excuses ou d’effectuer une correction.

La RMC s’occupe également de l’accréditation volontaire des journalistes, et délivre les cartes de presse. C’est-à-dire que la demande d’accréditation n’est pas obligatoire, mais comme dans la pratique, il est difficile de fonctionner sans la carte de presse, beaucoup de journalistes ont choisi de se joindre au processus. En effet, l’accréditation permet d’accéder aux conférences de presse officielles, qui, dans un pays où l’influence du gouvernement est omniprésente et où le secteur de la société civile est limité, constituent les principales sources d’information.

 

Contexte économique

D’une manière générale, les médias présentent peu d’intérêt économique au Rwanda. Ce secteur n’attire pas les opérateurs économiques. Du point de vue d’Asiimwe, le directeur général du radiodiffuseur public : « Le plus grand problème, c’est que les médias n’ont pas été gérés correctement. Les gens n’investissent pas dans les médias comme dans une entreprise, alors il n’y a pas d’investisseurs sérieux. L’économie est encore de taille modeste, les recettes publicitaires sont limitées, alors les gens se lancent pour la survie d’un jour sans plan d’entreprise clair pour établir une entreprise sérieuse et crédible. »[36].

Qui plus est, la publicité, qui est la principale source de revenus pour les médias, n’est pas bien développée au Rwanda. L’essentiel de la publicité potentielle provient du gouvernement, et elles apparaissent rarement dans les journaux indépendants. Le développement du marché publicitaire se heurte par ailleurs à la structure même de l’économie rwandaise où le secteur privé est encore peu concurrentiel. En conséquence, très peu d’entreprises prévoient un budget de publicité.

Les médias se heurtent également à des coûts de fonctionnement élevés. Les équipements de base doivent être importés (équipements des studios de production et d’émission, équipements modernes numériques, fongibles comme les cassettes, les bandes magnétiques…). Ces matériaux coûtent cependant cher en devises. Il y a également le salaire des journalistes qui pèsent lourds dans le budget des médias. En plus de la faiblesse des recettes publicitaires, les médias se retrouvent ainsi dans de mauvaises situations financières qui les rendent encore plus vulnérables à la pression politique.

Les faits révèlent pourtant que les salaires des journalistes sont déjà à un niveau très faible. Selon une étude du Noble Journalist Data Project[37] en 2014, et conduite auprès de propriétaires de médias, 43% des journalistes gagnent moins de 293 dollars par mois. Un tel salaire ne suffit même pas pour louer une maison ayant des accès aux services publics de base dans la capitale. Encore, pour 43% des sondés, la réception des salaires est parfois en retard à cause des contraintes financières rencontrées par les employeurs.

Du fait du faible niveau de rémunération des journalistes, le phénomène du « journalisme à enveloppe brune » s’est répandu au Rwanda. C’est-à-dire que les reporters sont payés pour assister à des évènements. Les entreprises, les organisations, les ONG, les ministères… prévoient des « frais de transport » pour les journalistes afin qu’ils viennent couvrir leur sujet.  De nombreux cas d’abus sont liés à cette pratique. En effet, il arrive que les journalistes menacent d’écrire des choses négatives sur des personnes, uniquement pour leur soutirer de l’argent[38]. L’enrôlement (officiel ou non) des journalistes par des personnalités politiques soucieuses de leur communication constitue une autre conséquence de cette situation professionnelle et financière fragile des journalistes. Les formations et la promotion du professionnalisme sont notamment impuissantes face à ce type de pratique. Pour Margaret Jjuuko, professeur à l’université du Rwanda, ces phénomènes sont difficiles à éviter lorsque les médias ne parviennent pas à rémunérer convenablement leur personnel.

Cela montre notamment à quel point les questions économiques ont des impacts sur les médias au Rwanda.

 

Contexte socio-culturel

Au niveau social, l’absence de professionnalisme est constatée dans certains médias tant publics que privés. Un faible degré d’organisation interne prévaut dans de nombreux médias. Il y a par exemple des radios qui ne disposent pas d’un directeur de l’information[39]. Cela conduit à l’amateurisme, aux dérapages et au sensationnel. En plus, de nombreux journalistes ne maîtrisent par les nouvelles technologies de l’information et de la communication. Le problème, c’est que les médias ne sont pas perçus comme un domaine prioritaire pour la création de richesse. Les dépenses d’argent et les efforts de formation et d’investissement sont ainsi minimes.

L’inadéquation entre la formation et les besoins du métier a aussi contribué à ce manque de professionnalisme. Les programmes étant essentiellement théoriques avec beaucoup de réflexion sur le rôle des médias, et quasiment pas de formation pratique. Les réformes des médias se sont pourtant accélérées ces dernières années. Une amélioration a été apportée sur les formations en journalisme à l’université du Rwanda, qui est entrée en partenariat avec plusieurs écoles internationales comme l’école canadienne de journalisme et de communication de l’Université Carleton, l’école de journalisme à Lille en France, et bien d’autres. Les étudiants ont pu ainsi profiter d’expériences plus variées. Un bon nombre ont suivi des stages à l’étranger. De nombreuses formations ponctuelles ont également été mises en place par différents partenaires[40].

En plus, en raison des rôles des médias dans le génocide de 1994, le métier de journaliste et le travail dans ce domaine restent encore mal vu par la société rwandaise. D’après Gaspard Safari, rédacteur en chef du journal New Times, « Les survivants [du massacre] regardent les médias comme des traîtres, des génocidaires; Les tueurs considèrent que les médias sont contrôlés par le gouvernement […] ». De ce fait, et en plus du nombre important de journalistes tués, en exil ou en prison, le métier ne séduit pas les jeunes. L’école de journalisme a du mal à trouver des formateurs nationaux et aussi des stagiaires. Les étudiants sont plus attirés par les métiers de la communication, qui est à la fois moins dangereux et mieux rémunérés. Ceux qui sont motivés pour étudier le journalisme y voient un moyen pour devenir des politiciens.

Quoi qu’il en soit, ces dernières années, en raison du contexte de grand contrôle de l’information qui prévaut dans le pays, les journalistes se montrent particulièrement vigilants avec les informations qu’ils publient. Les médias réalisent ainsi un réel traitement de l’information[41]. Ils ne se contentent pas de reproduire des contenus empruntés ailleurs. De ce fait, bien que ce ne soit pas encore totalement acquis, la confiance du public envers les médias s’est améliorée, comme le confirme le RMB.

 

 

  Total

 

Score

 

Percent

 

Don’t know

(Ne sais pas)

Global total

(Total répondants)

Satisfaction with public media reports on issues of real concern to people

(Satisfaction à l’égard des rapports des médias publics sur les questions qui préoccupent vraiment les gens)

2333

 

3.68

 

73.5%

 

259

 

2592

 

100.0%

 

10.0%

 

 
Satisfaction with private media reports on issues of real concern to people

(Satisfaction à l’égard des rapports des médias privés sur les questions qui préoccupent vraiment les gens)

2110

 

3.30  
66.0%
476
2586

 

100.0%

 

18.4%

 

 
Satisfaction with the balance of local and national news and information

(Satisfaction par rapport à l’équilibre entre informations locales et nationales)

2296

 

3.61  
72.1%
297
2593

 

100.0%

 

11.5%

 

 
Satisfaction with journalists and media organisations as regard their integrity

(Satisfaction à l’égard des journalists et des medias au regard de leur intégrité)

2208

 

3.65  
73.0%
379
2587

 

100.0%

 

14.7%

 

 
Satisfaction with journalists and media organisations on their role in fighting corruption in Rwanda

(Satisfaction à l’égard des journalistes et des medias par rapport à leurs rôles dans la lutte contre la corruption au Rwanda)

2370

 

3.82  
76.4%
226
2596

 

100.0%

 

8.7%

 

 
Satisfaction with the level of fairness , balance and impartiality of news reporting

(Satisfaction à l’égard du niveau d’équité, d’équilibre et d’impartialité des informations)

2249

 

3.52
70.3%

 

335
2584

 

100.0%

 

13.0%

 

 
Satisfaction with citizens level of participation in media in Rwanda

(Satisfaction à l’égard de la participation citoyenne dans les médias au Rwanda)

2393

 

2.81
56.3%

 

179
2572

 

100.0%

 

7.0%

 

 

Source : Rwanda Media Barometer, Décembre 2012

 

Le tableau ci-dessous apporte notamment une précision sur l’appréciation du scoring des réponses pour tous les résultats du RMB.

 

Response option

(Choix de réponse)

Score Perception value

(Valeur de la perception)

Inexistent/very low performance

(Inexistant/très très faible)

0.0–1.9 0%–20%
Low performance

(Faible)

2.0–2.9 21%–40%
Moderate performance

(Moyen)

3.0–3.9 41%–60%
High performance

(Elevé)

4.0-4.9 61%–80%
Very high performance

(Très élevé)

5.0 81%–100%

 

Contexte technologique

Du point de vue technologique, ces dernières années, le gouvernement du Rwanda a adopté une stratégie nationale qui vise à développer l’industrie des TIC et à positionner le Rwanda comme un important carrefour technologique régional (un « Singapour africain »[42]). Pour y parvenir, des plans quinquennaux ont été mis en œuvre. Le premier, de 2000 à 2005, avait pour objectif de créer un environnement favorable aux initiatives dans les TIC. Le second, se déroulant de 2006 à 2010, a permis la mise en place d’infrastructures de base, comme le réseau de fibre optique. Le troisième, s’étale de 2011 à 2015, et vise à introduire des services exploitant ces nouvelles technologies.

En ce qui concerne l’accès aux réseaux Internet et à la téléphonie mobile, les principaux FAI au Rwanda sont MTN Rwanda, TIGO et Airtel. Quasiment la totalité du pays bénéficie d’une couverture du réseau pour la téléphonie mobile (99,79% d’après le baromètre des médias, données datant de 2012) et 48,1% des rwandais ont un compte (5.155.697 abonnés, en date de Septembre 2012). Le taux de pénétration d’Internet s’accélère également. Il est passé de moins de 1% en 2000 à 7,1% à la fin de Décembre 2012.

En bref, on peut affirmer la forte prolifération des technologies de l’information et de la communication (TIC) au Rwanda. Raison pour laquelle l’UIT a classé le Rwanda comme le pays d’Afrique le plus dynamique dans le domaine du TIC en 2013. L’analyse des performances de téléchargement haut débit classait également le Rwanda à la 62e place parmi tous les pays du monde entier, et à la première place en Afrique, avec une vitesse de 7,88 Mbps. Par ailleurs, depuis 2013, le pays conduit une campagne d’alphabétisation des TIC avec l’objectif de familiariser les rwandais à l’utilisation des nouvelles technologies.

D’après le RMB (Rwanda Media Barometer), la rapide pénétration de l’Internet et l’engagement évident du président Paul Kagame, de certains haut fonctionnaires de l’Etat, ainsi que la grande majorité des institutions publiques et privées, à l’utilisation des médias sociaux et à la création de sites web pour discuter de questions d’intérêt public avec la population, ont favorisé l’accès des médias aux TIC. Environ 76,4% des professionnels des médias recourent à ces outils pour collecter des informations, bien que beaucoup se plaignent de la faiblesse de leurs mises à jour.

Malgré le fort développement des TIC dans le pays, force est de constater que la plupart des médias ont du mal à suivre le rythme et à s’équiper correctement : pas de connexion Internet ou débit insuffisant, nombre d’enregistreurs très limité, peu d’ordinateurs disponibles[43], faible disponibilité des installations d’impression et de distribution pour les médias imprimés[44]…. Ce caractère restreint de l’équipement constitue notamment un obstacle au développement du métier.

