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La Révolution Numérique dans l’Immobilier Suisse : Opportunités, Risques et Défis

RÉSUME

Le secteur de l’immobilier est parmi les secteurs les plus touchés par les technologies de l’information et de la communication.  La mutation technologique de ce secteur est caractérisée d’une part par la robotisation des activités de construction et d’autre part par l’arrivée de nouveaux entrants qui opèrent exclusivement en ligne ainsi que de nouvelles pratiques dans l’intermédiation et la commercialisation. Par ailleurs, la Suisse semble encore être en retard en matière de numérisation et elle est mal positionnée par rapport à ses voisins européens en termes d’échanges numériques entre les institutions, les entreprises et les citoyens. Ce retard est constaté au niveau de tous les secteurs d’activités, notamment celui de l’immobilier. Les activités du secteur immobilier suisse n’ont pas encore vraiment connu les grandes évolutions engendrées par le numérique. Les principales raisons de ce retard sont liées en grande partie par la structure fortement fragmentée de l’offre et la forte orientation du pays sur le marché intérieur qui défavorise les influences étrangères, notamment en termes d’innovation.

Ce retard de numérisation entrave au développement économique de la Suisse même si elle est déjà parmi les économies les plus compétitives. Par conséquent, la Suisse doit commencer à prendre des mesures en termes de numérisation plus particulièrement dans le secteur de l’immobilier, car l’évolution grandissante des nouvelles technologies remet en cause certains types de service, notamment celui du secteur traditionnel de l’immobilier et cela indépendamment de leur taille et de leur champ d’activité.

Pour la transformation digitale de son secteur immobilier, la Suisse doit prendre en compte certains points clés comme l’implémentation du BIM, la numérisation des chaines de création de valeur et le changement de profils des professionnels tout en tenant compte des divers aspects juridiques en rapport avec la numérisation. Par ailleurs, elle doit également relever certains défis pour mener à bien sa révolution numérique, notamment en termes de coûts, de stratégie numérique, et de compétences numériques de la population.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION

PARTIE I : Analyse du secteur de l’immobilier

  1. La situation actuelle du secteur de l’immobilier 6

1-1………………………………….. Les différents métiers et les acteurs en place dans l’immobilier 6

1-2………………………………………………………………………………… Un secteur en pleine mutation. 7

II-  Émergence du digital dans le secteur de l’immobilier, cas de la Suisse. 14

II-1.  Un léger retard pour la Suisse. 14

II-2.   Les principales raisons de ce retard. 17

II-3. La transformation digitale s’impose dans le secteur immobilier Suisse. 19

 

PARTIE II: INTERPRETATION DES RESULTATS ET APPRECIATIONS

  1. Les modifications apportées par les technologies numériques. 31

I-1. Modifications de l’environnement interne des entreprises. 31

I-2. Modification de l’environnement externe des entreprises. 32

  1. Les opportunités et les points de vigilance par rapport à la numérisation. 35

II-1. Les opportunités. 35

II-2. Les points de vigilance. 36

III. Les atouts et les défis à relever pour la Suisse. 43

III-1. Les atouts en termes de numérisation. 44

III-2. Les défis à relever 47

CONCLUSION

ANNEXES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

INTRODUCTION

Le basculement de l’économie dans l’ère du numérique engendre des effets qui sont de plus en plus sensibles chaque jour aussi bien au niveau des consommateurs qu’au niveau des organisations privées et publiques. L’apparition de nouveaux services innovants fait naitre de nouveaux modèles économiques et bouleverse la majorité des secteurs d’activités, dont l’immobilier. Le développement grandissant des technologies de l’information et de la communication est considéré comme des innovations fondamentales et a changé profondément la société et l’économie. En même temps, l’explosion du numérique rend beaucoup plus facile les interactions entre les différents acteurs tout en modifiant la façon dont les consommateurs et les entreprises communiquent et s’informent. Cette grande transformation a comme origine la pénétration croissante des technologies IP[1] où l’internet devient de plus en plus puissant et l’on assiste également au développement conséquent des technologies associées telles que l’internet mobile, l’internet des objets et le cloud computing. Afin de saisir les opportunités liées au numérique, les entreprises ont l’obligation de s’engager dans la mutation numérique.

 

Plusieurs pays ont enregistré des évolutions et des innovations technologiques très importantes, notamment au niveau de la numérisation dans le domaine de l’immobilier. Cet état de fait a provoqué pour certaines branches de l’économie, de grands changements structurels dans lesquels de nouvelles branches ont ainsi été créées et les sociétés ont dû rapidement s’adapter. Toutefois, ce n’est pas le cas pour la Suisse qui est encore à la traine en termes de révolution numérique. En effet, la Suisse est en retard par rapport à ses voisins européens en matière de numérisation. Pourtant, afin de conserver sa position en tant que l’une des plus grandes puissances économiques, la Suisse doit impérativement passer l’étape de la numérisation dans tous les secteurs d’activité y compris l’immobilier. Si la bonne tenue relative du secteur immobilier a toujours minimisé l’impact d’Internet, actuellement, le numérique fait confronter le modèle traditionnel des agences immobilières à une mutation profonde.

 

Dans ce travail, nous avons comme objectif de déterminer les modifications innovantes engendrées par les technologies numériques au sein du secteur de l’immobilier, puis de définir les différentes opportunités ainsi que les risques qui y sont liés. Nous déterminerons également dans quelle mesure la numérisation peut-elle remplacer l’activité de courtier. Le but est de traiter le sujet d’une manière globale, que ce soit au niveau technique, technologique ou juridique. Par ailleurs des distinctions seront effectuées selon les différents domaines de l’immobilier.

Pour ce faire, ce travail sera divisé en deux étapes différentes :

  • La première étape est destinée à l’analyse du secteur de l’immobilier dans son ensemble dans laquelle nous entamerons une évaluation de la situation actuelle du secteur de l’immobilier à travers les différents métiers et la mutation qui a marqué ce secteur d’activité. Nous nous focaliserons ensuite sur l’analyse de l’émergence du digital dans le secteur de l’immobilier, particulièrement pour la Suisse.
  • La seconde étape est destinée à l’interprétation des résultats des analyses dans laquelle nous déterminerons les différentes modifications apportées par les technologies numériques, les opportunités et les points de vigilance par rapport à la numérisation ainsi que les atouts de la Suisse et les défis qu’elle doit relever dans sa révolution numérique.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE I : ANALYSE DU SECTEUR DE L’IMMOBILIER

 I. La situation actuelle du secteur de l’immobilier

L’immobilier peut à la fois concerner les terrains nus, c’est-à-dire dépourvus de constructions, appelés également foncier, et les bâtiments quel que soit l’usage (habitat, bureau, industriel, stockage, etc.). Le secteur de l’immobilier fait partie des secteurs les plus prometteurs dans l’économie d’un pays, car il constitue une part importante de la richesse nationale tout en créant un nombre important d’emplois relevant à la fois du secteur public et privé. Les activités du secteur immobilier s’exercent au sein de plusieurs domaines d’activités englobant la construction et l’habitat, la location, la commercialisation, la gestion collective et individuelle de biens neufs ou anciens. Le marché de l’immobilier est également marqué par une grande liberté de communication entre les acteurs du marché : acheteur, vendeurs et intermédiaires.

1-1.            Les différents métiers et les acteurs en place dans l’immobilier

Environs 2331 000 personnes travaillent dans le secteur immobilier (hors travaux publics et constructions) et à ce chiffre s’ajoute le nombre des mandataires, des non-salariés, des indépendants et des agents commerciaux[2]. L’immobilier concerne de nombreuses activités comme la construction, le logement, la promotion, le conseil, la gérance, l’architecture, etc. En tout, les différentes activités qui composent le secteur immobilier sont classées en trois catégories de métiers :

  • Les activités de production et de promotion immobilière englobant les constructeurs, les lotisseurs, les promoteurs, les moniteurs d’opérations immobilières, les chargés de développement immobilier, les responsables de programme immobilier, les architectes, les prospecteurs fonciers, etc.
  • Les activités de transactions immobilières assurées par divers acteurs tels que les agents immobiliers, les négociateurs, les mandataires immobiliers, les diagnostiqueurs, les experts immobiliers, etc. La transaction immobilière a pour principal objectif d’assurer le conseil et l’intermédiation entre un demandeur qui peut être un acquéreur ou un locataire et un offreur qui peut être un bailleur ou un vendeur.
  • Les activités de gestion des biens immobiliers rassemblant les gestionnaires de parc locatif, les administrateurs de biens, les syndics de copropriété, les gérants de patrimoine, etc. Les biens immobiliers peuvent être individuels ou collectifs. Dans ce deuxième cas, il s’agit de gestion de copropriété.

Le marché de l’immobilier est représenté par de nombreux acteurs selon les catégories d’activités : les notaires, les entreprises de promotion immobilière, les agences immobilières, les administrateurs de biens immobiliers et les entreprises de location immobilière. En plus de ces différents acteurs, il y a également les nouveaux entrants qui se spécialisent dans le système du particulier à particulier. Ce nouveau système permet d’éviter les coûts de transaction et les différents frais demandés par les agences et les notaires. C’est ce type de transaction qui a fait naitre les revues d’annonces sont destinées à mettre directement en relation les particuliers tout en permettant un regroupement de l’information. Cette nouvelle pratique vient concurrencer les acteurs déjà présents.

1-2.            Un secteur en pleine mutation

Le secteur de l’immobilier constitue un marché très vaste dans lequel se trouvent des milliers d’entreprises. Le marché est actuellement représenté d’une part par des acteurs traditionnels comme les notaires, les entreprises de promotion immobilière, les marchands de biens, etc., et d’autre part par les acteurs en ligne. Cette double présence est liée au développement conséquent des nouvelles technologies de l’information et de la communication de ces dix dernières années. Avec l’arrivée d’internet, les transactions directes de particuliers à particuliers se sont fortement développées et ont fait apparaitre de nouveaux concurrents de nouveaux intermédiaires opérant en ligne. Différentes agences en ligne, des moteurs de recherche d’annonces, ainsi que des sites de services aux professionnels ou aux particuliers ont augmenté de nombre.

  • Le développement des TIC et d’internet

Le concept de TIC se présente comme le constat des fortes avancées en matière informatique, internet et de télécommunications ainsi que de leurs interactions. Le fort développement des bases de données, la rapidité de traitement et de transmission des informations ont donné aux différents acteurs la possibilité d’accéder à une quantité importante d’informations et plus rapidement. Actuellement, chaque entreprise immobilière dispose de sa propre base de données et peut facilement les transmettre. Pour profiter du système, les entreprises indépendantes travaillent avec les intermédiaires et deviennent plus visibles par les consommateurs. Les nouveaux opérateurs qui opèrent exclusivement à travers Internet agrègent les informations et les proposent par la suite aux consommateurs en les filtrant et en les amenant directement à ce qu’ils recherchent. Il y a également les agences en ligne qui concurrencent directement les agences traditionnelles en offrant des services avec des coûts beaucoup plus faibles.

Les TIC ont permis à de nombreux nouveaux acteurs de se positionner au sein d’un secteur saturé. Déjà entre 2005 et 2007, l’audience des sites immobiliers a attiré plus de 17,3[3] % des internautes, cette proportion est passée de 31%[4] en 2015 sur les 46 millions d’internautes.

