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Internet contre Presse : L’éclipse de l’information ?

L’INTERNET PEUT-IL ECLIPSER LA PRESSE POUR L’INFORMATION ?

Introduction 

I – L’Internet et la presse dans la révolution de l’information

  1. La presse en ligne comme canal d’information
  2. La presse vers Internet
  3. L’internet vs la presse, le contexte d’une concurrence (gratuité, pub, notoriété…)
  4. Les nouveaux besoins en information

 

II – Les forces médiatiques de l’Internet

  1. L’information en réseaux : Les spécificités de la publication web (info consommables, recyclables)
  2. L’internaute, le nouvel homme fort de l’information
  3. Le phénomène buzz
  4. Le blog d’information

 

III – L’impact des nouvelles technologies sur l’information et la presse

  1. La presse classique face à Internet
  2. Le traitement journalistique
  3. Une autre consommation de l’information
  • Un besoin d’information plus large
  • La diversification des supports
  1. Vers la fin ou la mutation de la presse
  2. L’information 2.0 : le renouveau journalisme

 

Conclusion

 

 

 

 

 

 

 

INTRODUCTION

La presse originelle est celle qui est écrite. Elle est née d’une première innovation technologique, à savoir l’imprimerie. A chaque fois que la technologie évolue,  on promet la disparition de la presse telle qu’elle est, totalement éclipsée par le nouveau média par un effet de mode ou une réelle emprise sur la société. C’était ainsi le cas lorsque la radio et de la télévision ont fait leur apparition dans le paysage médiatique.

Dans les années 1960, la télévision a été annoncée comme le média de l’avenir, celui qui va révolutionner le monde en transformant celui-ci en un village global. Le petit écran devait rassembler toutes les communautés, réduisant les faussées entre elles, réduisant la distance. De telle vision n’aura été réalisée qu’avec l’avènement de l’internet. L’évolution a enfin laissé la place à la révolution dans le domaine de la presse et des médias.

Internet a provoqué de nombreux changements profonds. Si la radio et la télévision se limitaient à proposer un nouveau support pour transmettre l’information, le journaliste s’y retrouve car il applique le même savoir-faire pour chercher et traiter ces informations. Internet a quant à lui fait évoluer l’information dans sa nature, sa consommation, sa médiatisation. Son pouvoir et son potentiel en tant que média sont importants à tel point qu’on a considéré le web dès ses premiers développements au début des années 2000 comme étant une menace contre la presse tel qu’elle existait jusque-là.

Et pourtant, la radio n’a pas remis en cause la presse écrite, ni la télévision ne poussait à la disparition de ces deux premiers médias. Pourquoi donc internet était annoncé comme un média « cannibale » qui va dévorer les autres. C’est peut-être parce que, avec le numérique, le réseau et l’interactivité, on sentait que l’on a affaire avec le média ultime. Pour le moment, il est difficile d’imaginer un autre nouveau média autre que le web. Au mieux, l’on peut s’attendre à des innovations des applications Internet.

La révolution de l’information est donc le fruit d’une évolution majeure des télécommunications. L’informatique, le réseau, la numérisation des données, l’audiovisuel tels sont les composants du multimédia. Ce dernier amène à son tour des changements profonds dans l’univers de l’information et de la presse. Internet a changé la médiation d’information sans les contraintes de temps ou d’espace propres à la presse. L’accessibilité d’une information qui n’est plus d’actualité est un phénomène nouveau. L’information en temps réel et la connectivité viennent compléter des fonctions que les consommateurs de la presse ont découvertes.

Le changement dans la presse sera aussi en interne. Au départ, il était difficile d’imaginer un journaliste travaillant pour un média en ligne. C’était les webmasters qui mettaient en ligne les contenus de la presse classique. Les choses ont évolué depuis car le cyber-journalisme est devenu une spécialité. La démocratisation rapide de l’Internet et la banalisation de l’accès aux réseaux des réseaux ont provoqué l’apparition des journalistes citoyens et autres bloggeurs qui sont très actifs dans la diffusion d’information.

Il serait intéressant de délimiter l’aspect de l’Internet en tant que presse. Cela implique une révision du concept journalistique. Dès l’origine de la presse, les 5W sont devenus une religion. Les nouvelles façons de traiter l’information sur Internet peuvent-elles être du journalisme. En plus de cela, la publication a des spécificités qui doivent prendre le dessus sur l’essence du texte.

Au départ, Internet était pollué par de mauvais contenus qui ne pouvaient être considérés comme journalistiques. Après, la qualité de contenu s’est considérablement améliorée. Désormais, il est de notoriété publique de parler de presse en ligne. Certaines publications traditionnelles ont lancé des versions en ligne de leur média. Le mépris que l’on avait à l’encontre du web en tant que média d’information a disparu. Dans la jungle du web, de vrais sites d’information sont reconnus comme tels, intégrant pour de bon la grande famille de la presse.

Quel effet aura l’internet sur les médias traditionnels. De nombreuses problématiques ont été soulevées. Elles étaient notamment focalisées sur la possible disparition de la presse  du point de vue du support car Internet serait un meilleur média de diffusion, interactif, accessible et multimédia, ou encore sur la concurrence du web sur le registre de la publicité.

La problématique qui nous intéresse est d’un autre angle et s’intéresse à l’inévitable dichotomie internet/autres médias mais sous l’angle de la presse, en particulier en matière d’information :

L’internet peut-il éclipser la presse pour l’information ?

Ce qui nous amène à axer nos réflexions sur trois concepts. Premièrement, l’internet sera considéré comme étant un média d’information qui diffuse des nouvelles et des actualités. Deuxièmement, la presse est à la fois une organisation et un support de diffusion d’information. Troisièmement, l’information est la nouvelle qui est rapportée par les journalistes.

Notre hypothèse est que l’internet est et sera le média d’information le plus puissant dans un avenir proche. Il peut éclipser la presse pour l’information. Notre recherche s’intéresse aux conditions et circonstances dans lesquelles la presse traditionnelle sera éclipsée par un nouveau média devenu le premier support d’information. Nous tenons à préciser le sens du mot « éclipser » qui veut dire surpasser, attirer vers soi l’attention au détriment des autres.  Cela suppose donc que la presse ne disparaîtra pas mais sera reléguée au second plan.

Dans une première partie, nous allons décrire l’Internet et la presse dans la révolution de l’information. Il y a une interaction et une concurrence entre les deux. Ensuite, nous allons aborder en profondeur les forces médiatiques de l’Internet. Les spécificités de l’information sur les réseaux sera mises en exergue. Dans une troisième partie, nous allons décrire l’impact des nouvelles technologies sur l’information  et la presse. Comment la presse doit-elle évoluer pour éviter d’être définitivement éclipsé par internet pour l’information.

 

 

I – L’Internet et la presse dans la révolution de l’information

  1. La presse en ligne comme canal d’information

La presse en ligne a mis du temps à éclore sur le réseau internet. Les sites d’information étaient rares avant les années 2000. Il a fallu attendre 2005 pour que le web intègre le monde de la presse. Auparavant, l’inverse se produisait déjà mais de façon très limitée. La présence en ligne des médias classiques notamment de la presse écrite sur Internet ne permettait pas encore d’officialiser l’existence d’une presse en ligne.

Au départ, le site web d’un journal était une vitrine de l’édition papier. On y retrouvait quelques articles ou extraits censés promouvoir le support papier. L’année 2005 a été le tournant pour diverses raisons. Premièrement, l’accès internet s’est démocratisé, couvrant désormais le territoire national par divers moyens de télécommunication. Deuxièmement, le débit de connexion s’est considérablement amélioré. Le chargement d’une page ou d’autres contenus sont plus rapides, voire instantanées.

La plus grande raison est que, sur Internet, il y a enfin un public au nombre important. La presse en ligne peut enfin devenir un mass média. En tout cas, il y a une masse critique de lecteurs-internautes pour que les annonceurs soient convaincus. Le web est enfin reconnu comme étant un support média susceptible de diffuser des contenus informatifs comme fait la presse. Les mises à jour sont désormais quotidiennes voire plusieurs fois par jour.

Le web 2.0 a vu la programmation web s’orienter vers l’utilisation des applications et des interfaces. Il est orienté utilisateur et s’adapte au besoin et aux habitudes de celui-ci. Au cœur de cette adaptabilité se trouve l’ergonomie. L’évolution de la technique du développement web a favorisé l’apparition de la presse en ligne. Créer un site web ne relève plus d’un exploit. C’est devenu facile. Pas besoin d’investir une somme faramineuse dans un projet informatique commandée à une société SSII.

Le support et le coût ne sont donc plus un frein pour la presse en ligne. Pour avoir un site d’information, il suffit de commander un outil de gestion de contenus. C’est un acte d’achat simple. Il n’est plus besoin de recourir à un processus lourd avec un cahier de charge et une véritable gestion de projet. Mieux, le web 2.0 a développé de nombreuses applications destinées à la publication de news et d’articles en ligne. Ce sont des outils accessibles et qui nécessitent un minimum de maintenance.

L’accessibilité du web se manifeste par sa maniabilité. D’une part, le gestionnaire du site peut enfin être celui qui en assure la responsabilité éditoriale. Il est donc un journaliste qui officie en tant que rédacteur en chef et non pas un technicien qui intervient en tant que webmaster. Il est un médiateur d’information qui utilise le canal de communication internet.

Le gestionnaire et médiateur d’information sur internet se soucie de l’ergonomie du site web par la performance du support. L’affichage de la page est fluide. Le chargement des médias image, son ou photos sont rapide. L’interface graphique permet de mettre en évidence les informations selon leur importance. La couleur des textes et la typologie contribuent à donner un sens à l’information.

Diffusée par le canal de communication qu’est internet, l’information a ses propres règles d’ergonomie. Certaines caractéristiques qui facilitent la lecture sur le support papier se retrouvent à l’écran. Le chapeau, les 5W en attaque de l’article, les intertitres… ce sont des techniques utilisées par le cyber-journaliste. L’écriture web y ajoute quelques règles ergonomiques comme l’utilisation de phrase courte, certaines formes de phrase, des mots-clés…

Il est donc admis dans la profession de la presse que l’internet est un canal d’information propice à la diffusion d’information. Après la date repère de 2005, les contenus des sites informatifs se sont rapprochés des standards de la presse. Les dépêches et les articles ou contenus issus du média originel sont toujours là. La différence est que ces organes de presse se sont mis à produire des articles ou des contenus destinés spécialement et exclusivement à leur site internet.

 

  1. La presse traditionnelle délocalisée sur Internet

La dichotomie presse traditionnelle et presse en ligne est de plus en plus floue. Si le web ne peut pas se déporter vers un support média traditionnel, l’inverse est possible et de plus en plus effectué. Auparavant, les médias classiques se plaignaient d’être pillés et dénonçaient le fait que leurs contenus, articles et information, se retrouvent sur le web sans que leurs droits d’auteur ne soient respectés.

De nombreux sites internet ont en effet des rubriques d’actualités sans avoir une équipe rédactionnelle ni être clients d’une agence de presse. Les rares médias en ligne qui produisent leurs propres contenus défendent de manière assez agressive leurs biens. Du coup, il est plus judicieux pour un site d’aller prendre des contenus issus des médias traditionnels. La concurrence n’est pas directe.

La presse traditionnelle devait se rendre compte que ses contenus et ses informations se trouvaient de plus en plus sur des sites internet. Il n’y a pas cette fois-ci de plagiat. L’article est attribué au journal qui l’a publié. Les sites internet font preuve de plus de courtoisie en mettant un lien hypertexte vers le site internet du média source. Ils deviennent donc un média relais qui met le contenu d’un journal papier à la disposition de lecteurs que celui-ci n’aurait pas forcément atteint ni ciblé.

