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ENJEUX ET IMPACTS FISCAUX DU STATUT DE COMMISSIONNAIRE OPAQUE POUR UNE FILIALE FRANCAISE DE NEGOCE D’UN GROUPE ETRANGER : MISSION DE L’EXPERT-COMPTABLE.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ENJEUX ET IMPACTS FISCAUX DU STATUT DE COMMISSIONNAIRE OPAQUE POUR UNE FILIALE FRANCAISE DE NEGOCE D’UN GROUPE ETRANGER :

MISSION DE L’EXPERT-COMPTABLE.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  1. Pierre Vee Session : Novembre 2015

102 bis, rue de Miromesnil

75008 Paris

 

 

Sommaire

Note de synthèse. 5

Liste des abréviations. 7

Introduction.. 8

Partie 1: Fonctionnement et intérêts du commissionnement opaque pour un groupe étranger souhaitant vendre des produits sur le marché français. 12

Chapitre 1: Les aspects et les particularités du commissionnement et du commissionnaire opaque dans le contexte français  12

Section 1 : Définition et fonctionnement d’une activité de commissionnement opaque. 12

  1. Définition d’un commissionnaire opaque. 12
  2. Différenciation entre un commissionnaire transparent et un commissionnaire opaque. 14
  3. Termes clés dans le domaine du commissionnement 14

Section 2 : Le cadre légal et administratif du commissionnement opaque. 15

  1. Le Code de commerce français. 15
  2. Les dispositifs européens. 16

Section 3 : La place du commissionnement dans les secteurs d’activité français. 17

  1. L’activité du commissionnement déjà agréée en France. 17
  2. Classement statistique des intermédiaires de commerce. 20
  3. Évolution des activités de commissionnement en France. 21

Chapitre 2 : Intérêt du commissionnement opaque pour un groupe étranger. 23

Section 1. Les intérêts stratégiques. 23

  1. Allègement des formalités administratives et fiscales. 23
  2. Amélioration de la gestion des comptes de la société fille. 24
  3. Optimisation de la gestion des approvisionnements intra-groupes. 25

Section 2 : Intérêt économique. 26

  1. Minimisation des coûts de transaction. 26
  2. Possibilité d’optimisation fiscale des livraisons au commissionnaire. 28

Chapitre 3 : Impacts comptables et fiscaux. 29

Section 1 : Procédure de comptabilisation des opérations. 29

  1. Enregistrement comptable des opérations de vente. 29
  2. Enregistrement comptable des opérations d’achat interne. 30
  3. Comptabilisation des opérations de livraison intracommunautaire des biens. 30

Section 2 : Aspects fiscaux du commissionnement opaque. 31

  1. Assujettissement du commissionnaire opaque. 31
  2. Déclaration et détermination de la base imposable pour l’impôt sur les revenus. 32
  3. Déclaration des opérations de transactions intracommunautaires. 33

Partie 2 : Identification et évaluation des risques fiscaux encourus par un commissionnaire opaque en France  36

Chapitre 1 : Nature des risque fiscaux. 36

Section 1 : Risques opérationnels liés à l’activité de commissionnaire. 36

  1. Synthèse des impôts et taxes applicables au commissionnement opaque. 36
  2. Les autres règles : déduction, exonération. 39
  3. Faits générateurs de TVA : approvisionnement, revente, 42
  4. Respect du délai de paiement de la TVA et vérification du taux d’imposition effectif 43
  5. llustration : cas pratique. 45

Section 2 : Risques lié à la méconnaissance des dispositions favorables à l’optimisation fiscale. 45

  1. Évolution récente du dispositif fiscal des activités de commission. 45
  2. Echéancier fiscal du commissionnaire. 50
  3. Illustration : cas pratique. 50

Chapitre 2 : Analyse et évaluation des risques fiscaux. 52

Section 1 : Risques inhérents à la structure juridique du commissionnaire opaque. 52

  1. Territorialité de l’impôt 52
  2. Base d’imposition des transactions pour un commissionnaire. 60

Section 2 : Risques liés aux livraisons de biens et services. 61

  1. Les risques liés aux règles fiscales (TVA, exigibilité) 61
  2. Les risques liés à la méconnaissance. 63

Section 3 : Cartographie des risques inhérents à l’activité de commissionnement opaque. 63

  1. Les critères d’évaluation des risques fiscaux. 63
  2. Cartographie des risques. 68
  3. Analyse de la significativité des risques. 69

Chapitre 3 : Calcul de l’impact des risques fiscaux significatifs. 69

Section 1 : Les sanctions fiscales lors de la réalisation des risques fiscaux. 70

  1. Les sanctions suite au manquement de déclaration des revenus. 70
  2. Les sanctions suite aux manœuvres frauduleuses. 70
  3. Autres sanctions. 72

Section 2 : Estimation de l’impact financier des risques fiscaux. 75

  1. En rapport avec les budgets de transaction. 76
  2. En rapport avec le montant de la commission. 76

Partie 3 : La mission de diagnostic des risques fiscaux par l’expert-comptable. 77

Chapitre 1 : Les modalités de l’intervention de l’expert-comptable. 77

Section 1 : Nature de la mission de l’EC et champ d’intervention. 77

  1. Définition de la nature de la mission de l’expert-comptable. 77
  2. Délimitation du champ d’intervention dans la lettre de mission. 78
  3. Cadrage déontologique de la mission. 79

Section 3 : Déontologie applicable à l’audit contractuel 82

Section 4 : L’engagement de la responsabilité de l’expert-comptable. 83

Section 5 : Valeur ajoutée de l’expert-comptable. 84

  1. L’expert-comptable : un conseiller privilégié des chefs d’entreprise. 84
  2. L’avantage de la polyvalence de l’expert-comptable pour la mission. 85

Chapitre 2 : Proposition d’outils de prévision et de contrôle du risque fiscal au dirigeant d’un commissionnaire opaque. 85

Section 1. Les diligences à mettre en œuvre dans l’audit fiscal 85

  1. Objectifs de la mission. 85
  2. Les diligences propres à la mission. 86
  3. L’organisation de la mission. 86

Section 2 : Conception des outils de prévision et de contrôle. 88

  1. Outil de prise de connaissance des règles fiscales (et exemple d’application) 88
  2. Outil de calcul de la base imposable à l’IR et à la TVA (et exemple d’application) 95

Chapitre 3 : Constitution des documents de fin de mission. 97

Section 1. Le rapport de mission. 97

  1. Le contenu d’un rapport de mission. 97
  2. Modèle de rapport de mission d’audit contractuel 99

Section 2. La lettre d’affirmation. 102

  1. Définition de la situation nécessitant une lettre d’affirmation. 102
  2. Le contenu de la lettre d’affirmation. 103
  3. Modèle de lettre d’affirmation. 104

Conclusion.. 106

Bibliographie. 108

 

Note de synthèse

 

Les sociétés étrangères sont de plus en plus intéressées à créer une filiale dans le pays où elles souhaitent commercialiser leurs produits et développer un marché à long terme. La création d’une filiale française présente des intérêts stratégiques et économiques pour une société étrangère. La dotation du statut de commissionnaire opaque à la filiale doit faire l’objet d’une attention particulière en ce qui concerne son régime fiscal.

 

Le commissionnaire opaque est un intermédiaire qui agit en son nom propre mais pour le compte du commettant. L’administration fiscale le considère cependant comme ayant acquis et vendu les marchandises en son propre. Le commissionnaire est assujetti fiscalement selon le régime d’un acheteur-revendeur. La filiale doit ainsi faire particulièrement attention aux implications fiscales de la transformation en un commissionnaire opaque.

 

L’expert-comptable est l’interlocuteur le mieux positionné pour conseiller la filiale française sur les enjeux et les implications d’un statut de commissionnaire opaque d’une société étrangère. Sa valeur ajoutée réside dans sa connaissance approfondie de l’entreprise et du secteur d’activité, de sa capacité à détecter les risques fiscaux potentiels correspondant aux spécificités de l’entreprise étudiée, de sa capacité à évaluer les forces et les faiblesses du contrôle interne, et de sa capacité à formuler des recommandations sur les actions à mettre en œuvre pour éviter les problèmes fiscaux qui conduisent généralement au paiement de cotisations d’impôts additionnels ou d’amendes incluant des pénalités de retard.

 

Le commissionnaire étant une filiale d’une société étrangère, l’expert-comptable doit prendre en considération les risques fiscaux relatifs au prix de transfert spécifiques au commissionnement. Sachant également que le commissionnaire a pour mission de commercialiser les produits de la société étrangère, il sera inévitablement impliqué dans des transactions intracommunautaires et hors de l’UE. L’expert-comptable doit ainsi appréhender l’ensemble des règles fiscales applicables à la TVA intracommunautaire.

 

L’expert-comptable doit également faire une revue des jurisprudences récentes concernant les commissionnaires pour connaître les critères de remise en cause utilisés par l’administration fiscale ainsi que les argumentations présentées par les tribunaux et la Cour d’Appel pour statuer sur une demande d’une entreprise assujettie.

 

Une filiale commissionnaire est redevable de l’IS sur la base du résultat fiscal qui intègre le montant des achats réalisés auprès du commettant, le montant de la commission ainsi que le montant des ventes réalisées auprès du client final. Elle doit également payer la TVA selon le régime de l’acquisition et la livraison intracommunautaire et selon le régime de simplification de l’imposition à la TVA des opérations triangulaires. Elle est également assujettie sur la CET calculée sur la base de la valeur ajoutée portant sur l’ensemble des ventes et achats réalisés pour le compte du commettant. L’expert-comptable doit ainsi vérifier l’ensemble des obligations fiscales rattachées à ces impôts.

 

Les risques ainsi identifiés sont constitués par le prix de transfert sur les commissions, le prix de transfert sur les prix de marchandises pour la question spécifique de l’IS, la TVA intracommunautaire, le transfert d’une clientèle au commissionnaire, la qualification du commissionnaire en établissement stable et le non-respect des obligations fiscales.

 

L’expert-comptable doit organiser sa mission selon les normes professionnelles prévues incluant la signature d’une lettre de mission avec le client, l’établissement d’un programme de travail, la mobilisation d’une équipe compétente et la rédaction du rapport de fin de mission.

Liste des abréviations

 

BIC                                         Bénéfices industriels et commerciaux

CET                                        Contribution économique territoriale

CFE                                        Cotisation foncière des entreprises

CJUE                                     Cour de justice de l’Union européenne

CGI                                         Code général des impôts

CVAE                                     Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises

DEB                                        Déclaration d’échange de biens

DREAL                                  Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement

HT                                           Hors taxes

IS                                            Impôt sur les sociétés

IR                                            Impôt sur les revenus

PBRD                                     Personnes bénéficiant du régime dérogatoire

PCA                                        Président du conseil d’administration

RCT                                        Registre des commissionnaires de transport

SARL                                     Société à responsabilité limitée

SCA                                        Société en commandite par action

SIRET                                                Système d’identification du répertoire des établissements

TVA                                         Taxe sur la valeur ajoutée

UE                                          Union Européenne

Introduction

 

Le développement des échanges internationaux a conduit à une diversification des stratégies et des modes de distribution de marchandises et de prestations de services. À chaque type de produit ou de service et à chaque profil de consommateur, des stratégies de plus en plus appropriées ont commencé à devenir habituelles : points de vente, boutiques, grandes surfaces, etc. L’évolution de la gestion de ces stratégies a donné naissance à plusieurs types de contrats de distribution tels que le contrat des concessionnaires, les contrats de distributeurs agréés et surtout les contrats des intermédiaires. Parmi ces contrats se distingue le contrat de commissionnement « opaque » souvent conclu pour la distribution de produits sur le territoire français.

 

Ainsi, au cours de dernières années, un certain nombre d’entreprises françaises, filiales de groupes internationaux, ont choisi le statut de commissionnaire afin de pouvoir continuer à exister malgré les difficultés engendrées par la crise. Il en est ainsi de certaines sociétés industrielles qui se sont trouvées dans l’obligation de se restructurer profondément et de ne garder comme activité qu’une activité de pur négoce de produits, qui ne pouvait alors être rentable que sous le statut de commissionnaire du groupe de tutelle auquel elles appartenaient. Face à ce phénomène, se pose naturellement la question de l’intérêt du statut de commissionnaire pour une société française, filiale d’un groupe étranger et du rôle que peut jouer l’expert-comptable dans cette transformation.

 

Une approche mercatique confère au commissionnement le rôle d’intermédiaire de commerce qui améliore la fluidité du marché et l’aboutissement de la politique commerciale du commettant. Par extension, ce type de contrat participe à l’équilibrage des prix et à la modération de la concurrence, parce que les commissionnaires ont la capacité de cibler exactement les clients et de combler les demandes spécifiques. Le commissionnement agit donc dans le sens positif de la croissance économique. C’est la raison pour laquelle dans certaines activités comme le transport, les législateurs français ont accordé un droit d’agrément aux commissionnaires.

 

Par contre, une approche fiscaliste adopte une distinction des commissionnaires en fonction de leur mode de représentation. À cet égard, le droit fiscal classifie un commissionnaire dit « transparent », comme étant celui qui agit en son propre nom et pour le compte des commettants, et un commissionnaire dit « opaque » comme étant celui qui agit pour son propre compte, sans que l’identité du commettant soit visible par les tiers. Ce dernier type de commissionnaire a ses propres caractéristiques. Il supporte toutes les charges rattachées à la disposition des marchandises, de l’approvisionnement jusqu’à l’écoulement des derniers lots. Cela implique une analyse bien approfondie de ses obligations fiscales de nature à rendre conformes les activités, à identifier et quantifier les éventuels risques fiscaux, et à pouvoir détecter les sources possibles d’optimisation.

 

En effet, la gestion fiscale d’un commissionnaire opaque engendre un certain degré de complexité. Elle comporte plusieurs étapes dont l’immatriculation de l’entité au registre du commerce et des sociétés, la déclaration de revenus, le calcul de la base taxable et le paiement de l’impôt. Ces étapes ne sont jamais exemptes de difficultés et de risques, parmi lesquels on observe le plus souvent la confusion des éléments à prendre en compte dans la détermination de la base taxable.

 

En principe, le revenu du commissionnaire consiste en des commissions. Cependant, pour un commissionnaire opaque, les charges liées à la mise à disposition des marchandises sont aussi à considérer parce qu’elles sont à la charge du commissionnaire, contrairement au cas d’un contrat de commissionnaire transparent.

 

En outre, d’autres risques peuvent aussi surgir dans la gestion de la taxe sur la valeur ajoutée. L’inattention peut porter préjudice dès l’analyse des faits générateurs en raison de la longueur du circuit de distribution qui commence depuis l’acquisition jusqu’à la vente. Elle peut s’étendre à l’analyse de la taxation des importations et des exportations pour un commissionnaire réalisant une opération avec des commettants et des clients étrangers. L’acquisition intracommunautaire, régie par une directive de plus grande envergure, peut également être fréquente dans le cas où les fournisseurs et les clients s’installent dans la zone euro. La non-maîtrise de la détermination des faits générateurs influence mécaniquement la gestion d’autres procédures comme la déclaration, le paiement et la demande de remboursement.

 

Pour se prémunir contre ces risques, les dirigeants de ces sociétés peuvent avoir recours à l’expertise de leur expert-comptable pour effectuer un diagnostic des risques fiscaux liés au passage au statut de commissionnaire, une évaluation de leur impact et proposer des schémas d’optimisation fiscale de ce statut. L’audit fiscal contractuel mené par l’expert-comptable peut aider le (futur) commissionnaire à bien saisir les obligations fiscales liées à son statut juridique et à ses activités et à s’approprier des options qui peuvent les alléger, de nature à optimiser la performance.

 

Ce mémoire a pour objectifs de :

 

  • Identifier les informations à collecter, qui permettent de délimiter les points de particularité d’un commissionnaire et d’un contrat de commissionnement opaque dans le cadre d’une prise de connaissance du secteur étudié.
  • fournir à l’expert-comptable un guide méthodologique lui permettant de réaliser un diagnostic de la situation fiscale de son client avant et après le passage au statut de commissionnaire, d’identifier les risques existants et de les quantifier.
  • identifier les sources possibles d’options fiscales permettant à l’expert-comptable de proposer des solutions d’optimisation fiscale à l’intention de ses clients désirant devenir commissionnaires. Ces options ressortent généralement des dispositifs fiscaux liés aux exonérations, au remboursement de la TVA, à la réduction, etc.

 

La poursuite de ces objectifs permettra d’apporter à l’expert-comptable (mais également au commissaire aux comptes d’un commissionnaire opaque) une méthodologie et des outils l’aidant à identifier et évaluer les risques fiscaux d’une part. Ce mémoire permettra d’autre part à l’expert-comptable d’être force de propositions auprès de son client en lui proposant des solutions d’optimisation fiscale, tout en respectant des textes applicables.

 

Ce mémoire sera organisé en trois parties :

 

  • la première partie décrira le fonctionnement et les intérêts d’un contrat de commissionnement opaque conclu avec un groupe étranger voulant écouler ses produits sur le marché français. Elle s’articulera autour de la consolidation des informations sur les aspects légaux et administratifs, sur les intérêts stratégiques du commissionnement opaque et sur les procédures de comptabilisation et de gestion fiscale des activités du commissionnaire.

 

  • la seconde partie établira les grands principes et les techniques d’identification et d’évaluation des risques fiscaux qui peuvent compromettre la rentabilisation des activités d’un commissionnaire opaque. Elle a pour vocation d’expliquer la nature des risques fiscaux inhérents à un tel type de contrat (concernant la TVA, la détermination de l’impôt et l’échéancier fiscal) et de présenter les procédures d’identification et d’évaluation ainsi que l’estimation de leur impact sur les transactions et les commissions.

 

  • la troisième et dernière partie présentera les différents points à considérer concernant la nature de la mission de l’expert-comptable dans un tel contexte, ainsi que le cadre déontologique dans lequel elle s’inscrit, et les responsabilités encourues par ce dernier. Il s’agit d’étayer les modalités délimitant son intervention et de présenter les outils d’identification et d’évaluation des risques fiscaux, et les documents nécessaires à la finalisation de la mission.

 

Partie 1: Fonctionnement et intérêts du commissionnement opaque pour un groupe étranger souhaitant vendre des produits sur le marché français

 

Cette première partie décrit l’activité de commissionnement opaque sur le marché français. Elle aborde ainsi plusieurs aspects du commissionnement tels que sa définition, son fonctionnement, son cadre légal et administratif, l’évolution croissante de cette activité ainsi que l’intérêt stratégique, économique et fiscale d’une société étrangère de recourir à cette approche pour vendre ses produits sur le marché français.

 

Cette prise de connaissance de l’activité de commissionnement permet au lecteur de comprendre son fonctionnement et son intérêt, et de détecter les premiers points sur lesquels l’expert-comptable et le dirigeant de la filiale doivent prêter une attention particulière.

 

Chapitre 1: Les aspects et les particularités du commissionnement et du commissionnaire opaque dans le contexte français

 

Un commissionnaire agit en tant qu’intermédiaire de commerce en son nom propre. Sa définition est précisée par le Code du Commerce. Le présent chapitre relate la différentiation entre un commissionnaire indépendant et un commissionnaire opaque. Il situe cette activité dans le cadre juridique français et européen. Il démontre également l’évolution croissante de l’activité de commissionnement depuis les dix dernières années sur le marché aérien.

 

Section 1 : Définition et fonctionnement d’une activité de commissionnement opaque

 

  1. Définition d’un commissionnaire opaque

 

Selon l’article L132-1 du Code du Commerce, « Le commissionnaire est un intermédiaire de commerce qui agit en son nom mais pour le compte d’un commettant dans les limites du mandat qui lui est conféré et pour les opérations qui lui sont confiées. » Ses activités consistent à acheter et à vendre des produits et des services en son nom propre ou sous un nom social pour le compte d’une ou plusieurs entreprises ou d’un groupement d’achats en commun. D’un point de vue juridique, il n’est pas propriétaire des produits et services qu’il commercialise et distribue.

 

Le commissionnaire  se rémunère sur une base forfaitaire ou avec une commission calculée sur la base de la valeur des commandes vendues. Les frais qu’il engage pour stocker et mettre à disposition les produits lui sont remboursés par les commettants. Il travaille normalement au comptant, dans le cas contraire, il supporte les coûts de crédit.

 

Le commissionnaire a pour obligations de :

 

  • exécuter les missions définies dans le contrat de commissionnement et mettre en œuvre les instructions de ses commettants : il doit ainsi effectuer des comptes rendus auprès des entreprises et des tiers pour qui il agit. Ces derniers contrôlent généralement si le commissionnaire a respecté les prix de vente qu’ils ont fixés et que ce dernier n’a pas surfacturé les produits et services afin d’empocher des bénéfices puisque sa rémunération est constituée uniquement des commissions convenues. Certains commissionnaires peuvent également vendre les produits et services à des tarifs moins avantageux : à l’issu de ces contrôles, les commettants peuvent exiger le remboursement des différences non perçues.

 

  • assurer le bon déroulement des transactions vis-à-vis des clients et des fournisseurs: il est responsable des transactions avec les clients et négocie les prix avec les fournisseurs.

 

  • assurer le bon stockage des produits et marchandises jusqu’à leur vente : il est responsable des pertes et dégradations pouvant survenir pendant qu’ils sont en sa possession. Il devrait généralement souscrire des assurances à cet effet. Le commissionnaire est par ailleurs responsable de la qualité des marchandises et des services vis-à-vis des clients. Il peut néanmoins effectuer un recours auprès du commettant concerné.

 

  • le commissionnaire n’est pas tenu d’une obligation de résultat envers le commettant : il n’est pas tenu responsable en cas de mévente des produits et services ou si les clients sont insolvables. La conclusion d’une clause de ducroire peut néanmoins rendre le commissionnaire responsable des défauts de paiement des clients. Le commissionnaire aura ainsi à assumer les risques commerciaux de chaque transaction : il doit payer une prime ducroire qui est limitée à un certain pourcentage du prix des ventes impayées.

 

Le commissionnaire n’a pas forcément le statut de commerçant puisqu’il peut également réaliser des opérations de transport ou de douane.

 

  1. Différenciation entre un commissionnaire transparent et un commissionnaire opaque

 

La distinction s’opère principalement par la visibilité ou non des commettants dans les contrats conclus par le commissionnaire. En effet, l’intermédiaire transparent précisera dans les documents commerciaux (bons de commande, contrats, factures) qu’il agit pour le compte d’un tiers. Les conditions des transactions  ont ainsi déterminées par les commettants.

 

Le commissionnaire transparent est perçu par les parties concernées par une transaction (acheteur/vendeur) comme une personne tierce qui a facilité leur mise en relation, donc un représentant d’une entreprise. Il n’est pas ainsi tenu responsable de la bonne fin des opérations conclues.

 

Le commissionnaire opaque, quant à lui, agit en son nom propre vis-à-vis des tiers : l’identité des commettants n’étant pas révélée, les documents commerciaux sont en son nom.

 

  1. Termes clés dans le domaine du commissionnement

 

Le contrat de commission est un contrat qui définit les modalités de collaboration entre le commissionnaire et le commettant. Il précise l’objet du contrat, l’existence d’un droit d’exclusivité ou non, les obligations et responsabilités des parties, les conditions financières (prix des produits, commissions), la durée de la collaboration et les conditions de réalisation. Pour les contrats de commissionnement à l’achat et la vente, les obligations des parties couvrent plusieurs aspects incluant par exemple le merchandising et la vente, la promotion, la livraison, le conseil et l’assistance technique ou les services après-vente.

 

Le commettant est par la personne physique ou morale qui délègue la réalisation de certaines transactions au commissionnaire.

 

La commission représente la rémunération du commissionnaire : elle peut être constituée d’un montant forfaitaire ou d’un pourcentage de la valeur de l’opération.

 

Section 2 : Le cadre légal et administratif du commissionnement opaque

                                                                                                                                                                               3 p

  1. Le Code de commerce français

 

Le code du commerce fournit dans ses articles L132-1 à L132-9, les textes de référence légaux du commissionnement.  L’article L132-1 précise la définition légale du commissionnaire. L’article L132-2 stipule que l’intermédiaire bénéficie d’un privilège pour garantir ses créances auprès des commettants. Ce privilège couvre le montant principal de la créance, les intérêts, les commissions ainsi que les frais et charges à rembourser par le commettant. Ce dispositif permet ainsi au commissionnaire de récupérer les montants investis et de percevoir sa rémunération même si les produits, objet des transactions, ne sont plus en sa possession.