Les changements apportés par le TIC dans le secteur immobilier peuvent se résumer de la manière suivante :

Tableau 1 : Les différents changements apportés par le TIC

Source : Internet et le marché immobilier, Maxime Le Clerc de la Herverie, Université de Rennes

  • Bouleversement du marché d’annonces immobilières

Auparavant, le secteur de l’immobilier a été caractérisé par des effets de réseaux et dominé par un nombre limité d’opérateurs, mais l’arrivée du numérique a fait montée en puissance de nouveaux acteurs qui interviennent en ligne. Cette situation témoigne à quel point ce secteur peut être bouleversé par l’innovation. Cette effervescence des annonces en ligne a commencé début des années 2000 et occupent une place importance au sein de l’écosystème immobilier. En 2014, l’ensemble des annonces immobilières en ligne a engendré un chiffre d’affaires de 240 millions d’euros ce qui équivaut au chiffre d’affaires d’un réseau de 500 agences physiques.

Pour la Suisse, une enquête menée par Ernst & Young SA pour le Baromètre du marché de l’investissement immobilier suisse auprès de différents acteurs économiques a pu montrer l’impact du numérique sur le secteur immobilier comme suit:

 

 

 

 

 

Figure 1 : Conséquences de l’évolution numérique sur le marché immobilier

Source : Baromètre du marché de l’investissement immobilier, Suisse 2014

En Suisse, l’évolution numérique n’a qu’un faible impact sur la demande d’immeubles résidentiels. Toutefois, plus de la moitié des personnes enquêtées sont d’accord avec le principe que la demande de certains produits immobiliers, bureaux et immeubles commerciaux, reculera sous l’influence de l’évolution numérique.

Figure 2 : Conséquences de l’évolution numérique sur le marché immobilier

 

Source : Baromètre du marché de l’investissement immobilier, Suisse 2014

À partir de la figure ci-dessus, nous pouvons constater que le secteur immobilier suisse est déjà touché par la numérisation. 76% des personnes ayant répondu à l’enquête sont plutôt d’accord sur le fait qu’il est possible que les promoteurs en lignes arrivent à remplacer les surfaces de vente qui ne disposent pas d’un emplacement propice. La part de marché des promoteurs et des vendeurs d’appartements risque également de diminuer si les promoteurs en ligne continuent à se développer. Toutefois, une minorité est d’accord avec le fait que les entreprises d’e-commerce arrivent à devenir des locataires de surfaces.

  • Augmentation des nouveaux entrants et adaptation des acteurs traditionnels

Le secteur immobilier est à la fois fragile et solide dans le sens où d’une part il fait partie intégrante du quotidien de chacun, car tout le monde a besoin d’acheter ou de vendre un logement et d’autre part il est en perpétuel mouvement et nécessite un effort d’adaptation permanent.

Animée par une grande course à l’audience, la quantité d’annonces publiées est devenue décisive. Dans ce constat, Lloyd Mullender, consultant médias chez Médiamétrie affirment que « Les internautes plébiscitent les sites qui en diffusent le plus, c’est devenu une compétition de poids lourds »[5]. Le marché en ligne est occupé en grande partie par des leaders appartenant à de grands groupes : Le Bon Coin à l’éditeur norvégien Schibsted et Se Loger à l’Allemand Springer. La concurrence peut encore se renforcer, car la transformation de l’écosystème immobilier favorise l’éclosion de nouvelles pratiques de distribution.

Face à l’effervescence de nouveaux entrants sur le marché immobilier, les différents acteurs traditionnels se voient obligés de subir de profonde mutation et d’être très attentifs aux changements qui interviennent sans cesse dans leur environnement afin de proposer des services compétitifs en adoptant des stratégies de différenciation. En effet, pour faire face et survivre face à la nouvelle concurrence des nouveaux réseaux de mandataires, les acteurs traditionnels tentent plus que jamais de proposer de nouveaux modèles économiques en ayant recours aux sites internet. Il y a par exemple les notaires qui se rassemblent autour d’une base de données commune et se basculent vers des solutions promouvant les signatures numériques des actes notariés telles que l’immonot.com. Les agences qui sont reliées par réseaux quant à eux optimisent leur visibilité en s’inscrivant sur un même site à l’exemple d’arthurimmo.com. Il y a également les agences indépendantes qui ont recours à des sites agrégateurs comme acheter-louer.fr pour mettre leurs offres sur le marché, les comparateurs d’agences tels que MeilleursAgents, CompareAgences, etc., les sites immobiliers d’open data comme Home’n’go et Kelquartier.

  • Évolution des pratiques et basculement vers les écrans mobiles

Étant donné que les usages numériques des consommateurs ne cessent d’évoluer, les entreprises sont obligées de proposer des offres adaptées correspondant aux nouveaux besoins et attentes de leurs clients. Dans le secteur de l’immobilier, cette situation a poussé plusieurs professionnels à adopter des stratégies plus proches des consommateurs. Si auparavant, les petites annonces étaient diffusées exclusivement dans des journaux ou autres supports, actuellement, il est possible de les diffuser en ligne. Avant même le développement de ce phénomène, Hervé Parent, président de la Fédération française de l’immobilier sur Internet, a déjà prédit : « Deux grandes innovations vont se développer : les visites virtuelles et la géolocalisation »[6].

Par ailleurs, après l’émergence d’internet auprès du grand public, le marché immobilier bascule de plus en plus vers les écrans mobiles via des applications développées par des professionnels. Les applications mobiles ont pour avantage de promouvoir la géolocalisation en donnant aux visiteurs la possibilité de visiter un logement de façon numérique c’est-à-dire en réalité virtuelle sans se déplacer.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

II-  Émergence du digital dans le secteur de l’immobilier, cas de la Suisse

II-1.  Un léger retard pour la Suisse

Comparé à d’autres pays européens, la Suisse dispose de quelques faiblesses en matière d’accès à internet, particulièrement au niveau des entreprises. La numérisation, un processus qui date plus d’une vingtaine d’années, arrive à peine à faire sa place en Suisse. Ce retard est constaté au niveau de tous les secteurs d’activités, notamment celui de l’immobilier.

II-1-1. Retard dans le développement numérique en général

Selon Jean-Henry Morin, professeur à l’Université de Genève, la Suisse est en retard par rapport aux autres pays européens en termes de développement numérique. Dans son rapport 2015 sur l’économie digitale, l’OCDE a désigné deux retardataires parmi les 34 pays membres de l’Union européenne : l’Autriche et la Suisse. Entre 2012 et 2014, la Suisse a reculé du quinzième au trentième rang dans l’indice de développement de la cyberadministration de l’ONU[7].  Le Directeur Général de Microsoft Suisse Peter Waser affirme également le retard considérable de la Suisse en termes d’utilisation des technologies de l’information et de la communication. Pour la plupart des entreprises, notamment celles de taille moyenne, considèrent les technologies numériques comme inutiles et ne jouent aucun rôle dans l’organisation. En effet, les sondages menés par l’Organisation Mondiale EY Suisse sur 700 entreprises suisses ont démontré que la majorité sous-estime la digitalisation en affirmant que son rôle est marginal.

Les résultats des enquêtes effectués par l’organisation EY Suisses ont montré que seuls 45% des entreprises considèrent le numérique comme moyennement important. Pour les 55 % restant, le rôle des technologies numériques reste encore très marginal. Toutefois, les entreprises avec un chiffre d’affaires au-delà de CFH 100 millions intègre davantage la numérisation dans leur modèle d’affaires[8].

Le résultat de l’étude[9] «L’avenir digital de la Suisse – réalités, défis et recommandations» réalisée par l’EPF Lausanne pour le compte de SIX et de Swisscom, affirme également le retard de la Suisse en termes de digitalisation. La Suisse fait partie des économies les plus compétitives, néanmoins, elle a encore du retard à rattraper affirme l’EFP[10].

II-1-2. Retard dans le secteur de l’immobilier

La révolution numérique a depuis longtemps transformé certaines branches d’activités en Suisse. Il y par exemple la finance et l’industrie manufacturière qui se sont totalement transformés depuis 30 ans.  La numérisation a provoqué une mutation structurelle, bénéfique pour certains et pénalisante pour d’autres. La révolution numérique a engendré la création de nouvelles sociétés et aussi de nouveaux secteurs économiques. Toutefois, les activités du secteur immobilier suisse n’ont pas encore vraiment connu les grandes évolutions engendrées par le numérique de ces dix derniers années[11].Actuellement, le secteur immobilier Suisse, notamment la branche de la construction, ne fait que commencer sa révolution numérique alors que dans d’autres pays, la révolution numérique du secteur immobilier est déjà très avancée.

Les principales raisons de ce retard sont liées en grande partie par la structure fortement fragmentée de l’offre et la forte orientation du pays sur le marché intérieur qui défavorise les influences étrangères, notamment en termes d’innovation. Le défaut d’intégration du numérique dans le secteur immobilier engendre des échanges d’informations lacunaires et prolonge grandement les phases de planification. Le manque d’innovation dans le secteur immobilier suisse n’offre qu’une croissance de 0.3% par an pour le secteur alors que ce secteur occupe la quatrième place parmi tous les secteurs d’activités en Suisse[12]. Comparé à l’ensemble de l’économie, ce taux se trouve largement inférieur à la moyenne qui est de 1.1% par an.

Il est également remarqué que la Suisse fait partie des rares pays qui n’ont pas encore implémenté le BIM (Building Information Model) dans l’immobilier.

Figure 3 : Intégration du BIM au niveau international

 

Source : «Business Value of BIM», SmartMarket Report, 2014

Cette figure montre que l’implémentation du BIM est déjà très avancée dans les pays étrangers. Aux États-Unis, la majorité des entreprises dans le secteur de la construction utilisent le BIM. La Grande-Bretagne, la France, l’Allemagne, l’Australie sont parmi les grands précurseurs au niveau européen. Ces pays intègrent le BIM dans plus de 70% de leur projet[13]. Dans ces pays, le BIM est surtout utilisé dans le cadre des constructions de bâtiment public. Au niveau de la Suisse, la standardisation se limite uniquement à l’élaboration d’un guide BIM et il n’existe aucune directive légale jusqu’à maintenant. En effet, contrairement à d’autres pays européens, l’autorité suisse n’a pas encore décidé de promouvoir l’implémentation du BIM.

Toutefois, malgré ce léger retard de numérisation dans le secteur immobilier, la Suisse compte à présent quelques professionnels de l’immobilier qui interviennent en ligne :

Tableau 2: Les sites immobiliers en ligne

Portail immobilier Marché principal Publication
Acheter-Louer.ch Suisse romande web et presse écrite
aclado.ch Suisse entière Spécialiste de biens immobiliers commerciaux
Anibis Suisse entière Publication d’annonce gratuite
betterhomes.ch Suisse entière Agents immobiliers avec vente directe
comparis.ch Suisse entière Annonces immobilières publiées sur comparis.ch
homegate.ch Suisse alémanique Portail touchant un large public
mmoscout24.ch Suisse alémanique et Suisse romande Portail touchant un large public
immostreet.ch Suisse romande Portail touchant un large public
JustImmo Suisse romande Publication de Nombreux biens immobiliers de prestige

Source : comparis.ch

 

II-2.   Les principales raisons de ce retard

Durant ces dix dernières années, la capacité de l’économie Suisse à convertir les nouvelles technologies de l’information et de la communication en gains de productivité et en avantages compétitifs a toujours été remise en cause. Selon la commission européenne, la Suisse est mal positionnée par rapport à ses voisins européens en termes d’échanges numériques entre les institutions, les entreprises et les citoyens[14], une des dix grandes priorités de la Commission européenne.

