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Le Genre, le Sexe et l’État Civil : Défis et Évolutions

L’état civil et le genre

 

Le genre est le clivage qui différencie deux êtres de la même race. Il existe autant dans le milieu animal que végétal, il existe également chez l’espèce humaine. Chez l’espèce animale et l’espèce végétale, on parle de mâle et femelle. L’importance d’une telle différenciation réside principalement dans la reproduction. C’est la femelle qui hérite de la portée. Le rôle du mâle se cantonne à la gestation. Chez l’espèce humaine, il est plus commun de parler de sexe.

Le sexe est un élément de différenciation, mais surtout un élément d’identification de la personne, entre la gente féminine et la gente masculine. Le sexe est un élément d’identification qui est repris et mentionné dans l’acte de naissance. Pour cela, c’est l’apparence externe des organes génitaux qui est prise en compte[1].

Mais au-delà de cette simple apparence extérieure, le sexe révèle d’autres données sur la personne. Le sexe est également déterminé par des données biologiques plus complexes, notamment par le caryotype des chromosomes. Chaque personne est définie par la combinaison de deux chromosomes X et Y. Pour un homme, la combinaison fait ressortir une pair XY. La femme quant à elle présente la combinaison XX.

Un autre élément caractérisant la différence entre l’homme et la femme est la sécrétion hormonale. Un homme secrète davantage d’hormone dit androgène et la femme davantage d’œstrogène. Bien que ces deux hormones soient présentes dans les deux genres, la quantité élevée et prédominante de l’une ou de l’autre déterminera le sexe de l’individu. La différenciation physiologique des deux genres peut ainsi être effectuée sur ces bases.

Psychologiquement, existe-il une possible différenciation entre les deux sexes ? En principe, les données physiologiques et biologiques influent sur les comportements de la personne. Entre virilité et féminité, la sécrétion d’hormone, mâle ou femelle, peut déterminer le comportement de la personne[2]. Une personne sous l’apparence d’une femme se comportera d’une manière plus douce qu’une personne sous l’apparence d’un homme.

Pourtant, la réalité est plus contrastée. Nombreux sont les personnes qui agissent différemment de leur sexe, des hommes qui ont une grande part de féminité, agissant ainsi comme une femme, et inversement. Certaines personnes affirment s’être trompées de corps, s’être trompées de sexe, être une femme dans un corps d’homme[3]. Ces hypothèses se vérifient souvent dans les données biologiques de la personne, taux élevé d’androgène chez la femme ou taux élevé d’œstrogène chez l’homme.

Faut-il dés lors se contenter de l’apparence anatomique d’une personne dans la détermination de sexe, surtout lorsque celui-ci doit être inscrit dans l’acte de l’état civil de la personne ? Si le sexe est défini comme « l’expérience intime et personnelle profonde qu’a chaque personne de son genre, qu’elle corresponde ou non à son sexe de naissance », il a également une portée sociale.

D’une part, il est difficile pour la Société de parler d’un homme lorsque les comportements de l’individu sont ceux d’une femme. Mais il sera d’autant plus difficile de catégoriser cette personne en homme lorsque tout chez lui détermine la féminité. Ceci a eu son incidence sur la notion juridique de sexe et de genre, ouvrant la possibilité au changement de sexe dans l’état civil.

Les recherches officielles ont pu conclure à la véracité de la situation. Le sexe ne se détermine pas seulement à l’aspect externe de la personne. Au-delà, nombreuse données peuvent venir appuyer ou contredire les premières impressions, nécessitant ainsi une requalification.

La construction de la notion de genre et celle de sexe se sont allongées dans le temps, l’occasion de débats et de revirements jurisprudentiels successifs. Jusqu’à présent, bien que la situation ait évolué, une grande différence sociale existe encore entre la gente masculine et la gente féminine. Les idées reçues sont restées ancrées dans la psychologie sociale, idées selon lesquelles la place de l’homme et de la femme dans la Société sont bien établie. Le sexe prend une importance telle qu’avoir un garçon à la naissance est reçu comme une bénédiction, plus qu’avoir une fille. Pourtant, un enfant reste un enfant.