Par ailleurs, la vitesse et la faible couverture de la connexion Internet sont à déplorer.  Ils n’améliorent pas les conditions de collecte et de diffusion des informations. Un exemple : même si le média employeur a les moyens de bien équiper ses journalistes et de les envoyer en reportage pendant plusieurs jours dans les districts locaux, ceux-ci ne pourront pas poster des articles, des vidéos ou des images directement de ces zones reculées. Le média employeur n’en tire ainsi aucun avantage significatif par rapport à ses concurrents. Puis, en matière de coût, l’usage d’Internet est vraiment cher. En guise d’illustration, les frais de diffusion en streaming peuvent atteindre 3 millions de francs rwandais par mois.

Le tableau suivant offre notamment un aperçu du niveau d’accès des medias rwandais aux techniques modernes pour la collecte, la production et la distribution d’informations, selon la perception des professionnels des médias.

 

  Score

 

Percent

(Pourcentage)

Refused to answer

(Refus de réponse)

Don’t know

(Ne sait pas)

Global total

(Total)

Media practitioners have access to ICTs and effectively use them

(Les professionnels des médias ont accès aux TIC et les utilisent efficacement)

3.82

 

76.4%

 

2 0 145
1.4%

 

0.0%

 

 
Media community have access to a wide range of reference , archival material, equipment with appropriate technical facilities

(La communauté des médias a accès à un large éventail de référence, documents d’archives, et équipements avec les installations techniques appropriées)

3.06

 

61.2%

 

5 1 144
3.5%

 

0.7%

 

 
Adequate printing and distribution facilities are available for print media

(Des installations d’impression et de distribution adéquates sont disponibles pour la presse écrite)

 

2.98

 

59.5%

 

5 13 143
3.5%

 

9.1%

 

 
Public, private and community media Use ICTs to generate citizens’ engagement with the media

(Les médias publics, privés et communautaires utilisent les TIC pour générer l’engagement des citoyens avec les médias)

3.48

 

69.6%

 

7 2 143
4.9%

 

1.4%

 

 
Media organisations use multi-platform delivery systems

(Les médias utilisent des systèmes de diffusion multi-plateformes)

3.69

 

73.8%

 

4 2 144
2.8%

 

1.4%

 

 
Overall

(Dans l’ensemble)

3.40

 

68.1

 

   

 

 

Source : Rwanda Media Barometer, Décembre 2012

 

En résumé, l’environnement dans lequel les médias rwandais évoluent peut se décrire ainsi :

  • Un contexte politico-légal où la censure et l’autocensure prévalent, les lois sont décrites en des termes vagues et sont assorties de sanctions sévères en cas d’infraction, forte pression politique sur les médias, enrôlement politique des journalistes.
  • Un contexte économique difficile, surtout pour les médias privés qui ont du mal à s’en sortir en tant qu’entreprise à but lucratif : faible volume de publicité, marché peu concurrentiel, coût de fonctionnement élevé…, prolifération du journalisme à enveloppe brune
  • Un contexte socio-culturel qui commence, mais qui a encore du mal, à évoluer : manque de professionnalisme et faible rémunération des journalistes, mauvaise image de la presse aux yeux de la société, inadéquation entre les formations et les exigences du métier, peu de candidats au métier de journalistes, regain de confiance du public envers les informations publiées par les médias…
  • Un contexte technologique dynamique : développement accru des TIC dans le pays surtout en milieu urbain, engagement du gouvernement en faveur des TIC, faible performance de la connexion Internet, coût élevé d’acquisition et d’utilisation des TIC…

Ce constat offre la possibilité de réaliser une analyse des opportunités, menaces, forces et faiblesses auxquels un média audiovisuel qui souhaite s’implanter au Rwanda va devoir faire face. Ce qui permettra d’identifier des pistes d’évolution futures pour le développement de ce domaine d’activité.

 

  • Analyse SWOT des medias audiovisuels rwandais

En théorie, l’analyse SWOT, de l’anglais Strengths, Weaknesses, Opportunities et Threats, permet d’identifier les facteurs d’influence de l’environnement interne, micro et macro-économique d’une entreprise. Elle permet de déterminer les situations dont elle peut tirer parti, et les problèmes, obstacles ou freins extérieurs qui peuvent nuire à son développement.

 

Les forces et les faiblesses à étudier pour un média 

En pratique, pour le cas d’un média, l’étude des forces et des faiblesses consiste à déterminer son potentiel d’audience, bien plus que les prix de journalisme que celui-ci ait pu gagner. Il s’agit alors de connaître son volume de consommateurs, ou son positionnement sur le marché démographique ciblé. En effet, selon la popularité du média et la situation de son auditoire par rapport à ceux de ses concurrents, les résultats des mesures d’audience et le taux de pénétration du média dans les différentes classes sociales peuvent constituer soit une force, soit une faiblesse.

Les points forts et les points faibles concernent également la situation interne actuelle de l’organisation. Trois éléments sont importants à cet égard : la structure, à savoir la manière dont l’entreprise est organisée, les moyens de production (les ressources humaines et leurs capacités, la qualité de la direction, les ressources techniques et financières…), et les questions culturelles (les attentes, la conviction et les valeurs du personnel…). En guise d’exemples, la présence du média en ligne, les taux de publicité et d’impression élevés, une équipe de rédaction expérimentée et passionnée, une grande base de données de contact et un modèle durable d’exploitation financière… peuvent être cités comme forces ou à défaut comme des points faibles.

L’analyse SWOT requiert ainsi une étude approfondie de la situation financière du média, plus précisément de sa structure de coûts (les coûts d’investissement, de production, de fonctionnement…) et de ses revenus. C’est-ce qui permet en général de déterminer un handicap ou un atout. Il faudra aussi voir si le média en question possède les capacités d’adaptation nécessaire en cas de changement des préférences du public ou encore d’évolutions technologiques dans la profession.

Enfin, cette analyse peut aussi considérer divers éléments associés à la perception du média par le public. Ce peut être la dénomination de la marque par exemple. Le nom de la chaîne pouvant être une force dans la mesure où les consommateurs et les annonceurs peuvent vouloir être associé avec les médias considérés comme des sources d’information et de divertissement d’élite.

Les opportunités et les menaces dans l’industrie des médias

L’analyse des opportunités et des menaces d’un média s’intéresse essentiellement à son environnement et aux facteurs externes qui peuvent influencer sa croissance et son développement. Les opportunités concernent alors les possibilités d’amélioration. Par exemple, les médias peuvent citer un grand marché, l’espace inutilisé dans son bureau, les séminaires de formation à venir, le volume d’informations locales ou nationales à traiter, une économie en croissance, le nombre de concurrents ou les barrières à l’entrée de l’industrie…

Les menaces se penchent en revanche sur les facteurs externes qui peuvent provoquer une baisse d’activité ou nuire au développement du média. Dans ce cadre, les médias peuvent citer l’augmentation de la quantité de contenu gratuit, l’évolution rapide de la technologie et des méthodes de distribution, la diminution de l’intérêt du public, ou les augmentations des coûts de production ou des concurrents…

Le tableau suivant offre un récapitulatif et un léger aperçu de la matrice SWOT d’un média au Rwanda. Il tient compte de l’environnement global de cette industrie dans ce pays. Bien sûr, selon les cas spécifiques de chaque média, il peut en être autrement. C’est ce que démontre l’étude de cas prise en exemple.

 

Essai de matrice SWOT des médias audiovisuels rwandais

  Atouts Handicaps
Internes Presse écrite

–          Fréquence des parutions (quotidien, hebdomadaire, bi-hebdomadaire)

–          Sujets traités

–          Format de publication

–          Nombre de pages publiées

–          Langue de rédaction

–          Accès aux annonces et aux publicités des services gouvernementaux et étatiques pour les publications publiques

 

 

Radio

–          Large base de clientèle

–          Accessibilité du média par toutes les classes sociales

–          Source d’information privilégiée par les rwandais

–          Les rwandais peuvent écouter la radio partout sur le territoire et à n’importe quel moment

–          Accès aux annonces et aux publicités des services gouvernementaux et étatiques pour les stations publiques

 

 

 

 

 

Télévision

–          Forte progression de ce média

–          Peu de concurrence

–          Marché publicitaire oligopole

–          Diffusion de l’information en sons et en images

–          Accès aux annonces et aux publicités des services gouvernementaux et étatiques pour les stations publiques

 

 

 

 

Presse écrite

–          Faible degré d’organisation interne

–          Coût d’impression élevé

–          Nombre d’édition faible

–          Faible base de clientèle (en raison même du taux d’alphabétisation faible dans le pays)

–          Compétences des ressources humaines

–          Motivation des ressources humaines

–          Média visuel, il n’y a pas de son

–          Accès limité aux annonces et publicités des services gouvernementaux et étatiques pour les publications privées.

 

 

Radio

–          Faible degré d’organisation interne

–          Manque de formation des journalistes

–          Manque de professionnalisme

–          Ressources financières insuffisantes

–          Frais généraux élevés

–          Equipements anciens

–          Phénomène du « journalisme à enveloppe brune »

–          Forte concurrence

–          Manque de variété des programmes

–          Les émissions n’ont pas d’images, il n’y a que du son

–          Accès limité aux annonces et publicités des services gouvernementaux et étatiques pour les stations privées.

 

 

Télévision

–          Ancienneté des équipements

–          Faible base de clientèle

–          Charges de production élevées

–          Accès limité aux annonces et publicités des services gouvernementaux et étatiques pour les stations privées.

 

Externes Presse écrite, radio et télévision

 

–          Volume important d’informations à traiter[45]

–          Large possibilité d’extension du marché

–          Le dynamisme économique du pays : possibles retombées positives sur le marché publicitaire

–          Digitalisation de la consommation de l’information

–          Amélioration des formations pour le métier de journaliste

–          Appui financier des bailleurs de fonds pour le développement des capacités des journalistes

–          Fortes barrières à l’entrée pour les radios et la télévision, surtout avec le passage au tout numérique[46].

–          Engagement fort du gouvernement en faveur des TIC

 

Presse écrite, radio et télévision

 

–          Forte pression politique

–          Faible avancée des réformes législatives pour la liberté d’expression

–          Les menaces et les risques de poursuites judiciaires

–          Fragmentation du marché de l’information avec le développement de la radio, la télévision et Internet

–          Tendance à la digitalisation de la consommation des médias

–          Faibles barrières à l’entrée pour la presse écrite.

–          Le faible taux d’électrification du pays

–          Coût élevé de l’exploitation des nouvelles technologies de communication

 

 

L’objectif de l’analyse SWOT étant d’avoir une vue d’ensemble de l’organisation et du marché qu’elle souhaite conquérir, elle facilite la prise de décision stratégique. Elle simplifie notamment le choix entre une offensive de l’expansion pour profiter des opportunités de l’environnement, et une défensive de l’expansion à travers l’amélioration et le développement en interne des points faibles, la défense pour se protéger des différentes menaces de l’environnement, ou encore le repositionnement ou la diversification pour réduire la vulnérabilité de l’entreprise face aux menaces extérieures. Cette matrice constitue ainsi un bon départ pour un projet d’investissement ou d’expansion dans l’industrie des médias au Rwanda. Elle offre quelques pistes pour l’élaboration de la stratégie de pénétration d’un média sur ce marché.