Le retard de numérisation de la Suisse peut s’expliquer de plusieurs manières[15] :

  • le secteur TIC de la Suisse n’est pas vraiment important et les taux de croissance de la productivité restent limités ;
  • la Suisse ne bénéficie pas encore d’une stratégie intégrale de promotion des TIC ce qui une grande menace pour sa compétitivité économique.
  • l’utilisation d’internet mobile est encore très difficile en raison des prescriptions règlementaires et les coûts élevés qui en résultent.
  • la population manque encore de compétences numériques. Cette situation résulte en grande partie du coût qui est encore assez élevé. Par conséquent, le nombre de personnes qui ont accès à l’internet mobile est très faible. Par ailleurs, il y a également les exigences règlementaires qui sont très strictes.
  • Les lacunes dans le financement et les lois fiscales sont également défavorables et freinent les jeunes pousses dans la création d’entreprises innovantes telles que les start-up. Jusqu’à maintenant, la Suisse ne possède pas encore d’écosystèmes de start-up. Notons que les start-up se différencient des autres types d’entreprises habituels, car elles demandent l’utilisation des nouvelles technologies. Pourtant, la Suisse semble avoir les conditions idéales pour développer les start-up alors que jusqu’à maintenant elles restent encore très marginalisées et le pays ne s’est pas encore fait connaitre comme un pays de start-up. Elle dispose par exemple d’une grande stabilité politique, d’une croissance économique soutenue et des esprits innovants.
  • L’e-gouvernement », ainsi que la contribution politique des citoyens à travers internet sont encore trop faibles. Comparée aux États-Unis et à d’autres pays européens, l’administration en ligne reste encore faiblement présente en Suisse. Selon l’EPFL, la principale cause est le retard dans le déploiement des services en ligne par la Confédération. Toutefois, selon toujours l’EPFL, la faible possibilité en termes d’e-participation n’est pas trop problématique, car les infrastructures classiques de la démocratie fonctionnent déjà correctement.  Par contre, c’est l’open data qui semble jusqu’à présent manqué, contrairement aux gouvernements des États-Unis et du Royaume-Uni qui ont déjà une bonne longueur d’avance.

Source : swisscom « L’avenir digital de la Suisse, réalité, défis et recommandations », Rapport de l’EPFL Collège du Management de la technologie, 2016.

 

 

  • Au niveau du secteur de l’immobilier, la structure très fragmentée et le fort taux d’exploitation constituent des obstacles conséquents au progrès de la numérisation[16]. En Suisse, le secteur de la construction se trouve encore actuellement au début d’un processus de complet de numérisation alors que pour d’autres pays, la numérisation est déjà très avancée dans ce secteur. Cette situation peut s’expliquer premièrement par la structure de l’offre dans laquelle le processus de construction se décompose en plusieurs niveaux où chaque niveau emploie de multiples entreprises. Également, la forte orientation du pays sur le marché intérieur ne lui permet pas de faire appel à des leaders mondiaux pour tirer la numérisation de son secteur immobilier. La branche de la construction est fortement coupée des influences étrangères.

II-3. La transformation digitale s’impose dans le secteur immobilier suisse

«Si nous ne voulons pas passer à côté des technologies de l’avenir, nous devons poser les jalons aujourd’hui», exprime le patron de Swisscom, URS Schaep. Même si la Suisse fait partie des économies les plus compétitives, elle doit encore relever tous les défis de la numérisation afin de conserver sa position : la digitalisation et l’économie numérique.

La numérisation est plus que jamais un moteur d’innovation aussi bien au niveau de l’économie qu’au niveau de la société. Selon une enquête menée par economisuisse, 60% de la population considère la numérisation de la société et de l’économie comme une grande opportunité[17]. Actuellement, la transformation digitale dépasse largement le cadre purement numérique, car l’enjeu est devenu sociétal et transversal pour tous les secteurs d’activités, notamment celui de l’immobilier.

Partout dans le monde, la numérisation fait avancer le secteur économique. Même avec un petit retard, la numérisation croissante fait déjà bouger le marché immobilier Suisse. En 2015, le Conseil d’État de la Suisse a décidé de mettre en place une stratégie « Suisse numérique » qui détermine les lignes directrices à adopter pour renforcer la position du pays en tant qu’économie novatrice. Le document se compose de 25 objectifs et 52 mesures destinées à la promotion de la mobilité intelligente[18].

  • Qu’est-ce qui pousse la Suisse à devoir maintenant faire la révolution de la numérisation au niveau immobilier?

L’évolution rapide des technologies de l’information et de la communication a grandement modifié les structures de presque tous les secteurs d’activités, y compris celui de l’immobilier : les données sont de plus en plus disponibles, en tout lieu et à tout temps, les biens fonciers et les différents processus sont numérisés. Cette grande transformation remet en question certains types de service, notamment celui du secteur traditionnel de l’immobilier et cela indépendamment de leur taille et de leur champ d’activité. Parallèlement à cela, la concurrence avec l’apparition de nouveaux modèles économiques exerce une forte pression sur les prix. Également, une numérisation croissante pourrait constituer un facteur économique qui fera bouger le marché immobilier, car la numérisation entraine une multiplication des modèles d’affaires en ligne qui aura pour conséquence de faire diminuer les surfaces de vente et les surfaces de bureau étant donné que les activités peuvent être traitées virtuellement grâce à internet.

Par ailleurs, le marché des services immobiliers suisse a été récemment marqué par différents types de développements transfrontaliers. La numérisation peut offrir de nouvelles opportunités tout en bouleversant le marché des services.  Cette situation a pour effet d’une part d’induire une forte pression sur les prix et d’autre part, de favorise la consolidation.

Actuellement, plusieurs facteurs poussent les professionnels de l’immobilier à passer le cap de la numérisation que ce soit en termes de constructions, de vente ou d’intermédiation. Parmi les principaux facteurs, nous pouvons citer : le fort développement du taux d’utilisation d’internet chez les particuliers, l’évolution des besoins des consommateurs en termes d’achats et de recherche d’informations, l’adoption du BIM qui constitue une réelle opportunité par rapport à la concurrence et l’incitation de la Commission Européenne pour la création d’un marché numérique unique.

  • Développement du taux d’utilisation d’internet chez les consommateurs

La numérisation économique est actuellement sur toutes les lèvres et fait partie intégrante de notre quotidien. Les objets connectés via des réseaux numériques sont autant de progrès qui changent le monde que ce soit dans le domaine professionnel ou au sein des ménages.  Le commerce en ligne commence de plus en plus à se développer avec un taux de croissance de 7 à 10% par an. Cette croissance est en majorité liée à la démocratisation très rapide des appareils mobiles. Avec ces types d’appareils, les consommateurs ne cessent de découvrir de nombreux avantages sur les achats sur internet et ne peuvent plus s’en passer : prix bas et offres très diversifiées.

Pour la Suisse, l’internet est utilisé quotidiennement par la population. L’audience des entreprises suisses sur internet est de plus en plus développée et variée. L’utilisation d’internet se développe en même temps que la diversification des usages. Cette forte utilisation d’internet a largement transformé les besoins des consommateurs ainsi que leurs habitudes de consommation. Par exemple durant le premier trimestre 2010, 47% des plus de 16 ans de la population suisse ont déjà réalisé des achats en ligne[19]. Actuellement, plus de la moitié de la population suisse utilisant internet achète des services ou des produits en ligne. Face à l’apparition des ces nouvelles habitudes, toutes les entreprises, quel que soit leur secteur d’activité doit s’adapter.

Figure 3: Utilisation d’internet pour les achats de biens ou de services

Pour la Suisse, toutes les catégories socioprofessionnelles, sociales et d’âge utilise massivement les services d’internet pour s’informer en vue d’un recours à un service ou à un achat. Selon une enquête de l’Office fédéral de la statistique,  l’e-commerce commence à se développer dans le pays et commence à devenir très populaire[20].

En même temps, l’utilisation d’internet mobile s’est également développée où plus de deux tiers des internautes se connectent à partir de dispositifs connectés tels que les tablettes, les Smartphones, etc.

  • Des clients à la recherche d’offres sur mesure et une forte augmentation des achats en ligne

Si les entreprises sont amenées à mettre en place des services numériques, c’est tout d’abord pour s’adapter aux nouveaux besoins des consommateurs, car grâce aux nouvelles technologies, ces derniers peuvent désormais choisir entre plusieurs prestataires tout en étant de plus en plus exigeants.  En Suisse, la vente en ligne connait une croissance de 13% par an,[21] car avec le développement des habitudes et des pratiques d’achats des consommateurs, les entreprises sont de plus en plus poussées à mettre en place des stratégies croisées en termes de distribution. Selon le responsable marketing chez ContactLab Suisse, les télévisions connectées et les smartwatches sont actuellement devenus des canaux de vente à haut potentiel.

Par ailleurs, les clients sont plus mobiles et plus connectés, et cherchent plus que jamais des réponses immédiates à leurs demandes.  Cette situation incite de nombreuses entreprises à se lancer dans des offres plus personnalisées, une pratique qui est actuellement devenue incontournable.

  • BIM

Le BIM (Building Information Model) peut se définir comme une méthode de travail qui se base sur la collaboration autour d’une maquette numérique. La technologie BIM est une sorte de processus impliquant à la fois la création et l’utilisation d’un modèle 3D afin d’aider les professionnels de l’immobilier à prendre de meilleures décisions en matière de traitement de projets et de communication[22]. Cette maquette numérique constitue une innovation numérique majeure pour le secteur immobilier et peut avoir un impact conséquent sur les différents métiers.

Le BIM ou la modélisation des données du bâtiment constitue l’une des principales raisons qui poussent la Suisse à entamer une révolution numérique au niveau du secteur de l’immobilier[23]. Pour le pays, le BIM constitue le premier pas vers la digitalisation de la construction. Cette modélisation propose une véritable maquette numérique pour le secteur du bâtiment et inclut tous les éléments de la construction.

  • Création d’un marché numérique unique par la Commission européenne

L’une des dix plus grandes priorités de la Commission européenne est la réalisation de marché unique numérique à travers des échanges numériques entre les institutions étatiques, les entreprises et les citoyens des différents pays de l’Union européenne.  En constatant que les petites et moyennes entreprises de l’UE n’exploitent pas encore assez le potentiel des ventes transfrontières, Günther Oettinger, commissaire européen à l’économie numérique et à la société, a décidé en 2015 de mettre en place une stratégie ambitieuse ayant pour objectif de mettre en place un marché numérique qui contribuera grandement à l’activité économique dans la zone euro. Cette stratégie sollicite la participation de tous les pays membres de l’Union européenne y compris la Suisse. Ce projet numérique vise ainsi à exploiter autant que possible les possibilités offertes par les services numériques avec l’objectif de faire des 28 marchés nationaux de l’Union européenne un marché unique numérique pour les biens et les services, que ceux-ci soient physiques ou numériques. En d’autres termes, il s’agit de promouvoir le développement du commerce en ligne et d’aider les entreprises à développer la vente sur internet.

