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L’Art et Alzheimer : L’évolution à travers les toiles de William Utermolhen

Introduction

Face à la maladie d’Alzheimer qui a été décrit comme étant « l’existence de plaques d’agrégats, communs dans d’autres pathologies, et en d’autres organes, ainsi que les neurones altérés, sièges de ce qui est appelé alors une dégénérescence neurofibrillaire en expliquant que dans certaines cellules apparemment normales, on découvre certaines fibrilles qui se distinguent par leur épaisseur et leur imprégnabilité. Elles forment d’épais faisceaux et apparaissent peu à peu à la surface de la cellule. En fin de compte, le noyau est détruit ainsi que la cellule et il ne subsiste plus qu’un faisceau de fibrilles là où se trouvaient auparavant des cellules ganglionnaires. Ces fibrilles se laissent colorer par d’autres substances que les fibrilles normales, ce qui indique qu’elles ont subi une modification chimique»[1] par le Docteur Alois Alzheimer, à Tübingen, lors de la 37ème rencontre des médecins aliénistes du Sud Ouest de l’Allemagne, diverses approches notamment médicamenteuses ont été effectuées.

En tant que Docteur en médecine spécialisé en capacité de gériatrie, allier l’art à la médecine s’avèrerait à la fois intéressant et original afin d’apporter une approche autre de la maladie d’Alzheimer, surtout que la mémoire sensorielle ainsi que la mémoire émotionnelle ou affective semblent être épargnées par la maladie.

Peintre américain,William Utermolhen (1933-2007) qui est décédé 13 ans après son diagnostic de la maladie d’Alzheimer en 1995, a décidé de réaliser une série d’autoportraits afin de pouvoir visualiser son état, sa condition. L’analyse de ces toiles montre qu’en réalité, la maladie était déjà présente dès 1991, cette maladie qui se caractérise essentiellement par des déficits et troubles de l’attention et une aggravation des troubles cognitifs au fil du temps.

La vie de monsieur William Utermolhen s’est trouvée bouleversée par la maladie d’Alzheimer ainsi que celle de son entourage. Le style figuratif du début de sa période d’artiste peintre a cédé la place à une peinture de plus en plus morcelée où tout vacille.

L’expérience de Monsieur Utermolhen est un témoignage unique et soulève une interrogation quant à la nécessité voire l’importance de l’art en tant qu’apport positif dans l’approche de la maladie d’Alzheimer. D’ailleurs, monsieur Utermolhen est le seul peintre qui a persévéré malgré la maladie à continuer à peindre, son témoignage est unique et permet de sonder les dérives psychiques que la maladie peut engendrée.

En effet, à travers l’évolution de la maladie, l’art, la peinture d’Utermolhen a permit de dévoiler un aperçu, un reflet de sa maladie non seulement par rapport à se propre perception mais aussi de son rapport avec les autres outre sa déchéance psychique.

Ce mémoire s’appuie essentiellement sur le texte du Docteur Patrice Polini dans « Dernières œuvres d’un artiste atteint de la maladie d’Alzheimer » de l’Association France Alzheimer et du documentaire «l’œil de verre » de Fréderic Compain, qui m’ont permis de cheminer ma réflexion.

Nonobstant, une telle étude exige également l’analyse de sources plus directes, comme l’entretien avec Madame Utermolhen son épouse à Londres à leur domicile, et les entretiens avec Christophe Boïcos gallériste et son ami afin de pouvoir répondre à une série d’interrogations inhérentes à la maladie d’Alzheimer : Est ce que la peinture peut retarder l’évolution morbide de la maladie? Est ce que la peinture de l’artiste a apporté des connaissances nouvelles sur la maladie d’Alzheimer ? Peut-on espérer une amélioration de la maladie en poussant les patients à s’investir dans la peinture?

Intitulé « Comment contribuer à l’étude de la maladie d’Alzheimer à travers la peinture de l’artiste William Utermolhen ? », ce mémoire souhaite démontrer l’importance de l’art dans la maladie par une autre approche qui se base sur l’analyse de l’évolution de la maladie à travers l’étude de toiles. En effet, cette étude se veut apporter une aide à la compréhension de la maladie d’Alzheimer, son évolution ainsi que sa fin inexorable qui se caractérise par la déchéance psychique. Une aide qui permettrait de ralentir, de régresser cette évolution, cette fin.

Après une première partie consacrée à la maladie d’Alzheimer, l’étude de Monsieur William Utermolhen sera effectuée, dont sa biographie, son dossier médical et plus particulièrement son rapport d’autopsie avant de conclure par l’analyse de certaines œuvres de M. Utermolhen afin de comprendre l’impact de cette affection sur le psychisme de l’être humain.

 

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Partie 1 : La maladie d’Alzheimer

C’est au début du XXème siècle qu’Aloïs Alzheimer, médecin psychiatre et neurologue allemand, à décrit la maladie d’Alzheimer, notamment les conséquences de la maladie qu’est l’altération, le déclin graduel de la pensée, la mémoire ainsi que la capacité de raisonnement.