 

Etude de cas : Essai d’analyse SWOT du journal The Rwanda Focus

  Atouts Handicaps
Internes  

–          Publication hebdomadaire

–          Journalisme professionnelle

–          Bonne organisation interne : 6 journalistes, 2 concepteurs graphiques

–          Sujets traités : éducation, développement, économie, social, affaires, politique et les enquêtes journalistiques

–          Format magazine

–          24 pages en moyenne

–          Publication en quadrichromie

–          Positionnement : cible les classes sociales élevées

–          Présence en ligne, mise à jour régulière

–          Taux de publicité intéressant

–          Image sérieuse du journal

 

 

–          Prix de vente élevé

–          Nécessité d’imprimer en Ouganda pour minimiser les coûts

–          Nombre de consommateurs faible

–          Accès limité aux annonces et publicités des services gouvernementaux et étatiques

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Externes –          Digitalisation de l’information

–          Large possibilité d’expansion

–          Possibilité de vendre des publicités en ligne

–          Ouverture du journal à des lecteurs internationaux grâce à sa présence en ligne

–          La globalisation de l’économie

–          Forte barrière à l’entrée pour le format magazine

 

–          La pression politique

–          Les menaces et les risques de poursuites judiciaires

–          Développement de la radio et de la télévision

–          Digitalisation de l’information

 

 

En partant de cette vue d’ensemble des forces, faiblesses, opportunités et menaces auxquels le journal est confronté, il est par exemple possible d’imaginer une stratégie d’expansion par une révision des tarifs de vente, permettant ainsi d’élargir la base de consommation, ou encore d’exploiter davantage la communication en ligne qui, après l’investissement de départ (lors de la création du site), ne génère qu’un faible coût d’exploitation.

En tout cas, cette analyse SWOT de l’industrie des médias au Rwanda révèle que le marché est en plein essor. Malgré la forte pression politique et la rigueur de la règlementation en vigueur, ces menaces restent contournables par la diversité des sujets de thématiques qu’un média peut aborder.

Le cas de la digitalisation de l’information est assez paradoxal car celle-ci peut constituer une opportunité dans la mesure où elle offre la possibilité d’associer les médias traditionnels à Internet, par la création d’un site web au nom du journal, de la station de radio ou de la chaîne de télévision, ou encore par la diffusion directement en ligne des émissions pour les radios et les télévisions. Ce qui aura pour conséquence d’élargir l’auditoire du média, et d’accroître son intérêt aux yeux des annonceurs. En revanche, elle devient une menace en cas d’incapacité de l’entité à s’adapter à cette innovation, pour des raisons financières ou matérielles.

Par ailleurs, la question des compétences et du manque de professionnalisme des journalistes s’altère peu à peu grâce aux améliorations pertinentes des formations. Enfin, le dynamisme économique du pays de ces dernières années n’est pas négligeable. Il apporte de véritables opportunités de développement dans cette industrie, à condition bien sûr d’avoir un plan d’entreprise sérieux et une bonne organisation interne.

 

 

C- Propositions et recommandations pour développer les médias audiovisuels au Rwanda et en Afrique en général

 

Pour pouvoir se développer, les médias rwandais ont besoind’un environnement politique et social favorables, plus précisément d’un environnement exempt de corruption, de pauvreté et de peur. Les journalistes doivent pouvoir jouir de leurs droits[47], et être capables d’exercer leurs métiers en toute sécurité. A cet effet, plusieurs améliorations doivent être effectuées, comme l’instauration d’un système de régulation favorable à la liberté d’expression, l’établissement d’un environnement économique favorable à la promotion des médias, le renforcement des capacités des professionnels des médias, des investissements infrastructurels suffisants pour soutenir le développement des médias.

 

  • Un système de régulation favorable à la liberté d’expression et à la liberté de la presse[48]

L’environnement juridique dans lequel un organe de presse évolue est un facteur crucial pour son développement. En effet, les lois et les règlementations peuvent entraver ou favoriser la croissance des médias, aussi restreindre ou promouvoir des types particuliers de contenu. Un régime juridique libéral et l’autonomisation permettra aux médias de traiter librement de tous les sujets, sans crainte de sanction légale.

Afin d’assurer un meilleur futur pour l’industrie de l’information et des médias au Rwanda, il est plus qu’essentiel que les lois sur la diffamation et les insultes soient abrogées, ou du moins, que des définitions précises soient attribuées aux crimes qui y sont apparentées. Il en est de même pour les lois sur le « divisionnisme » et la promotion des conflits ethniques. Ainsi, les journalistes seront en mesure de distinguer clairement les limites entre ce qu’ils peuvent diffuser ou non, et de ce fait pourront exercer leur travail librement et d’un œil critique. Les lois sur la liberté d’information et l’accès aux informations doivent entre autres être mises à profit et appliquées pour permettre aux journalistes d’enquêter librement, et aux médias de remplir leur rôle vital de surveillance, de collecte et de diffusion de l’information.

Certes, ces dernières années, un système de régulation des professionnels des médias commence à prendre forme au Rwanda à travers le Haut conseil des médias (MHC) et la Commission rwandaise des médias (RMC), le cadre juridique favorise également la liberté d’expression et la liberté de la presse. Néanmoins, on constate un manque de sensibilisation sur les droits et règlementations applicables aux médias. De nombreux abus sont encore constatés, ce qui a pour conséquence un degré élevé d’autocensure des professionnels par crainte des conséquences.

En tant qu’organe d’autorégulation dévoué à la protection des journalistes, la Commission rwandaise des médias (RMC) se doit ainsi d’assurer la sécurité des journalistes dans l’exercice de leurs professions. Elle doit pouvoir enquêter sur les déclarations de harcèlement des journalistes, et lorsque cela est nécessaire, en référer au gouvernement pour prendre des mesures complémentaires.

Enfin, du fait que la plupart des professionnels des médias en fonction au Rwanda n’ont pas suivi de formation en journalisme et ont appris leur métier sur le tas[49], il semble également important que ces organes d’autorégulation (MHC et RMC) organisent des programmes intensifs de sensibilisation pour que tous les professionnels de cette industrie soient au courant des lois et des textes sur la liberté d’expression et la liberté de presse.

 

  • Un environnement économique favorable au développement des médias

Ces dernières années, plusieurs initiatives du gouvernement ont été mises en œuvre pour la promotion des médias au Rwanda. Par exemple, la présidence a offert une imprimerie aux médias. Un Fonds commun pour le soutien des médias a également été mis en place. A l’instar d’un plan Marshall, ce fonds sera destiné à ressusciter et à soutenir le développement des médias à travers des appuis financiers et techniques. Un grand centre des médias est aussi en construction à Kigali. Ce sera un lieu pour des expositions, des bureaux, des studios individuels, des installations de transmission… D’autre part, le Ministère de l’information prévoit de développer des systèmes organisationnels pour faciliter la distribution de journaux, et des programmes de formation pour les gestionnaires des médias.

En somme, l’Etat fait des efforts pour que les opérateurs économiques investissent dans l’industrie des médias. Dans cette optique, le gouvernement prévoit d’appliquer des incitations fiscales, telles que les allégements fiscaux, ou encore des taux d’imposition réduits pour l’importation d’équipements et de matières premières utilisées par le secteur des médias. Des subventions, des facilitations de prêts, des prises de participation et de garanties sont également envisagées.

Quoi qu’il en soit, ces solutions semblent inadéquates face aux réels problèmes qui persistent, à savoir la discrimination du traitement entre les organes publics et privées. Cette différence est perceptible en matière d’accès à l’information, de concentration de la propriété des médias[50], d’attribution des fréquences, et d’accès aux annonces et publicités des organes gouvernementaux et étatiques.

Pour ce qui concerne l’accès à l’information par exemple, (21,1%) des journalistes travaillant pour des organes privés déclarent avoir des difficultés à collecter des informations auprès des autorités publiques[51]. Ce handicap n’est pourtant pas sans impact sur l’image et la notoriété du média en question, et de ce fait sur l’intérêt des annonceurs à son égard. Des efforts restent de ce fait à réaliser sur ce point afin de permettre à tous types de média d’être compétitif.

En ce qui concerne l’attribution des fréquences[52] de radiodiffusion, aucune mesure spécifique n’est destinée à favoriser tel ou tel type de support. En revanche, même si la loi simplifie les démarches de création d’un nouveau média[53], et n’exige aucune redevance ou n’y impose aucune condition restrictive, les exigences techniques à respecter pour pouvoir bénéficier d’une licence sont très élevées, constituant de fortes barrières à l’entrée pour ceux qui projettent d’investir dans les médias.

En effet, depuis 2013, l’Autorité rwandaise de régulation des services d’utilité publique (RURA) exige l’adoption de la technologie numérique. Celle-ci nécessite pourtant d’énormes innovations y compris la convergence de la radiodiffusion vers le multimédia, les données et les services de tél��phonie. Par ailleurs, pour l’importation des équipements de diffusion, en plus de l’exigence de conformité des matériels aux normes internationales[54], il faut aussi se soumettre à un certain nombre de contrôles. Qui plus est, les médias doivent s’acquitter de redevances de possession et d’exploitation de la licence, qui est calculé par un pourcentage fixe de son chiffre d’affaires annuel brut.

Quant à la délivrance de licences pour la télédiffusion, la priorité est cédée aux programmes qui diffusent du contenu local à hauteur de 20% du Free to Air program. Le RURA attribue ensuite les fréquences restantes aux enchères. Trois types de licences sont notamment disponibles : pour la distribution national, la distribution régional, et la licence de distribution communautaire.

Ces coûts étant pris en charges par l’organe gouvernemental pour les médias publics, les organes privés font face, si on peut le décrire ainsi, à une concurrence déloyale.

Enfin, en ce qui concerne l’accès au marché publicitaire, certes, aucune politique écrite n’existe en matière de régulation des publicités étatiques, mais force est en revanche de constater qu’en pratique, il y a une grande discrimination entre les médias appartenant à l’État et les organes privés.

D’une part, les annonceurs privés sont encore trop peu nombreux. L’absence d’un auditoire ou d’un lectorat locale important réduit l’intérêt des annonceurs pour la communication médiatique. Ceci s’explique par le faible impact que cela aurait sur leurs affaires, ce qui signifie un faible revenu pour les médias, et par conséquent une faible capacité à améliorer leur contenu et à devenir des professionnels. Le tout créant un cercle vicieux qui emprisonne la plupart des médias privés.

D’autre part, le gouvernement reste le plus grand pourvoyeur de publicité. Les médias détenus par l’Etat sont privilégiés pour leur diffusion, pénalisant ainsi les médias privés. D’après certains professionnels, cette discrimination est même utilisée comme un moyen d’affaiblir les organes de presse privés.

En somme, afin de favoriser l’émergence des médias privés, l’administration doit privilégier le partenariat public privé en ce qui concerne l’attribution des marchés publicitaires. Une distribution plus équitable de la diffusion des annonces est préconisée. Par ailleurs, des lois anti-monopole doivent être adoptées pour éviter les concentrations excessives de la propriété des médias. Enfin, le traitement équitable des médias privés et publics permettrait de mettre en place une concurrence juste et loyale, et ainsi de favoriser le développement de cette industrie.

 

  • Le renforcement des capacités des professionnels des médias

Le niveau de compétence des professionnels de l’industrie constitue l’un des problèmes majeurs des médias audiovisuels du Rwanda. Selon le RMB, l’industrie des médias rwandais employait en 2012 quelques 572 individus, comprenant les journalistes, les reporters, les correspondants, les commentateurs, les speakers et environ 75 rédacteurs en chef et équipe de rédaction. Près de 50% de ces professionnels ont appris leur travail sur le tas, et beaucoup n’ont même pas suivi des études universitaires. Encore, pour ceux qui ont reçu une formation, l’inadéquation entre le cursus et les réalités du métier est flagrante. Enfin, la plupart des journalistes qualifiés manquent de motivation en raison des faibles rémunérations qu’ils perçoivent. En conséquence, les professionnels des médias manquent en majorité de qualifications, ce qui a une incidence sur le professionnalisme de l’industrie.