Ce projet requiert, pour tous les pays membres, un meilleur accès aux biens et aux services en retirant tous les obstacles dans les échanges transfrontaliers en ligne quel que soit le secteur d’activité. Le projet vise également à améliorer les possibilités de collaboration entre les différents systèmes afin d’accélérer la croissance économique[24]. Selon toujours la Commission européenne, la Suisse devrait observer l’évolution actuelle et ne pas rater le train afin de se rattraper de son retard et doit se poser la question : dans quelle mesure une coordination internationale est-elle nécessaire pour réaliser l’économie numérique et que pouvons-nous faire nous-mêmes ?

Dans le cadre de la mise en place de ce marché, la Commission européenne attend que la Suisse veille à ce que ses entreprises, dans tous les domaines d’activités, et ses consommateurs puissent avoir facilement accès à ce marché à travers le numérique. Ainsi, la mise en place de ce marché unique numérique par l’Union européenne a un impact important sur la Suisse. Pour pouvoir y accéder, cette dernière doit impérativement passer l’étape de la digitalisation. Également, si les entreprises suisses n’entament pas l’étape de la numérisation, elles risquent de perdre en compétitivité en raison de la concurrence qui est de plus en plus forte. Par exemple en raison des règles différentes par rapport à celles d’autres pays (exemple : sur les contrats lors des achats en ligne), il est possible que les fournisseurs ne soient pas intéressés à vendre leurs biens et services en Suisse. Cela constitue un grand désavantage aussi bien pour les entreprises que pour les consommateurs, car le pays risque d’être le seul à ne pas avoir accès à tous les contenus et services numériques au niveau européen voire même à ne pas pouvoir visualiser à l’étranger un contenu acheté légalement dans leur pays. Donc pour ne pas rester isolé dans un domaine décisif pour une meilleure croissance économique, la Suisse doit impérativement passer le cap de la numérisation.

II-3.1 Les points clés pour passer l’étape de la digitalisation

La numérisation soulève un enchainement de questions nouvelles pour les entreprises : quelles seront les transformations indispensables ? Quels types d’exigences devront être satisfaits en termes d’infrastructure ?  Quelles sont les différentes règles qui vont s’appliquer dans le traitement de données ? Comment l’Etat va-t-il définir les différentes conditions-cadres afin que chaque entreprise et consommateur puisse profiter des bénéfices du numériques ? Ces différentes questions nous mènent à définir les points clés pour passer l’étape de la digitalisation, les différents aspects juridiques qui y seront liés, ainsi qu’à déterminer la modélisation des données du bâtiment BIM.

La digitalisation du secteur de l’immobilier Suisse, notamment celui de la construction ne semble pas encore très avancé. Toutefois, le pays ne peut plus reculer en termes de numérisation et les différentes activités vont connaitre de profonds changements. Le rapport du crédit suisse[25] prévoit quatre grands changements pour la numérisation du secteur de l’immobilier :

  • Une implémentation plus élargie du BIM surtout pour les entreprises qui n’ont pas encore décidé de passer l’étape. Pour cela, les entreprises devront faire preuve de flexibilité.
  • Une numérisation des chaines de création de valeur. L’intensité de la création de valeur ainsi que la productivité du secteur de la construction pourront permettre à la Suisse de rattraper son retard de numérisation.
  • Un changement de profils professionnels : la numérisation nécessite de nouvelles compétences, particulièrement dans la phase de planification qui demande davantage de grandes compétences dans les technologies numériques. En effet, le contexte de numérisation du monde de l’immobilier demande une meilleure qualification des entreprises et des collaborateurs. La personnalité des collaborateurs est également un facteur de succès. Les entreprises qui sauront allier technologie, professionnalisme, personnalité et connaissances solides seront les mieux armées.
  • La Commission européenne voit en la numérisation une condition unique pour exploiter au maximum le potentiel économique. Son étude concernant la cybermédiation esquisse des pistes à suivre : les attitudes des pays intéressés par la numérisation doivent être prises en compte afin de faire avancer la numérisation, la collaboration entre les autorités en elles, avec les citoyens et les entreprises doit se baser sur une infrastructure numérique commune dans laquelle les solutions doivent fonctionner au sein du contexte culture de chaque pays. Pour le cas de la Suisse, la Commission européenne stipule que le fait d’attendre des solutions internationales ou européennes en termes d’identification électronique ne constitue pas une option. Il ne suffit donc pas d’observer, mais plutôt de s’améliorer.

II-3-2 Les aspects juridiques

L’autorité publique a la responsabilité d’accompagner et de soutenir activement les transformations de structures engendrées par la numérisation. Pour cela, il est amené à mettre en place les jalons nécessaires tout en apportant sa contribution au développement durable des entreprises. En s’intéressant aux risques comme aux avantages des mutations technologiques, l’administration fédérale doit également répondre aux différents risques liés à l’utilisation des nouvelles technologies afin de protéger les sociétés et l’économie.

Le Conseil fédéral Suisse a créé un cadre général en faveur de l’utilisation des nouvelles technologies de l’information et de la communication au niveau de toutes les régions et de tous les domaines de l’économie. Parmi les différentes conditions-cadres dont bénéficient l’économie Suisse, il y a la grande liberté d’entreprendre, la main d’ouvre qualifiée, la sécurité juridique, la qualité des infrastructures, des charges fiscales modérées, la qualité de vie élevée ainsi que la flexibilité du marché du travail[26]. Selon DEFR ou le département fédéral de l’économie de la formation et de la recherche Suisse, le maintien ou plutôt l’amélioration de ces conditions-cadres sont actuellement au centre de la politique économique du pays[27].

Selon Markus Langenegger, Collaborateur scientifique, Croissance et politique de la concurrence, Secrétariat d’État à l’économie (Seco), Berne,  les mesures qui devront être prises par la Confédération, les cantons et les communes suisses doivent être en premier lieu liées à la Cyberadministration. Néanmoins, le Conseil fédéral a déjà rédigé une stratégie suisse dans ce domaine. La stratégie a comme objectif de permettre aux acteurs économiques et à la population de régler électroniquement les affaires en relation avec les autorités tels que les changements d’adresse, les formalités douanières, les services à la population, etc.

Par ailleurs, l’État intervient également dans le cadre de la dématérialisation des documents et d’archivage électronique. Le fort développement du volume des données électroniques pousse l’État à mettre en place des lois concernant la valeur probante des enregistrements informatiques qui constituent des preuves par écrit. Toutefois, la jurisprudence admet que l’acte ne soit ni écrit, ni signé par la partie à laquelle on l’oppose, mais qu’il doit être son œuvre intellectuelle et que les documents informatiques transmis ou reproduit ne possèdent jamais le caractère original, son unicité et sa signature faisant défaut sera objecté[28].

II-3.3 La modélisation des données du bâtiment (BIM)

Afin de passer l’étape de la modélisation, le secteur du bâtiment suisse doit premièrement passer par la modélisation des données du bâtiment (BIM). Contrairement aux conceptions assistées par ordinateur ou CA0, la modélisation des objets se trouve au premier plan. Dans cette conception, les objets individuels sont rattachés à des attributs tels que les matériaux, le poids ou le fabricant.

L’intégration du BIM dans le secteur immobilier suisse représente plus que l’utilisation d’un nouveau logiciel, car il fait partie intégrante de la numérisation dans l’ensemble de la chaine de création de valeur. Cela nécessite ainsi un échange d’informations par le biais d’un modèle commun impliquant l’intégration renforcée des différents partenaires concernés.

  • Les avantages du BIM

Le BIM offre l’avantage de tester directement les différentes caractéristiques du bâtiment telles que l’éclairage, la statique le chauffage ou les exigences concernant les issues de secours. Il est également possible de calculer le besoin en matériaux à l’aide du BIM.

Par ailleurs, le BIM permet aux entreprises d’économiser en termes de coûts et de temps. Cela provient essentiellement de la qualité des flux d’informations entre les acteurs concernés. Par exemple, les différents fournisseurs et sous-traitants sont impliqués plus tôt au sein du processus. Cela permet de diminuer les modifications de plans qui demandent beaucoup de temps. Avec le BIM, les maitres d’ouvrage connaissent plus précisément le projet qu’il va recevoir, le prix y afférent et le moment. Le modèle permet également de connaitre dès l’avance le niveau de complexité du projet à réaliser tout en ayant la possibilité de déceler les défauts de construction dans le modèle. Si l’on ne considère que le côté financier, l’implémentation du BIM permet de bénéficier jusqu’à un tiers de l’économie[29].

Figure 4: Les avantages les plus cites du BIM dans les pays industrialises (sans la suisse)

 

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Source: «Business Value of BIM», SmartMarket Report, 2014

 

Les perspectives de progrès attendus par les entreprises de la construction dans l’adoption de la maquette numérique BIM sont les suivantes :

  • Obtention aisée des marchés avec une meilleure réduction des délais de réalisation, des défauts de mise en œuvre ainsi que des risques de pathologie grâce à une meilleure préparation du chantier.
  • Une montée en compétence commune pour toutes les entreprises de construction ou sous-traitants grâce à un meilleur partage des données et des informations tournant autour des projets.
  • Une meilleure traçabilité des processus qualité et des matériaux pour garantir la performance
  • Une intégration efficace d’éléments préfabriqués et pré-industrialisés.
  • Les axes principaux pour la mise en place du BIM

La mise en place du BIM est destinée à favoriser l’installation d’un cadre de concertation et de gouvernance tout en mettant en place une série d’actions structurantes à forte visibilité selon quatre axes principaux établis par l’État:

  • Convaincre et donner envie à tous les acteurs opérant dans le secteur immobilier à l’utilisation du BIM : cela a pour objectif d’inciter les entreprises, notamment les TPE et les PME à utiliser des outils et des méthodes innovants dans leur projet de construction. Dans ce cas, la création d’un portail du numérique ainsi que l’animation de réseaux d’acteurs permettraient à ces entreprises de porter l’essentiel de leurs actions.
  • Répondre aux besoins d’équipements des acteurs tout en les permettant d’accroitre leurs compétences numériques : il s’agit de les faire bénéficier d’une panoplie d’outils et de formation en ligne afin de toucher le plus grand nombre d’acteurs sans avoir besoin de les faire déplacer.
  • Développer des outils adaptés à la taille de tous les projets avec l’objectif de développer des outils adaptés à tous les types de projet ainsi qu’aux différents métiers du secteur de l’immobilier.
  • Installer la confiance dans l’écosystème numérique : afin que le BIM puisse servir efficacement à mieux gérer les interfaces et à partager des informations de meilleure qualité, l’État propose d’organiser et de soutenir la représentation des pays concernés au sein des instances de normalisation au niveau européen et international.
  • Intégration de la robotique dans la construction

L’intégration de la robotique est également une étape à franchir si la Suisse souhaite réellement entrer pleinement dans la numérisation de son secteur immobilier. En effet, la numérisation ne s’arrête pas au processus de planification, car le potentiel de numérisation peut encore être plus important. Le BIM constitue un outil destiné à améliorer le pilotage et le contrôle des projets de construction et dans lequel les drones et les robots travaillent suivant un modèle et renvoient des informations sur l’avancement de la construction. Il y a également la numérisation et l’automatisation des processus de fabrication de certains éléments de la construction permettant une préfabrication sur mesure du bâtiment.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE II : Interprétation des résultats et appréciations

La transformation numérique au sein du secteur de l’immobilier suisse soulève beaucoup de questions : quels seront les changements nécessaires pour les entreprises, quels types d’exigences doivent-elles satisfaire en matière d’infrastructure? Quelles sont les différentes règles qui vont s’appliquer en termes de traitement de données ? Comment va faire l’État pour définir les conditions-cadres afin que chacun, entreprises et particuliers, puisse profiter du numérique. Toutes ces questions demande non seulement des modifications du modèle économique des entreprises de l’immobilier, mais également des défis à relever pour tous les acteurs concernés

I. Les modifications apportées par les technologies numériques

La numérisation du secteur immobilier va engendrer des changements conséquents dans les différents domaines de l’immobilier comme l’accroissement des acteurs immobiliers en ligne ainsi que la transformation de l’ecosystème immobilier.

