LA MUSICOTHERAPIE, UNE NOUVELLE PERSPECTIVE POUR LA REEDUCATION DES DIFFICULTES PERCEPTIVES ET COMMUNICATIVES DES AUTISTES ?
LA MUSICOTHERAPIE, UNE NOUVELLE PERSPECTIVE POUR LA REEDUCATION DES DIFFICULTES PERCEPTIVES ET COMMUNICATIVES DES AUTISTES ?
RESUME
Il est dès lors indéniable que la musicothérapie présente des vertus thérapeutiques. Dans ce mémoire, nous avons tenté d’établir ses effets sur les déficiences des personnes autistes. Notamment au niveau de leur communication. Aussi, notre étude a été effectuée dans le cadre d’un stage de formation auprès de l’association EURECAH qui soutient les personnes autistes. Nous avons été confrontés à un groupe de personnes autistes avec des caractéristiques différentes, composé par trois femmes âgées respectivement de 29ans, de 25ans et de 13ans, ainsi que quatre garçons âgés de 30ans, de 20ans, de 14ans et de 5ans.
Durant un an et demi de stage, soit 76 séances, nous avons été en mesure d’observer la portée de l’influence musicale à travers des techniques propres à la musicothérapie au niveau de l’association EURECAH. Chaque partie de la séance de musicothérapie a été modulée de manière à favoriser le relationnel des patients. Aussi avions-nous les rituels de début et de fin de séance, la partie échauffement corporelle, puis le choix d’instrument, et l’improvisation instrumentale.
Le groupe de personnes autistes qui a été suivi auprès de l’association EURECAH a présenté une nette amélioration de leurs compétences motrices et communicationnelles. Les patients se sont montrés progressivement plus motivés dans les séances d’improvisations instrumentales. Leurs troubles ont nettement régressé au profit d’une plus grande participation relationnelle dans les séances.
Ces résultats appellent à réflexion. Notamment sur l’éventualité de programmer les séances de musicothérapies dans les centres intervenant dans le domaine d’autisme.
INTRODUCTION
Que ce soit en dehors ou au niveau académique, j’ai toujours fait de la musique ma passion.
C’est d’ailleurs cette attention particulière que je lui porte, qui m’a incité à le pratiquer par le chant et le violon. Qui plus est, j’ai la nette conviction que le langage musical est étroitement lié au langage poétique. De ce fait, je lui attribue deux acceptions. D’une part, j’appréhende la musique en considération de son contenu manifeste, qui procure un plaisir immédiat partagé par tous et qui incite le corps à bouger. Et d’autre part, je l’assimile à un contenu latent qui agit sur notre inconscience sur la base des expériences oubliées[1].
Ce sont ces considérations qui m’ont dicté la certitude selon laquelle, la musique peut être un apport pour la réalisation d’une vie apaisée ; et qu’elle forme la base incontournable de la prise en charge thérapeutique des individus atteints de pathologies mentales et somatiques. Forte de ces convictions, j’ai décidé de suivre une formation de trois ans en musicothérapie, auprès du centre international de musicothérapie de Noisy-Le-Grand. J’ai ensuite additionné mon périple d’un stage de formation auprès de l’association Education Utile Régionale ou EURECAH[2]. J’y étais accompagnée par madame Annabelle Roch, une musicothérapeute formée à Buenos Aires. Elle est spécialisée auprès du public autistique. Et j’y étais en mesure de suivre deux groupes de personne autiste et polyhandicapé, ainsi qu’une personne individuelle souffrant de sclérose en plaques au niveau du service psychiatrique[3] et un enfant autiste dans une école Spe[4]. L’association recueille aujourd’hui environ 90 % des enfants autistes, et 10 % d’enfants atteints d’un autre handicap[5].Plus tard, j’ai été diplômée d’une formation en sophrologie, et je suis en cours de formation en Art-thérapie.
Depuis Janvier 2016, je suis bénévole au sein d’une association pour personne Alzheimer, ou j’ai créé un atelier de musicothérapie, d’art thérapie et de sophrologie. Professionnellement, j’ai actuellement un cabinet à Lyon où j’exerce en tant que sophrologue. Néanmoins, je souhaite obtenir le titre de Musicothérapeute en terminant ma formation par le biais de ce mémoire. Aussi, ai-je choisi comme thème : « La musicothérapie, une nouvelle perspective pour la rééducation des difficultés perceptives et communicatives des autistes ? » Dans la perspective de le mener à bien, j’ai décidé d’effectuer un stage supplémentaire en musicothérapie. J’ai fait ce stage avec madame Mary HART qui exerce depuis plus de 10 ans en tant que musicothérapeute. Elle à été formé à Nordoff-robbins music thérapy à Londre.
Il s’agit d’un stage en soin palliatif et il ne m’a pas été imposé. Toutefois, j’ai tenu à l’accomplir afin de prouver l’entier dévouement que j’aspire au métier de musicothérapeute, en passant par la réussite de ce mémoire.
Ainsi, pour correctement répondre à la problématique du sujet, la musique, la musicothérapie, et l’autisme seront traités en première partie de ce mémoire. Tandis que l’étude clinique trouvera place en deuxième partie.
PREMIERE PARTIE : PRESENTATION DE LA MUSIQUE, DE LA MUSICOTHERAPIE, ET DE L’AUTISME
- La musique
— Définition
La musique est une notion polymorphe, de ce fait, elle a en son compte plusieurs acceptions. Chaque définition donnée diffère selon l’angle de vue adopté par son auteur. Communément, la musique est « une succession de sons qui sont perçus comme étant organisés selon certaines règles artistiques »[6]. On retient deux choses de cette définition.
La première est que la musique peut être une œuvre d’art, une représentation, et un moyen de communication. Plus concrètement, la musique serait une œuvre d’art lorsqu’elle est le produit d’une création artistique. Toutefois, contrairement à l’art plastique où l’œuvre peut être donné en une seule fois, l’œuvre musicale, elle, se situe sur un plan temporel[7], et n’existe que lorsqu’elle est jouée. Ensuite, elle serait une représentation lorsqu’elle présente en temps réel quelque chose d’absent. Et enfin, elle serait un moyen de communication lorsqu’elle diffuse un message[8].
La deuxième chose à retenir est que la musique en elle-même diffère des autres sons puisqu’elle respecte certains règles ou systèmes de composition. Toutefois, la musique peut être obtenue de différentes manières, par la voix, par le corps, ou par des instruments de musique. Par ailleurs, la musique peut-être de nature abstrait, concrète ou de synthèse.
— L’origine selon Pythagore
La science du son est définie par les pythagoriciens comme étant : « une combinaison harmonique des contraires, l’unification des multiples, et l’accord des opposés ». Ainsi, selon eux, la musique est formée par de nombreuses figures mathématiques. Elle existe donc d’elle-même, et serait une science, plus spécialement une science sensible de la mesure, puisqu’elle fait preuve de justesse comme l’astronomie.
À l’époque de Platon, ces deux sciences ont été négligées au profit de l’arithmétique et de la géométrie. Néanmoins, Pythagore a considéré la musique comme étant une éthique médicale qui sert à apaiser les passions humaines et à rétablir les facultés de l’âme à leur juste place. Il pousse même jusqu’à dire qu’après l’expérience de la musique, il serait possible pour une personne d’être lui-même en plus d’acquérir des savoirs.
Plus tard, Pythagore a avancé la théorie de la « musique des sphères ». Ladite théorie adopte une approche extrinsèque[9] de la musique puisqu’elle suppose que l’origine de la musique provient des mouvements des planètes. Néanmoins, l’astrophysicienne Sylvie Vauclair et le musicien Claude-Samuel Lévine ont démenti la fameuse théorie. À la place, ils soutiennent que « des vibrations transposables sur la portée sont générées par les étoiles[10] », et qu’ils peuvent les utiliser pour créer une œuvre musicale.
— Les premiers sons du fœtus
« Les sons et surtout ceux rythmés par l’être humain tissent déjà des liens entre l’utérus et le monde(…) ce lien par le son rythmé est aussi lien entre le dedans et le dehors, entre l’avant et l’après, entre le soi et l’autre, entre la vie et l’absence.[11] »
Scientifiquement, l’oreille externe du fœtus commence à se former à la huitième semaine de la grossesse. Néanmoins, son système auditif est encore loin d’être performant. Toutefois, les os vibratoires qui forment son crâne lui permettront de percevoir les vibrations des sons. Ainsi, à partir de cet instant, le fœtus est en mesure de ressentir les ondulations.
Les premiers sons qui seront captés par le fœtus seront celui du bassin, du rythme cardiaque, et des gargouillis gastro-intestinaux maternels. Ces vibrations de sons apparaissent dès la septième semaine de la vie utérine et procurent chez le fœtus ses premières sensations et émotions. Ces vibrations agissent sur le corps du fœtus comme des résonateurs. Ils viennent résonner dans son corps, et le bouleversent de sensations nouvelles. Ainsi, les premiers sons du fœtus seront des bruits internes, dans la mesure où ils résonnent au sein du corps maternel. La mère forme alors l’espace sonore du fœtus. Elle lui transmet son rythme, et sa voix. Le fœtus est d’ailleurs spécialement sensible à la voix maternelle, car il peut la percevoir par voie interne, et plus tard par voie externe grâce aux différents tissus qui le séparent de l’extérieur.
Si au début, les sons apparaissent déconcertants pour le fœtus, ces bruits internes deviendront agréables pour lui plus tard. C’est le phénomène d’habituation[12] qui fait que les bruits internes ne sont plus captés comme étant des informations par le fœtus. Aussi, il va au fur et à mesure du temps, les intégrer. Toutefois, ce phénomène d’habituation se fait progressivement, et il semble que ce sont les battements cardiaques de la mère qui sont les premiers assimilés par le fœtus. Ensuite viennent les bruits de la respiration et les borborygmes[13].
— Système auditoire
C’est, à compter du cinquième mois de grossesse le fœtus commence, véritablement à apprécier les sons. Mais c’est à partir du huitième mois de grossesse que le fœtus aura développé son système auditoire. Il sera capable de distinguer la voix de sa mère, de repérer les changements de locuteur, et de mémoriser un air de musique.
Le système auditoire du fœtus, tout comme le nôtre, est formé par l’organe de l’ouïe. C’est un sens qui diffère des autres sens, car il peut être ni commandé ni filtré. Or, le fœtus est dans un environnement sonore variant en fonction de l’activité de sa mère. La diversité des sons qui viennent à lui stimule son audition, et peut l’amener à y répondre par un mouvement. En ce sens, des chercheurs ont pu constater à travers les échographies que les basses fréquences diminuent l’activité fœtale, tandis que les hautes fréquences l’animent. De même, les bruits intenses peuvent accélérer les rythmes cardiaques du fœtus, ou le faire retrancher au fond de la cavité utérine dans une attitude de protection. Ainsi, la faculté auditoire du fœtus se développe au cours du temps. Jusqu’à devenir un instrument de communisation entre lui et sa mère et ceu même après la naissance. C’est alors pour confirmer ces dires que Didier ANZIEU annonce que: « Le nourrisson a une capacité de perception bien supérieure à sa capacité d’émission phonétique, anticipant là l’antériorité de la compréhension sémantique par rapport à l’élocution. »[14].
– Système nerveux
C’est grâce au développement du système nerveux que le fœtus, à différents stade de la grossesse, acquiert des perceptions sensorielles. Et son système nerveux réagit différemment face à chacune d’entre elles.
- L’organe de l’Ouïe : Dès le sixième ou le septième mois, les sensations auditives sont présentes chez le fœtus. Ses oreilles sont entièrement formées. Et il pourra se servir du pavillon pour capter ou canaliser les vibrations extérieures, qui seront transmises, après un long cheminement, au cortex auditif du cerveau. Et c’est seulement à cet instant que lesdites vibrations seront reconnues comme étant des sons. On a pu remarquer qu’à ce niveau, le fœtus réagit aux bruits externes, puisque désormais, les bruits violents le font sursauter, et la musique douce l’apaise. Par ailleurs, les émotions de la mère semblent transposées au fœtus, qui peut y réagir par une accélération de son rythme cardiaque.
- L’organe du goût : Il se développe chez le fœtus de quatre mois. Grâce au microscope, les scientifiques ont pu examiner l’anatomie de la langue. Et ils y ont découvert les récepteurs gustatifs qui ont pour rôle de transmettre au système nerveux central les caractéristiques gustatives. Et ces derniers y seront traduits en sensation gustative. Concrètement, à ce stade, le fœtus avale le liquide amniotique et il semble discerner les saveurs.
- L’organe du toucher : Il se développe également dès le quatrième mois de grossesse car le fœtus sent quand on le touche à travers le ventre maternel. Le sens du toucher est assuré par la présence des corpuscules récepteurs sous la peau. Ils informent le cerveau en passant par la moelle épinière. C’est là que sont analysées les informations. Aussi, le système nerveux du fœtus peut comprendre la chaleur, le froid, la pression ou la douleur.
- L’organe de la vue existe pratiquement chez le fœtus, car il semble distinguer la lumière de l’obscurité. Il réagit à un faisceau de lumière violente dirigée vers sa tête à travers l’abdomen de sa mère. Ces rayons lumineux pénètrent donc son œil, et après un long processus d’infléchissement, traversent la courbure de sa cornée, son iris, sa pupille, son cristallin, puis sa rétine, qui transforme l’énergie lumineuse en message électrique pour être transmit au cortex visuel du cerveau.
– La mémoire musicale
Le fœtus peut capter très tôt les sons. Il atteint la capacité à dissocier les sons à partir du cinquième mois de la grossesse, et peut dès lors écouter de la musique. Et si elle est diffusée de manière régulière, elle laisse des traces dans sa mémoire, et il pourra s’en rappeler à sa naissance.
Cette mémoire musicale est liée au « rythme inné de l’enfant à naître[15] ». En ce sens, des recherches démontrent que ces traces dans la mémoire constituent le code sonore personnel du fœtus, et sera la base du futur langage de l’enfant. Par ailleurs, des chercheurs finlandais ont découvert que « les bébés sont capables d’apprendre très jeune, et que les effets de cet apprentissage restent apparent dans le cerveau pendant une longue période[16] ». De telles conclusions ont été tirées suite à une expérience dans laquelle ils ont demandé à des femmes enceintes de jouer le chant « d’Ah ! Vous dirai-je maman », cinq fois par semaine durant les trois derniers mois de leur grossesse. Après naissance, les chercheurs ont fait écouter aux bébés la même chanson, et une version modifiée. Les résultats publiés dans la revue Plos One constatent une augmentation importante de l’activité cérébrale des bébés à l’écoute de la chanson, et une impassibilité envers la version modifiée. Les bébés peuvent, de plus, retenir l’information depuis le ventre de leur mère pendant au moins six mois.
Il faut néanmoins comprendre que le fœtus porte une attention particulière à la voix de sa mère. Selon Maya GRATIER, « La voix de la mère habite littéralement le corps du fœtus, elle est aussi sa voix, elle fait vibrer son corps de l’intérieur et même à travers plusieurs intérieurs-son-corps, l’utérus, le corps de la mère-et ses cadences l’entrainent, se logent en lui. Et la voix de la mère est elle-même imprégnée de culture, des rythmes de la langue mais aussi des inflexions particulières qu’elle a développées dans les siens, qu’elle a peut-être transformées en voyageant. ». Et Marie-France CASTAREDE corrobore cette affirmation en disant que la musique et le chant peuvent raviver en nous les impressions de bien-être ressentis lors de l’accordage affectif (Daniel Stern[17]) qui a eu lieu avec nôtre mère, notamment par l’intermédiaire de sa voix.
– Les bienfaits de la musique chez le fœtus
A partir du moment où le fœtus réagit aux sons externes, il est également capable d’écouter de la musique. Et les bienfaits de la musique sur lui sont multiples. En effet, des recherches ont démontrées que faire écouter de la musique au fœtus stimule le développement de ses fonctions mentales et physiques.
- Le développement serait mental, dans la mesure où la musique agit en augmentant de manière considérable les sensations du fœtus. Elle agit à son égard de manière thérapeutique, puisqu’elle a tendance à le calmer, à le déstresser et à le sécuriser. Par ces faits, le fœtus est plus calme et serein à l’écoute de la musique, et ces effets durent, même après sa naissance. En outre, la musique permet au fœtus de ressentir des émotions. D’ailleurs, c’est en ce sens que Laurel Trainor dit : « La musique véhicule des émotions de manière directe, alors que les mots le font de façon indirecte».Et dans cette même conviction, il a également été établi que le fœtus perçoit mieux les émotions à travers la voix de sa mère. Aussi, le fœtus est « sensible à la musique de la voix de sa mère qui est, avant son visage, le tout premier lien qui se crée entre eux »[18]. En corrélation avec les bienfaits mentaux de la musique, Charles DARWIN va plus loin en disant que : « Les sons musicaux offrent une des bases du développement du langage.[19] » Ainsi, sans le savoir, le fœtus serait, en écoutant de la musique, en train d’apprendre à s’exprimer.
- Sur le plan physique, la musique est perçue par le fœtus, non seulement par les oreilles, mais également par les os. C’est pourquoi, elle peut éveiller en lui des réactions sonosomesthésiques, dues à la stimulation des tissus de son corps par le son. Cette réaction procure au fœtus de nouvelles sensations. Et il est en phase de réaliser, de manière inconsciente l’existence de son corps. Une expérience a par ailleurs, soutenu ces affirmations, en concluant que : « La perception sonosomesthésique (…) permet, de prendre conscience de nos os, de nos ligaments, de nos organes, de percevoir leurs réaction, et nous procure la sensation d’habiter nôtre corps[20]. »
La musique peut également constituer une ambiance sonore pour le fœtus, et peut l’amener à exécuter des mouvements. Et selon Adriana MARC : « Même si ces réactions motrices relèvent du réflexe, elles constituent une première ébauche de danse[21] ».
– Musique et cerveau
« Ecouter de la musique revient-il à manger quand on a faim, c’est-à-dire à satisfaire un besoin ? Ou bien est-ce plutôt comme admirer un coucher de soleil ou recevoir un massage, ce qui déclenche un mécanisme de plaisir sensoriel dans le cerveau ?[22] ».
Selon Daniel LEVITIN, la musique est un produit de l’évolution. Elle utilise des circuits cérébraux spécialisés et a un système de mémoire propre. La musique a donc un impact sur le psychisme. En ce sens, Edith LECOURT parle de « vécu sonore [23]» composé par les sensations, les perceptions, les émotions, les interprétations, ainsi que tout l’imaginaire suscité par les sons et les silences qui se mêlent pour former une expérience. Lorsque le vécu sonore fait l’objet d’une élaboration mentale, il forme l’enveloppe sonore. L’enveloppe sonore est une construction purement psychique, et le cerveau est capable de le mémoriser surtout lorsqu’il a rapport avec des émotions, en réveillant des sentiments profonds. C’est pourquoi certaines chansons peuvent entraîner des « flashs-back » lors des séances de relaxation en musicothérapie. La relaxation est une réaction analysée comme étant une compétence psychomotricien. Et dans une séance de musicothérapie, c’est la musique qui en est la source. En effet, elle peut indifféremment raviver des souvenirs, faire surgir des émotions, ou simplement détendre le patient.
Une des thèses de Daniel LEVITIN soutient que contrairement à l’idée selon laquelle la musique proviendrait uniquement de l’hémisphère droit de notre cerveau, elle serait, en réalité, en mesure de mobiliser presque toutes ses zones. Des découvertes récentes montrent que c’est le cervelet qui est la zone liée au rythme et aux réactions émotionnelles face à la musique. Ainsi, des individus possédant un faible quotient intellectuel peuvent avoir une augmentation de leur faculté émotive grâce à leur amour pour la musique. Le cortex auditif joue également un rôle en analysant les composants du son. De même, les régions frontales sont responsables de l’analyse de la structure et des attentes. Sans oublier le réseau de plusieurs zones formant le système méso limbique, à l’origine de l’excitation et le plaisir, et bien d’autres zones encore.
Ainsi, il est vrai que « Si l’on pouvait voir toutes les zones du cerveau qui extraient le signal du son pour le transformer en musique, on assisterait à un feu d’artifice d’impulsion, certaines coordonnées, d’autres non. C’est une sorte de symphonie neurale.[24] »
Aussi, avons-nous eu l’occasion de comprendre le fait que certaines zones du cerveau peuvent être atteintes sans que notre aptitude à la musique soit atteinte. De plus, ces découvertes sont d’autant plus intéressantes, étant donné qu’elles offrent la possibilité d’étudier le fonctionnement du cerveau par le biais de l’étude de la musique, sous le rapport biologique. C’est pourquoi, des spécialistes Français de la musique ont décidé d’agir ensemble dans l’accomplissement d’un projet intitulé « La spécificité de la musique : contribution de la musique à l’étude des bases neurales et cognitives de la mémoire humaine et application thérapeutiques[25] », qui sera financé par l’agence nationale de la recherche (ANR). L’intérêt de l’étude de la relation musique-cerveau est d’une part d’observer les régions cérébrales empruntées par la musique. Et d’autre part, de comprendre les réactions cérébrales en rapport avec la musique. Concernant ce dernier point, Daniel LEVITIN semble penser que le cerveau est prédisposé à interpréter les sons d’une certaine manière. Selon lui, la hauteur tonale est l’un des principaux vecteurs d’émotion musicale. Aussi, une note aiguë peut signifier la joie, une note grave la tristesse, le tempo rapide comme joie, etc.
- De la musique à la thérapie « La musicothérapie »
— définition
La musicothérapie fait l’objet de plusieurs interprétations par différents auteurs. Nous n’en retiendrons que quelques-unes d’entre elles.
- Étymologiquement, le terme musicothérapie est un dérivé des mots grecs « muses », et « térapia » qui signifie « donner du sens », et également « remettre en harmonie ». La musicothérapie est une technique de psychothérapie. Concrètement, elle fait de la musique un outil de soin, d’aide, de soutien ou de rééducation, en prenant en charge des personnes atteintes des troubles psychoaffectifs, des difficultés sociales ou comportementales, et des troubles sensoriels physiques ou neurologiques. C’est justement en considération des vertus attribuées à la musique qu’Edith LECOURT la définit comme étant : » le moyen de calmer les agités, de stimuler les apathiques, ou encore de chasser les idées morbides».
- L’association française en musicothérapie ( AFM), quant à elle, définit la musicothérapie comme étant : « Une pratique de soin, d’aide, de soutien ou de rééducation qui consiste à prendre en charge des personnes présentant des difficultés de communication et de relation. Il existe différentes techniques de musicothérapie, adaptées aux populations concernées : troubles psychoaffectifs, difficultés sociales ou comportementales, troubles sensoriels, physiques ou neurolo-giques. La musicothérapie s’appuie sur les liens étroits entre les éléments constitutifs de la musique et l’histoire du sujet. Elle utilise la médiation sonore ou musicale afin d’ouvrir ou de restaurer la communication et l’expression au sein de la relation, dans le registre verbal et/ou non verbal ». Cette définition privilégie l’utilisation du son et de la musique sous toutes formes dans le cadre d’une relation rééducative, psycho édicative. Ainsi, la musicothérapie consiste à rééduquer en favorisant la structure psychique, et à développer les capacités d’apprentissage. Le but étant d’atteindre l’autonomie ou la socialisation.
- M schneider quant à lui, a une vision anthropologique de la musicothérapie. Il la définit de manière suivante: « Nous avons déjà dit que le faiseur de pluie est aussi médecin. Mais, alors que les cérémonies de pluie matérialisent les chants divins, la musicothérapie cherche à sauvegarder et à fortifier la pure substance sonore de l’homme. Elle atteint son apogée quand elle s’efforce d’épurer et d’augmenter le volume normal de cette substance vitale dans l’intention de procurer l’immortalité à l’homme. » Cette définition octroie à la musique le rôle de médiateur entre le patient qui est en mal et Dieu, le guérisseur. Ainsi, selon cette conception, la musicothérapie utiliserait la médiation sonore ou musicale afin d’ouvrir ou restaurer la communication ou l’expression.
