La gestion durable des ressources naturelles mondiales : Défis et perspectives pour la filière bois française et la certification FS
L’importation du bois en France
Introduction
La gestion durable des ressources naturelles mondiales est un chapitre important des préoccupations environnementales depuis le lourd constat de la disparition annuelle d’une quinzaine de millions d’hectares de forêts tropicales d’Amazonie, d’Afrique et d’Asie, et de la menace qui pèse sur la survie d’espèces rares de la végétation. Certains gouvernements d’Europe ont pris l’initiative, à partir de l’année 2003, d’introduire des dispositions relatives aux marchés publics d’achats de bois, spécifiant qu‘il doit être d’origine légale ou au moins qu’il provient de forêts exploitées durablement. Cette politique, promue par une forte prise de conscience écologique collective, est devenue un cheval de bataille institutionnelle et a fait l’objet en 2008 d’un projet de loi au niveau de l’Union européenne. Le commerce du bois occupe 2 % du commerce des marchandises à l’échelle mondiale, la moitié duquel pourcentage est réputée d’origine illégale. Enfin, réalité économique établie et non réfutée, le plus gros importateur de ce bois d’origine illégale en vertu des principes relatifs à la protection environnementale est la France. La notion de partage de responsabilité, entre pays producteurs et pays utilisateurs, ainsi qu’entre producteurs et consommateurs, sert de base aux efforts et mesures tendant à décourager et éradiquer la pratique d’abattage illégal et dévastateur d’un produit à forte demande dans les pays développés.
Le présent mémoire s’articule autour de six points :
- L’état de la réglementation à l’importation
- Les plus gros consommateurs et les plus gros fournisseurs
III. Les modes de transport
- Le contrôle des espèces à l’importation
- Les marchés parallèles
- La réglementation future
Conclusion.
- L’état de la réglementation à l’importation
- La réglementation relative aux quantités importées
- L’importation de bois sur le territoire français n’est pas soumise à quota. Cela, malgré que le bois importé puisse entrer en concurrence avec les produits forestiers au niveau local ou régional, ou bois tempérés. C’est au plan de la valeur du bois et de son utilisation finale que le bois tropical se démarque – le bois destiné à la production de mobilier haut de gamme ou autre menuiserie d’intérieur à grande production.
- Les quantités importées tant du continent européen que des pays tropicaux sont simplement fonction de la demande qui est forte. La France importe la moitié du bois dont elle a besoin.
- Ni dans le cadre de l’OMC (Organisation mondiale du commerce) dont le dispositif est de nature commerciale et douanière, ni au niveau régional (Union européenne) la France n’est inquiétée car les règlements émis par ces instances ne concernent pas les quantités.
Il en est de même au niveau des conférences COWAC (Continent West Africa Conference) et la MEWAC (Mediterranean West Africa Conference), organes qui régissent, quant à eux, les taux de fret applicables au transport maritime entre l’Afrique et, respectivement, les ports français de la Côte atlantique et ceux de la Méditerranée.
L’OIBT (Organisation internationale des bois tropicaux), réunit autour de sa table les pays en développement d’Amérique du Sud, d’Afrique et d’Asie, fournisseurs de bois, et les pays développés, preneurs, pour formuler des politiques aussi bien commerciales qu’environnementales. Cet organe, né il y a 25 ans sous les auspices de la CNUCED, ne règlemente pas les quotas d’exportation ni ceux d’importation.
Par ailleurs, la France est présente sur des plateformes internationales d’intérêt économique et environnemental telles que la CEFDAC (Conférence des écosystèmes et des forêts denses d’Afrique centrale), l’AFIA (Association interafricaine des industries forestières), l’ATIBT (Association technique internationale des bois tropicaux / CNUCED). Ces organes ne légifèrent cependant pas en matière de quotas d’importation.
- Le caractère restrictif de la réglementation se situe au niveau des mesures fiscales préférentielles visant à favoriser l’importation de bois brut. En effet, si les pays producteurs ont intérêt à exporter un bois transformé, en raison de la valeur ajoutée y associée et en raison des taxes de 15 % qui frappent les exportations de bois brut, l’importation de bois transformés – sciages, placages et contreplaqués – représente au contraire, au niveau du pays importateur, un manque à gagner pour l’industrie locale de transformation dans l’ensemble, et notamment pour les infrastructures portuaires de transformation du bois, usines de proximité. De plus, les taxes d’importation sont quasiment nulles pour le bois brut.