I-1. Modifications de l’environnement interne des entreprises

  • Transformation de la relation client

« Un des défis à relever pour les entreprises est de concevoir le numérique comme une partie intégrante de l’organisation et non comme un univers à part qui serait le marketing digital »[30]. Rappelons tout d’abord que le digital ou numérique « correspond à l’apparition de nouveaux types d’usages rendus possibles et faisables par l’arrivée à maturité simultanée d’un certain nombre de technologies [31]».

Actuellement, le digital modifie considérablement les métiers des acteurs de l’immobilier. Les innovations apportées par le digital a non seulement transformé le business modèle, les processus métiers, les fonctions supports, mais également la relation client.  Ainsi, la numérisation engendre des modifications au niveau de la relation entre les entreprises et les clients. Le fait que les clients expriment leurs besoins à travers les portails numériques, comme les réseaux sociaux par exemple, change les règles du jeu, car désormais, les entreprises vont devoir trouver de nouveaux critères pour garantir leur succès.

  • Modification des formes de travail

La numérisation engendre des transformations au niveau des différents processus au sein des entreprises.  Par exemple avec les plateformes de communication numériques, les différents décideurs d’une entreprise peuvent prendre des décisions ensemble sans forcément être présents dans une même pièce. Par ailleurs, les technologies numériques peuvent également faire diminuer la durée des processus où les processus papier sont numérisés. Les gains de temps dans les processus peuvent être utilisés pour s’occuper des clients ou pour d’autres types d’activités.

  • Modification des processus commerciaux

Un des principaux objectifs de la numérisation est l’amélioration des processus commerciaux, car les clients peuvent communiquer numériquement et facilement avec les entreprises.  Grâce à cela, la communication entre l’entreprise et ses clients sera beaucoup plus améliorée et les processus commerciaux adaptés aux nouvelles possibilités offertes par le numérique.

I-2. Modification de l’environnement externe des entreprises

  • Accroissement des acteurs immobiliers en ligne

Les technologies numériques apportent d’importants changements dans l’économie d’un pays. Au niveau du secteur immobilier, la révolution numérique influence non seulement les activités de constructions, mais également l’écosystème immobilier, notamment avec l’apparition de différents acteurs en ligne : réseaux d’agences en ligne, les comparateurs d’agence en ligne, les promoteurs immobiliers en ligne et les sites d’annonces. L’apparition de ces nouveaux acteurs pourra également influencer la stratégie des distributeurs immobiliers,  particulièrement sur les manières de marketer les offres, de recruter des prospects ou de gérer la marque.

  • Transformation de l’écosystème immobilier

La révolution numérique dans le secteur de l’immobilier peut engendrer des impacts importants sur l’écosystème immobilier : affluence de nouveaux services entre les clients et les agences immobilières, empowerment des clients et création de nouvelles entreprises innovantes : les start-up.

Avec la transformation numérique des entreprises de l’immobilier, leur stratégie, leur modèle commercial, leur organisation, leur processus de travail ainsi que leur culture d’entreprise vont évoluer ensemble à travers l’utilisation de technologies numériques. Généralement, le modèle se fonde sur neuf éléments : l’expérience client, l’innovation des produits et de processus, la stratégie numérique, l’organisation, la numérisation des processus, la collaboration, l’exploitation des TIC et développement, la culture et expertise et la gestion de la transformation[32].

  • L’expérience client : les entreprises qui développent des stratégies numériques matures ont la possibilité d’adapter leurs offres avec l’évolution des habitudes de la clientèle. Dans ce cas, le prix ne constitue plus le seul critère de différenciation, le confort d’utilisation pour la clientèle gagne en importance. Le soutien numérique intervient pendant et après l’achat.
  • L’innovation dans les produits et les processus : les entreprises qui mettent à profit les opportunités offertes par les technologies numériques peuvent se procurer de réels avantages concurrentiels à travers des offres innovantes. Grâce aux nouvelles possibilités offertes par le numérique, elles ont également la possibilité d’améliorer les processus déjà existants.
  • La stratégie numérique : la stratégie numérique commence généralement par la considération des clients et de leurs besoins. Seules les entreprises avec une grande maturité numériques peuvent exploiter les diverses opportunités pour satisfaire au mieux leurs clients.
  • L’organisation : en exploitant efficacement la numérisation, les entreprises peuvent adapter leur organisation et leurs ressources aux divers changements de stratégie afin de relever plus efficacement les défis et d’acquérir le plus rapidement .possible des compétences numériques.
  • La numérisation des processus : au sein des entreprises qui ont déjà passé l’étape de la numérisation, tous les processus stratégiques peuvent être axés sur les structures numériques et peuvent être automatisés dans la mesure du possible. Par exemple si un contremaitre peut transmettre directement les rapports de travail à partir d’objets connectés, le chef de chantier peut vérifier les données de façon aléatoire. Grâce à cela le processus de travail peut s’accélérer et en cas d’erreurs, il est possible d’apporter des corrections rapidement.
  • La collaboration : en utilisant les technologies numériques, la coopération entre les collaborateurs se développe dans la mesure où la communication peut s’effectuer partout et à tout moment. Également, lorsque les professionnels sont mis sur un même réseau, ils peuvent travailler en collaboration en tout lieu.
  • Les technologies de l’information et de la communication : les entreprises qui développent les TIC peuvent adapter leurs stratégies aux nouveaux défis numériques. Grâce à cela, les petites et moyennes entreprises peuvent disposer de conditions optimales afin de progresser dans sa propre numérisation.
  • La culture et l’expertise : les entreprises qui sont matures en termes de numérisation développent une culture d’entreprise marquée par une ouverture et une meilleure compréhension des technologies numériques.
  • La gestion de la transformation numérique : la transformation numérique est un processus planifié et implique un travail d’équipe pour les entreprises. Cette transformation permet aux entreprises d’adapter leurs structures.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

II. Les opportunités et les points de vigilance par rapport à la numérisation

La numérisation a totalement transformé le monde depuis ces dix dernières années. Le numérique est présent partout et dans pratiquement tous les domaines de l’économie et de la société. Pour la Suisse, il constitue un élément pour sa croissance future, car les différentes chaines de création de valeur sont compromises par le développement de plus en plus important des différents réseaux de communication. Toutefois, la transformation digitale engendre non seulement des opportunités, mais également des risques qui doivent être maitrisés.

II-1. Les opportunités

La révolution numérique peut apporter de grandes opportunités pour les entreprises de l’immobilier. Les principales opportunités sont liées à l’optimisation du modèle commercial comme montré par le tableau ci-après :

Tableau 3 : Les opportunités de la révolution numérique pour les entreprises

Stratégie Opportunités Exemple
Ø  Optimisation –          Diminution des coûts de processus et des coûts unitaires Solutions numériques dans les processus de création de valeur

 

 

 

 

  –          Optimisation des modèles existants
Amélioration du modèle commercial existant –          Coûts optimisés
  –          Amélioration des procédures de service
  –          Planification des affectations avec appareils mobiles
Ø  Transformation –          Remodelage des activités existantes Offre parallèle de services en ligne et hors-ligne dans le commerce
  –          Extension de l’activité établie
Modification du modèle existant –          Marché numérisé
–          Modification de la chaine de création de valeur
Ø  Nouveaux marchés –          Modification des acteurs établis sur le marché

–          Nouveaux produits et prestations

–          Nouveaux modèles commerciaux

Le commerce est géré uniquement de manière numérique

 

 

 
 
Introduction de nouveaux modèles commerciaux –          Développement d’une distribution mondiale
–          Développement de nouveaux réseaux de création de valeur

Source : pe-Gestion de la petite entreprise[33]

Avec la numérisation, le besoin de changement ainsi que le remodelage et l’adaptation des processus et modèles commerciaux sont accélérés. Pour atteindre leur objectif de numérisation, les seules questions que les entreprises doivent se poser sont : quelles sont les implications de la numérisation au sein de l’organisation et pour le modèle commercial ? Quels sont les différents changements qui doivent être entrepris et à quoi ressemble une stratégie de numérisation réussie dans la réalité numérique ? Toutefois, quelles que soient les opportunités offertes par le numérique, il existe toujours des points de vigilance qui ne doivent pas être négligés, particulièrement pour le cas de la Suisse.

II-2. Les points de vigilance

Pour la Suisse, certains facteurs risquent de nuire à sa révolution numérique, notamment en ce qui concerne l’adoption de certaines stratégies numériques. Il y a par exemple les risques liés à la règlementation et les risques en relation avec les professionnels de l’immobilier. Selon le président de l’École polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ), Lino Guzzella : « La Suisse doit être consciente qu’un grand changement aura lieu. Ce n’est pas une évolution microscopique, mais tectonique » et « Beaucoup de professions qui ne demandent pas beaucoup de flexibilité risquent d’être remplacées par des robots… Il faut s’adapter à ces changements« [34].

  • Les risques au niveau de la règlementation

Actuellement, la règlementation en Suisse en termes de numérisation est encore très excessive. En effet, les règlements qui existent ne font qu’entraver le saut dans l’ère du numérique. Par exemple, l’utilisation mobile d’internet pâtit de la rigidité des prescriptions réglementaires et des coûts qui en résultent. Même si la Suisse dispose d’un cadre juridique stable offrant une multitude d’avantages, y compris pour le développement d’une société numérique, la règlementation est encore très pléthorique et cela risque d’entraver son saut dans l’ère du numérique. Cette situation est renforcée par la faiblesse numérique de l’administration publique. En effet, l’administration en ligne suisse reste encore très insuffisante. Selon l’étude de l’EPF, la Suisse ne dispose pas encore de conditions-cadres suffisantes pour lui garantir une transition digitale réussie.

  • Les risques à l’égard des professionnels de l’immobilier

À part les risques règlementaires, les professionnels de l’immobilier s’exposent également à d’autres risques face à la révolution numérique. Il y a par exemple les risques de désintermédiation, l’asymétrie de l’information et le risque de disparition de certains postes. L’augmentation des achats en ligne impacte également les surfaces de vente. Selon le rapport du crédit suisse 2016, le marché des surfaces de vente se confronte actuellement à deux défis conjoncturels majeurs : une appréciation du franc qui favorise les achats à l’étranger et le succès progressif des commerces en ligne. Les achats à l’étranger augmentent en même temps que les achats en ligne alors que plus les consommateurs se familiarisent avec le commerce sur internet, moins ils pourront se passer des prix bas et de l’étendue des offres en ligne. De plus, les nouvelles générations qui sont nées avec le numérique entrent de plus en plus dans le marché des consommateurs, ce qui fera encore diminuer la demande de surfaces de vente dans le temps.