— les approches
- concernant l’approche de la musicothérapie sur la douleur :
La musicothérapie cherche à déclencher des émotions précises chez le patient grâce à la musique, afin d’accéder à un dialogue et une aide. Le but est de permettre l’expression, » là où sa fait mal[26]« . François JACQUEMOT parle notamment « d’outil sonore à vertu thérapeutique » pour le corps, mais aussi pour le corps affectif. La musicothérapie est donc d’une thérapie qui utilise les propriétés de la musique et du sonore comme support en vue de rétablir, de maintenir ou d’améliorer la santé mentale, physique ou émotionnelle du malade[27]. Le sujet centre de la thérapie est alors le patient, et la musique sera pour lui un moyen d’établir une relation thérapeutique avec le musicothérapeute. La thérapie consistera pour le patient à s’ouvrir à une plus grande expressivité, ou à une meilleure communication, afin de développer ses potentialités créatrices. De là, il pourra analyser son rapport avec son propre corps et évaluer son propre état affectif élémentaire, ou réagir autrement. L’issu de la thérapie dépend donc du patient, car c’est lui qui décide de l’impact que pourrait avoir la musique sur lui. C’est en ce sens que Perrine CAILLERET a dit que : « le musicothérapeute ne se pose pas tant la question de savoir “ce que la musique lui fait”, mais plutôt “ce que le patient fait de la musique qui lui est donnée à entendre ou à produire[28] ». Par ailleurs, Sylvie BRAUN en soutenant que « ce sont les émotions qui intéressent principalement le musicothérapeute ». Elle appuie notamment la théorie selon laquelle le mal communique à travers l’émotion. Elle évoque spécifiquement la théorie du « mal-à-dit ».
Néanmoins, des recherches ont constaté que le cerveau a tendance à réagir de manières prédisposées aux sons de la musique. Notamment au rythme, à l’harmonie, à la mélodie, au timbre, et à l’écoute. C’est en tenant compte de ces affirmations que l’on a pu déduire les approches de la musique face à la douleur par le biais de la musicothérapie. En ce sens, Jacques JOST, dans l’équilibre et santé par la musicothérapie, a fait la synthèse de ses premières recherches, qui consistait en l’analyse des réactions affectives et émotionnelles de plus de 5000 séances musicales faite sur des sujets ayant des personnalités, des cultures, des professions, des âges et des difficultés pschychologiques différents. Dans sa synthèse, Jacques JOST expose les nouvelles techniques en musicothérapie, ainsi que leurs différents domaines d’application. Son approche relevait du test psychomusical. Et il avait établi les vertus curatives de la musique.
PRINCIPAUX MODES D’ACTIONS PSYCHOPHYSIOLOGIQUES DE LA MUSICOTHÉRAPIE
MUSIQUE
Stimuli multidimensionnel
Harmonie Timbre Mélodie Rythme Ecoute
Sensoriel Cognitif Affectif Comportementale Psycho-social
Atténuation
de la conduction des fibres afférentes |
Encodage mnésique, détourne l’attention | Stimule
la production d’endorphine |
Psychomotricité, hypertonie musculaire | Favorise la relation soignant-soigné |
DOULEUR
Figure d’une technique standardisée de musicothérapie dans la prise en charge de la douleur
- Concernant l’approche de la musicothérapie sur le patient :
Il existe deux techniques d’approche possibles en musicothérapie dont la musicothérapie active, et la musicothérapie réceptive, mais on les étudiera ultérieurement. Toutefois, il convient dès lors de savoir qu’il est important que les séances de musicothérapie se fassent dans un lieu de silence, d’expression et un espace rassurant et réconfortant. De cette manière, le thérapeute pourra écouter le patient, et s’adapter son expression. Il peut arriver que l’individu exprime seulement le silence, mais il peut aussi user de l’expression faciale, de la posture par des mouvements corporels, et de la variation de l’attitude et de la respiration[29]. Le travail du musicothérapeute consiste alors à repérer les changements éventuels dès que la musique, permet l’émergence d’une relation. Il est également « l’acteur du jeu sonore, il soutient l’expression, la reformule, la relance, l’interroge, prend de la distance. Il mobilise l’écoute, favorise les échanges, les interactions, stimule la communication.[30] »
— Musicothérapie active
La musicothérapie est dite active lorsque le patient est amené à produire lui même en s’exprimant à l’aide d’objets, d’instruments, ou indirectement avec le corps ou la voix. Cette pratique a été inspirée des pédagogies actives de l’Orff-Shulwerk de Carl Orff, d’Edgar Willems ou Émile Jaques-Dalcroze, et de TOMATIS. Concrètement, la thérapie consiste en la mise en jeux des facultés psychomotrices du patient dans le but de l’inciter à produire du son. Et le patient peut adopter une expression musicale ou corporelle puisque chaque instrument et geste contribuent à l’expression de soi.
La séance de musicothérapie active se fait en groupe ou en relation duelle. Elle est idéale pour les patients atteints des difficultés de verbalisation ou de communication. De ce fait, ce type d’approche permet l’interaction, l’expression et la créativité du patient afin de permettre, sur le plan psychologique, l’établissement d’une communication. Ainsi, le rôle du musicothérapeute est d’établir une communication non verbale par une autre forme de dialogue. Pour y arriver, le musicothérapeute choisit des instruments faciles à manier, et les met à disposition du patient. La pratique des instruments rythmiques comme les percussions les maracas, les grelots et les xylophones sont privilégiés pour leurs facultés de rééducation et de coordination des mouvements. Mais, le musicothérapeute peut également choisir l’expression par le corps ou la voix. Chaque séance est alors différente, car chacune d’elles peut être modulable en fonction de faits et des objectifs fixés.
En pratique l’objectif, de la musicothérapie active consiste en : « l’ouverture de canaux de communication avec des personnes en rupture de communication[31] ». Ici, la thérapie fait en sorte que le patient puisse se servir de ses propres possibilités expressives ou créatives, de son écoute et même de ses silences. Ainsi, il pourra sortir du rôle passif auquel son handicap le contraint, pour s’investir. Pour arriver à ces fins, par la musicothérapie active, le musicothérapeute peut à travers le jeu et le son user de diverses méthodes tels la thérapie vocale, le chant harmonique thérapeutique[32], et l’euphonie vocale ou encore la musicothérapie vocale[33].
– Musicothérapie réceptive
Selon Herbert Von Karajan : « La musique est une réalité globalisante vécue, à la fois physique et spirituelle ; elle peut devenir objet de connaissance grâce à la réflexion »
.
La musicothérapie réceptive privilégie l’écoute des extraits musicaux ou des sons. Elle consiste pour le musicothérapeute à diffuser certains montages sonores ou des œuvres musicales. Le but recherché est de stimuler l’imaginaire et les émotions du patient. Pour pouvoir y arriver, le musicothérapeute doit trouver le son ou la musique qui peut toucher le patient. Aussi, pour trouver le programme sonore approprié au mal, il doit préalablement faire un entretient, afin de juger de la réceptivité musicale du patient, en référence avec technique de la docteure Jacqueline VERDEAU-PAILLES. C’est ce que l’on nomme « bilan psychomusical ».
Et selon Perrine CAILLERET il consiste en : « l’écoute de 10 à 12 extraits musicaux de styles très différents. Après chaque extrait, le musicothérapeute demande ce que cela lui a évoqué, ce qu’il a ressenti. Suite à ce bilan, le musicothérapeute choisira de prendre cette personne en musicothérapie réceptive ou en détente psychomusicale »[34]
La musicothérapie réceptive a donc pour but la verbalisation par la provocation du patient. Elle suppose donc que les personnes visées soient capables de s’exprimer par la parole et d’effectuer un travail psychique[35]. Selon la technique établie par Jacques JOSH et Edith LECOURT, « une séance réceptive associe trois fragments d’œuvres musicales dont l’audition successive constitue trois étapes thérapeutiques : apaisement, détente, relaxation. » Ainsi, l’effet recherché par la musicothérapie réceptive consiste à déclencher des émotions précises chez le patient, par le biais de la musique afin d’accéder à une conversation. En théorie, le sujet ressent des émotions, puis verbalise ses ressentis. Ainsi il extériorisera son mal et pourra par la suite s’en débarrasser.
Il existe trois types de séance de musicothérapie réceptive qui sont :
- La séance de trois œuvres
Elle consiste en un montage de trois extraits musicaux. L’objectif est de permettre au patient de ressentir un cheminement. À la fin de chaque morceau de musique, le patient pourra verbaliser. La première œuvre doit s’efforcer de traduire l’état du moment où se trouve le patient, la deuxième doit être une œuvre de transition permettant d’atteindre le troisième morceau qui aura pour but de tendre vers un mieux-être. Les extraits durent en moyenne entre cinq et six minutes. L’approche de Sylvie BRAUN correspond plus à cette type de séance car elle soutient que l’individu doit de prime abord percevoir le rythme pour pouvoir laisser place à l’émotion et enfin parvenir à la représentation. Elle rapproche assimile sa technique au triangle oedipienne du père de la mère et de l’enfant. Aussi, la technique de Sylvie BRAUN consiste en la diffusion d’une première œuvre qui prend en compte les goûts du patient, suivit d’une deuxième œuvre qui se veut neutre dans le but d’annuler la première ; et enfin la troisième œuvre qu’elle qualifie de musique « d’ouverture » destinée à amener le bien-être.
- La séance de deux œuvres
Cette séance associe deux extraits diffusés. Le patient, à la fin de chacune d’elles, devra choisir entre les deux extraits celui qu’il a préféré.
- La détente psychomusicale[36]
Cette technique peut être indépendante de la musicothérapie réceptive.
TECHNIQUE STANDARDISÉE DE MUSICOTHÉRAPIE, LE MONTAGE EN « U »
La figure de technique standardisée de musicothérapie, montage « U » démontre comment le rythme de la musique arrive à détendre le patient, afin qu’il puisse ressentir des émotions et converser. Mais pour arriver à la communication, la musicothérapie réceptive dispose de deux techniques. La première est une approche individuelle, et le second se fait en groupe. La musicothérapie réceptive individuelle consiste à amener le patient dans un état hypnotique de relaxation grâce aux variations des composantes musicales comme les fréquences, le rythme, la formation orchestrale et le volume. Les montages en U doivent durer 20 min minimum, et sont décomposées en plusieurs phases de 5 à 6 morceaux. Ces morceaux de 3 à 4 minutes chacun, fondus et enchaînés, amènent progressivement le patient à la détente entre vieille et sommeil. Le patient est allongé (état favorisant la décontraction musculaire), les yeux fermés, l’éclairage réglé au minimum. L’implication et la coopération du patient sont primordiales. La détente, le détournement de l’attention, la relaxation profonde, et la qualité de la relation patient-soignant sont des facteurs certains du bien-être.
C’est donc précisément, dans cette technique que la figure standardisée de musicothérapie, montage « U » trouve tout son intérêt. Tandis que la technique de la musicothérapie de groupe a plutôt pour but de mettre en place l’échange au sein du groupe. Dans cette technique, le musicothérapeute peut demander aux patients d’exprimer leur préférence, ou leur choix, après écoute de deux musiques différentes.
– Détente Psychomusical
La détente psychomusical est destinée à procurer du bien-être. Il s’agit, comme l’indique son nom, d’un moment de détente accompagné par un cheminement musical. Grâce à une bande sonore soigneusement choisie par le musicothérapeute, le patient pourra relâcher la pression du moment pour arriver au bien-être. La détente psychomusicale est un prolongement de la musicothérapie réceptive, et elle est suscitée pour ses effets de détente et de relaxation. Elle propose au patient un cheminement musical depuis l’état de vigilance vers la détente. La thérapie applique donc également la « Bande en U »[37]. La mise en œuvre de la détente psychomusical repose sur la diffusion d’une ambiance sonore de 35 à 45 minutes qui a pour but de rendre un cadre vécu plus agréable. Le musicothérapeute doit prendre le patient dans son état de vigilance et l’emmener par la musique, vers un état de bien-être. C’est un enchaînement en « U » :
Voici un exemple de cheminement : 1ère œuvre : un orchestre à corde, puis un quatuor, un trio, un duo, un solo (correspondant à la plage de détente), ensuite duo, trio, quatuor, et orchestre à corde. La plage de détente doit durer environ une dizaine de minutes.
Les paramètres qui rentrent en jeu : l’intensité (différence de volume suivant les morceaux), la hauteur (commencer par des œuvres aigues ou médium pour arriver à l’œuvre de la plage de détente plus grave), la pulsation (diminuer le temps petit à petit de chaque morceau), le timbre (amener à un instrument solo).
Les morceaux doivent avoir la même tonalité ou des tons voisins. Il est préférable de garder la même époque, le même style.
1ère œuvre 9èmeœuvre
2ème œuvre 8ème œuvre
3ème œuvre 7ème œuvre
4ème œuvre 6ème œuvre
[Plage de détente]
5ème œuvre
Ce type de musicothérapie possède plusieurs vertus, et la personne autiste peut pleinement en bénéficier.
En effet, puisque la musique permet de maîtriser les réactions du corps et l’émotivité devant la souffrance physique, la détente psychomusicale peut contribuer à la préparation psychologique de l’autiste, en faisant en sorte qu’il se détende, en le distrayant, et en le calmant. De plus, grâce à sa faculté revitalisante, la musique peut, pénétrer le corps et faciliter le rétablissement des rythmes fondamentaux de l’ensemble de l’organisme, en les synchronisant. Pour un autiste souffrant de déficience de mobilité, la thérapie aidera à contrôler peu à peu ses mouvements. En outre, la musique a également des vertus stimulantes qui peuvent provoquer une reprise des contacts sociaux et encourager de nouvelles motivations. Ainsi, cette thérapie peut également aider l’autiste à surmonter ses troubles de communication et à extérioriser ses émotions. Et enfin, associée à des méthodes verbales, la musique peut contribuer à la rééducation des sens an alliant rythme, intensité et émotions. Ces vertus de la musique sont plus qu’utiles à l’autiste atteint des troubles sensoriels.
Ainsi, on peut considérer que la détente psychomusicale peut traiter, l’ensemble les troubles, des autistes. Le principe de la thérapie consiste à viser le bien-être en passant par la détente à partir de l’écoute musicale.
La figure qui va suivre, démontre comment le cerveau réagit à la musique, depuis l’état habituel à la détente, et vice-versa.
- Caractéristique du trouble du spectre autistique (TSA)
Le trouble du spectre autistique (TSA) regroupe la combinaison d’une triade dont les troubles autistiques (manifesté par des troubles sensoriels), le syndrome de l’asperger, et le trouble envahissant du développement-non spécifié (TED-ns).
Toutes les personnes atteintes du TSA présentent un déficit commun, la difficulté à comprendre les codes sociaux et la communication. Cela va de l’identification des éléments du visage, qui s’explique par ce que l’on appelle la communication non verbale et gestuelle. Cela atteint également la compréhension des niveaux de langage ou communication verbale. Ces déficits propres aux troubles autistiques peuvent se présenter seuls ou additionnés par des troubles sensoriels de l’asperger comme l’hypersensibilité auditive, tactile, problème vestibulaires ; et des troubles moteurs qui peuvent être manifestés par des difficultés pratiques pour la motricité fine.
Mise à part le syndrome de l’asperger, d’autres comportements difficiles peuvent également aux troubles autistiques. Il s’agit des troubles envahissants du développement-non spécifié (TED-ns), provoqués par les changements ou modification inexpliqués de l’environnement. Elle entraine l’hyper-sélectivité de la mémoire de la personne autiste par la généralisation. Ces types de troubles peuvent faire apparaître la colère, l’agressivité, les stéréotypies et automutilation. Ces comportements ont également des origines psychologiques entrainant l’incapacité à communiquer, l’ennui, ainsi que des problèmes sensoriels tel la douleur.
- Historique et définition
Le terme de Troubles du Spectre Autistique (TSA) est une nouvelle version du terme Troubles Envahissants du Développement (TED). Selon l’ancienne classification des troubles mentaux du DSM-IV-TR[38], il existait cinq troubles envahissants du développement dont:
- l’autisme (ou trouble autistique);
- le syndrome d’Asperger;
- le trouble envahissant du développement non spécifié;
- le syndrome de Rett;
- le trouble désintégratif de l’enfance.
Les TED étaient considérés comme des « troubles affectifs jusqu’à ce que les investigations scientifiques révèlent qu’il s’agissait d’un ensemble de variations neurodéveloppementales du fonctionnement cérébral pouvant s’exprimer par un large éventail de symptômes. [39]» Malgré cette définition, il reste difficile de déterminer les critères et les limites précises entre les sous-groupes des TED sus-énumérés. La principale raison de la difficulté réside dans le fait que les personnes atteintes de TED présentent des symptômes très variables. Et le degré de dysfonctionnement est mesurable en présence ou en l’absence de conditions médicales ou psychiatriques associées. C’est pourquoi plusieurs cliniciens se réfèrent à un concept dimensionnel plutôt que catégoriel, reconsidérant l’expression « troubles envahissants du développement » trop communément employée.
Tenant compte de cette disparité du terme « trouble envahissant du développement », la DSM-V-TR, a introduit la notion de « spectre autistique », qui rend compte de l’aspect dimensionnel du concept. Les « troubles du spectre de l’autisme » (TSA) regrouperaient alors dans une catégorie inclusive :
- l’autisme ou trouble autistique;
- le syndrome d’Asperger;
- le trouble envahissant du développement non spécifié (TED-ns).
La nouvelle classification de la DSM-V-TR a pour particularité de préciser le niveau d’atteinte des différentes sphères du développement et du fonctionnement de la personne autiste, avec l’existence ou non de conditions associées. Dans le but de faciliter le dépistage de la TSA chez l’enfant, chez l’adolescent et chez l’adulte.
- Classification
Sur le plan clinique, la personne autiste ne présente aucun symptôme biologique. C’est pourquoi on confond souvent la maladie avec la surdité, les troubles émotionnels, le retard mental ou la lenteur dans le développement.
Les TSA sont variables selon le niveau de langage atteint, l’âge, les capacités cognitives et la présence ou l’absence de conditions associées. En effet, chaque autiste a ses caractéristiques propres quant à sa capacité cognitive, sa capacité langagière et ses capacités de socialisation. Chacun se situe différemment sur un plan allant de la déficience intellectuelle à la douance, de l’absence totale de langage à une grande volubilité, ou d’une apparente absence d’intérêt pour la socialisation à un désir d’entrer en relation.
Depuis la DMS-V, il est aujourd’hui raisonnable de considérer l’autisme comme étant un désordre neurodéveloppemental d’origine biologique impliquant un grand nombre de facteurs génétiques. Quelques données[40] démontrent ses affirmations, soit notamment :
- le risque que la fratrie présente un TSA se situant entre 5 % et 10 % (allant même jusqu’à près de 19 % pour certaines formes, selon une étude récente) comparativement à environ 1 % dans la population générale;
- la concordance pour les TSA étant de 60 % à 90 % chez les jumeaux homozygotes comparativement à 5 % à 10 % chez les jumeaux dizygotes.
Par ailleurs, des facteurs environnementaux pourraient accentuer la variabilité des TSA. Néanmoins, les TSA sont tous caractérisés par des atypies dans quatre domaines de compétences :
- la socialisation;
- la communication;
- le jeu et l’imagination;
- la variété des intérêts et des comportements
- Diagnostique
Il est important de déceler tôt la TSA afin d’aider au mieux l’enfant. Pour y arriver, les centres de diagnostic se basent soit sur des critères psychologiques, soit sur des critères génétiques. Mais généralement, pour conclure à la présence d’un TSA, il faut s’appuyer sur l’identification d’un ensemble de comportements propres à chacun des sous-types cliniques de la TSA.
Selon les critères de diagnostique du DSM-V, seules deux catégories de symptômes subsistent dont:
- Les « troubles de la communication sociale ».
- Les «comportements restreints et répétitifs ».
Les troubles de la communication sociale relatifs aux TSA se manifestent par des difficultés dans la communication et par la persistance de l’interaction sociales dans des contextes multiples. Ils se présentent sous forme de déficits dans le cadre socioémotionnelle et dans les comportements par des communications non verbales utilisées pour les interactions sociales. Tandis que les comportements restreint et répétitif sont des mouvements moteurs dus à l’utilisation d’objets ou de vocaux stéréotypes ou répétitifs. Ils se concrétisent par des troubles anxieux de comportementaux.
Les examens spécifiques les plus souvent envisagés pour dépister les TSA s’appuient sur l’ensemble de ses comorbidités sus-évoquées. Aussi, les dépistages spécifiques à disposition sont :
- L’électroencéphalogramme (EEG)
Lorsque les personnes autistes présentent des troubles neurologiques ou de retard mental, ils sont sujets à une grande possibilité d’épilepsie. L’EEG a vocation à dépister ce genre de réaction. Néanmoins, il devrait donc être réservé aux autistes dont les comportements cliniques laissent paraître une épilepsie ou une présence de régression dans leur développement.
- Les examens d’imagerie médicale
La tomodensitométrie ou la résonnance magnétique cérébrale permet de diagnostiquer l’existence des disfonctionnement neurologiques associés à la TSA. Aussi, elle est recommandée lorsqu’il existe des conditions justifiant l’évaluation des structures cérébrales. Il en est ainsi des signes neurologiques ou neuropsychologiques clairs, de la régression, ou de la présence de convulsions ou d’épilepsie.
- L’investigation génétique
Lorsque la personne autiste a plus d’un cas de trouble de développement dans sa famille proche, il est recommandé d’opérer une investigation génétique. À ce jour, il est possible de préciser certaines causes génétiques des signes de dysmorphisme ou de retard mental associés aux TSA. C’est le cas de la duplication maternelle 15q1-q13 ou 16p11, ou le syndrome du X fragile, le typage génétique dont le test est une expertise en génétique doit être envisagé en présence de signes d’appel.
- L’investigation métabolique
Des examens métaboliques sont indiqués en présence de signes cliniques et physiques comme la léthargie, les vomissements cycliques, ou les convulsions précoces, etc. Et plus encore, s’il y a eu refus de soumettre l’enfant à sa naissance au dépistage des maladies métaboliques.
Par ailleurs, il existe plusieurs autres types d’évaluation comme les critères de la CIM-10 pour l’autisme infantile, l’échelle de Vineland pour l’évaluation du niveau d’adaptation social, le Leiter International Scale, pour l’épreuve d’intelligence, l’utilisation de tâches diversifiées de langage sous forme d’inventaire de développement réceptif, expressif, et communicatif, etc.
- Troubles envahissants du développement non spécifiés (TED-ns)
Les troubles autistiques peuvent être isolés ou accompagnés par d’autres maladies plus ou moins envahissants. Il peut s’agir des troubles envahissants du développement ou TED-ns. Ce type de trouble peut toucher plusieurs parties du secteur de développement du patient. Il fait référence à : « une altération sévère et envahissante du développement de l’interaction sociale réciproque associée à une altération des capacités de communication verbale ou non verbale, ou à la présence de comportements, intérêts et activités stéréotypés[41] ».
Ainsi, les troubles envahissants du développement non spécifiés ou (TED-ns) se manifestent par :
- L’altération du développement social du patient
Les personnes autistes manquent d’empathie, car ils ont du mal à apprécier les signaux sociaux comme les expressions faciales et intonation de la voix. Aussi ont-ils tendance à s’isoler, et à éviter toutes interactions avec d’autres personnes.
- L’emploi de communications déviantes
Les autistes sont en proie à des difficultés permanentes du langage. Un grand nombre d’entre eux n’y accède même pas. Ainsi, sur le plan expressif, l’autiste a du mal à « sortir de sa bulle ». Aussi, se cantonne-t-il aux besoins quotidiens comme la nourriture ou la toilette. On remarque alors un certain manque de réciprocité dans leur conversation. La gêne ressentie par les autistes au niveau de la communication n’est pas seulement verbale, puisqu’elle atteint aussi l’utilisation des gestes sociaux[42].
- L’adoption de comportements stéréotypes
Les personnes autistes supportent mal le changement. De ce fait, ils ont tendance à être répétitifs dans leur activité quotidienne. Leur comportement est variable. Il peut consister à se balancer, à être auto agressif, ou même à s’automutiler.
- Particularités sensorielles (perceptif et cognitif)
L’intégration sensorielle peut être définie comme étant : « un processus neurophysiologique qui permet de filtrer, d’organiser et de traiter l’information sensorielle provenant de notre corps et de l’environnement [43]».
