La responsabilité des Etats en cas de non-respect du droit communautaire à l’égard des citoyens et des entreprise
Thème : ‘La responsabilité des Etats en cas de non-respect du droit communautaire à l’égard des citoyens et des entreprises’
RESUME
Le droit communautaire s’efforce lentement, mais assurément d’unifier la règlementation au niveau des États membres communautaires. Et dans son élan, les jurisprudences que l’on a pu étudier démontrent qu’il offre de plus en plus de droits aux citoyens de la communauté, mais également aux entreprises. Il arrive même que le droit communautaire fasse primer les droits de ses ressortissants par rapport à celui des États membres communautaires. En ce cas, des arrêts de la Cour de justice de la communauté européenne admettent le droit à réparation des particuliers ou des sociétés victimes des agissements illicites ou des actes de l’État membre qui est contraire au droit communautaire. Ce droit, avons-nous vu, diffère de la notion de réparation que l’on retrouve en droit civil. Néanmoins, le concept de la responsabilité étatique présente plusieurs similitudes avec le Droit commun d’ordre interne.
Néanmoins ce droit à réparation, qu’offre le droit communautaire aux particuliers et aux entreprises, en cas de non-conformité de l’État membre au droit communautaire, n’est pas un principe acquis; et il faut la réunion de certaines conditions pour pouvoir y prétendre. Il en est ainsi de l’exigence d’un acte dommageable, de l’existence d’un préjudice et de la relation de cause à effet. De plus, d’autres critères d’ordres procéduraux sont souvent mis en jeux au niveau des jurisprudences.
Par ailleurs, le droit à réparation soulève des questionnements de nature politique dans la mesure où elle a tendance à titiller la souveraineté des États membres communautaires à travers la législation, l’administration, et même la juridiction.
INTRODUCTION
La notion de responsabilité est une idée générale du droit qui a été admise non seulement en droit international, mais aussi dans des matières liées à la protection des particuliers et des entreprises, précisément dans la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Il en est de même dans l’ordre juridique communautaire, notamment le traité de la communauté européen qui a mis en place un régime de responsabilité de la communauté visant à protéger tant les particuliers que les entreprises au cas où ces derniers seraient atteints d’un préjudice dû aux manquements d’un État du fait du non-respect du droit communautaire. En effet, le non-respect par les États du droit communautaire peut occasionner des dommages évidents aux citoyens et aux entreprises. Cependant, la question de la responsabilité des États a été un sujet très sensible dans la mesure où elle relève directement de la souveraineté des États dans le mouvement de l’intégration communautaire. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour laquelle la cour de justice de l’Union européenne est restée muette pendant longtemps sur le sujet de la responsabilité des États du fait du non-respect du droit communautaire. De même, les juges communautaires se heurtaient à un vide juridique au-devant des actions en responsabilité opérées par les opérateurs victimes du non-respect du droit communautaire. L’absence des dispositionsformelles du traité de Rome ou des textes communautaires prévoyant expressément, un régime de responsabilité, au profit des particuliers et des entreprises, en réparation des dommages résultant du non-respect par les États du droit communautaire, rendait le jugement difficile. Il a fallu attendre le célèbre arrêt Francovich pour affirmer l’existence d’un principe de responsabilité des États pour violation du droit communautaire. Les affaires Brasseries du pêcheur, Factortame III, et British Telecommunications ont également permis de confirmer le caractère général de ce principe fondamental et de préciser les conditions de mise en œuvre de cette responsabilité. Mais qu’en est-il réellement ? Pour avoir une opinion arrêtée sur la question. Il nous est opportun de voir de prime abord l’aspect théorique, pour ensuite en venir à l’aspect pratique.
PREMIERE PARTIE : L’ASPECT THEORIQUE
Chapitre 1 : La Théorie générale sur la responsabilité Etatique
La théorie de la responsabilité en Belgique trouve son origine à travers, l’article 1382 du Code civil français qui dispose que: « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.» La règle est de portée générale. Néanmoins, à l’égard de l’État, le principe avait été l’irresponsabilité de la puissance publique, car il n’existait pas de juridiction compétente pour juger les actes de la souveraineté nationale.
Suite à l’arrêt Blanco du 8 février 1873, un tournant jurisprudentiel a été opéré, car désormais, l’État devient responsable. Cependant, ladite responsabilité concerne spécifiquement le domaine de la mission de service public confiée aux personnes privées. De plus, le contentieux de la responsabilité administrative n’est pas régi par les règles du Code civil puisqu’elle est de la compétence du juge administratif. Ainsi, cet arrêt reconnait la responsabilité étatique au niveau national. Il fallait attendre le 19 novembre 1991, l’avenue de l’arrêt Francovich, pour que le principe de la responsabilité internationale d’un État membre communautaire soit établi. Cet arrêt a donné gain de cause à Francovich et Bonifaci, deux particuliers, suite à des dommages résultant d’une violation du droit européen par l’État Italien, leur État. Cet arrêt a pour particularité d’ouvrir aux Européens la possibilité de poursuivre leur État en réparation au cas où il manquerait à ses obligations internationales. Mais quels sont alors les conditions de responsabilité Etatique, et
A : Les conditions générales de la responsabilité Etatique
L’engagement de la responsabilité des États est conditionné par trois principes généraux. Dont l’illicéité, le préjudice ou le dommage et l’imputabilité.
1 : L’illicéité
La responsabilité étatique internationale est subordonnée à l’existence d’un fait international illicite. L’établissement de l’illicéité relève du Droit international. Il diffère de la conception en Droit interne du fait illicite. En fait en Droit international, l’illicéité des actes de l’État constitue « le fondement et l’élément premier de la responsabilité, celui auquel se rattachent tous les autres : imputation du fait illicite, préjudice, réparation et éventuellement punition »[1].
Le fait internationalement illicite se définit comme étant «une atteinte à la sécurité des rapports juridiques entre les sujets du droit international.[2] » Et il y aurait fait international illicite de l’État dans le cas où il y aurait eu «un comportement consistant en une action ou une omission (…) attribuable, d’après le droit international, à l’État » et «que ce comportement constitue une violation d’une obligation internationale ». Ainsi donc, la qualification d’un fait pour illicite résulte de l’existence d’une violation du droit international par l’État. Et ladite violation peut être le résultat du non-respect d’une obligation conventionnelle ou d’une obligation coutumière[3]. Mais elle peut également résulter d’une abstention à caractère condamnable. Néanmoins, la doctrine différencie les obligations passives (qui consistent pour les États à s’abstenir), des obligations actives (qui se traduisent par des obligations de faire). Ainsi, la violation peut résulter d’une action ou d’une abstention de l’État.
2 : Le préjudice
Dans le cadre du Droit international public, le préjudice doit résulter d’un fait internationalement illicite. En fait, « Le préjudice comprend tout dommage, tant matériel que moral résultant du fait internationalement illicite de l’Etat»[4]. Concrètement, le préjudice doit porter atteinte à un droit ou un intérêt d’une personne sujette au droit international. En ce sens, M. Dailler et M. Pellet disent que «les sujets du droit international ne peuvent invoquer un fait illicite pour fonder leur action que si ce fait a porté atteinte à un droit juridiquement protégé, un droit dont ils sont titulaires»[5]. Ainsi, il ne saurait y avoir de préjudice sans violation du droit d’un tiers.
3 : L’imputabilité
En vertu de la théorie générale de la responsabilité édictée par le Droit international public, l’Etat, auteur du préjudice, est responsable du fait illicite qu’il a engendré, et qui a causé un préjudice à une victime. Selon Jean COMBACON, le processus d’imputabilité a pour objectif «de rendre possible le rattachement de la conduite d’un sujet interne à un sujet international, aux fins de détermination de la responsabilité»[6]. Ainsi, le concept de l’imputabilité rend l’Etat responsable de ses actes ou de ses faits. En principe, cette responsabilité étatique couvre les agissements de ses agents et ceux de ses subalternes[7].C’est pourquoi, «aucune distinction n’est à établir entre les autorités centralisées et décentralisées, entre celles qui sont spécialement en charge des relations extérieures de l’Etat(…) et les autres, non plus qu’en fonction du caractère législatif, exécutif, administratif ou juridictionnel des activités de l’agent[8]».
B : Les conditions spécifiques de la mise en œuvre de la responsabilité Etatique pour violation du Droit communautaire
La Cour de Justice de la communauté européenne se base sur les critères édictés par l’article 288 du traité de la communauté européenne pour retenir la responsabilité de la communauté européenne. Et elle applique les mêmes conditions aux États membres, car elle considère qu’il n’existe aucune divergence dans la protection des particuliers et des entreprises en raison de la violation du Droit communautaire commis par la communauté européenne ou par les États membres. Ainsi, dans l’un, ou l’autre des cas il existe trois régimes de responsabilité, en considération du Droit international public, sus-développé, qui engage un État pour les faits de ses organes. Aussi les 3 conditions sont :
- La règle de droit violée doit avoir accordé des droits aux particuliers ou aux entreprises.
- La violation, en question, doit être suffisamment déterminée. La faute n’est pas une condition « sine qua non » de l’existence d’une violation. D’ailleurs, la CJCE[9] définit une violation caractérisée comme étant « une méconnaissance manifeste et grave par un EM ou par une institution communautaire des limites qui s’imposent à son pouvoir d’appréciation ». Néanmoins, la non-transposition d’une directive communautaire est considérée de plein droit comme étant une violation. Toutefois, la Cour précise qu’une analyse des bases de l’interprétation du droit communautaire par l’État membre[10] sera effectuée, afin de juger de sa bonne foi. Mais sa mauvaise foi sera établie si, antérieurement, la CJCE a déjà interprété le texte.
- Il doit, en outre, y avoir un lien de causalité entre le dommage subit et la violation du droit communautaire.
Chapitre 2 : le fondement du principe de la responsabilité de l’Etat membre du Droit communautaire
La responsabilité de l’État membre communautaire résulte de deux cas différents. D’une part, il y a la responsabilité de l’État membre communautaire issue des actes de l’organisation internationale. En effet, la personnalité juridique propre et distincte des organisations internationales n’exonère pas exclusivement la responsabilité des États membres en droit international. Et pourtant, selon Pierre KLEIN « Il n’existe pourtant aucun lien logique inéluctable entre personnalité et responsabilité exclusive de l’entité qui en est titulaire»[11]. D’autre part, la responsabilité étatique des États membres communautaires peut résulter d’un manquement à ses propres obligations. Notamment en cas de violation du Droit communautaire. Notre attention se portera sur cette deuxième éventualité qui est étroitement corrélée à la souveraineté de l’État. Cette question est donc particulièrement délicate, car elle met en jeu la conception traditionnelle de la souveraineté de l’État[12]
A : L’émergence du principe de la responsabilité de l’Etat membre
En ratifiant le traité de l’Union européenne, les États membres ont adhérés le droit communautaire. De ce fait, ils se sont rendus juridiquement obligés au respect des termes du droit communautaire. Ainsi, leur adhésion doit en principe refléter une coopération loyale.