Du point de vue du transport international, la durée et les coûts du transport maritime pour le bois provenant des pays tropicaux n’incitent pas à l’importation de faibles tonnages. Du point de vue du transport à l’intérieur du territoire, les importateurs branchés au réseau de la SCNF pour le transport par fer sont privilégiés pour les forts tonnages car ils bénéficient de réductions.
Il ressort de tout ceci que la notion de réglementation quantitative ne peut relever que de l’initiative du pays importateur, en l’occurrence la France, dans les conditions de légalité d’origine et si la collision du bois importé avec les produits concurrents de même nature (bois tempérés) ou les produits de substitution le justifie.
- La réglementation relative au statut du bois importé
- La question du statut se rapporte à l’origine légale ou illégale du bois
Il ressort des analyses économiques que près de la moitié – 40 % – du bois importé par la France est d’origine illégale et provient majoritairement de pays tropicaux (notamment Brésil et Congo). Le terme illégal se rapporte à l’illégalité des conditions d’exploitation des forêts dans les pays de récolte et/ou parce qu’il s’agit de bois commercialisé en infraction des règles de gestion forestière durable et de préservation des ressources naturelles. Les infractions sont relatives aussi bien aux lois nationales du pays de provenance, qu’aux lois internationales. D’une façon générale et sans limitation d’impacts additionnels au plan de la gouvernance et de l’économie :
- des bois sont prélevés de manière intensive dans des aires protégées et/ou sans permis d’exploitation,
- les coupes se font au mépris des règles de régénération
- des bois précieux et essences rares, espèces endémiques protégées, objet de réglementations strictes voire d’interdiction d’exportation, sont la cible de contrebande
- le trafic du bois finance parfois des conflits armés et guerres civiles, et participe au blanchiment d’argent. Il s’agit du bois des catégories ‘à risque élevé’ selon la terminologie de l’Union européenne.
- les déclarations d’exportation ne font pas état des quantités ou des essences effectivement exportées
Le trafic illégal de bois se solde, selon une estimation de la Banque mondiale de 2001, par une perte annuelle de 10 milliards de dollars pour les pays producteurs – si tant est que le terme production sied à un produit qui met parfois des années, voire des décennies, à se renouveler, sans parler des risques de perte de biodiversités et d’écosystèmes entiers.
Le gouvernement français a emboité le pas au Danemark, au Royaume Uni et à l’Allemagne pour assurer que les marchés publics d’achat de bois appliquent à 100 % en 2010 les règles officielles relatives à l’origine légale et à la gestion forestière durable. La question de limitation quantitative ne sera plus alors à l’ordre du jour en ce qui concerne les marchés publics, mais d’origine, tant pour les bois tempérés que pour les bois tropicaux.
En même temps, la France oppose sa réticence à la politique du dispositif législatif européen de 2008 imposant aux opérateurs de garantir la traçabilité du bois et des produits bois à toutes les étapes de l’approvisionnement, de mettre en place un système de ‘diligence raisonnable’, dispositif jugé lourd et coûteux. Vu le taux élevé (40 %) de bois tropicaux d’origine illégale importée par la France, le caractère défensif de cette prise de position peut s’expliquer.
- L’autorisation FLEGT
Le processus FLEGT (Forest law enforcement governance and trade / Application des réglementations forestières, gouvernance et échanges commerciaux), instauré par l’Union européenne, a fait l’objet d’un premier plan d’action en 2003 et d’un règlement en 2005, a pour but d’encourager les pays producteurs de bois à entrer dans un partenariat volontaire visant a lutter contre l’exploitation illicite du bois.
Le processus peut être mis en œuvre aussi bien au niveau bilatéral que régional, auquel cas les pays de la région s’engagent conjointement à en appliquer les règles. Des instruments comme la promotion de la bonne gouvernance, le renforcement institutionnel et le transfert de technologie dans les pays producteurs
La licence, ou autorisation FLEGT est le document qui permet de prouver à l’importation, l’origine du bois importé. Il n’est pas un document de limitation de quantités car la question de la quantité ne se pose pas pour des produits d’abattage illicite.