Normalement, l’intégration sensorielle nous permet de capter, et de sélectionner les informations que nous voulons prendre en compte[44]. Il en est différemment pour les personnes atteint de troubles autistes puisque leur attention est sélective à cause des troubles du développement qu’ils subissent. Ainsi, selon Lemay, « les autistes ne parviennent pas à donner un sens aux stimulations qui leur sont adressées dès que celles-ci dépassent l’aspect purement sensoriel ». C’est donc la raison pour laquelle, quarante pour cent des personnes autistes souffrent de troubles sensoriels. Et sur le domaine auditif, des troubles sonores binaires sont observés chez les enfants autistes et sont souvent confondus avec la surdité. Pourtant, ils peuvent également être hypersensibles à certains bruits quasi imperceptibles par l’entourage. Catherine BARTHÉLEMY parle notamment de «réactions paradoxales au monde sonore»[45].
Et selon Anne-Marie LATOUR :« L’enfant devient captif d’un petit réseau de sensations qu’il répète sans élargir l’éventail de ses expériences et sans devenir un sujet actif au sein d’un environnement reconnu, représenté et interpellé [46]». Par ailleurs, LEMAY illustre la position d’un enfant autiste face aux informations sensorielles en disant : « Des catégories perceptuelles binaires se constituent, mais le petit autiste semble avoir une énorme difficulté à dépasser la quête répétitive d’un stimulus psychosensoriel restreint pour entrer dans l’univers de la représentation».
– conséquences immédiates de l’inconfort sensoriel
Les personnes autistes souffrent de particularités sensorielles caractéristiques des troubles autistes. Ces troubles concernent les modalités sensorielles de l’autiste, tels l’ouïe, la vision, l’odorat, le toucher, ou le vestibulaire. De ce fait, son environnement peut inspirer l’angoisse, pour un autiste, puisqu’il ne peut le maitriser. Les informations extérieures perçues seront alors analysées comme une intrusion.
– conséquence de l’existence des particularités sensorielles
L’existence de particularités sensorielles pousse la personne autiste à s’inventer des stratégies compensatoires qui visent à le protéger de ces intrusions. Sa réaction est souvent caractérisée par une hypo ou hypersensibilité. Mais il arrive également qu’il recherche des stimulations sensorielles inhabituelles, ou adopte l’indifférence à l’égard des autres. Moins souvent, l’autiste peut percevoir différemment la douleur et s’offre à la mutilation.
Les problèmes sensoriels sont souvent à l’origine de différent comportement comme la rigidité alimentaire, et la peur de certains lieux ou de certains contextes sensoriels
- Communication verbale et non verbale
« Dans toutes les pathologies de la parole, le domaine qui a le plus contribué à nourrir la pensée sur la voix est l’autisme » André GREEN
Les personnes autistes souffrent d’une déficience qui affecte la parole et le langage, généralement à des degrés divers. Bien que certains restent muets, d’autres accèdent au langage. Mais même ces derniers ont beaucoup de difficultés à comprendre les productions sonores des autres, et à exprimer des sentiments ou des émotions. Accepter de parler signifie accepter de s’ouvrir à l’autre. C’est pourquoi la personne autiste lie la parole à un danger. Jean-Claude MALEVAL confirme ces affirmations en disant que la voix de l’autre peut être source d’angoisse chez les personnes atteinte des troubles autistiques. De plus, ils peuvent aussi être perturbés par leur propre voix.
Dans sa façon d’être, la personne autiste rejette toute dépendance à l’égard de l’autre. Il ne peut ou ne veut céder sa voix. Pourtant, selon LACAN, la voix est « l’objet de jouissance » qui commande l’investissement du langage. Et plus encore, selon MILLER « La voix est subjectivement assignée à l’autre ». Ainsi, la personne autiste qui se refuse à partager sa voix avec l’autre adopte une façon de parler qui se démarque. On peut noter :
- L’originalité de leurs verbalisations caractérisées par une écholalie à retardement ou un langage de perroquet dépourvu du « je »
- La particularité de leur voix qui sonne de manière artificielle, où les mots sont dénués d’expressivité.
- La spécificité de leur énonciation : la personne autiste semble parler dans le vide. Il parle sans s’impliquer dans ce qu’il dit, sans prendre appui sur ses ressentis. « Il parle à la condition de ne pas dire.[47] »
Ainsi, la personne atteinte du trouble autistique, même ayant la faculté de parler, peut se refuser à l’employer par peur. C’est pourquoi souvent il adopte des comportements afin de s’en protéger. Jean-Claude MALEVAL énonce quelques stratégies adoptées par la personne autiste :
- Le «mutisme » est sans doute la manière la plus radicale de retenir la jouissance vocale.
- Il peut aussi parler tout seul ou parler pour ne pas dir Jean-Claude MALEVAL parle d’un « verbiage autistique » dans lequel la voix est gommée. Elles dévient
- Beaucoup d’entre eux utilisent une langue de « l’intellect dépourvue d’affect », impossible à partager avec d’autres
- Ou encore, il peut mettre en place une « langue personnelle et privée ». Pour empêcher les autres de discerner ses sentiments.
Pour que l’apprentissage et l’intégration profonde des expériences sensorielles aient lieu, elles doivent être émotionnellement partagées. L’intérêt d’une thérapie psychomotrice auprès de ces enfants relève de l’importance que le psychomotricien accorde au jeu et à la relation. Le jeu replace l’enfant dans son statut de sujet, tout en favorisant l’accès à la représentation.
– Particularités comportementales
La rigidité cognitive des personnes autistes font que, leur réaction présente des particularités. Des chercheurs ont établi que c’est la plasticité du cerveau des autistes qui les oblige à traiter certaines informations sensorielles de façon accrue. Selon les dires du docteur Laurent MOTTRON l’origine de cette défaillance serait de nature génétique. Aussi, il énonce que l’autisme résulterait d’une « réaction du cerveau à un facteur génétique, essentiellement des mutations. Chez les personnes dont le seuil de déclenchement d’une réaction plastique est moindre que dans la population en général, ces mutations engendreraient une réaction plastique du cerveau qui ciblerait certaines fonctions, surtout non sociales. »
Ainsi, le cerveau des autistes serait sélectif, et a tendance à privilégier les contenus de la vie quotidienne, au détriment des données à caractère social. Ainsi, chez l’autiste, le cerveau néglige les ressources cérébrales requises pour la socialisation, ralentissant ainsi, le développement des relations sociales de l’individu.
– Développement de comportements inhabituels
L’individu atteint de l’autisme développe des troubles du spectre de l’autisme (TSA)[48]. Ce syndrome a, en grande partie, pour origine des troubles neurologiques, et a pour conséquence l’apparition de comportements atypiques ou inhabituels. En général, elles se manifestent par des difficultés de comportement, de communication et d’interaction sociale. Mais, selon le DSM-V, la catégorie des TSA regroupe le trouble autistique (manifesté par des troubles sensoriels), le trouble envahissant du développement-non spécifié[49] (TED-ns), et le syndrome d’asperger. Les deux premières font l’objet de traitement à travers ce mémoire. Seule nous intéresse le syndrome d’asperger. Il s’agit d’un trouble de développement d’origine génétique. C’est un handicap qui se distingue par le fait que la personne autiste conserve ses capacités intellectuelles bien que les troubles neurologiques affectent le fonctionnement de son cerveau. Toutefois, les autistes atteints du syndrome de l’asperge ont des difficultés à interagir avec d’autres. Aussi, fréquemment leur comportement consiste à s’isoler.
– L’audition
Les troubles de l’audition sont fréquents chez les enfants autistes. Ils perçoivent les sons d’une manière inhabituelle. Ces types de trouble sensoriel diffèrent de la surdité. Selon le témoignage de Daniel TAMMET, un autiste asperger: « Ecouter les autres n’est pas facile pour moi. Quand quelqu’un me parle, j’ai souvent le sentiment d’être en train de chercher une station de radio, et une grande partie du discours entre et sort de ma tête comme des parasites. Avec le temps, j’ai appris à en saisir assez pour comprendre de quoi on me parle (…) [50]».
Henri EY, lui, parle d’« hallucination », qu’il définit comme « une perception sans objet à percevoir ». Les hallucinations peuvent affecter chaque sens isolément ou simultanément, mais le cas le plus rependu concerne l’audition. Des études ont également supposé que les troubles de l’audition pouvaient atteindre les personnes autistes atteints de troubles autistiques et ceux avec les TED-ns.
En principe, la voix humaine constitue l’axe des interactions sociales. Chez l’autiste, il y a une défaillance cérébrale en rapport avec le traitement des signaux vocaux. En effet, il arrive qu’à l’écoute d’une voix, leur sillon temporal supérieur, chargé de traiter les informations vocales défaille. En outre, l’imagerie cérébrale montre que les sujets autistes et non autistes traitent les sons non vocaux de la même façon. Ainsi, les voix sont, chez les autistes, perçues au même titre que les autres sons.
-La vision
Il existe deux types de vision, dont la vision focale et la vision ambiante. La plupart des personnes autistes possèdent la vision focale, elle correspond au champ visuel central, et sont indépendants des mécanismes sensoriels. Par contre, ils n’ont pas accès à la vision ambiante. Selon le Docteur Melvin KAPLAN : « Nous faisons appel à notre vision ambiante pour évaluer la distance qui nous sépare des objets et des gens, la vitesse à laquelle ils se déplacent, la signification du langage corporel de nos interlocuteurs, voire même les limites de notre propre corps et celle de notre environnement. Il suffit que cette vision soit perturbée pour que le monde nous paraisse étrange et effrayant»[51]. Ainsi, la vision ambiante recouvre l’ensemble du champ visuel, et est intégrée aux autres mécanismes sensoriels.
Le handicap de la personne autiste par rapport à la vision ambiante s’explique par le fait que malgré son acuité visuelle, il ne peut pas voir correctement. Cette faculté étant en adéquation avec le cerveau[52]. Et puisque, la personne autiste présente des troubles neurologiques l’empêchant d’interpréter les informations d’ordres visuelles, il interprète faussement les images visuelles que lui revoient ses yeux.
– La perception des visages
La personne autiste est en proie à des défauts d’ajustement de la zone cérébrale appelée aire fusiforme des visages (AFV). C’est pourquoi il manque d’attention, et a beaucoup de mal à reconnaître les visages. Selon Maximilian RIESENHUBER, pour discerner les différents types de visage, les neurones doivent être précisément ajustés. Pour arriver à cette théorie, il a mené une étude avec 15 participants autistes adultes. Suite à un test qui a consisté à différencier deux visages. Les résultats ont démontré que : « ceux dont les anomalies comportementales étaient les plus marqués étaient également ceux dont les neurones étaient le moins finement ajustés »
Ainsi, conformément aux dires de RIESENHUBER, le manque de différenciation neuronale des visages permet difficilement aux personnes atteintes du trouble autistique d’identifier leur interlocuteur ou de comprendre les expressions faciales, ce qui, de ce fait, limite leur interaction sociale.
- Le moi peau (Didier ANZIEU) et chez l’autiste ?
« Le Moi-peau est une structure intermédiaire de l’appareil psychique : intermédiaire chronologiquement entre la mère et le tout petit, intermédiaire structurellement entre l’inclusion mutuelle des psychismes dans l’organisation fusionnelle primitive et la différenciation des instances psychiques correspondant à la seconde topique Freudienne. Sans les expériences adéquates au moment opportun, la structure n’est pas acquise, ou plus généralement, se trouve altérée[53] ». Didier ANZIEU
Dans le concept de Moi-peau, Didier ANZIEU met l’accent sur l’importance du » holding » de WINNICOTT ou le concept de la relation première d’une mère soutenant le corps de son enfant. Les soins prodigués à l’enfant trouvent leurs importances dans sa structure psychique future. En parlant d’autisme, ANZIEU s’appuie sur les notions de « fantasme intra- utérin » et de « fantasme d’une peau commune ». Le fantasme intra-utérin illustre la sollicitation mutuelle existant entre le bébé et son univers maternant. Tandis que le fantasme de peau commune est représente l’interface où la mère et l’enfant se tiennent dans une dépendance symbiotique en symétrie, attache qui sera l’ébauche d’une séparation à venir.
Les enveloppes autistiques se traduisent, selon ANZIEU, par la fixation du fantasme intra-utérin et l’échec du fantasme d’une peau commune. Ainsi, selon ses dires, quelles que soient les raisons de cet échec, « le bébé par une réaction prématurée et pathologique d’auto organisation négative […] se protégera dans une enveloppe autistique et se retirera dans un système fermé, celui d’un œuf qui n’éclot pas ».
- Olfaction
Le sens olfactif est celui qui permet de sentir les odeurs. Chez la personne autiste, on remarque un hypo ou une hyper sensibilité olfactive. Ce trouble du comportement fait partie des troubles du spectre autistiques. Et l’hypersensibilité olfactive peut être marquée par le haut-le-cœur, des nausées ou vomissements. Des odeurs précises en sont à l’origine de ces sensibilités. Il en est ainsi des odeurs prégnantes et persistantes, ou odeurs corporelles par la transpiration. Les parfums, ainsi que les odeurs de synthèse sont également difficiles à supporter pour les personnes autistes.
On peut aussi retrouver des comportements de flairage. Comme sentir la nourriture ou des éléments nouveaux. C’est en considération de ce comportement distinctif des autistes, que des chercheurs ont déduit qu’un test olfactif pourrait aider à déceler l’autisme. Pour concrétiser leur théorie, ils ont confronté à des odeurs agréables et désagréables 18 enfants atteints de troubles du spectre autistique et 18 enfants normaux. Tous les sujets ont été exposés 10 fois aux odeurs agréables et 10 fois à des odeurs désagréables. Selon les chercheurs, les enfants avec des caractéristiques normales de développement ajustent rapidement leur respiration soit, en prenant une profonde inspiration, soit en limitant l’ingestion d’air. Les enfants autistes, eux, continuent de respirer normalement, quelle que soit l’odeur.
C’est pourquoi le professeur SOBEL[54] affirme que : « Nous pouvons identifier l’autisme et sa gravité avec une précision significative en moins de 10 minutes, en utilisant un test qui est entièrement non-verbal et ne comporte aucune tâche à suivre. Cela entraîne l’espoir que ces conclusions pourraient former la base pour le développement d’un outil de diagnostic applicable très tôt, comme sur des nourrissons de quelques mois seulement. Ce diagnostic précoce permettrait une intervention plus efficace. »
- L’équilibration, la proprioception
La personne autiste présente des stimulations vestibulaires, ayant souvent pour conséquence des balancements. En principe, c’est grâce aux récepteurs situés à l’oreille interne, le cerveau ou plus exactement le système nerveux central reçoit les informations concernant la position du corps dans l’espace, notamment sur la vitesse et la direction d’un mouvement. « L’activité posturale est ainsi une activité perceptivo motrice qui fonctionne selon le principe de perception, traitement de l’information, puis mise en action des muscles[55] ». Chez la personne autiste, l’équilibration, qui est une fonction neurophysiologique permettant l’équilibre, est souvent perturbée avec des compétences et des déficits hétérogènes.
Il existe chez l’homme deux types d’équilibre, dont l’équilibre statique, qui implique l’immobilisation et contrôle des membres, et l’équilibre dynamique responsables de l’équilibre. Et les cas de maladresse motrice de l’autisme affectent l’un ou l’autre de ces équilibres. Soit l’équilibre statique est en place, mais l’équilibre dynamique est difficile. En ce cas, la personne autiste aura du mal à pratiquer la course ou à se tenir sur un pied. A l’inverse il est possible à la personne atteinte du trouble autistique de se maintenir en équilibre sur des hauteurs, mais il sera dans l’incapacité de se tenir immobile quelques instants.
- La maladresse motrice
La motricité est une fonction qui développe des compétences qui concourent à l’ensemble du développement intellectuel. Pourtant, la personne autiste, elle, a beaucoup de mal à coordonner des manipulations ou des mouvements complexes comme attraper, tracer ou enfiler. Son handicap est dû à la lenteur de sa motricité. La maladresse motrice fait partie du syndrome de l’asperger, qui est d’origine neurologique, mais aussi psychologique. Et elle peut par exemple résulter d’un manque d’affection.
Les problèmes avec la motricité chez les personnes autistes peuvent apparaître de différentes manières. Si certains d’entre eux présentent une motricité globale altérée, d’autres peuvent avoir des difficultés reliées à la motrice fine. Néanmoins, ces deux cas résultent conjointement, des problèmes neurologiques et de traitement sensoriel. La défaillance de la motricité globale affecte l’équilibre. C’est pourquoi la personne autiste a du mal à pratiquer du sport. Par contre, les difficultés liées à la motrice fine atteignent le contrôle moteur des muscles oro-moteurs. En ce cas, l’autiste peut perdre la maîtrise du langage.
- Les interventions
Actuellement, il existe plusieurs façons d’intervenir face aux troubles sensoriels autistiques. Il ne faut pas sous-estimer la première intervention, qui consiste à déceler rapidement le handicap pour mieux aider l’autiste. Il d’ailleurs été dit qu’ « Il ne peut y avoir d’accompagnement spécifique adapté, sans une bonne connaissance de ce qu’est l’autisme, et de son retentissement sur les personnes qui sont atteintes[56]».
Les interventions existantes tournent autour de la rééducation et des adaptations.
- La rééducation:
Elle est adoptée des approches sensorielles par un travail d’accoutumance et de sensibilisation. Cette intervention associe les thérapies cognitives et comportementales (TCC) à partir des scénarios sociaux de Carole Gray, et du travail sur les mécanismes cognitives afin de démarrer le processus d’attention et/ou d’inhibition.
- Les stratégies d’adaptation posturale:
Ce type d’intervention regroupe les outils ou gestes pouvant aider la personne autiste à mieux appréhender son environnement. Il peut s’agir de gestes relativement simples comme annoncer un bruit d’aspirateur et sa duré, ou l’établissement d’un menu à l’avance, ou encore l’emploie d’un accessoire comme un casque auditif, des vêtements serrés, des vestes ou couverture, etc.
- Une approche sensorielle :
Il s’agit de la thérapie développée par SNOEZELEN. Il s’agit d’une approche basée à la fois sur des stimulations multi sensorielles et une relaxation. Le concept consiste à apporter des stimulations visuelles, kinesthésiques, olfactives et auditives afin de favoriser l’ancrage corporel en faveur d’un mieux-être[57].
- La musicothérapie
La musicothérapie est une méthode peu connue, puisqu’elle est relativement nouvelle pour les patients autistes. Pourtant la musicothérapie permet l’amélioration du tempérament et de l’apprentissage de l’autiste. La musique étant un moyen de relier les fonctions verbales et non verbales dans le cerveau, elle est un excellent traitement pour les autistes éprouvant des difficultés de communication. La musicothérapie utilise de nombreux jeux, en utilisant la musique pour aider à améliorer les compétences sociales et comportementales. Elle encourage également le contact visuel tout en chantant ou en utilisant des instruments. La thérapie musicale peut donc aider les personnes autistes à se socialiser.
Les autistes ont souvent des capacités musicales qui dépassent ses autres capacités. Et la musicothérapie se présente comme étant un moyen pouvant aider les autistes à surmonter leurs troubles de développement social et du langage. La musicothérapie est particulièrement intéressante dans la mesure où la manière dont l’autiste utilise la parole importe peu, puisqu’il peut participer aux séances en tapant ou en fredonnant. La musicothérapie est en outre, un moyen de communiquer ses émotions et de développer sa mémoire.
Ainsi vu l’étendue des bienfaits de la musique sur l’autisme, le résultat de la conjonction des autres techniques avec la musicothérapie peut être surprenant pour les personnes autistes. Mais la théorie se vérifie- t- elle également en pratique ? Pour le savoir, nous allons aborder la deuxième partie de ce mémoire qui se porte sur la clinique.
DEUXIEME PARTIE – CLINIQUE
1-Présentation de l’association
– historique
Mon stage de formation a été accompli auprès de l’association EURECAH (Education Utile Régionale pour les Enfants Citoyens Atteints d’un Handicap). Elle a été créée le 25 janvier 1999, et se situe en France, au niveau de la commune de Saint-Chamond (Région Rhône Alpes). En février 2011, un agrément ALSH (Accueil de Loisirs sans Hébergement) lui a été accordé par la DDCS de la Loire (Direction départementale de la Cohésion sociale). Ce titre lui permet de recevoir des prestations de la CAF (Caisse d’allocation familiale) donnant ainsi aux familles la possibilité de profiter de tarifs dégressifs pour l’accueil de jeunes de moins de 18 ans. Par ailleurs, dans un souci d’égalité, des ramassages sont effectués l’association afin de répondre à un problème de mobilité chez certaines familles. L’association souhaite, aujourd’hui, l’obtenir un financement externe des prix de journée afin de libérer les familles de la charge financière supportée par l’accueil de leur enfant à EURECAH.
EURECAH répond alors aux difficultés pour les familles de personnes en situation de handicap à trouver des places d’accueil adaptées, sans avoir besoin d’aller à des dizaines, voire des centaines de kilomètres de leur domicile. Pour y parvenir, il met en place un accueil « d’urgence » spécialisé pour les jeunes sans solutions. Mais cet accueil n’a pas encore reçu d’agrément. Par ailleurs, lors des congés scolaires, et des vacances d’été, EURECAH prend en charge les personnes handicapées. Ainsi, « L’association EURECAH apporte donc à tous ces jeunes et ces familles, découvertes, socialisation, divertissements, mais aussi tranquillité, disponibilité professionnelle avec la possibilité de « souffler » pour l’entourage »[58].
EURECAH collabore alors avec les services de la Maison Loire et Autonomie située à Saint Étienne pour atteindre sa grande ambition, qui est, d’apporter une réponse personnalisée à chaque situation en participant à l’épanouissement individuel de chacun. Pour cela, elle œuvre pour le développement de l’autonomie de l’enfant à partir de ses capacités actuelles en faisant que chaque moment de la vie quotidienne en collectivité soit une véritable activité. Elle fait également en sorte de favoriser la socialisation et l’apprentissage de la vie en collectivité en permettant à chaque enfant de trouver sa place dans le groupe. En outre, l’association permet la découverte et le respect de l’environnement, tout en favorisant l’épanouissement individuel de chacun. Et enfin, l’association permet à chaque jeune de construire sa journée de loisirs pendant les vacances scolaires selon ses choix, son rythme personnel et ses besoins.
À l’origine, l’association a été créée par « deux maman d’enfants porteurs du handicap de l’autisme, qui se trouvaient sans solutions pour leurs enfants, et donc dans l’obligation de rester à domicile [59]». Au début, le personnel était embauché grâce aux emplois jeunes. C’était l’époque du dispositif » nouveaux services – emplois jeunes « . De nombreux jeunes ont alors contribué au développement de l’association dans le cadre de la santé, de la scolarité, de l’environnement et du sport. Ce qui a permis le développement d’EURECAH, « de par leur cout, minime pour l’association[60] ». À l’époque peu de personnes autistes fréquentaient l’établissement. Néanmoins, l’association a pu embaucher deux salariés, comme Aide Médico-Psychologique, pour la prise en charge du handicap. Après cinq années de fonctionnement et les emplois jeunes ayant Cessée, l’association a dû organiser des manifestations, et demander de l’aide à d’autres associations pour récolter des fonds. Plus tard, la qualité du travail et du personnel ont fait que l’association a accueilli de plus de jeunes porteurs d’un handicap. Néanmoins, il y a 16 ans, et aujourd’hui encore, l’association EURECAH lutte pour la reconnaissance des droits des personnes en situation de handicap et de leur famille. C’est encore cette volonté de répondre aux besoins des personnes en situation de handicap (notamment des personnes avec Troubles du Spectre autistique) et de leur famille que l’entreprise a créée une seconde association ayant pour objet le service d’aide à domicile. Il s’agit de soulager les familles qui éprouvent des difficultés à garder leur activité professionnelle, ou ne peuvent s’accorder du temps pourtant nécessaire.
– population accueillie
EURECAH accueille des personnes atteintes d’un handicap afin de leur proposer des activités adaptées. Beaucoup de familles font appel à l’association, car c’est un lieu privilégié de socialisation, d’apprentissage et de découverte pour toutes ces personnes. Ils y trouvent l’occasion de pratiquer de nombreuses activités complémentaires de celles qui leur sont proposées dans leur structure individuelle. Les personnes atteintes de handicaps viennent tisser des liens avec des personnes différentes de celles qu’ils côtoient en semaine.
Aujourd’hui, plus de cent familles font appel à l’association EURECAH. Chaque année, environ 95jeunes sont accueillis régulièrement. 90% de ces jeunes sont porteur d’autisme ou TSA (trouble du spectre autistique), quant au 10% restant, ils sont porteurs de maladies orphelines tels que le syndrome de Rett, le syndrome de Williams, le syndrome d’Angelman ou encore le syndrome de Sturge Weber….