1 : Le principe de la coopération loyale
C’est par l’arrêt Francovich, que la Cour de justice des Communautés européennes eût décrété l’obligation de coopération loyale, en appuyant notamment sur le fait que le principe de la responsabilité repère « également son fondement dans l’article 10 du traité[13], en vertu duquel les États membres sont tenus de prendre toutes les mesures générales ou particulières propres à assurer l’exécution des obligations qui leur incombent en vertu du droit communautaire. »[14]
Concrètement, cet article 10 dispose que les États et les institutions communautaires se doivent de concourir, de bonne foi, dans l’application des termes du traité. Ainsi, cette disposition a vocation à imposer aux États la mise en œuvre au niveau interne ou nationale du droit communautaire tout en interdisant toute les mesures qui peuvent aller à l’encontre de la réalisation des objectifs communautaires.
Il en résulte donc une obligation conjointe des organes étatiques dans le cadre de la coopération loyale et du respect des dispositions du traité des Communautés européennes. C’est alors, cette vision unifiée de l’État qui permet l’engagement de la responsabilité étatique, dans le cas où l’auteur de la violation du droit communautaire serait issu du pouvoir législatif, judiciaire ou exécutif ou encore de l’administration. De même, la responsabilité de l’État couvre également les entités publiques décentralisées ou fédérées[15].
Par ailleurs, la Cour de justice avait étendu le raisonnement de l’unité étatique, en s’appuyant sur les principes du droit international qui soutiennent que les organes de l’État sont réputés de l’État[16]. C’était également ce concept de l’unité de l’État en droit national, qui avait été transposé en matière de responsabilité internationale des États membres de la Communauté européenne[17].Ce qui a fait de la loyauté communautaire un principe de référence pour établir la responsabilité d’un État membre communautaire.
2 : L’allègement du principe
Après l’arrêt Francovich, la jurisprudence de la cour de justice de la communauté européenne avait écarté la référence à l’obligation de loyauté communautaire. Il en est ainsi par exemple de l’arrêt Brasserie du pêcheur et Factortame III[18]où la Cour de justice s’était appuyée sur une formule elliptique. Néanmoins, M. Schockweiler considère que « cette référence à l’article 5[19] du traité CEE n’est pas un point central ni un élément indispensable du raisonnement de la Cour […] La référence à l’article 5 du traité CEE constitue tout au plus une confirmation ou une illustration du principe que le fondement de la responsabilité de l’État doit être trouvé dans le système du traité »[20]. Il ressort de ce changement, l’inutilité de l’établissement de l’obligation de loyauté. Notamment pour justifier la responsabilité des États membres ; puisque désormais, l’article 10 est de nature accessoire et ne sert plus qu’à affermir le fondement de la responsabilité des États membres.
B : La reconnaissance du principe de la responsabilité de l’Etat membre communautaire envers les particuliers et les entreprises.
Comme nous avons pu le constaté, par l’arrêt Brasserie, la Cour de justice des Communautés européennes a déjà reconnu la responsabilité de l’État membre en cas de non-respect du droit communautaire du ressort de l’organe judiciaire interne73. Seulement, c’est sont les l’arrêt Köbler et l’arrêt Traghetti de lMediterraneo qui ont raffermis le principe de la responsabilité établi par la Cour de justice. En effet, l’arrêt Köbler, avait été le premier à avoir prôné la protection concrète des particuliers et des entreprises dans le domaine de l’activité judiciaire. Néanmoins, dans cet arrêt, la Cour avait encore rejeté les prétentions du demandeur même si elle avait été en accord sur le plan théorique76. Il avait fallu attendre l’arrêt Traghetti pour confirmer les avances de l’arrêt Köbler et admettre la responsabilité Etatique envers les particuliers pour non respect du Droit communautaire. La cour avait alors expressément admit la responsabilité « personnel » de l’Etat membre communautaire en énonçant : « dans l’ordre juridique international, l’État dont la responsabilité est engagée du fait de la violation d’un engagement international est considéré dans son unité, il doit en être d’autant plus ainsi dans l’ordre juridique communautaire.»[21]
La Cour de justice avait de plus qualifié de violation du Droit communautaire le fait « où le juge national interprète d’une manière telle qu’elle aboutit, en pratique, à une violation du droit communautaire applicable »77.Pour justifier cette décision et permettre ainsi le droit à réparation, la Cour s’était inspiré de l’effet de l’arrêt Köbler, en disant : « exclure, dans pareilles circonstances, toute responsabilité de l’État en raison du fait que la violation du droit communautaire découlant d’une opération d’interprétation des règles de droit effectuée par une juridiction, reviendrait à vider de sa substance même le principe posé par la Cour dans l’arrêt Köbler »78. Par conséquent, le principe tiré de la jurisprudence Köbler s’applique dès lors, à tous les composants de l’acte de juger, y compris l’activité juridictionnelle qui est maintenant susceptible d’une action en responsabilité.
Pour conclure , on peut aisément dire que le principe de la responsabilité des États membres en cas de violation du droit communautaire a pour origine l’œuvre jurisprudentielle de la Cour de justice Communautés des européennes. En prenant en compte les espérances individuelles, la jurisprudence de la Cour de justice voulait faire transparaître sa maturité à l’égard du système juridique commun[22].Dans cette optique, M. Vandersanden avance que « la réussite de l’entreprise résidera dans le respect de l’équilibre et de la juste mesure que chacun des deux ordres juridiques en présence devra concéder à l’autre, en sachant toutefois que la primauté du droit communautaire et la protection effective des droits des particuliers font partie intégrante de cette relation harmonieuse et que c’est la Cour qui en est le maître d’œuvre »[23].
En restreignant la marge de manœuvre du juge national des Etats membres, en ce qui concerne l’application du droit communautaire, la Cour de justice assure d’une part, plus de protection aux particuliers et aux entreprises, en plus d’une réparation adéquate des préjudices subis par la violation du droit communautaire par des États membres. Mais d’autre part, le Droit communautaire empiète également sur l’autonomie judiciaire des Etats membres.
C : La responsabilité de l’Etat législateur
En droit international, le principe de la responsabilité de l’État législateur repose sur le concept de la supériorité du traité sur la loi. Ainsi, la responsabilité de l’État législateur est engagée en cas de contradiction entre les normes de portées internationales, édictées par le traité et la législation nationale[24]. L’obligation de l’État législateur résulte de son adhésion au traité. Ainsi, sa responsabilité résulte, concrètement, du principe général de « Pactasuntservanda ». Cette obligation de conformité au traité international, implique les différents organes de l’État, y compris, l’organe législatif qui a pour devoir de veiller à la conformité des Lois avec les conventions internationales. À défaut, la Loi serait une norme irrégulière. Cette irrégularité de la Loi s’analyse comme étant une perte de la souveraineté du Parlement, car désormais, c’est le droit communautaire qui prime, en tant que supériorité normative.
Chapitre 2 : Les conditions de mise en œuvre de la responsabilité
A : Le principe de la primauté du Droit communautaire
Le principe de la primauté du droit communautaire garantit la mise en œuvre du droit communautaire par les États membres et la protection des droits conférés aux particuliers et aux entreprises par le droit communautaire.
1 : Le principe de la primauté du droit communautaire.
Le principe de la primauté du droit communautaire est une assurance de l’application, au niveau interne, du droit communautaire par les États membres. En effet, même en cas de conflit avec une norme interne, le droit communautaire prime, car il occupe une place supérieure12.
La célèbre affaire Costa contre E.N.E.L avait par ailleurs précisé « qu’issu d’une source autonome, le droit communautaire ne pourrait donc, en raison de sa nature spécifique originale, se voir judiciairement opposer un texte quel qu’il soit, sans perdre son caractère communautaire et sans que soit mise en cause la base juridique de la Communauté elle-même »[25]. Ce principe de la jurisprudence a acquis un fondement juridique à travers le paragraphe 2 du protocole n° 7 annexé au Traité d’Amsterdam du 2 octobre 1997. Ce paragraphe est dédié à l’acquis communautaire ainsi qu’aux « principes mis au point par la Cour de Justice En ce qui concerne la relation entre le droit national et le droit communautaire »[26]. Ainsi, selon ces dispositions, la communauté européenne possède un ordre juridique qui doit être assimilé au système juridique national des États membres y compris leur juridiction nationale De plus, le principe de la primauté du droit communautaire atteint également les particuliers et les entreprises. Puisqu’ils doivent s’y conformer au détriment de leur loi nationale. L’arrêt Van Gend en Loo avait raisonné en ce sens en disant que « Le droit communautaire (…) crée des charges dans le chef des particuliers, est aussi destiné à engendrer des droits qui entrent dans leur patrimoine juridique »16.
Tout compte fait, le principe de la primauté du droit communautaire a pour fonction de garantir la mise en œuvre des règles communautaires imposées au niveau du système interne des États membres. C’est alors, en ce sens que la Cour de justice des Communautés européennes avait imposé le droit communautaire à la règle du droit interne des États membres, y compris au niveau de leurs dispositions constitutionnelles[27].
2 : La mise en œuvre du principe de la primauté du droit communautaire.
La mise en œuvre du principe de la primauté requiert l’existence d’un moyen d’action au profit des particuliers et des entreprises, et d’un contrôle juridictionnel en cas de transgression du droit communautaire par les États membres. C’est en ce sens que l’arrêt Francovich et Bonifaci disposait que « la pleine efficacité des normes communautaires serait mise en cause et la protection des droits qu’elles reconnaissent serait affaiblie si les particuliers n’avaient pas la possibilité d’obtenir réparation lorsque leurs droits sont lésés par une violation du droit communautaire imputable à un État membre »[28]. Ainsi, le principe de la primauté du droit communautaire implique également le devoir de réparation, par les États membres, des dommages causés par les actes violant le droit communautaire.
Par ailleurs, le même principe oblige les États membres à effectuer « un contrôle juridictionnel effectif »[29] et de respecter les dispositions communautaires en vigueur.
B : L’application du Droit communautaire au niveau national
1 : Le principe
C’est la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes qui avait énoncé l’obligation de réparation. En effet, à travers son arrêt Humblet contre l’État belge, la Cour avait statué que, si elle « constate dans un arrêt qu’un acte législatif ou administratif émanant des autorités d’un État membre est contraire au droit communautaire, cet État est obligé, en vertu de l’article 86 du traité CECA, aussi bien de rapporter l’acte dont il s’agit que de réparer les effets illicites qu’il a pu produire ». Toutefois, la Cour de justice des Communautés européennes réduit l’obligation de l’État membre de désintéresser les particulières victimes des préjudices aux termes du droit national. Il a d’ailleurs été dit que «dans le cas où un tel préjudice aurait été causé par le fait d’une violation du droit communautaire, il incomberait à l’État d’en assumer, à l’égard de la personne lésée, les conséquences dans le cadre des dispositions du droit national relatives à la responsabilité de l’État ».