Principale cause de la dépendance lourde et la principale raison d’intégration en institution de la personne âgée, la maladie d’Alzheimer constitue la première étiologie des syndromes de démence chez au moins deux tiers des cas.

I.                   Définition de la maladie d’Alzheimer

Appartenant à la catégorie des affections dégénératives cérébrales, la maladie d’Alzheimer a été décrite pour la première fois, en 1907, par Aloïs Alzheimer.

Neurodégénérative dont l’évolution est progressive, la maladie d’Alzheimer se caractérise par des troubles cognitifs instrumentaux au niveau du langage, des praxies et des gnosies, conjointement à une amnésie hippocampique qui confirme une atteinte corticale dont l’évolution impacte sur l’autonomie et le comportement.

La présence de plaques, ainsi que de nœuds dans le cerveau favoriserait la dégradation des neurones en fonction du temps, outre le processus de vieillissement.

Figure 01 : Coloration au fluoro-jade B des différents types de plaques (plaques diffuses =

étoile de couleur blanche et plaques neuritiques = étoile de couleur noire) et de la glie

(astrocytes réactifs de forme étoilée et cellules microgliales de forme arrondie) dans le cortex

préfrontal de la souris transgénique APP 23 (mutation suédoise).

(photo réalisée au sein du laboratoire – barre d’agrandissement = 100 mm)

 

 

 

D’ailleurs, Aloïs Alzheimer de rajouter qu’« Elle survient habituellement à partir de 50 ans, mais sa fréquence augmente régulièrement avec l’âge, surtout après 70 ans ».

Les troubles relatifs à la maladie apparaissent progressivement, généralement, la perte de la mémoire des évènements constitue le premier symptôme de la maladie, particulièrement la mémoire épisodique. En effet, le patient peut être dans l’incapacité de se souvenir d’une activité, d’un évènement passé de quinze (15) minutes, alors qu’il se souvient très bien d’ancien évènement marquant.

Au fur et à mesure de l’évolution de la maladie, la mémoire des souvenirs anciens sera aussi altérée complémentairement à la mémoire procédurale (savoir-faire) ainsi que l’apprentissage encore connu sous le nom mémoire du travail.

Deux types de mémoire ne sont pas affectés par la maladie, à savoir:

  • La mémoire sensorielle : « la maladie d’Alzheimer provoque des lésions très précises dans le cerveau, qui entraînent notamment la perte de la reconnaissance des visages et la perte du souvenir des noms. Ainsi, les patients n’ont plus les mots pour dire les choses, lorsque le langage a été détruit par la maladie, mais ils restent capables de reconnaître le regard et la voix »[2] selon Jocelyne de Rotrou.

D’où l’intérêt de la stimulation sensorielle dans la communication non-verbale.

  • La mémoire émotionnelle ou affective : selon une étude réalisée sur des patients atteints de la maladie d’Alzheimer, la mémoire émotive était toujours présente[3].

Ainsi, au début de la maladie s’observent :

  • troubles de la mémoire
  • désorientation spatio-temporelle
  • altération de jugement
  • difficultés des fonctions dites instrumentales : appauvrissement du langage, incohérence du discours ….
  • altération des praxies
  • altération des gnosies
  • diminution des initiatives, de la spontanéité, pouvant aller jusqu’à une apathie, un désintérêt total.

Avec la progression de la maladie :

  • des épisodes d’agressivité
  • une déambulation
  • des troubles du sommeil
  • une perte de contrôle des fonctions corporelles
  • une atteinte cognitive totale
  • une apathie, un total désintérêt

 

 

II.                Origines et facteurs de risque

Malgré les progrès réalisés sur la physiopathologie de la maladie d’Alzheimer, les causes et origines exactes de la maladie restent encore non identifiées. Effectivement, la cause de la maladie d’Alzheimer est multifactorielle[4] [5](Goate, 1997; Ling, Morgan et al., 2003). De plus, il est nécessaire de distinguer les deux (02) types de maladie d’Alzheimer que sont les formes héréditaires qui apparaissent précocement et les formes sporadiques dont l’apparition est plus tardive[6] (Rocchi et al., 2003).

L’âge, le diabète, le tabac, l’hypercholestérolémie ainsi que l’arythmie cardiaque par fibrillation atriale et vasculaire sont les principaux facteurs mis en cause dans les démences.

Les anomalies des chromosomes 21, 19 et 24 augmentent considérablement le risque d’apparition de la maladie d’Alzheimer.

Le surpoids s’avère également être un facteur de risque, notamment par le fait que l’augmentation de la masse graisseuse entraîne un accroissement de l’insulinorésistance tout comme la sarcopénie. Indéniablement, l’insuline permettant d’améliorer les fonctions cognitives.

Plus le niveau d’éducation est bas, plus grand est le risque d’apparition de facteur d’expression précoce de la maladie.

Des dépôts amyloïdes peuvent également survenir à la suite de répétition de coups.

L’état dépressif de même que le statut matrimonial et social s’avèrent également être des facteurs de risque. En effet, il semblerait que le lien social puisse prévenir contre la démence dont la prévalence est largement faible chez les couples mariées par rapport aux célibataires.