 

Le tableau suivant offre notamment un aperçu des principales thématiques abordées dans les cours académiques.

 
Frequency
Percent
Yes        
No Total Yes No Total
Courses that cover issues of media law, ethics, regulation and public policy

(Cours qui couvrent les questions du droit des médias, l’éthique, la réglementation et les politiques publiques)

102 43 145 70.3 29.7 100
Courses that build awareness of the role of media in promoting democracy and human rights

(Cours de sensibilisation au rôle des médias dans la promotion de la démocratie et des droits humains)

 

86 59 145 59.3 40.7 100
Courses to equip students with the skills for independent thought and analysis

(Cours de renforcement des compétences de réflexion et d’analyse indépendante)

85 59 144 59.0 41.0 100
Courses that contain essential disciplinary knowledge in the subject areas journalists expected to be covered

(Cours de connaissance générale sur les disciplines et les domaines que les journalistes seront amenés à couvrir)

103 41 144 71.5 28.5 100
Courses on media literacy geared to provide modern communications environment

(Cours sur les médias et les techniques de communication modernes)

76 68 144 52.8 47.2 100

Source : Rwanda Media Barometer

Le tableau suivant révèle entre autres les principales thématiques de formations suivies par les professionnels des médias.

 
Frequency
Percent
Yes        
No Total Yes No Total
Journalism ethics

(Ethique du journalisme)

117 28 145 80.7 19.3 100.0
Risk awareness and first aid

(La conscience du risque et les premiers secours)

 

63 82 145 43.4 56.6 100.0
Awareness raising of media’s role in fostering democracy and human rights (Sensibilisation sur les rôles des médias dans la promotion de la démocratie et des droits humains) 86 56 142 60.6 39.4 100.0
Investigative reporting skills and related disciplinary knowledge

(Techniques de reportage d’investigation et les connaissances disciplinaires connexes)

65 80 145 44.8 55.2 100.0
Skills to report the perspectives of marginalized groups

(Techniques de reportage des points de vue des groupes marginalisés)

72 73 145 49.7 50.3 100.0
Genocide and its ideology

(Génocide et son idéologie)

72 72 144 50.0 50.0 100.0
Gender and development

(Genre et développement)

75 70 145 51.7 48.3 100.0

Source : Rwanda Media Barometer

D’après ces tableaux, l’éthique du journalisme et le rôle des médias pour la promotion de la démocratie sont les sujets sur lesquels la grande majorité des professionnels des médias ont été formés, soit au cours de leurs cursus académiques soit dans le cadre de leurs fonctions. L’importance de cette thématique est justifiée en raison du contexte post-génocide du pays, et aussi à cause du fait que la majorité des journalistes ont entrepris cette carrière sans formation académique et professionnelle préalable[55]. On constate cependant un manque évident de formation autour des nouvelles technologies, alors que les compétences informatiques se révèlent être une condition indispensable pour tenir dans l’environnement médiatique moderne. Il en est de même pour les techniques d’investigation et d’analyses journalistiques pour lesquelles moins de la moitié des professionnels en exercice et à peine un peu plus de la moitié des étudiants ont été formés.

Afin de remédier à cela, un renforcement des compétences des professionnels des médias est plus que nécessaire. Cela peut se faire entre autres par le biais de formations en interne, qui présente l’avantage d’être plus disponible, ou à travers des programmes d’échanges locaux, régionaux ou internationaux. La révision des programmes de formation et leur mise en adéquation avec les besoins du marché actuel est aussi plus que préconisé. La mise en œuvre de ces solutions requiert notamment la volonté des médias employeurs, la participation des organes de régulation (MHC et RMC) et des établissements d’enseignement supérieur.

Là encore, les médias privés et publics doivent être mis sur un même pied d’égalité. En effet, dans le RMB, il apparaît que les médias n’ont pas accès aux mêmes opportunités. Par exemple, certains sont invités à des formations, des séminaires et des conférences, tandis que d’autres ne le sont pas. En cas de disponibilités de bourses de formation, les critères de sélection ne reposent pas uniquement sur le profil des candidats, mais prennent également en considération le type et le caractère privé ou public du média employeur. Les journalistes des médias publics étant généralement privilégiés alors que les organes privés ont autant de difficultés financières pour survivre, et encore plus pour financer les formations de leurs salariés. Bien sûr, la discrimination n’est pas partout. Les formations octroyées par le Centre de presse autour des outils liés aux TIC sont par exemple accessibles à tous. En outre, le RMB rapporte que celles-ci sont effectuées d’une manière désordonnée.

Le tableau suivant révèle notamment les points clés sur lesquels les médias rwandais doivent s’améliorer pour être à la hauteur des normes de qualité professionnelles, selon la perception des citoyens et des sociétés civiles (Sources : Rwanda Media Barometer).

Ordinary people’s perceptions

(Selon la perception de simples citoyens)

Score

 

Percent Don’t know Global total
The way that public media cover and report news is fair and objective

(La façon dont les médias publics couvrent et rapportent les nouvelles est juste et objective)

3.81

 

76.3%

 

157

 

2592

 

6.1%

 

The way that private media cover and report news is fair and objective

(La façon dont les médias privés couvrent et rapportent les nouvelles est juste et objective)

3.43

 

68.6%

 

420 2586
16.2%
Public journalists cover key events and issues

(Les journalistes publics couvrent les événements et les questions clés)

2.41

 

48.3%

 

203
2592

 

7.8%

 

 

Private journalists cover key events and issues

(Les journalistes privés couvrent les événements et les questions clés)

 

2.31

 

46.3%
479
2582

 

18.6%

 

Public media report objectively on events/functions and other news of all political parties

(Les médias publics rapportent de manière objective les événements / fonctions et autres nouvelles de tous les partis politiques)

3.39

 

67.7%

 

568  
2576
22.0%

 

Private media report objectively on events/functions and other news of all political parties

(Les médias privés rapportent de manière objective les événements / fonctions et autres nouvelles de tous les partis politiques)

3.18

 

63.7%

 

743
2574

 

28.9%

 

 

Public media programming is balanced as far as entertainment and news and information are concerned

(La programmation des médias publics est équilibrée en ce qui concerne les divertissements, les nouvelles et les informations)

3.29

 

65.7%

 

387

 

2570

 

15.1%

 

Private media programming is balanced as far as entertainment and news and information are concerned

(La programmation des médias privés est équilibrée en ce qui concerne les divertissements, les nouvelles et les informations)

3.07

 

61.4%

 

554

 

2563

 

21.6%

 

Overall

(Dans l’ensemble)

3.1

 

62.25%

 

   

 

D’après ce premier tableau, les médias rwandais remplissent globalement bien leurs principales fonctions qui sont de divertir, d’éduquer et d’informer. De l’avis de la population, c’est surtout en matière de collecte et de diffusion des informations clés qui touchent la société rwandaise que les médias, aussi bien publics que privés, doivent faire des efforts. Ce tableau révèle par ailleurs un léger retard des organes privés par rapport aux publics dans tous les domaines. Raison pour laquelle, ceux-ci ont plus besoin de renforcement de leurs capacités que leurs collègues des publics.

 

CSO’s perceptions

(Selon la perception des sociétés civiles)

Score

 

Percent Don’t know Global total
The way that public media cover and report news is fair and objective

(La façon dont les médias publics couvrent et rapportent les nouvelles est juste et objective)

3.54 70.7% 9 151
6.0%

 

The way that private media cover and report news is fair and objective

(La façon dont les médias privés couvrent et rapportent les nouvelles est juste et objective)

3.32 66.3% 11 147
7,5%
Public journalists cover key events and issues

(Les journalistes publics couvrent les événements et les questions clés)

2.91 58.3% 15 164
9,1%
 

Private journalists cover key events and issues

(Les journalistes privés couvrent les événements et les questions clés)

2.48 49.7% 16 164
11.6%

 

Public media report objectively on events/functions and other news of all political parties

(Les médias publics rapportent de manière objective les événements / fonctions et autres nouvelles de tous les partis politiques)

3.24 64.8% 27 164
16.5%

 

Private media report objectively on events/functions and other news of all political parties

(Les médias privés rapportent de manière objective les événements / fonctions et autres nouvelles de tous les partis politiques)

3.01 60.2% 28 164
19.6%

 

 

Public media programming is balanced as far as entertainment and news and information are concerned

(La programmation des médias publics est équilibrée en ce qui concerne les divertissements, les nouvelles et les informations)

3.50 70.1% 17 164
10.4%
Private media programming is balanced as far as entertainment and news and information are concerned

(La programmation des médias privés est équilibrée en ce qui concerne les divertissements, les nouvelles et les informations)

3.23 64.7% 26 163
15.9%
Overall

(Dans l’ensemble)

3.15 63.1%    

Ce second tableau confirme les faiblesses des médias rwandais en matière de collecte et de diffusion des informations clés qui touchent la société rwandaise. Effectivement, l’avis des sociétés civiles au Rwanda rejoint celui des simples citoyens en ce qui concerne les questions qui nécessitent une amélioration de la part des médias.

 

  • Mettre en place des capacités infrastructurelles suffisantes pour soutenir le développement des médias

En matière de capacités infrastructurelles, les plus grands obstacles pour le développement des médias rwandais demeurent le niveau d’accessibilité des médias aux techniques et équipements modernes pour la collecte, la production et la distribution de l’information, et la difficulté pour les citoyens d’accéder aux médias audiovisuels, surtout en ce qui concerne la télédiffusion. Ces questions sont cependant paradoxales, car l’origine de ces problèmes est à la base économique.

En effet, en matière d’investissement infrastructurel, on peut dire que le gouvernement rwandais fait des efforts et les avancées sont notables. Le taux de pénétration de l’Internet, du téléphone mobile et des nouvelles technologies évolue rapidement. Bien sûr, il reste encore beaucoup à faire pour atteindre un niveau optimal. En revanche, c’est leur coût d’exploitation qui pose problème. Le recours aux équipements technologiques est tout simplement financièrement impossible pour beaucoup de médias.

Pour remédier à cela, l’intervention de l’Etat est souhaitable afin d’alléger les charges qui incombent aux médias. Par exemple, par l’adoption de dispositifs d’allègement fiscal, ou encore par un investissement public dans les infrastructures locales et ainsi contribuer à la baisse des coûts de production (une imprimerie pour faciliter l’impression et la distribution de la presse écrite…).

Pour le cas de la télédiffusion en particulier, une action à deux niveaux permettrait de populariser rapidement ce type de média. D’une part, promouvoir la télédiffusion par la multiplication du nombre de stations de télévision, et d’autre part dynamiser l’électrification du pays pour permettre à tous les citoyens d’avoir accès à ce média.

En effet, du fait de la cherté d’un poste de télévision qui le rend encore peu accessible pour la plupart des ménages, de l’absence de choix et du manque évident de concurrence sur cette activité, l’intérêt des rwandais pour la télévision est encore au plus bas. Une augmentation de l’offre permettrait alors de stimuler la demande, c’est-à-dire l’acquisition de poste de télévision par les ménages, et par conséquent d’assurer le développement de ce média.