 

Les articles L132-3 à L132-9 du code de commissionnaire régissent les commissionnaires de transport en particulier. Ils précisent :

 

  • les modalités d’exercice de cette profession incluant entre autres l’obligation d’inscrire la nature et la quantité des marchandises transportées sur un livre-journal.
  • les responsabilités du commissionnaire de transport qui doit garantir la bonne livraison des marchandises selon les termes et le délai fixés entre les parties. Il peut être tenu responsable des pertes et avaries des produits et des faits du commissionnaire à qui il confie les marchandises.
  • les éléments devant figurer dans la lettre de voiture qui constitue le contrat entre l’expéditeur des marchandises, le destinataire, le transporteur et le commissionnaire.

 

L’article L110-1 du code de commerce stipule que toute entreprise de commission est réputée réaliser un acte de commerce. Le commissionnaire a ainsi en principe la qualité de commerçant s’il exerce en tant que profession habituelle (article L121-1).

 

Outre sa définition et le privilège consenti au commissionnaire sur les marchandises qu’il détient en consignation pour pouvoir se faire rembourser ses avances, la loi commerciale ne prévoit pas d’autres normes sur le contrat de commission. Elle la renvoie aux dispositions du mandat prévues dans le Code civil, ce qui est inadéquat compte tenu de la différence entre les deux types de contrat.

 

  1. Les dispositifs européens

 

Le commissionnement constitue un schéma de distribution adopté par les sociétés étrangères pour commercialiser leurs produits dans la zone européenne. La libre circulation des marchandises fait partie des quatre piliers du marché unique instauré dans l’UE. Elle se base sur la suppression des droits et douane et l’inexistence d’un quota en termes de quantités échangées.

 

La directive 2006/112/CE du 28 Novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée cadre la réglementation de la TVA dans la zone européenne. Elle a pour objectif d’harmoniser les législations sur les TVA des biens et des services circulant dans l’UE afin de ne pas fausser les conditions de concurrence. Elle veille à ce que les pays membres supportent la même charge fiscale quelle que soit la longueur du circuit de production et de distribution. Elle fournit par ailleurs les grandes lignes sur les règles d’imposition de la TVA afin de permettre aux Etats membres de modifier leurs structures fiscales.

 

Cette directive précise par ailleurs les modalités des opérations intracommunautaires lorsque celles-ci sont effectuées par un acheteur identifié à la TVA dans un pays membre autre que celui de leur réalisation. Elle éclaircit les conditions de définition du lieu des opérations imposables pour réduire les conflits de compétences entre les pays membres impliqués dans une transaction donnée.

 

Section 3 : La place du commissionnement dans les secteurs d’activité français

 

  1. L’activité du commissionnement déjà agréée en France

 

Les activités de commissionnement en transport et de commissionnement en douane sont agréées en France. L’accès et l’exercice de ces deux professions sont réglementés.

 

Le commissionnaire de transport :

 

Cette profession est régie par le décret n° 90-200 du 5 mars 1990 et par les articles L. 132-3 et suivants du Code de commerce. Les activités du commissionnaire au transport peuvent couvrir l’organisation de transports terrestres, aériens ou maritimes, le groupage et l’affrètement.  Un transporteur dont 15% du chiffre d’affaires provient des activités de commissionnement, est qualifié de commissionnaire de transport.

 

Pour pouvoir exercer ce métier, l’entreprise candidate doit s’inscrire au registre des commissionnaires de transport (RCT) auprès de la DREAL du siège de la société, qu’elle soit française ou une filiale française d’une entreprise étrangère.

 

L’entreprise doit justifier d’une honorabilité, d’une capacité professionnelle. Ces conditions doivent être remplies de manière permanente.  Le dirigeant de l’entreprise doit justifier d’une attestation de capacité à réaliser ses fonctions (statut de cadre, présence permanente dans la société, pouvoir bancaire et pouvoir d’engagement). Cette attestation s’obtient après un examen, par équivalence, ou après une expérience professionnelle.

 

Un examen annuel est organisé par le directeur des transports terrestres et la personne qui doit présenter une attestation qui peut être ou non le dirigeant de l’entreprise doit s’inscrire auprès du préfet de la région du DREAL. Les diplômes tels que le diplôme d’études spécialisées transport de niveau Bac + 2, ou le  diplôme de l’école du transport et de la logistique, ou le diplôme de l’école de maîtrise du transport routier, ou le diplôme de l’Institut supérieur du transport et de la logistique internationale, ou le brevet professionnel de transport et des activités auxiliaires ou un certificat de formation (CNAM/AFT) donnent droit à l’attestation. Les candidats titulaires d’un diplôme supérieur sans être spécialisés en transport, doivent :

 

  • justifier d’une expérience d’au moins une année dans la direction d’une entreprise de commissionnaire ou d’au moins trois ans dans la direction d’une entreprise de transporteur.
  • effectuer un stage d’au moins 80 heures sur le commissionnement auprès d’un organisme agréé.

 

L’expérience professionnelle du demandeur est validée s’il dispose au moins de cinq années d’expérience continue,  s’il n’a pas interrompu ses activités depuis plus de trois ans dans une entreprise de commissionnaire des transports ou de transporteurs/loueurs dûment enregistrés dans leurs registres respectifs. Les cinq années requises peuvent être décomposées en :

 

  • 5 années continues d’expérience en tant qu’indépendant ou dirigeant,
  • 2 à 3 années de formations par un organisme agréé associé avec 2 à 3 années d’expérience à titre d’indépendant ou en tant que dirigeant,
  • 2 années en tant que salarié et 3 années en tant que dirigeant.

 

Le dirigeant de l’entreprise commissionnaire doit par ailleurs prouver qu’il n’a pas fait l’objet d’une condamnation d’interdiction d’une activité commerciale ou industrielle, ou d’une condamnation pour une violation grave du code de la route, de la réglementation sociale, des pratiques du marché. Il doit ainsi produire un extrait de son casier judiciaire.

 

La circulaire du 18 juillet 2012 fournit les procédures applicables pour reconnaître la capacité professionnelle d’un ressortissant de l’Union Européenne qui souhaite exercer le métier de commissionnaire de transport en France. Le ressortissant en question doit disposer d’un titre de formation ou d’un document attestant ses compétences à réaliser cette activité délivrée par un autre Etat membre. Il doit par ailleurs prouver qu’il bénéficie d’une expérience minimum de deux ans à plein temps dans l’exercice de la profession d’organisateur de transport. Cette expérience n’est pas requise si le titre de formation présenté relève d’une formation réglementée relative à l’activité de commissionnaire de transport.

 

Le commissionnaire en douane :

 

Le commissionnaire en douane a pour mission d’accomplir les formalités douanières afférentes à l’importation et à l’exportation de marchandises pour le compte d’un commettant. Ses activités incluent l’affrètement terrestre, aérien ou maritime ; l’organisation logistique (choix du mode de transport, formalités, manutention,…);  la production des documents y afférents ; les formalités et déclarations douanières. Cette profession est réglementée par un arrêté du 22 Décembre 1998.

 

Le commissionnaire en douane peut agir en représentation directe ou en représentation indirecte. Le commissionnaire qui dispose d’un agrément à titre exclusif délivré par la Direction Générale des Douanes et Droits Indirects est autorisé à agir en représentation directe. Il effectue les formalités douanières en mentionnant son numéro d’agrément sur les déclarations de douane. Il signe la déclaration de douane au nom et pour le compte du commettant qui constitue le déclarant et la seule entité redevable des droits et taxes envers l’administration. Il engage ses responsabilités pour les fautes qu’il commet, et il est tenu à un devoir de conseil envers le commettant.

 

Le commissaire en douane en représentation indirecte travaille en son nom propre mais pour le compte du commettant. Il est solidairement responsable avec le commettant du paiement des droits et taxes.

 

L’exercice de cette activité est conditionné par l’obtention d’un agrément et de d’une inscription au RCT. Pour les personnes morales, la demande d’agrément adressée au DG des douanes est accompagnée d’une copie des statuts et de l’extrait de la publication officielle de constitution de la société, d’une déclaration que la société dispose d’un établissement ou d’un engagement qu’elle en disposera après l’obtention de l’agrément, une copie de la délibération du conseil d’administration (pour le SA) sur la désignation du PCA, des directeurs généraux, une copie de la délibération portant sur la désignation des gérants (SARL ou SCA).  La demande fait par la suite l’objet d’une enquête par la direction générale des douanes.

 

  1. Classement statistique des intermédiaires de commerce

 

Les intermédiaires du commerce sont catégorisés dans le secteur du commerce de gros dans la nomenclature d’activités françaises avec un code d’activité principale allant de  46.11Z à 46.19B.

 

En 2013, le commerce de gros en général a connu une hausse en termes de volume et une légère baisse en termes de valeur. Les ventes totales se sont élevées à 743 milliards d’euros (avec 122 milliards € pour les intermédiaires de commerce). Le tableau ci-après fournit un résumé de la croissance du commerce en gros en France depuis 2004.

 

Tableau 1 : Évolution en valeur HT des ventes de marchandises du commerce de gros

 

Taux de croissance en %

  2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012sd 2013p Mds d’euros 2013p
Commerce de gros total (hors intermédiaires du commerce) 4,4 5,4 3,8 4,7 5,4 -12,6 4,5 8,7 1,7 -0,2 620,7
Intermédiaires du commerce (dont centrales d’achats) 5,2 4,7 3,7 5,1 7,7 -10,4 2,0 11,1 6,5 1,3 122,3
Commerce de gros et intermédiaires 4,5 5,3 3,8 4,8 5,7 -12,3 4,1 9,1 2,5 0,0 743

Source : Insee- comptes du commerce, 2013

 

 

Tableau 2 : Évolution en volume des ventes de marchandises du commerce de gros

 

Taux de croissance en %

  2008 2009 2010 2011 2012sd 2013p
Commerce de gros total (hors intermédiaires du commerce) 1,9 -6,8 1,6 4,1 -0,7 0,1
Intermédiaires du commerce (dont centrales d’achats) -1 -0,2 -5,1 2,2 1,4 1,5
Commerce de gros et intermédiaires 1,5 -5,8 0,6 3,8 -0,4 0,4

Source : Insee- comptes du commerce, 2013

 

  1. Évolution des activités de commissionnement en France

 

Les entreprises du commerce de gros réalisent une part de plus en plus croissante des exportations françaises. Elles ont réalisé en 2013 un chiffre d’affaires total de 103 milliards € représentant 24 % des exportations françaises (contre 19 % en 2008). Les exportations réalisées par les entreprises industrielles ont par contre baissé de 70% à 63 % entre 2008 et 2013. Les exportations des entreprises du commerce de gros connaissent une augmentation moyenne annuelle de 5,7% contre 0,7% pour l’ensemble du pays. Les entreprises exportatrices relevant de ce secteur (environ 35 000) restent généralement constants.  Elles représentent 28% du nombre des exportateurs en France.

 

L’augmentation des exportations dans le secteur du commerce de gros s’explique par des échanges internationaux devenus plus complexes et des produits devenus plus techniques (plus facilement obsolètes, nécessitant une plus profonde connaissance des marchés,…). La nécessité de maîtriser les coûts afin d’être plus compétitives a poussé les groupes et les entreprises à se filialiser au lieu de faire appel à des négociants indépendants.

 

Le recours à des filiales spécialisées dans la distribution est décidé par les groupes et les entreprises pour plusieurs raisons:

 

  • avec une filiale commissionnaire en France par exemple, la clientèle française est plus rassurée de traiter avec une entreprise locale qu’une maison étrangère qui lui semble lointaine en cas de problèmes.
  • la filiale commissionnaire ne représente pas en outre un risque financier pour le groupe puisqu’elle n’est pas propriétaire juridique des marchandises. Elle n’est pas responsable des encaissements et du recouvrement des créances. Les risques restent ainsi centralisés et gérés par les groupes.

 

Les types d’opérateurs du commerce de gros sont cependant très hétérogènes : les intermédiaires peuvent par exemple s’occuper de l’intégralité ou d’une partie de la distribution des produits (commissionnaire, distribution, société d’import-export, sociétés du commerce international, …). Certains acteurs peuvent fournir des services plus élaborés incluant par exemple  des fonctions d’ingénieries commerciales et financières. Les statistiques disponibles ne font pas la différence entre les différents métiers : elles mettent cependant en exergue que les filiales et les sociétés principales représentent 50% du nombre des exportateurs et la quasi-totalité de la valeur des exportations.

 

Les exportateurs relevant d’un groupe ont augmenté de 1 230 entre 2008 et 2013, et les valeurs exportées ont connu une croissance annuelle de 4,4% (contre -1,7% pour les indépendants).  Le graphe ci-après fournit une vue d’ensemble sur le dynamisme des opérateurs du commerce de gros rattachés à des groupes entre 2008 et 2013.

 

Graphe 1 : Répartition des opérateurs du commerce de gros entre

filiales/têtes de groupe et indépendants (en %)

 

Source: Douane, 2014

 

Chapitre 2 : Intérêt du commissionnement opaque pour un groupe étranger

 

Le commissionnement constitue une forme de contrat de distribution qui peut représenter des intérêts organisationnels, juridiques et fiscaux pour une société étrangère voulant commercialiser ses produits en France. Dans une situation de crise économique et de recherche permanente de compétitivité, les sociétés optent de plus en plus pour le commissionnement afin de minimiser ses coûts de distribution et de pénétration d’un marché étranger, pour alléger ses formalités administratives et fiscales, pour alléger sa trésorerie en termes de TVA par exemple qui sera redevable dans le pays de consommation, pour réduire les pertes financières éventuelles de la filiale en charge de la commercialisation des produits.

 

Section 1. Les intérêts stratégiques

 

  1. Allègement des formalités administratives et fiscales

 

La structure société mère-commissionnaire permet à un groupe de réaliser des économies fiscales  puisqu’elle bénéficie d’un taux d’impôt consolidé réduit. En effet, la société mère assume généralement plus de fonctions et de risques que le commissionnaire : elle bénéficie d’une ressource financière plus importante représentée par le profit des ventes. En assumant moins de risques, le commissionnaire perçoit moins de revenus. Le groupe peut réaliser des économies fiscales si la société mère se trouve dans un pays avec une fiscalité modérée.

 

D’un point de vue fiscal, un groupe ne peut pas compenser les bénéfices réalisés par certaines sociétés membres avec les pertes réalisées par d’autres sociétés. La structure société mère-commissionnaire permet cependant d’éviter cette problématique puisque les sociétés intermédiaires ne perçoivent que des commissions qui constituent leurs bases imposables. Des transactions commerciales non abouties ne donnent pas lieu à rémunération du commissionnaire. Le risque étant centralisé chez le commettant, les résultats des transactions commerciales positives ou non sont compensés.

 

Les groupes font généralement face aux problèmes des coûts de transfert qui surviennent habituellement lorsque des sociétés membres achètent ou vendent des produits ou services entre elles. Ces dernières doivent veiller à facturer des prix similaires à ceux appliquées sur le marché. Elles risquent en effet d’être confrontées à un redressement fiscal ou à une double imposition si les autorités fiscales soupçonnent l’achat de produits ou de services à un prix largement supérieur à celui du marché dans un pays avec une fiscalité avantageuse. Le recours à un commissionnaire permet au groupe d’éviter ces problèmes puisque les prix à l’achat et les prix à la vente ne sont pas considérés comme des « prix internes ». Le groupe doit cependant être prudent sur les montants des commissions payés : celles-ci doivent correspondre à ceux généralement pratiqués dans le monde du commissionnement.

 

La structure groupe-commissionnaire doit pouvoir justifier de manière détaillée les activités de commissionnement concernées et les montants y afférents. Il est également recommandé au commettant de calculer les commissions sur la base des produits et services vendus et non en fonction des marges bénéficiaires dégagés afin de ne pas remettre en cause l’indépendance du commissionnaire.

 

  1. Amélioration de la gestion des comptes de la société fille

 

Le commissionnement permet à la société mère de ne payer la société fille que pour la valeur ajoutée qu’elle apporte au groupe : cette valeur ajoutée peut se traduire en la prise en charge de fonctions, de responsabilités ou de risques bien définis. La contribution du commissionnaire consiste en sa connaissance du marché que ce soit pour les achats ou les ventes : réseau de fournisseurs, pratiques commerciales communes en termes de prix, de conditions, clients potentiels, réseau de distribution, …).  Il est rémunéré à hauteur des services qu’il rend à la société mère : les frais fixes du groupe s’en trouvent ainsi réduits.

 

Le commissionnaire supporte par ailleurs peu de risques puisque ces derniers sont assumés par la société mère : ces risques incluent par exemple les risques d’obsolescence des produits, les risques de défaut de paiement des clients, les risques de change encourus lors des transactions de vente. En effet, le commissionnaire français doit établir sa facturation dans la monnaie locale alors que les prix de revient des produits sont calculés en monnaie étrangère.  La commission du commissionnaire est calculée sur la base de la facturation locale réalisée.

 

La création d’une filiale commissionnaire peut s’avérer particulièrement avantageuse pour les groupes qui veulent s’installer durablement sur un marché qui présente de grandes opportunités de développement sur le long terme.

 

  1. Optimisation de la gestion des approvisionnements intra-groupes

 

La mondialisation des échanges économiques a poussé les groupes à recourir à la structure de commissionnement pour diminuer les charges et pour dégager davantage de profits. Le modèle de distribution, dans lequel une société mère créait des filiales qui lui appartenaient dans ses principaux marchés, a été peu à peu délaissé à partir des années 80. Chacune des filiales constituait des centres de profits locaux puisqu’elles dégageaient des bénéfices ou des pertes.

 

Ce modèle permettait au groupe d’assurer une distribution rapide de ses produits. Ces filiales  assumaient cependant des charges occasionnées par ses différentes fonctions. Les activités des filiales peuvent inclure l’approvisionnement, la planification, la promotion, la distribution, le transport, la gestion des stocks ou la gestion administrative et financière. L’ensemble des coûts de ces sociétés filles pouvait s’avérer onéreux à long terme pour le groupe.

 

La structure de commissionnement permet au groupe de centraliser les opérations classiques d’achat/vente au sein d’une filiale commissionnaire. Celle-ci achète habituellement des produits finis auprès des sociétés membres du groupe afin de les commercialiser sur le marché dans lequel elle est implantée.

 

Ce dispositif permet au groupe de réaliser des économies d’échelle et d’optimiser la gestion de l’approvisionnement entre les sociétés membres. En effet, la centralisation de la distribution auprès du commissionnaire permet au groupe de :

 

  • contrôler la chaîne de distribution de l’ensemble des produits des sociétés membres. En effet, il peut ainsi plus facilement obtenir des informations centralisées sur la situation des ventes par produits et par pays ; réorienter ses stratégies de distribution en fonction des données ainsi obtenues et influencer le processus de vente. Recourir à un commissionnaire permet au groupe de connaître plus profondément les marchés ciblés (les tendances du marché, les prix pratiqués, les comportements des concurrents, les nouveaux arrivants…).

 

  • simplifier et gérer plus efficacement les commandes des clients. Nous pouvons prendre le cas d’un groupe international spécialisé dans la mode pour illustrer cet avantage de simplification des commandes. Le commissionnaire s’approvisionne en vêtements d’enfants auprès de la société A, en vêtements de femme auprès de la société B, en vêtements d’homme auprès de la société C,…. Un client, distributeur textile, peut ainsi établir une commande pour divers articles auprès du commissionnaire et être livré en une seule fois par une seule entité. La livraison des marchandises, la facturation, le recouvrement des créances, la comptabilité en sont plus facilités.

 

  • pénétrer plus efficacement un nouveau marché en travaillant avec un commissionnaire qui le maîtrise bien tout en optimisant ses coûts. Cette optimisation est d’autant plus favorisée par le fait que le commissionnaire ne se concentre que sur une fonction bien précise, celle de l’approvisionnement auprès des sociétés membres et la distribution auprès des clients. La création d’une filiale commissionnaire permet par ailleurs au groupe de disposer d’un point de vente avec un « visage local ».

 

Section 2 : Intérêt économique

 

  1. Minimisation des coûts de transaction

 

Les flux de produits finis d’un groupe peuvent être importants en volume ou en valeur selon la nature de son activité. La centralisation de la distribution auprès d’une filiale commissionnaire permet de réduire les coûts de transaction pour les raisons ci-après :

 

  • le fait de confier la commercialisation à une ou des filiales dédiées permet aux autres sociétés de se concentrer sur d’autres fonctions sur lesquelles elles peuvent apporter plus de valeur ajoutée. Ces fonctions incluent à titre d’exemple la recherche et développement ou la production. Les sociétés du groupe peuvent ainsi se focaliser sur leur cœur de métier et améliorer leur productivité opérationnelle et administrative. Grâce à cette répartition des fonctions, les sociétés du groupe économisent des coûts de fonctionnement et des coûts d’opérations. La société A d’un groupe n’a plus ainsi besoins d’engager des dépenses dans l’établissement d’une stratégie de distribution, dans la réalisation de supports de communication ou dans la mise en œuvre d’un plan marketing. Il en est de même pour les sociétés B et C puisque ces activités seront désormais confiées au commissionnaire.

 

  • le système de gestion des flux mis en place par la filiale commissionnaire permet au groupe d’effectuer un suivi consolidé du volume et de la valeur des ventes ainsi que des marges réalisées. Le groupe dispose d’informations en temps réel et cette consolidation permet à ses dirigeants de prendre rapidement des décisions et des mesures correctives. Les coûts administratifs et comptables sont réduits puisque les informations de chacune des sociétés ne sont plus traitées de manière extracomptable.

 

  • les commissions versées au commissionnaire constituent des charges variables rattachées directement au chiffre d’affaires que le groupe répercute sur les prix de vente de ses produits. Le commissionnement réduit ainsi les charges fixes qui ont un impact considérable sur les marges dégagées.

 

  • les coûts liés à la distribution sont mutualisés : ils incluent par exemple les coûts de transport et d’acheminement des marchandises auprès du commissionnaire basé dans un même pays ou dans un autre pays que la société mère et les autres sociétés membres. Les coûts de promotion et de publicité sont réduits puisqu’une stratégie de communication peut être définie pour l’ensemble des produits du groupe centralisés auprès du commissionnaire. Les coûts de prospection et de recherche de clients s’en trouvent également minimisés.

 

Pour disposer d’une filiale, la société étrangère peut :

 

  • créer une nouvelle entreprise en France : cette option peut s’avérer coûteuse et plus longue administrativement. La société mère bénéficie d’une plus grande liberté dans le recrutement du personnel de la filiale.

 

  • prendre une participation au capital d’une entreprise locale qui peut assurer la commercialisation des produits de la société et qui connaît bien le marché. Cette option est moins coûteuse que la première option car la société étrangère disposera d’une structure déjà opérationnelle qui dispose généralement des actifs et biens nécessaires à la réalisation de sa mission (bureau, véhicules, mobiliers de bureau, matériels et équipements informatiques, local de stockage,…), de la force de vente ou des agents commerciaux et administratifs nécessaires.

 

Les coûts de création d’une filiale peuvent être amortis si la société étrangère exploite le marché dans lequel il s’implante de manière durable et profitable.

 

  1. Possibilité d’optimisation fiscale des livraisons au commissionnaire

 

Les livraisons au commissionnaire présentent également l’intérêt de différer l’imposition des ventes.  En effet, lorsque les sociétés recourent  à un distributeur classique : l’imposition des ventes se fait sur deux niveaux. Dans un premier temps, les sociétés sont imposées sur les produits des ventes (chiffres d’affaires diminués du prix d’achat des matières et des coûts de production) des produits qu’elles ont vendues au distributeur. En second lieu, le distributeur est imposé sur les bénéfices qu’il a réalisés sur la vente des produits auprès de clients tiers.