A.                Les facteurs génétiques des formes familiales

Des études génétiques réalisées auprès de familles dans lesquelles il y a apparition précoce, avant 65 ans, de la maladie d’Alzheimer, ont permis d’identifier la présence de mutations sur trois gènes, mutations dont les formes résultantes sont autosomiques dominantes.

1.                  Le gène APP :

Le peptide Ab est issu du catabolisme de l’Amyloid Protein Precursor encore appelé protéine APP dont le gène se localise au niveau du chromosome 21[7] [8](Kang et al., 1887; Goate et al., 1991). Or, Hardy a démontré le lien entre des formes familiales de la maladie d’Alzheimer et une mutation du gène APP, mutation London, qui se situe en aval du gène codant du peptide Ab, au niveau du codon[9] [10](Hardy, 1997).

D’autres mutations ont été identifiées par la suite, au niveau des codons 670 et 671 : mutation suédoise, qui se localise en amont du gène codant pour le peptide Ab, sur le codon 716 mutation Florida, sur le codon 715 : mutation Rouen.

Il est à noter que ces mutations sont à l’origine du catabolisme de l’APP par action sur les facteurs qui portent sur l’agrégation du peptide Ab ainsi que la production excessive de fragments de longueur anormale 1-42 contre 1-40 [11] [12]( (Hardy, 1997).

2.                  Les gènes préséniline 1(PS1) et 2 (PS2) :

Dans les familles où la maladie d’Alzheimer apparaît précocement, des mutations ont été identifiées au niveau de gènes qui interviennent également dans le rôle de l’APP ainsi que du peptide Ab [13] [14] (Goate, 1997; Selkoe, 2001).

130 mutations pathogènes ont ainsi été identifiées à partir du gène PS1 qui se localise sur le chromosome 14[15] [16](Sherrington et al., 1995; Duering et al., 2005). Mutations ponctuelles et faux sens car intervenant par substitution d’acide aminé[17] (Campion et al., 1995)., qui s’avèrent être à la fois fréquentes et dominantes car représentant 80% des cas complémentairement à une forme précoce et agressive de la maladie étant donné qu’elles atteignent les personnes de la tranche d’âge entre 24ans et 50ans.

Le gène PS2 situé sur le chromosome 1 est responsable de mutations rares avec 09 mutations identifiées[18] (Hardy, 1997). Ces mutations étant relatives à une forme familiale moins agressive et moins précoce (40ans et 70ans) de la maladie d’Alzheimer.

B.                 Les facteurs génétiques des formes sporadiques

Dans les formes familiales et sporadiques de la maladie d’Alzheimer, le facteur reconnu comme susceptible est le gène codant de l’apolipoprotéine E (ApoE) qui se situe sur le chromosome 19.

Encore appelées apoprotéines, les apolipoprotéines[19] sont situées à la surface des lipoprotéines et leurs confèrent, selon l’agencement et composition des apoprotéines, leurs identités ainsi que leurs propriétés fonctionnels et leur métabolisme.

Leurs rôles fonctionnels dépendent donc de leurs identités, comme :

  • Protéines de structure des lipoprotéines : apo B48 pour les chylomicrons, apo B100 pour les VLDL et Low Density Lipoproteins (LDL) …
  • Activateurs/ inhibiteurs d’enzymes: apo A-I activateur de la lécithine cholestérol acyl transférase (LCAT), apo C-III inhibiteur de la lipoprotéine lipase (LPL) …
  • Ligands pour les récepteurs cellulaires : apo B ligand des récepteurs LDL, apo E ligand des récepteurs hépatiques des High Density Lipoproteins (HDL)…
  • Echangeurs de lipides entre les lipoprotéines: Cholesteryl ester transfer protein (CETP).

L’apolipoprotéine E a un rôle essentiel dans le transport ainsi que la distribution des lipides. De plus, elle intervient, dans le système nerveux central, dans la croissance neuritique, assure le maintien de l’intégrité neuronale de même que la stabilisation du cytosquelette, notamment le réseau de microtubules qui permet d’établir la liaison entre les synapses cholinergiques[20] (Masliah et al., 1995).

Présent sous trois principaux allèles : e3, e2 et e4, des études ont mis en exergue que l’allèle e4 du gène ApoE était surexprimé chez les patients présentant la maladie d’Alzheimer[21] (Strittmatter et Roses, 1995).

L’allèle  s’avère ainsi être un facteur de risque dans l’apparition de la maladie d’Alzheimer, en effet :

  • Des expériences in vitro ont permis de démontrer la production de fibrilles insolubles de peptide Ab par l’isoforme ApoE4, issu de l’allèle4, qui se forme rapidement par rapport à l’ApoE2 ou encore l’ApoE2[22] (Wisniewski et al., 1995).
  • l’ApoE intervient également dans la restructuration des lésions des membranes neuronales par l’apport de lipides constitutifs (Poirier, 1995). Or, ces lésions sont aussi constatées dans d’autres maladies neurodégénératives [23](Moulard et al., 1996).
  • L’ApoE agirait aussi dans le mécanisme physiopathologique de la maladie d’Alzheimer par provocation de dysfonctionnement du métabolisme des lipides au niveau cérébral.