Le sexe définit-il l’avenir ? Lequel ? En réalité, le sexe ne devrait avoir son intérêt que pour le principal concerné. Le sexe individualise la personne. Mais il ne peut en aucun cas le définir. Entre la réalité et le principe existe pourtant une grande différence. Le sexe définit la personne et trace son avenir et sa place dans la Société.

Le droit n’a pas donné une définition stricte du sexe. Pourtant il l’appréhende comme un élément d’identification de la personne. Le sexe est défini à la naissance par les caractéristiques internes des organes de reproduction.

Genre et sexe sont des notions souvent mélangées. Ce mélange se comprend par une difficile acception par le droit des deux notions. John Money, sexologue auprès du Johns Hopkins Hospital de Baltimore, et de Robert Stoller, psychiatre et psychanalyste, professeur à l’Université de Californie ont contribué à faire le point sur la distinction entre sexe et genre.  « Le genre est la quantité de masculinité ou de féminité que l’on trouve dans une personne »[4] ; De cette acception découle celle du transgenre. Celui est défini comme « l’expérience intime et personnelle profonde qu’a chaque personne de son genre, qu’elle corresponde ou non à son sexe de naissance »[5].

Le genre a érigé les rôles féminins et masculins dans la société ainsi que les relations entre les femmes et les hommes. Les féminins et masculins se voient attribués des rôles différents. L’attribution de ces rôles est fonction de la culture, de la tradition, de la politique et des besoins, imposant ainsi une certaine limite entre les deux.

Le « genre » ou « l’approche de genre » est issu du terme anglais « Gender » qui appréhende  un concept sociologique désignant les « rapports sociaux de sexe », et de façon concrète, l’analyse des statuts, rôle sociaux, relations entre les hommes et les femmes.
Appliquées aux politiques publiques, le genre a pour objectif de promouvoir l’égalité des femmes et des hommes en prenant en compte les différences et la hiérarchisation socialement construite. On parle aussi en France « d’approche intégrée de l’égalité ».

Les mouvements des militants pour la reconnaissance de l’égalité des sexes n’ont eu aujourd’hui que des résultats encore partiels. Et ces résultats restent encore très partagés, entre les pays, entre les mœurs. Le clivage du genre est resté ancré dans les cultures et traditions. Dans certains pays, la femme est encore frappée d’incapacité, totale ou partielle. Il est évident que dans ces pays le genre a gardé toute son importance.

Deux catégories d’individus posent problème quant à l’identité de leur sexe. Il s’agit des intersexuels et des transsexuels.

L’intersexualisme se distingue du transsexualisme par son origine génétique ou hormonale. Les ambiguïtés d’origines génétiques proviennent du syndrome de Turner (XO), syndrome du triple X pour les femmes et syndrome de Klinefelter pour les garçons (XXY). En ce qui concerne les ambiguïtés d’origines hormonales celles-ci peuvent se traduire par le phénomène des testicules féminisants (personne ayant une apparence féminine mais un génotype masculin et qui a des testicules intra-abdominaux).

L’intersexualisme représente la personne qui possède les organes sexuels des deux sexes. La jurisprudence actuelle fait le choix de représenter les personnes seulement par l’un des deux sexes féminin ou masculin. C’est pourquoi, « tout individu, même s’il présente des anomalies organiques, doit être obligatoirement rattaché à l’un des deux sexes, masculin ou féminin, lequel doit être mentionné dans l’acte de naissance »[6].

Ces anomalies génétiques peuvent être repérées dès la naissance ou se révéler plus tardivement. Mais peu importe le cas, une fois que les médecins ont effectués un choix pour orienter le patient vers un sexe masculin ou féminin pour supprimer l’ambiguïté et permettre l’inscription dans l’état civil du sexe de la personne.

Le transsexuel, quant à lui, subi « un trouble de l’identité sexuelle, caractérisé par une opposition entre d’une part, le sexe anatomique, le sexe chromosomique et le sexe hormonal, et d’autre part le sexe psychologique et le sexe psycho-social »[7]. Le syndrome fut identifié pour la première fois en 1953 par Harry Benjamin et Guntheil, étude continuée par le professeur Küss lors d’une déclaration en 1982 devant l’Académie nationale de médecine.