Dans cette optique, l’électrification du pays est bien sûr un préalable indispensable. En effet, du point de vue énergétique, le Rwanda est encore peu développé. En 2008, seulement 6 % des 10 millions de Rwandais avaient l’électricité chez eux[56]. En revanche, le gouvernement réalise de nombreux investissements et le pays devrait pouvoir bientôt rattraper son retard. En effet, de 2009 à 2012, les nouveaux raccordements ont quasiment triplé, et à l’horizon 2017, le pays compte bien porter son taux d’électrification rurale à 70% contre 20% en 2015. De telles avancées devraient permettre d’élargir la base de clientèle de la télévision, et assurer un futur prometteur pour ce média.

En tout cas, pour le cas du Rwanda en particulier, même avec le poids d’une part de responsabilité des médias dans le massacre de 1994 et l’héritage que cela a laissé sur ce secteur, on peut en conclure que l’industrie des médias audiovisuels fait face à un futur assez prometteur. C’est une activité qui vaut la peine d’être développé étant donné la base de clientèle encore large, et le dynamisme économique du pays notamment en matière d’électrification, de démocratisation des TIC, et surtout sa croissance économique soutenue de ces dernières décennies. De multiples efforts restent cependant à effectuer notamment en matière de liberté d’expression et de liberté de la presse, de renforcement des compétences des professionnels des médias, et d’égalité de traitement des médias publics et privés aussi bien en ce qui concerne l’accès à l’information, la distribution du marché publicitaire, que la formation des professionnels des médias. Des mesures incitatives sont également souhaitables pour dynamiser cette industrie et convaincre les opérateurs économiques d’investir dans ce secteur (facilitation de l’attribution des fréquences, simplification des démarches d’importation des équipements, allègements fiscaux…).

  • Benchmark avec les médias audiovisuels d’autres pays d’Afrique

Afin d’avoir une vue globale de la situation en Afrique, et pour pouvoir émettre des opinions sur les opportunités de développement des médias audiovisuels sur le continent, un benchmark externe du cas du Rwanda semble intéressant. Pour ce faire, sa situation sera comparée avec ce qui se passe dans d’autres pays choisis au hasard, qui sont le Cameroun et le Sénégal.

  • Les médias Camerounais en bref

Contexte général   

Pour le cas du Cameroun, on peut affirmer que le pays présente une pluralité médiatique impressionnante : environ 500 journaux et magazines, une centaine de stations de radio, et un peu plus d’une dizaine de chaînes de télévision, et 10 plateformes multimédias y sont répertoriés[57].

En ce qui concerne l’accessibilité des médias, la presse écrite est surtout disponible dans les centres urbains. Les publications comptent entre 10 et 12 pages en moyenne, sauf pour le journal gouvernemental Cameroon Tribute qui propose 32 pages. Le journal s’achète à 400 CFA (environ 1USD), ce qui est un prix très élevé, même pour les plus aisés.

En outre, même s’il existe un large panel de radiodiffuseur et de télédiffuseur au Cameroun, seul la radio gouvernementale Cameroun Radio Television (CRTV) couvre la totalité du territoire. En raison de défaillance des transmetteurs, la réception de ce média est souvent coupée dans les parties les plus reculées du pays. Les stations privées se développent majoritairement en milieu urbain. Beaucoup de camerounais sont aussi connectés à des chaînes de télévision à péage en zones urbaines. Par ailleurs, des radios et des chaînes de télévision communautaires émettent dans les petites villes et les villages. Quoi qu’il en soit, la radio reste le média le plus populaire du fait du prix plus abordable d’un récepteur. Les coupures de courant restent cependant un obstacle au développement des médias, surtout en zone rurale.

Pour le cas d’Internet, jusqu’ici, ce média ne s’est pas encore imposé comme la première source d’information au Cameroun, mais présente un taux de pénétration qui évolue rapidement[58].

 

Contexte politico-légal

Du point de vue juridique, la Constitution du Cameroun garantit la liberté d’expression et de la presse. Le préambule de sa Constitution de 1996 stipule clairement que : « La liberté de communication, d’expression, de la presse, de regroupement, et de syndicalisme, ainsi que le droit de grève doivent être garantis en accord avec les conditions fixées par la loi. » Qui plus est, en 1990, le pays a ratifié les « lois de liberté ». Celles-ci déterminent le cadre de la liberté d’expression et de presse au Cameroun en accord avec sa Constitution. Cette loi, dans ces articles 6 et 36.1 garantit notamment la gratuité des opérations d’impression et de médias audiovisuels.

La réalité en est pourtant toute autre, car il est difficile de profiter de ce droit en toute sécurité. En général, les officiels trouvent toujours une échappatoire légale pour réduire au silence les voix anti-gouvernementales. En guise d’exemples, officiellement, il n’y a pas de censure administrative au Cameroun. Pourtant, le texte sur la Communication Sociale, en ces articles 13 et 14, oblige les éditeurs à faire parvenir « dans les deux heures après publication » deux copies de chaque publication au procureur de l’Etat et à l’autorité administrative locale pour contrôle.

Pareil, l’anonymat des sources est garanti par la loi de la Communication Sociale, cependant les journalistes peuvent être emprisonnés s’ils présentent à la Cour des documents administratifs comme pièces à convictions car de tels documents peuvent être considérés comme allant à l’encontre des lois administratives de secret professionnel et de confidentialité.

Autre exemple : depuis 2000, les Camerounais sont autorisés à s’exprimer et sont libres d’émettre des critiques visant les actions du gouvernement et des responsables de l’administration publique à travers les talkshows radiophoniques et les débats télévisés. Malheureusement, ces critiques sont soumis à la « tolérance administrative ». Sous ce terme vague, l’autorité publique s’approprie le droit d’interdire ou de fermer toute publication, radio, chaine de télévision, mais aussi d’arrêter tout citoyen qui fait publiquement des commentaires considérés comme diffamatoires ou portant atteintes à l’ordre publique.

En somme, le recours à l’intimidation est répandu au Cameroun[59]. Ce qui pousse les médias à l’autocensure. Les cas suivants le confirment : en février 2008, la station Equinoxe Radio et la chaîne de télévision Equinox ont été suspendues pour avoir programmé des émissions traitant de tensions sociales qui ont débouché sur des émeutes. Le Ministre de la Communication avait alors prétexté que ces stations n’avaient pas de licences en règle. La même année, des forces de l’ordre ont envahi les locaux de Magic FM, une station de radio de Yaoundé. Celle-ci a été accusée « d’avoir laissé passer en direct des commentaires anti-gouvernementaux »[60].

 

Contexte économique

Grosso modo, l’industrie des médias camerounais se caractérise par une forte concentration des propriétés des médias. En effet, malgré les lois qui interdisent cette pratique[61], le marché est monopolisé par quelques personnalités qui utilisent le nom de leurs connaissances et de leurs familles pour obtenir une licence.

Les média camerounais font également face à de lourdes charges d’investissement, de production et de fonctionnement. En guise d’illustration, les coûts de distribution d’un journal privé atteignent 44% de son prix de revient. De même, en raison des taxes punitives et des charges douanières élevées sur l’importation de papier auxquels les maisons d’impression sont souvent soumises, le coût d’impression est élevé. Entre autres, les coûts des licences sont aussi prohibitifs[62].

Face à cela, les médias font pourtant face à un marché publicitaire restreint[63]. A cause d’un secteur privé peu développé, seulement une poignée de sociétés font régulièrement de la publicité dans les médias. L’Etat demeure le plus gros annonceur au Cameroun à travers les institutions gouvernementales et les ministères. Les médias audiovisuels manquent aussi d’intérêt aux yeux des publicitaires qui craignent d’être associés à leur attitude critique vis-à-vis de l’Etat. Qui plus est, les autorités étatiques profitent de cette position avantageuse pour contrôler le contenu des médias. Il y est notamment d’usage de distribuer la publicité dans les médias « partenaires » et jamais dans les organes « non-partenaire ».

Pour ce qui est de la rémunération des journalistes, un accord d’intérêt général signé par les syndicats et les propriétaires des médias établit une échelle de rémunération pour les journalistes. La plupart des médias privés ne sont cependant pas en mesure d’offrir ces salaires. Seuls les organes publics et quelques médias privés proposent de bons salaires. Certains employeurs vont même jusqu’à ne pas payer les journalistes, et les encouragent ainsi à demander des allocations de transport auprès des sources d’actualités et des organisateurs d’évènements. En plus, les conditions de travail sont précaires. Les professionnels rapportent également un manque d’équipement, d’espace de travail, ainsi que des problèmes de moyens de transport et d’assurance médicale.

De ces faits, la corruption est devenue une pratique courante au Cameroun. De plus en plus de journalistes mènent  des investigations pour dénoncer les mauvaises conduites de personnalités publiques. Ils approchent ensuite les individus ou groupes concernés pour les informer des reportages qu’ils sont sur le point de publier afin de négocier un accord financier pour « étouffer ». La plupart du temps, les médias évitent également de critiquer les publicitaires par peur de les voir rompre leur contrat de publicité.

 

Contexte social

En matière de qualifications des professionnels des médias, on peut dire qu’il existe deux générations de journalistes au Cameroun. Celle d’avant 2002, avant laquelle la loi camerounaise en matière de communication n’exigeait aucun niveau d’études ou de formation de la part des professionnels de l’industrie des médias[64], et celle d’après 2002, depuis laquelle un décret redéfinit les conditions d’obtention de carte de presse reconnue par l’Etat. En effet, pour accéder au journalisme, les postulants doivent désormais détenir un diplôme de niveau Bacc + 2 au moins (Deug ou une Licence en journalisme). L’obtention d’une Licence universitaire dans un autre filière permet également d’embrasser le métier à condition de la cumuler à deux ans d’expérience professionnelle.

Quoi qu’il en soit, il est constaté que certains journalistes camerounais font vraiment des efforts considérables pour être professionnels et proposer des reportages fiables et précis. En revanche, le marché regorge aussi de journaux à scandale. Les reportages biaisés et les histoires « montées » de toutes pièces ne sont pas rares.

Quant à l’attrait du métier et aux cursus pour y accéder, on peut dire que l’industrie des médias séduit les jeunes et que la qualité de la formation est appréciable. Le Cameroun possède notamment deux institutions de journalisme qui proposent des cursus jusqu’au niveau du Master, et un bon nombre d’institutions privées offrent des cours de niveau Deug.

Le centre de formation (CFPA), affilié au diffuseur d’Etat CRTV, propose par ailleurs des formations de haut niveau pour tout candidat intéressé, même ceux issus d’autres sociétés de médias. De nombreuses formations clé en main, sous forme de séminaires et de cours intensifs, sont aussi disponibles. Et, il est aussi d’usage dans les médias d’organiser des formations en interne pour le renforcement de capacités de leurs employés.

 

Contexte technologique

Du point de vue technologique, le Cameroun met en œuvre une politique cohérente pour le développement des TIC. L’Agence Nationale de la Communication et des Technologies de l’Information (ANTIC) a pour rôle de promouvoir ce secteur à l’échelle nationale. Des efforts considérables sont entrepris pour permettre au grand nombre d’accéder à l’information. Par exemple, le gouvernement investit lourdement dans le réseau en fibre optique. Des dispositifs juridiques ont été adoptés pour imposer la couverture en réseau de téléphonie mobile de tout le territoire, même les zones les plus reculées du pays. Des « Télécentres communautaires » ont également été instaurés par  le Ministère des Postes et des Télécommunications afin de permettre aux populations des zones les plus isolées d’accéder à Internet et aux téléphones mobiles. Des milliers de femmes et membres de communautés marginalisées comme les Pygmées sont entre autres formées à l’usage de l’informatique.