C.                Les facteurs de risque épigénétiques et environnementaux

L’âge, notamment le vieillissement constitue le facteur de risque principal de la maladie d’Alzheimer (Ling et al., 2003), de plus la prévalence de la maladie se voit se doubler tous les 5 ans après 65 ans.

Selon l’exposition environnementale, la présence d’une variation de la pénétrance des caractères reliés à la maladie d’Alzheimer est également un facteur de risque important chez des jumeaux monozygotes.

Outre les variables associées au niveau socioprofessionnel ainsi qu’aux activités sociales et loisirs et l’éducation, il apparaîtrait que des traits psychologiques et biologiques interviendraient dans l’apparition de la maladie d’Alzheimer [24](Schenk et al., 2004) comme les pathologies vasculaires[25] [26](Hofman et al., 1997; Kudo et al., 2000), les traumatismes crâniens [27](Jellinger et al., 2004) ou encore les états de dépression.

Des facteurs de risque hormonaux contribuent également à l’apparition de la maladie d’Alzheimer, notamment le taux d’œstrogènes[28] (Geerlings et al., 2003).

L’oxydation cellulaire au niveau cérébral subséquente à la production d’espèces réactives de l’oxygène (ROS) durant le vieillissement joue également un rôle fondamental dans la survenue de la maladie d’Alzheimer.

D.                Le métabolisme de l’Amyloid Precursor Protein (APP)

L’Amyloid Precursor Protein (APP) est métabolisée généralement par la voie nonamyloïdogénique et par la voie amyloïdogénique qui aboutit à la production du peptide Ab.

1.                  La voie non-amyloïdogénique

Constituée par deux clivages endoprotéolytiques coordonnés par l’a-secrétase et la g-secrétase, la voie non-amyloïdogénique conduit à la formation de trois fragments distincts d’APP:

  • la partie APP soluble a (AbPPa ou sAPPa) qui possède une activité neuroprotectrice et cytotrophique. Ce fragment sera sécrété par l’axone après sa migration le long de ce dernier[29] (Sisodia, 1992).
  • les domaines « APP intracellular domain » (AICD)
  • le peptide P3 qui est issu du clivage secondaire du fragment C83[30] (Busciglio et al., 1993).

Processus physiologique, cette voie de métabolisme de l’APP n’amène pas à la formation du peptide Ab. D’ailleurs, les fragments obtenus par cette voie se retrouvent dans le liquide céphalo-rachidien et le cerveau des personnes saines ou encore affectées par la maladie d’Alzheimer [31] [32] [33] [34](Selkoe et al., 1988 ; Palmert et al., 1989 ; Schubert et al., 1989 ; Weidemann et al., 1989).

2.                  La voie amyloïdogénique

La voie amyloïdogénique comporte dans un premier temps un clivage de l’APP par la β-secrétase suivi de l’action de la g-secrétase dans un second temps qui va aboutir à la libération du peptide Aβ qui a une longueur variant entre 39 et 43 aminoacides [35] [36] (Cordell et al., 1994 ; Selkoe, 1994),et du domaine AICD du fragment C99 [37] [38](Busciglio et al., 1993a; Haass et al., 1992b).

Des mutations au niveau de l’APP peuvent survenir durant le clivage g-secrétase et donner naissance à des peptides de longueur supérieure, comme l’Aβ42, à celle des peptides Aβ40 produits par la protéine non mutée.

D’ailleurs, l’Aβ42 est neurotoxique de par son insolubilité et sa propriété oligomérisante[39] [40](Jarrett et al., 1993; Jarrett and Lansbury, 1993).

Cette voie, bien que pouvant aboutir à la formation de peptides pathologiques, n’est forcément pathologique. En effet, le peptide Aβ sous sa forme soluble, donc physiologique, est produit par divers types de cellules ainsi que dans le liquide céphalorachidien humain [41] (Seubert et al., 1993).

Les astrocytes humains secrètent le peptide Aβ à forte quantité[42] [43](Haass et al., 1992b ; Busciglio et al., 1993).

Figure 02 : Représentation schématique des deux voies de maturation de l’APP

 

III.             Les facteurs de protection

Les facteurs de protection sont surtout liés à l’hygiène et au mode de vie, ce qui suppose le fait de privilégier la consommation d’antioxydants, des vitamines C et E (cinq fruits et légumes par jour) ainsi que des oméga-3 afin d’améliorer la fluidité membranaire : le poisson, mais également le curcumin, par ailleurs la maladie d’Alzheimer est beaucoup moins fréquente en Inde.

IV.             Diagnostic positif

Maladie neurodégénérative d’évolution progressive, la maladie d’Alzheimer est la cause principale de dépendance lourde du sujet âgé et le motif principal d’entrée en institution. Elle débute bien avant le stade démentiel et se manifeste par l’apparition de troubles cognitifs diversement associés et éventuellement de troubles du comportement ou de la personnalité.