- Les labels
Quelle(s) garantie(s) les pays producteurs et les pays importateurs donnent-elles pour assurer, tout au long de la chaîne d’approvisionnement et jusqu’aux consommateurs, que le bois, produits du bois et produits finis du bois commercialisés proviennent d’une exploitation forestière conforme aux politiques de gestion forestière durable ?
En conséquence du développement mondial de la conscience écologique – des décideurs politiques aux ménages et individus – tous les produits du bois sont susceptibles de porter une marque de certification qui prouve l’origine du matériau bois utilisé.
Deux labels, associés à deux processus de certification distincts, s’appliquent à la gestion forestière durable. Il s’agit du label FSC et du label PEFC, mis en place au niveau de l’Union européenne et adoptés sur d’autres continents.
La gestion durable de la forêt se définit comme étant l’ensemble des pratiques d’utilisation propres à préserver les forêts. Selon les termes de l’accord d’Helsinki de 1993 en la matière : « la gestion et l’utilisation de terrains boises, d’une manière et d’une intensité telles qu’elles en maintiennent la diversité biologique, la productivité, la capacité de régénération, la vitalité et la capacité a satisfaire, actuellement et pour le futur, les fonctions écologiques, sociales et économiques pertinentes , au niveau local, national et international, et qu’elles ne causent pas de préjudices à d’autres écosystèmes ».
□ Le label FSC (Forest stewardship council), mis en place en 2008, est attribué pour une durée de cinq ans et avec un contrôle annuel, aux propriétaires fonciers et aux entreprises de transformation du bois, qui s’engagent à :
« i. respecter les lois et traités internationaux
- attester de droits de propriété clairement définis
iii. reconnaitre et respecter des droits légaux et coutumiers des populations autochtones
- préserver le bien-être des populations locales
- utiliser de façon rationnelle les produits et les services forestiers
- assurer la conservation de la diversité biologique et des ressources en eau et des écosystèmes fragiles
vii. réaliser un plan d’aménagement forestier
viii. mettre en place et réaliser un suivi et une évaluation des activités
- assurer le maintien des forêts primaires. »
- préserver l’existant et promouvoir l’accroissement naturel.
– L’accent sur les droits sociaux s’explique par le fait que les exploitations sauvages et illicites se font au préjudice des populations locales et des travailleurs des pays en développement, employés de façon illégale en dehors de toute protection juridique. Par ailleurs, la pérennisation de ces exploitations parallèles – protégées manu militari dans certaines régions du monde – est antiéconomique car elle fait obstacle aux investissements durables et responsables.
– Le référentiel FSC vise à régir l’exploitation et la commercialisation d’une dizaine d’essences tropicales dont l’acajou, l’ébène, le palissandre, le teck, le moabi, le bankiraï.
– 135 entreprises françaises de transformation du bois sont certifiées FSC (année 2007), selon la revue RS News, ‘portail dédié à la responsabilité sociale et environnementale de l’entreprise’,
– La couverture de la certification FSC pour les forêts mondiales est de 54 millions d’hectares. Dans l’Union européenne, 23 millions d’hectares de forêts sont certifiés FSC, selon les sources FSC.
Enfin, le label FSC se base sur un référentiel autonome qui ne dépend pas des dispositifs réglementaires nationaux / régionaux.
□ Le label PEFC (Pan european forest certification / Programme européen de forêts certifiées), mis en place également en 2008, concerne les bois d’Europe et d’Amérique du Nord.
– Le référentiel PEFC respecte les législations et réglementations nationales relatives à la gestion forestière durable. Les entités et propriétaires physiques forestiers souscrivant à la certification FSC s’engagent à :
« i. respecter la réglementation forestière applicable
- se former en matière de gestion forestière durable
iii. maintenir ou restaurer des zones d’intérêt biologique particulier
- introduire des espèces adaptées et variées
- mettre en place des peuplements mélangés
- appliquer une sylviculture dynamique
vii. laisser des arbres âgés ou morts
viii. mettre en œuvre des méthodes mécaniques de préparation du sol et privilégier les méthodes de défense biologique par rapport aux traitements chimiques
- préserver les arbres remarquables
- ne procéder aux coupes rases qu’avec discernement et ne jamais dépasser 10 hectares
- assurer l’équilibre forêt-gibier
xii. accepter le contrôle d’un auditeur
xiii. rédiger un document de gestion. »
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