A l’origine, donc, la présence de la presse traditionnelle sur internet n’a pas découlé d’une stratégie interne mais d’un fait accompli. C’est la presse écrite qui a surtout été victime du pillage de l’internet. Les éléments textuels se prêtent en effet plus facilement à la diffusion en ligne pour celui qui n’est pas producteur de l’information. Les internautes se sont mis à consommer ces informations de qualité devenues disponibles gratuitement.

La pluralité de ces sites internet qui diffusent des informations produites par la presse traditionnelle a rendu compliquée la bataille contre le plagiat ou la diffusion non autorisée. Comment en effet se battre sur le plan juridique à des adversaires ou contrevenant qui se comptent par milliers. Ces sites web qui reprennent les informations de la presse écrite ont pour certains un but commercial. Toutefois, il est très rare que la publication de l’information soit leur fonds de commerce.

Un constat s’imposer à cette première phase de développement de la présence de la presse en ligne, autour de l’année 2005 : Internet est devenu un canal d’information reconnu et utilisé. En 2006, le Financial Times a publié une étude réalisée par Jupiter Research dans plusieurs pays européens (France, Espagne, Allemagne, Italie et Royaume-Uni). L’étude a révélé que l’internet a dépassé la presse papier comme canal d’information privilégié par les Européens.

A l’époque, le temps moyen passé devant un ordinateur pour surfer est de quatre heures par semaine, cinq heures par semaine en France. Forcément, on passe plus de temps à surfer qu’à lire les journaux et les magazines. C’était la phase de la démocratisation de l’internet haut débit. Quelque 18 millions d’internautes français en bénéficiaient.

En Europe, le média numéro un reste la télévision. Le petit écran a gardé son avance grâce à la gratuité de son accès et le faible coût d’équipement. Même si la télévision est entrée dans le domaine du web, le concept de web tv est assez élémentaire pour concurrencer les chaînes classiques. L’internet devient cependant un moyen de diffusion pour des vidéos dont la plupart ne sont pas réalisés par des professionnels et sans l’intervention d’un journaliste.

Aux Etats-Unis, Internet rattrapait son retard sur la presse traditionnelle. Internet s’est rapidement démocratisé et utilisés par les internautes comme source d’information. En 2008, Pew Research Center a révélé dans une étude que 40% des américains suivent les actualités nationales et internationales par le web en premier, soit une progression de 13% par rapport à 2007.

Le web a dépassé en 2008 la presse écrite en tant que média d’information aux Etats-Unis. Les américains sont les premiers utilisateurs d’internet. Chez les jeunes de moins de 30 ans, le temps passé sur le web égale celui passé à regarder la télévision. Cette dernière perd du terrain mais arrive à faire face. La télévision reste le premier média d’information sur l’ensemble de la population. Le concept américain de l’actualité en direct rend secondaire l’information en temps réel sur internet.

Face à cet usage de plus en plus important d’internet à des fins d’information, la presse traditionnelle développe sa présence sur la toile. Elle est consciente que ses contenus rencontrent un public sur internet alors que ce sont les autres sites web qui en récoltent une notoriété, voire du profit.

La presse traditionnelle se trouve donc une adresse sur le web où elle s’exprime  avec son identité originelle. Les journaux mettent leurs articles en ligne et ajoutent même d’autres contenus élaborés spécialement pour le site web. Les chaînes de radio sont disponibles sur Internet. Même les chaînes de télévision osent le streaming en direct à certaines occasion.

Ces médias classiques contribuent largement à la redondance des contenus des médias hors linge sur internet. En effet, la migration vers internet ne signifie aucunement l’abandon du support traditionnel sur le plan stratégique. Par ailleurs, le public privilégie cette multiplicité des sources d’information. Avec la crise de la presse écrite, internet apparaît comme une voie d’issue pour sauvegarder la publication et en abandonnant l’édition papier.

 

  1. L’internet vs la presse, le contexte d’une concurrence  

3.1 Le nouveau média dans l’histoire

L’apparition d’un nouveau média a toujours remis en cause le ou les précédents. L’ordre établi est ébranlé. La radio avait à une autre époque concurrencé la presse écrite en termes d’information. Finalement, ce sont deux médias différents qui ont appris à coexister. Mais la bataille a été dure pour la radio. L’histoire des médias américains en atteste. Gwenyth L. Jackaway[1] rapporte la guerre entre la presse écrite et le nouveau média à l’époque de l’entre deux guerres.

Le premier forfait mis sur le compte de la radio a été de briser une structure institutionnelle qui régissait la livraison des informations nationales et internationales par les agences de presse à la destination de la presse, c’est-à-dire les journaux. Une fois une dépêche communiquée à une radio, l’information perde de la valeur pour la presse écrite car elle a déjà été diffusée. La capacité des journalistes radio à faire vivre les événements en direct à mis à mal les journaux papier qui devaient attendre le lendemain pour en faire un compte rendu.

Il fallait donc aux journalistes de la presse écrite se défendre contre ce qu’ils considéraient comme des imposteurs. La rédaction des journaux se sont mis à protéger ses articles par les droits de propriété intellectuels. Les journalistes papier et les patrons de la presse écrite n’hésitaient pas à dénigrer le travail des journalistes radio qu’ils qualifiaient de faux et de sensationnaliste. Ils criaient au plagiat quand il y a une bonne production journalistique sur les ondes. Ce sera des contenus des journaux qui ont été rassemblés ou traités.

Les attaques contre la radio en tant que nouveau média visaient les journalistes en tant que producteurs d’information. Dans une « rhétorique sacrée », les journalistes radios étaient accusés d’être « une menace contre les idéaux journalistiques d’objectivité, contre les idéaux sociaux de service public, contre les idéaux capitalistes de droits de propriété, et contre les idéaux politiques de démocratie».

Selon Jackaway, les vieux médias cherchent à endiguer des émergents par des lois, des règlements, ou par la force. Il cite des anecdotes comme les reporters papier qui faisaient barrage aux journalistes radios qui voulurent participer aux conférences de presse du Congrès dans les années 1930. Il fallait attendre 1938 pour que les journalistes radio accèdent équitablement au Congrès. Le correspondant Fulton Lewis Jr a réussi à obtenir la création d’une salle de presse radiophonique.

De nos jours, la presse écrite est en guerre avec un autre nouveau média : internet. Les journalistes de la presse écrite se vantaient d’être les « chiens de gardes » qui sont à même de surveiller tout écart de conduite des conseils municipaux, des gouvernements fédéraux et de la Maison Blanche et défendre la démocratie. Selon Jackaway, le web a affaibli les journaux commercialement comme l’avait fait la radio.

Le premier terrain de bataille est aussi celui de l’information. Jackaway révèle que des interrogations sur les nouveaux médias sont perceptibles chez les lecteurs et chez les journalistes eux-mêmes : «Qui est un journaliste? Qu’est-ce qu’une information? Comment ces informations devraient-elle être diffusées? Quelles sont les règles concernant le fond et la forme d’un message informatif acceptable?»

De telles problématiques supposent en effet que l’internet n’est pas accepté comme étant un média d’information selon la tradition et les valeurs journalistiques. L’attaque ne se limite donc pas à défendre un positionnement économique sur le marché de la presse. Jackaway parle d’une guerre médiatique dans le but de préserver des schémas de communication traditionnelle et des structures sociales. Il y a eu une domination culturelle à conserver.

Dans les années 1920-1930, les journaux étaient en guerre contre les radios car ces dernières diffusaient des informations qui étaient la propriété de la presse écrite que celles-ci soient produites par l’équipe de rédaction ou issues d’une agence de presse. Ils déploraient que les dépêches et les articles soient appropriés par la radio sans aucune autorisation.

Cette ligne de défense suppose qu’une chaîne de radio n’avait pas de vrais journalistes pour faire le travail correctement. La radio a fini par faire taire ses détracteurs en ayant une discipline journalistique à part entière et surtout des agences de presses spécialisées qui leur fournissent les nouvelles.

A l’époque de l’internet, les agences de presse et les journaux papiers sont toujours en guerre contre un nouveau média. Ils accusent les sites web et les moteurs de recherche de piller leurs contenus, volant leurs gros titres et leurs rubriques. La qualité mauvaise journalistique du contenu web est par ailleurs décriée. Comme à l’époque de la radio, le web est accusé de se contenter d’amasser les informations provenant d’autres médias.

Il y a des similarités évidentes entre les deux guerres contre le nouveau média, celle qui opposait la presse écrite et la radio dans les années 1920-1930 et celle qui met en concurrence la presse, à commencer par les journaux papier, et internet dans les années 2000. Le but est pour le média traditionnel de défendre un positionnement économique et des intérêts financiers, d’une part, de préserver une domination culturelle en tant que source d’information d’autre part.

Les époques sont différentes et la puissance de la radio et de l’internet en tant que média de diffusion n’est pas la même. L’on peut ainsi relever des différences majeures entre la guerre journaux vs radio et la guerre journaux-web :

– Dans les années 1920-1930, les journaux papier ne voyaient aucune obligation ni opportunité à se lancer dans la radio. Ils ses sont contentés de combattre le nouveau média. Dans les années 2000, les journaux papiers sont très investis dans le web. Ils ont un site internet et mettent en ligne leurs articles. Le site web est une entité à part entière qui ne se limite plus à promouvoir le support originel. C’est média un complémentaire avec le papier.

– Internet est pressenti pour être le média dominant des années à venir. La fin des journaux papiers n’est pas improbable et est même attendue d’ici une décennie. Il y aura certainement toujours des journaux qui vont miser sur la tradition mais le web a de fortes chances de devenir le moyen d’information numéro un. Sera-t-il à même d’éclipser les autres médias, journaux, radio et télévision en matière d’information.

– La puissance du web est sa capacité d’être la convergence de tous les médias. La bataille n’est plus vraiment contre un adversaire mais comment continuer à exister sans cet adversaire. Internet est un support de diffusion qui peut être utilisée par la presse traditionnelle pour moderniser leurs activités, d’une part, pour toucher un large public d’internautes d’autre part.

La guerre qui oppose internet aux autres médias ne se limite pas à la bataille de l’information. L’affrontement sur le plan commercial est aussi féroce dans un marché de plus en plus restreint.

 

 

3.2 Internet en tant que support publicitaire

L’internet a affaibli la presse traditionnelle peut-être parce qu’il lui a volé des contenus, du moins dans les premiers temps, mais aussi parce qu’il lui a volé une part d’audience. La presse écrite n’est pas la seule qui été concurrencée. La radio et la télévision sont aussi titillées par Internet. Les analyses et mesure d’audience dans la presse traditionnelle donnent des indications sur la notoriété. Ces données ne sont pas aussi transparentes et précises que les informations collectées par un site internet sur les internautes qui le fréquentent.

Le web s’avère un outil marketing et un média de communication efficace. En effet l’annonceur est en mesure d’atteindre son cœur de cible. Il connaît au mieux les consommateurs à travers leur identité, leur situation géographique, leurs centres d’intérêt, leurs besoins. La perte de vitesse des médias traditionnels par rapport aux médias en ligne est illustrée par une baisse de l’audience.

Internet représente un tout dans cette concurrence. Il ne s’agit pas pour le journal Le monde d’être en concurrence avec un site d’information mais avec internet. L’usage de l’internet veut qu’il soit rare de consulter juste un site en lieu et place d’un journal dans le but de s’informer. Le système de liens hypertextes veut que l’usager surfe sur plusieurs sites. Néanmoins, la concurrence directe existe sur le plan interne si le journal voit son audience diminuer au profit de la consultation de son site internet.