L’évolution se fait sur plusieurs années avec l’apparition d’une dépendance progressive conjointement à un retentissement sur les activités de la vie quotidienne (toilette, habillage, alimentation, déplacement) et sur l’entourage.

La démence de la maladie d’Alzheimer se définit par l’association d’un syndrome démentiel complémentairement à l’examen histologique du cerveau qui montre l’existence de plaques amyloïdes de dégénérescence neurofibrillaires et d’une perte neuronale.

Le syndrome démentiel se caractérise par des troubles des fonctions cognitives telles : mémoire, langage, praxies, gnosies, fonctions exécutives, etc… qui durent depuis au moins 6 mois (DSM-IV-TR). et qui sont suffisamment importants pour retentir sur la vie quotidienne.

Le diagnostic étiologique d’une démence neuro dégénérative établi par un médecin spécialiste (gériatre, neurologue ou psychiatre) repose ainsi sur une collaboration multidisciplinaire faisant intervenir des professionnels d’horizons et de pratiques différents regroupant le médecin généraliste traitant, un neurologue, un gériatre ou un psychiatre, et peut être aidé à des moments divers de l’évolution par de nombreux professionnels, dont ceux de la coordination : IDE coordinatrice de services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) ou d’équipe spécialisée Alzheimer (ESA), gestionnaire de cas complexes dans le cadre d’une maison pour l’autonomie et l’intégration des malades Alzheimer (MAIA), coordonnateur de réseaux de santé ou de centre local d’information et de coordination (CLIC)…

L’organisation et la structuration de cette prise en charge étant variables d’une région à l’autre, il n’est pas spécifié, pour chaque recommandation, quel professionnel ou quelle structure en est chargé(e). Certaines recommandations peuvent par ailleurs être mises en œuvre par des professionnels de qualifications différentes selon leur disponibilité, leur implication et leurs compétences dans le domaine.

L’objectif de la prise en charge étant la réalisation des bonnes pratiques par des professionnels compétents.

De même, la coordination des soins dépend des besoins du patient (stade de la maladie, environnement du patient) mais aussi de l’offre.

Le but est d’utiliser les ressources locales pour organiser la meilleure prise en charge.

La réalisation des évaluations cognitive globale, fonctionnelle, thymique et comportementale est réalisée par le binôme médecin spécialiste médecin généraliste traitant.

Afin d’établir un diagnostic étiologique et d’établir un plan de soins et d’aides, il faudra s’appuyer sur :

  • un entretien avec le patient et après son accord avec un accompagnant identifié capable de donner des informations fiables ;
  • un examen clinique ;
  • une évaluation fonctionnelle appronfondie ;
  • une évaluation psychique et comportementale ;
  • une évaluation neuropsychologique ;
  • des examens paracliniques spécialisés.

V.                Evaluation initiale

A.                Entretien

L’entretien évalue le type et l’origine de la plainte tout en reconstituant l’histoire de la maladie avec le patient et son accompagnant. La précision du mode et du lieu de vie : statut marital, environnement social et familial, type d’habitat, aides à domicile, …  étant aussi requis lors de l’entretien afin de pouvoir conditionner la prise en charge.

L’entretien repose sur la recherche du mode de début insidieux et l’évolution progressive des troubles.

La recherche des antécédents médicaux porte notamment sur :

  • les antécédents et les facteurs de risque cérébro-vasculaire ;
  • les antécédents psychiatriques ;
  • les antécédents traumatiques;
  • les antécédents familiaux de maladie d’Alzheimer ou de maladies apparentées ;
  • la prise de médicaments, d’alcool ou de toxique pouvant induire ou aggraver des troubles cognitifs ;
  • un syndrome confusionnel antérieur.

Il est à noter que l’entretien recherche d’éventuels changements de comportement et un retentissement des troubles sur les activités quotidiennes

B.                 Examen clinique

L’examen clinique doit apprécier :

  • l’état général particulièrement le poids et cardio-vasculaire notamment hypertension artérielle, troubles du rythme cardiaque.
  • le degré de vigilance avec la recherche d’une confusion mentale
  • les déficits sensoriels (visuel et auditif ) et moteurs pouvant interférer avec la passation des tests neuropsychologiques.

L’examen neurologique reste longtemps normal dans la maladie d’Alzheimer, c’est pour cela que l’existence de signes neurologiques (signe de Babinski, syndrome pseudo-bulbaire, réflexes archaïques, signe parkinsoniens, myoclonies, mouvements involontaires, troubles de l’oculo-motricité, troubles sphinctériens, troubles de la posture et de la marche, dysautonomie, etc.) doit faire évoquer un diagnostic autre que celui de maladie d’Alzheimer ou l’existence d’une comorbidité.

C.                Evaluation fonctionnelle

Le retentissement peut être apprécié à l’aide de l’échelle simplifiée des activités instrumentales de la vie quotidienne (IADL simplifiée) qui comporte les 4 items les plus sensibles que sont :

  • utilisation du téléphone
  • utilisation des transports
  • prise de médicaments
  • gestion des finances

La nécessité d’une aide, du fait des troubles cognitifs, à au moins un de ces items constitue un retentissement significatif de ces troubles sur l’activité quotidienne du patient.