2 : Le point de vue de l’Etat Belge
La constitution belge présente des lacunes par rapport à la relation entre le droit interne et de droit international. La Belgique est le seul État lié au traité de Paris et de Rome à avoir persisté dans le maintient de la constitution qui défend tout renoncement à la souveraineté étatique. Ainsi est interdit tout acte de cession des pouvoirs de législation, d’administration générale et de juridiction de l’État belge.
En Belgique, la constitution date de 1831 ; et malgré le fait qu’elle ait été révisée deux fois en 1954 et en 1958, la constitution belge reste rigide. En effet, en son article 68, elle classe les traités internationaux en trois catégories dont : «
- Des uns, l’exécutif doit donner connaissances aux autres
- Les traités « Belges et ceux qui pourraient grever l’État ou lier individuellement les Belges » doivent recevoir l’assentiment des chambres
- Les traités territoriaux enfin, ne peuvent être signés qu’en vertu d’une loi. »
On dénote à travers ces dispositions une réticence de l’État belge à la reconnaitre le principe de la primauté du traité sur les Lois d’ordre nationales[30]. C’est en ce sens que la Cour de cassation belge a tendance à considérer que le traité est « un acte équipollent à la loi. »[31]
Par ailleurs, il a été reconnu au juge Belge le pouvoir d’interprétation des traités internationaux au même titre que les lois. Aussi, en cas de conflit entre une loi et un traité, la jurisprudence Belge affirme : « Attendu qu’il appartient au législateur belge, lorsqu’il édicté des dispositions en exécution d’une convention internationale, d’apprécier la conformité des règles qu’il adopte avec les obligations liant la Belgique par traité (…) »[32].
Cet arrêt avait longtemps été considéré par la doctrine unanime comme établissant le principe de la préférence du traité par rapport à la loi, en cas de conflit[33]. Toutefois, cette démarche avait été critiquée par certains auteurs, qui soutenaient que la garantie de la primauté des traités devrait être prévue dans la constitution au niveau du droit interne.
A : Les sanctions des Etats membres en cas de non-respect du Droit communautaire
1 : Les sanctions d’ordres financiers
a : Le dommage et intérêts
La loi nationale d’un État membre communautaire qui entre en contradiction avec la norme communautaire est illicite, car elle est constitutive d’une faute[34]. De ce fait, l’État membre communautaire engage sa responsabilité pour faute jusqu’à concurrence des dommages causés par l’existence de cette législation (faute par commission). Mais il arrive également que l’irrégularité résulte d’une abstention de légiférer de la part de l’État membre communautaire (d’où la faute par omission). Cette dernière peut se traduire par l’absence de transposition des directives communautaires au niveau de la Loi nationale. La référence en la matière a été érigée par la cour d’appel administrative de Paris qui avait statué sur le cas d’une disposition législative incompatible avec les finalités du Droit communautaire. Dans le cas de l’espèce, l’État français avait été condamné par la Cour de justice européenne à réparer le préjudice causé par la situation illicite provoquée par la non-transposition des directives communautaires[35].
b : L’astreinte
L’astreinte est une sanction financière contre les États membres communautaires. Selon la commission Européenne, le montant de l’astreinte « doit être approprié pour assurer son caractère dissuasif ». Le calcul est effectué à partir d’un forfait de base fixée à 500 euros, multipliés en fonction d’un coefficient de gravité et de durée. Néanmoins, la sanction est assujettie à trois conditions dont :
- La condamnation préalable par « un arrêt de constatation de manquement» par la cour de justice,
- L’inexécution de la décision judiciaire par l’État membre concerné pendant la durée impartie. D’où la procédure de manquement sur manquementqui aboutie à une deuxième condamnation pour constatation de manquement.
- En l’absence de prise de mesure adéquate, le juge prononcera l’astreinte.
2 : La sanction d’ordre économique
Cette sanction consiste en la restriction par la communauté européenne de différents secteurs d’activité économique. La punition peut être une interdiction d’importation ou d’exportation des biens déterminés au sein de la communauté Européenne. Elle peut également être une interdiction en rapport avec les investissements, ou encore, des interdictions se rapportant à la fourniture des services.
3 : Les sanctions d’ordre administratives et pénales
Les sanctions administratives infligées directement par la communauté Européenne sont rares. Car, en principe, la mise en œuvre de ces types de sanctions revient aux États membres. Mais, conformément aux articles 83 et 110 du traité de la communauté européenne, la communauté en a la compétence dans le domaine de la concurrence, et également en matière bancaire. La sanction est souvent adoptée dans le domaine de la politique agricole commune et également en matière douanière.
La sanction d’ordre pénale n’est pas du ressort de la communauté européenne. En effet, elle se borne à instaurer les règles, tandis que leurs applications relèvent de la compétence des États membres communautaires. Il appartient donc à ces derniers de définir les sanctions pénales spécifiques pour l’application conforme des normes du Droit communautaire en vertu de l’article 10 du Traité de la communauté européenne. La Cour de Justice de la communauté Européenne avance que la sanction pénale doit prendre en considération le principe d’équivalence en plus d’être menée dans le respect des conditions de forme et de procédure comparable à celles qui s’appliquent en cas de transgression des règles internes de même envergure. Ce qui fait qu’en matière de sanction pénale, chaque Etat membres communautaire est libre de fixer les sanctions applicables aux violations du Droit communautaire sur la base de leur Droit interne.
DEUXIEME PARTIE : L’ASPECT PRATIQUE
Chapitre 1 : les moyens de recours dont disposent les citoyens et les entreprises du fait du non-respect du droit communautaire par un Etat membre
A : La voie nationale : le recours aux tribunaux nationaux
Lorsqu’un acte administratif de portée générale est antérieur au Traité, il peut y avoir des conflits entre le traité et l’acte administratif en question.
L’ordre juridique national, en Belgique, prévoit trois sortes de recours à porter des mains des particuliers et des sociétés, contre les actes administratifs illicites, dont le recours en annulation, l’action en réparation, et l’exception d’illégalité.
1 : Le recours en annulation
Conformément à l’article 9 de la loi du 23 décembre 1946, portant, création d’un conseil d’État[36], les recours en annulation des décisions contentieuses administratives, ou le recours pour violation, par les actes administratifs, des formes substantielles ou prescrites, ainsi que les excès ou le détournement de pouvoir, sont recevables pour annulation auprès de la section d’administration du Conseil d’État qui statue par voie d’arrêts. Dans l’examen de l’excès ou du détournement de pouvoir, les traités dûment approuvés par la Belgique peuvent être pris en considération. Les traités sont donc des sources du Droit administratif belge même si la doctrine en parle peu[37].
Il existe dans la jurisprudence belge très peu de recours contre le non-respect du Droit communautaire. Et dans le peu de cas qui existent, la question est relevée à titre incident. Toutefois, il est porté à la connaissance que dans les arrêts De Badts[38], Fried et Mandel[39],Jamsen et Boret[40], et Dupont[41] le conseil d’État Belge avait annulé les décisions de la commission d’appel qui avait ignoré les dispositions d’un traité avec la Belgique. Ce qui fait que le conseil d’Etat Belge admet que les traités dûment approuvés se placent au moins au même rang que les lois internes. Ainsi y aurait-il excès de pouvoir en cas de non-respect des traités. Ainsi, dans le cas où un arrêt aurait rendu en parfaite méprise des dispositions d’un traité ratifié par l’État Belge, porterai préjudice à un particulier, ce dernier peut réclamer l’annulation dudit arrêt auprès du conseil d’État.
2 : L’action en réparation
En Belgique, c’est l’arrêt de la cour de cassation du 05 novembre 1920[42] qui avait admit la soumission de la puissance publique au Droit civil. Notamment en ce qui concerne l’obligation pour l’État de réparer les dommages causés aux particuliers et aux entreprises, en raison d’un comportement fautif de l’administration. La faute de l’État peut résulter de la violation, par le pouvoir exécutif, d’un traité international. Concrètement, dans le cas présent, on parle du traité de la communauté européenne. Ainsi, si la violation cause un dommage direct et individuel à un particulier, ce dernier sera recevable à agir en dommages-intérêts[43] pour réparation devant les tribunaux judiciaires ou devant le Conseil d’État.
a : L’action devant les tribunaux judiciaires
La compétence des tribunaux judiciaires à juger les litiges en rapport avec la non-conformité au droit communautaire a pour origine l’arrêt rendu par le tribunal de Léopoldville qui stipule que : « Les conventions internationales qu’il appartient au chef du pouvoir exécutif de conclure ou de ratifier acquièrent en recevant l’approbation législative, sinon, le caractère tout au moins la force d’une loi ordinaire…, elles sont obligatoires à ce titre pour l’État considéré comme entité souveraine dans ses rapports avec les autres puissances contractantes(…) ».
Ainsi, le tribunal s’attribue alors compétent pour apprécier un litige contrevenant aux dispositions des traités internationaux, y compris le droit communautaire.
b : L’action en indemnité devant le Conseil d’État
Pour que le recours en indemnisation devant le Conseil d’État soit recevable, il faut que le particulier, victime, puisse apporter la preuve que l’administration a commis une faute en passant outre les dispositions du Droit communautaire. Cette preuve est parfois difficilement prouvable. Mais cela ne prive pas pour autant le particulier de tous ses recours, car en vertu de l’article 7, paragraphe 1er de la loi Belge du 23 décembre 1946 relative à la création du Conseil d’État : « La section d’administration connaît dans le cas où il n’existe pas d’autre juridiction compétente, des demandes d’indemnité relative à la réparation d’un dommage exceptionnel résultant d’une mesure prise ou ordonnée par l’État, la province, la commune ou le gouvernement de la colonie, soit que l’exécution en ait été normale, soit qu’elle ait été défectueuse ou différée. La section d’administration se prononce en équité par voie d’avis motivé, en tenant compte de toutes les circonstances d’intérêt public et privé. »
Ainsi, grâce à cet article, le particulier, victime, n’est plus obligé de rapporter la preuve d’une faute en cas de violation des dispositions communautaires par les pouvoirs publics. En fait, il lui suffit de montrer l’attitude préjudicielle de l’administration, et l’absence d’autres juridictions compétentes.
B : La voie internationale
Le recours en réparation par voie internationale est ouvert en cas d’épuisement des voies de recours au niveau national[44].
1 : Le recours direct : la procédure de manquement
Le moyen d’action des particuliers et sociétés victimes pour sanctionner, au niveau international, le non-respect du droit communautaire par l’État membre se concrétise par le recours en manquement. La procédure a pour objet la constatation de l’existence de manquement, dans l’objectif d’obliger l’État membre à réagir et à y mettre fin.
a : Le régime juridique du manquement
Juridiquement parlant la procédure de manquement est un recours permettant d’abord à la Cour de justice de constater le non-respect par un État membre des obligations qui lui incombent en vertu des traités, et ensuite le contraindre à appliquer le droit communautaire.