L’arrivée des médias internet a grignoté des parts de marchés à la presse traditionnelle en termes d’annonceurs. Le marché de la diffusion de publicité n’a pas augmenté. La presse écrite a été la plus touchée par cette diversification des diffusions. Si les annonceurs s’intéressent à diffuser ses publicités par le web, c’est que les sites internautes ont gagné en notoriété.

 

Le contenu est l’élément central de cette notoriété et l’information y a une grande place. Plus les médias en ligne deviennent professionnels dans le traitement et la diffusion d’information, plus ils sont crédibles pour faire partie d’un plan média.

 

  1. Les nouveaux besoins en information

4.1 La presse traditionnelle face au besoin en information des internautes

 

La presse traditionnelle a essayé de répondre à des besoins en information qui a comme critère la pertinence, la proximité, la fraîcheur et la connaissance. Un individu est plus intéressé par ce qui se passe à côté de chez lui qu’à l’autre bout du pays ou du monde. Dans un journal, il ne lira que les articles qui lui semblent intéressant. La pertinence du contenu est adaptée aux caractéristiques du lectorat ou de la thématique du journal.

 

Le centre intérêt de l’électorat ou de l’audience permet à un média de déterminer l’offre en matière d’information. Les rubriques, l’angle, le niveau de connaissance requis pour assimiler le contenus sont définis. La charte éditoriale est un outil qui permet d’atteindre ces objectifs. Le besoin premier éprouvé face à la presse traditionnelle est celui d’être informé de ce qui se passe dans son environnement ou dans le monde, et de comprendre ces événements.

 

La fraîcheur de l’information est un besoin important mais non pas primordial dans la presse traditionnelle. Grâces aux techniques journalistiques, il est possible de rendre compte d’un événement le lendemain, une semaine ou un mois après, selon la périodicité de la publication. La course à l’information a été dominée par la radio, le seul média pour lequel il n’est pas coûteux de tenir le public informé au fil des heures ou en direct.

 

Quand la presse traditionnelle a commencé à mettre en ligne ses contenus, elle ne répondait pas aux besoins des internautes qui sont différents de ceux du lecteur d’un journal, d’un auditeur ou d’un téléspectateur. Vers l’année 2005, les sites de la presse deviennent des sites d’information autonome. Avec des éléments additionnels et certainement de la valeur ajoutée, ils deviennent de véritables sites d’information.

 

La présence de la presse traditionnelle sur le web s’est faite de manière différente. D’abord, il y a les sites web qui portent le même titre que le média originel. Au départ, la différenciation des contenus a été peu évidente. Pour le journal papier, il y avait déjà de la matière alors pourquoi s’investir dans la production d’autres articles. Plus tard, le site web apporte finalement une production exclusive. S’il accueille des informations venant du journal, l’inverse ne se fait pas.

 

La radio trouvait l’internet comme support de diffusion  grâce au streaming. Pour s’informer, l’internaute devait écouter la radio en ligne. Le contenu texte était une mise en valeur du programme audio. Plus tard, la radio a intégré la dimension multimédia du web. Des informations en texte et en image viennent compléter le format audio.

 

La télévision a été contrainte à compléter l’information en image par le texte et la photo. Des contraintes techniques, notamment la bande passante insuffisante et la nécessité de compresser les images, rendaient impossible la diffusion des programmes. Le site internet est donc un moyen pour le téléspectateur d’appréhender autrement l’information. L’internaute est quant à lui attiré par la notoriété de la chaîne sur les ondes hertziennes pour faire du site web de celle-ci un média d’information.

 

Le deuxième type de site web de la presse traditionnelle est un média en ligne, développé uniquement sur internet. Le média originel n’est que le parrain du site qui devient une sorte de filiale. Les internautes ont fini par se lasser des articles du journal papier consultables en ligne. Le média y perdait de sa crédibilité. Pour être présent sur le web, il fallait en devenir l’acteur. Le journal Libération qui a lancé le site Rue89.com est un exemple en la matière.

 

Rue89.com est un média qui s’adresse aux internautes et aussi aux lecteurs de Libération. La ligne éditoriale est sensiblement la même. La charte éditoriale est par contre fondamentalement différente. Sur le site web, l’équipe rédactionnelle propose une autre façon d’écrire, un autre ton. Un article est enrichi par des liens hypertextes qui mènent vers d’autres contenus. La présence de la vidéo est une révolution pour un média issu de la presse écrite.

Grâce à un site internet, la presse traditionnelle a augmenté son audience. Cependant, cette diversification de la diffusion a fait baisser le nombre d’exemplaires vendus. La presse en ligne est un marché à fort potentiel. Les rédactions s’adaptent à de nouveaux besoins d’information.

  • Evolution des besoins en information avec internet

 

Grâce à son utilisabilité très évoluée, internet a changé le besoin en information de ses usagers. La presse a dû s’adapter à cette nouveauté. Ces nouveaux besoins donnent des caractéristiques nouvelles à l’information :

  • Rapide : l’information est diffusée le plus rapidement possible, idéalement en temps réel. Cette rapidité donne moins de place à l’analyse. La primeur est essentielle sur internet car elle permet à un site d’être cité par d’autres. Quand une personne est au courant qu’un événement s’est passé, il va sur internet dans l’espoir de lire un article ou voir une vidéo s’y rapportant.

 

  • Accessible : une information doit être accessible une fois mise en ligne. La page d’accueil d’un site web donne accès aux informations les plus importantes et les plus récentes.
  • Retrouvable : une information diffusée doit être accessible plus tard. Dans le traitement du suivi d’une actualité, les articles précédents qui sont en relation avec le sujet sont accessibles par un lien hypertexte.
  • Liée sémantiquement avec d’autres informations : une information ne doit pas être isolée. Elle s’enrichit de signification grâce à sa relation avec les autres informations. Ces liens peuvent être internes au site ou permettant d’accéder à d’autres sites web.
  • Susceptible d’être approfondie : si l’internaute a besoin d’en savoir plus, il approfondit l’information. Un article peut dans ce cas être découpé en plusieurs niveaux que le lecteur choisit d’explorer ou non.
  • Mise à jour : l’internaute a besoin d’une information qui évolue. La mise à jour est indispensable. Elle permet d’avoir plusieurs articles sur un même sujet.

En résumé, l’internaute a besoin d’une information immédiate, accessible, qui peut être retrouvée, liées sémantiquement avec d’autres informations, que l’on peut approfondir, qui est mise à jour.

Ces nouveaux besoins liés finalement aux spécificités et aux potentialités du web ont donné de la crédibilité à la publication d’information en ligne. Le web donne une dimension documentaire à l’information. Il est consulté par un usager de manière différente que lorsque l’on est en présence de la presse traditionnelle.

L’internaute est donc à la recherche du document qui peut lui délivrer l’information qu’il cherche. Mizzaro (1998)[2] parle d’une interaction entre « un individu qui a besoin d’information » et « un document qui contient ou non la réponse à ce besoin ». Un article est pertinent quand il répond au besoin de l’internaute en termes d’information.

Le chercheur André Tricot[3] qui dirige une équipe de recherche technologique « hypermédias et apprentissages » présente les besoins d’information en plusieurs catégories :

« Un besoin d’information peut apparaître dans une situation où l’on a :

– besoin d’une connaissance que l’on n’a pas ;

– besoin d’une confirmation d’une connaissance que l’on a   ;

– besoin d’une connaissance plus complète que celle qu’on  a, un exemple, une illustration, un contre exemple, etc. ;

– besoin d’être conforme aux buts, aux contraintes, aux attentes  de la situation ;

– besoin d’indications sur la forme de la connaissance à utiliser dans la situation ;

– détection d’un marqueur de pertinence dans la situation (mise en exergue visuelle).

Sur internet, la presse fait face à un besoin de rechercher une information. Les moteurs de recherche comme Google ou une application interne sur un site permet d’accéder à un article sur un sujet donné. Selon Millar & Shevlin (2003)[4], la décision de rechercher une information est influencée positivement par le fait d’avoir préalablement recherché de l’information.

La dimension recherche et l’accessibilité des archives donnent un avantage réel à internet en matière d’information. Cet avantage a par ailleurs motivé la presse traditionnelle à se lancer dans la publication en ligne de ses contenus.

 

II – Les forces médiatiques de l’Internet

 

  1. L’information en réseaux

 

Le concept de société de l’information tourne aujourd’hui atour de l’Internet, l’outil technologique capable d’absorber une quantité optimale d’information et de mettre en relation tous les citoyens du monde. Netcraft a publié une estimation du nombre de site web sur les réseaux sur la période 1995 et 2010.

 

En 1995, le nombre de sites web était de 19 000 avant de connaître un premier boom et passer le cap du million en 1997. Le développement de l’internet autour de l’an 2000 a fait qu’au début du millénaire, le nombre de sites web a atteint les 10 millions.

 

Lors de l’année charnière de 2005 marquée par l’explosion de l’usage d’internet, la création de contenus a suivi. Le nombre de sites web a atteint les 74 millions avant de faire un bond à 101 millions en 2006. Depuis, l’augmentation annuelle est estimée à 35 millions de nouveaux sites web par an. Fin 2010, l’estimation est d’environ 240 millions de sites web.

 

En 2002, alors que l’utilisation d’internet commençait à se démocratiser dans le monde, la production journalière de pages web était estimée à 7 millions. En 2005, l’apparition des sites dynamiques et l’accès aux techniques et aux outils de publication a boosté cette production pour dépasser les 50 millions de pages par jour (estimation). A l’époque, le moteur de recherche Google comptait 8 milliards de pages web indexées.

 

Les sites d’information se trouvent dans le cœur du web. Ce noyau est constitué d’environ 30% des sites existants. On peut accéder aux pages des sites d’information à partir d’autres sites web. L’inverse n’est pas vrai. Google privilégie par ailleurs les sites vers lesquels des liens pointent. La notoriété des sites d’information proviennent donc du fait que d’autres sites web les suggèrent aux internautes.

 

Aux alentours du cœur du web se forment des sites périphériques dont les pages sont dites « initiatrices » car elles pointent vers l’information. Ce sont eux qui font la notoriété du cœur du web.

 

Enfin, certains sites sont en dehors de cette interconnexion des informations. Ils n’ont pas de liens avec le cœur du web. Ils ne sont pas privilégiés par les moteurs de recherche. Ce sont les sites perso. Le phénomène blog a permis à ces publications personnelles de se constituer en réseaux en instaurant des liens d’ « amitié » entre eux.

 

L’information sur internet est particulièrement hétérogène. Elle l’est sur le point de vue des contenus. Des sites d’information, des sites thématiques, des portails communautaires, des sites de jeux, des sites de commerce… la typologie est très variée. Elle est un critère de connexion entre différents sites qui constituent alors un petit réseau. Il en est de même pour le public auquel s’adresse le site. Grand public, professionnel, femmes, enfants, adolescents, seniors… la cible est aussi un critère d’appartenance à un réseau.

 

Internet est un média mondial. La localisation d’une source d’information peut être difficile à cerner. La couverture géographique est pratiquement planétaire. De plus, le web se décline dans toutes les langues. Les contenus sont dynamiques et continuellement renouvelé. Les moteurs de recherche, en particulier Google qui monopolise 80% des requêtes, sont de plus en plus importants. Les sites d’information sont bien indexés et figurent dans les premières pages de résultats.

 

Dans la mise en réseau des informations, les sites fédérateurs ou portails sont incontournables. Ils permettent d’accéder à des thématiques qui développent chacune des informations dont les actualités, mis à part divers service utiles aux internautes ou tout simplement commercial. Les pure players de l’information, qui concentrent leurs contenus sur les actualités,  utilisent des moyens de communication communautaires.

 

La syndication de contenus a évolué. Au départ, il s’agissait pour un site web producteur d’information de partager ses contenus avec un autre site web afin de créer du trafic sur ce dernier. En clair, c’est du duplicate content volontaire sous forme de partenariat. Avec les nouvelles exigences du référencement, de tel procédé n’est plus bénéfique.