Il en découle que les nouveaux médias connaissent grand essor au Cameroun, plus particulièrement les téléphones mobiles qui permettent auxcitoyens d’avoir un accès supplémentaire à l’information[65]). Les services Internet deviennent de plus en plus accessibles et les réseaux d’accès libre sont en expansion, ce qui laisse espoir aux régions les plus reculées d’être un jour connectées à Internet. Néanmoins, jusqu’ici, seule une petite proportion de la population camerounaise recourt aux TIC de manière optimale. Cela s’explique par l’illettrisme qui prévaut encore dans le pays et les coûts encore onéreux de l’équipement, des accessoires et des services.

 

 

 

  • Les médias Sénégalais en bref

Contexte général

Il faut noter que le Sénégal sort d’une crise politique relative aux élections présidentielles de 2012, durant laquelle des morts, des blessés, des victimes de torture et de détention arbitraire ou encore de stigmatisation ont été rapportées. Son paysage médiatique comprend une vingtaine de journaux, une dizaine de chaîne de télévision et une cinquantaine de station de radios. Cette dernière reste le véritable média de masse avec la prolifération et le développement considérable de radios communautaires.

En ce qui concerne l’accessibilité des médias, pour la presse écrite, on peut dire que leurs coûts de production sont abordables, permettant ainsi d’offrir de meilleurs prix au lectorat. Malgré cela, les gens n’ont pas les moyens d’acheter les journaux. Qui plus est, le taux élevé de l’analphabétisme[66] limite le développement des organes de presse écrite.

Pour le cas des radios et télévisions, seule la Radio Télévision Sénégalaise (RTS) émet au niveau territorial, les stations privées ne couvrent que des localités limitées. La continuité et la permanence du service restent en revanche des défis majeurs communs. En effet, dans de nombreuses zones géographiques, tout ou partie des radios et télévisions ne sont disponibles que par intermittence.

Pour l’accessibilité du matériel de réception, le coût d’un récepteur radio ou de télévision est qualifié d’abordable. Le niveau d’équipement des ménages est relativement élevé[67].

 

Contexte politico-légal

Comme au Cameroun et au Rwanda, la Constitution Sénégalaise garantit la liberté d’expression en son article 8, aux termes duquel : « Chacun a le droit d’exprimer et de diffuser librement ses opinions par la parole, la plume, l’image, la marche pacifique, pourvu que l’exercice de ces droits ne porte atteinte ni à l’honneur et à la considération d’autrui, ni à l’ordre public».

Le régime de la presse est défini par la loi 96-04 du 22 février 1996 relative aux organes de communication sociale qui stipule que « toute personne physique ou morale peut créer et publier des organes de communication sociale et en être propriétaire, à la condition que les journalistes, ainsi que les techniciens de la communication sociale qui y travaillent soient en majorité de nationalité sénégalaise. »

Cette liberté d’expression et de la presse reste par contre encadrée voire limitée subtilement par d’autres textes telles le Code Pénal, les textes portant création du CNRA, ou encore les dispositions sur la cybercriminalité.

En guise d’exemple, la loi protège théoriquement les sources d’information[68], mais en pratique, les juges contournent ce dispositif par des inculpations de recel de document administratif et de diffamation. En outre, certaines dispositions législatives relatives à « l’injure » et à l’« offense » au chef d’État sont encore applicables et tiennent une place importante. Le code pénal sénégalais ne donne cependant aucune définition claire de ces termes, mais en laisse l’appréciation au juge avec tous les dangers que cela comporte pour celui qui exprime son opinion. Il en résulte que les médias pratiquent davantage l’autocensure au lieu de profiter de la liberté d’expression.

L’ingérence de la politique sur l’industrie du média se manifeste également par la mise en place du Conseil National de Régulation de l’Audiovisuel (CNRA). Celle-ci s’est faite sans considération préalable des opinions des professionnels des médias, ni de la société civile. Bien que le statut de cette autorité administrative la déclare comme indépendante, il est difficile d’y croire étant donné que la nomination de son conseil d’administration se fait par décret présidentiel sans consultation publique ouverte.

La mainmise de la politique sur les médias se traduit également à travers les procédures d’octroi de fréquences de radio et télévision. Celle-ci incombe notamment au ministère de la Communication en consultation avec la Présidence de la République et se décide « à la tête du client et selon les circonstances »[69]. A la différence des pays vus précédemment, il est clair qu’au Sénégal, l’attribution des fréquences ne fait pas l’objet d’un appel d’offres.

 

Contexte économique

Du point de vue économique, les médias Sénégalais bénéficient d’une aide financière de l’Etat. En 2013, cette subvention à la presse s’élevait à 700 millions CFA. Cette subvention n’est cependant pas répartie de manière équitable. Certains médias, comme le quotidien Le Soleil, qui compte 200 agents, reçoit par exemple moins d’aide que d’autres organes de moindre importance. L’industrie des médias bénéficient également de dispositifs pour alléger leurs charges d’exploitation (comme la réduction des redevances sur l’attribution des fréquences pour les radios et les télévisions[70]par exemple).

En ce qui concerne le marché publicitaire, aucune étude sérieuse ne donne un aperçu de la taille du marché publicitaire au Sénégal[71]. Mais, comme au Cameroun et au Rwanda, l’Etat reste le plus grand pourvoyeur de publicité. Leur diffusion est en majeure partie attribuée aux médias publics. Les organes privés rencontrent ainsi des difficultés à s’attribuer une part de ce marché. Qui plus est, avec la forte concurrence qui règne entre les médias, la vente d’espace publicitaire couvre à peine les coûts de fonctionnement. S’ajoutant à cela, même quand une société reçoit une bonne part du marché, il est souvent difficile de recouvrer les créances vis-à-vis des annonceurs.

Pour la rémunération et les conditions générales d’emplois, on peut dire que les professionnels des médias Sénégalais sont bien mieux lotis que leurs collègues camerounais et rwandais. Le montant de leurs salaires sont déterminés par la Convention collective liant les journalistes et les techniciens de la communication sociale. D’après cette convention, un journaliste professionnel débutant doit percevoir à peu près 200 000 CFA (4000 dollars américains). Par rapport à ce que gagnent les fonctionnaires, c’est l’équivalent du salaire de la catégorie de hiérarchie A.

Par contre, en pratique, un bon nombre d’entreprises de presse (60%) ne respectent pas les dispositions de cette convention collective, en raison notamment de la situation économique précaire qui les empêche de respecter les minima sociaux. Ce qui favorise la corruption dans le milieu des médias. Celle-ci se manifeste par la pratique du « per diem », c’est-à-dire des gratifications accordées aux journalistes pour la couverture des évènements, souvent sous prétexte de remboursement du transport. Quoi qu’il en soit, à la différence des pays vus précédemment, au-delà de la question du salaire perçu, les professionnels des médias Sénégalais s’intéressent également à des questions relatives aux charges sociales, indemnités, congés, couverture médicale, primes de panier….

Contexte social

Les qualifications des journalistes Sénégalais atteignent globalement, après comparaison des baromètres, des niveaux relativement élevés. L’offre de formation est très large. Les écoles de journalisme sont nombreuses. La loi exige également des entreprises qu’elles consacrent 2% de leur chiffre d’affaires annuel au renforcement des compétences de leurs agents. A cela s’ajoutent les sessions de formations thématiques initiées par les organisations professionnelles (le Syndicat des professionnels de l’information et de la communication du Sénégal, la Convention des jeunes reporters du Sénégal, les organisations de la société civile, le Réseau des journalistes économiques, etc.).

Cela n’empêche qu’il reste toujours des agents peu qualifiés. Ceci s’explique par la taille importante de l’offre de formation, conséquence de la « libéralisation sauvage du secteur de l’enseignement supérieur privé» et du nombre accru de jeunes qui souhaitent embrasser le secteur. Les dérives se traduisent alors par le non-respect des curricula, qui se ressent sur les compétences des sortants de ces écoles.

A part cela, des cas de méconnaissance et de mépris volontaire des règles d’éthique et de déontologie du journalisme sont rapportés.

Contexte technologique

En ce qui concerne le développement des TIC, le Sénégal dispose de cadres politique, juridique et règlementaire bien définis. Le pays a adopté de nombreux textes sur le sujet : Code des télécommunications (2002), Stratégie de Croissance Accélérée (SCA), Lettre de politique sectorielle des télécommunications (2005), la stratégie nationale en vue du basculement au tout numérique en 2015.

Force est cependant de constater que ces mesures ne sont pas appliqués en pratiques. Les initiatives entreprises ne sont pas cohérentes entre elles.

  • Comparaisons et suggestions pour le futur des médias audiovisuels en Afrique

Cette revue de l’environnement des médias audiovisuels a permis de constater :

  • Les pressions politiques que subit l’industrie des médias en Afrique, et ce, malgré les garanties de liberté d’expression et de la presse mentionnés dans les Constitutions et les différentes dispositions juridiques en cette faveur. Qui plus est, les Etats étant les principaux pourvoyeurs de publicités, ils abusent de leur position dominante pour manipuler les médias.
  • Les lourdes charges d’investissement, pour ne citer que le coût d’acquisition d’une licence et d’une fréquence, le coût des intrants qu’il faut toujours importer, les charges salariales… alors que le marché publicitaire est le plus souvent restreint. Quoi qu’il en soit, contrairement à ce qu’on aurait pu le penser, on note que la pratique du « journalisme à enveloppe brune », « les demandes de frais de transport » ou encore « le per diem » ne résulte pas forcément de la situation financière précaire des journalistes.
  • La différence entre l’offre de formation et l’attrait du métier vis-à-vis des jeunes, ce qui explique l’inégalité du niveau de qualifications des journalistes selon les pays.
  • L’impact du dynamisme et de l’engagement de l’Etat en faveur des nouvelles technologies sur le développement des médias audiovisuels.

Ce constat nous permet de proposer les recommandations suivantes pour assurer le développement optimal des médias en Afrique :

  • Adoption de mesures strictes pour l’accès à la profession afin d’éviter l’amateurisme et mettre en place un journalisme professionnel. Par exemple, l’élaboration de curricula de formation en adéquation avec les besoins du métier et permettant la maîtrise des techniques de collecte, de production et de diffusion de l’information modernes.
  • Renforcer les formations à l’éthique du journalisme pour limiter la corruption. Toujours dans cette optique, subventionner les médias pour les sortir de la situation de précarité financière dans laquelle ils se trouvent, et ainsi assurer leur viabilité, comme ce qui se pratique au Sénégal. Réviser également la rémunération des journalistes et élaborer des stratégies sévères afin de limiter les pratiques du genre « journalisme à enveloppe brune ». (Sanctionner sévèrement ceux qui continuent d’accepter les sommes proposés par les organisateurs d’évènements par exemple).
  • Dynamisation des avancées technologiques et infrastructurelles. C’est un prérequis indispensable pour assurer le développement des médias audiovisuels en Afrique (électrification, fibre optique, alphabétisation numérique …). Il est souhaitable que des dispositifs d’allègements des coûts d’acquisition et d’exploitation des équipements et services soient adoptés pour permettre au grand nombre d’y accéder.
  • Limiter les différences de traitement entre les médias publics et privés, notamment en matière d’attribution des marchés publicitaires et des aides de l’Etat.
  • La mise en place de « Télécentres communautaires » est un bon exemple pour élargir l’accès à l’information et la base de clientèle des médias.
  • Dynamiser le secteur privé afin de booster la demande publicitaire.