  • Les risques de désintermédiation 

Si depuis toujours, le marketing immobilier se faisait principalement sur papier, la révolution numérique pousse les acteurs à développer des stratégies marketing numériques sur le web. Les divers outils tels que les sites internet et les réseaux sociaux deviendront indispensables. Par exemple pour la France, les agents immobiliers ont, depuis quelques années, modifié leurs pratiques, car les clients utilisent de plus en plus internet pour trouver un logement et pour comparer les prix. Et en passant par les sites immobiliers en ligne, ils font de moins en moins appel aux intermédiaires immobiliers, car avec le numérique, ils ont la possibilité de réaliser des transactions à l’aide d’un intermédiaire en ligne tout en ayant la possibilité de faire des visites virtuelles des biens qui les intéressent.

Dans leurs travaux, Coase (1937) et Williamson (1975) expliquent le processus de désintermédiation par le fait que l’agent immobilier, l’intermédiaire principale dans la transaction, est considéré comme celui qui détient la « rente d’information » et qui a la possibilité de l’exploiter à son avantage[35]. L’apparition de nouveaux acteurs immobiliers en ligne remet peut remettre en cause la pertinence de l’’existence des agents immobiliers traditionnels (intermédiaires). En effet, ils risquent d’être considérés comme de simples constituants de la chaine de valeur qui finalement, augmentent le prix final des biens. En raison de l’avènement grandissant d’internet, ces derniers risquent de devenir inutiles en quelque sorte puisque les acheteurs et les vendeurs peuvent désormais se rencontrer directement de manière rapide et fluide. Benjamin & Wigand (1995), en se référant aux marchés des vêtements, affirment que les agents intermédiaires sont fortement menacés par la numérisation des mises en relation directe.  Ils expliquent que sans les intermédiaires, le vendeur pourra récupérer une plus grande partie du gain et l’acheteur peut avoir un large choix de biens tout en bénéficiant de prix moins élevé.

En 1997, trois auteurs, Tuccilo, Baen & Guttery ont déjà prédit l’avènement des « cybermédiaires » en affirmant qu’il est fort possible que les plateformes de rencontre remplacent définitivement les agences immobilières traditionnelles[36]. Avec les acteurs en ligne, les clients ont le choix entre deux méthodes différentes :

  • faire appel à un intermédiaire qui s’occupe de l’ensemble de la transaction et supporter le coût financier en surplus ;
  • effectuer des recherches à travers un cybermédiaire qui leur permet de bénéficier d’une mise en relation directe et d’assurer eux-mêmes toutes les procédures et organisations en rapport avec la transaction, notamment les coûts que cela peut engendrer en termes de complexité, de temps, de risques à assumer, de connaissances légales, etc.

Par ailleurs, si les portails de mise en relation se développent sur le web, cela pourrait promouvoir les transactions directes entre particuliers et mettre les professionnels dans une situation difficile. Par exemple à travers les réseaux sociaux, les particuliers peuvent facilement diffuser leurs petites annonces immobilières sur un ensemble de sites gratuits en considérant que les agences immobilières ne sont pas assez vastes pour accueillir toutes les annonces immobilières comme dans le web. En outre, si les portails de mise en relation se développent considérablement, les clients pourront avoir un maximum d’informations sur le web, comme c’est déjà le cas dans d’autres pays comme la France, et feront de moins en moins appel aux agents intermédiaires immobiliers qui demandent souvent des honoraires élevés.

En 2014, le Baromètre du marché de l’investissement immobilier a mené un sondage concernant l’impact du numérique sur le secteur immobilier. Les résultats des sondages ont démontré une réelle menace à l’encontre des agents immobiliers traditionnels qui risquent de perdre des parts de marché conséquentes en raison des services offerts par internet.

Figure 5 : Situation des agents immobiliers face aux acteurs en ligne

Dans la majorité des pays européens, les acteurs économiques, sondés par le Baromètre de marché de l’investissement immobilier, considèrent qu’il est fort probable que les services internet feront perdre des parts de marché aux agents immobiliers traditionnels, notamment pour la vente et la location d’immobilier résidentiel. Pour les quinze pays concernés par les sondages, la majorité des investisseurs sondés considère les services offerts par internet, particulièrement l’e-commerce, comme une menace non négligeable pour les magasins se trouvant dans les zones périphériques.

Toutefois, malgré l’avènement d’internet et le développement des sites d’annonces mettant directement en relation les particuliers, les agents immobiliers traditionnels restent encore dans la course. L’étude menée par Xerfi en témoigne et dans laquelle il mentionne : « Non seulement, les agents immobiliers n’ont pas été rayés de la carte, mais leur part de marché a augmenté ces quinze dernières années (68% des transactions totales)»[37].

  • Asymétrie de l’information

Avec la révolution numérique, les agents immobiliers risquent de faire face à des difficultés conséquentes, particulièrement en termes de commissions et en termes d’asymétrie de l’information en rapport avec la production de services. Concernant le problème d’asymétrie de l’information, nous pouvons nous référer au cas de la France où les agents immobiliers ont actuellement une mauvaise image. En effet, avant l’arrivée du numérique ainsi que des diverses possibilités qu’elle offre, les professionnels de l’immobilier étaient toujours les seuls dépositaires d’informations concernant les transactions : prix, demande, contexte juridique, etc. Grâce à ces informations, ils étaient les seuls à pouvoir tirer profit des transactions. Mais avec internet et la grande disponibilité de données sur le web, les consommateurs ont facilement accès à toutes les informations qu’ils souhaitent et gratuitement. Dans certains cas, il se peut même que les particuliers savent beaucoup plus que les agents immobiliers. Par conséquent, ces derniers apparaissent comme beaucoup moins professionnels, car l’asymétrie de l’information se retourne conte eux.

  • Fin du travail 

Depuis l’automatisation de certains domaines d’activités, la numérisation est devenue une révolution technologique qui se reflète non seulement sur le marché du travail, mais touche également les tâches manuelles que cognitives. Bien que très bénéfique pour les acteurs économiques, la révolution numérique peut entrainer la fin du travail pour les travailleurs. Par exemple les ouvriers d’usines risquent d’être remplacés par des robots et les travailleurs de bureau par des ordinateurs. Les ordinateurs et les machines disposent actuellement de grandes capacités pouvant contenir et structurer d’importante quantité de données. En effet, comme dans d’autres pays, la mutation structurelle engendrée par l’arrivée du numérique a des impacts conséquents sur le marché du travail.  L’automatisation des activités permet à l’homme de confier à des ordinateurs ou à d’autres machines innovantes des tâches habituellement manuelles ou cognitives répétitives et les progrès technologiques actuels permettent d’automatiser des activités et des opérations plus complexes.  Selon le secrétaire d’État à l’économie de Berne, Ursina Jud Huwiler, les économistes sont unanimes sur le fait que la révolution numérique a permis de remplacer la main d’œuvre dans divers domaines tout en donnant naissance à de nouvelles exigences en termes de qualifications[38].  Cela est confirmé par le fait que durant ces dernières années, la structure de l’emploi suisse s’est modifiée, notamment en raison de l’automatisation croissante. Ainsi, si la révolution numérique vient à bout, la structure de l’emploi risque de se transformer encore plus. Il de ce fait important pour la Suisse, qui souhaite entamer une révolution numérique plus importante,  d’appréhender les différentes possibilités ainsi que les limites des révolutions technologiques afin de mieux évaluer les conséquences sur le marché du travail.

Par ailleurs, les emplois risquent d’être considérablement remodelés avec la disparition de certains postes. En effet, les progrès techniques constituent une menace à ne pas négliger. Selon le secrétaire d’État à l’économie de Berne, les menaces liées à l’emploi peuvent se montrer de deux manières différentes : la première suppose une rupture se traduisant par une diminution des emplois et présente un niveau d’exigence moyen et qui ne peut être compensée par une hausse de la demande au niveau d’autres domaines d’activités ; la seconde est en relation avec le déplacement de la demande de travail à court ou à moyen terme avec l’émergence de nouveaux profils professionnels. Le plein emploi peut ainsi être menacé par la nette amélioration des outils informatiques, la robotique et l’intelligence artificielle qui multiplient sans cesse les possibilités de substitution. Lorsqu’il est plus économique pour les entreprises d’automatiser certaines tâches, elles peuvent être amenées à remplacer les travailleurs par des machines. Toutefois, cette situation peut être bénéfique pour les consommateurs lorsque cela leur permet de faire des économies si elle coïncide avec une baisse de prix.

  • Les Risques liés à l’innovation

Une fois la révolution numérique entamée, il est possible que les entreprises font face à un problème de rupture dans l’innovation des sites immobiliers. En effet avec le numérique, les paysages des sites d’annonces et les modèles d’affaires des agences immobilières en ligne doivent toujours se réinventer pour mieux faire face à la concurrence. Pourtant, certaines entreprises peuvent ne pas être capables de se réinventer à tout moment et risquent de perdre leur marché.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

III. Les atouts et les défis à relever pour la Suisse

Par rapport à la révolution numérique ; la Suisse dispose de quelques atouts lui permettant de mener efficacement sa transformation. Parmi ses plus grands atouts, il y a par exemple la performance des infrastructures ainsi que son potentiel en matière de technologies financières. Toutefois,  la transformation numérique s’accompagne de quelques défis à relever, notamment en termes de coûts pour les petites et moyennes entreprises, les stratégies numériques que devront adopter les agences immobilières, les compétences numériques de la population et aussi l’intervention de l’État.

III-1. Les atouts en termes de numérisation

  • Infrastructures performantes 

Comme indiqué par l’étude de l’EPFL, la Suisse dispose d’une infrastructure TIC compétitive qui peut encore être maitrisée. La numérisation peut être vue comme l’interaction de plusieurs facteurs qui sont interdépendants dans laquelle l’infrastructure du réseau constitue la base indispensable au stockage et à  la diffusion des informations.

  • Potentiel de technologies financières très élevé (Fintech) 

L’étude de l’PFL a souligné que par rapport à d’autres pays comme Hong Kong, New Yok, Londres ou Singapour, la Suisse dispose d’un fort potentiel en matière de sécurité de serveurs avec une réputation de fiabilité ; et elle est classée top3. Avec une bonne capacité de gérer efficacement les données, la Suisse dispose des conditions nécessaires pour se positionner en tant que « coffre-fort » international des données et peut devenir un modèle au niveau européen.

Figure 6 : Le développement de la protection des données en suisse

En ce qui concerne la sécurité des serveurs, la Suisse se situe loin devant les États-Unis et l’Allemagne.

La qualité  de l’infrastructure de la Suisse peut contribuer considérablement dans la protection des données. Plusieurs entreprises suisses helvétiques sont déjà leaders dans le marché de cryptage de données. C’est sur cette base que l’EPF désigne la Suisse comme un moteur potentiel d’innovation, toutefois, elle est encore devancée par d’autres pays tels que le Singapour, le Luxembourg, le Royaume-Uni, etc.

 

Figure 7 : L’efficacité de l’infrastructure des TIC suisse en comparaison internationale

Source : swisscom « L’avenir digital de la Suisse, réalité, défis et recommandations », Rapport de l’EPFL Collège du Management de la technologie, 2016.