 

Google n’aime pas la duplication de contenus. Le moteur de recherche n’indexe que le premier article. Les sites se positionnent donc en porte d’entrée pour rediffuser une information. La règle est simple : un seul contenu mais plusieurs entrées. Il est plus opportun de rester une porte d’entrée vers l’autre site en présentant des liens indiquant les informations que l’internaute peut y trouver.

 

La syndication est animée d’une bonne intention. Son objectif premier est de mettre l’information à la disposition du plus grand nombre. La confiance entre les deux partenaires permet de diffuser les articles avec de moins en moins de filtre. La syndication de contenus a fini par devenir automatique grâce au développement des techniques de la transmission de données par le web. Elle est simplifiée et accessible par le RSS ou Really Simple Syndication.

 

 

 

  1. L’internaute, le nouvel homme fort de l’information

 

Le lecteur, l’auditeur et le téléspectateur n’auront jamais autant de pouvoir que l’internaute. Ils sont même obligés d’utiliser internet pour s’exprimer sur leur média. Ils ne sont pas de réels contre-pouvoirs par rapport au journal ou à la chaîne. Par contre, l’internaute dispose des moyens de faire pression sur un site.

 

L’audience a toujours été un objectif pour la presse. Il l’est encore plus pour les sites d’information. La conception du contenu rédactionnel est ouvertement orientée vers les internautes qui consultent le site. La presse en ligne doit déterminer le besoin en information de ses lecteurs et leur proposer les contenus adéquats.

 

L’approche orientée internaute dans la conception des contenus du site s’oppose à la conception traditionnelle des médias qui se concentre sur une ligne éditoriale. Dans la presse écrite, les lecteurs sont obligés d’attendre le lendemain pour lire les informations. Le cycle des bouclages détermine la périodicité de l’information.

 

Sur internet, le journaliste ne peut attendre quand il est en possession d’un élément d’information. Il doit le diffuser tout de suite. En effet, il y a une attente de la part de l’internaute qui espère retrouver l’information sur le site.

 

L’internaute est volage de nature, il ne peut aller sur le web et surfer uniquement sur un site. La presse en ligne est devenue un tantinet « racoleuse » en essayant d’attirer et de fidéliser son audience. Elle s’attèle à garder le visiteur le plus longtemps possible sur son site. Pour ce faire, la presse en ligne n’hésite pas à proposer des contenus qui se distinguent des caractères a priori sérieux et intellectuels des informations que les médias classiques.

 

Le site web de Libération a surpris en diffusant un long extrait de vidéo pornographique datant de 1900, avec comme seul filtre une phrase disant qu’il est interdit au moins de 18 ans. Le document en question a certainement une valeur documentaire mais la brève décrivant la sortie du DVD aurait suffi. La fin justifierait les moyens. Les deux extraits de vidéos ont permis de garder 40 000 internautes 15 minutes de plus sur le site.

 

L’internaute serait attiré par les choses qui ne respectent pas l’éthique. De toute manière, les journalistes de la presse classique ont dénigré les cyber-journalistes qui seraient des « pseudo-journalistes » incapables de produire de l’information respectant les règles du métier et l’éthique. C’était avant que ces médias traditionnels ne deviennent eux-mêmes des acteurs du web. Répondre aux exigences de l’internaute a fait perdre certains repères.

 

A part sa capacité à amener la presse traditionnelle à adapter ses contenus, l’internaute a un réel contre-pouvoir dans le domaine de l’information. Pour commencer, quand la presse classique s’est lancée sur le web, elle ne pouvait que suivre la tendance. Elle ne pouvait pas se contenter de mettre en ligne des articles ou des fichiers multimédias.

 

Le prolongement du traitement des actualités dans les forums de discussion a été une première étape. L’internaute a la possibilité de contredire ou de démentir l’information. Il peut juger le journaliste. Les médias en ligne ont développé malgré eux une information parallèle dont la ligne éditoriale ne peut être maîtrisée.

 

Les sites d’informations, qu’ils soient professionnels ou amateurs, se doivent d’adopter les outils d’interactions. Empêcher aux internautes de réagir aux articles peut nuire à l’image du site. Ce serait priver les internautes de la liberté d’expression. Ce n’est pas la première fois que le public a le besoin de réagir dans un média. Les lettres de lecteurs, les interventions d’auditeurs par téléphone, les courriers adressés au médiateur d’une chaîne de télévision ont donné la parole au public.

 

La différence avec internet est que l’internaute a la possibilité de réagir à un article et de le faire autant de fois qu’il veut. Il peut le faire même si le dit article n’est plus d’actualité. L’internaute peut juger le contenu, tancer l’auteur, dénigrer, féliciter, expliquer… Il peut se lancer dans un débat sur l’article avec d’autres internautes qui sont intervenus.

Enfin, l’internaute peut tout simplement devenir un éditeur d’information. Il peut avoir un site d’information. Il lui suffit juste d’avoir une bonne qualité de rédaction. L’internaute a la liberté, celle de ne pas avoir à respecter des règles morales ou déontologiques. La transgression de ces règles peut même lui donner une certaine notoriété alors que ce serait l’effet inverse si c’était un média classique.

L’internaute peut aussi être à l’origine d’une information. Disposant d’un moyen de communication, il peut divulguer une information sans que cette dernière n’ait besoin d’avoir la forme journalistique. L’internaute a le pouvoir de mettre en lumière une information qui au départ n’aurait pas été divulguée au grand jour.

Signe du pouvoir de l’internaute, certains sites d’information affiliés à la presse classique recrutent des blogueurs pour assurer des rubriques qui nécessitent une vraie culture du web. Ils se permettent ainsi des écarts par rapport aux règles journalistiques.

 

  1. Le phénomène buzz

Le buzz est une technique de communication issue du marketing. Il s’agit de faire parler d’un site ou d’un produit avant sa sortie officielle. D’un anglicisme signifiant « bourdonnement », le buzz repose sur le phénomène de bouche à oreille. Des informations se propagent par internet ou par e-mail. Elles peuvent être des rumeurs qui attisent la curiosité des internautes. Grâce au buzz, la nouvelle se répand très vite.

Le buzz n’a pas de règle. Son mode de diffusion est totalement libre, pratiquement anarchique. Par opposition au marketing viral qui laisse aux consommateurs le soin de faire connaître les produits à ses pairs, une information ou une rumeur tant qu’elle n’est pas recoupée, se propagent sans que le contenu ne soit à l’abri d’interprétation, de modification ou de détournement.

 

Le succès du buzz dans le web marketing est dû à sa capacité de toucher la cible et d’être efficace grâce à l’effet de surprise. Le procédé rencontre la même réussite en matière d’information. Avec les sites spécialisés en scoop, y compris les rumeurs plus ou moins fondées, il n’y a pas la pression de réussir une campagne de communication. Le but est faire le buzz au maximum, c’est-à-dire de propager le plus possible l’information.

Les moyens de faire  du  buzz sur internet relèvent des outils de communications traditionnels comme le forum de discussion et l’e-mail. Les internautes ont cependant plus de possibilités depuis l’avènement du web 2.0. Les réseaux sociaux sont très favorables au buzz. Twitter avec ses messages courts est le meilleur moyen de propager une information. Facebook, Viadeo, LinkedIn sont aussi des plateformes permettant de relayer rapidement une nouvelle.

Les réseaux communautaires interactifs ont donné un peu plus d’ampleur au buzz. Les sites de partage de vidéos comme Youtube et Dailymotion permettent de rendre public en très peu de temps une information, un exploit, quelque chose d’extraordinaire, une scène particulière… Parfois, les outils participatifs à vocation encyclopédique comme Wikipédia sont utilisés pour propager un buzz en apportant des modifications à une description.

Le buzz est aux antipodes de la culture de diffusion de la presse classique. La diffusion à l’ancienne paraît bien limitée avec les communiqués d’agence ou des brèves journalistiques. Le buzz est un moyen de communiquer l’information avec la technique « virale » empruntée du marketing. Le bouche à l’oreille dans l’information en ligne se propage avec une célérité exceptionnelle. Sa diffusion n’a pas de frontières. Elle peut même être mondiale.

Le buzz est un moyen de diffusion dont la puissance n’est pas exploitée ni maîtrisée par les journalistes issus de la presse classique. Par ailleurs, il n’est pas certain que le buzz soit maîtrisable, à moins d’avoir une connaissance très poussée en marketing. C’est en effet les internautes ou une communauté en ligne qui adoptent un même comportement pour faire passer le message.

Le buzz est un circuit informel de l’information sur internet. Il se développe par des réseaux qui sont imprévisibles et en permanente reconfiguration. Sa portée est difficile à mesurer. Le sujet traité et le contexte influencent la propagation du buzz. Par ailleurs, le mot buzz désigne la rapidité de l’émergence et de la propagation des sujets très prisés ou « hots topics ». Le phénomène est facilité par l’utilisation de site de micro-blogging sur lesquels le message posté ressemble à SMS.

Le tweet, avec ses messages courts, est l’un des moyens les plus efficaces pour faire le buzz. Ce moyen de communication communautaire permet de révéler des informations avant même que la presse la publie. Quand une affaire fait le buzz, les internautes font des investigations, se relaient les informations. Ils se mettent à fouiller le web pour apporter des éléments de réponse à une question qui suscite la curiosité.

L’importance du buzz dépend de la notoriété de celui qui le publie. Sur tweeter, certains « posteurs »  ont plus de 10 000 « followers » qui suivent le fil de l’actualité à chaque buzz. La propagation de l’information est alors exponentielle grâce à l’interconnexion de nombreux réseaux de communautés.

Un grand nombre de followers ne signifie pas forcément une réelle notoriété. Il est possible qu’un posteur qui a 1000 followers n’enregistre que 10 petits clics. Cela donne un taux de 100 followers par clic. Finalement, cette personne ne sera pas aussi influente qu’un posteur qui a 600 followers avec un taux de 3 followers par clic. Il faut être lu pour que l’on puisse prétendre à avoir une influence quelconque.

Par ailleurs, la stratégie de certains twitteurs qui rassemblent le plus de followers possibles n’est payante qu’à court terme. Au fur et à mesure des postes, les internautes découvrent que la personne n’a rien d’intéressant à écrire. L’absence de vrais buzz finit par lasser les followers qui n’hésitent pas à se désinscrire.

Le principe de la propagation d’une information par le buzz est le re-tweet. Un suiveur (follower) a en effet intérêt à poster une information intéressante sur le tweet. Il ne s’approprie pas pour autant l’info et précise qu’il s’agit d’un re-tweet en signalant l’auteur originel.

Après avoir fait le buzz sur twitter ou facebook, une information est récupérée par la presse classique. Elle continue à être développée sur internet par les sites d’information et les blogs. Un autre buzz est attendue car le phénomène ne s’intéresse finalement qu’à la révélation. L’expression est trop restreinte pour qu’il y ait une analyse.

 

  1. Le blog d’information

Si l’instantanéité et la rapidité sont les qualités d’un tweet qui fait le buzz, le blog amène un peu de raison et de bon sens. Ce moyen de communication permet aux internautes de traiter les informations, de faire une réflexion, d’approfondir une question ou de se poser des interrogations sur un sujet. Il intervient dans une seconde étape du buzz après la révélation d’une information.

 

A priori, les bons blogueurs assument un rôle de chien de garde. D’abord, ils participent à l’observation de la vie publique et divulgue des informations qui éclairent l’opinion. Ensuite, ils dressent une barrière contre les dérives du web entraîné par le phénomène du buzz et tenté par la désinformation. Il faut donc que certains blogueurs fassent la police pour préserver la crédibilité des blogs.