L’existence d’un acte juridique interne en violation du droit communautaire suffit pour établir le manquement. Mais ce dernier peut également résulter d’une abstention ou d’opérations matérielles de la part de l’État membre. S’agissant de l’abstention, elle peut être manifestée par le refus de prendre les mesures en adéquation avec le Droit communautaire, tandis que l’opération matérielle peut par exemple inclure les contrôles aux frontières des produits non autorisés. L’ensemble de ces agissements de l’État membre communautaire, commis, en total mépris des normes du Droit communautaire peut aller à l’encontre des droits des particuliers ou des sociétés, en leur causant des dommages. Ainsi, la procédure en manquement intenté auprès de la Cour de justice vise également à rétablir les droits de ces victimes du comportement dommageable. En fait, on assiste ici à la transposition du principe juridique de la responsabilité en droits civils qui énonce : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer».
Effectivement, la Cour de justice, après constat du manquement, oblige l’État membre à « réparer » le dommage causé.
b : La procédure de constatation du manquement
Les particuliers ou les sociétés victimes du comportement illicite de leur État membre communautaire peuvent enclencher le recours en manquement par l’intermédiaire de la commission, en vertu de l’article 226 du traité de la communauté Européenne (CE). Pour y parvenir, ils devront adresser une plainte[45] à la commission qui agira en conséquence.
· La qualité à agir
C’est l’article 226 de la communauté européenne, qui confère aux particuliers et aux sociétés victimes d’un acte de manquement le droit de porter plainte auprès de la communauté européenne, en raison d’un manquement de leurs États membres communautaire. Il appartiendra ensuite à ce dernier d’actionner le recours en manquement.
La qualité à agir que possède le particulier et la société contre leur État résultent de la ratification antérieure du traité de la communauté européenne par cet État. Par ce fait, les particuliers issus de l’État en question ont acquis la qualité de ressortissants européens, au même titre que leur État qui est dès lors un État membre communautaire. Cette qualité a été d’autant plus raffermie par l’arrêt Francovich.
· La mise en demeure
La procédure de manquement peut débuter par une phase précontentieuse au cours de laquelle la commission met en demeure l’État membre de présenter ses observations. Néanmoins, cette étape peut être contournée grâce à l’article 298 CE.
La démarche de la mise en demeure faite par commission nous ramène au concept général du Droit administratif qui définit la mise en demeure comme étant : « une injonction adressée par une autorité administrative, dans les cas prévus par les textes, pour ordonner à un particulier ou à une collectivité publique de prendre une mesure obligatoire ou de mettre fin à un comportement illégal. »[46]
De même, le régime juridique de la phase précontentieux s’inspire du concept civil de la mise en demeure qui conçoit la fin de la procédure en cas d’exécution du débiteur. Étant donné que dans le cas présent, si l’État membre prend les mesures qui s’imposent après mise en demeure, la procédure en manquement sera interrompue. Par contre, si après la constatation par la commission de l’illégalité du comportement de l’État membre par le biais des observations, ce dernier persiste dans son manquement, la Cour de justice peut être saisie.
· L’inexécution de ses obligations par l’État membre communautaire
Si à l’issu de la mise en demeure, le manquement persiste, l’inexécution de ses obligations par l’État membre communautaire peut être établie. Ce qui peut enclencher à son égard un recours en responsabilité par la commission devant la Cour de justice. Pour justifier son comportement jugé illicite, l’État membre communautaire ne peut qu’invoquer le cas de force majeure. Ici encore, le Droit communautaire prend exemple sur le régime juridique de la force majeure en Droit civil qui le définit comme étant : « Tout évènement imprévisible et insurmontable empêchant le débiteur d’exécuter son obligation. [47]» L’évènement à l’origine du manquement doit donc être étranger pour que l’État membre soit exonéré. Aussi, seront irrecevables les justifications qui invoquent l’illégalité de l’acte méconnu, le manquement par un autre État membre, ou encore les difficultés relatives à l’application du droit communautaire.
Par contre, l’État membre peut excuser son manquement en invoquant le caractère équivoque ou imprécis des dispositions communautaires sujettes au litige, ou le cas échéant, en soutenant l’abrogation du texte contesté. Toutefois, pour que l’imprécision des normes communautaire soit soutenable, il faut que l’équivocité concerne un aspect essentiel de l’obligation en cause. De plus, l’État membre doit avoir usé de tous les moyens qui lui sont possibles pour mettre fin à son incertitude sur lesdites normes.
En l’absence d’un fait justificatif ou d’une exonération de responsabilité, la Cour de justice peut prononcer à l’égard de l’État membre communautaire, l’arrêt de manquement. Qui constate définitivement l’existence du manquement à l’égard d’une ou des normes communautaires. L’arrêt de manquement a donc un caractère déclaratoire et non encore punitif. Toutefois, un nouveau manquement peut donner lieu à un nouvel arrêt qui aura pour objet de confirmer la première. Et l’État membre communautaire récalcitrant peut être condamné au paiement d’une somme forfaitaire (dommage et intérêt[48]) ou faire l’objet d’une astreinte.[49]
2 : Les recours indirects
Les recours indirects ont vocation à éclairer les normes du droit communautaires qui peuvent avoir des lacunes ou une nature équivoque. On parle ici de recours indirects dans la mesure où seules les juridictions des États membres communautaires peuvent saisir la Cour de justice en cas de doute, notamment, sur la validité ou le sens d’une règle communautaire.
a : Les recours préjudiciels
Ce type de recours relève de l’article 234 du traité sur la communauté européenne. La procédure est engagée auprès d’une juridiction nationale. Néanmoins, la Cour de justice est la seule compétente en la matière. Il existe deux types de recours préjudiciel, dont le recours en interprétation et celui fait en appréciation de validité.
· Le recours en interprétation
Selon les dispositions de la Cour de justice de la communauté européenne, « les juridictions nationales sont toutes obligées de renvoyer à la Cour de justice dès qu’elles ont un doute sur la validité d’un acte communautaire dans la mesure où elles n’ont pas le pouvoir de déclarer invalide les actes des institutions communautaires. »
S’agissant du recours en interprétation, il est ouvert sur la totalité des dispositions du droit communautaire originaire ou modifié. Il n’est pas requis que la règle concernée s’applique directement. Par contre, en ce qui concerne le recours pour appréciation de validité, il doit être relatif aux actes pris par les institutions communautaires, en corrélation avec l’objet du litige principal.
La démarche en matière d’interprétation est généralement entamée par le juge national qui interroge la Cour sur l’adéquation du droit national avec le droit communautaire. La réponse de la cour permettra donc aux juges nationaux de trancher la question de compatibilité d’une norme du droit communautaire avec celle du droit national. Cette réponse est manifestée par un arrêt dont l’arrêt en interprétation. Il est « de portée générale », étant donné que la question préjudicielle pour interprétation est soulevée afin que le juge national puisse se prononcer sur l’application ou non d’un dispositif du Droit communautaire à un cas particulier, qui est le fond du litige d’origine.
· Le recours en appréciation de validité
Dans l’arrêt en appréciation de validité, si, la réponse de la Cour constate l’invalidité de l’acte communautaire, le juge national ne doit donc pas l’appliquer. Si, au contraire, l’arrêt en appréciation valide l’acte communautaire, le juge national s’en user dans le jugement du fond du litige. Ce qui fait qu’ici encore, l’arrêt en appréciation est de portée générale, car la décision de la Cour s’impose aux juges nationaux.
Chapitre 2 : La réparation du dommage causé
Quand un acte ou une mesure étatique cause un préjudice à un particulier, ce dernier peut, avons-nous vu, réclamer la réparation, dans le respect des conditions diverses, auprès de la juridiction de l’ordre judiciaire ou le Conseil d’État.
A : Les conditions du droit à réparation
1 : La règle du droit communautaire violée doit avoir conféré des droits aux particuliers et aux entreprises.
Par l’arrêt Francovich, la Cour de justice des Communautés européennes a reconnu que les conséquences imposées par les directives de la communauté comprenaient également la Cession de droits à l’avantage des particuliers[50].Mais encore faut-il prouver l’existence d’une infraction à une règle de droit protégeant les particuliers et les entreprises.
Ainsi, il faut différencier les règles de droit communautaire attribuant des droits aux particuliers de celles qui dérivent des relations entre la Communauté et les États membres. Car, en vertu de la condition énoncée par l’arrêt Francovich, seules les infractions aux règles de droit communautaire attribuant des droits aux particuliers et aux entreprises peuvent donner lieu à réparation.
Selon l’opinion de M. Simon, la règle selon laquelle la règle du droit communautaire violée doit avoir procuré des droits aux particuliers, victimes, n’est pas une exigence d’effet direct, car, la directive, source de litige dans l’affaire Francovich était justement dénuée d’effet direct[51]. Pourtant dans l’affaire Brasserie du pêcheur et Factortame III, la Cour de justice des Communautés européennes a s’était référé à cette condition en énonçant : « est manifestement remplie en ce qui concerne l’article 30 »[52]. Néanmoins, M. Vandersanden a considéré que pour reconnaître la responsabilité de l’État, il ne faut pas se satisfaire d’un examen purement objectif de la norme de droit communautaire méconnue. Car il faut également tenir compte de l’objet des directives qui inclue l’attribution des droits à des particuliers et à des entreprises. Aussi, en cas de non-transposition desdites directives, la responsabilité de l’État serait établie du moment où la violation des droits des particuliers et des entreprises apparait suffisamment identifiable[53].
2 : La violation caractérisée d’une règle communautaire.
Cette condition de l’indifférence manifeste envers le droit communautaire est le plus ardue des trois conditions cumulatives[54]. C’est pourquoi l’appréciation de l’existence d’une violation caractérisée a été confiée par la Cour de justice des Communautés européennes aux juridictions nationales[55] qui sont « seules compétentes pour établir les faits des affaires au principal et pour caractériser les violations du droit communautaire en cause »[56].
De même, la nature de la preuve, selon laquelle l’État membre communautaire est coupable d’une méconnaissance manifeste et grave du droit communautaire diffère en « fonction de chaque type de situation.»[57]
Selon M. Barav, l’exigence d’une violation suffisamment caractérisée peut exempter virtuellement le législateur qui est relié à la nature normative de la mesure objet du litige. En effet, en tant qu’auteur des actes législatifs, il possède une marge d’estimation discrétionnaire.