 

Dans le cadre d’un recours au commissionnaire, la société mère est imposée sur les bénéfices dégagés (prix de vente minoré du coût d’achat des matières premières, des coûts de production et de la commission versée à l’intermédiaire).  Le commissionnement permet également à la société mère de réduire les risques de problématique sur les prix de transfert puisque la filiale n’a pour activité que de vendre les produits pour le compte du groupe. La question des prix de transfert n’intervient qu’au niveau des commissions, ce qui facilite la gestion des flux intra-groupes et leur justification.

 

Chapitre 3 : Impacts comptables et fiscaux

 

Section 1 : Procédure de comptabilisation des opérations

 

  1. Enregistrement comptable des opérations de vente

 

Dans les comptes du commissionnaire :

 

Il constate la vente en débitant un compte client (puisque la vente est réalisée en son nom et que la facturation émane du commissionnaire) et en créditant un compte produits (pour enregistrer la vente proprement dite).  Il enregistre également une dette envers le commettant (puisque la vente est réalisée pour le compte de ce dernier) contre la créance client. Le commissionnaire comptabilise en outre la commission perçue représentant son chiffre d’affaires (dans un compte produits) et une créance envers le commettant.

 

Dans les comptes du commettant :

 

Il constate la vente en débitant le compte client commissionnaire (puisque ce dernier doit lui reverser les produits de la vente envers des tiers) et en créditant un compte produits (puisque la valeur des ventes constitue son chiffre d’affaires). Il comptabilise par ailleurs la commission due au commissionnaire en débitant un compte de charges (ce montant doit être payé à titre d’un service rendu) et en créditant une dette envers le commissionnaire.

 

En termes de facturation :

Lors d’une vente, le commissionnaire émet deux factures : (a) une facture envers le client acheteur pour le montant équivalent au produit du prix de vente et de la quantité vendue. Le commettant ne facture pas la vente au client puisque le commissionnaire agit pour son compte ; (b) une facture envers le commettant pour sa commission.

 

Cette facturation directe de la vente par le commissionnaire au client pose une problématique pratique pour le commettant qui ne dispose pas de pièces comptables justificatives pour attester de la vente (bon de commande ou contrat de vente au nom du commettant, facture de la société étrangère au tiers client, bon de livraison).  Pour y remédier, le commettant peut établir une facture au nom du commissionnaire avec apposition d’une mention « confirmation de la vente sur commission ». Cette facturation interne est par ailleurs nécessaire dans le cadre de l’imposition à la TVA.

 

  1. Enregistrement comptable des opérations d’achat interne

 

L’achat interne n’est constaté qu’au moment de la vente puisqu’il n’y a pas de transfert juridique de la propriété des marchandises entre le commissionnaire et le commettant. Ce transfert a lieu entre le commettant et le client qu’au moment de la vente. Dans les comptes du commissionnaire, l’enregistrement d’un compte produit (pour la vente chez le client) s’annule avec l’enregistrement d’un compte achat. Ces comptes s’annulent puisque seule la commission constitue le chiffre d’affaires du commissionnaire. Etant donné l’absence de transfert de la propriété des produits, aucun stock n’est constaté chez ce dernier.

 

  1. Comptabilisation des opérations de livraison intracommunautaire des biens

 

La livraison intracommunautaire intervient lors des achats ou des ventes effectuées par des opérateurs localisés dans l’Union européenne.

 

Achat intracommunautaire de biens et marchandises :

 

L’entreprise fournisseur ne facture pas de TVA à l’entreprise acheteur dans le cadre d’un achat intracommunautaire puisque lors de la revente des marchandises, l’acheteur va collecter cette taxe auprès de ses clients. La TVA fera alors l’objet d’une autoliquidation au niveau des écritures comptables : à la réception d’une facture, l’entreprise acheteur devra calculer une TVA fictive et passer les écritures comptables y afférentes. Celles-ni n’ont aucun impact au niveau de la comptabilité, elles permettent néanmoins à l’entreprise d’effectuer la déclaration obligatoire de TVA des achats intracommunautaires.

 

L’écriture comptable pourrait se présenter comme suit :

 

Achat de matières premières

TVA déductible (dont le montant est calculé de manière fictive)

à Fournisseurs

à Tva due intra-communautaire

Vente intracommunautaire de biens et marchandises :

Les ventes réalisées dans l’Union européenne ne sont pas assujetties à la TVA, la facture de vente ne doit pas ainsi en comporter. Les écritures comptables sont ainsi exemples de TVA.

 

Clients

Ventes Union Européenne

 

Section 2 : Aspects fiscaux du commissionnement opaque

 

  1. Assujettissement du commissionnaire opaque

 

L’assujettissement d’un commissionnaire est défini après la détermination de sa qualification fiscale. Un commissionnaire transparent, qui agit au nom et pour le compte du commettant, est considéré comme un prestataire de services et seule sa rémunération est imposable à la TVA. Le commissionnaire opaque, quant à lui, est assimilé à un acheteur-revendeur : de ce fait, le montant total de la transaction (prix de vente et commission) est imposable. Un commissionnaire opaque facturera ainsi au commettant le prix de vente relatif à la commande majoré des frais de gestion (si applicable) et de la commission ainsi que de la TVA correspondant. Il est par ailleurs assujetti aux règles de territorialité des livraisons de marchandises selon la transaction réalisée.

 

Le commissionnaire est imposable dans la catégorie des BIC (en tant que commerçants et à raison des opérations qu’il réalise) en IR pour les entreprises individuelles, en IS pour les sociétés, en TVA sur les achats-reventes, et à la contribution économique territoriale.

 

  1. Déclaration et détermination de la base imposable pour l’impôt sur les revenus

 

Les bénéfices réalisés par le commissionnaire  sont imposables dans la catégorie des BIC et ainsi assujettis à l’impôt sur les revenus. Sa base imposable est calculée en minorant l’ensemble des produits réalisés avec les dépenses engagées durant la période d’imposition, qu’ils aient été effectivement encaissés ou décaissés. L’article 38-2 bis du code général des impôts stipule que les créances sont rattachées à l’exercice au cours duquel la livraison des marchandises a été effectuée. Les prélèvements effectués par le commissionnaire seront intégrés dans la base imposable s’ils constituent une charge pour la société et s’ils ont été nécessaires pour les besoins de l’exploitation.

 

Le commissionnaire doit normalement déclarer le bénéfice net imposable réalisé au 31 Décembre de l’année d’imposition (pour un exercice allant de janvier à décembre). Si l’exercice de l’entreprise est différent de cette période (juin à mai), le bénéfice déclaré correspondra au mois de clôture (mai) pour l’année d’imposition.


Le régime d’imposition du commissionnaire dépend  de la taille et du chiffre d’affaire réalisé :

 

  • le régime micro-BIC s’applique si la société dégage un chiffre d’affaires annuel de 82 200 € hors taxes, et si elle est exonérée ou en franchise de TVA. La déclaration inclut le numéro SIRET de la société, le montant de son chiffre d’affaires, l’adresse de son principal établissement et ses effectifs. Un abattement de 50% s’applique sur les résultats déclarés.
  • le régime réel simplifié si la société réalise un chiffre d’affaires annuel inférieur à 783 000 € hors taxes (HT),
  • le régime réel normal est applicable pour la société ne bénéficiant pas d’un régime micro-BIC ou simplifié. Les sociétés éligibles au régime micro-BIC et simplifié peuvent néanmoins opter pour ce dernier régime.

 

Le commettant doit déclarer les commissions versées à un commissionnaire lorsque ces dernières correspondent à un service rendu. Les commissions payées aux commissionnaires en douane agrées ne font pas obligatoirement l’objet d’une déclaration si les montants versés correspondent aux tarifs réglementaires et s’ils sont stipulés de manière distincte sur les factures.

 

 

  1. Déclaration des opérations de transactions intracommunautaires

 

Pour rappel, le commissionnaire opaque agit en son nom et pour le compte d’un commettant sans révéler l’identité de ce dernier auprès des tiers.  Du point de vue des douanes et de la fiscalité, le commissionnaire à la vente est réputé acheter des marchandises auprès de son commettant et les commercialiser à des tiers.  Le commissionnaire à l’achat est réputé acquérir des marchandises auprès d’un fournisseur et les vendre à son commettant.

 

Le commissionnaire en marchandises, qui réalise des exportations (dans des pays hors de l’Union Européenne), est considéré comme réalisant personnellement ces opérations[1]. Il est ainsi réputé avoir acheté et revendu les marchandises à l’exportation : il acquiert donc la qualité d’exportateur[2] .

 

Le commissionnaire en marchandises, qui réalise des livraisons intracommunautaires (entre les pays membres de l’Union Européenne) de marchandises exonérées de TVA, est considéré comme ayant réalisé une prestation de services car la livraison est réputée être effectuée par le commettant. Ce dernier doit apporter la preuve qu’il a rempli les conditions requises pour bénéficier d’une exonération et de remplir les obligations requises.

 

Le commissionnaire en France doit déclarer les transactions qu’il réalise à l’intérieur de l’Union Européenne bien que ces dernières ne font pas l’objet de formalités et de déclarations en douane. Il doit ainsi remplir et communiquer mensuellement à la douane une déclaration d’échanges de biens (DEB). Ce document permet à l’Etat d’établir les statistiques du commerce extérieur et d’effectuer un suivi fiscal de la TVA en connaissant les flux de marchandises entre les pays européens.

 

La DEB restitue l’ensemble des échanges de marchandises importées/exportées et ayant fait l’objet de livraison intracommunautaire.  Ils incluent les marchandises importées en France soumises à droits et taxes et qui sont par la suite expédiées vers un pays européen ainsi que les marchandises livrées de France vers un autre pays membre de l’UE destiné à être exportées. Le commissionnaire ne doit pas déclarer dans la DEB les marchandises qui sont expédiées en régime transit ; les échantillons commerciaux ; les marchandises qui rentrent temporairement en France pour des foires ou pour des analyses ; les livraisons effectuées auprès de particuliers étrangers basés en France.

 

Cette déclaration doit être établie à partir du moment où il y a un flux physique : l’existence ou non de flux financiers ou de facturation ne conditionne pas l’obligation de déclaration. Celle-ci doit se faire dans un délai de 10 jours à compter de la date d’éligibilité de la TVA en ce qui concerne les livraisons intracommunautaires, et doit être déposée au service des douanes. Il incombe à la société commissionnaire ou à son commissionnaire en douane dûment mandaté d’établir les déclarations. Le commissionnaire est responsable de la véracité des informations fournies auprès du service des douanes.

 

La DEB contient les informations ci-après : un numéro d’identification de la déclaration, la nomenclature des marchandises, leur poids, le type de la transaction (achat/vente), le pays d’origine et le pays destinataire, le numéro de TVA intracommunautaire de l’acheteur.

 

Le niveau de détail de la déclaration varie en fonction des montants des marchandises arrivées d’un pays membre de l’Union Européenne (introduction) et des montants des marchandises livrées à partir de la France vers un Etat membre (expédition).

 

Tableau 3 : Niveau de détail de la DEB

INTRODUCTION NIVEAU D’OBLIGATION EXPEDITION NIVEAU D’OBLIGATION
Seuil de 460.000 euros Déclaration détaillée Seuil de 460.000 euros Déclaration détaillée
En dessous de 460.000 euros Pas de déclaration En dessous de 460.000 euros Déclaration simplifiée, données limitées à fournir

Source : Site douane.gov.fr

 

Le commissionnaire doit choisir le niveau le plus contraignant si deux niveaux sont applicables en tenant compte de l’introduction et de l’expédition. Il peut par ailleurs opter pour la déclaration détaillée pour des raisons pratiques. En cas de dépassement d’un seuil, le commissionnaire doit appliquer le niveau d’application correspondant à partir du mois concerné.

 

Une société commissionnaire qui vient d’être créée, ne procède à sa première déclaration que lorsque le montant cumulé des introductions intracommunautaires excède 460 000€. Elle doit cependant remplir une DEB dès sa première expédition quel que soit son montant.

 

La non production de la DEB dans les délais impartis est passible d’une amende de 750 à 1000€. Chaque erreur ou omission constatée dans la déclaration est passible d’une amende de 15€ avec un plafond maximum de 1500€.

Partie 2 : Identification et évaluation des risques fiscaux encourus par un commissionnaire opaque en France

 

Cette deuxième partie identifie les risques fiscaux encours par un commissionnaire opaque en France. Les principaux points fiscaux concernent le prix de transfert sur les commissions, la TVA relative au commissionnaire opaque, l’application du régime acheteur/revendeur pour la détermination de l’IS, la problématique de la reconnaissance d’un établissement stable ou l’existence potentielle d’un transfert de clientèle au commettant. Elle explique la nature de ces risques fiscaux en se basant sur les textes et les réglementations en vigueur et sur les récentes jurisprudences.

 

Les risques fiscaux du commissionnaire opaque peuvent être répartis en trois catégories : les risques opérationnels liés aux caractéristiques même de l’activité de commissionnement (impôts et taxes dus, délai de paiement, obligation déclarative) ; les risques liés à la méconnaissance des règles fiscales ; les risques liés à la structure juridique du commissionnaire (territorialité de l’impôt).

 

Cette partie présente également des techniques d’évaluation de l’existence de ces risques fiscaux basés sur un ensemble de questions que l’expert-comptable doit se poser lors de son diagnostic. Elle présente par ailleurs les conditions d’exonération et de déduction de la TVA pour les transactions réalisées par le commissionnaire opaque.

 

Chapitre 1 : Nature des risque fiscaux

 

Ce premier chapitre restitue les différents impôts et taxes auxquels le commissionnaire opaque est assujetti, les réglementations fiscales qui concernent la TVA intracommunautaire. Celles applicables aux acquisitions et aux livraisons intracommunautaires doivent être en effet maîtrisées pour pouvoir appréhender la taxe redevable dans le cas d’un long circuit de distribution. Il explique par ailleurs les risques auxquels le commissionnaire s’expose en cas de méconnaissance du dispositif fiscal afférent à son activité.

 

Section 1 : Risques opérationnels liés à l’activité de commissionnaire

 

  1. Synthèse des impôts et taxes applicables au commissionnement opaque

 

L’expert-comptable doit vérifier au préalable que le commissionnaire dispose réellement de la qualification fiscale de commissionnaire opaque. Pour ce faire :

 

  • il vérifie si le contrat conclu entre le commettant et le commissionnaire mentionne si le commissionnaire agit en son nom propre pour son compte ou pour le compte d’autrui.
  • il vérifie si les contrats émis par le commissionnaire envers son client mentionnent que le commissionnaire agit au nom d’autrui avec la mention de la raison sociale ou du nom, de l’adresse du commettant.
  • il vérifie s’il existe des transactions qui ont fait l’objet de facturation directe entre le commettant et le client final, alors que celles-ci ont impliquées le commissionnaire.

 

Pour que le commissionnaire ait la qualification fiscale d’un commissionnaire opaque, (a) il doit être clairement établi dans la convention conclue entre lui et son commettant que l’intermédiaire agit en son nom propre et pour son propre compte, impliquant donc que l’identité du commettant n’est pas visible auprès des tiers ; (b) que les factures émises par le commissionnaire ne portent aucune indication sur le commettant ; (c) que les facturations du commissionnaire portent sur les transactions entre lui et son client. Dans le cas de la conversion d’une filiale d’un statut de distributeur à un statut de commissionnaire opaque, l’expert-comptable doit recommander le respect de ces règles générales lors de la rédaction de la convention société étrangère-filiale et lors des facturations entre commissionnaire et client final.

 

Le commissionnaire opaque est assujetti aux impôts et taxes ci-après :

 

  • La TVA: le commissionnaire opaque est assimilé à un acheteur-revendeur, et est ainsi imposable à la TVA sur le montant total de la transaction (prix payé par le client final ou le commettant, incluant la commission). Les règles afférentes à la TVA sont détaillées dans les prochaines sections.

  • L’IS : le commissionnaire opaque est assujetti à l’impôt sur les sociétés pour les bénéfices qu’il réalise.

 

  • La contribution économique territoriale: Les entreprises qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 7 600 000€ sont assujetties à la CET pour un montant au moins égal à 1,5 % de la valeur ajoutée produite par l’entreprise. Le chiffre d’affaires et la valeur ajoutée à considérer par l’entreprise correspondent à ceux réalisés durant les 12 mois de l’année d’imposition. Malgré le fait que le commissionnaire opaque agit pour le compte d’autrui, il est assujetti à la cotisation de taxe professionnelle sur la base du montant total des marchandises vendues pour le compte du commettant et non uniquement sur la base de ses commissions.

Le chiffre d’affaires à retenir dans le cas d’un commissionnaire opaque qui agit en son nom propre et pour le compte d’autrui, pour la cotisation minimale de taxe professionnelle, et pour la même occasion, à la cotisation minimale de CFE à la CVAE a été confirmé par une décision du Conseil d’Etat sur le cas de la société AUSTRALE, commissionnaire opaque vendant des voitures d’occasion. Celle-ci avait en effet demandé l’annulation du jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en 2009 sur l’augmentation de sa cotisation minimale de taxe professionnelle au titre de 2003 assortie de droits et pénalités de 25 025€.

 

La société AUSTRALE avait fourni les argumentations ci-après pour justifier cette demande : (a) elle réalise ses ventes en son nom mais pour le compte de ses fournisseurs dans le cadre d’une activité de commissionnaire-priseur qui fait partie de la catégorie de commissionnaire opaque ; (b) le régime d’acheteur-revendeur du commissaire opaque n’est applicable que pour l’imposition de la TVA et non pour la cotisation de taxe professionnelle ; (c) les montants des ventes sont versés intégralement aux fournisseurs et la société ne perçoit qu’une commission de 9% ; (d) elle n’émet pas de factures au noms des clients mais un bordereau d’adjudication mentionnant le montant de l’adjudication et la commission légale de 9 %.

 

Le Conseil d’Etat a rejeté la demande d’annulation émanant de la société AUSTRALE en évoquant les argumentations ci-après : (a) selon l’article 1647E du CGI, à partir du moment où une entreprise agit en son nom propre pour le compte d’autrui, elle doit calculer son chiffre d’affaires sur la base des prix totaux des transactions effectuées, incluant ses commissions ; (b) la société indique elle-même dans sa demande qu’elle agit en tant que commissionnaire opaque agissant pour le compte de son commettant ; (c) que les documents émis par la société ne précisent pas que la société agit au nom du commettant, de même que les certificats de vente ne mentionnent pas le nom du commettant, confirmant de ce fait qu’il est un commissionnaire opaque ; (d) même si la société n’exerce pas une activité d’achat-revente, il n’est pas fondé qu’elle ne base le calcul de son chiffre d’affaires que sur les commissions.

 

Pour rappel, la CET est composée de la CFE et de la  CVAE :

 

  • la CFE doit être payée par l’entreprise dans chaque commune ou elle a des locaux ou des terrains. Elle est calculée sur la base de la valeur locative de biens (valeur brute) utilisés par l’entreprise pour les besoins de son exploitation et assujettis à la taxe foncière (terrains, locaux, installations possédés ou loués en crédit-bail ou mis à disposition gratuitement). Le taux d’imposition varie d’une fonction à l’autre.

 

  • la CVAE est redevable par les entreprises qui réalisent un CA supérieur à 152 500€. Elle est calculée sur la base de la valeur ajoutée de la société qui s’obtient par la différence entre le CA réalisé et les achats de biens et les charges d’exploitation. Les produits et les charges financiers et exceptionnels ne sont pas considérés dans le calcul de la valeur ajoutée. Le montant de la valeur ajoutée ne peut pas excéder 80% du CA (si CA ≤ 7 600 000€) ou 85% du CA (si CA ≥ 7 600 000€). Le taux d’imposition s’élève à 1,5%.

 

  1. Les autres règles : déduction, exonération

 

En ce qui concerne la TVA

 

Les transactions commerciales réalisées entre des entreprises opérant dans l’Union Européenne sont régies par des règles particulières incluant celles relatives aux exonérations et aux déductions.

 

  • Exonération et déduction

 

En ce qui concerne les acquisitions intracommunautaires : Lorsqu’une entreprise assujettie en France achète des biens ou marchandises auprès d’une société étrangère assujettie établie dans un autre pays membre de l’Union Européenne, la TVA est exigible en France si le lieu de livraison du bien est localisé fiscalement en France.

 

D’un point de vue pratique, l’acheteur en France reçoit une facture de son fournisseur  (société étrangère) qui ne contient pas de TVA. L’acheteur doit payer la TVA en France : celle-ci peut être déductible si la facture mentionne le prix hors taxe (relatif à l’achat-vente) et les numéros d’identification à la TVA du fournisseur et de l’acquéreur L’acheteur doit auto-liquider la TVA en précisant la TVA collectée et la TVA déductible dans la déclaration CA3.

 

Les acquisitions intracommunautaires ne sont exonérées de TVA que pour les personnes bénéficiant d’un régime dérogatoire et les acheteurs qui réalisent un montant d’achat intracommunautaire annuel inférieur au seuil de 10 000€.

 

En ce qui concerne les livraisons intracommunautaires : Elles traduisent les ventes réalisées par une société française à une autre société assujettie à la TVA localisée dans un pays membre de l’UE. La société française peut bénéficier d’une exonération sur la TVA si les conditions ci-après sont satisfaites :

 

  • la livraison doit être réalisée à titre onéreux,
  • la société « fournisseur » est un assujetti à la TVA et doit ainsi disposer d’un numéro de TVA intracommunautaire,
  • la société « acheteur » est également assujettie à la TVA ou ne constitue pas une PBRD, et doit également avoir un numéro intracommunautaire,
  • le fournisseur doit connaître le numéro d’identification à la TVA de l’acheteur,
  • le fournisseur doit posséder des justificatifs de livraison des biens ou des marchandises hors de France : ces justificatifs peuvent inclure les factures, les bons de livraison,….

 

Si une de ces conditions n’est pas remplie, le vendeur doit soumettre la livraison à la TVA.

 

  • Franchise de TVA

 

Une société assujettie à la TVA peut importer et recevoir des biens ou marchandises en franchise de la TVA lorsque ces derniers feront l’objet d’une exportation, ou d’une livraison intracommunautaire exonérée (donc respectant les conditions énumérées ci-dessus).

 

Les biens et marchandises achetés auprès des pays membres de l’UE doivent faire l’objet d’une attestation d’acquisition intracommunautaire de biens ou de services en franchise de la TVA tandis que les biens importés (hors de l’UE) feront l’objet d’un avis d’importation en franchise.  Ces attestations sont à remettre aux fournisseurs ou au service des Douanes : elles certifient que les biens seront destinés à être livrés à l’exportation ou dans un pays européen. Elles doivent être conservées par les acheteurs comme un document justificatif.  L’acheteur devra acquitter la TVA si les biens ne sont pas exportés ou livrés selon le motif pour lequel il a obtenu la franchise. L’autorité fiscale peut exiger une caution auprès de l’acheteur.

 

Pour bénéficier du dispositif de franchise, l’acheteur doit être assujetti à la TVA et doit être celui qui livre ou exporte directement les biens ou marchandises.

 

Exportation et livraison intracommunautaire par un commissionnaire opaque : Le commissionnaire opaque est réputé acquérir et livrer les biens ou marchandises en son personnel : son commettant constitue de ce fait son fournisseur. Il peut être exonéré de TVA pour les acquisitions et les livraisons intracommunautaires qu’il réalise s’il respecte les conditions requises. De ce fait, il peut réaliser des achats en franchise auprès de son commettant si les biens achetés seront livrés ou exportés à un client tiers.  Il doit remettre à son commettant une attestation particulière qui précise qu’il agit en son nom propre mais pour le compte d’autrui. Elle doit par ailleurs être chiffrée  si le commissionnaire doit la soumettre au visa de l’autorité fiscale.

 

L’achat en franchise est conditionné par le respect d’un contingent équivalent au montant des livraisons imposables à  la TVA réalisées par le commissionnaire durant l’année précédente. L’administration fiscale peut cependant autoriser un dépassement inférieur ou égal à 20% si l’intéressé justifie l’augmentation de ses commandes. Une demande portant sur un dépassement du contingent supérieur à 20% fera l’objet d’une enquête et d’une vérification approfondie par le service des impôts des entreprises.