Certains journalistes se mettent au blog pour s’exprimer librement, détachés de l’obligation de ligne éditoriale de l’organe de presse pour lequel ils travaillent. Animer un blog est donc une activité extra-professionnelle, un passe-temps, un exercice intellectuel effectué pour le plaisir. C’est aussi un moyen d’entrer personnellement en contact avec des lecteurs, auditeurs ou téléspectateurs.

Selon Crmmetrix, spécialiste de l’écoute client, « un blog est un site web personnel qui permet à son auteur de s’exprimer en créant des notes écrites et/ou des contenus audio et vidéo (de type podcast ou vidéopodcast) qu’il soumet aux autres internautes de façon publique ou restreinte. Ces notes peuvent être commentées par d’autres internautes ».

 

« Sur un blog, les notes sont archivées par ordre chronologique inversé et il est possible la plupart du temps de s’y abonner grâce à la technologie des flux RSS ». La blogosphère est un terme qui désigne l’ensemble des blogs et/ou des créateurs de blogs.

Crmmetrix a fait des études sur l’évolution de la blogosphère en France.  «Grâce aux blogs, Internet devient plus que jamais une source d’information privilégiée pour les internautes, écrit son CEO Laurent Florès. Considérés comme plus critiques et interactifs, les blogs rapprochent les gens, et leur progression régulière marque clairement le passage d’un marketing de « l’interruption » à un marketing de l’écoute et de la permission, où il devient fondamental pour une marque, une institution, un homme politique de véritablement « écouter» ce qui se dit sur eux».

Grâce aux blogs, l’internaute et le journaliste deviennent véritablement acteur du web, de la société et du monde. Ce moyen de communication en ligne est utilisé pour la liberté d’expression qu’il procure. Un blog permet d’être réactif à une nouvelle. Il permet d’interagir avec d’autres internautes sur le traitement de l’information. Il y a donc une proximité entre les internautes et le blogueur.

 

Les internautes vont sur un blog pour s’informer sur un sujet car ce moyen d’information est considéré comme plus critique, offrant un regard analytique. Selon Crmmetrix, trois internautes sur quatre consultent un blog pour s’informer.  Ce sont les jeunes de 16-24 ans qui sont les plus nombreux à considérer un blog comme source d’information. Plus de la moitié des internautes consultant un blog déclarent vouloir y suivre l’actualité.

 

Selon Laurent Flores[5], « très clairement plus qu’un moyen alternatif d’information, le blog est aujourd’hui un moyen d’information complémentaire des autres médias, ils font et feront de plus en plus partie des sources d’informations régulières du consommateur, du citoyen. A ce titre, comme le font déjà certaines marques, organisations, ou encore certains politiques, un suivi spécifique des blogs et de leur contenus ne peut s’avérer qu’intéressant puisque contrairement aux autres médias ils sont généralement tenus, et surtout consultés par d’autres consommateurs et citoyens ».

« La transparence est donc de mise pour pleinement bénéficier de la popularité des blogs et de leur influence auprès des internautes », ajoute Laurent Flores. Les intervenants qui n’ont pas respecté ce principe l’ont souvent payé cash. L’éthique des pratiques est d’ailleurs un thème fort et incontournable.

Il faut donc au blogueur un peu de journalisme pour continuer à avoir de la notoriété en tant que source et éditeur d’information. Le principe de la vérification s’impose. Le blog « sérieux » est un terrain propice au journalisme citoyen. Avant tout, c’est un outil de communication personnelle. Il engage donc l’identité du blogueur.

Le réseau de blogueurs peut manifester la puissance du réseau quand il y a un mouvement de solidarité. Malheureusement, de tels élans sont souvent constatés dans un contexte négatif. Quand un blogueur se fait attaquera en justice pour un délit liée à l’information qu’il a diffusée, ses amis rassemblent leurs forces pour lyncher médiatiquement le plaignant. Le déferlement d’agressivité peut être impressionnant.

Le blog a certainement un côté affectif. Il permet aux blogueur, y compris les journalistes de relater une information, de faire une analyse en utilisant la première personne. C’est une personne qui s’adresse aux internautes. Ces derniers répondent par un commentaire en s’dressant au rédacteur.

De nombreux sites d’information sont nés sous la forme d’un blog. Avec le développement du web 2.0, les outils de publication de contenus se sont démocratisés. En faisant de l’information sa thématique, un blog peut avoir une notoriété en tant que publication web. Les annonceurs ne sont pas insensibles à ces nouveaux sites perso qui traitent des sujets d’actualité ou des thèmes spécifiques. Ce sont des sites d’informations fiables.

 

  1. Internet, un média alternatif

5.1 Le média alternatif

Le concept de média alternatif est né d’un nécessaire combat contre la presse dominante. Les médias dominants sont marqués par l’uniformité malgré la prolifération des titres dans la presse écrite, des chaînes de radio et de télévision. Le conformisme y est une règle dont les transgressions sont plus ou moins convenues. Il faut donc des nouveaux médias qui proposent une autre forme d’information.

Ces médias sont dits alternatifs à cause des informations qu’ils véhiculent. Ils proposent des informations alternatives à celles diffusées par la presse classique, les médias commerciaux ou les médias officiels. Ils ne cherchent pas à faire de l’audience encore moins à faire des recettes publicitaires. Les médias alternatifs misent sur la gratuité pour rendre ses contenus accessibles.

Le fait d’être désintéressés financièrement permet aux médias alternatifs d’être indépendants dans le traitement des informations. Loin de la logique commerciale ou idéologique, ce nouveau genre de média entre dans une dynamique conflictuelle et contestataire. Leur combat concerne la défense de la démocratie. Pour ce faire, ils publient des informations très élaborées et privilégient les analyses.

Le média alternatif n’est pas un phénomène récent né avec internet. Il peut avoir des formats traditionnels que sont le journal, le magazine, la radio. Il n’en reste que c’est avec internet qu’il a été possible de généraliser la diffusion d’informations et d’idées qui ne sont pas habituellement diffusées par les médias commerciaux.

L’information « libéraliste » constituant le « mainstream » des médias est concurrencée par internet dans la mesure où la diffusion en ligne devenait un système à part entière. Avec le développement du web, les usagers de l’information ne se contentent plus de la presse classique. Ils utilisent plusieurs supports différents pour avoir une vue complète sur l’actualité ou un sujet particulier.

L’internet en tant que média alternatif permet à plusieurs sites d’information de collaborer. L’internaute peut avoir une mosaïque d’information proposée par des sites partenaires. Il a la liberté de construire par lui-même cette mosaïque en fonction de ses besoins, de ses idées, de ses affinités. L’imbrication des sources d’information donnent de la force aux sites spécialisés.

Le média alternatif ne s’adresse pas à un public convaincu mais à un public à convaincre. En tout cas, il faut avoir un public pour devenir un média indépendant. Une activité éditoriale nécessite du moyen. Le web alternatif est confronté à la problématique du financement même s’il est désintéressé sur le plan économique. Ainsi, les sites d’information indépendants ont un modèle économique qui leur garantit au moins la survie à défaut d’engranger du profit.

5.2 L’alternative web pour s’informer

Les sites d’information sont  des médias alternatifs par rapport à la presse traditionnelle. A terme, ils pourraient devenir des classiques et susciteront la création de nouveaux médias alternatifs. Pour le moment, les blogs et les tweet ne sont pas considérés comme des médias, encore moins comme de la presse. Les blogs d’information sont sur le point de changer de statut.

En tant que presse, l’alternative aux médias traditionnels est composée par les pure players du web. Ce sont des médias d’information qui n’existent qu’en ligne. Ils se différencient des autres titres qui sont une version en ligne d’un journal, d’une radio ou d’une télévision. Ces nouveaux médias d’information ont une liberté de ton et s’opposent à une certaine pensée unique du journalisme. Ils disent les choses qui sont tues par la presse.

Les pure players de l’information en ligne ont un modèle économique. L’abonnement est la formule qui a été privilégié au départ. Certains sites ont renversé la tendance en proposant des contenus gratuits. D’autres ont trouvé le compromis entre un contenu gratuit et une partie payante avec des articles à valeur ajoutée comme les confidentiels. L’internaute paie pour chaque unité d’information qu’il veut consulter.

Les sites d’information peuvent-ils vivre sans recette et être libres de toutes contraintes économiques ? La réponse est non. Les pure players fonctionnent grâce à des fonds propres ou mis à disposition. Ce capital est financé par les fondateurs auxquels se joignent des investisseurs. Ce n’est pas du mécénat. Il faut donc un jour ou l’autre un retour sur investissement.

Malgré leur statut de média alternatif, les sites d’information ont dû respecter la logique commerciale. L’abonnement permet de générer des revenus mais il a l’inconvénient de limiter l’audience du site. Un site à abonnement peut tabler sur 50 000 abonnés alors qu’un site gratuit peut viser les deux millions de visiteurs uniques en un mois. La gratuité de l’information permet aux pure players d’attaquer le marché de la publicité. La vente de contenus est aussi un moyen de rentabiliser le site.

En France, il n’y a pas beaucoup de pure players de l’information en ligne qui ont réussi à devenir un média alternatif à la presse. Voici les principaux sites qui  font de l’information leur fonds de commerce :

Le post.fr :

C’est l’un des sites d’information les plus fréquentés avec plus de 2 millions de visiteurs uniques. Les contenus traitent de l’actualité mais avec un angle plus blog que journalistique. La participation des internautes y est importante. La rédaction du site rapporte des nouvelles en citant comme sources de médias de la presse classique. Le modèle économique est basé sur la recette publicitaire

Mediapart :

C’est un site d’information qui avait pour ambition de s’installer dans le débat public, dans l’espace médiatique et dans l’univers numérique. Sa philosophie est la liberté. C’est un journal numérique de référence et indépendant. Sa liberté repose sur la fidélité d’un public de lecteurs fédérés par l’acte d’achat. Médiapart propose ses contenus en abonnement. Les abonnés peuvent participer à la rédaction et envoyer des commentaires. Le site publie volontiers des articles qui le critiquent sur le traitement de l’information.

Rue89 :

 

C’est l’incarnation du passage de la presse classique à la presse en ligne. Fondé par des anciens journalistes de Libération, le site a démarré avec un fonds destiné aux «chômeurs créateurs d’entreprise» avant de faire une levée de fond. Rue 89 a une culture journalistique. La pertinence de l’information et la liberté de ton ont fait son succès. Si le site ouvre la rédaction aux internautes, il fait un tri afin d’éviter de devenir une tribune libre. Les spécialistes, comme les sociologues ou les psychologues, s’expriment sur les actualités. Après avoir atteint le million de visiteurs uniques, Rue 89 s’est diversifié.

 

 

Bakchich :

 

C’est le pionnier des médias alternatifs sur le web. Des articles très fouillés et des caricatures percutantes, le site mène un combat contre l’ordre établi et révèle les choses cachées. Ce n’est pas un mass média mais un site qui s’adresse à un public qui se préoccupe un peu plus de ses devoirs de citoyen. Bakchich a rencontré des difficultés économiques malgré une bonne audience. Le site a été fragilisé par son procès contre David Douilet mais se refait une santé avec l’aide d’une entreprise. Il mise sur un objectif de 120 000 visiteurs pour devenir viable.

 

Slate.fr :

 

Le site est une déclinaison du site américain, pionnier des pure players aux Etats-Unis lancé en 1996, Slate.com. Le traitement différent de l’actualité sur ce site qui revendique le fait de ne pas être d’information. C’est un autre journalisme qui peut être pointu et ironique. Les rédacteurs de Slate sont des journalistes en interne, des indépendants ou travaillant pour d’autres titres. Les chroniques du site permettent de comprendre l’actualité.