– fonctionnement de l’association
Afin de donner aux parents l’occasion de s’impliquer dans l’organisation quotidienne de leurs enfants souffrant d’un handicap, l’association EURECAH se laisse dirigée par un conseil d’administration composé des parents bénévoles. L’entreprise accueille des bénévoles qui s’occupent conjointement des projets pédagogiques avec les professionnels. Les bénévoles sont généralement composés par la famille des handicapés.
Chaque association d’EURECAH possède son propre conseil d’administration. Ce qui fait qu’elles sont indépendantes l’une de l’autre, et que chacune d’entre elles dispose du pouvoir de décision en ce qui concerne la direction de leur association.
Ainsi, la première association qui est responsable du centre éducatif et de loisir est composée par un président (Mr Robert), une vice-présidente (Mme Céline GAUMOND), une trésorière (Mme Françoise BILLAND), et une secrétaire (Mme Muriel SAUNIER). Et la seconde association qui s’occupe du service à domicile, elle, est dirigée par un président (Mr Robert LAURENT), une vice-présidente (Mme Céline GAUMOND), une trésorière (Mme Muriel SAUNIER) et une secrétaire (Mme Catherine SANSOE).
– Projet institutionnel
- Un centre éducatif
EURECAH accueille des jeunes en périodes scolaires afin de mettre en place avec eux un travail personnalisé. Des espaces structurés ont été mis en place pour une meilleure qualité de la prise en charge des personnes atteintes d’autisme. Un accueil spécialisé a également été aménagé en faveur des jeunes en attente de placement. Par ailleurs, pour répondre aux souhaits des familles, un accueil régulier peut également être mis en place sur du plus long terme. L’association EURECAH, accueil également les jeunes rejetés de leur structure d’accueil du fait des troubles du comportement jugés « importants ».
Ainsi, l’association EURECAH prend en charge des « jeunes placés en établissement, et pour qui le projet personnalisé fait mention d’un accompagnement extérieur, sur des activités adaptées [61]».
- Un accueil de loisirs
La deuxième vocation d’EURECAH est « d’organiser des loisirs et vacances pour un public atteint d’un handicap en favorisant l’autonomie, la socialisation et l’intégration en milieu ordinaire ». L’association EURECAH détient un agrément ALSH (Accueil de Loisirs Sans Hébergement) de la DDCS (Direction départementale de la Cohésion Sociale) depuis février 2011. L’accueil de loisir est ouvert aux personnes atteintes d’un handicap et leur famille. Ce projet a été mis en place afin de permettre à ces personnes l’accès aux loisirs. Pour les personnes autistes les moments d’inactivités et d’ennui sont bien souvent source d’aggravation des troubles du comportement. Aussi, EURECAH agit en faveur des jeunes handicapés en leur offrant des découvertes dans la socialisation et les divertissements, mais aussi la tranquillité et la disponibilité professionnelle pour les membres de leurs familles.
- Un service à domicile spécialisé
Depuis avril 2015, l’association EURECAH a obtenu un agrément de LA DIRRECTE (Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi) pour l’ouverture d’une seconde association. Celle-ci œuvre dans le service d’aide à domicile spécialisé ou encore le service à domicile auprès des personnes atteint de Troubles envahissants du Développement ou Troubles autistiques. Cette nouvelle association d’EURECAH a pour objectif de compléter les réponses locales au handicap en ajoutant à l’offre institutionnelle existante une capacité d’intervention à domicile avec du personnel formé.
Cette seconde association propose une fonction éducative de sociale à travers plusieurs missions[62] dont le premier consiste à développer des compétences à domicile, en accompagnant les familles qui rencontrent des difficultés dans les gestes de la vie quotidienne. Il s’agit de généraliser les apprentissages. Ensuite, le second fait en sorte de favoriser l’autonomie, en proposant un service qui vise à préserver ou à développer l’autonomie des usagers à domicile. La troisième mission se traduit par le respect des habitudes de vie de la personne aidée, son cadre de vie, mais aussi la place de sa famille et de ses proches.
2 –Cadre du stage
- Organisation et prise en charge
Mon intégration à l’association s’est faite par l’intermédiaire d’Annabelle qui m’avais présenté quelques jours avant mon arrivé auprès de l’équipe d’EURECAH. C’était également elle qui a annoncé ma future présence auprès des personnes autistes.
Puisque les séances de musicothérapies consistent à associer la musique ou le son aux jeux, elles se passent dans une salle de jeux. SCHILLER dit justement : «Le jeu est ce qui défoule le mouvement de l’intérieur vers l’extérieur du corps. »
Les éducateurs nous préparent la salle avant notre arrivée et installent le groupe. Mais parfois, quand ils sont débordés, nous nous en occupions nous même. On allait chercher les enfants directement dans l’autre pièce. La succession des jeux n’est pas déterminée avant les séances. Les consignes sont ajustées en fonction de la dynamique du groupe. Les jeux de l’atelier touchent à la créativité. Lorsque WINNICOT parle d’aire transitionnelle, d’espace potentiel[63], il souligne « l’importance de l’expérience. (…) Ces ateliers vont fonctionner comme un lieu et un temps pour explorer et permettre que la créativité de chacun se déploie. » Les techniques pratiquées consistent à associer la musique à la voix aux jeux. Néanmoins, Emmanuelle LEFEVRE a dit : « Que ce soit avec le rythme ou la voix, ces jeux n’ont pas pour objectif la technique, mais bien l’accordage de soi à soi et de soi à l’autre.[64] »
Les différents jeux mis en œuvre dans le cadre de la musicothérapie au niveau de l’association visent à favoriser l’affirmation, à utiliser le corps comme instrument sonore, et à affiner la communication non verbale, à travailler l’écoute, et à encourager la créativité. Mais au-delà des objectifs thérapeutiques envisagés, c’est les patients qui mènent la danse. C’est-à-dire qu’en tant que musicothérapeute, on leur propose un cadre contenant qui leur permet de s’exprimer… on s’adapte donc à ce qui se passe durant la séance, de ce que la personne autiste nous offre ou pas. On ne peut pas planifier de façon scolaire un programme visant un objectif précis. Il s’agit vraiment d’une relation humaine avant tout, et si notre objectif est atteint c’est un plus.
- Favoriser l’affirmation
Les jeux qui nécessitent l’expressivité poussent l’enfant à s’affirmer devant les autres. Il serait certes difficile d’instaurer un climat d’écoute mutuel. Néanmoins, ce serait un cadre de confiance incitant les plus timides à s’exprimer d’eux-mêmes. « Un cadre contenant, c’est un cadre ajusté, un espace relationnel qui contient sans étouffer, qui délimite sans enfermer, un espace de partage où la rencontre peut avoir lieu sans risque ; un espace où s’éloigner est possible, sans toutefois disparaitre.[65] » ANZIEU, lui, compare le cadre à un « contenant maternel », « une enveloppe protectrice », « une peau psychique où les pensées du sujet peuvent se déployer ». Aussi je pense que le cadre de l’atelier joue un rôle important pour aider les personnes autistes à faire des propositions (bruits, sons corporels) et à s’affirmer.
- Utiliser le corps comme instrument sonore
À travers les percussions corporelles et les vocalisations, les autistes ont l’occasion d’émettre des sons. Ils peuvent sonner leur ventre avec les mains, claquer la langue ou les doigts, frapper des pieds, et des tas d’autres sons, en utilisant le corps comme un instrument rythmique. Les jeux de « percussions corporelles » permettent des rythmes plus vivants. Ces types de jeux incluent également la douche sonore, l’alternance des marches bruyante et silencieuse, et la vocalise. Je considère que l’ensemble de ces jeux est fort utile pour les personnes autistes, car ils permettent d’éveiller le corps et de faire le lien entre les sons et les mouvements.
- Affiner la communication non verbale
Les enfants autistes n’ont pas ou n’ont que très peu la capacité d’usage du langage. C’est pourquoi ils sont sensibles à ce qui peut être véhiculé par la voix. Puisque : « La voix ne sert pas seulement à parler. Par sa modulation tonale, elle exprime aussi bien, l’accord, le désaccord, l’impatience, la souffrance, la joie… Et si, souvent, le signifié de la langue vient à en masquer ses qualités expressives, les exercices proposés invitent à faire apparaître sa dimension cachée. Il s’agit bien aussi d’explorer le fait que la source de la voix soit le corps.[66] »
La musique, en elle-même est une forme de communication non verbale, aussi, elle constitue un moyen privilégié, pour les autistes, d’entrer en relation avec d’autres, en faisant abstraction de la parole. La musique agit également comme un « renforçateur naturel », qui conduit l’autiste à acquérir des compétences dépassant le cadre musical, en touchant ses émotions. Dans le cadre de la musicothérapie, plusieurs jeux affèrent au renforcement de la communication non verbale. Il en est ainsi de la « communication périverbale », qui met l’accent sur le rapport de l’autiste avec l’espace. Le jeu du « téléphone arabe » consiste à maîtriser les tons vocaux. Tandis que les « communications paraverbale et supraverbale » sont indiquées pour faire ressortir une émotion particulière.
- Travailler l’écoute
Il s’agit de favoriser l’écoute de son corps, des autres et de la musique.
Une séance est réservée à la relaxation. Cette séance basée sur la détente et l’écoute des sons a pour but d’éveiller en chaque patient des sensations pour stimuler la verbalisation.
Ici la thérapie peut consister à écouter une musique, à marcher au rythme de la musique, localiser un son ou reconnaitre une voix les yeux fermés.
Les patients étant couramment invités à verbaliser leurs ressentis autour de leurs productions, l’écoute mutuelle est, dans ce type d’exercice, de rigueur. L’écoute des autres demande souvent beaucoup d’efforts aux enfants autistes, qui ont tendance à bouger ou à jouer quand l’un d’entre eux s’exprime.
- Encourager la créativité (De l’écoute à la musique)
Afin de stimuler l’imagination des patients, après une séance d’écoute, chacun d’entre eux peut être conduit à proposer un son (à partir des instruments de musique à leur disposition) ou une voix. La musicothérapeute se charge de retenir chacune des propositions pour les combiner celle des autres. Les sons ajoutés les uns aux autres créent alors, une mélodie d’ensemble.
« Il s’agit d’inviter le groupe à mettre en œuvre; mettre en mouvement; à mettre hors de soi, à faire exister, quelque chose qui devient saisissable, palpable, audible, visible, transférant sur le matériau ce qui n’était pas repérable ou pas encore porté à la conscience. C’est une mise en mouvement et mise en forme des émotions, des sensations inélaborées[67] »
L’élément essentiel de cette technique de musicothérapie est donc l’écoute. Après seulement pourra être entamée la verbalisation. Alors, pour capter l’attention de tous les patients, il faut limiter les mouvements parasites en favorisant la relaxation. Les enfants autistes peuvent ainsi mieux se concentrer sur l’activité. Car « L’oreille écoute mieux quand le corps est posé ».
Les jeux de rythme et de vocalisations ont donné lieu à un comportement adhésif normal que l’on adopte dans une situation de groupe. Cet effet d’ensemble est en corrélation avec la surprise de pouvoir produire un objet sonore en groupe. « Il s’agit d’une représentation d’une entente possible, un début de liaison intersubjective[68] »
- Matériel
Voici l’inventaire des matériels mis à nôtre disposition. Ils étaient composés de chaises et de différents instruments de musique dont:
- La guitare
- Le foulard
- Le bol tibetain
- Les maracasses
- Le tambour
- La boite à tonerre
- Les batons de pluis
- Les diapasons
- Le shékéré
- Le tambour d’eau
- Le balafon
- L’accordéon
- Le djembé
- La kora
- Le Kalimba
- Le drum
- Le cristal
- Le xylophone
- Les animaux musicaux
J’estime tout particulièrement les instruments à peau, comme le tambourin, le djembé, les timbales, le tambour. Ils m’ont permis de travailler le langage des autistes à partir de l’imitation motrice, qui est l’un des précurseurs du langage. Ces types d’instruments ont la particularité de démontrer la capacité de l’enfant à imiter et à reproduire les gestes qu’il observe chez les autres personnes de son entourage. Cette capacité joue un rôle essentiel dans les apprentissages sociaux ainsi que dans le langage.
Aussi, la musicothérapie peut consister à utiliser le rythme du djembé pour inciter les autistes à apprendre la vie en groupe, à avoir un objectif commun et à échanger entre eux. Ainsi dit, le rythme peut aider les autistes à créer, à communiquer et s’épanouir. Par le rythme de nouvelles aptitudes de communications s’éveillent dans leur cerveau naturellement, puis les aident graduellement à ajouter de la musique et des mots sur leurs rythmes.
- Jour et horaire fixe
Garder des habitudes régulières dans le cadre de la musicothérapie est important pour la personne autiste car il a besoin d’avoir des structures stables afin que le monde qui l’entoure ait un sens. Les habitudes ont pour nature la création d’un cadre précis et stable pour chaque activité. Le changement peut être perturbant pour une personne qui atteinte d’autisme.
Aussi, le respect des habitudes en séance souligne l’importance de la répétition de temps et de l’espace, afin de mieux cerner les raisons pour lesquelles l’enfant adopte un certain comportement. Cela permet également de structurer la vie de l’enfant, surtout quand l’autiste présente des troubles du spectre et qu’il a du mal à garder en vue l’ensemble de ses activités journalières. De même, maintenir un horaire cohérent par rapport aux activités programmées et à la discipline aide graduellement l’enfant autiste à cesser ses comportements indésirables.
L’ensemble de ces informations a fait qu’il ait été très important pour notre cadre surtout auprès des autistes d’avoir des jours et des horaires fixes. On n’en changeait jamais. La répétition avait son importance.
Si KANNER, en étudiant l’origine de l’autisme, établit la relation causale des contactes parents-enfants, en parlant de « mères réfrigérateurs ». ANZIEU, lui, a comparé le cadre à un « contenant maternel », « une enveloppe protectrice », « une peau-psychique où les pensées du sujet peuvent se déployer ». Aussi je pense que le cadre de l’atelier joue un rôle important pour aider les autistes à faire des propositions (bruits, sons corporels) et à s’affirmer.
- Les rituels
- Les Rituels d’accueil
Ecouter la même chanson à chaque séance sert à marquer la mémoire auditive des personnes autistes. Cette mémoire a une préférence pour les sons connus. C’est pourquoi en début de chaque séance de musicothérapie, on envoyait la même chanson de bonjour et de bienvenue. Il s’agissait donc d’un rituel d’habituation. Et on avait choisi le chant pour stimuler la mémoire auditive des autistes compte tenu des vertus émotives[69].
La mémoire auditive est très importante car elle est le socle qui conditionne la mémoire. Elle permet l’apprentissage. Il a été établi que les autistes sont souvent jugés aptes à la musique. Aussi, pourront-ils avoir la capacité d’apprendre. Par ailleurs, c’est également le même système auditif qui procure « les capacités de discrimination auditive »[70]en engendrant une activité motrice. C’est grâce à cette faculté de discrimination que l’autiste peut percevoir la musique et la distinguer des sons.
Ainsi, l’adoption d’une même chanson à chaque séance permet à l’autiste d’affiner sa perception, et d’entraîner sa mémoire auditif à partir de la musique.
Néanmoins, il faut savoir que la musique n’a d’effet à l’égard de l’autiste que si elle est en mesure de lui inspirer de la joie ou du plaisir[71]. Pendant mon stage, je pouvais entendre certains d’entre eux dire en arrivant dans la pièce « on va faire de la musique », « on va chanter ». Ceux qui ne pouvaient parler tapaient dans les mains. Ces enfants autistes avaient exprimé à travers ces mots leur contentement, ainsi que leur volonté dé participé à la séance, et même une première verbalisation de leur ressenties. Ces faits renforcent l’idée selon laquelle le sourire ou la bonne humeur résultant de la musique peut amener à articuler ou à communiquer. C’est pourquoi il a été dit que : « L’audition est extrêmement importante chez l’Homme et est directement associée au système de communication le plus développé : le langage. L’articulation … ».
On avait marqué l’instant en se serrant la main. On se faisait la bise les uns et les autres plusieurs fois jusqu’à ce que la chanson soit terminée. Il s’agit de gestes qui témoignent de d’une « communauté de relation[72] » au sein du groupe. Il est important que chaque personne autiste se sente à sa place au niveau du cadre : « être par et avec les autres ». Ces gestes simples peuvent aider l’autiste à se rassurer et à se soigner.
- Chant (prénoms chanté, verbalisation)
Pendant les séances de musicothérapie, tout le monde était installé en rond sur leur chaise. On a adopté des jeux de rondes, car ils facilitent l’expression individuelle dans la mesure où l’attention n’est pas focalisée sur une personne en particulier. De plus, elles « donnent aux autistes le sentiment de faire partie d’un tout[73] ». Ce qui fait de ce genre d’environnement, un cadre important pour l’autiste qui doit surmonter l’angoisse dépressive résultant de la séparation du « moi » et du « non-moi »[74]. En effet, le rapprochement du groupe durant ces moments d’indifférenciation[75] peut créer chez l’autiste un sentiment de réconfort et de sécurité, qui peut l’inciter à s’exprimer et à extérioriser son mal.
On avait également l’habitude de chanter ensemble la même chanson en tapant sur nos tamtams. On chantait à chaque fois, le prénom d’un enfant présent à tour de rôle, et tous nous accompagnait soit de leur voix, soit de leur corps. Selon Adriana MARC, « Le chant collectif amène une certaine convivialité et une cohésion de groupe, tout en canalisant leur énergie débordante. La ronde permet les échanges de regard et fait appel au mouvement tout en le limitant ».
En outre, les temps de chants collectifs sont l’occasion d’observer certains comportements particuliers des personnes autistes. Durant les séances de chants, j’ai remarqué que quand on chantait le prénom d’un autiste, la plupart des autres chantaient aussi son prénom en le regardant. Ceci témoigne du fait qu’ils peuvent maîtriser le caractère intrusif du bruit, et qu’ils ont connaissance de la limite entre le dedans et le dehors ou entre le « moi » et le monde environnant.
Enfin, les temps d’indifférenciation leur permettent de mêler leurs voix durant les vocalisations collectives et ainsi de participer à l’élaboration d’une mélodie commune. Ils peuvent ainsi se rendre compte que l’harmonie peut résulter de la différence. Comme dit Emmanuelle LEFEVRE : « Le groupe offre un contenant physique concret et se définit par son ‘bruissement’, base de l’identité sonore du groupe. Ce processus inconscient est le bruit résultant d’un rassemblement particulier de plusieurs êtres.[76] »
- Echauffement corporel
Après le chant des prénoms, Annabelle proposait toujours un échauffement corporel, du corps et de la voie. Je trouvais cette partie intéressante, car au-delà du simple échauffement corporel, je remarquai qu’il y avait un vrai travail de prise de conscience de son corps qui n’était pas une évidence pour tous. Pourtant cet échauffement consistait à se frotter les mains, faire monter et descendre ses doigts le long des bras jusqu’à l’épaule, le long des jambes, jusqu’au pied, puis les joues, la bouche, et pour terminer par la tête.
Ces difficultés d’appréhension trouvent leurs explications à travers les troubles sensoriels. Ils atteignent l’ensemble des modalités sensorielles chez les personnes autistes, mais également la proprioception et le sens vestibulaire qui sont tous deux étroitement corrélés.
La proprioception qui implique les muscles et les articulations informe le cerveau de la localisation des parties du corps et leurs mouvements. Ainsi, tous les autistes présentant des troubles moteurs ont des difficultés dans la construction de la conscience de leur corps. D’où la difficulté pratique des exercices proposés par Annabelle.
Le sens vestibulaire, quant à lui, est responsable de l’équilibre. Ou plus précisément de la vitesse et de la direction d’un mouvement. Dans l’autisme, « ces compétences sont souvent perturbées par des déficits hétérogènes [77]». Les troubles atteignent, soit l’équilibre dynamique, soit l’équilibre statique, dont le cas est ici présent, manifesté, par des difficultés de contrôle des membres. Par conséquent, il y avait des personnes du groupe qui ne faisait pas cet exercice.
Évolution thérapeutique :
Au fur et à mesure des séances, pour ne pas mettre un enfant à part, j’ai ajouté des variations en prenant les mains de ceux que je pouvais toucher; et à les diriger sur les parties du corps. Et pour ceux que je pouvais ni toucher ni regarder dans les yeux, je leur demandais, sans les toucher, de me montrer avec leur doigt où étaient situés leurs jambes, leur bras, leur tête. Et cela fonctionnait.
« Le corps peut émettre des sons en faisant intervenir la voix, ou il peut en produire. À travers les percussions corporelles et les vocalisations, les enfants ont l’occasion d’être plus attentifs aux sons qu’ils peuvent faire avec leur corps[78] ». C’est en considération de ces affirmations que j’ai également proposé une autre approche avec un jeu corporel de la musicalité du corps. Quand on tape sur les jambes ça ne résonne pas de la même façon que sur les bras. Et on peut faire de la musique en tapant des pieds au sol. Les jeux de percussions corporelles ont pour avantage de mobiliser le schéma corporel dans les rythmes de façon approfondie et vivante. Les enfants se sont montrés plus réceptif à ces jeux, plus amusants, auxquels ils s’adonnent volontiers.
- Le choix d’instrument
Quand j’arrivais, j’installais tous pleins d’instruments sur une table de côté. Il fallait qu’ils soient à la portée de tout le monde pour que chacun puisse faire choix. Le choix est une faculté qui se cultive chez les personnes autistes. Notamment par l’activité de triage. Le tri est une tâche qui plaît aux enfants autistes, car, à leur égard, l’activité qui tient compte de leurs aptitudes visuelles prend tout son sens. De ce fait, il s’agit d’une activité qui leur est facile à maîtriser.
Le tri aide à définir un choix dans la mesure où il attire l’attention d’un enfant vers les différences entre les objets. Chez un enfant normal, la notion des différences est acquise à partir des questionnements sur la nature des choses. Les réponses seront pour lui des expressions verbales qui donneront un sens aux différences entre les objets. Par contre, pour les enfants atteints d’autisme, les mots n’ont pas autant de sens, à la différence des visuelles. C’est pourquoi un enfant autiste qui a appris à trier des objets et des images à partir de leurs différences visuelles est capable d’apprendre d’autres concepts plus difficiles au travers du processus de tri. En effet, il serait capable d’apprendre les noms des objets parce que les différences entre objets ont déjà attiré son attention, donnant ainsi, plus de signification aux formes verbales de différenciation. À partir de cet instant, l’autiste serait également capable d’avoir une préférence sur des objets qu’il aurait triés (exemple du choix d’instrument). D’où l’intérêt des nombreux exercices de tri que l’on fait passer aux enfants autistes au niveau de l’association.
Ainsi, le choix d’instrument de l’autiste résulte d’un processus d’adaptation de ses aptitudes visuelles. Aussi, en principe, ce choix devrait être libre. Autrement dit, le rôle du musicothérapeute devrait se limiter à inviter le patient à découvrir les instruments. Si le patient semble hésitant ou interpelle le musicothérapeute, il devrait simplement lui rappelle les consignes et se garder d’interférer dans son choix. Selon Perrine CAILLERET, « Cette attitude positionne le musicothérapeute vers une neutralité bienveillante[79] ».
Si le patient ne joue pas, le musicothérapeute peut passer au second temps, et proposer au patient un instrument facile à manier.
- Le rituel de fin
C’est un temps de relaxation réceptif qui marque la fin de la séance. Il s’agit d’un temps calme ou de détente psychomusical. Les enfants s’allongeaient sur des tapis au sol ou dans l’espace de jeu, et on terminait la séance par l’écoute d’un montage en « U ». Il s’agit d’une méthode thérapeutique développée par Jean-Marie Guiraud-CALADOU nommée détente psychomusicale. La thérapie a pour but la redynamisation par l’apaisement et la détente. En principe cette méthode devrait durer en moyenne 45minutes, mais la capacité d’appréhension générale des personnes autistes étant limitée, on a écourté la séance à 10minutes.
Pour le côté pratique de la situation, la séance tenait plus de la musicothérapie énergétique qui est une technique d’écoute et d’aide à la personne. C’est une thérapie puissante qui « permet aux sons d’entrer dans nôtre corps », et redonne de l’énergie à l’organisme ou au mental afin d’arriver au bien-être. C’est une pratique dédiée à la relaxation et à la thérapie par les ondes sonores. Conçue par Franck NABET, cette théorie par le son associe des éléments de travail psychologique, sonomestésiques et énergiques. Les massages sonores sont effectués soit par des bols tibétains, soit par des massages de fréquences sonores particulières émises au 432hz. Dans notre séance on avait opté pour les bols tibétains.