 

Le commissionnaire peut se trouver en situation de crédit de taxe lorsque les livraisons qu’il a réalisées en franchise et lorsque les transactions taxables à la TVA sont inférieures aux dépenses engagées. Il peut se faire rembourser le crédit de taxe déductible.

 

Au vu de ces règles d’exonération et de déduction, l’absence de numéro de TVA intracommunautaire des parties concernées par une transaction imposable à la TVA, le non respect des règles de facturation, l’impossibilité de justifier la livraison réelle des biens et marchandises peuvent constituer des risques fiscaux opérationnels considérables pour un commissionnaire opaque qui se verrait ainsi imposer à la TVA sur la totalité du montant total de la transaction.

 

  1. Faits générateurs de TVA : approvisionnement, revente,

 

Les faits générateurs de la TVA désignent les faits qui rendent cette taxe exigible. Ils dépendent essentielle de la nature des transactions effectuées par un assujetti. D’une manière générale, les faits générateurs de la TVA se produisent au moment où les biens et les marchandises sont livrés à l’intérieur du pays concerné (que ce soit lors d’acquisition communautaire, de la livraison communautaire, de l’importation ou de l’exportation).Sélectionner les versions à comparer

 

Pour le cas de l’intermédiaire opaque, le  commettant (société étrangère établie dans un autre pays membre de l’UE) livre et stocke des biens ou marchandises auprès d’un commissionnaire opaque. La réception des biens et des marchandises en France par le commissionnaire n’est pas considérée comme une affection à leur date d’arrivée si ce dernier les vend dans un délai de trois mois à compter de leur date de réception. La vente est réputée réalisée au moment du transfert de propriété des biens et marchandises auprès du client du commissionnaire, moment auquel le fait générateur et l’exigibilité de la TVA intervient (article 269 du CGI). Le commettant et le commissionnaire doivent cependant être en mesure de justifier la qualité d’intermédiaire opaque intervenant dans la transaction (contrat, autres,…)

 

Lorsque la vente des biens et marchandises est effectuée par le commissionnaire dans un délai supérieur à trois mois, le commettant doit procéder à la régularisation de l’affectation en la soumettant à la taxe une fois que le délai légal est expiré. Il doit par également soumettre la livraison interne à la TVA lorsque les biens ou marchandises concernés sont vendus par l’intermédiaire.

Des ventes à essai peuvent être réalisées par un commissionnaire opaque dans le cadre des opérations intracommunautaires : les premières ventes sont réalisées à titre d’essai afin de tester le marché, ou la capacité du commissionnaire à commercialiser les produits. Pour ces transactions spécifiques, la réception des marchandises en France par le commissionnaire n’est ni considérée comme une affectation ni une acquisition intracommunautaire. Elles ne sont qualifiées en tant que telles que lorsque les biens ont fait l’objet d’un transfert de propriété.

 

La non maîtrise des faits générateurs de la TVA constitue de ce fait un risque fiscal opérationnel pour le commissionnaire opaque : le dépassement ou non du délai légal de trois mois doit être surveillé.

 

  1. Respect du délai de paiement de la TVA et vérification du taux d’imposition effectif

 

D’une manière générale, les entreprises assujetties à la TVA doivent effectuer une déclaration de leurs chiffres d’affaires et de leurs taxes au service des impôts dont elles relèvent dans les délais fixés par l’administration fiscale. Ils doivent également acquitter la TVA au moment de la déclaration.

 

Les entreprises assujetties à la TVA soumis au régime réel normal doivent effectuer cette déclaration tous les mois. Une déclaration trimestrielle peut être accordée à celles dont le montant de la taxe s’élève annuellement à moins de 4 000€.  Celles qui rencontrent des difficultés pour effectuer leurs déclarations dans les délais peuvent obtenir une demande supplémentaire d’un mois. Pour en bénéficier, ces entreprises doivent établir une demande auprès du service des impôts et doivent l’expliquer/la justifier (par exemple : la difficulté pour un groupe de collecter l’ensemble des éléments nécessaires à la déclaration auprès de ses filiales dans le délai de 15 jours exigé pour procéder à la déclaration). Les entreprises autorisées à faire une déclaration trimestrielle ne peuvent pas demander un délai supplémentaire.

 

Bien que l’entreprise bénéficie d’un délai additionnel pour faire sa déclaration, elle doit verser un acompte dans le délai normal légal : elle doit ainsi évaluer la TVA normalement due et payer un acompte de 80%. Ce travail d’évaluation incombe totalement et reste sous la responsabilité de l’entreprise. La différence constatée entre la taxe devant être payée et l’acompte payé sera imputée des acomptes sur les prochains mois ou fera l’objet d’un paiement complémentaire lors de la déclaration effective.

 

Dans la pratique, l’entreprise versera le 15 du mois 2 un acompte relatif au chiffre d’affaire évalué au cours du mois précédent (mois 1). L’imprimé utilisé mentionnera « acompte pour le mois du mois 1» et le montant de l’acompte dans une ligne bien distincte. Dans sa déclaration du mois 3, le redevable précisera le chiffre d’affaires réel du mois 1, le montant de la taxe réellement dû, l’acompte déjà versé ainsi que l’acompte estimé pour le mois 2. Il s’acquitte de la somme ainsi déterminée.

 

Pour éviter les fraudes, l’administration fiscale a fixé que le redevable doit payer en acompte au moins un montant égal à 80% de la taxe normalement due. En cas de sous-évaluation de cet acompte de 20%, l’entreprise devra s’acquitter d’un intérêt de retard de 5% (article 1731 du CGI).

 

Les entreprises assujetties au régime réel simplifié d’imposition doivent réaliser une déclaration annuelle de la taxe due pour l’exercice. Elles doivent également payer un acompte semestriel pour le prochain exercice.

 

La déclaration de TVA doit être réalisée même si l’entreprise n’a effectué aucune transaction imposable à la TVA, elle doit apposer la mention « néant ».

 

  1. llustration : cas pratique

 

Pour illustrer la détermination des faits générateurs de la TVA, un commettant A établi dans un pays membre de l’UE livre le 2 mars à son commissionnaire à la vente basé en France des marchandises qui seront vendues intégralement à un client le 28 mai.

 

  • A la date du 02 mars, bien que le commissionnaire est réputé acquérir les biens en son nom personnel, à cette date, il n’est pas considéré avoir acheté les biens. Le commettant, lui, a affecté les biens, opération assimilable à une acquisition intracommunautaire. Il doit normalement déclarer et payer les taxes y afférent.

 

  • Les marchandises sont revendues à la date du 28 mai, la livraison de biens par le commettant n’est pas qualifiée d’affectation puisque la revente est intervenue dans un délai de trois mois. Une acquisition intracommunautaire a été réalisée par le commissionnaire qui devient ainsi imposable à la TVA. Le client du commissionnaire (dans le cas d’une livraison intracommunautaire) mentionne la transaction dans la DEB. Le commettant peut récupérer la TVA déductible sur les dépenses engagées en France pour la réalisation de la transaction (TVA sur coûts de stockage par exemple).

 

  • Si les marchandises ne sont pas vendues par le commissionnaire à la date du 03 juin, elles sont imposées à la TVA suivant les règles du droit commun.

 

Section 2 : Risques lié à la méconnaissance des dispositions favorables à l’optimisation fiscale

 

  1. Évolution récente du dispositif fiscal des activités de commission

 

Importance des numéros d’identification à la TVA

 

Comme il a été indiqué dans les sections précédentes, le vendeur et l’acheteur doivent chacun fournir un numéro d’identification à la TVA afin de bénéficier d’une exonération à cette taxe à la livraison. En effet, chaque entreprise assujettie opérant dans l’UE doit disposer d’un numéro de TVA intracommunautaire attribué par les services de la DGI, condition préalable à toute transaction intracommunautaire. Ce numéro figurera sur les DEB, les factures ainsi que les déclarations de TVA. En cas de besoin, les entreprises qui bénéficient d’une franchise de base peuvent demander un numéro auprès du service des impôts qui le délivrera dans un délai de 15 jours.

L’absence ou l’invalidité du numéro d’identification à la TVA du commettant et de l’acheteur constitue un risque principal pour le commissionnaire car ils peuvent remettre en cause le bénéfice de l’exonération à la livraison.  En effet, en communiquant son numéro de TVA intracommunautaire, le fournisseur suppose que le client soumettra la transaction à la TVA dans son pays (pays de destination).

 

L’arrêté de la CJUE n°C-273/11 démontre par exemple que l’exonération de la TVA n’est pas systématique lors d’une livraison intracommunautaire. Les faits concernent la vente de marchandises par une société hongroise à une société italienne : les biens devaient être transportés dans un autre pays membre selon les termes du contrat. Les marchandises ont été livrées à la société italienne sur un site en Hongrie. Cette dernière a envoyé à son fournisseur hongrois des lettres de voitures attestant que les marchandises ont été transportées hors de la Hongrie. Le fournisseur a émis une facture hors taxe dans le cadre d’une livraison intracommunautaire.

 

  • l’administration fiscale italienne a radié le numéro d’identification de l’acheteur italien en argumentant que celle-ci était introuvable et qu’elle n’a jamais payé la TVA sur cette échange.
  • l’administration fiscale hongroise a considéré que les marchandises n’ont jamais quitté le sol hongrois, et a exigé le paiement de la TVA au titre de la transaction assorti d’une amende et d’une pénalité de retard.
  • suite à la contestation de l’entreprise hongroise, la CJUE a été saisie par l’administration fiscale : (a) l’exonération à la TVA est acquise si le vendeur a prouvé l’existence d’une transaction intracommunautaire (transfert de propriété, expédition/transport des biens vers un autre Etat membre, constat du départ physique des biens de l’Etat membre d’expédition). (b) si l’acheteur a présenté des preuves et qu’il est prouvé qu’il agit de bonne foi, l’exonération est confirmée même si l’acheteur n’a pas transporté les marchandises hors du territoire de la Hongrie.

 

Pour que l’exonération à la livraison ne soit pas remise en cause, le vendeur (commissionnaire) doit prouver la satisfaction de deux conditions cumulatives :

 

  • l’acheteur est assujetti à la TVA et ne bénéficie pas d’un régime de franchise ou d’un régime de dérogation à cette taxe dans le pays où il est établi.
  • les biens vendus ont été expédiés ou transportés hors de la France à destination de l’acheteur, que ce transport ou cette expédition ait été effectué par le vendeur, l’acheteur ou une autre entité.

 

Un certain nombre de précautions doit être ainsi prises par les entreprises engagées dans une transaction commerciale intracommunautaire (incluant le commissionnaire opaque) :

 

  • le vendeur doit s’assurer que le numéro d’identification communiqué par l’acheteur existe et est bien valable (le commettant vis-à-vis du commissionnaire, et le commissionnaire vis-à-vis de l’acheteur final). Lorsqu’il n’existe pas ou lorsque le numéro n’est pas valide, la livraison doit être taxée de TVA. D’ailleurs, selon l’annexe II art 242 du CGI, ce numéro doit obligatoirement figurer sur la facture établie par le vendeur. La Commission Européenne a mis en place un service qui permet aux entreprises de vérifier l’assujettissement à la TVA de leurs partenaires commerciaux et d’obtenir une attestation de la réalisation de cette vérification.[3]  Cette attestation peut servir de preuve probante en cas de remise en cause par l’administration fiscale.  Il est cependant important de noter que la mention du numéro d’identification de l’acheteur sur la facture et la possession de cette attestation ne constituent pas à elles-seules des preuves suffisantes pour justifier l’exonération.

 

  • le vendeur doit être capable de prouver que l’acheteur était identifié à la TVA au moment de la livraison si ce numéro ne figure pas sur la facture. Il peut par exemple fournir la DEB mentionnant la transaction et le dit numéro.

 

Attention à la fraude carrousel

 

La recherche d’une optimisation fiscale peut également mettre des entreprises d’une même chaîne commerciale établies dans l’UE dans une situation de fraude « carrousel ». Le schéma le plus simple consiste par exemple :

 

  • une entreprise A réalise une livraison intracommunautaire exonérée auprès d’une entreprise B,
  • l’entreprise B réalise une vente auprès d’une entreprise acheteur C et facture une TVA collectée qui ne sera ni déclarée, ni payée
  • l’entreprise C revend à une entreprise D en facturant une autre TVA collectée et en demandant la déduction de la TVA payé à l’entreprise B lors de l’achat.

 

La fraude se situe au niveau de B qui ne verse pas la taxe et de C qui demande cependant déduction ou remboursement de la taxe déductible.

 

Des mesures additionnelles ont été prises par l’administration fiscale afin de réduire les fraudes touchant la TVA (article 262 du CGI). Ainsi, l’exonération et la déduction ne s’appliquent pas s’il est prouvé que le vendeur savait ou qu’il ne pouvait pas ignorer que :

 

  • l’acheteur a une activité fictive : il ne dispose pas de locaux de travail, de personnel dédié ou de matériels conformes ou requis par ses activités. Il en est de même également lorsqu’il est constaté qu’il n’existe aucune relation entre les activités économiques de l’acheteur et les marchandises acquises.

 

  • l’acheteur faisait partie intégrante d’une chaîne de fraude. L’analyse de la jurisprudence a permis de mettre en exergue quelques éléments sur lesquels l’administration fiscale peut se baser pour faire valoir qu’un vendeur français n’avait pas d’activité réelle en relation avec la livraison. Ces éléments incluent : (a) les liens de dépendance qui peuvent exister entre les entreprises d’une même chaîne commerciale, qu’ils soient financiers, économiques ou juridiques ; (b) les livraisons répétées et de montant assez élevés avec le même commettant et auprès des mêmes clients ; (c) l’application de conditions commerciales différentes de celles appliquées généralement par la profession.

 

La filiale française qui dispose d’un statut de commissionnaire répond à l’ensemble de ces éléments : étant une filiale, elle partage des intérêts communs avec la société principale, elle applique la stratégie économique et commerciale du groupe. Etant donné la nature de ses activités, le commissionnaire réalise des livraisons répétées pour des montants assez élevés. L’administration fiscale pourrait présumer qu’une livraison intracommunautaire n’a pas eu lieu. La jurisprudence du CE n°273619 et 273620 du 27 juillet 2005 portant sur la société Fauba France, a par exemple mis en exergue que la satisfaction des conditions nécessaires pour une exonération à la livraison n’empêche pas l’administration fiscale de remettre en cause la réalité de la livraison. La CJCE a par contre statué que le droit à la déduction est refusé s’il est démontré que l’acheteur savait qu’il participait à une fraude. L’avantage de la filiale est qu’elle peut argumenter que ses activités ont un fort lien avec les livraisons de biens et marchandises.

 

La décision n°301053 de la haute juridiction de la Cour Européenne en date du 23 Mars 2009 sur l’affaire Hornet Computer International fournit par exemple des indices sur les éléments permettant de confirmer la participation de l’entreprise à des transactions frauduleuses :  la justice a considéré qu’elle ne pouvait pas ignorer que : (a) ses fournisseurs venaient d’être récemment créées et qu’ils ne disposaient d’aucune référence et de logistique réelle pour ces activités ; (b) les prix hors taxes pratiqués étaient inférieurs à ceux proposés sur le marché dans des conditions économiques normales ; (c) que les anomalies sur les documents comptables ne pouvaient pas être méconnues des dirigeants (des devis et factures similaires, des bons de transport incomplets,…).

 

Le commissionnaire doit ainsi mettre en œuvre toutes les procédures et mesures nécessaires pour s’assurer qu’il n’est pas impliqué dans un schéma de fraude. Il doit ainsi prêter attention à plusieurs éléments incluant l’existence d’une activité réelle, les prix pratiqués, les liens de dépendance avec les acheteurs, la nature des activités, les règles de facturation, les conditions de paiements, l’existence des documents de transport et de livraison.

 

  1. Echéancier fiscal du commissionnaire

 

En ce qui concerne la TVA :

 

La TVA doit être payée au moment du dépôt de ces déclarations. Le CGI fixe en effet les dates limites de dépôt des déclarations:

 

Tableau 4. Dates limites de dépôt des déclarations

Forme des entreprises Entreprises individuelles Toutes sociétés sauf sociétés anonymes Sociétés anonymes Autres redevables
Résidence des entreprises Selon la première lettre du nom patronymique de l’exploitant Selon les 2 premiers chiffres du numéro d’identification attribué par l’INSEE Associations, collectivités, redevables occasionnels
VILLE DE PARIS ET DÉPARTEMENTS DES HAUTS-DE-SEINE, DE LA SEINE-SAINT-DENIS ET DU VAL-DE-MARNE A à H : le 15
I à Z : le 17
00 à 68 : le 19
69 à 78 : le 20
79 à 99 : le 21
00 à 74 : le 23
75 à 99 : le 24
le 24
AUTRES DÉPARTEMENTS A à H : le 16
I à Z : le 19
le 21 le 24 le 24

 

  1. Illustration : cas pratique

 

Les cas pratiques abordés dans la présente sous-section se réfèrent au schéma de fraude carrousel.

 

Exemple 1

 

  • Prenons ainsi le cas d’une entreprise étrangère E établie dans un pays membre de l’UE qui commercialise des marchandises à une entreprise F établie en France pour un montant hors taxes de 200 000€.

 

  • Cette opération constitue une livraison intracommunautaire exonérée à la société F. L’entreprise française F revend par la suite les marchandises à une entreprise G établie dans un pays membre de l’Union Européenne et établit une facture pour un montant hors taxe de 166 667€ et une TVA de 33 333€. L’entreprise F ne déclare et ne paie pas la TVA.

 

  • L’entreprise G récupère ou demande un remboursement de la TVA déductible de 33 333€ (suite à l’acquisition auprès de F). Elle a réalisé un gain au niveau du prix de vente puisqu’elle n’a payé que 166 667€ (contre 200 000€ payé normalement par une entreprise opérant dans des conditions normales). Le prix payé est ainsi inférieur au marché, ce qui représente un avantage considérable puisque l’entreprise pourra revendre ces marchandises à un bas prix et encaisser la même marge qu’une entreprise « normale ».

 

  • Dans la foulée, l’entreprise G peut également revendre les marchandises à l’entreprise E ou à une autre entreprise établie dans l’UE en livraison intracommunautaire exonérée. Cette situation d’achat-revente peut intervenir entre plusieurs entreprises établies dans l’UE.

 

Exemple 2

 

  • Prenons le cas d’une entreprise A établie en France qui achète des marchandises auprès d’une entreprise européenne B pour 100 000€, cet achat constitue une livraison intracommunautaire exonérée.

 

  • L’entreprise A revend cette marchandises à une entreprise C établie dans un pays membre de l’UE. Elle facture la TVA mais ne la reverse ni à l’Etat, ni à son fournisseur. L’entreprise C aura une TVA déductible de 20 000€ dans ses écritures ?

 

  • L’entreprise C achète des marchandises auprès d’une entreprise française D (qui les a achetés hors UE), puis les revend à une entreprise E (acheteur final). L’entreprise C n’enregistre pas de TVA collectée car elle procède à une livraison communautaire si l’entreprise E est établie dans l’UE ou à une exportation si celle-ci est établie hors UE. Elle exerce cependant son droit à déduction sur la TV facturée par l’entreprise D et l’impute à la TVA collectée sur ses autres activités.

 

  • Sans l’existence des sociétés écrans C et D, l’entreprise française D aurait vendu directement ses marchandises à l’entreprise E. Elle ne pourrait pas ainsi justifier d’une TVA collectée et se trouvera en situation permanente de crédit de TVA.

Chapitre 2 : Analyse et évaluation des risques fiscaux

 

Section 1 : Risques inhérents à la structure juridique du commissionnaire opaque

 

  1. Territorialité de l’impôt

 

D’une manière générale, le régime d’imposition des biens et marchandises livrés dépend de leur lieu de livraison : qu’ils sont localisés ou non en France lors de leur départ à destination de l’acheteur.

 

D’une manière générale, le lieu de livraison d’une opération correspond au pays de départ des biens et marchandises pour être expédiés ou transportés. Ainsi, lorsque les biens ou les marchandises sont expédiés ou transportés à partir de France, le lieu de livraison est la France quel que soit leurs pays de destination (dans l’UE ou hors UE).

 

Les entreprises établies hors de France sont soumises à la TVA pour : (a) les livraisons dont le lieu est localisé en France ; (b) les acquisitions intracommunautaires. Il faut cependant noter que la taxe doit être acquittée par le client identifié à la TVA en France pour les livraisons de biens qu’elles ont effectué.

 

Les entreprises qui sont à la fois établies à l’étranger et en France doivent acquitter la taxe aux mêmes conditions que les entreprises établies en France. C’est le cas par exemple des sociétés mères basées à l’étranger et de ses succursales en France.

 

Acquisition intracommunautaire par une entreprise non assujettie 

 

Une entreprise non assujettie à la TVA établie en France qui réceptionne des biens ou des marchandises importées d’un autre pays membre de l’UE est considéré comme avoir réalisé une acquisition intracommunautaire. Cette transaction doit être obligatoirement soumise à la TVA par cette entreprise si elle ne bénéficie pas d’un régime dérogatoire, elle doit ainsi acquitter la TVA à l’importation. Pour éviter la double taxation, l’entreprise peut demander un remboursement de la taxe auprès du pays du fournisseur. [4]

 

Acquisition intracommunautaire par une entreprise étrangère suivie d’une livraison

 

Une entreprise étrangère assujettie à la TVA reçoit en France des biens et marchandises transportées ou expédiées d’un autre pays membre de l’UE vers la France. Bien que l’entreprise en question ne soit pas établie en France, la transaction n’est pas qualifiée d’affectation assimilée à une acquisition intracommunautaire au moment de la réception des marchandises si l’entreprise le livre à une autre entreprise établie hors de France ou à une entreprise française assujettie à la TVA dans un délai de 3 mois. Le moment du transfert de propriété au profit de l’acheteur final constitue le fait générateur de la TVA : la transaction prend alors la qualification de transaction intracommunautaire. Le client doit la soumettre à la TVA.

 

Le 3 Septembre, une société étrangère A non établie en France expédie des marchandises en France et les vend à une entreprise française assujettie le 15 Octobre.

 

  • A l’arrivée en France des marchandises le 07 Septembre, aucune acquisition intracommunautaire n’est constatée puisque les marchandises ont été revendues avant le délai de 3 mois. Les obligations de la DEB et la soumission à la TVA incombent à l’entreprise B (acheteur). L’entreprise A (vendeur) peut récupérer les TVA déductibles engagées pour réaliser cette transaction (stockage).

 

  • Si les marchandises ne sont pas vendues dans le délai de 3 mois, l’entreprise étrangère doit régulariser sa situation et soumettre l’expédition à la TVA.

 

Acquisition intracommunautaire par une société étrangère livrant directement son client

 

Une société étrangère assujettie à la TVA mais non établie en France qui expédie ou transporte, ou qui fait expédier et transporter des biens et marchandises directement auprès d’un client établi en France est réputé réaliser une affectation assimilée à une acquisition intracommunautaire. Cette disposition s’applique même si : (a)  la société étrangère dispose d’un établissement stable ; (b) ou si elle dispose d’un numéro d’identification ou France ; (c) ou si elle y a désigné un représentant.

Acquisition intracommunautaire par un commissionnaire opaque

 

Une entreprise étrangère dans un autre pays membre de l’UE expédie des biens et marchandises auprès d’un commissionnaire opaque établi en France : la réception de ces derniers ne constitue pas une affectation de biens assimilée à une acquisition intracommunautaire s’ils sont également revendus dans un délai de trois mois. La vente effective par le commissionnaire de ces biens et marchandises à des clients et leurs livraisons physiques traduisent le transfert de propriété au client. A partir de ce moment, le commissionnaire est réputé avoir réalisé une acquisition intracommunautaire. La livraison auprès de son client est soumise à la TVA.

 

D’une manière générale, le lieu d’une acquisition intracommunautaire est la France lorsque les biens et les marchandises se trouvent physiquement en France à l’arrivée de l’expédition ou lorsqu’ils quittent physiquement la France pour être livrés chez l’acquéreur. Le commissionnaire constitue un acheteur puisqu’il est réputé acheté et livré personnellement les biens et marchandises. Il peut les expédier ou transporter directement chez son client (en UE ou hors UE) ou le faire faire.