 

 

III – L’impact des nouvelles technologies sur l’information et la presse

  1. La presse classique face à Internet

Depuis une quinzaine d’années, la presse classique partage la sphère informationnelle avec internet. Pour une fois, l’évolution de la technologique a été défavorable à ces médias traditionnels dans leur conquête du monde. Le web est devenu un super média d’information qui rassemble des millions de « médias ». Il peut être un frein aux visées expansionnistes des radios, télévisions et journaux. En même temps, internet pourrait être un support pour relancer cette expansion.

 

La télévision est encore le média de masse qui permet d’informer le public. La force de l’image et la familiarité du petit écran font que l’ère de la télévision sera encore longue. La radio est un média de proximité dans un pays comme la France. La presse écrite est une référence dans le domaine du journalisme et de l’information. Cet ordre établi a été bouleversé par internet.

 

Le web a pris tellement d’importance qu’il est assimilé aux technologies de l’information et de la communication. Internet a révolutionné l’information dans la production de contenus. Les spécificités et le potentiel du média en ligne ont donné lieu à une nouvelle écriture qui est un genre nouveau en matière de journalisme.

 

Internet a changé les formats d’accès à l’information. L’article, l’interview, le reportage, les dossiers ont changé pour s’adapter au support. Le mode de diffusion connaît aussi une métamorphose importante. La presse écrite, la radio et la télévision se retrouvent sur internet que ce soit avec le même contenu ou avec un contenu adapté.

 

L’influence de l’internet sur les médias classiques ne se limite pas au contenu ni au traitement de l’information. Le web a révolutionné les salles de rédaction car la gestion de l’espace et du temps n’est plus la même. Les journalistes peuvent travailler de n’importe où, à n’importe quel moment. Il y a une nouvelle organisation de travail quand le bouclage n’est plus le seul repère pour publier une information.

 

La presse écrite, la radio et la télévision sont donc amenées à se repositionner pour faire face à l’information en ligne et tirer avantage du potentiel du support de diffusion multimédia. La presse traditionnelle perd en effet du terrain en tant que média d’information, de savoir et de divertissement. Elle est directement concurrencée par un média internet qui est fort de millions de sites web apportant chaque jour, chaque heure, chaque minute, une flopée d’informations, de connaissances et de loisirs.

 

Si le nombre de titre ou de chaînes est limité pour les médias classiques, le nombre de sites web diffusant de l’information ne l’est pas. La notion d’information évolue et la presse traditionnelle doit s’adapter. La considération des spécificités du web implique une stratégie particulière dans la conception des contenus et dans l’optimisation de la diffusion. La notion d’ergonomie est beaucoup plus complexe que la mise en page dans la presse écrite ou le montage des reportages télé.

 

Après avoir accusé la presse en ligne de pratiquer un pseudo-journalisme, la presse classique est tenue de se démarquer des sites web qui diffusent de l’information. Elle a un standing et une supériorité à défendre. Dans ce sens, elle doit préserver le « vrai » journalisme. Mais la presse écrite peut-elle faire la course à l’information en respectant ses valeurs, sa vision de l’information et sa pratique du journalisme.

 

L’internaute semble en effet attacher moins d’importance à la qualité journalistique d’un article. Ce qu’il veut c’est de l’information rapidement, que cette dernière soit vérifiée ou non. Le buzz n’exige pas la vérité absolue. Prise de court dans la course à l’information, la presse classique doit s’exprimer par son site internet pour ne pas se cantonner à un rôle d’analyse des actualités.

 

Dans cette course, internet a pris l’avantage dans la mesure où il est devenu un média qui permet des révélations. De nombreux sites sont spécialisés dans le scoop. Il y a une demande spécifique à ce genre d’information. De plus, le web traite volontiers des sujets que la presse classique refuserait de traiter à cause des considérations éthiques ou tout simplement de l’intérêt que l’on peut porter à l’information.

 

 

  1. Le traitement journalistique

 

2.1 Le journaliste professionnel et le web

 

En préservant ses valeurs et sa culture journalistique, la presse classique se démarque des autres producteurs d’information sur le web. Elle est éclipsée par l’internet, le nouvel espace public sur lequel elle évolue. Les sites d’information, pratiquant le journalisme applique un traitement technique de l’information de manière accélérée. Il n’y a quasiment plus de délai entre les faits, la couverture de ces faits et la diffusion de l’informant qui s’y rapporte.

 

La presse classique a pour règle d’observer une distance critique avec les faits. Le journaliste prend nécessairement du recul avant d’informer son public. Il présente l’information selon des principes qui sont appliqués par la rédaction. Sa démarche est celle d’un professionnel et reconnue comme telle par le public.

 

Les médias en ligne ont moins de pression dans la mesure où une fausse information ou un mauvais traitement de l’information n’est pas forcément nuisible à son image, à moins d’être répétés. Les rédacteurs peuvent donc prendre plus de risque à publier l’information en primeur. Quand le fait s’avère exact, la presse écrite, la radio ou la télévision est réduite à un rôle de relayeur et citer un site web comme étant la source de l’information.

 

Au départ, c’est l’inverse qui devait se produire. Les sites web qui n’ont pas les ressources humaines pour produire de l’information reprennent ce que les médias classiques diffusent. Dans ce cas de figure, le web ne devrait pas éclipser la presse traditionnelle. Cette dernière perd la confrontation concernant la vitesse de publication. Par contre, la presse traditionnelle gagne pour ce qui est de l’analyse ou de la profondeur de l’information.

 

Il y a donc deux genres de journalisme qui répondent chacun à une attente de la part du public. Il ne faut pas croire que le journaliste n’est pas le bienvenu sur le web. Au contraire, c’est un nouvel horizon pour élargir la pratique journalistique. Sur le web, le traitement de l’information est minimaliste quand il s’agit de publier le premier. L’information est limitée aux 5W. La consistance minimale d’un article est de 100 mots. Les cyber-journalistes seraient donc des spécialistes des brèves. Et encore dans les flux de l’actualité, l’information est réduite à une phrase courte ou à un titre composé de moins de 10 mots.

 

Si la presse classique est obligée à se positionner comme médias d’analyse, prenant du recul par rapport aux faits, la presse en ligne ne s’abstient pas de faire autant. Les pages d’un journal ou d’un magazine sont limitées comme l’est la durée d’un reportage ou d’une interview radiophonique ou télévisée. Cette limite de l’ordre de l’espace et du temps n’existe pas sur internet.

 

L’aspect documentaire du système d’information qu’est internet donne au cyber-journaliste des latitudes dans l’exploitation d’une information. Il peut concevoir plusieurs articles sur des pages différentes mais reliées entre elles. Il peut ajouter un élément multimédia pour illustrer son article. Il peut associer le contenu d’un article à d’autres pages externes au site et écrites par quelqu’un d’autre.

 

Le cyber-journaliste a de nombreuses possibilités dans l’exploitation d’une information. L’enjeu est d’intégrer les pratiques journalistiques dans la production d’information pour le web. Les sites d’information qui le font, en particulier les pure players, bénéficient de la confiance des internautes. Ils sont jugés comme étant des médias responsables, soucieux de la véracité de l’information et des règles déontologiques du journalisme.

 

La presse en ligne arrive à éclipser la presse écrite quand elle affiche une identité et se positionne clairement comme un média d’information. Les journalistes signent leurs articles par leur vrai nom. Ils sont reconnus comme étant des professionnels de l’information. Etant des « vrais » journalistes, ils sont respectueux des principes déontologiques du métier, ils sont conscients de leur responsabilité sociale.

 

Il n’empêche que ces sites sérieux fassent appel à des blogueurs pour compléter leurs offres en matière de contenu. C’est une autre façon pour un média de refléter une représentation équitable de toutes les composantes de la société. Sur internet, le droit de savoir et le droit à l’information animent les rédacteurs. Ces objectifs rendent secondaires les autres règles du journalisme.

 

 

2.2 Le journalisme en ligne selon la loi

 

La loi Création et Internet[6] ne se limite pas à la lutte contre le téléchargement illégal. Dans des dispositions diverses, elle préconise des mesures relatives au journalisme sur internet. La loi apporte une clarification sur le statut de publication en ligne pour les sites diffusant des informations. Elle  traite des droits d’auteur des cyber-journalistes et définit la responsabilité applicable aux directeurs de la publication pour les contenus mis en ligne par des tiers.

 

Ces dispositions de la loi Création et Internet permet d’atténuer les différences de traitement entre la presse papier et la presse en ligne. Un site web peut être un titre de presse qui est défini comme étant un « organe de presse à l’élaboration duquel le journaliste professionnel a contribué, ainsi que l’ensemble des déclinaisons du titre, quels qu’en soient le support, les modes de diffusion et de consultation ». Le site web d’un journal, d’une chaîne de radio ou de télévision est donc un titre de presse.

 

Le titre de presse produit de l’information mais doit diffuser tout ou partie de son contenu par un service de communication au public en ligne. L’activité de publication est assurée à titre professionnel. La loi définit le service de presse en ligne comme « tout service de communication au public en ligne édité à titre professionnel par une personne physique ou morale qui a la maîtrise éditoriale de son contenu, consistant en la production et la mise à disposition du public d’un contenu original, d’intérêt général, renouvelé régulièrement ».

 

Le contenu d’un titre de presse en ligne est « composé d’informations présentant un lien avec l’actualité et ayant fait l’objet d’un traitement à caractère journalistique, qui ne constitue pas un outil de promotion ou un accessoire d’une activité industrielle ou commerciale ».

 

La loi Hadopi met l’accent sur l’activité de journalisme professionnel. Elle fait référence à une maitrise éditoriale du contenu et une publication régulière. Elle distingue ainsi la presse en ligne des autres publications non professionnelles dont les contenus sont produits librement, sans respecter les règles journalistiques et de manière assez irrégulière. Les articles à caractère promotionnel ne sont pas journalistiques et ne permettent pas de prétendre à un statut de presse en ligne.

 

La question des droits d’auteurs et de la propriété intellectuelles des journalistes est clarifiée par la loi Création et internet. Il y a cession à titre exclusif à l’employeur des droits d’exploitation des œuvres du journaliste réalisées dans le cadre de l’élaboration d’un titre de presse, que la contribution soit permanente ou occasionnelle. Cette disposition peut être contredite par une stipulation contraire dans la convention liant un journaliste professionnel ou assimilé à un titre de presse.

 

En tout cas, un journal peut légalement mettre en ligne des articles publiés dans le support papier. Il a le droit d’auteur de la production de ses journalistes. Dans un contrat entre le journal et le journaliste, des conditions spécifiques permettent toutefois au journaliste de tirer profit de cette deuxième publication de son œuvre.

 

La loi Hadopi consacre la spécificité du web sur la question de la responsabilité éditoriale. La loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse n’est pas appliquée à la lettre. Le directeur de la publication est toujours présumé responsable du contenu des articles publiés. Par contre, il n’est plus réputé avoir connaissance de ces contenus et avoir approuvé leur publication sur le site.

 

L’esprit de la loi Création et Internet prend en compte le web 2.0 qui a amené les titres de presse en ligne à proposer parmi ses contenus des articles ou éléments d’information produites par des internautes ou des collaborateurs qui ne sont pas des journalistes professionnels malgré une certaine expertise. Ces contributions ne sont pas contrôlées ou filtrés au préalable. Il n’y a donc pas fixation préalable à la communication au public qui pourrait engager la responsabilité pénale du directeur de publication.

 

Le régime de responsabilité éditoriale est aménagé en fonction du caractère contributif et interactif de certains titres de presse et publications en ligne :

 

« Lorsque l’infraction résulte du contenu d’un message adressé par un internaute à un service de communication au public en ligne et mis par ce service à la disposition du public dans un espace de contributions personnelles identifié comme tel, le directeur ou le codirecteur de la publication ne peut pas voir sa responsabilité pénale engagée comme auteur principal s’il est établi qu’il n’avait pas effectivement connaissance du message avant sa mise en ligne ou si, dès le moment où il en a eu connaissance, il a agi promptement pour retirer le message » (article 27II).