Aussi, dans le but de limiter le pouvoir d’appréciation du juge national, la Cour de justice des Communautés européenne savait peu à peu précisé la notion de méconnaissance manifeste à travers les arrêts suivants :
- Dans l’arrêt Brasserie du pêcheur et Factortame III, la Cour de justice avait annoncé que la violation devait être caractérisée. La Cour de justice avait de plus estimé que la juridiction compétente devait prendre en considération « le degré de clarté et de précision de la règle violée, l’étendue de la marge d’appréciation que la règle enfreinte laisse aux autorités nationales ou communautaires, le caractère intentionnel ou involontaire du manquement commis ou du préjudice causé, le caractère excusable ou inexcusable d’une éventuelle erreur de droit, la circonstance que les attitudes prises par une institution communautaire ont pu contribuer à l’omission, l’adoption ou au maintien de mesures ou de pratiques nationales contraires au droit communautaire »[58]. Compte tenu de cet arrêt, pour apprécier l’existence d’une « violation caractérisée » du droit communautaire, et en vertu de l’article 234, 3e alinéa, du Traité de la communauté européenne, le juge national doit se référer aux éléments de chaque cas d’espèce « parmi lesquels figurent notamment, le degré de clarté et de précision de la règle violée, le caractère délibéré de la violation, le caractère excusable ou inexcusable de l’erreur de droit, la position prise par une institution communautaire ainsi que l’inexécution, par la juridiction en cause, de son obligation de renvoi préjudiciel.»[59]
- Dans l’arrêt Traghetti del Mediterraneo, la Cour de justice avait affiné l’appréciation de la responsabilité. Aussi avait-il étendu le domaine de la violation manifeste aux activités d’interprétation et d’appréciation. Elle a par ailleurs édicté les critères de la méconnaissance manifeste soutenue dans l’arrêt Köbler[60].En outre, la Cour avait également jugé que la transposition incorrecte d’une directive ne constitue pas une violation caractérisée65, en raison des ambiguïtés et des incertitudes. De plus, une marge d’appréciation est reconnue à l’État membre en ce qui concerne la mesure de transposition des directives communautaires.
3 : Un lien de causalité direct existe entre la violation de la norme communautaire et le dommage causé.
a : L’origine jurisprudentielle du concept de lien de causalité direct
Dans l’arrêt Francovich, la Cour de justice avait simplement fait référence à l’existence d’« un lien de causalité.»[61] Par contre, dans l’arrêt Brasserie, elle a restreint sa conception du lien de causalité, en parlant d’« un lien de causalité direct »[62]. Pourtant, dans l’arrêt Dillenkofer, qui faisait suite à l’arrêt Brasserie, la Cour de justice était revenue à l’expression« un lien de causalité »[63]. Ce qui avait engendré une certaine confusion. Néanmoins, l’arrêt Köbler avait confirmé l’arrêt Brasserie ; car dans cet arrêt, la Cour de justice avait estimé qu’il faut « qu’il existe un lien de causalité direct entre la violation de l’obligation qui incombe à l’État et le dommage subi par les personnes lésées »[64]. De même, dans son arrêt Traghettidel Méditerranée, la Cour de justice s’était référée à « un lien de causalité direct »[65]
b : le moyen d’établissement du lien de causalité direct
L’établissement d’un lien de causalité direct entre la violation de l’obligation communautaire par l’État qui en est membre, et le préjudice subi par la victime de l’acte forme la troisième condition imposée par la Cour de justice des Communautés européennes.
Selon la Cour de justice des Communautés européennes, le moyen à disposition du juge national pour déceler le lien de causalité consisterait à « vérifier si la personne lésée a fait preuve d’une diligence raisonnable pour éviter le préjudice ou en limiter la portée »[66]. Ainsi, pour que le lien de causalité direct soit établi envers le comportement fautif de l’État membre communautaire, et le dommage subi par la victime, le juge national doit considérer la vigilance de la victime. En plus clair, le particulier ou la société victime doivent avoir usé de tous les moyens à la portée de leurs mains afin d’éviter ou de limiter les impacts du comportement dommageable sur eux. Ce qui fait que, concrètement, il n’y aurait lien de causalité directe entre le comportement dommageable de l’État membre communautaire et le préjudice subit par les victimes que dans la mesure où l’acte dommageable de l’État membre leur a été insurmontable. En ce cas seulement, la responsabilité de l’État membre communautaire sera établie à l’égard des victimes ; et il devra réparer l’étendue des préjudices subis.
Néanmoins, dans une procédure en manquement, en cas de suppression de la cause du dommage, la procédure prend fin, et il n’y aura donc plus lieu à réparation. Il en est autrement dans le cas d’une procédure en annulation[67] où, selon M. Vandersanden, aucune exception ne peut être faite pour engager la responsabilité de l’État membre. D’ailleurs, il avait posé la double condition de l’exercice préalable d’un recours en annulation dont la première est la subordination du recours en indemnité par rapport au recours en annulation qui doit exister et s’appliquer en droit interne et qu’elle puisse être pratiquement ou sans difficulté excessive être exercée. La seconde condition prend en compte la reconnaissance des droits octroyés au particulier par rapport au préjudice dont il se prévaut.
B : La nature de la réparation
1 : Le principe international de la réparation
Selon une publication de la Cour permanente de Justice internationale : « Le principe essentiel qui découle de la notion même d’acte illicite et qui semble se dégager de la pratique internationale, notamment de la jurisprudence des tribunaux arbitraux, est que la réparation doit, autant que possible, effacer toutes les conséquences de l’acte illicite et rétablir l’état qui aurait vraisemblablement existé si ledit acte n’avait pas été commis. Restitution en nature, ou si elle n’est pas possible, paiement d’une somme correspondant à la valeur qu’aurait la restitution en nature ; allocation s’il y a lieu, de dommages-intérêts pour les pertes subies et qui ne seraient pas couvertes par la restitution en nature ou le paiement qui en prend la place ; tels sont les principes desquels doit s’inspirer la détermination du montant de l’indemnité due à cause d’un fait contraire au droit international. » De plus, la Cour avait également prononcé que « (…) la violation d’un engagement entraîne l’obligation de réparer dans une forme adéquate.»[68] En fait on retrouve constamment à travers les jurisprudences internationales, le concept de la réparation selon lesquels elle doit « effacer toutes les conséquences » de l’acte dommageable, et qu’elle doit effacer toutes les conséquences de l’acte illicite de manière intégrale ou adéquate. Par ailleurs, dans l’arrêt de la Cour sur l’affaire Lusitanie, il a été dit que « (…) la réparation doit être à la mesure du dommage subie (…) Le « dédommagement » (compensation) doit être suffisant et compenser autant que possible le dommage subi (…). »[69]
2 : Les formes de réparation
Selon l’avis du comité préparatoire de la Société des Nations: « La responsabilité de l’État comporte l’obligation de réparer les dommages soufferts en tant qu’ils se présentent comme la conséquence de l’inobservation de l’obligation internationale. Elle comporte de plus, s’il y a lieu, selon les circonstances et d’après les principes généraux du droit des gens, l’obligation de donner une satisfaction à l’État qui a été lésé dans la personne de ses ressortissants, sous la forme d’excuses plus ou moins solennelles et dans les cas appropriés, par la punition coupable. »[70]
Ainsi dit, il est certain que la réparation doit avoir pour objet l’effacement de toutes les conséquences actes ou omission illicites. Pour y parvenir, la réparation peut prendre la forme d’une restitution en nature (restitutio in integrum) ou d’un versement de dommages-intérêts[71] ; ou encore la satisfaction ; et les uns n’excluent pas forcément les autres.
a : La restitution
Le régime juridique de la restitution en droit international possède des caractéristiques que la notion de restitution en droit national n’a pas bien qu’il s’agit de la même institution juridique. La différence réside dans le fait qu’en Droit international, restitution détient des formes propres ayant des natures particulières, en raison de la nature spéciale de la réparation des dommages qui résultent du comportement illicite de l’État membre communautaire.
Ainsi, la restitution sera matérielle ou juridique, suivant la nature du dommage objet de la réparation. En principe, la réparation matérielle s’accompagne, selon la jurisprudence internationale, d’une allocation de dommages et intérêts. Toutefois, on peut également considérer comme restitution matérielle le fait par exemple de redonner la liberté à un particulier illégalement détenu. Mais il peut arriver que la restitution n’ait pas pour objet de réparer les dommages directement infligés à un particulier. Il en avait été ainsi dans l’affaire de la compagnie générale des asphaltes de France où l’arbitre Plumbey avait ordonné la restitution tout en reconnaissant qu’il n’y avait eu aucun dommage matériel occasionné[72].
En outre, la restitution n’est pas toujours suffisante à « effacer, autant que possible, toutes les conséquences de l’acte illicite et rétablir l’état qui aurait vraisemblablement existé si ledit acte n’avait pas été commis. » Notamment, dans le cas où il y aurait un manque à gagner. Car à ce moment-là, la restitution au particulier ou à la société victime des biens ou droit dont ils avaient été privés ne suffira pas à rétablir la situation avant l’acte dommageable.
Les particularités de la restitution, en droit international, se manifeste d’autant plus lorsqu’elle consiste en l’abrogation ou à la modification d’une décision judiciaire ou d’une sentence en guise de réparation. Il en était ainsi dans l’affaire Leuders où la France n’a pas seulement demandé la libération de l’intéressé, mais avait également exigé l’annulation du jugement qui le condamnait. Mais en général, la jurisprudence internationale ordonne rarement l’annulation d’un jugement. De plus en tant que forme de réparation, la restitution présente des difficultés pratiques. C’est pourquoi la Cour de Justice internationale avait souligné le fait qu’il y aurait « restitution » que dans la mesure où elle serait « possible ». En effet, d’une part, il peut exister des impossibilités d’ordre matériel. Il en est par exemple ainsi lorsque le bien a été détruit. Et d’autres parts, la restitution peut-être juridiquement impossible. D’autant plus que, conférer l’opportunité de changer un jugement rendu; et qui a la force de la chose jugée, ou d’ôter les effets d’une mesure législative, ouvrirai la porte à de grandes difficultés de l’ordre du pouvoir étatique.
b : Les dommages et intérêts
Le but des dommages et intérêts diffère complètement de celui de la restitution dans la mesure où la nature juridique des dommages et intérêts ne consiste pas à rétablir la situation initiale du particulier ou de la société, mais plutôt à les dédommager en raison du comportement de l’État qui avait été contraire au droit communautaire.
La réparation en dommages et intérêt visera les dommages « damnum emergens » et le « lacrum cessans », ainsi que les autres préjudices dus au comportement illicite de l’État du moment que la relation cause à effet est établie. La forme de réparation pour dommages et intérêts peut aussi concerner les dommages qui peuvent entrainer la restitution. De même, la réparation ici peut se porter le paiement d’indemnités à titre d’intérêts.
Ainsi, comparée à la restitution, la réparation en dommages et intérêt répond plus aux aspirations du principe selon lequel le dommage occasionné par un acte ou une omission contraires au droit international doit être réparé en totalité.
c : La satisfaction
La satisfaction fait partie des modes de réparation à la disposition des particuliers ou des sociétés victimes du comportement illicite de l’État envers les normes du droit communautaire. Pourtant, si le principe de la réparation est la prise en compte du dommage effectivement causé aux victimes de l’acte dommageable, la satisfaction, elle, est fonction de la gravité de l’acte dommageable. Aussi, la portée de la satisfaction sera évaluée en fonction des éléments de gravité de l’acte. La satisfaction prend par exemple en considération la publicité donnée à l’affaire, ou même l’attitude des gens envers les acteurs de l’acte ou des responsables[73]. Ainsi, les critères permettant le droit à la satisfaction sont de nature variable et imprécise en fonction de chaque cas d’espèce.