Aussi, accompagné d’Annabelle, je passais autour de chacun d’entre eux, en faisant résonner l’instrument au contact de leur corps, pour un massage sonore. Les vibrations émises vont parcourir leurs organismes et remettre leur corps et leur mental en harmonie avec eux-mêmes.
Les enfants étaient particulièrement sensibles et très demandeurs de ces temps calmes. Ils étaient impressionnés et surpris de la résonnance de ces instruments dans leur corps. La musicothérapie a énormément de vertus. D’autant plus pour les personnes autistes qui n’avaient pas accès au langage. En effet, ici la musicothérapie se présente comme une aide qui a son importance dans l’équilibre physique et psychologique des autistes. Effectuée en groupe, cette méthode « crée un lien d’humanité » entre les autistes qui présentent des pathologies différentes et prévient ainsi de l’isolement.
De même ce type de thérapie réduit les troubles du sommeil en aidant la personne autiste à retrouver la sérénité et le calme en lui-même. Elle peut aider à mieux supporter les traitements lourds. Elle redonne de l’énergie pour les personnes en difficulté physique ou psychologique en diminuant les fatigues. Sans oublier qu’elle permet des moments de détente, pour le plaisir de calme et de bien-être.
C’est surement en raison de toutes ces vertus sus-citées, et bien d’autres encore, que les personnes autistes ont apprécié ces rituels de fin de séance. Surtout, lorsque je place mon diapason sur la « glotte » de ceux qui n’avaient pas accès au langage.
3- Pistes d’orientation musico thérapeutique
- Psychologie du groupe
Les séances de musicothérapie peuvent être réceptives ou actives. Selon WINNICOTT, les séances de musicothérapies actives sont des occasions successives de défilés, de passages et de métamorphoses. C’est donc pour lui un rituel de passage. Il dit également que ces passagers sont positifs, car ils reconstruisent, enrichissent et consolident les potentiels de créativité au sein du groupe. Par contre, la musicothérapie réceptive de groupe combine les effets de la dynamique de groupe. Elle convient parfaitement aux personnes souffrant de troubles de la communication ou d’insertion sociale.
Dans le cadre de mon stage chez EURECAH, j’ai effectué des séances tous les mercredis de 14h à 16h, soit au total 200h, avec Md Annabelle Roch[80] une musicothérapeute. La première heure était consacrée au premier groupe d’enfants autistes et la deuxième heure au groupe de polyhandicapé.
Le but du groupe d’autistes était de travailler l’écoute inter et intra personnelle des patients. Les propositions de groupe alternent entre :
- des moments de détente durant lesquels tous les membres du groupe font la même chose ; et
- des moments actifs durant lesquels un membre a l’occasion de s’exprimer devant le groupe.
Les moments actifs sont importants dans la mesure où ils permettent aux autistes de mêler leurs voix ou leurs sons durant les vocalisations collectives et ainsi, de participer à l’élaboration d’une mélodie commune. Ils peuvent ainsi se rendre compte que même si le son produit par chacun diffère, il en résulte une harmonie. Ces moments durant lesquels ils font une proposition sont essentiels pour favoriser leur écoute et leur expression au sein du groupe. De par leurs propositions, ils démontrent leurs caractéristiques. C’est pourquoi, il est dit que : « Le groupe offre un contenant physique concret et se définit par son ‘bruissement’, base de l’identité sonore du groupe. Ce processus inconscient est le bruit résultant d’un rassemblement particulier de plusieurs êtres[81]» ; et que : « Le groupe constitue une situation où se combinent la projection de l’histoire de ses membres et des processus psychiques spécifiques à la situation de groupe.[82]».
Toutefois, il existe deux sortes de groupe en musicothérapie, le groupe ouvert, et le groupe fermé.
– Le groupe ouvert
Le groupe est dit ouvert lorsqu’il peut accueillir d’autres patients venant de l’extérieur. Au sein d’EURECAH le choix a été orienté vers ce type de groupe, car certains enfants durant l’année partent dans d’autres structures, certains décèdent, et certains nouveaux patients viennent en cours d’année. Dans une séance de musicothérapie de groupe ouvert, la participation est en principe faite de manière libre et varié. La musicothérapie de groupe peut revêtir de multiples facettes qui font sa différence avec la musicothérapie individuelle.
- Groupe de musicothérapie active ouvert[83]
Le moment de musicothérapie active ouvert ou en groupe est présenté de manière à ce que chaque groupe puisse travailler sur des problématiques précises telles que l’expression verbale et non verbale, la créativité, le maintien de compétences non seulement cognitives, mais également motrices, la socialisation (qui concerne la place de chacun dans un groupe. C’est-à-dire dans le respect des différences interpersonnelles et la compréhension de l’altérité), la prise de position, et la notion de plaisir et de bien être, ainsi que les découvertes musicales, ont incontestablement une grande place dans la séance.
Le musicothérapeute peut également choisir le chant. Cette méthode de travail essentiellement les souvenirs, l’expression vocale et la cohésion de groupe. Ce style de travail s’inspire des travaux de Carl ORFF. Les techniques de jeu utilisés concernent essentiellement le fonctionnement rythmo-musicaux et les musicothérapies des cultures traditionnelles de l’Afrique ou de l’Asie.
Cette approche n’est pas sans problème, à commencer par ceux créés par les différences entre les mentalités et les logiques de pensée des participants du groupe. En effet, la considération du phénomène musical n’est pas uniforme. En occident, les lignes de pensées diffèrent assurément de ceux de la société africaine. Mais, « il ne s’agit d’adopter une telle ou telle conception rythmo-musicale Africaine ou Asiatique en particulier, mais de s’en inspirer en transposant, dans notre pratique, les procédés techniques utilisés par les traditionnels. ». Car, la base, ces méthodes d’approche de Carl ORFF ne sont pas culturelles, mais universelles. D’ailleurs j’ai eu l’occasion d’observer que les enfants autistes préfèrent chanter des chansons en d’autres langues plutôt que de chanter une chanson française.
Ainsi, le procédé doit impliquer le groupe dans son ensemble et prendre un sens dans un climat convivial où doivent primer les valeurs d’usage plutôt que les valeurs d’échange, car le groupe ne crée pas d’objet, il crée une œuvre.
L’étendue des caractéristiques de la musicothérapie active ouverte se résume en plusieurs points :
- D’abord, elles donnent la priorité au groupe. La musicothérapie active se fait naturellement en groupe même si elle peut être adaptée pour une seule personne.
- Ensuite, le groupe présente un aspect global où la parole, le mouvement corporel, et le rythme musical sont étroitement corrélés. Cette corrélation est donc assurée par la présence permanente d’un aspect rituel, de sorte que nos habitudes culturelles individuelles n’y ont plus leur place.
- En outre, en musicothérapie active en groupe, le groupe ne travaille pas sur la logique, mais plutôt sur l’organisation temporelle et donc rythmique. Ce qui fait qu’il n’y ait nullement besoins d’avoir des qualités exceptionnelles en musique pour pouvoir participer à une séance de musicothérapie active en groupe.
- Et enfin, le caractère général de la pratique de la musicothérapie de groupe est marqué par la combinaison de plusieurs champs que, par habitude, nous avions dissociés. En effet : « Dans notre enseignement occidental, nous séparons la musique qui devient cours de musique et de solfège, le corps, qui devient le sport, et rarement la danse. C’est loin d’être le cas dans les sociétés de style orales où la combinatoire est de rigueur ».C’est donc également pour restaurer cette perte que la musicothérapie active de groupe s’efforce de proposer des procédés sans prendre part de la croyance des participants.
- Groupe de musicothérapie réceptive ouvert[84]
La musicothérapie réceptive de groupe ouvert combine les effets de la « dynamique de groupe ». Elle est idéale pour le traitement des personnes souffrant de troubles de la communication ou d’insertion sociale.
En début de séance, la technique de base consiste, pour le musicothérapeute, à demander à chacun des participants d’apporter deux extraits de musique d’environ trois minutes. Mais il arrive que ce soit le musicothérapeute lui-même qui les propose. Mais dans tous les cas, ces extraits devront représenter des états émotifs différents pour prévenir la banalité de la séance. Après l’écoute consécutive des deux extraits, chacun des participants pourra communiquer son ressenti par rapport aux deux morceaux. L’émotion pourra être positive ou négative selon la personne, mais le patient devra également expliquer son choix.
Dans une séance de musicothérapie réceptive ouverte ou collective, le musicothérapeute a pour tâche d’enregistrer chacun des commentaires des participants, pour ensuite en livrer une synthèse globale. Après quoi l’auteur du choix des deux extraits pourra, lui aussi, exprimer ses propres impressions par rapport à son choix musical, mais aussi par rapport aux réactions des autres participants. Ainsi, l’ensemble des participants du groupe est mobilisé par le phénomène concret de dynamique de groupe. En dehors de la verbalisation, d’autres supports peuvent être plus efficaces. Il peut en être ainsi du dessin, surtout, lorsqu’il a été commenté, car il donne lieu à des échanges.
Cette technique permet au musicothérapeute d’identifier le comportement de chacun des participants, ainsi que les problèmes liés à la communication. Les membres du groupe pourront, de leur côté, expérimenter les pouvoirs émotionnels de la musique, en plus des échanges verbaux qu’elle permet.
En fin de séance, le musicothérapeute pourra proposer l’écoute d’une musique.
- Groupe fermé
Le groupe est dit fermé lorsqu’il est consacré à un groupe de patient en particulier, ou encore à une personne en particulière. En ce dernier cas, on parlera plutôt de musicothérapie active et réceptive individuelle.
- La musicothérapie active individuelle
La musicothérapie est dite active lorsque la personne est invitée à produire par elle-même des sons et à verbaliser ses ressenties par l’intermédiaire d’objets sonores, d’instruments de musique, ou directement avec la voix ou le corps suivant ses facultés personnelles. Les séances de musicothérapie active individuelle des adaptations des séances de musicothérapie de groupe. Elle peut être issue d’une démarche individuelle du patient ou de ses proches, ou due à la présence d’un cas particulier requérant une attention particulière.
Ici, le musicothérapeute associe le son et le corps dans des jeux, tout en titillant l’esprit créatif du sujet. Le but de la séance étant toujours, comme en musicothérapie de groupe, l’expression de soi.
Les méthodes à disposition du musicothérapeute s’appuient essentiellement sur l’exploration sonore et l’improvisation musicale. Concrètement, le musicothérapeute demande au sujet de produire des sons en soufflant, en grattant, en pinçant, ou en frottant sur différents instruments de musique. Il l’invite par la suite à partager ces différentes manières de produire des sons. La séance de musicothérapie active individuelle utilise également la musique, non pas comme un moyen d’échange entre les participants, comme l’est le cas au sein d’une musicothérapie de groupe, mais plutôt un échange entre le thérapeute et le patient, car il s’agit ici d’une prise en soin individuelle.
La musicothérapie active individuelle prend donc également appui sur l’espace potentiel de jeu, qui, en plus d’être un loisir, peut également amener une personne à « confronter sa réalité intérieure au monde extérieur et à exprimer ainsi les tensions psychiques qui la traversent ». Le patient, lui, pourra se servir d’un instrument de musique et produire des sons pour s’exprimer. Ainsi, « tout ce qui est exprimé dans l’espace transitionnel devient perceptible[85] ».
- La musicothérapie réceptive individuelle
La musicothérapie réceptive individuelle met en jeu trois protagonistes, dont la musique qui est l’émetteur ; le patient, le récepteur, et le thérapeute, en tant qu’accompagnateur. Elle diffère de la musicothérapie réceptive en groupe, en ce qui concerne la technique, car, ici c’est le musicothérapeute qui propose au patient les extraits de musiques. Il existe trois manières de mener une séance de musicothérapie réceptive individuelle.
La première est celle proposée par J JOSH. Ce type de séance est composé par trois écoutes : le premier extrait reflète la difficulté du sujet. Ce faisant, le musicothérapeute propose une musique militaire. Il s’agit d’une musique forte de nature à induire une sensation de puissance, d’énergie et de force. Elle a pour but de rehausser les potentiels du patient. Le deuxième extrait va neutraliser les effets du premier car la musique choisie sera d’une nature plus neutre, avec un profil rythmique large, lent et simple. Le troisième morceau portera sur l’ouverture souhaitée par le patient. Certains musicothérapeutes préfèrent sauter le deuxième extrait. Par contre, il doit y avoir un temps de parole, à raison de, 15 minutes, afin que le patient puisse échanger avec le musicothérapeute ses appréciations sur les musiques diffusées.
La deuxième méthode serait de passer en premier un extrait d’environ 3 minutes dont l’objectif sera de décharger les tensions. Il s’agit généralement d’une musique déstructurant, présentant des fréquences aiguës. Son rôle est de faire ressortir les difficultés, afin de réunifier la personnalité du patient. Cette musique doit obligatoirement être secondée par une phase de verbalisation, qui aura pour but d’extérioriser les émotions du patient. Et en troisième phase se fera passer une musique de détente avec peu de connotations émotionnelles, d’une durée d’environ cinq minutes afin de permettre à l’auditeur de se sentir mieux. On priorisera les musiques souples et coulées pour aider le patient à lâcher prise. Enfin, on achève la séance par une musique d’éveil d’environs 3minutes qui est de la même nature que celle passée en troisième place. Toutefois, celle-ci devra rétablir la vigilance normale du patient. Ce type de musique est de nature enjouée et progressivement dynamique.
La troisième technique consiste à atteindre la relaxation. Pour y arriver, le musicothérapeute proposera une série de quatre œuvres dont une musique apaisante qui n’est pas toujours calme. L’objectif étant de permettre l’extériorisation des tensions du patient. La séance se poursuit avec une musique de détente, de nature calme et sécurisante, propice au « lâcher-prise ». La troisième œuvre est une musique de relaxation, utilisée à fréquence basse afin de réduire l’état de vigilance de l’auditeur. Et en fin sera diffusée une musique d’éveil pour ramener l’état normal de vigilance du patient.
- L’Approche du jeu (Winnicott et Freud)
- La théorie
WINNICOTT émet l’hypothèse selon lequel, le bébé se satisfait de façon auto-érotique dans sa vie intra-utérine. Il est en contact avec des objets qui sont des prolongements de lui-même, qu’il nomme des « extensions du Moi » ou « objets subjectifs ». À ce stade, l’objet est non encore appréhendé, comme séparé et différent. C’est selon WINNICOTT l’étape du développement « antérieur à la séparation du non-moi et du moi ». Et le bébé et la mère sont encore dans un « état fusionnel primaire ».
Après naissance, pour diminuer ses tensions internes et pour se défendre contre les angoisses dépressives, le bébé commence à investir les premiers substituts de la mère. Progressivement, il se constitue un espace qui n’est plus tout à fait uniquement dedans et pas encore tout à fait dehors, mais entre-deux. C’est cet espace que WINNICOTT nomme « espace transitionnel[86] » ou « potentiel ». C’est dans cet espace où la « continuité cède le pas à la contiguïté » que les phénomènes transitionnels et le jeu ont trouvé leur origine.
WINNICOTT précise que l’enfant pourra choisir indifféremment comme premiers substituts le pouce ou un bout de couverture, tant que l’objet est réel, car: « Ce qui importe n’est pas tant sa valeur symbolique que son existence effective. Que cet objet ne soit pas le sein, bien qu’il soit réel, importe tout autant que le fait qu’il soit à la place du sein». Ainsi, l’enfant adoptera un objet transitionnel concret. WINNICOTT en fait allusion en disant : « Sans halluciner, l’enfant extériorise un échantillon, dans un assemblage de fragments empruntés à la réalité intérieure[87] ».
La théorie de FREUD s’oppose fortement à celle de WINNICOTT, dans la mesure où il a dit : « Le contraire du jeu n’est pas le sérieux, c’est la réalité. En dépit de son investissement d’affects, l’enfant distingue fort bien de la réalité le monde de ses jeux ». Pour vérifier sa théorie, il s’est proposé « d’étudier la manière dont travail l’appareil psychique en s’acquittant d’une des tâches normales et précoces. Il s’agit du jeu d’enfant ».Il avait choisi d’observer son petit fils d’un an et demi qui lançait au loin une bobine et la ramenait en tirant sur un fil attaché sur l’objet. FREUD s’était demandé pourquoi l’enfant éprouvait du plaisir à répéter ce geste épuisant. Il a alors compris que « le véritable objet du jeu était le retour joyeux ». Pour lui, l’enfant reproduit dans les jeux tout ce qui l’a marqué en se rendant maître de l’intensité de son ressenti.
- Le concret
Concrètement, l’ « espace transitionnel » est un espace de jeu. Tandis que l’ « objet transitionnel » décrit par WINNICOTT peut être un nounours, un quelconque objet, même la mère elle-même. Un objet pourra représenter, pour l’enfant, une présence rassurante comme celle de sa mère. Et dans le cas où son choix se porte sur sa propre mère, cela veut dire qu’il l’utilise comme un prolongement de lui-même, mais aussi comme distincte de lui. Cette double acception qu’il éprouve à l’égard de sa mère va lui permettre d’évoluer à travers d’expériences nouvelles. Ainsi, L’objet transitionnel a pour dessin de progressivement désinvestir l’enfant de la situation de dépendance physique qu’il a avec sa mère. Mais il arrive des fois que les phénomènes transitionnels persistent.
Pourquoi l’enfant joue-t-il ?
L’enfant joue essentiellement pour avoir le sentiment d’exister réellement. Le jeu permet d’assujettir les pulsions de l’enfant aux contraintes de la réalité. C’est ce que WINNICOTT entend par « intégration de la personnalité » qui vient après la phase de « dépendance absolue » du nourrisson à sa mère. L’enfant pourra peu à peu accepter les frustrations de la séparation avec sa mère, et à partir de là, avoir le sentiment d’exister comme un individu distinct. C’est seulement à ce stade que l’enfant se rend compte de son existence. Et ses pulsions seront assouvies par les jeux (playing). Toutefois, il arrive qu’un enfant ne passe pas à ce stade et reste au niveau de l’espace transitionnel. C’est le cas notamment des personnes autistes.
Selon FREUD : « Pour ce qui est du jeu de l’enfant, nous croyons comprendre que si l’enfant reproduit et répète un évènement, même désagréable, c’est pour pouvoir, par son activité , maîtriser la forte impression qu’il en a reçue, au lieu de se borner à la subir en gardant une attitude purement passive ». Ainsi, selon ces dires, l’enfant joue par désir d’être grand ou de se comporter comme un adulte. Il veut être actif et non plus passif en reproduisant les évènements sous la forme d’un jeu. FREUD dit aussi que reproduire dans un jeu une impression pénible est une source de plaisir indirecte qui permet d’obtenir un plaisir plus direct. Condition indispensable, selon lui, à l’acquisition du langage.
Le jeu de l’enfant est-il sans enjeu ?
Selon WINNICOTT, le jeu est pour un enfant normal, un moyen d’exister en tant que soi (vraie self), malgré les contraintes de la réalité auxquelles il doit s’adapter. Le contraire serait que l’enfant ait à s’adapter à son environnement au détriment de son propre développement personnel (faux self). C’est notamment le cas des autistes. Aussi, WINNICOTT distingue clairement le jeu ou (Game), qui peut être organisé socialement, et l’activité beaucoup plus essentielle de jouer (playing). Selon lui : « Jouer est un acte créateur, une invention d’un individu, alors que les jeux éducatifs sont beaucoup plus limités ». Néanmoins, il ajoute : « Il ne faut jamais oublier que jouer est une thérapie en soi. Faire le nécessaire pour que les enfants soient capables de jouer, c’est une psychothérapie qui a une application immédiate et universelle ; elle comporte l’établissement d’une attitude sociale positive envers le jeu. Mais il faut admettre que le jeu est toujours à même de se muer en quelque chose d’effrayant. Et l’on peut tenir les jeux (games) avec ce qu’ils comportent d’organisé, comme une tentative de tenir à distance l’aspect effrayant du jeu (playing)[88]».
FREUD avait, quant à lui déclarer que : “ Chaque enfant qui joue se comporte comme un poète, dans la mesure où il se crée un monde propre, ou pour parler plus exactement, il arrange les choses de son monde suivant un ordre nouveau, à sa convenance [89]”. Toutefois, il avait précisé que le jeu devait obéir au principe de plaisir.
- La musicothérapie active
« La musicothérapie « active » favorise une communication non verbale. Elle permet aux patients de s’exprimer, aussi bien corporellement que musicalement (mouvements corporels, production de sons avec des instruments, regards, touchés…) », Anna GUSTAVE
Il s’en suit que la musicothérapie active est basée sur la production musicale réalisée par le ou les patients eux- mêmes. Et elle peut consister à créer une existence de créativité et d’écoute par l’intermédiaire des instruments de musique ou en usant du corps et la voix. La liberté d’expression est la règle. L’improvisation, élément majeur de la musicothérapie active, permet au patient d’établir une relation avec le musicothérapeute, mais aussi avec les autres membres du groupe si les séances se font en groupe. La musicothérapie étant donc une thérapie très active, et en principe collectif, elle peut ne pas convenir à un patient. C’est la raison d’être du bilan actif préalable.
- Le bilan actif
Il s’agit d’un test de réceptivité à la musicothérapie active. Le bilan actif est un outil de travail du musicothérapeute. Il est donc un moyen et non une fin. Le musicothérapeute centrera son attention sur les mouvements corporel du patient tels ses gestes, ses déplacements dans l’espace, ses mimiques. Toutefois, son jugement se portera également sur les instruments que le patient utilisera, l’ordre, et la façon dont il les utilise, les rythmes et les phases mélodiques qu’il va créé, ainsi que les associations sonores et rythmiques, etc.
Généralement, le test de bilan actif consiste à positionner le patient devant une table où sont posés différents instruments de musique. Le thérapeute sera positionné en face de lui ou en retrait. Dans un premier temps, le musicothérapeute demande au patient de jouer, quand il le veut et comme il le veut, tout en le laissant la liberté de choisir ou non un instrument de musique.
Dans un second temps, le musicothérapeute diffusera simultanément une œuvre mélodique, puis une autre rythmique, suivit d’une autre de nature harmonique, et enfin une qui soit électro-acoustique. Pendant la diffusion, il est possible pour le patient de jouer quand il le voudra et comme il le voudra. À la fin du test, le musicothérapeute demandera respectivement le ou les instruments et la ou les musiques préférées du patient.
- Les séances de musicothérapie
Pour qu’il y ait soin, le thérapeute doit offrir toutes les conditions nécessaires rendant possible le jeu. Il y va du cadre de la séance, des consignes et de sa ritualisation dans le temps.
Le jeu représente une activité spontanée et un effort non imposé, mais voulu. Il donne alors l’occasion de réentrainer diverses fonctions cérébrales et peut ici prendre des fonctions rééducatives variées évidentes.
La musicothérapie active me parait être une bonne approche pour un groupe d’enfants, car la notion de jeu est très présente dans l’animation en musicothérapie. L’espace de jeu en musicothérapie peut également amener une personne à confronter sa réalité intérieure au monde extérieur et à exprimer ainsi les tensions psychiques qui la traversent. Le champ du jeu représente alors un espace potentiel. La réalité intérieure de la personne peut prendre appui sur les instruments de musique et sur les sons produits pour s’exprimer. Tout ce qui est exprimé dans cet espace transitionnel devient perceptible.
Au sein d’EURECAH, tout notre travail thérapeutique est centré sur le jeu musical durant nos séances. L’improvisation était la clé de voûte de nos séances. Le concept consistait à étaler les instruments de musique sur une table où chaque personne peut prendre l’instrument qu’elle souhaite et en jouer de la façon dont elle veut. Les consignes étaient simples, car les enfants avaient le droit et le choix de jouer avec les instruments à condition qu’ils ne les jettent et qu’ils ne les détériorent pas.
Ils avaient également le droit de s’asseoir où ils le souhaitaient, tant qu’ils se ne mettaient pas en danger autrui ou eux-mêmes. Le jeu privilégie le geste, la voix, la respiration, les sons corporels ainsi que les instruments de musique. Toutefois, il est à remarquer que le concept de la musicothérapie active peut, certes, être bénéfique pour le patient (cas d’un transfert), mais elle peut aussi prendre une tournure négative (cas du contre-transfert).