D.                Évaluation cognitive globale

Il est recommandé d’effectuer une évaluation globale de manière standardisée à l’aide du Mini Mental State Examination (MMSE) dans sa version consensuelle établie par le groupe de recherche et d’évaluation des outils cognitifs (GRECO), sans préjugé d’aucune étiologie.

L’âge, le niveau socioculturel, l’activité professionnelle et sociale, ainsi que l’état affectif (anxiété et dépression) et le niveau de vigilance du patient doivent être pris en considération dans l’interprétation des résultats obtenus

Il n’y a pas d’accord professionnel concernant le choix des autres tests de repérage à effectuer dans le cadre d’une évaluation des fonctions cognitives. Toutefois, il existe des batteries composites qui peuvent être réalisées au cours d’une consultation spécialisée afin d’avoir une évaluation cognitive plus détaillée.

Parmi les tests utilisés et de passation brève, on peut citer :

  • des tests de mémoire : épreuve de rappel des 5 mots, Memory Impairment Screen (MIS).
  • d’autres tests de repérage : test de l’horloge, tests de fluence verbale.

E.                 Évaluation psychique et comportementale

L’entretien doit se baser sur la recherche d’une dépression (critères DSM-IV-TR) qui peut se présenter sous l’aspect d’un syndrome démentiel ou surtout s’accompagner ou inaugurer un syndrome démentiel.

Structuré à l’aide d’échelles telles que la Geriatric Depression Scale (GDS), le NeuroPsychiatric Inventory (NPI) ou encore l’échelle de dysfonctionnement frontal (EDF) , l’entretien doit apprécier le comportement du patient pendant l’examen et dans sa vie quotidienne par la recherche de troubles affectifs, comportementaux ou d’expression psychiatrique (troubles du sommeil, apathie, dépression, anxiété, hyperémotivité, irritabilité, agressivité, hallucinations, idées délirantes) qui peuvent être observés dans le cadre d’une maladie d’Alzheimer.

F.                 Evaluation neuropsycholgique

Le choix des tests neuropsychologiques standardisés et validés à effectuer dans le cadre d’une consultation spécialisée est laissé à l’appréciation du professionnel qui les réalise.

Il est à rappeler que le bilan neuropsychologique doit évaluer chacune des fonctions cognitives notamment : la mémoire épisodique, la mémoire sémantique, les fonctions exécutives, l’attention et les fonctions instrumentales (langage, communication, praxies, gnosies, fonctions visuo-constructives, calcul)

Les tests recommandés doivent tenir particulièrement compte de la mémoire verbale épisodique avec un apprentissage qui comporte un contrôle de l’encodage, des rappels libres, indicés, immédiats et différés, ainsi qu’une reconnaissance.

L’investigation de chacune des fonctions cognitives permet de dresser un profil cognitif. Il met en évidence les fonctions préservées et celles qui présentent un déficit en le quantifiant.

VI.             Examens paracliniques spécialisés

L’imagerie morphologique doit être systématiquement réalisée. Dans des cas difficiles ou atypiques, certains examens paracliniques peuvent être proposés par des équipes spécialisées.

1.                  Imagerie fonctionnelle

La réalisation systématique d’une imagerie par tomographie d’émission monophotonique (TEMP) d’une scintigraphie cérébrale avec l’ioflupane DATscan ou d’une imagerie par tomographie à émission de positrons (TEP) n’est pas préconisée pour affirmer seule un diagnostic positif de maladie d’Alzheimer.

2.                  Analyse du LCR

Une analyse standard du LCR (cellules, glucose, protéines, électrophorèse des protéines) est recommandée chez les patients avec une présentation clinique atypique et/ou rapidement évolutive (suspicion de maladie inflammatoire, infectieuse, paranéoplasique ou de CreutzfeldtJakob).

Le dosage dans le LCR des protéines Tubulin Associated Unit (TAU) totales, TAU phosphorylées et Aβ42 peut être réalisé en cas de doute de diagnostic en particulier chez les jeunes patients.

B.                 Electroencéphalogramme

La réalisation d’un électroencéphalogramme (EEG) n’est recommandée qu’en fonction du contexte clinique : crise comitiale, suspicion d’encéphalite ou d’encéphalopathie métabolique, suspicion de maladie de Creutzfeldt-Jakob ou en cas de confusion ou d’aggravation rapide d’une démence connue dans l’hypothèse d’un état de mal non convulsif.

C.                Étude génétique

Le génotypage de l’apolipoprotéine E n’est pas recommandé comme test de dépistage de la maladie d’Alzheimer, ou encore comme test diagnostique complémentaire de la maladie d’Alzheimer.

D.                Biopsie cérébrale

La biopsie cérébrale peut apporter un diagnostic spécifique dans certaines démences de cause rare.

Ce prélèvement ne doit être entrepris qu’exceptionnellement et dans des centres spécialisés.