De même, il existe diverses formes de satisfaction. Ici, la réparation peut par exemple être purement morale, et manifestée par la présentation d’excuses solennelles. Mais il peut également arriver que la satisfaction prenne un caractère pécuniaire. Par exemple la majoration des indemnités allouées en dommages et intérêts.
Chapitre 3 : Cas jurisprudentiels concrets liés à la responsabilité des États du fait du non-respect du droit communautaire à l’égard des citoyens et des entreprises
Au sein de la communauté européenne, la jurisprudence belge reste dans son ensemble très pauvre. Elle fut d’ailleurs particulièrement désordonnée, mais paraît se stabiliser. Il n’empêche que, les recours aux dispositions communautaires sont parfois parfaitement inopportuns, car les parties semblent évoquer le revoie préjudiciel, à des buts dilatoires.
A : Le cas d’une responsabilité Etatique envers un particulier
Pour illustrer le cas spécifique de la responsabilité étatique envers les particuliers, nous nous réfèrerons à l’arrêt Garcia. Dans les faits de l’espèce, le litige oppose M. C. Garcia Avello, le représentant légal de ses enfants, à l’État belge au sujet d’une demande de modification du nom de famille de ces derniers.
Dans les faits de l’espèce, Carlos Garcia Avello est un ressortissant espagnol, et il habite en Belgique avec son épouse belge, Isabelle Weber ; et leurs deux enfants qui ont donc acquis la double nationalité. En vertu de la Loi belge, les enfants doivent porter le patronyme de leur père. Aussi, le nom de leur père leur a été attribué sur leur certificat de naissance. Néanmoins, en vertu de la coutume espagnole qui veut que le premier nom de chaque parent soit donné à leurs enfants, avec celui du père devant, les époux ont alors demandé aux autorités belges de changer le nom de leur enfant soit de « Garcia Avello » en « Garcia Weber ».
1 : Le recours au niveau national
La demande de M. Garcia Avello a été rejetée au motif que la demande en question allait à l’encontre de la pratique Belge.
a : Les arguments du demandeur
Dans leur demande, les époux avaient soutenu que le nom attribué à leur enfant pouvait induire en erreur. Car du point de vue espagnol, les enfants seraient considérés, comme des frères et sœur du père; et non ses enfants, et encore moins ceux de leur mère. Aussi, dans la réalité les enfants étaient obligés de porter deux patronymes différents en Belgique et en Espagne ce qui engendrait des difficultés pratique.
b : La décision rendue
La demande avait été rejetée pour motif qu’elle allait à l’encontre de la pratique Belge. Selon l’avocat généra Jobs, le refus d’enregistrer un enfant ayant une double nationalité sous le nom De ses deux parents conformément à la tradition espagnole constitue une discrimination en raison de la nationalité interdite par le droit communautaire.
2 : Le recours à la juridiction de la communauté européenne
Après ce refus, M. Garcia Avello a introduit une action devant le conseil d’État belge, qui a déféré une question préjudicielle portant sur la question de savoir si le refus était ou non contraire au droit communautaire ; et également pour demander des éclaircissements sur les principes relatifs à la citoyenneté de l’Union européenne et à leur liberté de circulation.
a : Les conclusions de l’avocat général
L’avocat général avait considéré qu’il n’y avait pas à considérer la question de la libre circulation, car le litige était entre un État et ses propres ressortissants, les enfants de M. Garcia. Avello étant également Belge. De plus, en tant que ressortissant Espagnol, M. Garcia. Avello pouvait parfaitement user de ses droits communautaires, et s’établir et travailler en Espagne. Aussi, en vertu de la citoyenneté européenne, l’avocat général considérait que : « Toute discrimination en raison de la nationalité est manifestement interdite dans toutes les situations auxquelles le droit communautaire s’applique ».
b : L’Ordonnance du juge
La Cour de justice de la Communauté européenne avait jugé que les articles 12[74] et 17[75] de la CE, n’admettaient pas le refus opposé par l’autorité nationale d’accéder à la demande de M. Garcia Avello de changer le nom de ses enfants mineurs, citoyens de l’Union européenne et titulaire du droit au nom requis, en vertu de la coutume de leur second État.
La Cour avait établi son jugement en plusieurs étapes; dont :
- L’application du Droit communautaire, car les deux enfants sont issues des États membres communautaires en vertu de l’article 17 du traité
- En référence aux jurisprudences antérieures[76], la Cour avait jugé que les deux enfants de M. Garcia Avello avaient droit à une égalité de traitement avec les autres citoyens des États membres communautaires.
- La Cour avait également jugé qu’en raison de la double nationalité des deux enfants, les deux enfants devaient être traités différemment des nationaux belges ayant une unique nationalité.
- La Cour avait, par ailleurs, retenu la difficulté pratique que représentait la garde du nom du père.
- Par conséquent, la Cour avait jugé que les règles d’attribution du nom belge étaient contraires aux articles 12 et 17 du traité de la communauté européenne
- Ce qui a permis aux deux enfants de porter les patronymes de leurs deux parents, en vertu de la coutume de l’Espagne.
c : L’analyse du jugement
Cet arrêt de la Cour démontre la volonté de la Cour d’affirmer les droits des citoyens Européens. Notamment, en ce qui concerne, dans le cas présent, la liberté de circulation des personnes. En outre, l’Arrêt a mit l’accent sur plusieurs points du droit communautaire dont :
- L’établissement de la responsabilité d’un Etat membre communautaire en cas de non-respect du droit communautaire. (notamment les articles 12 et 17 du traité)
- Les conditions d’engagement de cette responsabilité (dont l’intérêt à agir)
- La réparation, par l’attribution des noms aux deux enfants selon la coutume de l’Espagne.
Cet arrêt semble signifier, entre autre, une possible harmonisation de règles relatives au statut personnel au sein de l’union européenne.
B : Le cas de la considération des droits d’une entreprise contre celui de l’Etat
Pour illustrer le cas jurisprudentiel de la considération effective du droit des sociétés par le droit communautaire, nous retiendrons le cas de l’arrêt n° 164.028 du 24 octobre 2006 qui met en cause de la SA « Varec » contre l’Etat belge et la société de droit allemand « Diehl Remscheid GmbH & Co ».
1 : Les faits de l’espèce
D’abord ; le ministre de la défense avait attribué un marché pluriannuel ; qui consiste en la liaison de 32 000 maillons de chenilles, à la société ‘Diehl’. La société « Varec » avait attaqué cette décision devant le conseil d’Etat. Dans le cas de l’espèce, la société « Varec » avait demandé la communication de l’annexe 14 de l’offre de la société « Diehl », qui n’avait pas été présenté au dossier administratif.
Mais la partie adverse refusa au motif que cette annexe avait été remis à la société « Diehl ». De plus, le défendeur avait considéré que la tâche d’inclure l’annexe au dossier ne lui revenait. De son côté, la société Diehl avait soutenu que son offre revêtait un caractère confidentiel, et que de ce fait, elle s’opposait au fait que d’autres parties puissent y avoir accès, y compris la société « Varec ».
Le conseil d’Etat avait jugé utile de rechercher si, en application du principe du contradictoire, les pièces d’ordres confidentiel relies au secret commercial dans une offre pouvaient être accessible au juge et à l’ensemble des parties. C’est pourquoi, il avait posé une question préjudicielle en interprétation devant la Cour de justice à propos de l’article premier, paragraphe première de la directive du 89/665/CEE du 21 décembre 1989, à l’article 15, paragraphe 2, de la directive 93/36/CEE du 14 Juin 1993 et à l’article 6 de la directive 2004/18/CE du 31 mars 2004.
2- La décision de la Cour
La décision de la Cour était en deux temps :
- D’une part elle stipulait : « Interprétés en ce sens qu’ils ne permettent pas à la partie adverse d’invoquer la confidentialité de certaines pièces contenues dans le dossier administratif afin d’empêcher leur communication aux parties et qu’ils ne permettent pas au Conseil d’Etat d’apprécier la confidentialité alléguée de ces pièces, les articles 21 et 23 des lois coordonnées sur le Conseil d’Etat violent l’article 22 de la Constitution, lu en combinaison avec l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et avec l’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques »
- Et d’autres part, la Cour disait : « Interprétées en ce sens qu’elles permettent à la partie adverse d’invoquer la confidentialité de certaines pièces contenues dans le dossier administratif afin d’empêcher leur communication aux parties et qu’elles permettent au Conseil d’Etat d’apprécier la confidentialité alléguée de ces pièces, les mêmes dispositions ne violent pas l’article 22 de la Constitution, lu en combinaison avec l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et avec l’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.»
3- Les implications de la décision de la Cour
Attendu qu’effectivement, le droit à un procès équitable est violé en raison de la non-opposition à la partie adverse des documents essentiels à la solution du litige[77]
Néanmoins, la Cour avait jugé que l’application stricte de ce droit impliquait une violation du droit au respect de la vie privée de la société « Diehl » ; et l’expose à un risque grave et difficilement réparable[78] en raison de la divulgation de ses secrets professionnels.
Ainsi, la Cour avait jugé que la protection contre les interventions arbitraires ou disproportionnées de la puissance publique dans la sphère d’activité privée de la société « Diehl » faisait partie du principe général du droit communautaire[79]
4- L’analyse
Dans cet arrêt, le demandeur, la société « Varec » n’avait pas eu gain de cause contre l’Etat et la société « Diehl ». Néanmoins, l’arrêt de la Cour avait pour mérite de :
- Privilégier le droit à la vie privée de la société « Diehl » par rapport au doit procès équitable.
- Confirmer la reconnaissance du droit des sociétés par le droit communautaire.
- Etablir que la considération de la vie privée par le droit communautaire est conditionnée par l’existence d’un dommage en cas d’exposition.
CONCLUSION
En guise de conclusion, nous pouvons dire que la responsabilité des États en cas de non-respect du droit communautaire à l’égard des citoyens et des entreprises gagne de plus en plus de terrain au niveau de la communauté européenne. En effet, dans le cadre de ce mémoire, l’ensemble des arrêts de la Cour de Justice de la communauté européenne que nous avions eu l’occasion d’étudier en la matière converge tout vers l’unification plus ou moins avérer de la législation dans les États membres communautaires. Par ailleurs, ces jurisprudences reconnaissent aux particuliers et aux sociétés leurs droits, en tant que citoyens de la communauté, au-devant des agissements illicites des États membres communautaires.
C’est alors ainsi que l’ancien principe de l’irresponsabilité étatique avait laissé place à la responsabilité « civile » de l’État en cas de dommage causé aux particuliers ou aux entreprises. Dès lors, la responsabilité étatique est établie en cas de violation des règles du traité communautaire. Toutefois, nous avions eu l’opportunité de voir que la notion de responsabilité civile de l’État au niveau du droit international diffère en bien des points de celui du niveau national en ce qui concerne les conditions de responsabilité étatique, mais également pour ce qui est des moyens de réparation. Par ailleurs nous avons vu que la procédure en la matière est complètement différente dans la mesure où le droit communautaire prévoit la procédure particulière de la question préjudicielle en vue de l’interprétation ou de la validation d’une règle ou d’une loi par rapport au droit communautaire.