 

 

Conclusion

Cette étude a permis de voir que bien que le rôle des médias audiovisuels soit en premier lieu de divertir, d’éduquer et d’informer son public. Il s’agit d’acteurs économiques, dont l’action a des impacts sur la vie économique, sociale et politique d’un pays. Il est notamment possible de distinguer les médias publics qui sont gérés et financés par les gouvernements, des médias privés qui sont à but lucratif, et des médias internationaux qui traitent essentiellement de l’actualité internationale. De ces caractères uniques des médias, ils sont souvent soumis à des conditions juridiques spécifiques.

Pour le cas du Rwanda par exemple, le rôle pris par les médias audiovisuels dans l’incitation au massacre lors du génocide de 1994, n’est pas sans impact sur les conditions que vivent actuellement les organes de presse qui y évoluent. Le secteur est encore en pleine reconstruction, mais a du mal à se développer en raison des contrôles exacerbées effectuées par le gouvernement, du monopole des médias publics à l’accès aux annonces, du caractère restreint du marché publicitaire privé, et au manque de qualifications des professionnels des médias. Le dynamisme économique et technologique du pays, ainsi que les organes d’autorégulation qui se mettent en place et les efforts qu’ils entreprennent pour renforcer les compétences des médias laissent par contre entrevoir une lueur d’espoir pour l’avenir des médias audiovisuels au Rwanda.

En élargissant l’analyse au niveau de l’Afrique, à travers l’observation de l’environnement des médias audiovisuels au Cameroun et au Sénégal, on constate qu’outre les problèmes économiques et infrastructurelles, les pressions politiques constituent les principaux obstacles au développement de cette industrie sur le continent. On remarque cependant un véritable dynamisme en matière d’investissement dans les TIC ce qui laisse présager des opportunités de développement intéressantes des médias audiovisuels sur le continent, étant donné l’importance de la base de clientèle qu’il reste à conquérir. Ce qui nous amène à nous interroger sur les limites économiques de ce potentiel de développement.

 

Bibliographie

  • Rôle des médias audiovisuels, de la téléphonie mobile, de la publicité et des documents imprimés dans la gestion des PME agroalimentaires, par Cécile Broutin et Marie-Christine Lebret, 2006
  • Les médias audiovisuels au Burundi, par Eva Palmans, in L’Afrique des grands lacs, Annuaire 2003-2004
  • SINE, B., Impérialisme et théories sociologiques du développement, Paris, Editions Anthropos-IDEP, 1975, p.186.
  • Rwanda Media Barometer, 2012, Rwanda Governance Board, Décembre 2012
  • La couverture de l’actualité régionale par les médias des pays des Grands Lacs – Monitoring conjoint des médias au Burundi, en République démocratique du Congo et au Rwanda, Projet ONDES DES GRANDS LACS (2009 -2012), Institut Panos Paris
  • IMS assessment mission: The Rwanda media experience from the genocide, Monique Alexis, March 2003
  • Histoire du Rwanda, des origines à la fin du XXe siècle, Déo Buyanafashe et al., Huye 2011
  • Les politiques et régulations de l’audiovisuel en Afrique, Katrin Nyman-Metcalf et al. 2003
  • The constitution of the Republic of Rwanda
  • Quand s’exprimer n’est pas sans danger : les limites de la liberté d’expression au Rwanda, AMNESTY INTERNATIONAL, Juin 2011
  • Médias du pouvoir et pouvoir des médias chez quelques écrivains africains, Louis Bertin Amougou, Université de Dschang, Cameroun, 2006
  • Médias et démocratie : La fonction des médias dans la démocratie, par Daniel Bougnoux Information, médias et Internet, Cahiers français n° 338
  • Les évolutions socio-économiques au Rwanda et au Burundi: quelles perspectives pour le développement ? par An Ansoms, 2004
  • Le Baromètre des médias Africains, Cameroun 2011, Friedrich-Ebert-Stiftung
  • Le Baromètre des médias Africains, Sénégal 2013, Friedrich-Ebert-Stiftung
  • Rwanda : une décennie pour rien, Hervé Deguine, Les Cahiers du journalisme n°9 – Automne 2001

Webographie

 

 

 

[1] Source : http://catalogue.polytechnique.fr/Files/2008-01-Histoire%20des%20Medias.ppt

[2] Source : http://www.cnrtl.fr/lexicographie/radiodiffusion, consulté le 07 avril 2015

[3] Idem

[4] Source : http://www.cnrtl.fr/lexicographie/t%C3%A9l%C3%A9vision, consulté le 07 avril 2015

[5] Source : http://www.cnrtl.fr/definition/academie9/internet, consulté le 07 avril 2015

[6] http://www.csa.fr/Services-interactifs/Services-de-medias-audiovisuels-a-la-demande-SMAD/Definition, consulté le 07 avril 2015

[7] http://www.nouvelordremondial.cc/theories-de-controle-de-lesprit-et-techniques-utilisees-par-les-medias-de-masse/, Théories de contrôle de l’esprit et techniques utilisées par les médias de masse, Vigilant Citizen, consulté le 16 avril 2015

[8] Médias et démocratie, La fonction des médias dans la démocratie, Daniel Bougnoux, Information, médias et Internet, Cahiers français n° 338

[9] En décembre 1989, à la veille du réveillon de Noël, alors qu’en Roumanie tombait la dictature de Nicolae Ceausescu, les téléspectateurs occidentaux découvraient avec horreur les images d’un charnier où, affirmaient les envoyés spéciaux, gisaient des corps affreusement torturés. On parlait alors de quatre mille morts pour la seule ville de Timisoara. En fin de compte, il s’avéra que les cadavres exhibés devant les caméras avaient été déterrés dans le cimetière des pauvres.

[10] http://www.monde-diplomatique.fr/1990/03/RAMONET/18658, Mythes et délires des médias,

Télévision nécrophile, par Ignacio Ramonet, mars 1990, consulté le 17 avril 2015

[11] Tunisie, Egypte, Syrie, Lybie, Yémen

[12] Une société dans laquelle l’achat de biens de consommation est à la fois un principe et une finalité.

[13] http://laconsommation.canalblog.com/, consulté le 17 avril 2015

[14] La durée d’écoute individuelle moyenne des enfants âgés de 4 à 14 ans est de 2h09 min/jour. 11% de la durée d’écoute des enfants âgés de 4 à 14 ans sont consacrés à la publicité télévisée. Soit 72 publicités par jour, près de 30.000 chaque année.

[15] SINE, B., Impérialisme et théories sociologiques du développement, Paris, Editions Anthropos-IDEP, 1975, p.186.

[16] http://aceproject.org/ace-fr/topics/me/meb/meb03a/meb03a01, Médias publics : étatiques, gouvernementaux et radiotélévision de service public, consulté le 14 avril 2015

[17] Idem

[18] Médias du pouvoir et pouvoir des médias chez quelques écrivains africains, par Louis Bertin Amougou, Université de Dschang, Cameroun, 2006

 

[19] http://www.adeanet.org/pubadea/newsletter/pdf/Vol11No2/fr_6.html, Les médias en Afrique, Akin Fatoyinbo, Spécialiste principal en communication, Banque mondiale, Abidjan

[20] www.cairn.info/revue-internationale-et-strategique-2010-2-page-67.htm, La bataille de l’information internationale, Fougier Eddy, Revue internationale et stratégique 2/2010 (n° 78), p. 67-74

 

[21] http://www.definitions-marketing.com/Definition-Audience, Définition Audience, consulté le 17 avril 2015

[22] L’UIT est la plus grande organisation internationale existante du monde (avec 189 Etats membres en 2002) et la plus ancienne toujours en activité. Elle a été créée en 1865 sous l’appellation Union Télégraphique Internationale et a fusionné en 1932 avec l’Union Radiotélégraphique Internationale (créée en 1906) lorsqu’elle a changé de nom pour devenir Union Internationale de Télécommunications.

[23] https://cpj.org/fr/2014/12/lheritage-du-genocide-rwandais-inclut-la-restricti.php, L’héritage du génocide rwandais inclut la restriction des médias et l’autocensure, consulté le 5 mai 2015

[24] https://cpj.org/fr/2014/12/lheritage-du-genocide-rwandais-inclut-la-restricti.php, L’héritage du génocide rwandais inclut la restriction des médias et l’autocensure, consulté le 5 mai 2015

[25] Les journalistes de RTLM – mise sur pied en 1993 – ont appelé à l’antenne leurs auditeurs à tuer les hutu modérés et les tutsi.

[26] Liste des chaînes de television : Rwanda Television, TV 10, Clouds TV Rwanda, LEMIGO TV, Family TV, YEGO TV et OMEGA TV. Source: http://en.wikipedia.org/wiki/List_of_television_stations_in_Africa#.C2.A0Rwanda

Liste des radios basées à Kigali : Contact FM, Radio 10, Radio Isango Star, Radio Flash FM, City Radio, Radio Ijwi ry’ Ibyiringiro (Voice of Hope), Amazing Grace Christian Radio, Radio Voice of Africa, Radio Ijwi ry’Ibyiringiro, Restore Radio, Umucyo Radio.

Liste des radios basées dans les districts de Gicumbi et Karongi : Ishingiro Community Radio et Isangano Community Radio

Radios basées dans le district de Muhanga : Huguka Radio, Radio Maria

Radios basées dans le district de Huye : Izuba Community Radio, Radio Salus

Source : RMB

[27] Ces sites emploient pas moins de 55 journalistes permanents.

[28] La disponibilité fait référence à la proximité de l’information pour le consommateur. L’accessibilité se réfère à la capacité des consommateurs à payer pour l’information et / ou à se permettre de payer le récepteur (téléviseur, poste de radio, etc.) ou toute autre plateforme médiatique.

[29] 10 répondants sur 10 vivent dans des zones couvertes par la radio publique.

[30] La taille de l’échantillon de l’enquête du Rwanda Media Barometer (RMB) est de 2600 répondants pour la catégorie concernant les citoyens, 164 répondants issus de sociétés civiles et 144 journalistes. Tous ont été sélectionnés au hasard. L’enquête a été conduite suivant les deux approches, quantitatives et qualitatives. L’approche quantitative implique l’utilisation de questionnaires structurés, tandis que l’approche qualitative combine la recherche documentaire, les entretiens individuels avec des informateurs clés et les discussions de groupes.

Les questionnaires ont été administrés auprès de journalistes, d’organisations de la société civile et d’individus sélectionnés de manière aléatoire. Les groupes de discussion sont composés de groupes de citoyens sélectionnés, de sociétés civiles et de journalistes. Les entrevues avec des informateurs clés ont été organisées et menées avec des dirigeants de médias, des experts de médias, les organismes de réglementation, des responsables gouvernementaux, des partenaires de développement, des chercheurs des médias et des académiciens.

[31] Le fait que la télévision touche une grande proportion de la population, malgré la faiblesse des ménages possédant un poste de télévision fonctionnel (18,8%) s’explique par le fait que beaucoup de rwandais accède à ce média depuis les postes de télévision de leurs voisins.