Sur le plan international, c’est la Hong Kong et le Singapour qui sont placés au plus haut niveau en termes d’infrastructure. Toutefois, la Suisse dispose d’une couverture de raccordement au réseau fixe, à la téléphonie mobile et à internet. La Suisse est également le numéro un dans les connexions à haut débit sur le réseau fixe.

Le Fintech Suisse peut encore être optimisé grâce à la présence de plusieurs établissements financiers qui opèrent à l’international avec des infrastructures de qualité.  Par ailleurs, même si les entreprises suisses, particulièrement les PME, sont encore très traditionnelles, les conditions indispensables pour un environnement favorable au développement des start-up sont déjà là comme le nombre élevé d’incubateurs, d’accélérateurs ainsi que de centres d’innovation disponibles dans le pays.

Un raccourcissement du délai de construction qui va aider à diminuer les risques de développement de projets afin qu’ils soient plus attractifs. Également, la rapidité du processus de planification et de construction gagnée grâce à la numérisation pourrait réduire le décalage temporel entre la demande et l’offre et ainsi diminuer la suroffre.

  • La qualité de vie de la population

Concernant la qualité de vie, les citoyens suisses peuvent bénéficier d’une infrastructure TIC de meilleure qualité et peuvent avoir facilement accès à internet. Le pays devance l’Allemagne, les États-Unis et le Royaume-Uni. Toutefois en ce qui concerne les aptitudes à se familiariser avec le numérique, les citoyens ont encore des efforts à faire[39].

 

 

Figure 8 : La qualité de vie de la Suisse en comparaison internationale

 

Source : swisscom « L’avenir digital de la Suisse, réalité, défis et recommandations », Rapport de l’EPFL Collège du Management de la technologie, 2016.

 

III-2. Les défis à relever

  • Des coûts élevés

Bien plus qu’un simple logiciel, l’intégration du BIM demande davantage de dépense, notamment au niveau du développement. Toutefois, les coûts sont faiblement réduits en termes de documentation technique et d’appel d’offres.

Figure 9: Approche du projet de construction traditionnelle et BIM

 

Source : BIM-Leitfaden für Deutschland

Il est fort possible que la révolution numérique se heurte à d’importantes dépenses de mise en place et à des taux d’exploitation importants. Ces obstacles seront plus difficiles à gérer pour les petites entreprises, car pour elles, la numérisation doit être menée de front avec l’exploitation courante. Par conséquent, le succès dépend grandement de la capacité d’adaptation de ces dernières et de leur ouverture à l’innovation. Ainsi, les économies de coût et de temps grâce au BIM ne peuvent être perçues que lorsqu’il y a un meilleur flux d’information entre les différents partenaires.

À part la numérisation de la construction et les coûts, la numérisation du secteur de l’immobilier Suisse, présente de nombreux enjeux stratégiques et des défis à relever, d’une part pour les agences immobilières traditionnelles et d’autre part pour les sites d’annonces immobilières :

  • Défis numériques des agences traditionnelles

La révolution numérique engendre deux types d’enjeux stratégiques pour les agences traditionnelles : la défense du modèle traditionnel et la disruption numérique. En effet, l’apparition de sites immobiliers en ligne peut remettre en cause les services des agents traditionnels. De grandes questions stratégiques peuvent se montrer : comment défendre la position concurrentielle face aux nouveaux entrants : au niveau des marges et des modèles d’affaires ? Comment innover et créer de la valeur face à des consommateurs mieux informés et connectés en permanence ? Quelle stratégie mettre en place pour mieux profiter des avantages du numérique ?  Pour mieux y faire face, les agences traditionnelles doivent essayer en permanence de mettre en œuvre des stratégies numériques capables de se mesurer avec les services en ligne qui sont souvent moins chers et demandent beaucoup moins de temps.

  • Renforcement des compétences numériques de la population et de nouvelles exigences en matière de qualifications

L’étude menée par l’EPFL a révélé que pour passer efficacement l’étape de la numérisation, la Suisse doit encore investir dans le renforcement des compétences numériques de ses citoyens. L’EPFL souligne que c’est l’une des conditions sine qua non afin que le numérique puisse s’intégrer totalement au sein de la société et la faire avancer. La transmission des compétences en technologies de l’information et de la communication est primordiale afin que la Suisse puisse utiliser pleinement des atouts du numérique. Il s’agit de permettre à la population d’utiliser les nouvelles technologies dans tous les domaines : politiques, sociales, économiques et culturels.

Par ailleurs, la révolution numérique fait naître de nouvelles exigences en termes de qualifications. Un défi à relever pour la population. S’ils veulent être qualifiés, les travailleurs seront obligés de suivre des formations et se reconvertir afin de s’adapter à l’évolution de la demande.

  • Renforcement de l’intervention de l’État et révision de la loi fédérale sur la protection des données

Le département fédéral de l’économie, de la formation et de la rechercher DEFR soulève quelques points essentiels sur différents domaines permettant à la Suisse d’exploiter autant que possible le potentiel économique offert par révolution technologique :

  • Formation et perfectionnement des salariés : il est indispensable que la qualification des travailleurs soit en mesure de satisfaire de façon optimale les exigences d’un monde qui est de plus en plus marqué par le numérique ;
  • Recherche : faisant partie des économies les plus compétitives, la Suisse peut bénéficier d’une place de choix en termes d’exploration des potentialités technologiques offertes par le numérique et en termes d’élaboration d’applications qui en découlent ;
  • Protection des données : avec les diverses possibilités offertes par les nouvelles technologies et le développement du stockage de données personnelles, la sécurité des données doit être assurée par l’État ;
  • Infrastructures performantes et sûres : les infrastructures sont la base de l’univers numérique. Pour la Suisse, l’exploitation et le développement des infrastructures se font essentiellement sous l’impulsion du marché. Pourtant, l’intervention de l’État est primordiale dans la règlementation des infrastructures de réseau étant donné leur rôle essentiel dans la transformation numérique. Il est également important que les infrastructures couvrent le maximum de territoire tout en étant accessibles à toute la population.

Une loi fédérale sur la protection des données a déjà été adoptée par le Parlement en juin 1992. La loi était destinée à faire face à l’augmentation des risques d’atteinte à la personnalité engendrés par l’utilisation des technologies modernes de l’information et de la communication et à l’augmentation massive des traitements de données.  Pourtant, à cette époque, le contexte de protection des données n’est pas la même que celui d’aujourd’hui. Il n’était pas encore question d’internet pour tous et la population n’avait pas encore accès à l’informatique. Actuellement, tout le monde, sans exception, possède des objets connectés : ordinateur, téléphone portable ou tablette. Ainsi, il est désormais question d’internet des objets, de big data, de réseaux sociaux et de cloud computing. Compte tenu de ces grands changements technologiques et l’augmentation du nombre de personnes connectées et concernées par la protection des données, l’office fédéral de la justice a dû faire évaluer la loi concernant la protection des données ou la LPD. Cela a été fait en 2008, conformément à l’article 170 de la Constitution fédérale afin de mesurer son efficacité. L’évaluation effectuée a permis relever que les développements technologiques représentent de nouvelles menaces en termes de protection de données que la loi n’arrive plus désormais à palier dans certains contextes[40]. Un projet de révision est projeté pour cette année 2016. Selon l’Unité organisationnelle Projets et méthode législative de Berne, afin de mieux faire face aux risques concernant la protection des données en Suisse, le projet de révision devrait contenir certaines mesures[41] qui tendront à :

  • Promouvoir les bonnes pratiques de l’autorégulation : cela consiste à confier le soin d’approuver ou d’édicter les règles de bonnes pratiques à des organes spécialisés, par exemple un comité d’experts. Les règles serviront de base pour les responsables de traitement et permettront d’élaborer des solutions adaptables aux nouveaux défis de la révolution numérique actuelle sans forcément réglementer de manière excessive ;
  • Prendre en compte les exigences de protection des données dès la mise en place : cela pourrait s’agir par exemple d’intégrer préalablement des obligations pour les responsables du traitement et d’effectuer des analyses d’impact en cas de risque pour la personnalité. Pour cela, il est important de mettre en place des mesures adaptées aux risques encourus. Il est également proposé de donner au responsable de traitement la possibilité de contacter directement le PFPDT (Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence) afin qu’il n’y ait aucun obstacle aux divers traitements envisagés ;
  • Promouvoir la transparence des traitements : il est important que les personnes concernées par la protection des données sachent utiliser les nouvelles technologies tout en ayant la liberté de décider le type de données qu’elles souhaitent mettre à la disposition. Cela demande une grande transparence dans la collecte et le traitement des données. En Suisse, la loi actuelle prévoit que le devoir d’information dans le secteur privé ne peut exister que si les données collectées sont sensibles et que les profils sont constitués. Afin de renforcer efficacement la transparence des traitements des données, l’obligation concernant le devoir d’information doit s’étendre à toutes les catégories de données ;
  • Garantir un contrôle efficace et une meilleure maîtrise des données lorsqu’elles sont diffusées. Cette mesure devrait introduire la possibilité d’établir un mécanisme alternatif concernant le règlement de conflits afin de permettre aux personnes concernées de faire valoir leurs droits sans être obligées de devoir se lancer dans une longue procédure risquée et coûteuse ;
  • Renforcer les pouvoirs du PFPDT : afin que la protection des données s’effectue efficacement, il serait judicieux que les préposés au pouvoir aient la possibilité de rendre des décisions comme prévu par les réformes au niveau européen. Pourtant actuellement, la PFPDT n’est autorisée à émettre que des recommandations et le porter devant les autorités judiciaires dans le cas où elles ne sont pas suivies. L’Unité organisationnelle Projets et méthode législative de Berne considère que ce sont des compétences assez faibles si elles sont comparées avec celles dont disposent les autorités de contrôle dans d’autres pays européens ainsi que les autres organes de surveillance de la Confédération disposant d’un pouvoir décisionnel. En ayant la possibilité de rendre des décisions, le PFPDT aurait la possibilité de rendre des décisions destinées à suspendre le traitement ou dans certains cas à prononcer des sanctions.
  • Adaptation aux nouveaux besoins des clients

La transformation numérique du secteur de l’immobilier engendre de grands défis pour les professionnels, notamment dans la relation client. En effet, en utilisant internet pour effectuer leur achat ou pour s’informer, les clients sont de plus en plus exigeants, car ils disposent désormais d’un large choix. Par conséquent, les entreprises vont devoir développer de nouvelles stratégies pour être compétitives sur le marché. Les principaux défis des entreprises de l’immobilier à l’ère du numérique peuvent se résumer par les points suivants:

  • Le respect des besoins des clients, car désormais l’offre ou le produit de l’entreprise en constitue plus le seul centre d’intérêt ;
  • La pensée disruptive se traduisant par la capacité à voir les choses différemment, sans limites et à mettre en place les différents concepts qui vont avec ;
  • Le temps d’accès au marché : avec le numérique, l’accès au marché et aux différentes informations le concernant est devenu plus rapide. Également, la mise en œuvre et le lancement de nouveaux concepts numériques se font à une vitesse sensiblement accrue.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CONCLUSION

Depuis le début des années 2000, le monde est confronté à une importante mutation technologique. Par conséquent, toutes les entreprises, quel que soit leur secteur d’activité, se trouvent obligées de s’adapter aux nouveaux systèmes engendrés par cette transformation en adaptant leur stratégie que ce soit au niveau de la production ou de la commercialisation.  Le numérique est omniprésent et transforme le monde dans tous les domaines de l’économie et de la société.