Irma Arnoux caractérise le transsexualisme « comme la conviction absolue chez une personne de sexe physiquement bien déterminé, qui ne présente aucune ambiguïté, d’appartenir au sexe opposé avec un désir intense et obsédant de changer d’état sexuel, anatomie comprise, pour vivre sous une apparence conforme à l’idée qu’elle s’est faite d’elle-même »[8].

C’est à la naissance qu’est inscrit dans l’état civil le sexe de la personne. Cette inscription est fonction des caractéristiques relevées par le médecin responsable de l’accouchement. Ce dernier se base sur les caractéristiques physiques, notamment les caractéristiques des organes de reproduction, pour se prononcer sur le sexe du nouveau né.

Mais un problème est soulevé par le cas des intersexuels. En effet, il est difficile d’établir la catégorie de ces personnes qui présentent des anomalies ne permettant pas l’identification stricte de leur sexe. Homme ou femme ? Ces personnes présentent les caractéristiques des deux sexes. Mais en même temps ni l’un ni l’autre non plus[9].

Pourtant, la loi exige la mention obligatoire du sexe dans l’état civil de chaque personne. Le sexe permet en effet une identification de la personne. Mais des problèmes peuvent surgir ultérieurement.

D’abord, le mariage des intersexuels a été au entre des débats jurisprudentiels. Peut-on admettre la validité d’un mariage d’une personne inscrite comme femme dans l’état civil mais qui ne présente pas d’aptitude à l’union sexuelle et la reproduction ?[10] Les juges du fond ont été divisés sur la question. Certaines jurisprudences ont opté pour la nullité d’un tel mariage[11], en se focalisant principalement sur les organes sexuels internes.

En 1903, la cour de cassation s’est prononcée en défaveur de toute nullité du mariage fondé sur l’inaptitude sexuelle de l’intéressé. La Cour s’est attardée sur la condition de la différence de sexe des deux époux par référence aux aspects externes des organes génitaux[12].

Ensuite, une autre question peut être soulevée, celle de la possibilité de changement de sexe et la modification de l’état civil. La mention du sexe dans l’état civil intervient à la naissance. Le sexe est alors attribué et ne relève pas du choix de la personne intéressée. Il est fort possible dans ce cas que les personnes qui se considèrent s’être trompées de sexe décident ultérieurement de demander la modification de sexe dans l’état civil.

Une telle demande s’est heurtée pendant longtemps au refus de la jurisprudence sur la base de l’indisponibilité[13]. Cette solution ait été abandonnée par les tribunaux français puisque l’indisponibilité ne pouvait interdire le changement de sexe. Les juridictions prennent en considération la conjugaison concordante de caractères génétiques, anatomiques et physiologiques[14].

Aujourd’hui encore, le sexe est au centre des débats, notamment par l’introduction dans le système juridique français du mariage pour tous. Le gouvernement français a tenu à reconnaitre la possibilité pour deux personnes du même sexe de se marier, chamboulant ainsi les principes jusqu’ici retenus de la différence de sexe des deux époux. Cette mesure nous ramène à la question de la pertinence de la mention du sexe dans l’état civil.

En effet, en autorisant le mariage de deux personnes du même sexe, aucune utilité pertinente ne peut plus être retenue pour la mention du sexe. Ce manque de pertinence est appuyé par les mesures de restriction des clivages de genre, notamment au niveau professionnel. L’égalité des sexes tant affirmé tend à réduire le clivage du genre pour rendre ce dernier obsolète.

Quel est dés lors l’utilité actuelle de la mention du sexe dans l’état civil ? Quels sont les enjeux de la mention du sexe dans l’état civil ? Ces questions induisent à plusieurs réflexions, notamment du changement de sexe à l’état civil (partie I) et les conséquences de ce changement (Partie II).

 

 

Partie I :

Le changement de sexe de l’état civil

 

Les intersexués et les transsexuels prouvent l’existence d’un mal être chez de nombreuses personnes. Par une identification du sexe de la personne, cette personne peut ressentir a contrario une perte d’identité. La mention du sexe dans l’état civil est pourtant rendue obligatoire par la loi[15].