En outre, les modes de réparation sont également très typiques du droit communautaire, car on prévoit les dommages et intérêts, la restitution et la satisfaction, qui ont des régimes juridiques différents de ce que l’on retrouve en droit commun. En effet, nous avons pu voir l’ensemble des difficultés relatives à l’application de la restitution, compte tenu de son principe. On a également retenu l’originalité de la sanction en satisfaction, que le droit civil ignore.
L’ensemble de ces divergences entre le droit international communautaire et celui du Droit national civil appelle à des juridictions différentes pour trancher les litiges. Ainsi, en ce qui concerne l’engagement de la responsabilité des États membres en cas de non-respect du droit communautaire, deux voies de recours s’ouvrent aux particuliers ou à l’entreprise victimes. Il s’agit entre autres du recours auprès des juridictions nationales et celui devant la Cour de justice de la communauté lorsque les voies de recours nationales sont épuisées. Si, le jugement du fond des litiges revient aux juridictions nationales, la Cour de justice, elle, s’occupe de régler les questions d’ordres préjudicielles qui peuvent être soulevées par le Juge national en vue d’une interprétation d’une norme communautaire, ou pour juger la conformité d’un texte national par rapport au droit communautaire.
Ainsi, la nature de l’intervention de la Cour de Justice de la communauté est d’ordre incident. Néanmoins, le juge national d’un État membre communautaire est tenu, en vertu du traité communautaire de se conformer aux jugements de la Cour dans les décisions sur le fond qu’il devra rendre.
Cette obligation de conformité de la juridiction des États membres communautaires à la décision de la Cour de justice de la communauté a pour origine l’obligation de coopération loyale auquel ils sont assujettis. D’ailleurs, nos recherches ont démontré que cette obligation ne s’arrête pas au niveau judiciaire, car elle atteint également les organes administratifs et législatifs de l’État. Ainsi, par ces faits, l’engagement de la responsabilité des États membres communautaires pour non- conformité au droit communautaire peut concerner indifféremment des actes illicites du pouvoir exécutif, législatif ou encore judiciaire desdits États.
Aussi, dans le présent mémoire, dans le but de démontrer plus clairement la nature de la responsabilité des États membres communautaires en cas de non respect du droit communautaire, nous avions étudié l’arrêt Garcia Avello de la CJCE. De par cet arrêt, l’engagement de la responsabilité de l’État membre communautaire avait été démontré, ainsi que le droit des victimes à réparation. Dans un second arrêt, celui de la SA « Varec », la Cour avait clairement admis les droits d’une société privée au détriment d’une règle de portée générale prévue par la constitution d’un État membre communautaire. Ce qui souligne l’intérêt soutenu que porte le droit communautaire au droit de ses ressortissants.
Ainsi, en résumé, la question de la responsabilité des États membres envers les particuliers et sociétés en raison de la non-conformité au droit communautaire est née de l’ingérence du droit communautaire dans tous les organismes étatiques. D’ailleurs, c’est de l’obligation d’application de ce droit par les États membres communautaires que les particuliers et sociétés, victimes, tirent leur droit à réparation pour non-exécution.
Mais, l’ingérence du droit communautaire au niveau des États membres communautaires ne fait-elle pas obstruction à la souveraineté nationale de ces États ?
BIBLIOGRAPHIE
LES OUVRAGES
- CAMBIER, « la responsabilité de la puissance publique et de ses agents » (Bruxelles, 1949)
- BOUTAYEB, Droit européen : Institutions, ordre juridique, contentieux
- Denys SIMON. « La responsabilité de l’État saisie par le droit communautaire : la jurisprudence : Brasserie du pêcheur, Factortame, British télécom, Hedley Lamas… », A.J.D.A. 1996.489.
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- Dominique CARREAU ; Droit international, 2è éd., Ed. A. Pedone, Paris, 1988,
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DOCUMENTS
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- Pasicrisie le, 1.515.
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- Protocole sur l’application des principes de subsidiarité et de proportionnalité du Traité d’Amsterdam, version publiée Journal officiel n° C 340 du 10 novembre 1997.
- Projet d’articles de 2001 de la Commission du droit international.
JURISPRUDENCES DE LA COUR DE JUSTICE DE LA COMMUNAUTE EUROPEENNE
- CJCE, 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame III
- CJCE, 15 juillet 1964, Costa contre E.N.E.L. aff. 6/64, Rec. p. 1149, n° 3
- CJCE, 15 mai 1986, Johnston, aff. 222/84, Rec., p. 1651, n° 13
- CJCE, 8 octobre 1996, Dillenkofer, aff. C-178/94, Rec, p. I-4845, n° 24
- CJCE, 30 septembre 2003, Köbler c/ Autriche, n° 55.
- CJCE, 13 juin 2006, Traghetti del Mediterraneo. n° 43
- CJCE, 8 octobre 1996, Dillenkofer, n° 27.
- CJCE, 26 mars 1996, British Telecommunications.
- CJCE, 24 September 1998, BrinkmannTabakfavriken.
- CJCE, 11 décembre 1985, Hillegom Hillenius
- CJCE, 21 septembre 1989, Hoechst Commission
- CJCE, 22 octobre 2002, Roquette Frères S.A
JURISPRUDENCES BELGES
- Cass, RG, 14 Janvier 2000, C980477F
- Cass D.B c/ Etat Belge, 25 mars 2000
- Cass, 27 juin 1845
- Cass, Humblet c/ l’État belge
- Civ liège, 03 juin 2008, Sokadze david c/ Etat belge
- Cass, 19 décembre 1991, Anca
- Cass, Garcia c/ Etat Belge
- Cass, Varec c/ Etat Belge
PREMIERE PARTIE : L’ASPECT THEORIQUE. 3
Chapitre 1 : La Théorie générale sur la responsabilité Etatique. 3
A : L’émergence du principe de la responsabilité de l’Etat membre. 5
1 : Le principe de la coopération loyale. 5
2 : L’allègement du principe. 6
C : La responsabilité de l’Etat législateur 8
Chapitre 2 : Les conditions de mise en œuvre de la responsabilité. 8
A : Le principe de la primauté du Droit communautaire. 8
1 : Le principe de la primauté du droit communautaire. 8
2 : La mise en œuvre du principe de la primauté du droit communautaire. 9
B : L’application du Droit communautaire au niveau national 9
2 : Le point de vue de l’Etat Belge. 9
A : Les sanctions des Etats membres en cas de non-respect du Droit communautaire. 10
1 : Les sanctions d’ordres financiers 10
a : Le dommage et intérêts. 10
2 : La sanction d’ordre économique. 11
3 : Les sanctions d’ordre administratives 11
DEUXIEME PARTIE : L’ASPECT PRATIQUE. 13
A : La voie nationale : le recours aux tribunaux nationaux. 13
1 : Le recours en annulation. 13
2 : L’action en réparation. 14
a : L’action devant les tribunaux judiciaires. 14
b : L’action en indemnité devant le Conseil d’État 14
B : La voie internationale. 15
1 : Le recours direct : la procédure de manquement 15
a : Le régime juridique du manquement 15
b : La procédure de constatation du manquement 15
- La qualité à agir. 15
- La mise en demeure. 16
- L’inexécution de ses obligations par l’État membre communautaire. 16
a : Les recours préjudiciels. 17
Chapitre 2 : La réparation du dommage causé. 18
A : Les conditions du droit à réparation. 18
2 : La violation caractérisée d’une règle communautaire. 18
a : L’origine jurisprudentielle du concept de lien de causalité direct 20
b : le moyen d’établissement du lien de causalité direct 20
B : La nature de la réparation. 21
1 : Le principe international de la réparation. 21
2 : Les formes de réparation. 21
b : Les dommages et intérêts 22
A : Le cas d’une responsabilité Etatique envers un particulier 23
1 : Le recours au niveau national 23
a : Les arguments du demandeur 24
2 : Le recours à la juridiction de la communauté européenne. 24
a : Les conclusions de l’avocat général 24
B : Le cas de la considération des droits d’une entreprise contre celui de l’Etat 25
3- Les implications de la décision de la Cour 26
[1] Paul REUTER, Droit international public, 1ère éd., PUF, Paris, 1958, pp. 245-246.
[2] Patrick DAILLER et Alain Pellet, Droit international public, 7è éd., L.G.D.J., Paris, 2002, p. 796.
[3] Propos tirés de Dominique CARREAU ; Droit international, 2è éd., Ed. A. Pedone, Paris, 1988, p. 405
[4] L’article31, § 2 du projet d’articles de 2001 de la Commission du droit international.
[5] Patrick DAILLER et Alain PELLET, Droit international public, 7è éd., L.G.D.J., Paris, 2002, p. 790.
[6]Jean COMBACAU et Serge SUR ; Droit international public, 4è éd., Montchrestien, Paris, 1999 p.534.
[7]Paul Reuter, Droit international public, 1ère éd., PUF, Paris, 1958, p.260
[8] Montchrestien, Droit international public, 4è éd. Paris, 1999 p.774
[9]Sign, Cour de Justice de la communauté européenne.
[10]Sign, Etats Membres
[11] Pierre KLEIN, la responsabilité des organisations internationales dans les ordres juridiques internes et en droit des gens, Bruylant, Bruxelles, 1998, p.490
[12] P. ROSANVALLON, La démocratie inachevée, Paris : Gallimard, 2000, p. 20-26.
[13] Selon l’article 10 du traité de la CE : « les États membres prennent toutes mesures générales ou particuliers propres à assurer l’exécution des obligations découlant du présent traité ou résultant des actes des institutions de la Communauté ; ils facilitent à celle-ci l’accomplissement de sa mission »
[14]CJCE, 19 novembre 1991, Francovich et Bonifaci, aff. C-6/90 et C-9/90, Rec. n°36
[15]G. VANDERSANDEN et M. DONY, La responsabilité des États membres en cas de violation du droit communautaire, Bruxelle: Bruylant, 1997, p.21.
[16]CJCE, 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame III, n° 34. La Cour estime que « dans l’ordre juridique international, l’État, dont la responsabilité serait engagée du fait de la violation d’un engagement international, est également considéré dans son unité, que la violation à l’origine du préjudice soit imputable au pouvoir législatif, judiciaire ou exécutif. Il doit en être d’autant plus ainsi dans l’ordre juridique communautaire que toutes les instances de l’État ».
[17]D. SIMON, « La responsabilité des États membres en cas de violation du droit communautaire par une juridiction suprême, à propos de l’arrêt Köbler », Europe, novembre 2003, pp. 3-6, sp. p.4
[18]CJCE, 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame III, aff. C-46 et C-48/93, Rec.p.3, n° 3
[19] Actuellement, il s’agit de l’article 10.