Dans ce travail, nous nous sommes intéressés au secteur de l’immobilier, car il fait partie des secteurs les plus touchés par la transformation entrainant de nouveaux entrants, de nouveaux types d’activité ainsi qu’un bouleversement dans les modèles d’affaires de certaines branches d’activités. Cette transformation digitale est déjà très avancée au sein de divers pays européens à l’exception de la Suisse qui semble encore être en retard en matière de numérisation dans le secteur de l’immobilier, pourtant elle fait partie des économies les plus compétitives au niveau international. Au cours de ces dernières années, les chantiers de construction ainsi que les processus n’ont enregistré aucun changement notable. Cette situation est en partie liée au fait que la Suisse ne bénéficie pas encore d’une stratégie intégrale de promotion des TIC que ce soit au niveau de l’administration ou de la population.

Afin de relever efficacement les défis de la numérisation croissante et maintenir sa position, la Suisse devrait prendre des mesures en ce qui concerne les technologies de l’information et de la communication tout en développant des stratégies pour promouvoir l’économie numérique. Le passage à la digitalisation est également poussé par le fait que les consommateurs utilisent de plus en plus Internet pour s’informer ou pour acheter. Il y a également l’adoption du Building Information Model ou BIM, qui est une véritable opportunité pour le secteur immobilier Suisse. Et enfin la création d’un marché numérique unique initié par le Commission européenne.

Toutefois, la numérisation du secteur immobilier demande certains défis à relever pour la Suisse, notamment pour les agences immobilières pour la défense du modèle traditionnel et la disruption numérique, le renforcement des compétences numériques de la population et l’intervention de l’État. Il faut également noter que le renforcement des entreprises immobilières suisses au sein de leur propre marché dépend grandement de combien ces dernières sont prêtes à investir pour leur transformation digitale.

 

 

 

 

 

 

 

 

ANNEXES

Annexe 1 : Bibliographie

Annexe 2 : Liste des illustrations

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Annexe 1 :

Bibliographie

  • APEC – « Référentiel des métiers cadres du secteur de l’immobilier» 2015
  • BAEN JS, GUTTERY “The Coming Downsizing of Real Estate: The Implication of Technology”. Journal of Real Estate Portfolio Managements, 1997
  • Crédit Suisse « Marché de l’immobilier Suisse», Investment Solutions & Products Economic Research  mars 2016
  • Commission européenne, « Stratégie pour un marché unique numérique en Europe», mai 2015.
  • Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche (DEFR) « Principes pour une nouvelle politique de croissance », 2015.
  • Dominik Hauri et Markus Saurer « La cyberéconomie: situation et potentiel du point de vue économique», Secrétariat d’État à l’économie (SECO) et le Département fédéral de l’économie, 2013
  • PostFinance SA, « pe-Gestion de la petite entreprise », Mingerstrasse 20, 3030 Berne, Université de St-Gall, 2016
  • Swisscom « L’avenir digital de la Suisse, réalité, défis et recommandations », Rapport de l’EPFL Collège du Management de la technologie, 2016.
  • Maxime Le Clerc de la Herverie « Internet et le marché immobilier», Université de Rennes, 2014
  • Ernst & Young SA, « Baromètre du marché de l’investissement immobilier, Suisse » 2014
  • Ernst & Young SA Suisse, « Les entreprises suisses de taille moyenne sous-estiment le potentiel de la digitalisation», Communiqué de presse, 2016
  • Office fédéral de la statistique, « enquête sur l’utilisation d’Internet dans les ménages suisses » premier trimestre 2014.
  • Williamson, O. E. (1975), “Markets and hierarchies: Analysis and antitrust implications” New York: Free Press, Coase, R. (1937).

 

Sites internet

  • Dino Auciello, décembre 2015, « Les défis de l’e-commerce en Suisse», bilan.ch/
  • Ghislaine Bloch, mai 2016, « Cette Suisse 4.0 qui se fait attendre », letemps.ch
  • Jérôme Porier, Juillet 2015, « Les sites immobiliers enregistrent des audiences records», LeMonde.fr
  • Hervé Parent, septembre 2007 « Le web révolutionne l’immobilier », lefigaro.fr  
  • Dominique Rochat, mars 2016 « Saisir les chances de la numérisation» economiesuisse.ch
  • Nadine Haltiner/gax info économie, avril 2016, « Face à la révolution numérique, la Suisse doit se montrer plus audacieuse« , rts.ch,
  • Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche DEFR, Secrétariat d’État à l’économie SECO, 2015 « La vie économique : plateforme de politique économique », Suisse.fr

 

 

 

Annexe 2 :

Liste des illustrations

Figure 1 : Consequences de l’evolution numerique sur le marche immobilier 8

Figure 2 : Consequences de l’evolution numerique sur le marche immobilier 8

Figure 3 : Integration du bim au niveau international 12

Figure 3: Utilisation d’internet pour les achats de biens ou de services. 16

Figure 4: Les avantages les plus cites du BIM dans les pays industrialises (sans la suisse) 21

Figure 5 : Situation des agents immobiliers face aux acteurs en ligne. 30

Figure 6 : Le developpement de la protection des donnees en Suisse. 33

Figure 7 : L’efficacite de l’infrastructure des tic suisse en comparaison internationale. 34

Figure 8 : La qualite de vie de la suisse en comparaison internationale. 35

Figure 9: Approche du projet de construction traditionnelle et bim.. 35

 

[1] Internet-Protocol : une famille de protocoles de communication en réseau informatique.

[2] APEC – Référentiel des métiers cadres du secteur de l’immobilier, 2015

[3] Selon une étude de Médiamétrie » cité par  le Figaro du 25 Septembre 2007

[4] Les sites immobiliers enregistrent des audiences records, Le Monde.fr, Juillet 2015, Par Jérôme Porier

[5] Cité dans : Les sites immobiliers enregistrent des audiences records, Le Monde.fr, Juillet 2015, Par Jérôme Porier

[6] lefigaro.fr « Le web révolutionne l’immobilier », septembre 2007

[7] Bilan, La référence de l’économie, « Stratégie numérique: la Suisse est en retard,», www.bilan.ch, octobre 2015

[8] Organisation mondiale Ernst & Young SA Suisse, « Les entreprises suisses de taille moyenne sous-estiment le potentiel de la digitalisation », Communiqué de presse, 2016

[9] Les groupes Swisscom et SIX ont mandaté l’EPFL pour situer le pays dans la révolution numérique globale en cours. Intitulé: L’Avenir digital de la Suisse. Réalités, défis et recommandations

[10] swisscom.ch, « La Suisse a un retard à combler en matière de numérisation », < https://www.swisscom.ch/fr/about/medien/press-releases/2016/05/20160526-MM-DigitalCH.html , >mai 2016

[11]Crédit Suisse « Marché de l’immobilier Suisse », Investment Solutions & Products Economic Research  mars 2016

[12] Crédit Suisse « Marché de l’immobilier Suisse », Investment Solutions & Products Economic Research  mars 2016

[13] Crédit Suisse « Marché de l’immobilier Suisse », Investment Solutions & Products Economic Research  mars 2016

[14] Commission européenne (2015), fiche d’information sur le marché unique numérique, cité dans Suisse Fr. « La vie économique : plateforme de politique économique », Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche DEFR, Secrétariat d’État à l’économie SECO, 2015

[15] La cyberéconomie: situation et potentiel du point de vue économique, Dominik Hauri Collaborateur de projet, Institut d’études économiques de Bâle SàRL et Markus Saurer Expert indépendant en économie de la concurrence et de la réglementation

[16] Crédit Suisse « Marché de l’immobilier Suisse », Investment Solutions & Products Economic Research  mars 2016

[17] Saisir les chances de la numérisation, mars 2016, www.economiesuisse.ch

[18] Cité dans « Cette Suisse 4.0 qui se fait attendre » par Ghislaine Bloch, mai 2016, disponible sur https://www.letemps.ch/economie/2016/05/03/cette-suisse-4-0-se-attendre

[19] Ipsos Juin 2011

[20] Office fédéral de la statistique, « enquête sur l’utilisation d’Internet dans les ménages suisses » premier trimestre 2014.

[21] La référence Suisse de l’économie, « Les défis de l’e-commerce en Suisse », décembre 2015, disponible sur le site www.bilan.ch/

[22]Autodesk : Bulding Information MPodeling disponible sur http://www.autodesk.fr/solutions/building-information-modeling/overview

[23] Crédit Suisse « Marché de l’immobilier Suisse », Investment Solutions & Products Economic Research  mars 2016

[24] Commission européenne, Stratégie pour un marché unique numérique en Europe, 6 mai 2015.

[25] Crédit Suisse « Marché de l’immobilier Suisse », Investment Solutions & Products Economic Research  mars 2016

[26] Suisse Fr. « La vie économique : plateforme de politique économique », Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche DEFR, Secrétariat d’État à l’économie SECO, 2015

[27] Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche (DEFR) « Principes pour une nouvelle politique de croissance », 2015.

[28] Pour le droit suisse, v. Mario Giovanoli, Télécommunications et forme écrite dans les contrats internationaux, in Mélanges Paul Piotet, Berne, p.425-449

[29] Crédit Suisse « Marché de l’immobilier Suisse », Investment Solutions & Products Economic Research  mars 2016

[30] Bernard Pras, Décisions Marketing (p. 8).

[31] Deloitte, Lettre des Services Financiers numéro 26

[32] «  pe-Gestion de la petite entreprise », PostFinance SA, Mingerstrasse 20, 3030 Berne, Université de St-GAll

[33]«  pe-Gestion de la petite entreprise », PostFinance SA, Mingerstrasse 20, 3030 Berne, Université de St-GAll

[34]Nadine Haltiner/gax info économie : « Face à la révolution numérique, la Suisse doit se montrer plus audacieuse« , www.rts.ch, avril 2016

[35] Williamson, O. E. (1975), Markets and hierarchies: Analysis and antitrust implications. New York: Free Press, Coase, R. (1937). The nature of the firm. Economica, 4 (November), 386-405.

[36] BAEN JS, GUTTERY (1997) The Coming Downsizing of Real Estate: The Implication of Technology. Journal of Real Estate Portfolio Managements 3: 1-18

[37] Immobilier : Internet n’a pas tué les agences immobilières ! Le marché devrait revenir à « la normale » selon Xerfi, juin 2014 disponible sur http://www.toute-la-franchise.com/vie-de-la-franchise-A13512-immobilier-internet-n-a-pas-tue-l.html

[38] Cité dans : Suisse Fr. « La vie économique : plateforme de politique économique », Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche DEFR, Secrétariat d’État à l’économie SECO, 2015

[39] Swisscom « L’avenir digital de la Suisse, réalité, défis et recommandations », Rapport de l’EPFL Collège du Management de la technologie, 2016

[40] Evaluation des Bundesgesetzes über den Datenschutz – Schlussbericht, 10 mars 2011, pp. 172 et 213.; disponible en ligne sur le site de l’OFJ (Rapport du Conseil fédéral du 9 décembre 2011 sur l’évaluation de la loi fédérale sur la protection des données (FF 2012 255).

[41] Suisse Fr. « La vie économique : plateforme de politique économique », Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche DEFR, Secrétariat d’État à l’économie SECO, 2015

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