Devant un tel sentiment de perte d’identité, la solution envisagée est le changement de sexe. Le choix du sexe inscrit à l’état civil ne relève pas du choix de la personne. Celui relève du choix d’autrui, souvent les parents sur les prescriptions de médecin spécialiste. Peut-on ainsi reconnaitre à la personne de revenir sur ce choix d’autrui pour reconnaitre le sien ?

Dans un premier chapitre, nous ferons un retour sur les fondements du changement de sexe dans l’état civil pour exposer dans un second chapitre les implications de ce changement de sexe.

 

 

 

Chapitre I : Les fondements du changement de sexe de l’état civil

 

 

 

Section 1: La mention du sexe, entre nature et culture

 

Élisabeth Badinter affirmait que «en faisant de la différence biologique le critère ultime de la classification des êtres humains, on se condamne à les penser par opposition à l’autre. Deux sexes donc deux façons de voir le monde, deux types de pensée et de psychologie, deux univers différents qui restent côte à côte sans jamais se mélanger »[16]

 

 

  • 1 : La mention du sexe, un critère de nature

Thomas Laqueur, dans le sillage de Michel Foucault, montre de quelle manière l’essor de la biologie et de la médecine ont entrainé une « sexualisation » du genre. Le genre devient ainsi une donnée permettant de donner un sens à la différenciation des sexes. Cette différenciation apparaît comme étant naturelle et inéluctable. Celle-ci se fait sentir notamment face au rôle du mariage (A), mais aussi de la filiation (B).

 

 

  • L’élément naturel justifié par le rôle du mariage:

Le choix de la dualité des sexes semble se confirmer par le rôle accordé par le mariage. En effet, la norme hétérosexuelle est considérée comme étant une évidence naturelle. Une telle considération rejoint l’idée que le mariage ne peut unir qu’un homme et une femme. Le droit, jusqu’à présent, a affirmé sa position pour une telle dualité.

La dualité de sexe est le garant de la définition de l’institution familiale pour le droit. Mais outre cet aspect naturel, le mariage a également une dimension culturelle. En effet, même si le couple préexiste à toute institution juridique, c’est toutefois le droit qui lui attribue un statut et qui décide d’unir des couples hétérosexuels et non homosexuels.

Le code ne fait plus référence au mari et à la femme. Il a préféré le terme « époux » pour désigner les deux membres du couple, abstraction du sexe. Cela démontre que c’est bien le droit qui décide de ce que représente le mariage. Si celui-ci estime qu’il doit unir un homme et une femme, comme c’est le cas actuellement, alors c’est bien lui qui décide qu’il doit y avoir une dualité des sexes.

En 2005, le parquet entendait faire opposition au mariage de deux personnes transsexuelles. Toutes deux étaient nées de sexe masculin, toutes deux avaient acquis les caractéristiques du sexe féminin, mais l’une avait obtenu un changement de sexe en 1999 tandis que l’autre était restée un homme pour l’état civil. Bien qu’au regard de l’état civil, elles fussent bien de sexe différent, le procureur s’est opposé au mariage, estimant que les intéressées entendaient s’unir par le mariage en tant que femmes[17].

De cette affaire, il en découle que si les intéressés ont entendu s’unir en tant qu’homme et femme, le mariage aurait été validé. Il s’agit donc bien d’une notion culturelle et non pas vraiment naturelle comme ce que l’on essaie de nous faire croire. Ainsi, cet élément fait échec.

 

 

  • L’élément naturel justifié par le rôle de la filiation:

L’Etat présente actuellement la différenciation des sexes comme étant un modèle naturaliste qui paraît évident. On met en avant cette évidence par un argument imparable: « Les femmes, ça fait les enfants »[18]. La science du droit positif oppose ainsi les hommes et les femmes en biologisant la reproduction. Le rôle de la filiation prend donc une place importante dans la détermination d’une différenciation sexuelle puisqu’elle permet de déterminer la place de chaque sexe.

Permettre le mariage homosexuel pourrait entrainer des conséquences inattendues. Ce mariage ouvrira la porte à l’adoption à tous les couples, hétérosexuels ou homosexuels, ce qui permettrait également de « sortir de la logique matérialiste de la reproduction humaine » selon Nathalie Rubel. Par conséquent, l’Etat ne pourrait plus s’appuyer sur cet argument pour manifester l’évidence d’une différenciation des sexes. Celle-ci semble, tout comme le mariage, dépendre du droit. Nous allons donc étudier sa place dans la construction de la différence de sexe et de genre.