 

Opérations ne constituant pas des acquisitions intracommunautaires

 

Les biens expédiés ou transportés en France en vue d’être exportés ne constituent pas des affectations de biens et marchandises assimilées à des acquisitions intracommunautaires. Il en est de même des marchandises dont une partie du trajet passe par la France alors que les pays de départ et de destination sont des  autres pays membres de l’UE.

 

Lieu de l’acquisition intracommunautaire

 

Lorsque l’acheteur n’est pas capable de justifier qu’il a soumis la transaction dans le pays membre de l’UE où les biens et marchandises ont été transportés ou expédiés, le lieu d’acquisition considéré est la France. La livraison est ainsi soumise à la TVA en France si l’acheteur a donné un numéro d’identification français.

 

Si l’acheteur a bien démontré que la taxe a été acquittée dans le pays de destination des biens et marchandises, la base d’imposition déclarée en France sera diminuée de celle déclarée dans ce pays : la différence fera l’objet d’une demande de restitution par l’acheteur. Celle-ci devra intégrer les éléments permettant au service fiscal de s’assurer de la bonne arrivée des biens et marchandises dans le pays de destination, la déclaration et le paiement effectif de la TVA dans ce même pays (production d’une attestation de l’administration fiscale concernée).

 

Les tableaux ci-après restituent les règles de base du régime fiscal applicable pour les transactions intracommunautaires.

 

Tableau 5. Régime fiscal applicable aux acquisitions et livraisons intracommunautaires

Régime fiscal Acquisition intracommunautaire Livraison intracommunautaire
Caractéristiques – Opération de vente

– Fournisseur assujetti dans un Etat membre

– Marchandises expédiées ou transportées en France à destination de l’acheteur français

– Livraison à titre onéreux

– Fournisseur assujetti en France

– Acheteur assujetti dans un Etat membre de l’UE

– Marchandises expédiées ou transportées hors de France à destination d’un autre pays membre

Règle de territorialité TVA exigible en France si lieu de livraison du bien en France Exonération de TVA en France sous réserve de respecter les conditions
Conséquences fiscales Acheteur redevable

Auto-liquidation et report de la TVA

Etablissement d’une DEB

Etablissement d’une DEB
Conséquences sur la facturation Facture HT + numéro d’identification à la TVA du fournisseur et de l’acheteur + mention auto-liquidation en France par le client Facture HT + numéro d’identification à la TVA de l’intermédiaire et du client + mention de l’exonération de l’opération en France

 

 

 

Tableau 6 : Lieu de départ et de destination et imposition à la TVA

  France Autres Etats de l’Union européenne Pays hors Union Européenne
Assujetti Non assujetti
Lieu de départ en France

Destination de :

Opération interne à la France soumise à la TVA Livraison intra-communautaire exonérée de TVA Livraison intra-communautaire, soumise à la TVA Exportation soumise à la TVA
A destination de la France

Au départ de :

Opération interne à la France soumise à la TVA Acquisition intracommunautaire soumise à la TVA sauf pour les biens exonérés de TVA en France Importation soumise à la TVA

 

 

Les règles de territorialité dans les opérations triangulaires intracommunautaires

 

Les opérations triangulaires désignent la livraison de biens ou marchandises à une entreprise assujettie qui les livre à une autre entreprise assujettie.

 

  • Pour les biens expédiés ou transportés de France vers un autre membre

 

Prenons le cas d’une entreprise française qui vend des marchandises à une entreprise belge qui la revend à une entreprise allemande. Les marchandises sont livrées directement de la France vers l’Allemagne. L’entreprise belge peut opter entre deux possibilités :

 

  • elle fournit au fournisseur français un numéro d’identification à la TVA en Allemagne : le fournisseur français réalise une livraison intracommunautaire exonérée.
  • elle ne peut pas fournir ou ne fournit pas un numéro d’identification à la TVA dans un autre pays membre : la livraison réalisé par l’entreprise française est située en France, et y est soumise à la TVA. Au cas où l’acheteur belge fournit son numéro d’identification à la TVA en France, le traitement fiscal est similaire.
  • l’entreprise belge réalise une livraison intracommunautaire exonérée en Allemagne.

 

  • Pour les biens expédiés ou transportés d’un autre pays membre vers la France

 

Une mesure de simplification a été mise en place par l’article 141 de la directive 2006/112/CE du 28 Novembre 2006 pour régir les opérations triangulaires. La transposition de cette mesure dans le CGI est mentionnée dans l’article 258D.

 

Pour le schéma ci-après :

L’acquisition intracommunautaire réalisée par l’entreprise B (lieu de livraison réputé en France)  n’est pas soumise à la TVA. L’entreprise B émet une facture hors taxe vers l’entreprise C. La taxe est acquittée par l’entreprise destinataire des biens et marchandises. L’entreprise C établie en France doit déclarer cette livraison  dans sa déclaration de CA comme s’il s’agissait d’une acquisition intracommunautaire.

 

Pour bénéficier de cette simplification des procédures, les conditions suivantes doivent être toutes  remplies :

 

  • l’acheteur (entreprise B) ne doit pas être établi en France et ne doit pas avoir de numéro d’identification en France.
  • l’acquisition auprès de l’entreprise A est effectuée pour être livrée immédiatement à un autre client.
  • le bien est expédié directement d’un autre Etat que la France vers la France.
  • l’entreprise C est identifiée à la TVA en France.

 

Le cas ci-après illustre l’implication du non respect des conditions cumulées :

 

Une entreprise établie en Allemagne vend des marchandises à une entreprise italienne qui la revend à une autre entreprise établie en France. Les marchandises sont exportées directement de l’Allemagne vers la France. Dans le cas où l’acheteur italien fournit au fournisseur allemand son numéro d’identification en Allemagne, la livraison effectuée par l’entreprise allemande est située en Allemagne. L’entreprise italienne réalise une livraison intracommunautaire exonérée vers la France. L’entreprise française réalise une acquisition intracommunautaire en France et doit ainsi soumettre l’opération à la TVA.

 

Le commissionnaire peut se retrouver dans la situation de l’entreprise française.

 

  • Pour les biens expédiés ou transportés d’un autre pays membre vers un autre pays membre

 

Pour le schéma ci-après :

 

Si l’entreprise B n’a pas soumis l’acquisition intracommunautaire à la TVA dans le pays de destination (Etat 3), le lieu de l’acquisition est situé en France. Cette acquisition n’est pas soumise à la TVA. L’entreprise C, qui est le client, doit s’acquitter de la taxe au titre de la livraison.

 

Les conditions suivantes doivent être remplies pour bénéficier de ce dispositif de simplification :

 

  • l’entreprise B n’est pas établie et n’est pas représenté dans les deux Etats de départ et de destination (1 et 3), elle doit par contre être établie en France.
  • les biens acquis par l’entreprise B font l’objet d’une livraison à l’entreprise C.
  • le client C est identifié à la TVA dans le pays de destination (Etat 3).
  • les biens sont expédiés ou transportés directement de l’Etat 1 vers l’Etat 2.

 

L’entreprise B établie en France doit facturer son client C et cette dernière doit mentionner son n° d’identification en France, le n° d’identification de son client dans le pays de destination (Etat 3), la mention « Application de l’article 141 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006 », le montant hors taxes des échanges. Elle doit noter sur la facture émise par l’entreprise A que l’opération est de nature triangulaire.

 

L’intermédiaire transparent

 

L’intermédiaire transparent établi en France qui travaille pour un commettant situé en dehors de l’Union Européenne, doit acquitter la taxe sur le montant total de l’opération pour le compte du commettant si ce dernier n’a pas désigné un représentant. Etant donné que l’intermédiaire paie la taxe pour le compte du commettant, il est autorisé à déduire la taxe relative aux opérations qu’il réalise en nom propre, la taxe versée à l’importation, la taxe sur ses commissions. Il doit facturer au commettant la taxe acquittée et peut préciser sur ce document commercial qu’elle est établie pour le compte d’une société étrangère.

 

Risque pour le commissionnaire opaque

 

Le risque fiscal pour le commissionnaire est constitué par une mauvaise évaluation du lieu de livraison, de sa redevabilité à la TVA ou non et des obligations fiscales (déclaration des transactions concernées et de leurs chiffres d’affaires).

 

  1. Base d’imposition des transactions pour un commissionnaire

 

Un commissionnaire opaque effectue des acquisitions ou des livraisons intracommunautaires selon les opérations qu’il effectue pour son commettant.

 

  • la base d’imposition du commissionnaire est constituée du prix total de la transaction incluant le montant de la commission pour les opérations à l’achat (livraison de biens ou marchandises en faveur du commettant).
  • la base d’imposition est égale au prix de la transaction hors commission pour le commettant (vente au commissionnaire) ou pour le client acheteur (achat au commissionnaire).

 

Selon l’article 256 du CGI, « Dans le cas d’opérations réalisées par des intermédiaires opaques agissant en leur nom propre, la commission n’est donc jamais imposée en tant que telle…. Le taux applicable à leurs opérations est toujours le taux du bien ou du service dans la transaction de laquelle ils s’entremettent »

 

Le cas pratique ci-après fournit un exemple de la base d’imposition du commissionnaire agissant en son nom propre avec comme hypothèse que le commettant et le client final sont établis en France et sont assujettis à la TVA. Dans le cas par exemple d’une transaction de 10 000€ hors taxe incluant une commission de 1 500€ hors taxe.

 

  • pour le commettant : pour la vente et la livraison au commissionnaire, sa base imposable est constituée du montant total hors commission, soit 8 500€, d’où une TVA de 1 700€.
  • pour le commissionnaire : pour l’achat des marchandises au commettant, il ouvre son droit à déduction de la taxe de 1 700€. Pour la vente à son client, sa base imposable sera constituée du montant total incluant la commission, soit 10 000€, d’où une TVA de 2 000€.
  • pour le client acheteur : il ouvre droit à déduction de la taxe pour 2 000€.

 

La base d’imposition inclut tous les montants qui seront reçus par l’acheteur ou le preneur des biens et marchandises. Ces montants peuvent être perçus en espèces ou en nature. Les paiements en nature doivent être valorisés.

 

Le risque fiscal pouvant intervenir pour le commissionnaire réside dans l’intégration ou non de la commission dans la base imposable et dans la prise en considération de tous les éléments nécessaires ayant fait l’objet de facturation.

 

Section 2 : Risques liés aux livraisons de biens et services

 

  1. Les risques liés aux règles fiscales (TVA, exigibilité)

 

Les entreprises doivent respecter un certain nombre de règles de facturation à l’issu de la livraison des biens et des marchandises afin de pouvoir bénéficier de l’exonération à la TVA.  La facture doit contenir des informations obligatoires ci-après :

 

  • le nom du vendeur et son adresse, ainsi que ceux de l’acheteur,
  • le numéro de la facture et sa date,
  • le numéro d’identification à la TVA du vendeur,
  • le numéro d’identification à la TVA de l’acheteur,
  • la quantité livrée, la description de l’article, le prix unitaire hors taxe le montant total hors taxe, le taux d’imposition et la TVA calculée. La TVA doit obligatoirement apparaître si elle doit être acquittée afin que l’acheteur puisse également exercer son droit à déduction. La facture ne doit pas cependant pas comporter de TVA dans le cas d’une livraison intracommunautaire exonérée.
  • la mention « Exonération TVA » pour les livraisons intracommunautaires,

Le vendeur peut facultativement mettre une annotation sur la facture indiquant qu’il s’agit d’une acquisition intracommunautaire et précisant le montant de la TVA qu’il devra acquitter. Cette procédure est particulièrement utile si le commissionnaire est assujetti à différents taux de la taxe selon les opérations.

 

La déclaration de taxes sur le chiffre d’affaires réalisée par l’entreprise doit également mentionner le montant du CA relatif à l’acquisition intracommunautaire et de la taxe correspondante afin que l’acheteur puisse exercer son droit à la déduction.

 

L’entreprise « vendeur »  doit justifier que les livraisons effectuées sont bien réelles et que les biens et les marchandises ont été bien été transportés ou expédiés hors de la France. Elle doit fournir à l’administration tous les documents qui pourront attester de manière directe ou indirecte la livraison. Ces documents peuvent inclure entre autres la facture de l’entreprise qui a transporté les marchandises, les documents de transport (connaissement, LTA, lettre de voiture,…), le contrat d’assurance conclu pour le transport et l’expédition, le bon de commande ou le contrat d’achat dûment signé par l’acquéreur, la correspondance écrite échangée entre le vendeur et l’acheteur, le bon d’enlèvement, le bon de livraison attestant la réception des marchandises par l’acheteur, la lettre de crédit , l’attestation bancaire du règlement de la facture. Il n’existe pas de liste exhaustive de documents à fournir : l’administration fiscale évaluera au cas par cas la pertinence et la suffisance des documents présentés.

 

Lorsque l’acheteur effectue lui-même l’enlèvement physique, l’expédition et le transport des biens, le vendeur ou le commissionnaire ne pourra pas détenir au moment de la livraison les documents justifiant une livraison réelle. Si le commissionnaire et son client réalisent des transactions commerciales régulières, le vendeur pourra demander de recevoir les documents de transport ultérieurement.

 

L’absence d’une justification suffisante pour attester de la réalité de la livraison pourrait remettre en cause l’exonération de la TVA. Le commissionnaire opaque doit veiller à ce que l’ensemble de ses documents commerciaux permettent de justifier de la livraison effective des biens et marchandises, que ce soit à l’achat au commettant ou à la vente à un client. Il doit par ailleurs prendre les précautions nécessaires pour obtenir les documents dans le meilleur délai. Il serait par exemple plus difficile de récupérer ces documents si la transaction commerciale entre le commissionnaire et le client est ponctuelle. Le commissionnaire pourrait par exemple collecter des pièces qui lui permettraient de retrouver le client et de récupérer les documents de transport. Ces pièces peuvent inclure une copie de la carte d’identité de l’acheteur, un certificat sur le siège de l’entreprise cliente, le numéro d’immatriculation du véhicule de transport,…). Le commissionnaire peut également exiger le versement d’une caution correspondant au montant de la TVA qu’il aurait à payer en cas de remise en cause de l’exonération jusqu’à la réception des documents requis. Au cas où le commissionnaire estime qu’il ne détient pas suffisamment de documents justificatifs, il devrait soumettre sa livraison à la TVA afin de ne pas encourir un redressement à cette taxe assortie de pénalité ou d’intérêt de retard.

 

  1. Les risques liés à la méconnaissance

 

La méconnaissance et l’absence de maîtrise des règles fiscales applicables au commissionnaire opaque en France peuvent conduire à des redressements fiscaux en cas de contrôle fiscal : le droit à la déduction et l’exonération de la TVA peuvent être remises en cause, l’entreprise peut être amenée à payer une cotisation additionnelle pour les impôts et taxes. Il risque par ailleurs la double imposition et l’impossibilité de récupérer une partie de la TVA payée lorsqu’il ne dispose pas des documents requis.

 

Section 3 : Cartographie des risques inhérents à l’activité de commissionnement opaque

 

  1. Les critères d’évaluation des risques fiscaux

 

Délocalisation artificielle ou non de la société étrangère : Pour évaluer les risques fiscaux d’un commissionnaire opaque en tant que filiale d’un groupe, l’expert –comptable doit vérifier que celle-ci ne constituerait pas une délocalisation artificielle du siège de la société étrangère. Ce schéma permet en effet de déclarer une activité commerciale en France sous l’égide d’une société étrangère, de procéder à de fausses transactions intracommunautaires par l’intermédiaire de la filiale fictive. L’expert-comptable doit ainsi s’assurer que : (a) la société étrangère est physiquement établie dans le pays étranger avec des moyens d’exploitation ; (b) la filiale française réalise de manière effective des opérations commerciales et dispose des moyens d’exploitation nécessaires ; (c) les dirigeants ne sont pas frappés d’une interdiction de gestion ou d’autres poursuites judiciaires. La délocalisation artificielle permet principalement de ne pas déclarer une activité effectuée en France, ce qui constitue un manque à gagner pour l’administration fiscale française.

 

Prix de transfert portant sur la commission : l’expert-comptable doit vérifier l’existence ou non d’une politique de transfert entre la société étrangère et la filiale, ou comprendre comment la société étrangère envisage d’appliquer comme prix de transfert. Il doit vérifier la bonne application du principe de pleine concurrence. Une filiale commissionnaire reçoit des marchandises envoyées par la société étrangère, et les revend à un autre client. Elle ne se rémunère que sur la commission qui est calculée sur la base des prix de marchandises. Le commissionnaire doit facturer une commission qui respecte ce principe : (a) le taux appliqué pour calculer la commission devrait être plus ou moins égal à celui pratiqué par la profession dans le domaine d’activité de l’entreprise ; (b) de même que la base de calcul, le prix des marchandises entre le commettant, le commissionnaire et le client doit refléter les conditions normales du marché pour que l’administration fiscale ne soupçonne pas une surfacturation ou une sous-facturation.

 

Le non-respect du principe de pleine concurrence peut remettre en cause l’IS déclaré et payé par la filiale en France. Il ne remet cependant pas en cause la TVA car au regard de cette taxe, l’application de prix inférieurs ou supérieurs au prix du marché ne constitue pas un acte anormal de gestion. La TVA collectée est calculée sur la base des sommes encaissées, peu importe qu’elles aient été sous ou surfacturées.  Même si la différence a fait l’objet d’un redressement fiscal en termes d’IS, cette procédure ne s’applique pas à la TVA. Le client peut, quant à lui, exercer son droit à déduction lorsque les conditions sont remplies à savoir la mention de la taxe sur la facture, l’établissement de la facture au nom du client, la bonne correspondance entre la livraison et la facture. La TVA n’est remise en cause que si elle présente un caractère fictif.

 

Existence ou non d’un établissement stable en France : Un établissement stable se définit comme « une installation fixe d’affaires par l’intermédiaire de laquelle une entreprise exerce tout ou partie de son activité».[5]  Le principal critère d’évaluation de l’existence d’un établissement stable est constitué par l’existence de moyens d’exploitation en France (locaux, matériels, et équipements, personnel…). Ces installations doivent être implantées sur un lieu précis et pour une durée permanente. L’administration fiscale prend en considération les caractéristiques des activités de l’entreprise afin d’apprécier le caractère permanent ou temporaire des installations. Si la société étrangère a mis fin aux activités de sa succursale pour cause de mauvais résultats financiers, le caractère permanent n’est pas remis en cause.

 

La distinction d’un établissement stable est importante fiscalement : en effet, les bénéfices de celui-ci sont imposés exclusivement dans l’Etat où il est établi au taux en vigueur (donc en France) tandis que les bénéfices d’une succursale par exemple sont imposés exclusivement dans l’Etat où la société à laquelle elle est rattachée est établie (société étrangère).  Les risques fiscaux pour la société filiale commissionnaire sont de : (a) être imposée pour les bénéfices réalisés (marges des ventes) en France ; (b) être suspecté de transférer des bénéfices hors de France par l’intermédiaire des contrats de commissionnaire.

 

La décision rendue par le Conseil d’Etat le 31 Mars 2010 sur le cas de la société britannique Zimmer a fourni plus de précisions sur l’existence ou non d’un établissement stable en France.

 

Les faits alors jugés se présentent comme suit :

 

  • l’entreprise britannique Zimmer Ltd a vendu ses produits en France par le biais d’une société établie en France Zimmer SAS qui était son distributeur jusqu’en mars 1995.

 

  • la société France Zimmer SAS a été convertie en une filiale commissionnaire de l’entreprise britannique. Elle lui a cédé son actif (immobilisations, stock, créances clients) et son passif. Cette conversion a eu pour effet de réduire le chiffre d’affaire de la société, par conséquent l’IS et la taxe professionnelle due.

 

  • l’administration fiscale en France a qualifié la société France Zimmer SAS d’établissement stable de l’entreprise britannique et lui a imputé des cotisations additionnelles d’IS et de taxe professionnelle.

 

  • En Février 2007, la Cour administrative d’appel de Paris avait décidé que la société française constituait un établissement stable de la société britannique en France pour les raisons ci-après : au vu du contrat qui les liait, la société française pouvait engager son commettant dans des activités qui lui sont propres, qu’elle est par ailleurs un agent dépendant de la société britannique.

 

  • Le Conseil d’Etat prend une décision contraire : il rappelle qu’une société étrangère dispose d’un établissement stable en France si ce dernier « exerce habituellement en France des pouvoirs lui permettant d’engager cette société dans une relation commerciale ayant trait aux opérations constituant les activités propres de cette société, et que cette personne n’est pas indépendante vis-à-vis de l’entreprise ». Selon le Conseil d’Etat, la dépendance de la filiale française envers l’entreprise britannique est justifiée. En ce qui concerne l’engagement, le conseil se réfère à la définition du commissionnaire qui agit en son nom propre et pour le compte du commettant. Les contrats, que le commissionnaire signe, sont donc en son nom propre, ce qui l’engage juridiquement. Il n’engage pas ainsi le commettant vis-à-vis de ses clients. Le Conseil d’Etat a stipulé qu’en vertu de la nature de ses activités, le commissionnaire ne peut pas être qualifié d’établissement stable.

 

Responsabilités et obligations définies dans le contrat de commissionnement : Lors de sa décision sur le cas de la société France Zimmer SAS, le Conseil d’Etat a conclu que : « un commissionnaire ne peut constituer un établissement stable du commettant…sauf s’il ressort soit des termes mêmes du contrat de commission, soit de tout autre élément de l’instruction qu’en dépit de la qualification de commission donnée par les parties, le commettant est personnellement engagé par les contrats conclus avec des tiers par son commissionnaire qui doit alors, de ce fait, être regardé comme son représentant et constituer un établissement stable ». L’expert-comptable doit ainsi examiner soigneusement le contrat de commissionnement conclu entre la société étrangère et la filiale commissionnaire. En effet, la seule dénomination « contrat de commissionnement » ne la qualifie pas comme telle. L’expert doit étudier si le commissionnaire n’engage pas le commettant dans les contrats qu’il conclut, si les risques principaux sont réellement assumés par la société étrangère, si les prix fixés et la stratégie commerciale sont définis par la société britannique, si les frais engagés par la filiale pour la réalisation des transactions commerciales sont remboursés. La rédaction ou l’étude du contrat de commissionnement nécessite une grande attention de la part de l’expert-comptable car il définit les liens, les responsabilités et les obligations exactes de chaque partie. Le contrat peut par ailleurs constituer un document justificatif pour l’administration fiscale lors du redressement des prix de transfert.

 

Transfert d’une clientèle vers le commettant : Avant la conversion d’une entreprise dotée d’un statut de « distributeur » ou d’ « acheteur-revendeur », l’expert-comptable doit examiner si la conversion n’a pas entraîné un transfert de clientèle vers le commettant. Nous allons nous baser sur le cas de la société Ballantine’s Mumm Distribution pour étayer ce critère d’évaluation.

 

  • la société Ballantine’s Mumm Distribution (BMD) assurait la distribution des produits de sa société mère britannique Allied Dommecq en qualité de distributeur de 1993 à 1998. Elle avait défini une stratégie de pénétration sur le marché et une stratégie de distribution des produits de la société mère. Elle s’est constituée d’un portefeuille de clients. Elle a par la suite acquis la qualité de commissionnaire à partir de 1999.

 

  • l’administration fiscale a cependant considéré qu’en 1999, la société BMD aurait dû recevoir dans ses caisses un montant égal à la valeur de la clientèle transférée au commettant. Elle a estimé cette valeur au montant total des dépenses de communication engagées pour se constituer son portefeuille de clients (publicité,…). Elle a intégré ce montant dans les résultats imposables de la société et a fait l’objet d’une retenue à la source.