VII.          Quelle place accorder à la prévention de la maladie d’Alzheimer?

Des travaux de l’université de Pittsburg (Dr Wai-Ying Wendy Yau) publié dans le Lancet Neurology le 29 juin 2015, montre que l’accumulation de plaques béta amyloïde est pratiquement achevée bien avant l’apparition des symptomes neurodégénératifs et cognitifs.

Selon le Dr Irène Drogou (quotidien du médecin (06/07/2015), l’apparition des plaques amyloïdes constitue meilleur biomarqueur d’Alzheimer.

De plus, une équipe de l’université de Pittsburgh a suivi pendant 11 ans l’évolution de plusieurs marqueurs connus dans la maladie d’Alzheimer chez 16 patients à haut risque génétiquement prédisposés au trouble neurodégénératif.

Parmi toutes les trajectoires de marqueurs, le dépôt des plaques amyloïdes est apparu comme le marqueur le plus précoce et le plus reproductible avec une séquence en 3 phases : la formation de plaques amyloïdes, une période stable avec un plateau du dépot amyloïde et un déclin cognitif progressif, avec atteinte du processus maximum plusieurs années avant les symptômes, ce qui en fait, selon les auteurs, une cible, non pas pour le traitement, mais pour la prévention secondaire.

Ce marqueur est souvent anormal chez des sujets sans déficit cognitif et n’est pas corrélé au pronostic clinique. D’ailleurs, tous les essais avec des traitements anti-A bêta se sont soldés par des échecs chez les sujets symptomatiques jusqu’à présent. Ce qui renforce l’idée que l’accumulation de dépot amyloïde est terminée bien avant le déclin cognitif et les troubles neurodégénératifs.

Pour les auteurs «cette distinction temporale pourrait être plus importante que ce qu’on pensait auparavant» d’ou la considération «les dépôts A béta comme moyen de prévention secondaire».

De plus, «la variabilité individuelle du délai entre la phase de plateau amyloïde et la neurodégénérescence progressive suggère que des facteurs additionnels de vulnérabilité ou protecteurs peuvent modifier le cours de la maladie».

La plupart des cas de maladie d’Alzheimer ne sont pas génétiques mais sporadiques. Si une physiopathologie similaire semble probable, il est important de tester cette hypothèse dans les formes les plus fréquentes.

Ils concluent «pour comprendre comment des pathologies mixtes causées par le vieillissement et une maladie non Alzheimer peuvent interagir avec la voie propre à la maladie d’Alzheimer».les limites de ce type d’étude et ne proposent pas de modification de prise en charge en termes de dépistage. En effet, les anomalies observées sur un bilan de dépistage ne peuvent être utilisées à titre de diagnostic précoce. Il n’y donc pas lieu de se précipiter pour faire ces test cognitifs mais plutôt d’agir sur les facteurs de risque modifiables déjà identifiés.

 

 

Partie 2 : Les fusains tardifs

Peintre figuratif, Utermolhen a toujours donné de l’importance aux êtres qu’il dessinait. Ses fusains représentent une grande place dans les œuvres du peintre. Chaque modèle peint, exprimé traduit à la fois sa nudité et son état d’âme, rappelant la vulnérabilité de l’humain.

I.                   1990 Utermohlen Boy Seated with Easel MD 1990

 

 

 

 

 

Dans cet œuvre, l’omniprésence des lignes est effarante et crée une tension certaine entre l’être et l’espace. En effet, l’épaisseur des lignes efface la fluidité, l’union, l’harmonie entre l’espace c’est-à-dire l’environnement, le social et tout ce qui lie l’être au monde à ce dernier.

C’est comme ci la maladie annonçait déjà par sa présence, la distance, le mur, la séparation qui va se produire entre l’être et son monde environnant. De plus, le modèle est affalé durement sur une chaise avec les mains croisées sur le rebord de la table qui peuvent traduire le fait d’être lié, attaché… l’impuissance.

La présence de la chaise vide à ses côtés avec un semblant d’X représenterait alors l’inconnue qui commence à cheminer avec lui, cette inconnue apportée par la maladie, cette inconnue qui s’impose.

Tout l’espace étant occupé par le fusain, une certaine révolte face à la déchéance, à l’emprisonnement de la maladie semble s’exprimée par la suppression du vide : c’est un combat qui commence bien qu’on sache à l’avance qui sera le gagnant.

Le jeu de contraste entre le noir très appuyé et le grisé intérieur reflète la dépression, l’angoisse, l’inquiétude

L’accentuation des traits, du dessin manifeste tellement le poids ressenti et éprouvé par le patient atteint de la maladie d’Alzheimer.

 

II.                1995 Nude and Radiator

 

 

 

La vulnérabilité du corps, de l’être est ici accentuée par la nudité du modèle qui est allongé près d’un radiateur aux lignes dures et rigides. C’est comme si l’être était à la recherche de chaleur, de chaleur humaine qui ici symbolisé par le radiateur semble s’éloigner de plus en plus.