 

 

  • 2 : Le rôle du droit dans la construction de la différence de sexe et de genre:

« Ce qui est relevant c’est moins les différences objectives que le dispositif culturel qui a fait de ces différences un système si intelligible de nos conventions sociales qu’il finit par apparaître comme naturel et allant de soi »[19]. La différence biologique entre les sexes n’a de sens que culturellement. Le droit, non seulement prend une part non négligeable dans son authentification, mais serait lui-même « genré » selon Gilda Nicolau[20].

Ce qui au départ peut sembler naturel, ne l’est pas réellement puisque le droit prend une place importante dans la construction de cette réalité. En effet, le droit participe activement à la mise en place des rapports sociaux et familiaux puisqu’il est créateur de règles. Ainsi, selon Michel Foucault, « le pouvoir doit être pensé d’une manière plus large, comme une force productive des rapports sociaux plutôt que comme simple puissance répressive ».

Le droit joue ainsi un rôle déterminant dans le processus de construction du sexe et en fixe les rôles sociaux. Sexe, genre et sexualité sont à la fois des objets de droit, juridiquement constitués, et des données sociales externes, des objets du droit, saisis et régulés par lui selon Mikhaïl Xifaras[21].

Ce qui ne paraît être que le simple reflet de la réalité n’est en fait qu’un choix du législateur qui décide de donner un statut officiel et d’attacher des conséquences juridiques à telle ou telle donnée de réel. La fonction du droit n’est donc jamais purement recognitive, mais toujours aussi constitutive selon Danièle Lochak[22].

De ce fait, la transformation d’une notion en catégorie juridique n’est pas neutre. Celle-ci ne l’est pas car il s’agit pour l’Etat de répondre à certains objectifs et de répandre une certaine idéologie. La notion en question peut s’avérer être symbolique. L’élément naturel n’est donc qu’un alibi qui permet d’enraciner la distinction homme/femme par la société. Cette distinction permet d’exclure les schémas qui n’entrent pas dans la norme. Cela expliquerait la résistance du droit à prendre en compte les situations qui ne s’inscrivent pas dans le schéma de la dualité des sexes telles que le transsexualisme ou l’intersexualisme.

Pour conclure, si cette dualité est le produit du droit alors serait-il possible de supprimer cette distinction si les conditions le permettent ? Il semblerait que oui. Il nous faut donc étudier une question qui semble très importante pour la suite de ce raisonnement : l’état de notre corps et de notre personne est-il indisponible ? Cet état peut-il faire l’objet d’une liberté individuelle de choix de notre sexe ?

 

 

Section 2 : Statut juridique du changement de sexe

L’évolution juridique concernant le changement de sexe entraîne une question qui est celle de l’indisponibilité de l’état de la personne. « L’état de la personne est constitué par l’ensemble des règles qui définissent sa personnalité juridique et qui l’individualisent par rapport à sa famille et à la société dans son ensemble »[23].

En droit positif, le sexe est reconnu comme étant un élément de l’état des personnes. Cependant, la volonté de changer de sexe à l’état civil ne heurte-t-elle pas ce principe d’indisponibilité de l’état des personnes? Pour cela, il nous faut étudier l’évolution en la matière concernant l’intersexualisme (I) et le transsexualisme (II).

 

 

  • 1 : Indisponibilité de l’état des personnes et intersexualisme:

L’intersexualisme a toujours été ignoré de par le fait qu’il a toujours été admis un dualisme des sexes (A). Néanmoins, serait-il possible d’instaurer un genre neutre et ainsi pouvoir disposer de son état (B) ?

 

 

  • Le principe de dualisme et l’intersexuation ignorée

L’intersexualisme représente la personne qui possède les organes sexuels des deux sexes. Pendant longtemps, la législation et la jurisprudence se sont relayées pour représenter les personnes seulement par l’un des deux sexes, féminin ou masculin. « Tout individu, même s’il présente des anomalies organiques, doit être obligatoirement rattaché à l’un des deux sexes, masculin ou féminin, lequel doit être mentionné dans l’acte de naissance »[24].