Le transfert est un lien affectif, positif (lorsqu’il est tendre) ou négatif (lorsqu’il est hostile), que le sujet élabore, sans en prendre conscience, avec son musicothérapeute. C’est l’étape fondamentale de la cure analytique puisqu’ici, le patient éprouve des sentiments inconscients pour le musicothérapeute, sentiments déjà vécus pour une personne de son entourage. Il adoptera envers son thérapeute la même attitude qu’il a pu avoir précédemment pour ces personnes. Le thérapeute doit pouvoir repérer cela pour le signaler au patient afin que celui-ci en prenne conscience.
Le contre-transfert se traduit comme étant les réactions personnelles inconscientes du musicothérapeute envers le patient. Ce sont des réactions d’opposition au transfert, celui-ci devenant trop difficile à supporter pour le musicothérapeute. Selon ANZIEU : « Un tel contre-transfert provient des problèmes personnels non résolus de l’analyste. Il a la structure d’un symptôme névrotique ou narcissique et constitue un obstacle au progrès de l’analyste. […] Ce terme désigne les attitudes et les réponses du psychanalyste qui découlent de la situation analytique. Le psychanalyste est soutenu dans son travail par certaines motivations et il doit y trouver des gratifications. Les émotions qu’il ressent envers le sujet sont induites inconsciemment par lui, et elles servent à éclairer l’analyste sur ce dernier à condition qu’il les accepte sans culpabilité et qu’il procède à une réflexion autoanalytique à leur égard. Ce contre-transfert est un moteur de l’analyse[90] ».
- Temps de relaxation réceptif – temps calme
- Le test réceptif
Le test réceptif, tout comme le test actif, fait partie du bilan psychomusical qui va permettre au musicothérapeute d’évaluer l’intérêt d’une prise en charge musicothérapeutique, de définir les projets de son patient, et de l’orienter vers des méthodes actives ou réceptives ou encore la combinaison des deux. Dans un premier temps, le musicothérapeute va s’assurer de la nature de la démarche du patient en entrant en contact avec lui dans le cadre d’un entretient préliminaire. Le but est de pouvoir instaurer un climat de confiance entre le patient et le musicothérapeute.
Le test réceptif vient après l’entretient préliminaire. Il a été mis au point et expérimenté à l’hôpital Limoux par l’équipe de Jacqueline Verdeau-Paillès. Son objectif est d’établir un programme sonore en fonction de l’âge, de la culture musicale et des problèmes psychologiques du patient. Il consiste en l’audition d’une dizaine d’extraits sonores et musicaux très variés afin d’obtenir rapidement un aperçu aussi juste que possible de la qualité de réceptivité musicale du patient. L’audition peut par exemple être composée d’une œuvre descriptive; suivi d’une autre qui soit rythmique avec des percussions, puis une autre mélodique ou folklorique. Ensuite, il pourrait y avoir du chant suivi d’une musique contemporaine, puis un soliste avec orchestre, etc.
Après chaque écoute d’un extrait, le patient est invité à exprimer ce qu’il ressent, par la parole, ou un autre moyen d’expression s’il le souhaite (corporel, musical, pictural…). À la fin du test, le musicothérapeute exploite les résultats de son patient dans un psychogramme.
3-Cas clinique
Mon stage avait duré 1 an et demi, soit 76 séances. Il me sera donc impossible de parler de toutes les séances que j’ai effectuées. Cette partie sera dédiée à celles qui m’auront le plus marqué.
- Le premier contact :
Au premier jour de ma venue, le groupe manifestait beaucoup d’intérêts à mon égard. Ils m’avaient à plusieurs reprises demandé mon prénom. Et il fallait que je fasse preuve de patience et que je réponde à chaque fois à la même question. C’était visiblement là leur manière de m’intégrer dans leur groupe. Toutefois, j’étais également ressenti comme une intrusion par certains.
La curiosité étonnante des personnes autistes est généralement observée chez les patients aspergés. Il s’agit d’une curiosité d’observation, une recherche de compréhension différente de celle des enfants normaux. Pour ce qui est de la manière adéquate à adopter face à une telle curiosité, il a été dit que:« L’enfant capricieux a besoin de fermeté. L’enfant autiste a besoin de compréhension et d’aide[91] ». Ce qui fait de la patience un élément important dans la rééducation des personnes autistes.
Lors de ce premier contacte, j’avais de suite intégré ma place de musicothérapeute auprès d’Annabelle. Mais cela n’avait pas empêché une adolescente d’adopter des gestes familières à mon égard. Elle avait même poussé jusqu’à m’appeler son petit chat. Annabelle était intervenue et l’avait réprimandé. Mais elle ne semblait pas comprendre pourquoi.
Il faut savoir que « les personnes avec autisme ne reconnaissent pas suffisamment les expressions émotionnelles des autres. Elles perçoivent moins le visage comme un ensemble et associent souvent les émotions aux détails de l’expression émotionnelle». Par conséquent, la personne autiste a du mal à éprouver de l’empathie envers les autres. L’empathie se dit de la capacité à comprendre les sentiments des autres sans les vivre soi-même. Pour le ressentir, il faut pouvoir adopter la perspective et le point de vue des autres en prenant part à leurs états d’âme, et ainsi, pouvoir réagir de la manière émotionnellement adaptée.
Durant cette première rencontre avec les patients autistes, je m’approchais, et j’essayais de rentrer en contact avec chacun d’ entre eux, sans pour autant devenir envahissante et aller contre leur gré. Pour y arriver, il me fallait alors adopter leur façon d’intégrer les petits groupes. Une mère ayant pour enfant un autiste asperger avait rapportée: « Mon fils adore les autres, il est très sociable. Il allait là où les autres jouaient (…), mais ne prenait pas les siennes, ne jouait pas avec eux, mais se mettait à côté, les observait, riait avec eux. ». Et c’est ce que je fis. De par mon action, je voulais partir à leur découverte et qu’ils me découvrent en retour. Essayer de tisser des liens, m’intégrer, et être accepter dans leur groupe. Ce fut un jour fort en émotion pour moi, car je débutais mon stage avec beaucoup d’enthousiasme. Mais je redoutais également de ne pas savoir quoi faire, sans compter que j’ignorais l’autisme. C’est alors, dans le but d’apprendre plus sur ce syndrome que j’avais décidé d’étudier un cas particulier, que j’avais nommé, Julien
- Présentation des cas cliniques
Durant mon stage, auprès d’EURECAH, j’ai pu suivre un groupe de personnes autistes. Leur identité étant confidentielle je vais les nommer autrement. Ainsi, le groupe était composé de Jennifer, Laure, Anna, Andy, Arnaud, Mathieu, Ben et Julien. Je les présenterai tour à tour. Toutefois, plus spécifiquement, j’ai décidé de choisir Julien pour mon cas approfondi. Je l’avais choisi, en raison de son jeune âge. Mais j’avais d’abord pensé à Ben. C’est pourquoi ce mémoire parlera également de lui.
- Déroulement des séances, et analyses
C’est la psychanalyse ou la psychothérapie qui avait à l’origine instauré le cadre thérapeutique. La pratique avait par la suite été transposée à toutes les thérapies. Le cadre du déroulement des séances doit être accompli dans le respect du principe de l’unité de temps et d’action.
- L’unité de temps:
Il s’agit d’effectuer les séances les mêmes jours, les mêmes heures, et pendant les mêmes durées. Dans le cadre de mon stage auprès d’EURECAH mes séances se déroulaient tous les mercredis de 14h à 16h. L’unicité de temps suppose également un espace de rencontre neutre, c’est à dire bien insonorisée, confortable, et protégé des vues extérieures. Ce sont là les raisons pour lesquelles nos séances se déroulaient dans la salle de musique de l’association.
- L’unité d’action :
L’unité d’action suppose qu’à chaque séance les modalités d’interventions doivent être définies à l’avance. En ce qui concerne nos missions chez EURECAH, elles tournaient essentiellement autour de la création, de la restauration et du maintient des moyens de communication et de relations chez des personnes autistes grâce à la médiation sonore et musicale.
- Rituel d’accueil (chant)
Le rituel d’accueil marque le début de la séance, tandis que la détente psychomusicale en marque la fin. Ces parties sont immuables. Aussi lors de chaque arrivée des patients autistes dans la salle, la musique du bonjour[92]était diffusée sur un poste. Et sur cette musique, nous prenions tous contact. On se faisait la bise ou se serait la main. Il s’agissait là d’une forme de thérapie d’étreinte.
|
– Échauffement corporel
La séquence de l’échauffement corporelle avait pour objectif de travailler la motricité des patients autistes. Elle consiste à effectuer des mouvements relativement simples accompagnés de musique. Pourtant, cet exercice pose souvent des problèmes aux patients autistes. Les gestes à effectuer dans la séance d’échauffement corporel peuvent varier. Mais en général, les personnes autistes devaient pointer les parties de leurs corps de bas en haut ou de haut en bas et également le long des bras.
|
– Choix d’instrumental
Pendant mon stage, les instruments étaient variés; et disposés sur une table à la portée de mains de tous les patients. Les enfants pouvaient choisir l’instrument qui leur plaisait. La consigne était juste de les utiliser à bon échéant. Cette partie de la séance avait pour but d’apprendre aux patients à faire un choix.
Les instruments m’avaient beaucoup aidé dans mon approche. J’avais rapporté beaucoup d’instruments qu’ils ne connaissaient pas et qu’ils voyaient pour la première fois. Aussi ai-je pu établir un contact avec beaucoup d’entre eux grâce à ceux-ci. Les instruments étaient comme des cadeaux que je leur avais rapportés; et qui donc leur donnait de l’importance.
|
– Improvisation instrumentale
Cette partie de la séance de musicothérapie consistait pour les patients à faire du bruit avec leur corps. Dans le cadre de mon stage, le jeu pouvait consister à taper des mains, à donner des coups de pieds au sol, à claquer la langue, etc. D’ailleurs, les patients m’avaient semblé extrêmement créatifs dans ce jeu. J’ai été surprise de réaliser à quel point les jeux sonores ont sollicité l’imaginaire des patients présentant des troubles du spectre autistiques. Mais l’ensemble des bruits a créé un jeu sonore.
|
– Place à leur propre processus créatif
La partie « place à leur processus créatif » consiste à « donner une impulsion créative[93] » au groupe. En faite chaque patient faisait un choix d’instrument et devait jouer avec. Ici ma tâche est comparable à celle d’une art-thérapeute. Elle consiste d’abord, à montrer comment il faut faire. De ce fait, les patients peuvent laisser libre cours à leurs imaginations et communiquer à leur façon. S’il arrive qu’un patient soit réticent. Mon rôle serait donc de lui expliquer comment s’y prendre. Toutefois, dès que le processus se déclenche je me dois de rester en retrait et d’encourager toutes formes de production porteuse de sens, sans jamais les juger.
Selon Jean-Pierre Klein : « L’accompagnement du thérapeute est discret. Il se contente dans un premier temps, d’accueillir les productions, de les orienter dans le sens d’une plus grande clarté, ce qui n’exclut pas la complexité (…).Puis, la fonction de l’art-thérapeute est donc de pousser, avec beaucoup de prudence, le patient vers toujours plus de profondeur. »
|
– Induction à la détente (foulard)
Lors de l’induction à la détente, les patients étaient installés sur leur chaise, et on chantait une musique très douce et émotive « alélouyia ». Tout en chantant, je passais avec un foulard, et caressais le visage des patients.
|
– Le rituel de fin (La détente psychomusical)
La détente psychomusical forme le rituel de fin de séance. On s’en servait pour clôturer la séance. Les enfants s’allongeaient sur des tapis au sol ou dans l’espace de jeu, et on terminait la séance par l’écoute d’un montage en U de 10 min. Et je passais autour de chacun (avec Annabelle) d’eux avec des bols tibétains et un diapason que je faisais sonner au contact de leur corps en un massage sonore. Les personnes autistes apprécient particulièrement ces instants où il apprenait, à chaque fois un peu plus, à lâcher prise et à se détendre. Je proposais des sons au ralenti, parlais lentement et décomposais les gestes.
|
– Présentation des cas cliniques, analyse et vécu
Étant donné le caractère confidentiel des dossiers, je n’ai pas pu avoir toutes les informations nécessaires. Toutefois, j’ai réussi à en obtenir certaines après contact avec les patients et quelques-unes de la part de l’équipe. L’équipe qui avait toujours été débordée, car il était en sous effectifs par rapport au nombre de patients présent.
– Jennifer
Jennifer est une jeune femme autiste de 29 ans. Elle a été scolarisée depuis l’âge de 2 ans et demi. Elle présentait des difficultés communicatives. C’est pourquoi, elle avait passé un bilan ergonomique qui s’était révélé négatif, mais qui avait diagnostiqué l’autisme. Jennifer avait été suivit par un psychologue scolaire, et avait continué sa scolarité en grande section jusqu’à l’âge de 7ans. Puis de 7 à 16 ans, elle avait été scolarisée à son domicile à raison de 2h tous les matins. L’association EURECAH l’avait prise en charge depuis ses 16ans. Notamment du mardi au samedi et également durant vacances scolaires. Elle y découvre des activités régulières et variées qui lui permettent de travailler plusieurs objectifs ; et la musicothérapie en fait partie. En parallèle elle consultait, deux fois par semaine, un neurologue, un orthophoniste, un psychomotricien et un kiné.
– Séance 1 à 5
Dès le début du rituel, étant donné que j’étais encore nouvelle, Jennifer avait tendance à mettre mon rôle à l’épreuve. Aussi, lorsque mon prénom était joué sur le tamtam, elle se levait, et je devais aller la chercher. Son but était de récupérer ma place dans la ronde. Elle répéta le geste pendant trois séances de suite. Pendant les 3 premières séances, nous nous sommes replacées à nos places respectives. Puis à la 4 ème séance, j’avais décidé de rentrer dans son jeu. Aussi, en la suivant, au lieu de reprendre ma place, je m’étais placé sur sa chaise. Jennifer était amusée, mais elle voulait reprendre sa place en me poussant. Dans la 5ème séance, elle ne refit plus le geste. Elle avait enfin admis ma place en tant que thérapeute et témoignait un peu plus de retenue. Mais elle se comportait différemment avec moi et Annabelle qu’elle n’écoutait jamais.
Dans le groupe, j’avais remarqué que Jennifer était une personne souriante et sociable. Elle utilisait le regard et le toucher pour entrer en contact avec les jeunes. Elle savait s’y prendre à sa manière. Elle aimait le contact et s’intéresse à ce que font les autres. J’avais d’ailleurs pu constater que Jennifer avait un rapport particulier avec un jeune avec lequel elle semble rechercher la proximité.
|
- Vécu
Par ce petit jeu, je me suis rendu compte que Jennifer rentrait très facilement en contact avec moi par le regard, le toucher, et l’humour. Elle recherchait mon attention. J’ai été surprise par ce comportement. D’ailleurs, je m’étais, à plusieurs reprises, demandé les raisons pour lesquelles elle m’avait choisi, moi, et pas quelqu’un d’autre. J’avais hésité à la prendre comme cas clinique en raison de ce lien très fort qui existait entre elle et moi. Cela me dépassait. En faite, je n’en connaissais pas la raison. Qu’avais- je donc fais pour le créer? C’est en raison de cette incertitude que je ne l’ai pas choisi. Néanmoins, je savais qu’elle devait refouler un mal-être ou un manque d’affection et me dévouer son affection était, pour elle, une manière de renouer avec le monde externe. C’est pourquoi je m’étais laissé faire.
– Séance 6
Nos précédentes séances m’avaient appris que Jennifer pouvait s’exprimer avec des sifflements qui présentaient beaucoup de similitudes avec des chants d’oiseaux. Parfois rajoutait même des « pui pui » et des « cou cou ». Mais j’avais aussi remarqué que trop de bruit pouvait l’affoler, car elle avait tendance à se frapper fortement les joues et les oreilles.
Le jour de la 6ème séance, Jennifer était en avance. Elle était extrêmement agitée, tendue et angoissée, car l’on avait changé son traitement. Elle était installée seule dans la salle de musicothérapie, et déjà prête à commencer. J’avais profité de ce moment de calme pour proposer à Jennifer une séance individuelle courte autour des bruits d’oiseaux. J’avais utilisé de petites percussions, un bol sonore et ma voix.
Jennifer avait réagi dès le début de ma prestation. J’avais d’abord adopté des percussions lentes, ce qui l’avait endormie. Mais en mettant plus de rythme dans mes improvisations, le son l’avait réveillé et elle avait même participé en suivant le rythme sur sa main droite. Il y avait un grand changement entre le début et la fin du moment, car Jennifer était apaisée.
|
- Vécu
J’ai été contente de voir que la méthode que j’avais adoptée prenait effet sur Jennifer. Une fois de plus, la musique avait démontré sa capacité à apaiser les tourments. Ce moment passé avec Jennifer m’avait beaucoup demandé. En effet, à cet instant-là, il m’avait fallu improviser une musique tout en tenant compte des comportements habituels de Jennifer. Sans cela, la thérapie n’aurait eu aucun effet sur elle. De plus je devais tenir compte de ses réactions.
– Conclusion
Jenny était très attachée à moi tout au long de l’année. Elle avait beaucoup amélioré son élocution séance après séance. Elle sentait quand je n’arrivais pas à la comprendre, et el faisait out pour que j’y arrive. Cela ne l’avait pas contrarié. Au contraire, elle faisait preuve de beaucoup de créativité pour communiquer avec moi.
– Laure
Laure est une jeune femme autiste de 25 ans. Elle présentait un retard de développement. Après test, elle avait été diagnostiquée atteinte du trouble des spectres autistiques. Aussi, dans le but de stimuler son développement elle avait été suivie par des pédiatres, des orthophonistes, des pédopsychiatres, une psychomotricienne et une éducatrice. Pourtant, son langage avait régressé, car elle communiquait en criant, en tendant ou en poussant des objets. Toutefois, elle avait un penchant pour les jeux de piscine dans l’eau, la musique et certains films de Walt Disney.
– Séance 1
Ce jour- là, Laure était agitée et respirait avec peine. Son expression était crispée et elle s’agitait beaucoup. En fin de séance, pendant le rituel de fin, lorsque tous les patients étaient allongés au sol, j’avais joué de longs accords en arpège et une mélodie suspendue à l’aide d’un bol sonore, d’un tambour de l’océan et de ma voix. Le but était de pouvoir encadrer la respiration de Laure, et amener la détente collective. Petit à petit elle devenait plus calme et à la fin du rituel, elle avait même fermé ses yeux. Son expression, ainsi que la position de son corps semblaient plus détendues. De plus, sa respiration était plus profonde, plus régulière, et moins bruyante.
|
- Vécu
J’ai été contente d’être parvenue à détendre Laure durant cette première séance. J’avais utilisé la musique dans le cadre de la détente psychomusical. Laure a été réceptive malgré son agitation. Alors, tout comme avec Jennifer, la musique avait su calmer ses tourments. À la différence qu’avec Laure j’ai du porter mon attention sur la respiration. Ma prestation était extrêmement très délicate, dont la mesure où je devais amener à la détente. Et l’état de Laure ne me laissait pas beaucoup de marge de manœuvre. Il m’avait fallu jouer avec justesse.
– Conclusion
En résumé, Laure est atteinte d’autisme lié à des troubles sensoriels. Elle présente notamment des troubles de la communication et psycho comportementale liée à son retard mental. Mais cette séance avait confirmé les dires selon lesquels : « Il est possible en ralentissant les informations de l’univers extérieur et en ralentissant le rythme intérieur des personnes autistes qui sont souvent très stressées et qui ont des signes de stress qui peuvent être atténués considérablement.« [94]
– Anna
Anna avait 13ans, et elle était une personne autiste. Elle avait été accueillie par EURECAH depuis 2013 du mardi au samedi et pendant les périodes de vacances scolaires. En dehors de l’association, Anna vit auprès d’une famille d’accueil. Anna est hyperactive, ce qui fait que parfois elle se montrer agressive. Toutefois, Anna était très sociable. Elle connaissait chaque prénom de ses camarades et elle s’approchait facilement des autres pour jouer ou par curiosité. J’ai également remarqué qu’Anna avait un lien particulier avec Ben, ils ont le même âge et sont souvent assis côte à côte.
– séance 1
Anna était très agitée. Elle avait récemment été opérée pour un strabisme de l’œil droit. Elle faisait de petits gémissements pendant la séance répétitive. Elle s’agitait beaucoup sur sa chaise ; et je pouvais ressentir son angoisse et son mal-être. Alors, dès qu’Anna fût allongée sur le tapis pour le rituel de fin ou la détente, J’avais pris ma guitare, et j’avais entrepris de répondre en musique à ses gémissements. Pour y arriver, j’ai dû improviser. J’étais à l’écoute de ses moments de douleur. Aussi, lorsqu’elle gémissait un peu plus fort, j’utilisais plus de dissonance afin de chronométrer sa douleur. Je tenais compte également de ses mouvements. Ainsi, vers la fin de la séance, Anna était plus détendu.
|
- Vécu
Cette séance a prouvé l’action que la musicothérapie peut avoir sur la douleur. Pour moi, cette séance représente ma plus grande performance. En effet, j’ai du déployer des efforts pour pouvoir guetter la teneur des gémissements d’Anna, les traduire pour ensuite réagir en conséquence dans mon improvisation. J’éprouve d’ailleurs une certaine fierté à y être arrivé.
– Conclusion
Anna devait ressentir de la douleur due à son opération. C’est ce qui explique son agitation et son mal- être apparent. Toutefois, la musique a su maitriser sa douleur et l’apaiser.
– Arnaud
Arnaud était un homme autiste de 30 ans, mais qui avait l’âge mental d’un enfant de 5 ans. Il était sociable, notamment avec les plus jeunes. Il pouvait retenir leurs prénoms et leur donner la main. Il communiquait par le biais du regard ou du toucher. Il avait également le sens de l’humour.
Arnaud appréciait les séances de musicothérapie chez EURECAH. Il venait certains jours en semaine, chaque samedi et pendant les vacances scolaires. Il avait l’expression verbale limitée, mais il faisait de grands efforts de communications non verbales. J’avais remarqué qu’Arnaud avait besoin de réconfort et d’attention dans ce qu’il faisait. J’avais aussi constaté qu’il avait certaines difficultés motrices, car il s’essoufflait vite.
-Séance 1
Au début de la séance, j’avais remarqué qu’Arnaud avait la respiration rapide et semblait essoufflé. Il avait l’expression renfermée. J’avais alors entrepris de travailler sa respiration à l’aide du tambour de l’océan, ma voix et un bol sonore. Il avait été directement captivé par les instruments. Ce qui m’avait permis de l’attirer dans des improvisations variées aux tempos libre et chronométré. J’avais également utilisé du majeur et du mineur suivant ses expressions. Le résultat avait été sa détente. Il était plus ouvert et était plus cohérent dans ses quelques paroles.
|
– Conclusion
Dans l’ensemble, Arnaud s’était adapté rapidement aux séances de musicothérapie. Il connaissait le déroulement et avait de très bonnes capacités de compréhension et d’expression verbale. Il participait activement et disposait de bonnes capacités de concentration. Mais il était nécessaire de proposer à Arnaud un cadre pied structure pour limiter ses comportements stéréotypés qui consistaient pour lui à compter avec ses pieds et ses doigts.
– Mathieu
Je ne dispose pas de beaucoup d’information sur Mathieu. Tout ce que j’avais pu savoir c’est qu’il avait 20 ans, et qu’il était scolarisé en 5 ème année.
– Séance 1
Pendant la séance de l’échauffement corporelle, lors de l’exercice de respiration, Mathieu avait fait une crise épileptique. Il faisait des gestes anodins accompagnés par des paroles confuses. L’instant d’après il était tombé au sol. Au vu de ses gestes, j’avais tout de suite alarmé Annabelle et les éducateurs. On l’avait alors placé sur le côté en attendant que la crise passe. Pendant ce temps, le groupe s’était affolé, j’étais complètement démunie, et Annabelle semblait ressentir la même chose. Alors, pendant que les éducateurs tentaient de réconforter Mathieu, j’avais décidé de faire diversion en passant la musique de « Sonate K448 pour deux pianos de Mozart ». Lors de la diffusion de la musique, le groupe semblait plus calme. Et la convulsion de Mathieu s’était peu à peu évanouie. Le plus étonnant était le fait que la crise de Mathieu ait été moins longue que d’habitude. Soit 2 minutes au lieu de 5 à 7minutes. De plus, il avait retrouvé sa lucidité en un rien de temps, et s’était installé sur sa chaise avec enthousiasme. Il avait même souhaité continuer la séance. Ce que nous fûmes.
|
- Vécu
Cette séance me marquera pour très longtemps. C’était la première fois que j’assistais à une crise d’épilepsie. Et je puisque je connais peu de chose sur Mathieu je me demande, jusqu’à présent, si c’était ou non l’exercice de la respiration qui avait provoqué la crise. Néanmoins, je me félicite de m’être souvenu du fait que la musique pouvait aider à surmonter les crises. Je l’ai su à travers les nombreuses lectures que j’avais faites le long de ma formation. L’idée provenait des recherches scientifiques effectuées sur la musique et l’épilepsie[95].