Le corps n’est plus représenté en totalité, le visage est ici difficilement représenté, le corps est désarticulé : il manque un bras et un membre inférieur. La tête est penchée en avant comme affligée, et l’absence de visage, d’expression dénote une certaine perte, une absence de vie.

III.             1995 Utermohlen Desperate Figure winter

 

 

 

 

 

Ce dessin fut exécuté après le diagnostic des médecins et se veut être un dessin préparatoire de la toile « Blue sky ».

Le peintre se représente affalé sur la table, abattu par la nouvelle. L’accentuation du noir et le fait que la tête ne fasse qu’un avec le bois de la table traduit le profond abattement de l’artiste.

Il se représente alors dans le vide assis sur une chaise devant une table sur laquelle il s’appuie … ses seuls ancrages.

IV.             Broken Figure 1996

 

 

 

 

Les dessins des figures géométriques sont les dessins des tests médicaux. En effet, il importe d’entretenir les capacités intellectuelles des patients atteints de la maladie d’Alzheimer afin de lui offrir le maximum d’autonomie et prévenir la baisse de l’estime de soi ainsi que les difficultés rencontrées dans la vie quotidienne qui résultent de la déchéance psychique et l’altération des fonctions cérébrales.

Ici, le peintre semble reconnaître encore les formes géométriques toutefois l’être est représente comme désarticulé, désarticulation qui traduit l’incohérence de sa pensée, l’inacceptation de son état, son désarroi, son obsession : les tests deviennent obsessionnels pour lui.

 

 

V.                1996 Caged Nude  1996

 

 

 

 

 

 

Des traits épais, une cage, un visage imprécis avec des yeux globuleux accentué en noir avec un contraste grisé intérieur … la nudité du corps, la mise en évidence de l’organe génital, la stature … tout ramène à l’état primitif de l’homme. C’est comme s’il vivait dans un siècle étranger à lui, qui l’enferme. D’ailleurs, la rigidité des lignes de la cage traduit et accentue son emprisonnement psychique.

Il souhaite être libéré de sa cage, de sa maladie et vivre pleinement : voir les choses, l’environnement qui l’entoure et vivre.

Ce désir ardent bien qu’en étant impuissant est ici traduit par la mise en exergue de l’organe sexuel qui fait de lui un homme, un vrai homme autre que cet homme qui croule sous la maladie.

La fragilité, la vulnérabilité de l’être est ici frappante.

 

VI.             1998 Modèle assis de dos

 

 

 

 

 

 

 

La représentation du corps, assis, de dos, tronqué et dépourvu de ses membres reflète un réel mal être du peintre outre sa difficulté à tenir un crayon. Il n’est pire sentence pour un artiste que de ne pouvoir tenir et maîtriser son outil, son art.

Le corps dégage une sensation d’écrasement par son affalement à même le sol et son dos, de mutilation par l’absence de bras et de jambe … c’est comme si les sens disparaissaient. Le corps autant que l’âme sont en souffrance.

De plus, la dissolution du soi est palpable, traduisant ainsi la perte des repères, de l’identité.

VII.          2000 « Head » Les derniers dessins

 

 

 

 

 

 

La représentation de « Head » pour tête : pensée, image de soi, estime de soi, sensation, sentiment, perception … ici est accablante qui est vraiment palpable. En effet, le « Head » est ici juste griffonné d’une tête primitive avec une large fissure dont l’accentuation complémentairement à la disproportion des deux orbites dénote la large et réelle souffrance de l’artiste.

Utermolhen ne peut plus s’exprimer à travers le dessin qui ici traduit la résignation de l’artiste face à l’adversité fatal de la maladie d’Alzheimer.

La mort du peintre fut ce jour pour son épouse, ce jour où son art est mort par son incapacité à tenir son crayon, son pinceau.

 

 

 

 

Conclusion

Selon sa femme Patricia, en continuant à peindre dès le diagnostic de sa maladie : « À partir de ce moment-là, il a essayé de comprendre sa maladie en se peignant lui-même ».

La perte de contrôle du peintre William Utermohlen est progressive et se retrouve dans ses autoportraits entre 1995 et 2000. De plus, ses autoportraits reflètent indéniablement sa détresse, son désarroi, son impuissance devant l’imposition de la démence induite par l’Alzheimer, traduction de sa souffrance et de son basculement dans la disparition, l’oubli.

L’évolution de son art correspond à l’évolution neurodégénérative de la maladie. En effet, les détails s’effacent peu à peu, en débutant par la disparition des perspectives, le rapprochement de son art vers l’expressionnisme abstrait alors que selon sa femme, il avait une technique très précise voire scientifique.

La décision de continuer à peindre d’Utermohlen est nettement significative. Incontestablement, il espère et tente une auto-guérison sachant que la maladie d’Alzheimer affecte notamment la partie droite du cerveau qui est responsable de la visualisation interne des choses, l’expression du soi propre à l’être.

L’art semble être ainsi une approche nouvelle et innovante de la maladie d’Alzheimer, complémentairement aux divers exercices sur la mémoire, la désorientation temporelle et l’orientation dans l’espace.

 

 

Bibliographie

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