L’intersexuel ne peut obtenir une modification de son état civil que dans le cas d’une erreur matérielle du fait de l’incertitude initiale. Cette question est réglée par la Cour d’appel de Versailles en date du 22 juin 2000 qui a posé les conditions de cette modification. La Cour rappelle que l’intangibilité de l’état civil ne s’oppose pas à la modification du sexe juridique, l’indisponibilité de l’état n’étant pas synonyme d’immutabilité. En l’espèce, il s’agissait d’un enfant qui avait été déclaré comme étant un garçon devant l’état civil alors même qu’il présentait dès sa naissance « des organes sexuels masculins insuffisants ».

Le caryotype avait révélé que l’intéressé était génétiquement un garçon. Mais suite à l’échec de la stimulation de ses organes, les médecins effectuèrent une intervention de féminisation. La Cour d’appel décida de permettre la rectification de la mention du sexe sur l’état civil. Trois conditions ont été posées:

  • la modification du sexe ne doit pas résulter d’une démarche volontaire, prédéterminée des parents, mais doit constituer « l’aboutissement juridique d’une situation médicalement constatée et conseillée.
  • il faut une impossibilité médicalement constatée de mettre fin à l’ambiguïté sexuelle concernant le sexe déclaré à l’état civil.
  • une fois l’opération réalisée, l’enfant doit se comporter de manière à être en accord avec son sexe psychique (vis-à-vis de son sexe anatomique).

 

Ainsi, n’est-il pas possible, plutôt que d’énoncer des conditions, laisser la possibilité d’instaurer un genre neutre?

 

 

  • Le genre neutre

La détermination du sexe se base sur des marqueurs anatomiques et biologiques apparemment clairs. Or, les intersexuels ne sont pas le reflet de cette démarcation puisqu’ils possèdent à la fois des marqueurs anatomiques et biologiques des deux sexes. Vouloir à tout prix les faire entrer dans une des deux catégories de sexes officiels n’est-il pas critiquable?

En effet, l’intersexuation est une variation naturelle de l’espèce humaine. L’enfant naît ainsi. La division entre les deux sexes est donc tout autant « culturelle » que « naturelle ». Il n’est, dès lors, pas anodin de se demander s’il est préférable de voir l’intersexuation comme une variabilité du corps humain et non une anomalie ou une malformation. Cela remettrait en question les catégories sexuelles, par tant la notion même de sexe à l’état civil.

 

 

  • 2 : Indisponibilité de l’état des personnes et transsexualisme:

Que représente la part réelle de la volonté lorsque la personne est confrontée à la transidentité ? Cette détermination au changement est-elle cause ou conséquence ? Le sentiment d’appartenir à l’autre genre est-il réellement le fruit de la volonté ou s’impose-t-il à la personne ?

La jurisprudence fut pendant longtemps hostile aux demandes de modification de la mention du sexe sur l’état civil des transsexuels en raison de la question de l’indisponibilité de l’état des personnes (A). Mais la cour européenne des droits de l’homme a vite permis de dissiper toutes les interrogations (B).

 

 

  • Le refus de reconnaissance du changement de sexe des transsexuels:

Le sexe est souvent conçu en droit comme devant être nécessairement figé. Le principe d’indisponibilité de l’état s’opposerait à toute évolution. En effet, tant la doctrine que la jurisprudence ont longtemps été hostile aux demandes de changement de sexe.

La jurisprudence a refusé le changement juridique de sexe et a justifié sa position que « la transformation physique de transsexuel, parce qu’elle résultait d’un choix délibéré, ne pouvait, sans heurter l’ordre public, être suivie d’une modification de l’état civil »[25]. La jurisprudence s’est alors basée sur le principe d’indisponibilité pour asseoir cette position. Une telle référence à l’indisponibilité a été l’objet de plusieurs critiques, obligeant la jurisprudence à délaisser le motif de l’indisponibilité pour introduire la notion de sexe variable[26].

Mais en 1987, nouveau revirement, la Cour de cassation revint sur le fondement de l’indisponibilité, en refusant le changement juridique de sexe au nom de la « volonté délibérée » de l’intéressé[27].