[32] Jean-Léonard Rugambage, rédacteur en chef adjoint d’un journal rwandais en langue kinyarwanda, Umuvugizi, a été abattu le 24 juin 2010 devant chez lui, près de Kigali. Il menait des investigations sur l’homicide par arme à feu de l’ancien chef d’état-major de l’armée rwandaise, Kayumba Nyamwasa, commis à Johannesburg (Afrique du Sud) le 19 juin 2010

[33] D’après un communiqué de Reporters sans frontières (RSF), une trentaine de médias ont été suspendus. Ce fut le cas par exemple des journaux en langue kinyarwanda : Umuseso, Umuvugizi, Umurabyo, et de plusieurs radios, dont Voice of Africa Rwanda et Voice of America (http://aufait.homelinux.com/2010/08/03/une-trentaine-de-medias-suspendus-avant-la-presidentielle-au-rwanda-selon-rsf_364493, Une trentaine de médias suspendus avant la présidentielle au Rwanda, selon RSF, consulté le 11 mai 2015)

[34] https://cpj.org/fr/2014/12/lheritage-du-genocide-rwandais-inclut-la-restricti.php, L’héritage du génocide rwandais inclut la restriction des médias et l’autocensure, consulté le 5 mai 2015

[35] Le manque d’accès à l’information,  le blocage des journalistes par des fonctionnaires hostiles et nerveux, la notion de « journalisme responsable » utilisée pour freiner les reportages critiques, l’environnement économique défavorable, et la dépendance à l’égard de la publicité étatique.

[36] https://cpj.org/fr/2014/12/lheritage-du-genocide-rwandais-inclut-la-restricti.php, L’héritage du génocide rwandais inclut la restriction des médias et l’autocensure, consulté le 5 mai 2015

[37] Etude dirigée par Sally Stapleton, journaliste américaine et fondatrice du Great Lakes Media Institute. Des entretiens ont été conduites avec 100 journalistes.

[38] « A cause du manque de qualité ou d’éducation, vous avez des gens qui viennent dans votre bureau pour vous menacer d’écrire des choses négatives si vous ne payez pas. C’est monnaie courante. », Propos d’un responsable de site Web populaire privé, qui a travaillé dans les relations publiques et qui ne souhaite pas être nommé, in https://cpj.org/fr/2014/12/lheritage-du-genocide-rwandais-inclut-la-restricti.php, L’héritage du génocide rwandais inclut la restriction des médias et l’autocensure, consulté le 5 mai 2015

[39] Le président de l’ARJ (Association rwandaise des journalistes), Gaspard Safari, le confirme. Propos recueillis par Cyprien Ndikumana, Diagnostic des partenaires OGL, 1er juillet 2009, in La couverture de l’actualité régionale par les médias des pays des Grands Lacs – Monitoring conjoint des médias au Burundi, en République démocratique du Congo et au Rwanda, Édité par l’Institut Panos Paris.

[40] L’IPP, SFCG (Search for Common Ground), La Benevolencija, mais également le GRET (Groupe de recherche et d’échanges technologiques), Radio Nederland ou la VOA (Voice of America) ont entrepris de former des journalistes congolais, burundais et rwandais réunis. Il y a aussi des offres de formation provenant de NED (New Endowment for Democracy) et de RIJ (Radio Interactive pour la Justice).

[41] Pour la presse écrite : plus de 85 % des articles ont fait l’objet d’un traitement propre à la rédaction. Le recours aux agences de presse (5,30 %) et à d’autres sources non identifiées (5,96 %) est assez peu fréquent.

Dans l’audiovisuel, les journalistes favorisent leurs propres productions : 91,49 % des éléments diffusés

sont élaborés au sein de la rédaction ou proviennent des reporters, correspondants locaux ou envoyés spéciaux. Les autres éléments d’information proviennent des agences de presse ou d’un média international ou continental (6,38 %), d’un média régional (1,06 %) ou de sources non identifiées (1,06 %).

[42] http://www.un.org/africarenewal/fr/magazine/april-2011/rwanda-l%C3%A9conomie-dop%C3%A9e-par-les-nouvelles-technologies, Rwanda : l’économie dopée par les nouvelles technologies, Par Masimba Tafirenyika, consulté le 12 mai 2015

[43] Seulement une dizaine d’enregistreurs et d’ordinateurs en moyenne pour Contact FM et Radio Salus

[44] La majorité des journaux impriment en Ouganda, où le coût d’impression est moins cher par rapport aux tarifs pratiqués sur le marché local.

[45] Outre les questions politiques/diplomatiques, sécurité, crimes et violences, qui sont généralement tabous dans le pays, il y a la possibilité d’aborder les questions économiques, éducation et enseignement, culture et religion, travail et emploi, sport, environnement, agriculture, élevage, énergie, santé, accidents et catastrophes, justices et droits de l’homme, société civile, infrastructures et développement, médias et télécommunications, humanitaire, divertissements…

[46] Le Rwanda est passé à la Télévision numérique terrestre (TNT) au mois d’août 2014. C’est le troisième pays du continent à compléter ce passage après la Tanzanie et l’île Maurice. http://economie.jeuneafrique.com/regions/afrique-subsaharienne/22733-le-rwanda-devient-le-3e-pays-africain-a-passer-entierement-a-la-television-numerique.html, consulté le 15 mai 2015

[47] La Charte de déontologie de Munich (ou Déclaration des devoirs et des droits des journalistes), signée le 24 novembre 1971 s’applique essentiellement pour le journalisme en Europe, mais constitue une bonne référence. Elle mentionne dix devoirs et cinq droits du journaliste. Parmi les droits stipulés, on note le libre accès à toutes les sources d’information et le droit d’enquêter librement sur tous les faits qui conditionnent la vie publique, le droit de refuser toute subordination qui serait contraire à la ligne générale de son entreprise, le droit au bénéfice des conventions collectives, le journaliste ne peut être contraint à accomplir un acte professionnel ou à exprimer une opinion qui serait contraire à sa conviction ou sa conscience…

[48] Il n’y a pas de définition universelle de ce qu’est la liberté de la presse, mais dans le contexte de ce travail, il est utilisé pour signifier que «les journalistes sont en mesure de faire leur travail sans être soumis à l’intimidation ou à la violence, et sont capables de rendre compte librement sans censure ».

La liberté d’expression se réfère au « droit d’exprimer ses idées et ses opinions librement par la parole, l’écriture, et d’autres formes de communication, mais sans provoquer délibérément préjudice à un personnage et / ou à sa réputation par des déclarations fausses ou trompeuses « .

[49] D’après le RMB, un grand nombre de journalistes n’ont que le diplôme du secondaire, surtout ceux qui travaillent pour les stations privées. Seulement 50% des professionnels des médias ont un diplôme de deuxième ou troisième cycle universitaire.

[50] Une chaîne de télévision et huit stations de radio sont dirigées par le radiodiffuseur public.

[51] Source RMB. Les autorités publiques éteignent généralement leurs téléphones mobiles pour éviter tout contact avec les journalistes, ou refusent tout simplement de répondre aux appels des journalistes privés. Ils filtrent les appels et sélectionnent les journalistes avec qui ils veulent parler.

[52] Elles sont tirées du plan UIT (GE84) qui attribue les fréquences à chaque pays de manière à éviter les interférences entre les émetteurs. Le Rwanda dispose de 58 fréquences pour les 10 sites de diffusion reconnus Countrywide. Kigali dispose de 11 canaux de fréquence, alors que les besoins se chiffrent à 30 canaux.

[53] La loi 02/2013 du 08/02/2013 qui régule les medias, stipule en son article 16 : « Avant la mise en place d’un nouvel organe de presse, son propriétaire ou toute autre personne compétente doit adresser une demande par écrit à l’organisme public compétent. Si c’est un organe de presse public, le président du conseil d’administration du nouvel organe de presse à mettre en place doit déposer la demande écrite. L’organe publique compétente mettra en place les instructions pour déterminer les conditions requises pour la mise en place du média »

[54] Les équipements doivent être conformes aux normes internationales reconnues par l’UIT (Union internationale des télécommunications), EAC (East African Community Standards), FCC (Federal Communications Commission (États-Unis), ANSI (American National Standards Institute), ETSI (European Telecommunications Standardization Institute)

[55] Il en résulte de nombreuses allégations du gouvernement sur des journalistes qui violent l’éthique des médias.

[56] http://www.banquemondiale.org/fr/news/feature/2013/02/05/electrification-project-lights-up-lives-boosts-incomes-in-rwanda, consulté le 20 mai 2015

[57] Données en date de 2011

[58] La pénétration du web est estimée à 4% pour une population de 20 millions d’habitants. A travers tout le pays, l’accès à Internet se fait par les cybercafés et dans les bureaux où les salariés profitent du débit illimité et de l’absence de réglementation restrictive pour se connecter. Les téléphones portables connectés à Internet atteignent un taux de pénétration de 40 %.

[59] En cas de diffamation criminelle, le Code Pénal camerounais pourvoit l’annulation des garanties constitutionnelles de liberté d’expression. Un journaliste encourt jusqu’à six mois de prison pour diffamation.

[60] Le Baromètre des médias Africains, Cameroun 2011, Friedrich-Ebert-Stiftung

[61] Au Cameroun, une personne n’a droit qu’à une licence.

[62] Le prix de la licence se décline comme suit :

  • radio commerciale locale – 10 millions CFA (environ 20 000 Dollars US)
  • radio non-commerciale locale – 5 millions CFA (environ 10 000 Dollars US)
  • radio commerciale nationale – 50 millions CFA (environ 100 000 Dollars US)
  • radio non-commerciale nationale – 10 millions CFA (environ 20 000 Dollars US)
  • TV commerciale locale – 50 millions CFA (environ 100 000 Dollars US)
  • TV non-commerciale locale – 10 millions CFA (environ 20 000 Dollars US)
  • TV commerciale nationale – 100 millions CFA (environ 200 000 Dollars US)
  • TV non-commerciale nationale – 25 millions CFA (environ 50 000 Dollars US)

[63] Une étude privée a révélé que le secteur de la publicité audiovisuelle représentait annuellement 9 milliards de CFA (environ 19.95 millions de dollars US)

[64] La loi définit le statut de journaliste comme toute personne qui, de part ses « facultés inellectuelles » résultant de stages ou de « talents », est considérée apte à collecter et traiter une information destinée à une publication sociale. Aucune qualification académique n’est requise.

[65] Il existe plus de 7 millions d’abonnés, ce qui représente 40 % de la population camerounaise.

[66] 47,9% selon l’Enquête de Suivi de la Pauvreté au Sénégal (ESPS) II 2011 (publié en 2013). Source : site web de

l’Agence nationale de la statistique et de la démographie. www.ansd.sn

[67] 60% des ménages ont accès à l’électricité (éclairage) selon l’ l’Enquête de Suivi de la Pauvreté au Sénégal (ESPS) II (publié en 2013).

[68] L’article 35 de la loi 96-04 du 22 février 1996 : « le journaliste ou le technicien de la communication est tenu au secret professionnel tel que prévu à l’article 363 du Code pénal. Il ne doit pas divulguer les sources des informations obtenues confidentiellement »

[69] Le cas de la Télévision Futurs Médias (TFM) en est un bon exemple : en 2010, le pouvoir – dans un premier temps – avait rejeté publiquement la demande de fréquence à Monsieur Youssou Ndour avant de la lui accorder en dehors de toute procédure transparente et manifestement après que celui-ci ait montré plus de sollicitude vis-à-vis du régime. Source : Le Baromètre des médias Africains, Sénégal 2013, Friedrich-Ebert-Stiftung

[70] Les redevances sur l’assignation de fréquence pèsent lourdement sur les opérateurs. Par exemple, la redevance d’une chaîne de télévision s’élève à 21 millions de CFA par an.

[71] Plusieurs chiffres sont avancés quant au montant du marché publicitaire : 6 milliards de CFA (12 millions de dollars américains), une dizaine de milliards (une vingtaine de millions de dollars américains), 15 milliards (30 millions de dollars américains), etc.

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