 

Dans l’esprit de la loi, un titre de presse en ligne ne peut être jugé par les contributions des internautes ou autres rédacteurs mais uniquement par les articles écrits par des journalistes professionnels. Le directeur de publication doit cependant être « prompt » pour enlever tout article ou messages dont la publication est susceptible d’engager la responsabilité du site.

 

La loi Hadopi est une victoire du web sur la presse classique. Premièrement, internet est intégré dans la définition neutre par le droit du concept de titre de presse. Deuxièmement, le cyber-journaliste est considéré comme un journaliste professionnel qui fait d’un site web un titre de presse. Troisièmement, les contenus des autres médias peuvent être publiés sur internet sans que le journaliste puisse revendiquer ses droits d’auteur. Enfin, le directeur de publication d’un titre de presse en ligne bénéficie d’un régime de responsabilité aménagé selon les spécificités du support.

 

 

 

  1. Une autre consommation de l’information

 

 

Internet est un média particulier de par le ratio exceptionnel du nombre de sources d’information/consommateurs d’information. Il est inconcevable d’avoir une chaîne de télévision ou un journal pour 50 individus. Le cœur du web constitue toutefois la force médiatique des réseaux. L’évolution des technologies et des usages développe sans cesse un mode de consommation de l’information alors que sur les médias classiques, les choses sont pratiquement les mêmes depuis toujours.

 

  • Un besoin en information plus large

 

Internet éclipse la presse classique car il a fait évoluer les besoins en information des citoyens. Désormais, on parle d’usagers d’information et non pas un public simplement intéressé par les actualités. Cela signifie que le concept de l’information dans un média dépasse dorénavant celui de l’actualité. Il y a toujours ce besoin de savoir ce qui se passe dans son environnement ou dans le monde qui pousse les individus à suivre les actualités. Mais être au courant de quelque chose ne suffit plus.

 

L’information est un besoin de consommation. Le consommateur est dans un état de veille car il sait que des informations sont disponibles quelque part et qu’il a l’outil pour les chercher. Les actualités et les informations traitées par les médias classiques sont des alertes qui poussent le consommateur d’information à approfondir le sujet sur internet. L’usage de l’internet influence l’usage de l’information.

 

Ce nouveau besoin d’en savoir plus, de comprendre, de connaître l’historique d’un fait, la biographie d’une personne qui fait l’actualité… nécessite une activité documentaire. Le besoin en information ne sera satisfait que lorsque l’usager fait une démarche pour compléter le vide. L’information diffusée par la presse crée en effet un besoin d’informations supplémentaires. Le caractère éphémère des messages à la radio ou à la télévision est une raison de plus pour aller retrouver l’information sur un média où elle sera toujours accessible.

 

Quand un sujet d’actualité évolue à chaque instant, internet est le meilleur moyen de le suivre. L’information en direct et en temps réel y est certes plus légère qu’à la télévision mais elle donne l’essentiel de l’événement. Avec internet, il est possible de suivre une actualité sur plusieurs médias en même temps. Le zapping n’est pas préjudiciable puisque l’internaute ne rate pas l’information même s’il ne l’a pas consultée au moment où la page s’est rafraîchie automatiquement.

 

Les autres médias sont conscients de ce besoin des lecteurs, auditeurs ou téléspectateurs d’en savoir plus, de suivre l’évolution d’un fait alors que la presse classique ne peut faire un suivi à chaque instant. Ils renvoient par ailleurs à un site internet pour un complément d’information. Et ce n’est pas forcément le site web du même titre de presse. La presse classique se sert de l’internet pour que son public puisse retrouver les informations sur le site web du journal ou de la chaîne. Cela peut être une interview, un reportage.

 

Internet éclipse la presse classique par le fait qu’une information ne doit plus être volatile, que celle-ci doit être retrouvée. Un contenu journalistique a alors une fonction documentaire dans sa seconde vie sur internet. Une fois l’annonce de la nouvelle faite par les médias classiques, le suivi se passe sur le web. L’usager de l’information veut retrouver les informations pour les lire ou les voir une seconde fois. Il veut confronter les informations sur le même sujets mais traitées par deux médias à la ligne éditoriale différente.

 

Sur internet, l’usager de l’information va consulter les commentaires sur un sujet d’actualité. Il est à la recherche d’un buzz qui s’y rapporte car les événements peuvent susciter des révélations sur le web. Les acteurs de l’actualité deviennent des « people ». Il y a un besoin d’en savoir plus sur la vie privée des gens. Quand une actrice enceinte reçoit une récompense par le monde du cinéma, on s’interroge sur sa vie amoureuse, sa situation matrimoniale, sa grossesse, l’homme de sa vie et même de la grossesse hors mariage. C’est un  voyeurisme qui est largement satisfait par internet.

 

Là où internet surclasse la presse est quand il est utilisé pour vérifier une information. Certes, ce sont souvent les sites d’information associés à un titre de presse classiques qui sont consultés, mais l’intérêt est d’observer le comportement des usagers de l’information. Le web donne alors la version finale et complète de l’information qui sera mémorisée. Aussi, il est intéressant de voir les réactions ou les démentis des personnes ou organisations concernées par l’actualité qui sont diffusées en premier lieu sur internet.

 

 

  • La diversification des supports

 

 

Les nouvelles technologies et la convergence des médias donnent l’avantage à internet. La presse écrite ne peut pas diversifier le support papier, elle est condamnée à entrer dans la presse numérique. La radio a la chance d’être indépendante car ne nécessite pas le déploiement de beaucoup de technologie. Elle peut être écoutée à partir d’un téléphone portable ou un lecteur de musique. La télévision sur un terminal mobile n’est pas impossible mais sa démocratisation est freinée par un coût rédhibitoire.

 

Les contenus de la presse écrite rejoignent ceux de l’internet. Quand quelques centaines de titres sont sur le même support que les millions d’autres sites web, ils deviennent comme les autres. Certes, la notoriété du titre de presse joue mais cela n’enlève rien au caractère démocratique du web. Or, la diversification des supports électroniques et connectés oblige la presse à diffuser sur un internet déjà surpeuplé.

 

A un moment, le wap était annoncé comme l’avenir de l’information. L’internet allégé pour téléphone portable ne permettait pas de profiter du patrimoine d’information du web. Il fallait attendre des moyens technologiques adaptés comme les connexions Wifi ou  3G+, les ordinateurs portables en miniature, les consoles avec accès internet. L’iPad et autres tablettes offrent encore plus de conforts et de possibilités à la consultation d’information multimédia.

 

L’évolution du matériel avec des équipements performants et aux prix abordables, l’amélioration de la connexion internet, la multiplication des offres de services d’information, les conditions sont réunies pour que l’internet devienne le support et média d’information dominant.

 

 

  1. Vers la fin ou la mutation de la presse

 

Le cyber-journalisme est désormais reconnu comme étant une discipline pratiquée par des professionnels. Ayant été un métier destiné aux jeunes ayant suivi une formation en journalisme ou non, il a évolué depuis se reconnaissance par les pairs journalistes et l’Etat à travers la loi. La reconversion des journalistes de la presse traditionnelle est inéluctable car l’avenir du journalisme s’oriente de plus en plus vers les numériques.

Un titre de presse doit s’adapter à l’ère de l’internet. Dans un cas extrême, un journal ou magazine papier arrête la version imprimée pour se lancer sur le web. Tous les journalistes ont alors le devoir d’adapter son savoir-faire à la publication en ligne. Le cas le plus fréquent est que le titre de presse se décline sur le web. Ce revirement, la presse traditionnelle ayant dénigré le web comme anti-journalisme, est dicté par les perspectives économiques.

La presse écrite est celle qui subit le plus la concurrence du web. Elle est en récession alors que les médias en ligne sont en pleine croissance. Les journalistes de la presse écrite sont pourtant les plus réticents à se lancer sur internet et se plier à de nouvelles règles du métier. Au départ, la raison de ce manque d’enthousiasme a été le caractère amateur du journalisme en ligne. Comme ce dernier s’est déjà professionnalisé, l’autre motif est le refus de fournir du travail de qualité à un public devenu exigeant mais qui n’est pas prêt à payer.

Le modèle économique de la presse en ligne n’est pas encore tranché entre les contenus gratuits et payants. Le questionnement a gagné la presse écrite. De plus en plus de journaux papiers sont distribués gratuitement alors que le nombre de site payant stagne. Les titres de la presse classique et de la presse en ligne semblent s’accorder sur la gratuité de l’information concernant l’actualité. Les informations à forte valeur ajoutée peuvent être payantes.

Serge Guérin (1996)[7] a noté un paradoxe : c’est la presse et le livre font preuve de la plus grande alacrité face aux nouvelles techniques de diffusion. « Loin de tuer l’écrit, l’apparition du multimédia et d’Internet semble lui donner une seconde jeunesse ». Les acteurs de la presse écrite se sont très vite intéressés à internet malgré la réticence de ses journalistes à sauter le pas.

Lors de son 52 ème congrès, à Zurich (Suisse) en 1999, l’Association mondiale des journaux ont déjà annoncé que la nécessité de s’adapter à un nouveau support de diffusion est dorénavant incontournable. « Les organes de presse abordent l’Internet de manière différente pour le traitement de l’information ». La concurrence du web et la crainte de la disparition a fait place à une attitude plus positive : « les éditeurs s’accordent à dire que l’Internet est un moyen d’approcher une cible autre que les consommateurs de journaux papier ».

Internet ne fait pas concurrence à la presse écrite mais à l’ensemble des médias. Les médias traditionnels ont le choix entre une opposition contre le web ou une intégration dans l’univers des réseaux des réseaux. Les médias ne peuvent pas mettre sur le dos de l’internet la responsabilité de la crise qu’ils ont traversée. La presse classique a en effet affronté des difficultés économiques mais aussi une baisse de crédibilité.

La presse en ligne en a profité pour se développer. Elle a cependant offert une opportunité aux journées, radios et télévision un moyen de se racheter. Internet est à la fois la cause et l’effet de l’érosion de la base publicitaire lucrative de la presse écrite. Les journaux devaient reconquérir son lectorat qui s’est tourné vers le web. Dotés d’une équipe de rédaction performante, ils ont dû s’adapter pour mettre en ligne des informations vers un lectorat plus large sans contraintes de distance, de diffusion ou de bouclage. Un titre de presse peut toucher un public au-delà des frontières du pays, touchant la diaspora, la communauté linguistique et les étrangers qui sont intéressés par la France.

Internet a éclipsé la presse classique dont les journaux mais ne va pas causer sa disparition. Le fait d’avoir un titre de presse dans un média traditionnel est une force sur internet. L’on peut s’attendre à ce que les budgets de la presse traditionnelle soient réduits au profit de la presse en ligne. Même si la double présence en ligne et hors-ligne semble profitable, les grands acteurs du web ne semble pas intéresser à se lancer dans la presse traditionnelle. Le chemin est donc à sens unique.

La presse écrite a maladroitement négocié le passage vers les supports en ligne. Le site web a été conçu comme étant un prolongement du journal papier et non pas un média à part entière. Les choses ont depuis évolué car la presse s’est adaptée à l’univers internet. Les sites d’information diffusent des contenus adressés à des internautes qui ont un besoin défini. La technique du « push » permet de proposer des informations personnalisées en fonction des centres d’intérêt du lecteur.