 

La TA de Paris a refusé la demande de la BDM de dégrever la retenue à la source.  La CAA de Paris[6] a débouté la décision de l’administration fiscale pour les raisons ci-après: (a) elle a jugé que la conversion en statut de commissionnaire n’a pas donné lieu à un transfert de clientèle) ; (b) les risques du distributeur ont été transférés à la société mère (risques produits, risques de marché, risques de défaut de paiement, décision de la stratégie marketing, décision des prix à appliquer). Le transfert de ces risques n’implique pas un transfert de la clientèle ; (c) par ailleurs,  la CAA estime que la commission de la filiale est bien proportionnelles aux fonctions et risques que la BMD assume réellement, et que la baisse du résultat imposable est justifié ; (d) la CAA a par ailleurs prononcé que « le contrat de commissionnaire n’étant pas un contrat autonome mais le préalable à la conclusion d’autres contrats qu’elle signe en son nom propre pour le compte de son commettant, la société BMD ne peut être regardée comme ayant transféré sa clientèle locale et, par suite, comme ayant procédé à un acte anormal de gestion ».

 

L’expert-comptable doit ainsi vérifier :

  1. si la filiale avait engagé des moyens qui lui sont propres pour acquérir sa clientèle lorsqu’elle agissait en tant que distributeur.
  2. les fonctions et risques transférés au commettant et la pertinence de la commission perçue par rapport à ceux réellement assumés.

 

Ces critères d’évaluation seront retranscrits dans un questionnaire qui servira d’outil de travail pour l’expert-comptable afin de mieux appréhender le passage du statut de distributeur au statut de commissionnaire ou afin de considérer l’ensemble des points essentiels à la création d’une filiale avec un statut de commissionnaire.

 

 

  1. Cartographie des risques

 

Les risques fiscaux d’une filiale commissionnaire sont ainsi constitués par :

 

  • la filiale commissionnaire constitue une délocalisation artificielle de la société étrangère.
  • la filiale commissionnaire participe à une fraude de type carrousel.
  • la filiale commissionnaire réalise un transfert indirect de bénéfices à l’étranger.
    • elle ne respecte pas le principe de pleine concurrence en général, et plus particulièrement, le calcul de la commission ne reflète pas les conditions normales du marché et de la concurrence.
    • la filiale procède à un transfert de clientèle vers la société étrangère.
  • la filiale commissionnaire constitue un établissement stable en France :
  • les termes du contrat conclu entre le commissionnaire et le commettant sont contraires aux principes de l’activité de commissionnement.

 

L’expert-comptable doit établir une cartographie des risques dans laquelle l’ensemble des risques fiscaux identifiés est énuméré. Pour chaque risque identifié, il devra préciser :

 

  • le niveau de risque brut (sans la réalisation d’aucune mesure de contrôle) : son impact et sa probabilité (chacun avec une notation comprise entre 1 et 5),
  • décrire les contrôles possibles qu’il peut effectuer pour assurer de l’inexistence du risque,
  • estimer l’efficacité des contrôles prévus.
  • évaluer le niveau de risque net (après l’application des mesures de contrôle),
  • décrire les actions nécessaires à mettre en œuvre au sein de la société étrangère et de sa filiale afin d’assurer de la mitigation des risques.

 

Un exemple de cartographie des risques fiscaux est fourni en annexe 1.

 

 

  1. Analyse de la significativité des risques

 

L’analyse de la significativité des risques est importante puisqu’elle permet à l’expert-comptable et à la société filiale de se focaliser sur les risques majoritaires présentant un niveau élevé d’occurrence (avec la plus forte chance de survenance) et d’impacts (pouvant induire des redressements fiscaux financièrement importants pour la filiale qui pourrait conduire à sa faillite). Cette analyse se fait à partir de la cartographie des risques.

 

Chapitre 3 : Calcul de l’impact des risques fiscaux significatifs

 

Ce troisième chapitre concerne les sanctions encourues par le commissionnaire opaque en cas de non-respect des règles fiscales dues par une méconnaissance des textes et réglementations, ou une négligence avérée ou une absence de maîtrise de ces règles. Il permet au lecteur de prendre connaissance des possibles conséquences financières des irrégularités et erreurs découvertes.

 

Section 1 : Les sanctions fiscales lors de la réalisation des risques fiscaux

 

  1. Les sanctions suite au manquement de déclaration des revenus

 

Pour rappel, le commissionnaire opaque dispose d’une qualité de commerçant puisqu’il agit en son nom propre ou sous sa dénomination sociale mais pour le compte d’autrui. Il est ainsi assujetti au régime des BIC.

 

L’absence de déclaration du chiffre d’affaires par le commissionnaire opaque ou la non déclaration des éléments qui composent la base imposable des impôts et taxes dans les délais impartis est sanctionnée par :

 

  • une majoration de 10% si l’entreprise n’a pas fait l’objet de mise en demeure ou si elle a effectué ses déclarations dans les 30 jours suivant la réception de la mise en demeure de l’administration fiscale.
  • une majoration de 40% si l’entreprise n’a pas déposé ses déclarations dans les 30 jours suivant la mise en demeure.

 

Elle se calcule sur la base du montant des taxes non payées dans les délais.  Un intérêt de retard de 0,4% par mois peut par ailleurs s’ajouter à cette majoration. Celui-ci est calculé sur la base du nombre de jours entre le lendemain de la date à laquelle l’impôt était dû, et le dernier jour du mois pendant lequel le dépôt de la déclaration a été effectué ou pendant lequel le redressement a été notifié.

 

  1. Les sanctions suite aux manœuvres frauduleuses

 

Activité illicite due à un défaut de réalisation des procédures de création ou de formalisation d’une entreprise

 

Une majoration de 80% est par contre appliquée si l’administration fiscale met en évidence une activité illicite, que celle-ci ait faite ou non l’objet d’une mise en demeure. Une filiale qui n’a pas effectué les procédures légales de création d’entreprise dans les délais légaux (inscription au registre du commerce,…) peut être considérée comme une activité illicite. Une erreur d’inscription dans un centre différent de celui dans lequel elle aurait dû être faite ne permet pas de déclarer la filiale comme illicite.

 

Cette sanction ne s’applique pas si l’entreprise a effectué une déclaration spéciale professionnelle ou si elle a effectué une déclaration d’impôt sur le revenu  même si le revenu catégoriel est erroné, ou si elle a déclaré une TVA

 

Sanctions encourues en cas de fraude carrousel

 

Les fraudes carrousel sont spécifiquement surveillées par l’administration fiscale car : (a)  elles ont des conséquences fiscales  puisqu’elles diminuent les recettes fiscales ; (b) elles ont également des impacts économiques importants car en ne reversant pas la TVA, un fournisseur peut facturer ses produits à un prix moindre par rapport à la concurrence.

 

Le commissionnaire, qui a réceptionné la livraison de biens ou de marchandises, qui savait ou qui ne pouvait pas savoir que les TVA sur les livraisons antérieures de ces mêmes marchandises ou la TVA sur la livraison qui lui est effectuée, sera considérée comme solidairement responsable avec le fournisseur de payer la taxe[7]. L’exonération de la livraison intracommunautaire est ainsi remise en cause. Il peut également se voir refuser la déduction ou le remboursement de son TVA déductible. Le paiement de la TVA sera par ailleurs assorti d’une majoration de 80% pour cause de manœuvres frauduleuses. Un commissionnaire, bien qu’il ait agi de bonne foi, peut être ainsi sanctionné s’il n’est pas capable de prouver qu’il ne savait pas ou qu’il ne pouvait pas connaître l’existence d’une chaîne commerciale frauduleuse.

 

Outre ces sanctions fiscales, le commissionnaire peut également encourir des sanctions pénales à titre de fraude fiscale[8] et d’escroquerie. Il peut être passible du paiement d’une amende de 75 000€ et d’une peine de 5 ans de prison que la fraude ait été traduite par la production de fausses factures ou l’absence de facturation. Il peut également être sanctionné d’une interdiction d’exercer la profession de commissionnaire ou de gestion d’entreprise. Le réceptionnaire des marchandises est désormais sévèrement puni puisqu’habituellement, l’administration fiscale n’arrive plus à récupérer la TVA auprès des fournisseurs (sociétés écrans en milieu de réseau) qui disparaissent lorsqu’ils se sentent compromis. L’autorité fiscale a ainsi choisi de punir à la fois le fournisseur et son client depuis 2007.

 

Sanctions encourues pour factures fictives, inexactes ou incomplètes

 

Les entreprises impliquées dans une fraude carrousel établissent généralement des factures fictives qui peuvent être sanctionnées d’une amende représentant 50% du montant de la facture.

 

Pour bénéficier d’une exonération, le commissionnaire et les autres entreprises impliquées dans des relations triangulaires intracommunautaires doivent satisfaire les règles de facturation sachant qu’il existe des mentions obligatoires à préciser dans les factures. Chaque erreur et chaque omission dans les factures est sanctionnée d’une amende de 15€, que celle-ci concerne la date de la facture, le numéro, le nom du vendeur et ses coordonnées complètes, le nom du client et ses coordonnées, les informations relatives à l’opération (quantité, type de marchandises, prix unitaire, taux de TVA), les numéros d’identification à la TVA du vendeur et de l’acheteur pour les livraisons intracommunautaires, la mention « exonération de TVA ».

 

  1. Autres sanctions

 

Défaut de déclaration d’échange des biens

Le commissionnaire qui n’a pas rempli la DEB peut être sanctionné d’une amende de 750€. Celle-ci peut s’élever à 1 500€ si la déclaration d’échange des biens n’a pas été effectuée dans les 30 jours à partir de la date de réception de la mise en demeure. Chaque information incorrecte ou omise est punissable d’une amende de 15€ dans pour autant dépasser 1 500€.

 

La douane dispose par ailleurs d’un droit de renseignement et de communication. Elle peut de ce fait convoquer le commissionnaire pour disposer d’informations supplémentaires ou pour des clarifications. L’absence de réponse aux demandes des services de la douane sont est passible d’une amende de 1 500€.

 

Absence d’auto-liquidation de la TVA

 

D’une manière générale, un fournisseur collecte la TVA auprès de son client en la lui facturant, et la reverse à l’Etat. Ce schéma ne s’applique pas dans certaines situations puisque c’est le client lui-même qui versera la taxe due. Le fournisseur ne devra pas ainsi facturer une taxe dans la facture de vente adressée à son client. Ce mécanisme est utile pour les échanges de biens et marchandises entre différentes entreprises établies dans des territoires différents. Ainsi,

 

–       la société étrangère n’est plus obligée de s’immatriculer en France pour pouvoir déclarer ses TVA en France.

–       le client établi en France et assujetti à la TVA effectuera les procédures de déclaration et de versement de la TVA au titre de ces transactions. Pour autoliquider la TVA, le client précisera le montant HT de l’achat dans sa déclaration en tant « achat de biens ou services auprès d’une société étrangère) et paie la TVA.

–       la société étrangère facture émet une facturation hors taxe et précise que la taxe est due par le client.

 

La non liquidation de la TVA est passible d’une amende s’élevant à 5% du montant de la taxe due.

 

Non respect de l’obligation documentaire sur les prix de transfert

 

Une entreprise est soumise aux obligations documentaires sur les prix de transfert si : (a) son CA HT ou si son actif au bilan est supérieur ou égal à 400.000.000 € ; (b) plus de 50% de son capital ou de son droit de vote est détenu directement ou indirectement par une autre société ; (c) si elle détient plus de 50% du capital ou du droit de vote d’une entreprise. Cette catégorie d’entreprise doit fournir une documentation complète à l’administration fiscale.

 

Une entreprise qui ne respecte pas les conditions sus nommées doivent fournir une documentation plus allégée quelque soit les types d’opérations réalisées entre les sociétés appartenant à un même groupe ou associées.

 

La documentation exigée doit comporter :

 

  • des informations relatives au groupe d’entreprises ou à la société qui contrôle : elles doivent permettre à l’administration fiscale de comprendre l’environnement et le fonctionnement du groupe d’entreprises. Elles incluent notamment une description des activités du groupe ; une explication des différentes structures existantes, de leurs fonctions et des risques qu’elles assument ; une liste des actifs incorporels détenues en lien avec l’entreprise établie en France ; une explication détaillée de la politique de transfert du groupe. Les informations doivent permettre de connaître la position de la filiale par exemple dans le groupe, ses activités réelles, sa contribution, les fonctions et risques qu’elle assume.

 

  • des informations relatives à l’entreprise associée dont l’administration fiscale vérifie la comptabilité (ça peut être le cas de la filiale commissionnaire de la société étrangère). Elles doivent permettre à l’administration fiscale de vérifier si le principe de pleine concurrence a été respecté. Elles doivent notamment inclure une description de ses activités ; une mention détaillée des opérations qu’elle réalise avec les autres sociétés du groupe en précisant les montants de chaque flux. L’entreprise doit fournir les copies des accords ou de conventions signées entre celle-ci et la société mère ou entre celle-ci et les autres entreprises associées. Elle présente par ailleurs les méthodes de détermination des prix de transfert en incluant une analyse fonctionnelle, une analyse des risques assumés, une liste des actifs utilisés ainsi qu’une analyse comparable.

 

Ces documentations doivent être mises à disposition de l’administration fiscale dès le premier jour du contrôle.  Celle-ci peut également demander des documents supplémentaires si ceux qui lui a été présentés ne lui permet pas d’apprécier correctement le principe de pleine concurrence. Une lettre de mise en demeure est envoyée lorsque la société vérifiée n’a pas respecté les obligations documentaires ou lorsqu’elle n’a pas produite les pièces demandées dans les délais impartis. La société peut demander une prorogation du délai sans pour autant que celui-ci ne dépasse une période de deux mois.

 

Le non respect des obligations documentaires et l’absence de production des pièces demandées dans un délai de 30 jours à compter de la réception de la mise en demeure peuvent être sanctionnés d’une amende de 10 000€ par exercice ou de 5% des bénéfices considérés comme transférés indirectement par exercice vérifié.  L’application des 5% de pénalité s’applique en cas d’absence totale ou de non pertinence des documents présentés.

 

Non respect des obligations déclaratives sur les prix de transfert

 

Les entreprises établies en France, qui réalisent des transactions avec des sociétés établies et associées à l’étranger, doivent obligatoirement déclarer leur prix de transfert.  Cette déclaration doit se faire dans un délai de 6 mois à compter de la déclaration des résultats. La non déclaration des prix de transfert dans les délais impartis est punissable des mêmes sanctions que celles encourues pour le non production des documents.

 

Non respect du principe de pleine concurrence

 

L’administration fiscale est autorisée par la loi à réviser les bases imposables déclarées par les sociétés concernées par les prix de transfert pour calculer l’IR ou l’IS du. Elle peut ainsi réintégrer directement les montants des bénéfices transférés indirectement estimés à partir de la vérification de leur comptabilité et/ou sur la base des résultats de l’analyse des comparables qui permettra de déduire les bénéfices que l’entreprise aurait dû réaliser dans les conditions normales du marché.

 

Section 2 : Estimation de l’impact financier des risques fiscaux

 

  1. En rapport avec les budgets de transaction

 

Les budgets des transactions ne sont pas forcément remis en cause car étant donné que le commissionnaire agit fiscalement comme un acheteur-revendeur, il comptabilise les achats et les ventes. Le résultat comptable constitue ainsi la base du résultat fiscal. La filiale sera pénalisée si les prix d’achat ont été sous-facturés ou sur-facturés puisqu’elle devra payer l’IS correspondant à la différence.

 

  1. En rapport avec le montant de la commission

 

En cas de dénonciation pour transfert indirect de bénéfices, l’administration fiscale peut intégrer dans le montant de la commission, un montant additionnel qui ferait que la commission reflète les conditions normales du marché entre une société étrangère et sa filiale. Si la commission de la filiale est calculée sur un taux de 5% alors que pour un même secteur d’activité, la commission payée par une entreprise indépendante est de 12% à son commissionnaire, l’administration va redresser le résultat fiscal en y intégrant la différence de 7% calculée sur le montant total des ventes. Cette réintégration sera appliquée sur la base imposable de l’IS et non sur celle de la TVA.

 

Partie 3 : La mission de diagnostic des risques fiscaux par l’expert-comptable

 

Cette troisième partie présente la mission de diagnostic des risques fiscaux de la transformation du statut de distributeur ou d’acheteur-revendeur de la filiale française d’une société étrangère en un statut de commissionnaire opaque. La mission consiste à diagnostiquer les risques fiscaux impliqués par cette transformation ainsi que leurs conséquences au niveau de la filiale. Elle aborde les modalités d’intervention de l’expert-comptable qui incluent la conclusion d’une lettre de mission, la délimitation de la mission à réaliser, les normes à mettre en œuvre selon le cadre de déontologie, la valeur ajoutée de la mission pour le client, l’organisation de la mission et les documents de présentation des résultats du diagnostic. Elle présente également des outils de prévision et de contrôle des risques du risque fiscal pour faciliter le diagnostic du commissionnaire aux comptes.

 

Chapitre 1 : Les modalités de l’intervention de l’expert-comptable

 

Ce premier chapitre aborde les modalités de l’intervention de l’expert-comptable à savoir la définition exacte de la mission, sa délimitation, les comportements à appliquer ainsi que le cadre déontologique applicable. Il présente l’intérêt de cette mission pour l’expert-comptable qui doit mettre en avant sa valeur ajoutée pour la commercialiser auprès de ses clients et pour justifier ses honoraires.

 

Section 1 : Nature de la mission de l’EC et champ d’intervention

 

  1. Définition de la nature de la mission de l’expert-comptable

 

La mission de l’expert-comptable relève d’une mission d’audit contractuel ou de diligences directement liées demandées par une entreprise  pour obtenir des réponses spécifiques à ses besoins. Elle fournit une vraie valeur ajoutée au client puisqu’elle lui permet de :

 

  • appréhender certaines opérations telles que les transmissions, les acquisitions d’entreprises, les fusions,…
  • évaluer les risques de l’entreprise sur des domaines précis afin de prendre les mesures nécessaires pour éliminer ou mitiger ces risques (risque social, risque fiscal, risque juridique ou risque environnemental…)
  • analyser la qualité du système et des procédures de l’entreprise (système d’information, gestion des clients,…)

L’audit fiscal constitue une mission d’audit contractuel puisqu’il peut intégrer le contrôle des déclarations fiscales effectuées par l’entreprise (vérification des impôts et taxes payés par rapport aux règles fiscales, contrôle de  l’exactitude des calculs des impôts que ce soit sur la base imposable ou les taux utilisés, vérification des échéanciers, contrôle des dossiers d’exonération…) ; ou l’analyse des options fiscales pour l’entreprise en vue de proposer la meilleure alternative fiscale., ou l’audit de la gestion fiscale.

 

Contrairement à une mission d’audit légal, les termes et modalités d’une mission d’audit contractuel sont définis librement entre l’expert-comptable et son client.

 

  1. Délimitation du champ d’intervention dans la lettre de mission

 

La lettre de mission formalise l’accord conclu entre l’expert-comptable et le client, et définit les modalités de l’intervention. Elle comprend les informations ci-après :

 

  • les informations générales sur l’expert-comptable et sur le client, incluant les dénominations sociales, les formes juridiques, les adresses géographiques, les coordonnées des contacts, les numéros d’inscription auprès du RCS, le nom d’ordre de l’expert-comptable, les numéros d’identification à la TVA.

 

  • la description de la mission : la lettre de mission précise la nature et l’objectif de la mission. Dans le cas du présent mémoire, la mission consiste à analyser les conséquences fiscales du statut de commissionnaire opaque d’une filiale française d’une société étrangère et à proposer une optimisation fiscale. L’expert-comptable communiquera au client un rapport qui relate les résultats des analyses qu’il a effectués ainsi que les constats sur les contrôles réalisés. Il appartiendra par la suite au client de tirer ses propres conclusions. Il précisera également que la mission sera exécutée dans le respect des normes professionnelles de l’expertise comptable.

 

  • la délimitation de la mission : l’expert-comptable doit préciser que : (a) sa mission n’inclut pas un audit ou un examen limité des comptes ; et que : (b) elle n’a pas pour objectif de trouver les erreurs ou les irrégularités, ou de détecter des actes illégaux.

 

  • les procédures convenues : L’expert-comptable et le client se mettent d’accord sur les procédures qui seront mises en œuvre pour mettre en œuvre de la mission.

 

  • le déroulement et les modalités de la mission : l’expert-comptable fournit le nom et les fonctions des responsables et des interlocuteurs qui interviendront directement sur le dossier. La lettre de mission précise par ailleurs le planning de l’intervention et les tâches réalisées par dates ou périodes.

 

  • la liste des documents à fournir par le client.

 

  • les livrables attendus de l’expert à savoir un rapport mentionnant les constats et résultats des procédures engagées.

 

  • les honoraires : la lettre de mission précise la base de calcul des honoraires (taux horaire, nombre de jours), le traitement des frais et débours divers, les modalités de facturation.

 

  1. Cadrage déontologique de la mission

 

Le cadre déontologique de la mission de l’expert-comptable comprend des normes de comportement professionnel et des normes de travail.

 

Normes de comportement professionnel

 

  • Indépendance: l’expert-comptable doit veiller à préserver son indépendance par rapport à la mission et à son client. Il ne peut pas ainsi assumer une fonction publique rémunérée ou travailler dans une société privée en situation de subordination par rapport à l’employeur. Il ne peut pas effectuer des travaux pour des entreprises dans lesquels il a des intérêts financiers ou avec lesquels il a des relations financières (emprunt, prêt ou crédit-bail…).  Il ne devrait pas accepter de recevoir des cadeaux, qu’ils soient  sous forme de biens ou de services  ou de conditions commerciales favorables.

 

  • Compétence: l’expert a comme obligation de mettre à jour et de compléter régulièrement ses connaissances. Il doit veiller à ce que ses collaborateurs disposent des compétences nécessaires pour réaliser les travaux. Ces derniers doivent par ailleurs bénéficier d’une formation continue. L’expert-comptable doit ainsi consacrer un minimum annuel de 40 heures à la formation. Le cabinet doit évaluer de manière périodique ses besoins en personnel (en terme d’effectif et de compétences) et doit établir/mettre en œuvre un plan de formation.

 

  • Qualité du travail: L’expert-comptable doit réaliser ses missions avec conscience professionnelle et avec la diligence nécessaire pour livrer un travail de qualité.   Il s’assure par ailleurs que les collaborateurs exercent leurs activités en veillant à leur qualité par l’application des normes existantes en termes de compétence, de supervision et de programmation des travaux. Certaines tâches doivent par exemple être exécutées exclusivement par l’expert-comptable qui assure la responsabilité entière de la mission.

 

  • Secret professionnel et devoir de discrétion: l’expert est tenu au secret professionnel et à la confidentialité des informations sous peine de sanctions pénales (emprisonnement et amende). Il ne peut pas communiquer les informations sur son client à des tiers ou à un autre cabinet d’expert-comptable à moins qu’ils aient été mandatés par le client à travailler sur le même dossier.

 

  • Acceptation et maintien des missions: la prise de connaissance globale de l’entreprise, l’évaluation des risques, le respect du principe d’indépendance ainsi que l’examen de la disponibilité des compétences requises chez l’expert-comptable et les collaborateurs concernés sont des conditions préalables pour accepter une mission. L’expert doit par ailleurs vérifier qu’aucun évènement interne ou externe ne remet pas en cause la mission de l’expert, que ce soit au niveau de ses objectifs ou de son déroulement.

 

Normes de travail

 

  • Programmation des travaux: L’expert-comptable doit programmer la réalisation de sa mission en précisant les activités ou tâches à effectuer, le début de réalisation, les délais, le temps de travail prévisionnel, le budget y afférent. Cette programmation permet à l’expert d’affecter les ressources financières incluant les collaborateurs.

 

  • Lettre de mission: Il s’agit du contrat signé entre l’expert-comptable et son client définissant les objectifs, la nature et la délimitation de la mission, les droits et les obligations de chacune des parties ainsi que les honoraires.

 

  • Délégation et supervision: L’expert-comptable peut déléguer une partie des activités à réaliser mais en conserve la responsabilité entière.  Il doit cependant superviser les travaux confiés à chacun des collaborateurs en vérifiant la qualité des tâches exécutées et les heures de travail y afférentes par le biais de la revue des dossiers de travail et du programme de travail.  La supervision par l’expert doit être matérialisée par une note de commentaires ou des notes sur les documents de travail.