– Conclusion
Avec le temps, Mathieu a su tisser des liens avec les autres. Il n’a pas toujours la bonne distance dans les rapports sociaux, car il cherche encore un contact tactile, mais il a désormais un peu plus de retenue. Il est capable de s’inscrire dans un travail de groupe. Toutefois, Mathieu ne s’était toujours pas débarrassé de ses stéréotypes.
-Benjamin (Ben)
Ben est un jeune adolescent autiste de 14 ans. Il mesure environ 1m75, et il n’utilise pas le langage verbal. Par contre, il communique en poussant des cris ou des sons. Il a un petit frère collégien de 11 ans, et sa mère est ménagère tandis que son père travaille de nuit. Sa famille n’a pas la chance de bénéficier d’une aide sociale. Aussi, Ben avait dû interrompre une IME en 2013 et rester à domicile.
La rupture avec l’IME a été particulièrement dure pour Ben, car il a été interné suite à une hospitalisation d’urgence. C’est en septembre 2013 qu’il avait été pris en charge par le centre d’EURECAH à raison de 6 jours sur 6 pour toute la journée, du mardi au vendredi.
– Séance 1
Ma première rencontre fut sa première séance. Il était extrêmement agité, aussi avait-il à sa garde deux éducateurs. Il n’aimait pas le contact, alors il n’avait pas participé au rituel de bonjour. En fait, il était en retrait du groupe dans le fond de la salle au milieu des deux éducateurs.
Ben était particulièrement violent. Il malmenait les éducateurs en les frappant, en leur crachant dessus et en les mordant. A deux, les éducateurs avaient encore beaucoup de mal à le contenir. Aussi l’avaient-ils fait sortir de la salle de musicothérapie, car sa présence perturbait le bon déroulement de la séance.
|
- Vécu
Dans cette première séance, j’ai pu remarquer que Ben n’avait pas la capacité du langage verbal. Par contre, il pleurait. Il me paraissait être un enfant très sensible et débordé par ses émotions. J’ai été, malgré moi, impressionnée par l’agressivité et la force de Ben. Il était en grande souffrance et je ne savais pas comment réagir. Ma formation m’avait indiqué que la personne autiste a tendance à rejeter la nouveauté. Mais, je ne savais pas que la réaction pouvait être aussi violente. Comment pouvais-je l’aider la prochaine fois ? C’était là la question que je m’étais posée.
– Séance 2
La deuxième séance avait été plus calme que la première. Ben était arrivé avec les éducateurs dans la partie choix d’instruments. Alors, ayant pris un tambour, je tapais dessus tout en me rapprochant de lui. Ben était intrigué par cet instrument. Il semblait très curieux.
Il regardait en direction des éducateurs. J’avais l’impression qu’il guettait une réponse sur les visages des éducateurs. Il recherchait un signe quelconque de réaction ou d’émotion de leur part, concernant le bruit que faisait avec mon instrument. En réponse, les éducateurs l’avaient encouragé à découvrir l’instrument en question. J’avais risqué une approche en me plaçant à son niveau, mais c’était sans succès, car il m’avait craché au visage tout en me regardant.
J’ignorais ce que cette réaction pouvait signifier pour lui. J’étais dans l’incertitude. Néanmoins, j’étais resté debout, et j’avais continué à taper sur le tambour devant lui. J’étais à l’écoute d’un quelconque signe de sa part pour que l’on puisse communiquer.
C’est alors que, Ben avait volontairement touché d’un doigt le tambour. J’entrepris de l’imiter, de sorte que quand il posait un doigt, j’en posais également un. Puis quand il en posait deux, j’en faisais de même. Il semblait encore hésitant dans ses démarches, car il regardait toujours en direction des éducateurs. Mais quand il s’était mis à frapper sur le tambour avec toute une main, je lui ai offert l’instrument et je m’en étais procuré un autre. On tapait alors sur nos instruments respectifs. Ce n’était qu’à ce moment-là que Ben semblait prendre assurance et s’était amusé. Mais l’instant n’avait pas duré, car il s’était très vite ennuyé et avait replongé dans une telle violence, que les éducateurs avaient encore dû user de la force pour le faire quitter la séance.
|
- Vécu
Ce jour-là, j’ai pu partager, en quelques instants, l’émotion de Ben. Sa souffrance m’avait énormément touché. Mais j’avais également vécu l’expérience du rejet « dans les règles de l’art ». Ce n’était pas très agréable se faire cracher dessus. Et il a fallu que je prenne sur moi, pour garder mon calme et rester professionnel. Je savais que sa réaction ne m’était personnellement destinée. Elle correspondait plus à sa manière de protéger de son espace et ainsi de garder sa distance.
Toutefois, la présence des éducateurs m’avait quelque part rassurée. En effet, ce serait mentir de dire que je n’avais pas peur. L’agressivité de Ben m’avait laissé perplexe, j’avais bien sûr peur qu’il s’en prenne à moi, mais j’avais aussi peur de faire ou de dire ce qu’il ne fallait pas. J’aimerai vraiment pouvoir l’aider à s’apaiser et à s’amuser plus longtemps.
– Séance 3
Ce jour-là, suite à ma demande, on m’avait permis d’avoir Ben pour quelques instants en séance individuelle, en fin de séance. Ayant pris en compte son penchant pour le tambour, j’avais préalablement installé sur le rebord d’une table, des instruments de musiques composées de tamtam, de tambour, et de djembé. J’avais également écarté les chaises de manière à avoir de l’espace.
Lorsqu’il était arrivé, j’étais devant la table, et avais devant moi le même tambour que la dernière fois. Je m’étais alors mise à taper fortement dessus en lui disant : « bonjour Ben veux-tu m’attraper ? » Ben s’était approché de la table. Et lorsqu’il avait tapé sur le tambour le plus proche de lui, je m’étais mise à faire le tour de la table en courant, tout en tapant au passage, sur le plus de tambours possible.
Ben était amusé, et je m’étais arrêté. Mais il voulut m’imiter et recommença à taper sur un tamtam tout en accélérant le rythme de ses pas pour pouvoir taper sur un autre. Alors, je l’avais suivi, mais sans le dépasser. Je restais juste derrière lui, et j’avançais uniquement lorsqu’il s’avançait pour taper sur un autre tamtam. Durant cette séance, Ben n’avait ni craché, ni fait preuve de violence et l’éducateur présent n’avait pas eu besoin d’intervenir.
|
- Vécu
Cette séance a été particulièrement agréable. J’étais plus à l’aise avec Ben, et j’ai pu avoir le contrôle de ma séance, car pour la première fois, il n’avait pas eu de crise. J’avais décidé de mener la thérapie de cette manière, car j’avais remarqué la fois précédente la sensibilité de Ben à l’égard des tambours. Mais j’avais également tenu compte de son caractère hyperactif et violent. De plus, j’avais remarqué que dans ses débuts de crises de violences, Ben avait tendance à marcher droit devant lui puis à repartir en arrière à de multiples reprises, avant de s’en prendre aux personnes à la portée de ses mains. J’avais donc proposé ce jeu afin de lui permettre d’exprimer cette violence à travers ces instruments. Je cherchais à l’apaiser tout en contrôlant son stéréotype. Nous étions rentrés en relation pour la première fois. La séance n’avait duré que 10 min, mais c’était une avancée exceptionnelle.
– Séance 4
Cette fois encore, Ben et l’éducateur étaient arrivés dans la partie choix d’instrument. Et cette fois encore, ils étaient en retrait du groupe au fond de la salle. J’avais proposé à Ben un tambour, il l’avait de suite reconnu et avait joué avec.
Ce jour-là Raphaël était présent dans le groupe. C’était un enfant polyhandicapé, donc je ne parlerai pas de lui dans ce mémoire. Mais il était, tout comme Ben, sensible aux tambours.
Pendant la partie de l’improvisation instrumentale du groupe, un rythme avait attiré mon attention. C’était Ben et Raphaël qui jouaient en parfaite harmonie de rythme et ils s’amusaient ensemble sans même se voir puisque le groupe était tourné face à Annabelle et moi et mettait de dos Ben. J’avais su qu’un dialogue se mettait en place entre eux. Alors, j’avais pris l’initiative de retourner la chaise de Raphaël de manière à ce qu’ils puissent s’apercevoir. Et ce fut exceptionnel, tous deux se répondaient dans le rythme et la joie.
|
- Vécu
Cette séance était tout simplement magnifique. J’ai été témoin d’une forme de communication à travers la musique. Ma formation en Musicothérapie m’avait préparé à cette d’éventualité. Toutefois, lors de cette séance, j’étais en totale admiration devant l’étendue des pouvoirs de communication de la musique. Il n’y avait même pas fallu un regard pour que la relation soit établie.
J’ai été particulièrement touché par la joie partagée entre Ben et Raphaël. Je ne sais pas de quoi ils parlaient, mais ce qui était sûr, c’est qu’eux, ils se comprenaient parfaitement.
-Séance 5
Cette fois-ci, Ben et son éducateur étaient en avance. Ils étaient arrivés au moment du chant des prénoms. Néanmoins, surement compte tenu de ses habitudes, Annabelle ne l’avait pas intégré au groupe, ce qui a fait que son prénom n’avait pas été chanté. Du coup, il m’avait semblé agité. Je m’étais approché de lui pour chanter son prénom avec le tamtam, mais je n’arrivais pas à avoir son attention, de plus, il s’était levé pour aller se cacher dans la cuisine.
Mais étant donné que la porte de la cuisine qui donnait sur la pièce de musicothérapie, on pouvait se voir réciproquement. Je le voyais donc faire ses pas stéréotypés d’avant crise. Cela consistait pour lui à marcher droit devant, puis à repartir en sens inverse. Pour faire diversion, j’avais saisi un tambour et je frappais dessus à chaque fois qu’il regardait dans ma direction. Cela l’avait surpris, mais il continuait son stéréotype sans pour autant rentrer en crise. Mon geste semblait l’intriguer. Mais au bout d’un moment, il s’était lassé et avait dirigé son regard vers le sol. Pour récupérer son attention, j’avais entrepris de marcher comme lui en sens inverse, en laissant place à un jeu de regard entre nous à chacun de nos croisements. Cela avait fonctionné, car il semblait de nouveau captivé, et sa crise ne s’était toujours pas enclenchée. J’avais ensuite tenté de le recroiser une fois sur deux. Il s’en était aperçu et s’était arrêté dans son stéréotype lorsqu’ il ne me voyait pas passer. Au fur et à mesure, ses pas se ralentissaient et ses bras étaient relâchés le long de son corps. Il s’était apaisé. Je lui ai alors laissé un tamtam et j’avais rejoint le groupe. À un moment donné, en me retournant, j’avais aperçu Ben qui sortait la tête de la cuisine.
|
- Vécu
J’ai retenu de cette séance que Ben avait besoin d’attention. C’était un grand progrès comparé à son état initial de renfermement. L’erreur première a été de ne pas l’avoir intégré dans l’immédiat. Je ressentais sa tristesse. Il avait l’impression d’être rejeté par le groupe. Aussi, par mes actions, je tenais à lui montrer que j’étais présente et qu’il n’était pas seul. J’avais pensé le prendre comme cas approfondi. Mais malheureusement, je n’avais plus revu Ben après cette séance. J’ai appris plus tard qu’il avait été placé dans une autre structure à la demande des éducateurs qui avaient jugé son cas trop difficile.
– Conclusion
Ainsi, Ben serait atteint du syndrome d’autisme. Et il présente des troubles de comportements manifestés par des stéréotypes. Il avait également des tendances hyperactives. Toutefois, il nous a été donné de voir qu’il pouvait réagir au son. Il avait d’ailleurs, un penchant avéré pour le tambour. C’était ce penchant que j’avais exploité durant nos séances de musicothérapie. Le but de la thérapie était d’établir un moyen de communication. Et c’était chose faite, car il a pu communiquer à travers la musique avec Raphaël.
En outre, la cinquième séance avait démontré que Ben pouvait s’ouvrir aux autres. Mais qu’il avait besoin d’attention et du temps pour y parvenir. Personnellement, je pense qu’avec de la persévérance, la musicothérapie aurait pu parvenir à de grandes choses avec Ben. D’ailleurs l’efficacité de la thérapie a déjà été prouvée, à son égard, par la diminution de ses crises habituelles et par sa communication.
3-Cas Clinique
-Julien (cas approfondi)
Julien était le plus jeune du groupe. Il avait 5 ans. Julien présente des troubles du spectre autistiques avec un retard mental et il s’automutilait. Il était espagnol. Et sa famille le maltraitait. Ce n’était qu’en 2014 qu’il avait été accueilli auprès d’une famille d’accueil. Néanmoins, il tenait à sa mère. Aussi, sa séparation avec elle l’avait amené à la dépression. Il a ensuite été soigné en clinique depuis le 22 mai.
Lors des séances de musicothérapie, Julien faisait beaucoup d’effort de communication et parvenait à comprendre l’autre. Il était un enfant très sensible aux émotions, ce qui le rendait attachant, mais également méfiant. D’ailleurs, il était particulièrement sensible aux bruits parasites, et pouvait s’énerver au cas où les rituels ne seraient pas suivis. Julien manquait également de confiance en lui, c’est pourquoi il avait un grand besoin d’être rassuré. Et il se refermait très facilement et pouvait même s’isoler. À son égard, la thérapie consistait en la sécurisation, le développement de son autonomie, l’apprentissage des limites sociales et la communication.
– Séance 1
Le jour de son arrivée, nous n’étions pas prévenues. Il avait été accompagné de l’éducatrice qui nous avait demandé de l’intégrer dans le groupe de musicothérapie. Il était très agité, et pleurait. Il avait l’air désorienté, et semblait ne pas comprendre ce qu’il faisait dans ce milieu inconnu avec des personnes qui lui sont étrangères. Notamment moi et Annabelle. Néanmoins, Annabelle avait continué le début de la séance en chantant pour apaiser Martin. Mais après le départ de l’éducatrice, il pleurait de plus belle. Ce qui dérangeait Annabelle dans son rituel de début de séance.
|
- Vécu
Lors de cette première rencontre avec Julien, j’avais pu ressentir la détresse qui l’animait. Il m’avait semblé tourmenté par la nouveauté à laquelle on l’avait confronté. Je voulais tellement l’aider. Je savais que la gestion d’une crise autistique demande de la douceur et de la patience, c’est pourquoi il me paraissait essentiel, à cet instant-là, de trouver une approche pour le rassurer.
Concrètement, afin d’établir une relation de confiance entre nous, et le rassurer. Aussi, pendant que Julien pleurait, j’avais tenté une approche délicate en sa direction. J’avançais peu à peu tout en prenant soin de marquer mes pas par le bruit de mon talon au sol. Ce bruit devait lui permettre de situer ma position par rapport à lui. Mes arrêts laissaient place à un jeu de regard entre nous, car il se retournait et cessait de pleurer. Ces courts instants m’avaient permis d’observer ses réactions d’invitation ou de refus de contact. Au bout d’un moment, il ne se retourna plus pendant mes pas, ce qui m’avait permis d’arriver jusqu’à lui.
|
Dans les faits, je m’étais abaissé à son niveau, et m’étais présenté tout en lui expliquant en espagnol que l’on allait faire de la musique. Mais Julien ne semblait pas disposé à participer à la séance. D’ailleurs, il ne cessait de me dire: « no » « no » « no », et pointait du doigt la porte de sortie. Je n’avais pas voulu l’intégrer de force, alors je l’avais ramené auprès de l’éducatrice.
|
- Vécu
Julien n’avait donc pas assisté à la séance de musicothérapie ce jour-là. Mais je ne l’avais pas ressenti comme un échec. J’avais pu aborder Julien, et c’était pour moi une victoire. Comme l’avait dit Armelle SAILLOUR : « La prise en charge de l’autisme est faite de petites victoires. Le quotidien est difficile, mais petit à petit, on avance ». À ce moment-là, ce qui m’importait c’était d’abord le bien-être de Julien. C’est pourquoi, durant cette rencontre, obtenir sa confiance avait été ma priorité. Mais ce lien recherché ne pourra s’établir contre sa volonté. Je devais donc chercher un moyen pour bien m’y prendre à la prochaine séance.
– séance 2
Cette fois-ci, Julien m’avait reconnu. Il m’observait depuis la porte et hésitait à entrer en salle, pendant que les autres membres du groupe, eux, s’installent. En retour à son geste, je l’avais également observé pour lui montrer que je le voyais. Au rythme de la chanson de bonjour, je claquais mes talons comme à notre première rencontre, mais sans avancer vers lui. Mon comportement avait l’air d’amuser, car il faisait un petit sourire. Et il s’amusait à avancer puis à reculer. Alors, pour l’encourager, lorsqu’il passait la porte, je prenais un air enthousiaste, en tapant plus fort des pieds et des mains, puis quant il ressortait de la salle, je prenais un air mollasson. Ce petit jeu avait duré environ 2 ou 3 min. Mais il avait par la suite fermé la porte et était reparti sans revenir. Mais il riait.
|
- Vécu
De nature très timide, la posture du clown m’avait demandé de gros efforts. Je ne m’en serai jamais cru capable. Mais je ne regrette pas mon geste, car même si Julien n’avait toujours pas participé à la séance, cette fois-ci je l’avais fait rire. Ici encore, j’avais préféré respecter sa décision et l’avais laissé partir. Mais je me demandais comment l’intégrer dans le groupe. Par ailleurs, j’étais tourmenté par la question de savoir si j’avais bien agi. Fallait-il réellement rester connecter avec Julien, pendant que le reste du groupe s’installe ? Il aurait pu se passer des choses inhabituelles mêmes en ce peu de temps.
– Séance 3
Comme d’habitude, j’accueillais les patients avec la chanson de bonjour. Julien se cachait derrière, je le voyais à peine. Cette fois-ci, il avait passé le pas de la porte et s’approchait lentement vers moi, de la même manière que j’avais procédé avec lui la première fois. Aussi, après 2 pas, il marquait un arrêt en tapant des pieds avant de continuer. Lors de ses arrêts, je tapais également des mains en disant « bonjour ». Et lorsqu’il fût assez proche de moi, il m’avait donné sa main. Je l’avais alors accompagné et lui avait proposé une chaise. Julien avait bien voulu s’assoir, mais il refusait de me lâcher la main. Je lui avais alors expliqué que l’on allait faire de la musique et que je ne partirais pas, après quoi, il m’avait lâché la main. Mais quelques instants plus tard, Julien s’était mis à regarder tout le monde et avait pleuré en pointant la porte de sortie. Je l’avais alors raccompagné.
|
- Vécu :
J’avais presque cru pouvoir intégrer Julien au groupe de musicothérapie, mais ce n’était pas encore le cas. Je me demande comment faire la prochaine fois, quelle approche faut-il adopter ? Comment détourner les regards du groupe de l’arrivée de Julien pour qu’il ne se sente pas oppressé ?
– Séance 4
Ce jour-là. Julien était absent, et Annabelle était malade. Je devais donc assurer la séance seule. J’avais entrepris de ne rien changer à nos habitudes. Mais, à l’arrivée du groupe, ils m’avaient demandé Annabelle. Je leur avais alors expliqué son absence, et avais spécifié qu’elle serait présente à la prochaine séance. Mais l’annonce de ce changement avait engendré une véritable émeute. Certains se mettaient à des fous rires, pendant que d’autres se tiraient les cheveux se mettais à faire des gestes stéréotypes. Anna, au lieu de m’embrasser lors de la chanson de bonjour, m’avait mis un coup de tête. J’ai dû imposer mon autorité pour sauver le cadre de la séance. Pour y arriver, je m’étais servi d’un gong et j’avais tapé fort pour surmonter le bruit du débordement.
Les bruits du gong avaient surpris le groupe, qui s’était tu. Chacun avait alors repris sa place et écoutait le gong finir de retentir. Je me souviens avoir entendu Mathieu me demander « C’est quoi ? Sa sert à quoi ? Je peux essayer ? ». J’avais expliqué qu’on allait jouer ; et qu’au premier son du gong tout le monde devait danser, crier, chanter et faire du bruit. Tandis qu’au deuxième son, il faudra vite se rassoir et garder le silence. On avait donc commencé le jeu, et au premier retentissement, tous les patients s’étaient levés et avaient fait un maximum de bruit. Puis, dès que je voyais leur épuisement, je faisais retentir le gong une deuxième fois pour laisser place au silence. À ce moment-là, je me souviens avoir entendu Mathieu et Anna dire avec soulagement « ça fait du bien ». Par la suite, je leur avais laissé le gong à tour de rôle. Et durant le reste de la séance, le gong avait dicté les règles, les bruits et les silences nécessaires et la séance c’était très bien passé.
|
- Vécu
Mener seule la séance a été réellement stressant. Je n’avais que 3 séances à mon compte. De plus je n’avais pas encore établi de lien avec les patients. Ils étaient habitués à Annabelle plus qu’avec moi. Au début, je voulais m’en tenir au programme, mais la force des choses m’avait obligé à m’adapter à la situation. Toutefois, cette première séance seule m’avait enrichi en plus de me conforter dans mes aspirations professionnelles à devenir musicothérapeute.
J’avais rapporté les faits à Annabelle et elle m’avait réconforté et félicité d’avoir su gérer la séance; et elle m’avait assuré qu’elle ne doutait pas de mes capacités. Elle m’avait également avoué que son absence était volontaire pour me faire prendre confiance en moi. J’avoue que j’ai été surprise et très flattée, mais doute toujours de moi.
– Séance 5
Lors de cette séance, pendant qu’Annabelle installait les instruments, j’avais aidé les éducateurs à installer les patients dans la salle de musicothérapie. Ce jour-là, Julien était présent, il m’avait tout de suite attrapé la main. Sa réaction m’avait surpris. J’avais remarqué que son doudou avait une forme de grenouille. J’avais également dans mon sac un instrument de musique de la même forme. Aussi, je lui avais dit que j’avais une surprise pour lui et nous étions allés chercher l’instrument ensemble. J’espérai que l’instrument puisse rassurer Julien, et nous permettre une communication. Pendant que je cherchais dans mon sac, il semblait intriguer par ma surprise. Je lui ai alors tendu la grenouille que j’avais commencé à faire chanter. Il me l’avait presque arraché des mains et m’avait dit avec un grand sourire « OH Musica rana» qui veut dire : la grenouille qui fait de la musique. Cette fois, Julien était resté jusqu’à la fin de la séance et pour les prochaines. Il n’avait pas voulu se détacher de cet instrument, et s’était amusé avec durant la séance sans égard pour les parties de la séance.
|
- Vécu
Cette séance a été une grande avancée pour Julien, car pour la première fois, il était détendu et était resté jusqu’à la fin. J’ai été contente d’avoir pu gagner la confiance de Julien. Je ne m’attendais pas à ce qu’il vienne de lui-même et me tienne la main. Mais je l’étais encore plus lorsque je l’avais vu s’amuser avec l’instrument grenouille. Même s’il ne participait pas encore à la séance, il avait enfin lâché prise.
– Séance 6
Ce jour-là, Julien était rentré seul, et s’était installé seul sur sa chaise dans la salle de musicothérapie. Je m’étais approché de lui pour lui chanter la chanson de bonjour. Il m’avait observé, et m’avait fait un beau sourire et m’avait dit « musica si, si musica ». Puis, il m’avait réclamé la grenouille. Je le lui avais alors apporté.
|
- Vécu
Ce jour-là, je sentais que Julien avait une bonne maîtrise de lui-même. De plus, il m’avait semblé plus présent dans le groupe même s’il m’avait encore réclamé la grenouille.