La presse écrite, qui a été suivie par la télévision, a revu le modèle économique de son site web. Le but n’est plus d’atteindre un lectorat le plus large possible pour le vendre à des annonceurs. Il s’agit désormais de répondre à des besoins précis par une diffusion à la demande vers un public ciblé. Le mono-produit d’un média dans une logique de diffusion « pull » ne focalise pas la stratégie éditoriale. Les sites d’information propose des produits d’information diversifiés avec des offres à valeurs ajoutées comme les confidentielles ou les stratégiques.

Le développement des technologies de diffusion et de l’usage de l’internet va plutôt mener à la mutation de la presse qu’à la disparition de celle-ci. Les médias traditionnels sont mieux armés pour évoluer sur le web. Ils proposent des contenus multimédia, traitant des éléments textuels, sonores et visuels pour diffuser une information. La gratuité est une règle mais la qualité et la valeur ajoutée se vendent toujours aussi bien. Avec internet, les sites d’information diffusent des informations locales pour toucher des individus qui se trouvent dans une ville différente voire à l’étranger.

 

  1. L’information 2.0 : le renouveau journalisme

Depuis que le web est considéré comme un vrai média dans lequel des journalistes professionnels travaillent dans la production et la diffusion d’information, le journalisme est entré dans une nouvelle phase de crise. La profession change de repères et nombreux sont ceux qui sont désorientés. Avec l’internet et la course perpétuelle au scoop, au buzz, à la primeur sans obligation de vérifier, le journaliste traditionnel n’a pas encore trouvé sa place.

Il est donc normal que dans les révélations sur des affaires, les sites non journalistiques prennent le devant sur les sites d’information et la presse classique. Les journalistes doivent-ils signer un arrêt de mort de la profession et agir comme les blogueurs ? Ont-ils un vrai rôle à jouer dans cette nouvelle société de l’information ? Le journaliste doit se placer sur un nouvel échiquier de l’environnement médiatique dans cette bataille de l’information.

L’argument sur la défense d’une profession noble qui est dégradée par internet ne serait que des propos corporatiste. Le cyber-journaliste est un champion de la médiation de conversation et aime faire d’une phrase un buzz. Il est un gestionnaire de plate-forme mais agit dans une stratégie de médiation de contenus. Il publie d’abord, rectifie après si c’est nécessaire. Il y a une acculturation du journaliste quand il travaille sur le web. Ce nouveau journalisme est bien mauvais. La résistance des puristes est compréhensible.

On attend plus du journaliste sur internet. Intégrant la culture web, il doit amener son savoir-faire et ses valeurs issus de ses expériences vécues dans la presse classique. Il peut promouvoir une information de qualité et journalistique grâce à la vérification et le recoupement, la hiérarchisation des informations, à l’amélioration du format de l’information, à la mise en perspective des informations importantes, à la documentation… Il peut ainsi distinguer le vrai journalisme du faux sans forcément entrer dans un jugement de valeur sur le bon et le mauvais.

Par le journaliste, la presse doit continuer à exister sur internet. Le professionnel de l’information est appelé à intervenir au milieu du gigantesque flux formé par les contenus des blogs et des sites édités par des journalistes amateurs. Appliquant son savoir-faire et respectant la déontologie, il est à même de rétablir certaines vérités, de vérifier les buzz, de dénoncer les manipulations à but politique, idéologique ou commercial, à relier l’information à un contexte afin d’apporter un éclairage…

Le métier de journaliste est donc à réinventer. Il y a une crédibilité à reconstruire pour que le journalisme soit reconnu comme professionnel dans l’écosystème de la diffusion de l’information en ligne marquée par l’abondance et la course au scoop. Les outils de publication de contenus permettent à n’importe qui de faire du journalisme ou de se prendre pou un journaliste. A une époque, on en disait du grand bien, parlant de journalisme citoyen pouvant contribuer à la démocratie notamment locale.

L’idée était que les citoyens ont un moyen efficace de contrôler l’information qui leur était servie et qu’ils sont capables d’apporter leur propre vision de l’actualité. A part les fautes professionnelles sur le plan du journalisme, il s’est avéré que le journalisme citoyen s’est livrée à des actes de manipulation qu’il était censé combattre. La possibilité donnée à tout le monde de produire et diffuser de l’information favorise la désinformation et le conditionnement des internautes à acheter un produit à avoir certaines idées.

Le journalisme citoyen n’est pas toutefois mauvais de nature. Il favorise la participation citoyenne dans le but de fournir des informations indépendantes, fiables, précises, diverses et appropriées nécessaires à une démocratie. Il joue un rôle actif dans la  récupération, reportage, l’analyse et la dissémination de l’actualité et de l’information. Finalement, c’est un rôle qu’un vrai journaliste doit assumer.

La différence est dans la mise en pratique des règles journalistiques en particulier la vérification des faits. En 1998, le Rapport Bourdier avait recommandé la mise en place d’un label pour distinguer les vraies entreprises de presse qui proposent des services d’information en ligne dans le respect des règles du métier et de l’éthique. Le but était de dresser un mur entre le service de rédaction et le service marketing en distinguant les informations journalistiques des informations à but promotionnel.

Internet ne va donc pas amener la disparition de la presse mais il l’éclipse en la forçant à intégrer un nouvel écosystème d’information. Paradoxalement, c’est sur internet que les titres de presse classiques doivent s’illustrer. Le rôle du journaliste y est primordial dans la reconstruction d’une crédibilité mise à mal par la mutation de la nature du produit information et l’évolution du rapport entre l’information et le public.

 

 

 

CONCLUSION

L’internet peut éclipser la presse pour l’information. Il l’a déjà fait et il pourra le faire. Le but de l’internet n’est pas de tuer la presse classique pour régner en maître dans la sphère de l’information. Ce qui est inutile en soi puisque internet lui-même n’est pas dominé par quelques empires médiatiques comme c’est le cas avec la presse traditionnelle. Quoiqu’il en soit, la presse a été sur la défensive vis-à-vis du web. L’instinct de survie a provoqué quelques affrontements contre le nouveau média.

La presse n’a plus le monopole de l’information. Elle est éclipsée par internet sur lequel les informations circulent dans des flux aussi énormes que rapides. La production d’information y est plus libérale sans aucune obligation déontologique ou professionnelle. A preuve, ce qui importe c’est de faire le buzz, la vérification viendra après. La presse classique est surclassée dans cette course à l’information. Elle ne peut cependant faire preuve d’autant de légèreté que les blogs pour parler d’un fait sans aucune vérification.

Si la presse est éclipsée par internet, c’est parce que ce dernier déploie une puissance exceptionnelle dans la diffusion de l’information. L’effet réseaux relie les informations les unes aux autres sans qu’il y ait un contrat de partenariat entre les promoteurs des sites. Les agrégateurs de contenus et les moteurs de recherche contribuent à cette mise en réseaux. La hiérarchisation de l’information opérée par ces grands acteurs du web ne reflète pas la qualité des contenus.

La presse n’est pas encore allée véritablement à la conquête de l’internet. Elle est cantonnée dans une prison culturelle qui l’empêche de se défaire d’une partie de son identité pour embrasser pleinement l’univers numérique. Tant qu’elle reste en dehors de l’internet, se contentant d’une présence afin d’y être comme les autres, la presse sera en retrait dans la bataille de l’information, surclassée par le web.

Les médias traditionnels sont aujourd’hui conscients de la nécessité de s’investir dans la presse en ligne. Pour ce qui est d’investir, la conjoncture économique n’est pas favorable d’autant que le retour sur investissement n’est pas garanti dans un secteur où les modèles économiques sont à un stade d’essai. La motivation de devenir un titre de presse en ligne reste à trouver.

De nombreux journalistes ont vécu le passage vers le web comme une contrainte. Ils ont une image négative du web qui serait un média envahissant et sans qualité. Le sentiment de frustration attesterait que les acteurs de la presse classique en pleine crise de crédibilité et économique se font voler la vedette par des pseudo-journalistes qui publient des informations à tout va. Internet ne serait fort que parce qu’il y a un système de réseaux reliant les informations les unes aux autres et une grande liberté de publier ce que l’on veut.

Seulement, les cyber-journalistes et les journalistes citoyens ne se contentent pas de s’intéresser à des sujets ou informations ignorés par la presse classique. Le web a donc éclipsé la presse en diffusant les informations rapidement sous forme de buzz et surtout grâce à la diversification des supports permettant d’accéder à internet. Le cycle de bouclage est un sérieux handicap pour la presse. Cette dernière a perdu le privilège de la révélation, réduite à reprendre le buzz ou le scoop créé sur internet après en avoir fait vérification. L’information est devenue un flash permanent.

 

La presse a tout à gagner sur le web. Le circuit informel de l’information par les réseaux sociaux, blogs et site de journalisme citoyen sont à double tranchant. Ils incarnent la démocratisation de l’information pour une plus grande liberté d’information. Les titres de presse offre une garantie supplémentaire au public pour ce qui est de la qualité de l’information. Par ailleurs, la loi préconise que seuls les sites d’information employant des journalistes professionnels ont un statut de presse en ligne.

 

Il est judicieux de s’interroger sur une pratique commune du journalisme sur le web. Les premiers techno-journalistes ou cyber-journalistes se sont focalisées sur les spécificités du média web dans l’élaboration et la présentation de l’information. La lecture sur écran n’est pas linéaire et la présence de liens hypertextes pousse l’internaute à « zapper ». Comment donc écrire un papier quand on sait qu’il ne sera pas forcément lu du chapeau à la chute.

 

Des principes immuables comme les 5 W, la pyramide inversée, la synthèse, le message essentiels resteront. Il serait plus juste de faire évoluer dans sa globalité les techniques journalistiques. La concurrence du web et de ses millions de sites n’est pas sans influencer le formatage de l’information. Les journalistes ne doivent-ils pas pratiquer la même profession avec le même savoir-faire et la même déontologie quel que soit le média. Etre présent sur le web en tant que média en apportant son professionnalisme est la seule manière pour la presse classique de sortir de l’ombre de l’internet.

 

La « prophétie » de Dominique Wolton sur l’avenir de l’internet s’est en grande partie vérifiée. L’avenir du web est tourné vers le commerce électronique. Les nouvelles sont utilisées par les sites comme un produit d’appel pour un service ou un produit à vendre, a prédit le sociologue spécialiste des médias. Cette information marchande nuit à la crédibilité de l’information et au rôle joué par les journalistes citoyens dans la démocratie.

 

Les vrais sites d’information en tant que titre de presse ont une opportunité à saisir pour renouveler la sphère informationnelle sur internet. La presse classique et les pures players du web ont tout à prouver et à gagner. Il y a bien une pratique journalistique qui permettra d’influencer positivement la consommation de l’information sur internet.

 

 

 

 

 

 

 

 

[1] Gwenyth L. Jackaway, Media at War: Radio’s Challenge to the Newspapers, 1924-1939 (La guerre des médias: la radio défie les journaux, 1924-1939)

[2] Mizzaro, S. Relevance: The whole history. In T. Bellardo Hahn & M. Buckland (Eds.), Historical studies in information science (pp. 221-244). Silver Spring (1998).

[3] André Tricot, maître de conférences à l’IUFM de Midi-Pyrénées.  Apprentissages et recherche d’information avec des documents électroniques. Université de Toulouse (2003)

[4] Millar, R., & Shevlin, M., Predicting career information-seeking behavior of school pupils using the theory of planned behavior. Journal of Vocational Behavior (2003).

[5] Laurent Flores Customer Listening Blog. Baroblogs Octobre 2006 : la montée en puissance des blogs comme moyen d’information et de communication est confirmée

 

[6] Loi No2009-669 du 12 juin 2009 favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet – Loi Création et Internet ou Loi Hadopi.

[7] GUERIN Serge, La cyberpresse La presse et l’écrit off line, on line, Hermès, 1996, 156 p.

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