 

  • Documentation des travaux: l’expert-comptable doit tenir des dossiers de travail qui matérialisent les diligences effectuées par le cabinet :

 

  • ceux-ci doivent permettre de comprendre les travaux à effectuer et ceux déjà réalisés. Ils permettent à l’expert-comptable de connaître l’avancement des travaux effectués et de contrôler les tâches de chaque collaborateur.
  • ils permettent de rechercher les informations sur le dossier parce qu’elles sont centralisées dans un même document.
  • ils permettent de connaître l’entreprise cliente de manière approfondie. L’assimilation des informations sur l’entreprise par un nouveau collaborateur s’en trouve ainsi facilité.
  • ils permettent d’affiner les nouvelles missions proposées au client, l’évaluation des temps de travail et des honoraires à budgéter.

 

Section 3 : Déontologie applicable à l’audit contractuel

 

L’entreprise peut recourir à un expert-comptable pour répondre à des besoins spécifiques sur des procédures convenues en lien avec ses comptes. Les conditions ci-après doivent être remplies avant la réalisation de cette mission :

 

  • les analyses et les constats sont effectués à la demande de l’entreprise cliente.
  • les procédures convenues portent sur des éléments des comptes de l’entreprise, sur des états comptables ou sur les comptes, sur des informations directement liées ou non à la comptabilité. Dans le cas d’une filiale soumis à un régime d’acheteur-revendeur, les constats vont concerner les comptes de TVA et les impôts sur les sociétés. Dans le cas de la filiale française avec un statut de commissionnaire opaque, la mission peut par exemple porter sur les constats des comptes de TVA, des comptes de produits relatifs aux commissions perçues et de l’impôt sur les sociétés.

 

L’expert peut réaliser une mission sur les procédures convenues sur l’entreprise cliente (la filiale), sur l’entreprise qui la contrôle ou sur une autre entité qu’elle contrôle.

 

L’expert doit cependant comprendre les motifs et le contexte qui ont poussé son client à demander la réalisation d’un audit contractuel afin de s’assurer que :

 

  • les conditions sus nommées sont respectées
  • la mission demandée ne constitue pas une infraction au code de déontologie : par le biais de la mission, l’expert-comptable ne doit pas par exemple représenter une entreprise devant une entreprise, ou s’impliquer dans un contentieux dans lequel l’entreprise est impliquée.

L’expert-comptable doit convenir des modalités de la mission avec son client incluant :

 

  • les documents, les informations, les données que le client doit communiquer,
  • les types de procédures qui seront appliquées et le calendrier y afférent,
  • la restitution des analyses et des constats. Cette restitution peut à la fois être orale et écrite.

 

L’expert-comptable doit obligatoirement fournir un rapport qui matérialise les travaux réalisés et les constats. S’il n’a pas défini lui-même les procédures de contrôle, il doit le préciser dans le rapport afin que le lecteur puisse correctement interpréter les constats formulés. Le rapport doit inclure les informations génériques ci-après :

 

  • l’indication au titre d’un rapport de constat sur des procédures convenues,
  • l’identification du client et de l’expert-comptable,
  • un exposé du contexte de l’intervention de l’expert,
  • la mention des informations, données, éléments utilisés pour la réalisation de la mission,
  • la description des procédures mises en œuvre,
  • la formulation des constats.

 

Section 4 : L’engagement de la responsabilité de l’expert-comptable

 

La responsabilité civile contractuelle de l’expert-comptable est engagée lorsqu’il commet des fautes ou lorsqu’il a été négligent lors de l’exécution de la mission convenue avec son client. Bien que l’expert n’ait pas une obligation de fin, le client peut le poursuivre pour faute et négligence en prouvant les faits dénoncés. La justice va alors apprécier le comportement de l’expert par rapport à celui exigé par la déontologie. Le client peut demander des dommages et intérêts en contrepartie des préjudices subis.

 

L’expert-comptable doit ainsi souscrire une assurance de responsabilité civile professionnelle et veiller à bien préciser dans la lettre de mission les délimitations des travaux.

 

La responsabilité pénale de l’expert-comptable est engagée lorsqu’il a réalisé ou lorsqu’il est complice d’une infraction, incluant entre autres le non-respect du secret professionnel, l’enregistrement d’écritures comptables erronées ou fictives, l’abus de confiance ou le délit d’initié. Le client ou le tiers doit alors saisir le commissariat de police ou le procureur de la République.

 

La responsabilité fiscale de l’expert-comptable est engagée dans les cas de figures ci-après : il a enregistré des écritures comptables incorrectes ou fictives ; il a omis de passer des écritures comptables ; il a élaboré des faux états financiers qui ont eu pour objectif de fausser les bases imposables des impôts et taxe. Cette responsabilité est également engagée lorsqu’il est poursuivi pour délit de fraude fiscale. Pour éviter cette situation, l’expert doit être capable de justifier qu’il a réalisé les écritures nécessaires avec exactitude et qu’il a procédé aux vérifications suivant les diligences requises.

 

Section 5 : Valeur ajoutée de l’expert-comptable

 

  1. L’expert-comptable : un conseiller privilégié des chefs d’entreprise

 

L’expert-comptable est un conseiller privilégié en raison de sa proximité avec les chefs d’entreprise. De par ses missions traditionnelles telles que la tenue de la comptabilité, ou la présentation des comptes annuels, l’expert-comptable maîtrise les activités de l’entreprise, son historique, son fonctionnement, son environnement et sa situation financière. Il est le mieux positionné pour détecter les éventuelles anomalies, irrégularités ou fraudes dans les comptes financiers ainsi que les faiblesses et les dysfonctionnement du contrôle interne de l’entreprise. Sa valeur ajoutée réside dans la proposition de mesures et actions destinées à améliorer la gestion de l’entreprise, à réduire les risques de fraudes qui peuvent occasionner des pertes financières pour l’entité. Grâce à sa connaissance approfondie de l’entreprise, l’expert peut également accompagner le dirigeant dans l’appréhension des nouvelles règles économiques, fiscales ou sociales en l’aidant à comprendre leurs implications pour l’entreprise, pour son organisation et pour ses résultats financiers. Il peut par ailleurs l’assister dans le choix des meilleures options de développement.

 

La valeur ajoutée de l’expert-comptable dans la présente mission est d’aider le dirigeant à appréhender les enjeux et les impacts fiscaux du statut de commissionnaire opaque de  la filiale et à minimiser les risques de redressement fiscaux.

 

  1. L’avantage de la polyvalence de l’expert-comptable pour la mission

 

La mission requiert une bonne compétence dans le traitement fiscal des groupes (mère-fille), des transactions intracommunautaires, des importations/exportations, du régime fiscal des commissionnaires opaques afin de pouvoir analyser les implications fiscales de la création d’une filiale agissant en tant qu’intermédiaire. L’expert-comptable bénéficie d’un atout considérable puisqu’il dispose des compétences en comptabilité, en gestion financière et en fiscalité.

 

Chapitre 2 : Proposition d’outils de prévision et de contrôle du risque fiscal au dirigeant d’un commissionnaire opaque

 

Ce deuxième chapitre concerne les diligences à mettre en œuvre par l’expert pour réaliser au mieux sa mission et pour garantir sa qualité ; la proposition d’outils de prévision et de contrôle des risques fiscaux relatifs au statut de commissionnaire opaque à utiliser par l’expert-comptable ou les dirigeants de l’intermédiaire. Ces outils sont utiles car ils permettent à l’expert de s’assurer qu’aucun point important n’a été omis, que tous les points fiscaux ont été traités et analysés correctement.

 

Section 1. Les diligences à mettre en œuvre dans l’audit fiscal

 

  1. Objectifs de la mission

 

La mission de l’expert-comptable a pour objectif  de (a) analyser les risques fiscaux d’une filiale française d’une société étrangère lors du basculement d’un régime d’acheteur-revendeur vers un statut de commissionnaire opaque ; (b) identifier les risques fiscaux du commissionnaire opaque compte tenu des spécificités de ses activités et de celles de l’entreprise ; (c) s’assurer de la cohérence et de la pertinence des impôts et taxes payés par rapport aux réglementations en vigueur ; (d) s’assurer de l’existence d’une sécurité suffisante au sein de l’entreprise qui garantisse le respect des règlementations fiscales ; (e) formuler des recommandations pour éliminer ces risques.

 

  1. Les diligences propres à la mission

 

L’expert-comptable doit mettre en œuvre un certain nombre de diligences lors de la réalisation de la mission. Il doit veiller à matérialiser ses travaux dans des documents écrits afin de garder une traçabilité des démarches effectuées et des informations utilisées pour aboutir à ses conclusions.

 

  1. L’organisation de la mission

 

Etant donné les spécificités des missions d’audit contractuel et des missions sur les procédures convenues, il n’existe pas de méthodologie standard. L’expert-comptable peut adopter les démarches ci-après dans le cadre de la mission portant sur l’étude des impacts fiscaux du statut de commissionnaire opaque de la filiale française d’une société étrangère :

 

  • L’expert-comptable doit prendre connaissance de la filiale étudiée, de ses activités, de son fonctionnement, de sa relation avec la société étrangère, de sa relation avec les autres entreprises associées du groupe, de sa gestion fiscale. Cette étape permet d’appréhender les spécificités de l’entreprise dans le cas d’une première relation avec le client et constitue une base préalable pour les prochaines analyses. Elle permet de collecter les informations à intégrer dans le dossier permanent de l’expert. Cette étape lui permettra de définir les éventuels risques et difficultés qui pourraient survenir durant la mission. Elle peut fournir une première idée sur les activités à réaliser pour orienter les investigations de l’expert et sur les informations ou documents à obtenir pour baser ses analyses.

 

  • Si l’audit fiscal inclut de vérifier l’exactitude des TVA ou des autres impôts à payer, l’expert-comptable doit : (a) prendre connaissance des régimes fiscaux applicables aux spécificités de l’entreprise étudiée (taux d’IS, taux de TVA applicable aux produits vendus par la société, les incidences fiscales sur les conventions (contrats de location ou leasing, etc…), les avantages fiscaux (CIR,…) ; (b) identifier les faiblesses des procédures de traitement des points fiscaux qui peuvent représenter des risques pour l’entreprise. Il doit ainsi examiner les dispositifs mis en place au sein de l’entreprise pour le traitement fiscal. Il pourra par la suite procéder à des vérifications de certaines opérations afin de contrôler leur pertinence (exactitude des déclarations, calcul de la base imposable, bonne application du taux d’imposition). L’expert doit restituer de manière précise les faiblesses constatées dans le traitement fiscal ainsi que les risques potentiels constatés.

Pour l’analyse des procédures de traitement fiscal, l’expert-comptable doit vérifier s’il existe un service fiscal au sein de l’entreprise, sa position dans l’organigramme ou si une ou des personnes dédiées sont en charge des questions fiscales. Il analyse comment les problèmes fiscaux sont traités. Il contrôle si la société détient un manuel des procédures et si ce dernier intègre des questions fiscales. Il vérifie si l’entreprise/ou le groupe a eu recours à un ou des conseils externes pour l’aider dans le domaine fiscal. Il examine comment les questions fiscales sont traitées ; dans quelles conditions les déclarations fiscales sont établies ; l’existence de procédures de vérification interne de ces déclarations (en termes de règles fiscales et de mode de calcul) ; les procédures d’envoi des déclarations ; les procédures de paiement des impôts et taxes (autorisation des paiements, paiements, concordance).

 

A l’issue de cette analyse des procédures fiscales, l’expert-comptable réalise :

 

  • un test de conformité pour s’assurer que les procédures identifiées sont correctes et réellement appliquées dans l’entreprise. Il permet de détecter les procédures informelles.
  • un test de permanence pour s’assurer que les procédures constatées sont systématiquement appliquées par l’entreprise.

 

Dans le cadre de l’analyse des impacts fiscaux de la conversion d’une filiale distributeur en une filiale commissionnaire opaque ou dans le cadre de la création d’une filiale opaque, l’expert doit s’informer sur (a) les spécificités fiscales du commissionnaire opaque ; (b) les spécificités fiscales de cette activité dans le cadre d’une relation société étrangère-filiale française impliquée dans des transactions intracommunautaires.

 

  • L’expert en déduit les points fiscaux sur lesquels l’entreprise doit faire particulièrement attention ; analyse les procédures internes de traitement fiscal de l’entreprise par rapport à ces points fiscaux afin d’identifier les points faibles, les zones de risque.

 

  • Dans le cadre d’une mission supplémentaire de conseil, l’expert-comptable peut formuler des recommandations afin que la société principale-filiale soit en conformité par rapport aux règles fiscales applicables (TVA intracommunautaire, IS, établissement stable).

 

Pour organiser la mission de manière efficace, l’expert-comptable doit élaborer un programme de travail. Cet outil lui permettra à la fois de gérer une contrainte temps puisque la mission doit se dérouler sur une période bien définie, et de gérer l’avancement des activités. Le programme de travail détaillera l’ensemble des travaux à effectuer : il permet de ne pas oublier certains contrôles nécessaires. Il facilite par ailleurs la répartition des travaux entre les collaborateurs.

 

Section 2 : Conception des outils de prévision et de contrôle

 

  1. Outil de prise de connaissance des règles fiscales (et exemple d’application)

 

Questionnaire à utiliser lors de l’évaluation des risques fiscaux de la transformation de la filiale française en statut de commissionnaire

 

Le questionnaire ci-après fournit un check-list des points à aborder par l’expert-comptable pour réaliser un diagnostic sur le basculement de la filiale en un statut de commissionnaire opaque :

 

Vérification de la nature de la relation prévue entre la société étrangère et de la société française

 

  • est-ce que la société étrangère est établie dans un Etat membre de l’UE ?
  • quel est le régime fiscal actuel de la société qui sera convertie en une filiale d’une société étrangère avec un statut de commissionnaire?
  • quelles sont les modalités prévues pour la relation entre la société étrangère et le commissionnaire ?
  • est-ce que la société française va travailler exclusivement pour la société étrangère ou non ?
  • est-ce que le commissionnaire répond à la qualification fiscale d’un commissionnaire opaque ?
  • pourquoi la société étrangère veut opter pour un statut de commissionnaire opaque ?
  • est-ce que les termes du contrat entre le commettant et le commissionnaire sont définis, et sont conformes au statut d’un commissionnaire opaque ?
  • quelles sont les fonctions et risques assumés par le commettant ?
  • quelles sont les fonctions et risques assumés par le commissionnaire ?
  • est-ce que des échanges physiques de marchandises interviendront entre le commettant et le commissionnaire ?
  • est-ce que la facture émise par le commissionnaire sera établie uniquement en son nom propre ?
  • est-ce que la société étrangère est établie dans un autre pays membre de l’UE ? Preuve.
  • est-ce que la société est assujettie à la Tva en France ?
  • est-ce que la société dispose d’un local en France ? où ? de moyens d’exploitation ? lesquels ?
  • est-ce que la société a un moyen de savoir si l’entreprise associée en amont ou en aval s’est bien acquittée de la TVA ?
  • est-ce que le dirigeant de la société française n’est pas frappé d’une interdiction de gestion ou d’autres poursuites judiciaires ?
  • quelles sont les conditions commerciales envisagées ? est-ce qu’elles sont similaires à celles pratiquées généralement sur le marché ?
  • qui sera chargé de la livraison des marchandises aux clients finaux ?

 

Vérification de la politique de prix de transfert sur les commissions

  • comment est-ce que le montant de la commission sera défini ? sur quelle base ?
  • est-ce que le taux de commission est similaire à celui pratiqué dans le même secteur d’activité de l’entreprise ? source.
  • est-ce que la commission est cohérente par rapport au service que le commissionnaire rend ?

 

Vérification de la politique de prix de transfert sur les prix des marchandises

  • est-ce qu’il existe une politique de transfert sur les prix des marchandises ? est-ce qu’elle est appliquée ?
  • est-ce que les prix des marchandises transférées au commissionnaire reflètent les conditions normales du marché ?
  • est-ce que le groupe a déjà fait l’objet d’un contrôle fiscal sur ses prix de transfert ?
  • est-ce que le groupe adopte une politique de documentation des prix de transfert ? est-ce qu’il est appliqué ?

 

Vérification de l’existence potentielle d’un transfert de clientèle vers le commettant

  • est-ce que la société française dispose déjà d’un portefeuille de clientèle spécifique au commettant?
  • est-ce que la société française a engagé des frais de communication et de publicité pour l’acquisition de cette clientèle ?

Vér

Vérification du contrôle interne lié à la fiscalité existant au sein de la société française

  • est-ce que la société française dispose d’un service fiscaliste ou emploie une personne spécialisée en fiscalité internationale ?
  • est-ce que la société française dispose d’un personnel chargé de la facturation des biens et marchandises ?
  • comment est-ce que la société assure le suivi des livraisons effectuées par le commettant et des livraisons effectuées chez le client ? est-ce qu’il dispose d’un outil de suivi ?
  • est-ce que le responsable financier de l’entreprise maîtrise les questions de prix de transfert ?

 

Vérification du caractère potentiel d’un établissement stable

  • est-ce que le contrat entre le commettant et le commissionnaire remplit les critères de qualification d’un contrat de commissionnement ?
  • est-ce que les stratégies commerciales et les prix sont bien définis par le commettant ?
  • est-ce que les frais engagés par la société pour la commercialisation des produits seront remboursés par le commettant ? sur quelle base ?

 

Questionnaire à utiliser lors de la détermination de la TVA applicable

 

Le questionnaire inclura les questions ci-après :

 

  • Pays concernés par l’opération ? Pays de départ et pays de destination
  • est-ce que l’opération constitue une transaction intracommunautaire ?
  • est-ce que le fournisseur est assujetti à la TVA dans son pays ?
  • est-ce que le commissionnaire en France est assujetti à la TVA en France ?
  • est-ce que le commissionnaire en France est assujetti à la TVA dans le pays de départ des marchandises (à priori le pays où la société étrangère est localisée ?
  • est-ce que le commissionnaire en France est assujetti à la TVA dans le pays de destination (dans le pays où le client est localisé ?
  • est-ce que le client est assujetti à la TVA dans son pays ?
  • est-ce que le commissionnaire peut vérifier l’exactitude du numéro de TVA du client dans son pays ?
  • est-ce que les marchandises sont transportées ou expédiées directement du fournisseur vers le client final ? Mention des pays.
  • est-ce que les marchandises sont transportées ou expédiées du fournisseur étranger vers le commissionnaire en France ? Mention des pays.
  • est-ce que les marchandises transportées ou expédiées du fournisseur sont destinées à être livrées directement au client final ?
  • est-ce que le commissionnaire livre lui-même les marchandises ?
  • est-ce que le commissionnaire peut justifier de la livraison des biens hors France ? quels documents ?
  • est-ce que les règles de facturation sont respectées ?
    • montant hors taxe ?
    • numéro d’identification à la TVA du fournisseur ?
    • numéro d’identification à la TVA du commissionnaire?
    • numéro d’identification à la TVA du client final?
    • mention « exonération de TVA en référence au CGI ou à la directive européenne »
  • est-ce que le commissionnaire a vendu les marchandises expédiées ou transportées du fournisseur étranger dans un délai légal de trois mois ?
  • le commissionnaire veut-il appliquer le régime fiscal d’un acheteur-revendeur en termes de TVA ou veut-il appliquer le régime simplifié des opérations triangulaires ?

 

La réponse à ces questions permettra à l’expert-comptable d’appréhender l’ensemble des facteurs à prendre en considération, à déterminer notamment le lieu d’imposition (la territorialité de l’impôt) et de déduire si les transactions du commissionnaire sont soumises ou exonérées de la TVA en France.

 

Exemple d’application

 

Prenons le cas d’un groupe international commercialisant des vêtements de prêt-à-porter pour hommes et femmes, qui réalise d’importantes opérations intracommunautaires.

 

Sur la base des règles fiscales préétablies, l’expert-comptable pourrait déduire facilement faire une lecture du lieu d’imposition de la TVA :

 

Ex. 1 : Marchandises expédiées par HubCo d’un entrepôt italien vers un client belge par le biais d’un commissionnaire en France

Hypothèse : Les entreprises concernées sont assujetties à la TVA dans leurs pays respectifs.

 

Société étrangère (HubCo)

Entrepôt en Italie

Commissionnaire

France

Client final

Belgique

 

Marchandises expédiées d’Italie à la Belgique

HubCo : facture le commissionnaire au prix de vente minoré de la commission sous le numéro d’identification à la TVA en Italie et le numéro d’identification du commissionnaire en France.

Commissionnaire : facture le client belge sous son nom propre en précisant son  numéro d’identification à la TVA en France et celui du client, et en ajoutant la mention « Application de l’article 28 de la directive 77/388EU ».

Traitement de la TVA:

  • Opération entre HubCo et le commissionnaire : exonéré de TVA
  • Opération entre le commissionnaire et le client : exonéré de TVA

 

Ex. 2 : Marchandises expédiées par HubCo d’un entrepôt italien vers un client français par le biais d’un commissionnaire en France

 

Société étrangère (HubCo)

Entrepôt en Italie

Commissionnaire

France

Client final

France

 

Marchandises expédiées d’Italie vers la France

HubCo : facture le commissionnaire au prix de vente minoré de la commission sous le numéro d’identification à la TVA en Italie et le numéro d’identification du commissionnaire en France.

Commissionnaire :

  • Opérations entre HubCO et le commissionnaire considérée comme une acquisition intracommunautaire et soumise à la TVA en France
  • facture le client français sous son nom propre en précisant son numéro d’identification à la TVA en France et celui du client

Traitement de la TVA:

  • Opération entre HubCo et le commissionnaire : exonéré de TVA
  • Opération entre le commissionnaire et le client : soumise à la TVA en France

 

Ex. 3 : Marchandises expédiées par HubCo d’un entrepôt au Pays Bas vers un client au Pays-Bas par le biais d’un commissionnaire en France

 

Société étrangère (HubCo)

Entrepôt au Pays Bas

Commissionnaire

France

Client final

Pays Bas

 

Marchandises expédiées du Pays Bas vers le Pays Bas

HubCo : facture le commissionnaire au prix de vente minoré de la commission sous le numéro d’identification à la TVA au Pays BAs et le numéro d’identification du commissionnaire en France.

Commissionnaire :

  • facture le client néerlandais sous son nom propre en précisant son numéro d’identification à la TVA en France et celui du client au Pays Bas
  • demande le remboursement de la TVA chargée par HubCo auprès des autorités néerlandaises. Le commissionnaire doit être inscrit à la TVA au Pays-Bas.

Traitement de la TVA:

  • Opération entre HubCo et le commissionnaire : soumise à la TVA néerlandaise
  • Opération entre le commissionnaire et le client : soumise à la TVA néerlandaise (auto-liquidation par le client).

 

Ex. 4 : Marchandises expédiées par la société étrangère A de son entrepôt au Pays Bas vers le point de vente au détail de son commissionnaire en France où les marchandises sont stockées en consignation. Celles-ci sont vendues par le commissionnaire.  

 

Société étrangère (A)

Entrepôt au Pays Bas

Société A en France Commissionnaire

Point de vente

France

Clientèle de détaillants

 

Marchandises expédiées du Pays Bas vers la France

Société étrangère A :

  • transfère les marchandises vers la société A en France
  • acquisition par la société A en France
  • facture le commissionnaire établi en France.

Commissionnaire :

  • acquisition auprès de la société A en France

Traitement de la TVA:

  • Transfert des marchandises par la société étrangère A du Pays Bas vers la France : exonéré de TVA
  • Opération entre la société A et le commissionnaire : soumise à la TVA française
  • Opération entre le commissionnaire et le client : soumise à la TVA française

 

  1. Outil de calcul de la base imposable à l’IR et à la TVA (et exemple d’application)

 

D’un point de vue comptable, les opérations réalisées par un commissionnaire transparent sont enregistrées dans les comptes du commettant qui sont des comptes de tiers, seule la commission est comptabilisée dans le résultat de l’entreprise.  Les opérations réalisées par le commissionnaire opaque, quant à elles, sont enregistrées dans les produits et les charges de l’entreprise. Elles sont toutes comptabilisées au niveau du compte de résultat. Le chiffre d’affaire du commissionnaire opaque est donc bien constitué de la totalité des prix de vente incluant les commissions d’un point de vue comptable.