– Séance 7
Au début de cette séance, Julien s’était installé tout seul ; et cette fois-ci, il n’avait pas cherché à être à côté de moi. Il semblait à l’aise et plus autonome. Il ne m’avait d’ailleurs pas réclamé la grenouille. De plus, il avait l’air de s’intéresser aux autres autour de lui et voulait les connaître. Aussi avait-il esquissé un regard en la direction de personne dont on chantait le prénom avec le tamtam.
|
- Vécu
J’ai vécu une émotion très mitigée, en observant Julien à ce moment-là. Je l’avais trouvé extrêmement attachant. Je ressentais pour lui la même affection que celui que j’ai pour mon fils de 6 ans. Aussi, le voir se détacher de moi, et comprendre qu’il n’avait plus besoin de moi, m’avais quelques part, touché. Mais je savais que c’était une bonne chose, et j’étais contente de le voir intégrer le groupe et devenir plus autonome.
– Séance 8
À mon arrivée, les éducateurs ont déjà installé le groupe. N’ayant pas eu le temps de me préparer, j’avais mis la chanson d’accueil du bonjour sans accompagnement. Mais ce qui m’avait étonné était le fait que Julien avait retenu et chantait presque un refrain complet :
« Bonjour Bonjour comment ça va?
Bonjour Bonjour très bien merci
Je suis content d’être ici »
Puis au moment des prénoms chantés, Julien était, comme d’habitude, installé au milieu de la ronde. Mais il voulait que l’on commence par lui. Je lui avais alors expliqué qu’avec ce jeu c’était chacun à son tour et donc de patienter jusqu’à ce que le sien arrive. Mais que la prochaine fois s’il souhaitait que l’on commence par lui, il lui faudra changer de chaise.
|
- Vécu
Je ne sais pas si j’ai bien fait de demander à Julien d’attendre son tour. Mais Annabelle m’avait rassuré en me rappelant qu’il était nécessaire de lui apprendre les limites sociales. De plus, cela faisait parti des objectifs thérapeutiques de Julien.
– Séance 9
Pendant cette séance, lors de la partie échauffement corporelle, Julien comme à son habitude ne participait pas vraiment. Mais ce jour-là, Julien avait l’air inquiet et s’était mis à pleurer. Il m’avait dit qu’il voulait aller aux toilettes. Aussi, laissant Annabelle avec le groupe, je l’avais tout de suite accompagné. Et dans mon élan de précipitation, j’avais emporté avec moi une boite à meuh. Arrivé aux toilettes, Julien s’était accroupi dans l’espace entre le mur et la cuvette des toilettes, et il se tapait la tête contre le mur. J’étais seule, et je ne comprenais pas ce qui se passait. De plus, Julien s’était mis à enfoncer ses doigts dans sa gorge, à mordre ses avant-bras, et à ronger ses ongles. Il faisait une crise en poussant des gémissements avec une intonation grave. Face à cette situation, j’étais complètement désemparé. Je n’avais fait ni formation médicale, ni études de psychologie me permettant de comprendre le problème de sa pulsion anal. Et je n’avais, à porter de main, que ma boite à Meu. Aussi avais-je essayé de l’apaiser avec la musique afin de l’aider à expulser.
Je m’étais d’abord servi de ma voix en essayant d’être sur le même ton grave de la sienne. Mon but était de lui faire savoir que j’étais avec lui dans sa douleur. Julien avait réagi en me tenant la main et il s’était assis sur la cuvette des toilettes. Il m’avait toutefois tourné la tête, car il ne souhaitait pas que je le regarde.
J’avais continué mon gémissement avec quelques variations de voix en partant d’une intonation aigu pour arriver au plus grave. Julien me serrait plus fort la main dans les intonations graves. Il semblait pousser plus fort. Au bout de 2 longues minutes, Julien réussit enfin à expulser. Je m’étais alors saisi de ma boite à meuh et l’avait secoué de manière à accompagner et à masquer le bruit de l’expulsion de ses excréments dans l’eau. Le son du meuh amusait Julien, et il avait continué à expulser sans plus tenir ma main et à se féliciter lorsque je secouais la boite pendant ses expulsions.
|
- Vécu
Pendant sa crise, j’étais très inquiète pour Julien. Je ne savais ni, ce qui se passait, ni comment l’aider. J’avais également peur que la situation s’aggrave. J’hésitais dans ce qu’il fallait faire ou pas. J’étais complètement désemparée avec pour seul outil ma boite à meuh. Mais lorsque Julien avait répondu à ma première tentative de communication, j’avais repris confiance en moi. Et je suis heureuse d’avoir été en mesure de lui apporter mon aide dans ses moments de douleur.
– Séance 10
Ce jour-là, Julien était déjà sur sa chaise, il m’avait accueilli avec un grand sourire. Il participait activement à toutes les parties de la séance de musicothérapie. Lors de cette séance, Annabelle m’avait demandé de préparer un nouveau jeu dans le cadre du processus créatif. J’avais donc partagé des feuilles aux patients en leur demandant de les faire sonner de manière différente. Par ce jeu, je voulais tester les gestes « instrumentaux » des patients pour ensuite les valider en un petit morceau de musique composé des divers sons.
Lorsque j’étais passé près de Julien pour l’accompagner dans sa création, il était déjà en contact avec Mathieu. Ils s’amusaient ensemble. En fait Julien lui montrait sa feuille, il l’avait secoué, la frottait entre ses mains, la froissait, la mettait en boule, puis l’avait jeté par terre. Après, Mathieu l’avait récupéré, et en avait fait un tube pour chanter à l’intérieur devant le visage de Julien. Celui-ci s’était mis à rire et enleva de la bouche de Mathieu la feuille qu’il voulait récupérer. Puis, l’ayant recouvré, il l’avait plié, déplié, puis déchiré, etc.
|
- Vécu
Avec ce jeu, j’avais peur au départ que les règles soient trop difficiles pour les patients. Mais en leur expliquant peu à peu les choses et en leur montrant d’abord ce que l’on pouvait faire avec le papier. Tout le groupe avait pu participer à cette activité et nous nous étions tous bien amusés. Par ailleurs, Annabelle m’avait félicité.
– Conclusion
Julien était un enfant autiste qui présentait des troubles envahissants du développement-non spécifié (TED-ns) avec une explosion de violence et d’agressivité. Des conditions environnementales traumatiques[96] ont déclenché chez lui, des formes autistiques réactionnelles perturbant la constitution du « soi »[97], ou l’instance de l’individuation.
Dans les faits de l’espèce, il a été séparé de sa mère, une personne à qui il tient énormément, en plus d’avoir été victime de violence. Ainsi, suite à ces faits, le développement de Julien a été marqué par la disjonction des noyaux du « soi ». Et c’est justement cette constitution fragmentée de sa personnalité que la musicothérapie tente d’unifier, en faisant en sorte que Julien puisse se rendre compte de l’existence de son « moi ». Et compte tenu des résultats de mon stage, c’était en très grande partie réussie, car à partir de la dixième séance, Julien s’était bien investi durant les séances de musicothérapie. Il accaparait l’adulte en qui il à confiance et avait progressé dans des paroles plus nettes. Il veut même faire plaisir et éprouve de la fierté à réussir. Il chante la souris verte, sa préférée, meunier tu dors ? Et loup y es tu ? Il jouait calmement, et se racontait des histoires en parlant de son petit frère, et de sa mère. Il n’avait pas l’air inquiet ni angoissé par le manque de sa famille. Plus tard, J’avais appris que Julien pouvait aller seul aux toilettes.
CONCLUSION
J’ai aujourd’hui atteint la fin de ce stage en musicothérapie auprès d’EURECAH. Et je peux dès lors affirmer avec conviction affirmer que « oui » la musicothérapie représente une nouvelle perspective de communication des personnes autistes. La découverte pratique de la musicothérapie m’a permis de conforter l’étendue des connaissances que j’ai acquises durant ces années de formations auprès de notre institution. Grâce à mon stage, j’ai pu, d’une part, découvrir en temps réel mon futur métier ; et d’autre part constaté personnellement la dimension communicative, que possède la musique sur l’autisme.
Au cours de toutes les séances, j’ai traversé des états émotionnels très divers, allant du doute à l’assurance, et de la tristesse à la joie. Mais tous ces états ont contribué à ma remise en question, ce qui m’avait amené à faire un travail sur moi-même. En effet, au cours dudit stage, j’avais mainte fois douté de mes gestes et de mes paroles. J’ai toutefois appris à maîtriser mes affects, afin qu’ils n’influent pas de manière négative sur le déroulement des séances.
Peu à peu, j’ai réussi à analyser ce qu’il pouvait se passer au cours des séances, en essayant de repérer, plus spécifiquement, les différents échanges entre moi et Julien. Au fil de mon stage, mon analyse s’est améliorée.
Le but de mon stage a été de pouvoir communiquer avec une personne autiste par l’intermédiaire de la musicothérapie. La tâche n’était pas évidente au départ, mais l’objectif était devenu de plus en plus accessible jusqu’à ce que je l’eus atteint : objectif réalisé.
La relation qui s’était établie entre moi et Martin, un enfant qui ne parlait pas, m’avait appris à comprendre les significations gestuelles, mimiques et sonores. En théorie, dans la musicothérapie, on prend en compte la personne dans son ensemble, avec une attention particulière portée à son regard et à ses gestuelles. Et c’est par l’intermédiaire de la musique que l’on peut entrer en relation avec une personne atteinte de troubles autistiques. D’ après mes expériences tirées du stage que j’ai effectué, j’estime également que l’entrée en relation avec une personne autiste par le biais de la musique suppose que le musicothérapeute puisse utiliser l’instrument de musique à bon escient. En effet, je pense qu’il est primordial pour le musicothérapeute de pouvoir concilier les productions sonores du patient et la manière de jouer ou de chanter. Pour y parvenir, il est primordial de savoir écouter l’émotion. D’ailleurs c’était en ce sens que Sylvie BRAUN avait soutenu que ce sont les émotions qui intéressent principalement le musicothérapeute.
L’expérience du gong m’avait également convaincu que les sons jouent un rôle dans la relation, il faut donc les prendre en considération dans la musicothérapie et savoir les transformer en jeu. D’ailleurs, la séance du jeu avec les feuilles de papier avait établi que les bruits peuvent amener à quelque chose de construit et d’élaboré.
Par ailleurs, la séance d’improvisation instrumentale autour des instruments m’a persuadé du pouvoir communicatif que possède la musique. Spécialement lors de l’interaction entre Benjamin et Raphaël. Les patients ont pris plaisir à jouer avec leurs instruments. Ce temps qui laissait place à l’inventivité leur a donné l’occasion de communiquer leurs ressentis.
Pour ma part, j’ai également appris à m’exprimer avec le regard, sans utiliser des mots. Ce qui m’a énormément fortifié dans mes aspirations futures tout en m’apprenant à découvrir mes limites.
Maintenant, une chose reste à savoir : et si présenter les sons au ralenti, parler lentement et décomposer les gestes permettaient des améliorations notables du développement et du comportement chez certains enfants autistes ?
BIBLIOGRAPHIE
- Ouvrages :
- American Psychiatric Association. DSM-IV-TR : manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, 4e édition, texte révisé. Washington DC, 2000. Traduction française par J.-D Guelfi et coll., Masson, Paris, 2003.
- Dr Melvin Kaplan, vision ambiante : une approche physiologique des troubles autistique, ARRI, vol 20, NO 2006.
- FRANÇOIS Hébert, Rencontrer l’autiste et le psychotique: jeux et détours, éd. Vuibert.
- GLORIA Laxer et PAUL Trehin Les troubles du comportement, Éd. Autisme France diffusion, 2008
- Nordoff P, Clive R. Therapy in music for handicapped children. Barcelona Publisher; 2004.
- ROLAND Vallée, La relation émotionnelle : Approche thérapeutique par la musicothérapie des troubles de la relation, de l’expression, décembre 2015.
- ROGE Bernadette, Autisme, comprendre et agir, Éd. Dunod, 2008
- Laurent MOTTRON, L’autisme, une autre intelligence, Mardaga, 2006
Guiraud-Caladou JM. Musicothérapie, paroles des maux : réflexions critiques. Paris: ed. Van de Velde;1983.
- WINNICOTT, Jeu et réalité – l’espace potentiel de, édition Puf nov.2000.
- Documents :
- Adriana MARC, Utilisation de la voix et des sons : dans l’´education et la thérapie
- BARRAQUE Philipe, ethnomusicologue et musicothérapeute, université de Paris.
- BOUCHARD Chrystine, MTA, douleur et musicothérapie
- CAILLERET Perrine, La musicothérapie active : un lieu d’expression et de communication pour un enfant polyhandicapé.
- Du collège des médecins de Québec et de l’ordre des psychologues de Québec, Les Troubles du Spèctre de l’Autisme, évaluation clinique
- Daniel TAMMET, je suis né un jour bleu.
- Emmanuelle LEFEVRE, Article Corps, sonore et mouvements psychiques à l’adolescence dans Revue française de Musicothérapie.
- FREUD, En 1907, lors d’une conférence sur “ Le créateur littéraire et la fantaisie ”.
- OLDFIELD Amelia, La musicothérapie interactive.
- Pascale POIRIER Quand la voix prends corps pour se entendre dans Psychomotricité entre théorie et pratique.
- MALEVAL Jean-Claude, L’autiste et sa voix.
- Musicothérapie et autisme Deux études de cas selon le modèle de Rolando Benenzon.
- ROLANDO Omar Benenzonet EDITH Lecourt, La musicothérapie: La part oubliée de la personnalité.
- Travail de Guy Rosolato, qui s’inspire du travail de Palo Alto et de BENENZO R.
- WINNICOTT, L’approche du jeu.
- Webographie
- http://autisme.france.free.fr, Rubrique « qu’est-ce que l’autisme/Carte d’accompagnement »
- Site de la faculté de médecine de pierre & Marie-curie. « Psychomotricité : expressivité du corps »
[1] Ces dires ont été d’autant plus corroborés par une phrase de Victor Hugo disant : « La musique exprime ce qui ne peut être dit et sur quoi il est possible de rester silencieux ».
[2] Education Utile Régionale pour enfants citoyens atteints d’un handicap. Voir http://www.eurecah.fr.
[3] Voir le site internet, http://www.ch-st-cyr69.fr/
[4] Voir le site internet, http://www.education.gouv.fr/annuaire/69-rhone/lyon-8/etab/ecole-elementaire-spe.-publiqu-edouard-herriot.html
[5] Source en provenance du site internet http://www.eurecah.org.
[6] Définition donné par le dictionnaire, Antidote HD
[7] D’après Juliette GARRIGUE, Expression, musique. Notions, Encyclopedia Universalis, page395.
[8] C’est en ce sens que Claude Debussy énonce : « La musique commence là où la parole est impuissante à exprimer ». Monsieur Croche et autres écrits, Gallimard, 1984, p.206.
[9] L’idée soutenue est que la musique est une perception sociologique. Autrement dit, c’est l’homme qui qualifie un son quelconque de musique. Ainsi, la musique serait un sens donné à un son ou une percussion. En illustration, la musique d’un oiseau ne serait musique, que parce qu’on la qualifie ainsi.
[10] Voir, la nouvelle musique des sphères de Sylvie Vauclair, claude et samuel levine.
[11] Sylvain MISSONIER et Nathalie BOIGE Rhythm’n’babies édition Spirale.
[12] Selon Adriana Marc, Utilisation de la Voix et des sons, dans l’éducation et la thérapie psychomotrice, Université Bordeaux SEGALEN, institut de formation en psychomotricité. P 90
[13] Se dit des bruits intestinaux.
[14] Didier ANZIEU, le moi-peau
[15] Selon Adriana MARC, Utilisation de la voix et des sons dans l’éducation et la thérapie psychomotrice, p13.
[16] Eino PARTANEN auteur principale de l’étude et chercheur à l’université d’Helsinki.
[17] Daniel Stern, Le monde interpersonnel du nourrisson, PUF, coll. Le fil rouge, 1989
[18] D’après Adriana MARC, Utilisation de la voix et des sons dans l’éducation et la thérapie psychomotrice P12
[19] DELIEGE Irène, VITOUCH Olivier, LADINIG Olivia (2010), musique et évolution, in Google livre (en ligne)
[20] Voir le site internet de la musicothérapie : http://www.memoireetvie.com/medias/soudani6.htm
[21] D’après Adriana MARC, Utilisation de la voix et des sons dans l’éducation et la thérapie psychomotrice, P13
[22] LEVITIN Daniel (2010), De la note au cerveau.
[23] LECOURT Edith. La Musicothérapie Analytique De Groupe – Improvisation, Écoute Et Communication.
[24] MANNES Elena (2008), L’instinct de la musique, documentaire.
[25] OLIVIER Aude (juin 2007). La symphonie neuronale, in CNRS (en ligne).
[26] Chrystine BOUCHARD, MTA, douleur et musicothérapie.
[27] BENENZON Rolando Omar, La musicothérapie : la part oubliée de la personnalité, Ed. De Boeck Université, 2004
[28] Perrine CAILLERET, La musicothérapie active : un lieu d’expression et de communication pour un enfant polyhandicapé. P23
[29] Nordoff P, Clive R. Therapy in music for handicapped children. Barcelona Publisher; 2004.p.69.
[30] Selon, Perrine CAILLERET, La musicothérapie active : un lieu d’expression et de communication pour un enfant polyhandicapé.
[31] Voir travail de Guy Rosolato, qui s’inspire du travail de Palo Alto et de BENENZO R.
[32] Conçu par Philipe BARRAQUE, ethnomusicologue et musicothérapeute, université de Paris 8
[33] Créée par Mireille Marie, Artiste et pédagogue.
[34] Perrine CAILLERET, La musicothérapie active : un lieu d’expression et de communication pour un enfant polyhandicapé. P.26
[35] Edith LECOURT. Découvrir la musicothérapie. Paris : Eyrolles ; 2005.p.112
[36] Voir supra, La détente psychomusicale
[37] Guiraud-Caladou JM. Musicothérapie, paroles des maux : réflexions critiques. Paris: ed. Van de Velde;1983.P.158
[38] American Psychiatric Association. DSM-IV-TR : manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, 4e édition, texte révisé. Washington DC, 2000. Traduction française par J.-D Guelfi et coll., Masson, Paris, 2003, p. 80-99.
[39] Du collège des médecins de Québec et de l’ordre des psychologues de Québec, Les Troubles du Spèctre de l’Autisme, évaluation clinique.
[40] Donnés tiré du troubles du spectre de l’autisme, évaluation clinique, Collège des médecins du Québec et de l’ordre des psychologues. P8
[41] Du collège des médecins de Québec et de l’ordre des psychologues de Québec, Les Troubles du Spèctre de l’Autisme, évaluation clinique.
[42] Voir infra, communication verbale et non verbale.
[43] Sandra DUMONT-BEAUVILLE article «Les particularités sensorielles chez les personnes atteintes d’autisme ».
[44] Adriana MARC, Utilisation de la voix et du son, dans l’éducation de la thérapie psychomotrice. P 62
[45] Catherine BARTHÉLEMY Article Troubles de la communication dans l´autisme : de l’exploration cérébrale à la thérapeutique.
[46] LEMAY, M. Éditorial : Y a-t-il un autisme ou des autismes? Dans la revue Santé mentale au Québec
[47] Jean-Claude MALEVAL, L’autiste et sa voix
[48] Suite à la parution du DSM-V, le terme trouble du spectre de l’autisme remplace le terme trouble envahissant du développement (TED).
[49] Voir supra, Troubles envahissants du comportement,
[50] Daniel TAMMET, je suis né un jour bleu, p. 101
[51] Dr Melvin Kaplan, vision ambiante : une approche physiologique des troubles autistique, ARRI, vol 20, NO 2006.
[52] Voir supra, système nerveux
[53] « Le Moi-peau », de Didier Anzieu, éd. Dunod, 2003, page 26.
[54] Coauteur de l’expérience, et cité par le Daily Mail
[55] Coline DEVOS, Travail d’adaptation posturale au travers d’un parcours de franchissement chez deux enfants porteurs d’autisme, P6
[56] Voir https://www.youtube.com/watch?v=fQysrw5He2w.
[57] Propos d’Anne-Marie LATOUR
[58] Tiré du site op-cit.
[59] Source en provenance du site internet http://www.eurecah.org.
[60] Propos tiré du site d’EURECAH
[61] Source en provenance du site internet http://www.eurecah.org
[62] Voir, http://www.eurecah.org
[63] Voir supra, l’approche du jeux
[64] Emmanuelle LEFEVRE, Article Corps, sonore et mouvements psychiques à l’adolescence dans Revue française de Musicothérapie
[65] C. BALLOUARD, Psychomotricité ed. Dunod
[66] D’après le site de la faculté de médecine de pierre & Marie-curie. « Psychomotricité : expressivité du corps ». p.273
[67] Pascale POIRIER Quand la voix prends corps pour se entendre dans Psychomotricité entre théorie et pratique
p.274
[68] Adriana MARC, Utilisation de la voix et des sons : dans l’´education et la thérapie psychomotrice
[69] Voir figure : Chanter qu’est-ce que c’est ?
[70] Lecanuet et al, 1986 ; Lecanuet, Granier-Deferre, Cohen, Le Houézec & Busnel, 1987
[71]Voir la figure op-cit
[72] Voir figure : Chanter qu’est-ce que c’est ?
[73] Adriana MARC, Utilisation de la voix et des sons : dans l’´education et la thérapie psychomotrice, p47
[74] Voir supra, L’approche du jeu (WINNICOTT)
[75]Moments durant lesquels tous les membres du groupe font la même chose.
[76] Emmanuelle LEFEVRE, Article Corps, sonore et mouvements psychiques à l’adolescence dans Revue française de Musicothérapie P 48
[77] Sandra Dumont-Beauville, Les particularités sensorielles chez les personnes atteintes d’autisme, Psychologue IME La Frégate (83200) / FAM Héméralia (13780)
[78] Adriana MARC, Utilisation de la voix et des sons : dans l’education et la thérapie psychomotrice
[79] Perrine CAILLERET, La musicothérapie active : un lieu d’expression et de communication pour un enfant polyhandicapé. p23
[80] http://lyonmusicotherapie.free.fr.
[81] Emmanuelle LEFEVRE, Article Corps, sonore et mouvements psychiques à l’adolescence dans Revue française de Musicothérapie
[82]Op-cit, Emmanuelle LEFEVRE
[83] Les références théoriques s’inspirent de la psychanalyse, l’Ethnologie et Anthropologie.
[84] Source, Pascal Rivière, http://www.aecoute.net
[85] Propos de BASTIEN Gournay, Musicothérapie active
[86]WINNICOTT, Jeu et réalité – l’espace potentiel de, édition Puf nov.2000, p 139.
[87] Op-cit, WINNICOTT, Jeu et réalité – l’espace potentiel, p 73
[88] Winnicott, D.W. 1975. Jeu et réalité ; l’espace potentiel, Gallimard.
[89] FREUD, En 1907, lors d’une conférence sur “ Le créateur littéraire et la fantaisie ”.
[90] Didier ANZIEU, Le psychodrame analytique chez l’enfant et l’adolescent, édition Puf 2000,
[91] Propos tiré de Canalblog, un fils asperger , comment détecter le syndrome d’asperger chez le jeune enfant ?
[92] https://www.youtube.com/watch?v=atNkI6QFZ50
[93] Geoffrey TROLL, co-auteur avec le Dr Jean RODRIGUEZ, de l’art-thérapie, pratiques, techniques et concepts, Ellébore, 1995)
[94] Bruno GEPNER, pédopsychiatre et psychiatre, spécialiste de l’autisme auprès d’enfants et d’adultes, chercheur au CNRS et enseignant à l’Université d’Aix Marseille.
[95] http://www.lanouvellerepublique.fr/France-Monde/Actualite/Sante/n/Contenus/Articles/2015/08/13/La-musique-pour-prevenir-les-crises-d-epilepsie-2430022
[96] Hospitalisations précoces, rupture d’attachement, carences affectives, maladies somatiques, déficiences sensorielles
[97] Pour Laurent Mottron, les sujets autistes sans retard mental présentent des spécificités cognitives, non pathologiques. Les déficits dans les relations sociales relèveraient de difficultés d’intégration de la complexité informationnelle des relations humaines plus qu’un trouble de la relation émotionnelle. Mottron effectue une analogie avec la situation des sourds. La société devrait modifier son regard sur l’autisme en acceptant que les autistes soient différents, comme la société a accepté la différence de la surdité. Cf. Mottron L, L’autisme, une autre intelligence, Mardaga, 2006.
Nombre de pages du document intégral:108
€24.90