[20]F. SCHOCKWEILER, « La responsabilité de l’autorité nationale en cas de violation du droit communautaire », RTDE, 1992, pp. 27- 50, sp. p. 42
[21] Cour internationale de justice, affaire relative à la licéité de l’emploi de la force (Yougoslavie c. Espagne), demande en indication de mesures conservatoires, ordonnance du 2 juin 1999, paragraphe 23
[22] Cour internationale de justice, affaire relative à la licéité de l’emploi de la force, (Serbie-et-Monténégro c. Allemagne), exceptions préliminaires, arrêt du 15 décembre 2004, paragraphe 111
[23] Cour internationale de justice, affaire relative à la licéité de l’emploi de la force, (Serbie-et-Monténégro c. Allemagne), exceptions préliminaires, arrêt du 15 décembre 2004, paragraphe 112.
[24]Sentence arbitrale, 14sept. 1872, affaire de l’alabama : C.P.J.J. avis du 10 septembre 1923. Affaire des colons allemands en Pologne, série B, n°6
[25] CJCE, 15 juillet 1964, Costa contre E.N.E.L. aff. 6/64, Rec. p. 1149, n° 3
[26] TitreV. paragraphe 2 du Protocole sur l’application des principes de subsidiarité et de proportionnalité du Traité d’Amsterdam, version publiée Journal officiel n° C 340 du 10 novembre 1997.
[27] V. D. RITLENG, « Le principe de primauté du droit de l’Union », RTDE vol. 41, n° 2, avril-juin 2005, pp. 285-303.
[28] CJCE, 19 novembre 1991, Francovich et Bonifaci, op. cit. n°33
[29] CJCE, 15 mai 1986, Johnston, aff. 222/84, Rec., p. 1651, n° 13
[30] Cass 4 juillet 1949, Pasicris le, 1949.1.515. V. aussi INSTITUT ROYAL DES RELATIONS INTERNATIONALES, Conséquences d’ordre interne (… ), p. 180.
[31] Voir les conclusions du Ministère publi, cass. 27 novembre 1950, Pasicrisie 1951.I.182
[32] Cour Cass. 8 janvier 1925; Pas., 1925, I, 101. Dans le cas de l’espèce, un ressortissant allemand habitant en Sarre demandait que ses biens soient exemptes des mesures de séquestre prévu par loi du 17 novembre 1921. Le demandeur, s’était basé sur l’article 297, litt. b, 3e alinéa du Traité de Versailles qui stipulait que les allemands, ne sont pas considérés comme ressortissants que s’ils acquièrent la nationalité d’une Puissance allié ou associée grâce à un Traité. Le motif a été additionné de l’article 49 du même Traité qui prévoyait l’organisation, après 15 de vigueur, d’un avis populaire par laquelle la population sarroise pourrait opter pour la souveraineté sous laquelle elle voudrait être placée. Mais, si donc les habitants de la Sarre étaient destinés à perdre la nationalité allemande, ils ne pouvaient pas non plus prétendre être des ressortissants allemands en raison de la législation sur les séquestres. Néanmoins, la Cour de cassation avait rejeté ces raisonnements. Pourtant, la loi belge du 17 novembre 1921, prise en application de l’article 297 du Traité de Versailles 20, considérait expressément les Sarrois comme ressortissants allemands.
[33] J. MASQUELIN , « L ’action réciproque des traités et des lois », cité supra, note 11, p. 150; P. D E. VISSCHER , note à la Revue critique de droit international privé, 1955, p. 300; Fr.
[34]C.J.C.E, 5 Mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame III, aff. Jointes C 46/93et C. 48/93. R.F.D.A 1996.583. Cette jurisprudence, suivie par d’autres arrêts de la cour, a suscité une littérature abondante de la part des communautaristes. On se reportera notamment à Hugues CALVET, « Droit administratif de la responsabilité et droit communautaire ». A.J.D.A. n° spéc. Juin 1996, pp. 92-96 à Denys SIMON. « La responsabilité de l’État saisie par le droit communautaire : la jurisprudence : Brasserie du pêcheur, Factortame, British télécom, Hedley Lamas… », A.J.D.A. 1996.489.
[35] C.A.A. Paris, 1er Juill.1992, Société Jacques Dangeville, Rec. 558 : Dr. Fiscal 1992, n°33, n°1665, p. 1420, concl. BERNAULT: A.J.D.A. 1992.768, note PRETOT : J.C.P. 1993.1.3645.ch. E.PICARD.
[36]Monit., 9 Janvier 1947
[37] Les principaux manuels de Droit administratif ne mentionnent pas les conventions internationales parmi les sources doont le respect s’impose à l’administration. Cf. M. VAUTHIER, précis de droit administratif de la Belgique, 3éd., Bruxelle, 1950, n° 30 ;J. SAROT, répertoire des arrêts et avis de la section d’administration, Bruxelle, 1955, pp. 105 et suiv ; C. CAMBIER, La censure de l’excès de pouvoir par le conseil d’État, Bruxelles, 1956, pp. 19 et suiv ; A BUTTGENBACH, Manuel de droit administratif, 2eme édition, Bruxelles, 1959, pp.19 et suiv ; P. WIGNY, Droit administratif, 4 ème éd., Bruxelles, 1962, n°505.
[38] 7 janvier 1953, Recueil de jurisprudence et de droit administratif, 1953, p. 179.
[39] 31 juillet 1957, R.A.A.C.E., 1957 n° 5779.
[40] 29 juin 1953, op-cit, n° 62 60
[41] 16 mai 1952, op-cit, n° 1565
[42] Pas., 1920, I, 193
[43] Dans l’optique où la violation serait la conséquence d’un acte réglementaire, à portée générale et impersonnelle, il se peut que les tribunaux rejettent la demande en réparation, pour motif que le particulier n’a pas d’intérêt personnel ou individuel à agir. Néanmoins, CAMBIER, dans son ouvrage « la responsabilité de la puissance publique et de ses agents » (Bruxelles, 1949, pp. 299-300), considère que l’État serait tenu de réparer même en ce cas.
[44] Cass., DB . c/Etat Belge, 25 Mars 2010
[45] En vertu du principe en matière de plainte international, toute personne peut mettre en cause un État membre en formulant une plainte à l’attention de la commission européenne pour dénoncer une mesure législative, règlementaire ou administrative ; ou le fait d’un État membre qui est contraire aux normes du droit communautaire.
[46] Selon, Raymond GUILLIEN et Jean VINCENT, lexique des termes juridiques, 14e édition.
[47] Lexique des termes,op-cit.
[48] Voir infra, dommage et intérêts
[49] Voir infra, astreinte
[50] CJCE, 19novembre 1991, Francovich et Bonifaci, n° 40
[51] D. SIMON, « Droit communautaire et responsabilité de la puissance publique – Glissements progressifs ou révolution tranquille? » p. 238 et « La responsabilité de l’État saisie par le droit communautaire », AJDA, n° 7, 1996, pp. 489-499, p. 492
[52] CJCE, 5mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame III, n° 54.
[53] G. Vandersanden et M. Dony, La responsabilité des États membres en cas de violation du droit communautaire, p. 35
[54] C. BOUTAYEB, Droit européen : Institutions, ordre juridique, contentieux, p. 286.
[55] C’était dans l’arrêt Haïm, que la Cour de justice avait déclaré qu’il appartenait au juge national de vérifier si une violation suffisamment caractérisée a été commise en l’espèce.
[56] G. VANDERSANDEN et M. DONY,op-cit, p. 36
[57] CJCE, 8 octobre 1996, Dillenkofer, aff. C-178/94, Rec, p. I-4845, n° 24
[58] CJCE, 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et Factortame III, n° 56.
[59] CJCE, 30 septembre 2003, Köbler c/ Autriche, n° 55.
[60] CJCE, 13 juin 2006, Traghetti del Mediterraneo. n° 43.
[61] CJCE, 19 novembre 1991, Francovich et Bonifaci, n° 40.
[62] CJCE, 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur et -Factortame III, n°65.
[63] CJCE, 8 octobre 1996, Dillenkofer, n° 27.
[64] CJCE, 30 septembre 2003, Köbler c/ Autriche, n° 51.
[65]CJCE, 26 mars 1996, British Telecommunications, aff.C-392/93, Rec., p. I-1631; CJCE, 24 September 1998, BrinkmannTabakfavriken, aff.C-319/96, Rec. p. I-5255.
[66] CJCE, 28 novembre 1995, Brasserie du pêcheur et -Factortame III, n° 84 ; CJCE, 8 octobre 1996, Dillenkofer, n° 72.
[67] Le recours en annulation fait partie des recours disponibles en cas de non respect du droit communautaire par les institutions communautaires. Il est prévu par les articles 230 et 231 du traité de la communauté européenne. Les autres types de recours du même genre sont notamment le recours en carence et le recours en réparation.
[68] Arrêt rendu dans l’affaire de l’usine de Chorzów (compétence), Série A, n°9, p21.
[69] Recueil des sentences arbitrales, p36. Voir le point de vue analogue exprimé par l’arbitre Ralston dans l’affaire Di Caro (Ralston, p. 770).
[70] Voir, publication de la société des nations, 1929, V3, p. 146 et suivant
[71] Certains auteurs qualifient de « directe » la réparation qui consiste à rétablir la situation antérieure à l’acte dommageable et d’indirecte celle qui consiste dans le versement de dommages-intérêts. Voir Ch. De Visscher, p. 118.
[72] Voir Ralston, P.340
[73] Voir Anzilotti, P. 524 et 525
[74]«Dans le domaine d’application du présent traité, et sans préjudice des dispositions particulières qu’il prévoit, est interdite toute discrimination exercée en raison de la nationalité.»
[75]L’article 17 CE dispose:
«1.Il est institué une citoyenneté de l’Union. Est citoyen de l’Union toute personne ayant la nationalité d’un État membre. La citoyenneté de l’Union complète la citoyenneté nationale et ne la remplace pas.
- Les citoyens de l’Union jouissent des droits et sont soumis aux devoirs prévus par le présent traité.»
[76]Affaires C-184 /99 Grzelzcyk Recueil 2001 p6I606193 et C624/98 D’HoopReceuil 2002 p I-06191
[77] CEDH, 25 janvier 1995, McMichael c. Royaume-Uni, § 80
[78] CJCE, 11 décembre 1985, Hillegom c. Hillenius, C-110/84, § 33; CJCE, 24 juin
1986, Akzo Chemie c. Commission, C-53-85, § 28; CJCE, 6 avril 1995, BPB Industries et British Gypsum c. Commission, C-310/93, §§ 26/27; CJCE, 13 juillet 2006, Mobistar, C-438/04, §§ 40 et 43. Voy. aussi mutatis mutandis, CEDH, 20 décembre 2001, P.S. c. Allemagne, §§ 27-30; CEDH, 10 novembre 2005, Bocos-Cuesta c. Pays-Bas, §§ 70-72
[79] CJCE, 21 septembre 1989, Hoechst c. Commission, C-46/87 et C-227/88, § 19, Rec., 1989, p. 2859; CJCE, 22 octobre 2002, Roquette Frères S.A., C-94/00, § 27, Rec., 2002, p. I-9011
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