 

D’un point de vue économique, seules les commissions constituent les recettes propres du commissionnaire opaque. L’application de la règle de détermination du chiffre d’affaires a des conséquences différentes en termes d’impôts :

 

  • Pour les impôts sur les sociétés, même si les montants de la vente sont enregistrés dans la comptabilité en tant que produits, avec la déduction des charges lors du calcul du résultat, seules les commissions composent le résultat qui constitue le résultat fiscal. Le mode de détermination du chiffre d’affaires du commissionnaire opaque n’impacte pas sur le montant de l’IS.
  • Pour la TVA, le commissionnaire opaque est réputé acheter et vendre les biens en son nom personnel. La TVA déductible (opération assimilée comme un achat auprès du commettant) vient corriger la considération de la TVA collectée sur le prix de vente incluant la commission. Ce mode de calcul peut être défavorable pour les entreprises industrielles et commerciales puisqu’elles ont un taux de charges plus élevé que les entreprises non commerciales, ce qui implique une différence plus importante entre leur CA et les bénéfices qu’elles réalisent.
  • Pour la contribution économique territoriale, l’assiette est constituée par la valeur ajoutée et non par le CA. La valeur ajoutée représente un solde : les sommes payées aux commettants sont incluses dans les consommations.

 

La filiale commissionnaire est assujettie à l’IR si elle est une société individuelle, et à l’IS si elle a une autre forme juridique.

 

Calcul de la base imposable à l’IS

 

Base imposable = résultat comptable + réintégrations fiscales – déductions fiscales – déficit restant à imputer

 

Réintégration fiscale = charges comptabilisés non admises en déduction dans le résultat fiscal enregistrée en comptabilité qui n’est pas fiscalement admise en déduction Déduction fiscale= produits comptabilisés non imposables fiscalement.

 

Il faudra également retrancher les créances fiscales telles que les réductions d’impôt, les crédits d’impôt ou les acomptes déjà payés.

Exemple d’application pour la TVA :

Cas d’un commissionnaire opaque réalisant une transaction de 30 000 € HT incluant la commission de 4 500 €

 

Tableau 7 : Exemple de calcul TVA

Intermédiaire agissant en son nom propre
À la vente À l’achat
Situation du commettant Situation de l’intermédiaire Situation du tiers Situation du commettant Situation de l’intermédiaire Situation du tiers
Vente à l’intermédiaire

Taxation

5 100

Achat au commettant

Déduction

5 100

Vente au tiers

Taxation

6 000

Achat à l’intermédiaire

Déduction

6 000

Achat à l’intermédiaire

Déduction

6 000

Achat au tiers

Déduction

5 100

Vente au commettant

Taxation

6 000

Vente à l’intermédiaire

Taxation

5 700

Chapitre 3 : Constitution des documents de fin de mission

 

Ce dernier chapitre concerne les documents de fin de mission à présenter et à soumettre par l’expert-comptable. Il fournit des indications sur le rapport de mission et sur la lettre de mission.

 

Section 1. Le rapport de mission

 

  1. Le contenu d’un rapport de mission

 

Le contenu du rapport de mission est laissé à la libre appréciation de l’expert-comptable et de son client : le contenu peut ainsi être rédigé à l’initiative e l’expert ou défini de commun accord entre les deux parties.

 

La forme du rapport

 

Les parties peuvent convenir de la forme du rapport qui peut être effectuée de manière écrite ou orale. Il est cependant recommandé à l’expert d’établir systématiquement un rapport écrit qui permet de recenser les constats de manière formelle et de matérialiser la prestation fournie par le cabinet afin de disposer d’une référence en cas de litiges ultérieurs.

 

La combinaison rapport écrit/et rapport verbal peut s’avérer utile car elle permet à l’expert-comptable d’exposer oralement les travaux effectués, les constats et les recommandations formulées. L’entretien permet d’interagir avec le client, de connaître leur perceptions, d’expliquer des points que le client a du mal à appréhender, d’assurer que les livrables sont bien conformes à l’attente du client.

 

Le contenu du rapport

 

L’expert-comptable doit identifier la nature des informations que le client aimerait disposer dans le rapport : le client peut par exemple avoir des constats détaillés sur les irrégularités fiscales de l’entreprise, ou obtenir des constats détaillés sur les risques fiscaux majeurs de celle-ci, et/ou les mesures recommandées pour redresser les irrégularités ou pour éliminer et mitiger les risques.

 

Le rapport doit néanmoins contenir des informations obligatoires telles que :

 

  • la mention des travaux effectués et des difficultés rencontrées lors de la mission : cette description est particulièrement importante car elle permet d’apprécier la méthodologie déployée par l’expert et la qualité des travaux, de justifier le coût de la mission en cas de litiges entre les parties. Elle permet au client de comprendre dans quelles conditions l’expert-comptable a effectué ses analyses.
  • la mention des contrôles essentiels à la mission mais qui n’ont pas été effectuées. L’expert doit expliquer pourquoi ils n’ont pas pu être effectuées et les impacts de la non réalisation sur les constats formulés.
  • la conclusion des travaux effectués ou les constats (les irrégularités fiscales, les risques fiscaux, les points fiscaux sur lesquels une attention particulière doit être apportée par l’entreprise).
  • les recommandations de l’expert-comptable pour supprimer les irrégularités et éliminer les risques. Elles peuvent couvrir les procédures de contrôle interne des questions fiscales ou la compréhension des règles fiscales ou les mesures de sécurité existantes sur les points fiscaux. Il appartiendra au client de décider de mettre en œuvre ou non les mesures recommandées par l’expert.

 

Les recommandations de l’expert peuvent être curatives : celles-ci sont destinées à corriger les irrégularités ou les erreurs qui sont d’origine purement fiscale ou d’origine comptable. Les irrégularités ou erreurs fiscales sont généralement dues au faible respect des règles en vigueur (défaut de déclaration, retard de dépôt des déclarations, mauvais remplissage des déclarations). L’expert-comptable doit formuler des recommandations pour éviter de dépasser le légal de dépôt des déclarations (mise en place d’un calendrier fiscal avec des dispositifs d’alerte), ou pour remplir de manière correcte les déclarations fiscales (formation du personnel concerné, établissement de spécimen de déclaration dûment rempli avec des explications). Les erreurs fiscales d’origine comptable sont dues par l’exactitude des montants enregistrés pour obtenir le résultat comptable (base imposable de certains impôts). Une mauvaise imputation comptable (comptabilisation en actif au lieu de charges et vice-versa) impacte directement sur le montant du résultat comptable.

 

Les recommandations émises peuvent également être préventives : l’expert-comptable doit attirer l’attention du client sur les risques fiscaux significatifs et proposer des mesures pour limiter la survenance de ces risques. Celles-ci sont généralement constituées par des mesures de sécurité, des nouvelles procédures de contrôle.

 

 

  1. Modèle de rapport de mission d’audit contractuel

 

Le rapport de mission de l’expert-comptable pourrait se présenter comme suit :

 

Rapport de mission de l’expert-comptable résultant de procédures convenues relatives à l’audit des procédures fiscales de l’entreprise X et de l’examen du statut de commissionnaire opaque pour la filiale française X de la société étrangère Y au (date).

 

A l’attention du Directeur Général de la Filiale X,

 

En notre qualité d’expert-comptable de la filiale X et en réponse à votre demande dans le cadre de la revue des procédures fiscales de votre entité, nous avons mis en œuvre les procédures convenues avec vous, portant sur les informations et les comptes liés directement à la fiscalité de l’entité X.

 

Ces informations et ces comptes ont été élaborés sous la responsabilité du Responsable Administratif et Financier de l’entité X. L’expert-comptable est en charge de communiquer les  constats qui résultent de la mise en œuvre des procédures convenues avec vous selon les termes décrits dans notre lettre de mission du (date).

 

Ces procédures ont été définies afin de permettre à l’entreprise X de s’assurer que les procédures fiscales appliquées au sein de l’entreprise X garantissent une sécurité suffisante en termes de respect des règles  fiscales en vigueur. Les constats fournis par l’expert-comptable sont destinés à permettre à l’entité X de tirer ses propres conclusions sur la sécurité de ses procédures fiscales. Les travaux ont été exécutés selon les normes d’exercice de la profession d’expertise comptable en France.

 

L’ensemble des procédures convenues ont été réalisées.

 

  1. Nous avons procédé à l’analyse des procédures de contrôle interne relatives au traitement fiscal dans l’entité X concernant l’activité fiscale intégrale de l’entreprise (fiscalité en France, fiscalité internationale) et portant sur l’ensemble des impôts et taxes afin de relever les irrégularités potentiels pour la période de ( années concernées) et de dégager les risques fiscaux.

 

Ces procédures ont inclus :

 

  • la vérification de la cohérence des déclarations selon les spécificités de l’entreprise,
  • la vérification de la cohérence des déclarations entre elles,
  • la vérification de la cohérence des déclarations avec les données de la comptabilité,
  • la vérification de la cohérence des déclarations selon les règles fiscales,
  • la vérification de l’existence de documents justificatifs permettant de répondre à des demandes d’explications ultérieures.
  • l’analyse des fluctuations des postes de bilan, de produits et de charges pour détecter des tendances anormales pouvant voir un impact sur la fiscalité,
  • l’évaluation du contrôle interne spécifique au domaine fiscal
  • la vérification par sondage des opérations fiscales

 

  1. Nous avons proposé des moyens et actions pour éliminer ou réduire les irrégularités constatés et les risques identifiés.

 

Les procédures effectuées ont permis de déduire les constats ci-après:

 

  • pour la procédure a :……………………
  • pour la procédure b : …………………..
  • pour la procédure c :……………………

 

En notre qualité d’expert-comptable de la filiale X et en réponse à votre demande dans le cadre de l’examen de la mise en place d’une filiale avec un statut de commissionnaire opaque, nous avons mis en œuvre les procédures convenues avec vous.

 

Ces procédures ont été définies afin de permettre à l’entreprise X d’optimiser la gestion fiscale de la filiale ; de comprendre et d’évaluer les risques fiscaux encourus par l’entreprise en matière d’impôts et taxes dans le domaine de la fiscalité internationale et pour la fiscalité relative à ses relations avec la société étrangère ; d’appréhender la diminution de la charge fiscale impliquée par la conversion du statut de la filiale en un commissionnaire opaque.

 

Les procédures ci-après ont été mises en œuvre :

 

  • l’analyse des impacts fiscaux du statut de commissionnaire opaque sur le résultat imposable de la filiale et sur l’IS à payer.
  • l’analyse des impacts de ce nouveau statut sur la charge fiscale de la filiale et la sécurisation des opérations fiscales afin de ne pas s’exposer aux risques de transfert indirect de bénéfices.
  • l’analyse des obligations fiscales additionnelles à mettre en œuvre par la filiale (déclaration de DEB).
  • l’analyse des impacts du statut de commissionnaire opaque sur la TVA intracommunautaire.
  • la sécurisation des procédures de contrôle interne relatives aux spécificités fiscales du statut de commissionnaire opaque.
  • la restitution des règles fiscales applicables au statut de commissionnaire opaque relatives à la TVA intracommunautaire.
  • la mise en exergue des faiblesses relatives au contrôle interne dans le contexte de mise en place d’un statut de commissionnaire opaque.

 

Les analyses ont permis de mettre en exergue les constats ci-après :

 

  • Forces :…………………………………
  • Faiblesses : ……………………………
  • Opportunités :………………………….
  • Menaces : ………………………………

 

Les recommandations de l’expert-comptable sont :

 

………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………

 

Notre intervention ne fait pas l’objet d’une expression d’une opinion sur les informations collectées et étudiées. Le présent rapport est établi à l’attention du client X dans le contexte et pour les objectifs nommés ci-dessus, et ne concerne que les informations relatives à la mission et qui ont été communiquées par le client.

 

Section 2. La lettre d’affirmation

 

  1. Définition de la situation nécessitant une lettre d’affirmation

 

La lettre d’affirmation permet à l’expert-comptable d’engager la responsabilité de la direction générale de l’entreprise cliente quant à la transmission des documents et des informations qui lui sont utiles pour réaliser la mission convenue.

 

Elle est particulièrement requise lorsque l’expert constate une contradiction entre les déclarations de la direction et les éléments qu’il a pu collecter durant ses travaux ou lorsqu’il met en doute l’honnêteté de son client sur les informations communiquées surtout si celles-ci peuvent remettre en cause les constats et les conclusions de l’expert-comptable. Face à ces situations, l’expert peut choisir entre plusieurs formes d’engagements qui peuvent se traduire par un memorandum ou une lettre d’affirmation du client.

 

Elle a pour objectifs de formaliser les déclarations de la direction générale et des autres directions impliquées dans la mission de l’expert-comptable, de documenter l’exactitude et la fiabilité de ces déclarations, de diminuer les possibles malentendus de la part de l’expert-comptable sur les informations communiquées.

 

Dans le cadre de la mission de mise en place du statut de commissionnaire opaque pour une filiale française d’une société étrangère, la lettre d’affirmation peut s’avérer nécessaire pour engager la responsabilité de la filiale sur les informations relatives à :

 

  • la nature des transactions envisagées avec la société mère, sur le circuit des flux physiques des biens et marchandises, sur les autres membres du groupe qui pourraient être associés aux transactions, sur les pays d’origine concernés, sur la politique de transfert envisagée sur les commissions. Ces informations revêtent en effet une grande importance pour définir le régime fiscal applicable au commissionnaire opaque et pour évaluer les risques fiscaux liés à l’activité.

 

  • aux procédures de contrôle interne sur le domaine fiscal puisque c’est sur la base des informations communiquées que l’expert évalue les faiblesses du dispositif, procède à un contrôle exhaustif ou non des opérations, et formule des recommandations.

 

  • à la fiabilité des informations financières fournies dans les états financiers car elles impactent sur les montants des résultats fiscaux imposables.

 

  1. Le contenu de la lettre d’affirmation

 

La lettre d’affirmation inclut :

 

  • l’objet de la lettre d’affirmation et la mention de la mission sur laquelle elle se réfère.
  • les déclarations qui sont importantes pour la mission et qui ne sont pas reflétées directement dans les états financiers et dans les annexes de la société X.
  • les déclarations qui résultent de l’évaluation propre ou du jugement de la direction portant sur la fiabilité des informations, l’absence d’irrégularités constatées ou de cas de fraudes avérées.

 

  1. Modèle de lettre d’affirmation

 

La lettre d’affirmation contient des éléments qui sont plus ou moins standardisés : une partie est personnalisée pour tenir compte des spécificités de la mission, du client et des travaux à réaliser.

 

Dans le cadre de la mission d’analyse des impacts fiscaux du statut de commissionnaire opaque d’une filiale française d’une société étrangère, la lettre d’affirmation pourrait à titre d’exemple, contenir les formulations ci-après :

 

A l’attention du cabinet d’expert-comptable,

 

Cette lettre d’affirmation vous est adressée en application de vos normes d’exercice professionnel dans le cadre de votre mission sur les procédures convenues relatives au domaine fiscal de la filiale X et sur l’analyse des impacts fiscaux de la dotation du statut de commissionnaire opaque à notre entité pour la période du (date de début à la date de fin de la mission).

 

En qualité de responsables de la filiale X, nous vous confirmons ci-après, en toute bonne foi et au mieux de notre connaissance, les informations et affirmations qui vous ont été fournies dans le cadre de votre mission :

 

  1. Les états financiers donnent une image fidèle de la situation financière de la société, et ont été établis selon les principes et les règles comptables françaises.
  2. Des contrôles visant à déceler et à prévenir les erreurs et les fraudes ont été définis et implantées dans la société.
  3. Nous vous avons communiqué :
  • les états et documents financiers, les livres comptables ainsi que les annexes afférents à la comptabilité ;
  • les conventions et les contrats ayant ou pouvant avoir une incidence significative sur la fiscalité de l’entreprise ;
  1. Nous avons mis à votre disposition les rapports, avis ou positions dont le contenu pourrait avoir une incidence significative sur le domaine fiscal.
  2. Nous vous avons informé sur nos décisions de gestion et de nos jugements susceptibles d’avoir une incidence significative sur le régime fiscal de l’entreprise.
  3. Nous n’avons pas connaissance de fraudes fiscales avérées ou suspectées incluant la direction et le personnel en charge des dossiers fiscaux.
  4. Nous avons appliqué, au mieux de notre connaissance, les textes légaux et réglementaires fiscaux. Des procédures ont été mises en œuvre dans l’entreprise afin de le garantir. Nous n’avons pas connaissance de cas de non-respect des règles fiscales en vigueur.
  5. Nous vous avons fait part du projet de réorganisation de notre entité, de nature à affecter notre régime fiscal. L’information communiquée sur le fonctionnement du groupe et la relation entre les entreprises associées est exhaustive et pertinente.

 

La lettre d’affirmation est signée par les membres de la direction qui sont liés directement aux questions fiscales, financières et opérationnelles, et qui sont bien informés sur les déclarations effectuées par l’entreprise dans le cadre de la mission de l’expert-comptable.

 

 

 

Conclusion

 

La mission de l’expert-comptable consiste à réaliser une évaluation des risques fiscaux de la conversion du statut d’une filiale française d’une société étrangère en un statut de commissionnaire opaque. Pour rappel, le commissionnaire opaque est un intermédiaire de commerce qui agit en son nom propre et pour le compte du commettant qui n’est pas visible auprès des tiers. Le commissionnaire est directement engagé vis-à-vis du client.

 

L’analyse a permis de mettre en exergue l’approche fiscaliste du commissionnaire opaque qui est considéré comme un acheteur-revendeur en ce qui concerne la TVA, l’IS et la CET. Il est considéré comme achetant les biens à son nom propre pour ses opérations avec le commettant, et comme vendant les biens personnellement et ses opérations avec le client.

 

Les principaux risques encourus par le commissionnaire opaque incluent ainsi :

 

  • Le transfert de clientèle du commissionnaire vers un commettant qui pourrait être qualifié de transfert indirect de bénéfices: ce risque peut intervenir au moment de la transformation de la société française en une filiale commissionnaire. Il est évoqué si l’administration fiscale prouve que la société française disposait d’une clientèle acquise par ses propres moyens au moment de la transformation. En cas d’existence de transfert de clientèle, le commettant doit verser une contrepartie au commissionnaire.

 

  • Le prix de transfert sur les commissions qui pourrait également être qualifié de transfert indirect de bénéfices : le montant de la commission facturée par le commissionnaire au commettant (taux de calcul) doit refléter les conditions normales du marché dans le même secteur d’activités que celui de la société étrangère et la filiale.

 

  • La TVA intracommunautaire qui pourrait exposer le commissionnaire à des risques de double d’imposition et de non récupération de la TVA payée : le commissionnaire doit maîtriser les règles de TVA applicables aux acquisitions et aux livraisons intracommunautaires ainsi qu’aux règles de simplification autorisées sur les opérations triangulaires. Les règles applicables varient en effet selon le lieu de livraison réputé des marchandises ; l’identification à la TVA du commettant, du commissionnaire et du client ; le délai de vente des marchandises par le commissionnaire.

 

  • Le non-respect des diverses obligations incombant au commissionnaire pour cause de méconnaissance des règles fiscales, de négligence ou d’omission. Ces obligations incluent entre autres la déclaration mensuelle d’échange de biens que les opérations du commissionnaire soient soumises ou non à la TVA.

 

  • La qualification de la filiale commissionnaire en un établissement stable : De par la nature de ses activités et du contrat qui lie les des deux parties, un commissionnaire opaque ne constitue pas un établissement stable de la société étrangère en France. Cette qualification peut cependant être remise en cause si les fonctions et les risques assumés par la filiale et si les modalités relationnelles ne correspondent pas à ceux d’un intermédiaire opaque.

 

Le questionnaire proposé à l’expert-comptable pour faciliter son évaluation des risques fiscaux du commissionnaire opaque intègre l’ensemble de ces aspects. Il doit également veiller à vérifier que la filiale commissionnaire ne fasse pas partie d’une fraude carrousel caractérisée par l’existence de sociétés écrans dans la chaîne de distribution ; et que la filiale ne présente pas les caractéristiques de ces sociétés écrans.

 

Les risques fiscaux du commissionnaire opaque peuvent également survenir lors de la réalisation proprement dite des opérations. Ils incluent entre autres le non-respect des règles de facturation qui permettent de bénéficier d’une exonération de la TVA et l’incapacité de fournir des documents justifiant le transport ou l’expédition des marchandises hors de France. Ces questions doivent être examinées par l’expert-comptable.

 

 

Bibliographie

 

 

Textes législatifs

  • Code civil
  • Code de commerce
  • Code général des impôts
  • BOI-TVA-CHAMP-10-10-40-40 en matière de TVA
  • BOI-BIC-CHAMP-60-10 en matière de BIC
  • BOI-IF-CFE-10-30-10-40  en matière d’IF

 

Ouvrages

  • ANGLADE Christine, CEMPURA Eric, LESORT Raphaëlle, 2014, « Les intermédiaires de commerce », Gualino Edition, 128 pages
  • BOUYER Céline et al, 2011, « LA TVA intracommunautaire en 65 questions et réponses », Entreprise Europe Network, 44 pages
  • DIXON Marie-Luce, 2014, « Harmonisation ou non des intermédiaires du commerce », tiré de la conférence FIT4 BUSINESS, CCI International, Luxembourg,
  • FERRIER Didier, Ferrier Nicolas, 2014, « Droit de la distribution », Edition LexisNexis, 480 pages
  • MORE Patricia, STAUB Olivier, THOMAS Stéphanie, 2012, « Guide de la TVA intracommunautaire : Formalités pratiques ; DEB/INTRASTAT », Edition Delmas, 394 pages
  • POORTHUIS Elisabeth, 2013, « Le courtier ou apporteur d’affaires », Enterprise Europe Network / CCI International Auvergne
  • RF, 2012, « TVA dans les opérations internationales », Edition Groupe Revue Fiduciaire, 6éme édition, 875 pages

 

Mémoires d’expertise comptable

  • Mohamed Ben Hadj Saad, « L’audit fiscal dans les pme: proposition d’une démarche pour l’expert-comptable », janvier 2009
  • Carine Gill, « Le commissaire aux comptes face aux spécificités du commissionnaire de transport au sein d’un groupe dans la distribution de véhicules automobiles : proposition d’un guide méthodologique d’audit des comptes annuels » novembre 2013

 

Articles de presse et revues professionnelles

  • CHAHID-NOURAI Noël et al, « La taxe professionnelle», Bulletin de gestion fiscale des entreprises, BGFE 6/13, Edition Francis Lefebvre, février 2014
  • CHAULIN Vincent, « Intermédiaires opaques et services exonérés de TVA », Fiscaliste, chaulin-avocat.com, 7/12/2011
  • GELIN Stephane, 2007, « La mort fiscale du commissionnaire », Revue Option Finance
  • SILBERTEIN Caroline et BENARD Marc, « Conversion d’un distributeur en commissionnaire», Feuillet Rapide Francis Lefebvre paru le 3 mai 2013
  • L’Entreprise
  • Revue Fiduciaire
  • Revue Francis Lefebvre
  • Bulletin Comptable et financier 12/93 (Francis Lefebvre)
  • SIC

 

Ouvrages spécialisés

  • Mémento Droit commercial 2014, Francis Lefebvre,
  • Mémento Groupes de sociétés 2013-2014, Francis Lefebvre,
  • Mémento Comptable 2015, Francis Lefebvre,
  • Documentation Pratique Fiscal – Francis Lefebvre

 

Sites internet

 

[1] Article 262 ter du CGI

[2] Article 256 V du CGI

[3] : www.ec.europa.eu/taxation_customs/vies/vieshome.do?selectedLanguage=fr

[4] Article 20 de la directive 2006/112/CE du conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de la taxe sur la valeur ajoutée

 

[5] BOI-INT-DG-20-20-10-20120912 – DGFIP

[6] CAA PARIS, 9e chambre, 31 décembre 2012, n°10PA00748

[7] CGI, art. 283-4 bis

[8] Article 1741 du CGI : une personne est réputée réalisés une fraude fiscale lorsqu’elle « s’est frauduleusement soustrait ou a tenté de se soustraire frauduleusement à l’établissement ou au paiement total ou partiel » de l’impôt

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