La Haute juridiction a été sollicitée pour se prononcer définitivement sur la question. En quatre arrêts rendus en 1990, elle a décidé que: « le transsexualisme, même lorsqu’il est médicalement reconnu ne peut s’analyser en un véritable changement de sexe, le transsexuel, bien qu’ayant perdu certains caractères de son sexe d’origine n’ayant pas pour autant acquis ceux du sexe opposé »[28]. Pour la Cour, le sexe juridique est déterminé par le sexe génétique. Un transsexuel même opéré ne peut acquérir juridiquement le sexe revendiqué. Elle niait donc le sexe psychologique.

Cependant, cette hostilité ne serait-elle pas plutôt due à la volonté d’instaurer l’immuabilité de l’état des personnes ? En effet, le transsexualisme a été classé parmi les affections psychiatriques, tant par l’OMS dans sa Classification internationale des maladies (CIM10), que par l’American psychiatric association et son Diagnostic and statistical manual of mental disorders (DSM IV).

Le transsexualisme n’était donc pas accepté en tant que tel comme une pathologie pouvant se soigner mais comme une maladie psychiatrique. Implicitement, la société démontre sa volonté de préserver la différenciation des sexes.

Toutefois, cette position de la jurisprudence française a été l’occasion pour la Cour européenne des droits de l’homme de réaffirmer les principes de liberté reconnus à chaque individu, obligeant ainsi le droit positif français à rectifier sa position sur la question du changement de sexe.

 

 

  • Vers une reconnaissance progressive

Il a fallu attendre une condamnation par la Cour européenne des droits de l’homme en date du 25 mars 1992 (B. c/ France) pour que la France se décide à accepter le changement de sexe civil d’un transsexuel. La cour européenne a censurée les décisions françaises sur la base du respect de la vie privée[29].

En effet, il était difficile pour un transsexuel de changer de prénom. En outre, la mention du sexe apparaissait dans de nombreux documents officiels et laissait apparaître la discordance du sexe et de l’état actuel du transsexuel.

La Cour de cassation en date du 11 décembre 1992, a entériné la position européenne. La Cour a finalement admis que « lorsque, à la suite d’un traitement médicochirurgical, subi dans un but thérapeutique, une personne présentant le  syndrome du transsexualisme ne possède plus tous les caractères de son sexe d’origine et a pris une apparence physique la rapprochant de l’autre sexe, auquel correspond son comportement social, le principe du respect dû à la vie privée justifie que son état civil indique désormais le sexe dont elle a l’apparence; que le principe de l’indisponibilité de l’état des personnes ne fait pas obstacle à une telle modification ».

Enfin, l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme, Goodwin c. Royaume-Uni en date du 11 juillet 2002 a reconnu explicitement le droit de changer d’identité sexuelle. Les États se doivent donc de reconnaître juridiquement la conversion sexuelle. Cependant, la Cour leur accorde une marge de manœuvre quant aux conditions requises pour changer de sexe.

 

 

Chapitre II :

Les conditions du changement de sexe dans l’état civil

 

Le changement de sexe a été occulté pendant fort longtemps sur la base de l’indisponibilité. Une interprétation erronée de ce principe a permis d’interdire le changement de sexe, autant pour les intersexués que les transsexuels. A une certaine époque, le fait de vouloir changer de sexe était considéré comme une anomalie psychiatrique.

Mais la science a permis de déterminer un état naturel des intersexués et des transsexuels. Le fait est que ces personnes se retrouvent emprisonnées dans un corps qui ne leur convient, limitant ainsi leur liberté, et gênant leur épanouissement.

La jurisprudence française a pendant longtemps pu éviter le changement de sexe. Mais la forte pression européenne a permis de se concentrer sur l’avenir des personnes en mal être et à la recherche d’une identité. La jurisprudence a fini par rectifier sa position en reconnaissant la possibilité de changer de sexe sous certaines conditions, conditions tenant au fond (section 1) et conditions relevant de la forme (section 2).

 

 

Section 1 : Les conditions de fond du changement de sexe

« Lorsque, à la suite d’un traitement médico-chirurgical subi dans un but thérapeutique, une personne présentant le syndrome du transsexualisme ne possède plus tous les caractères de son sexe d’origine et a pris une apparence physique la rapprochant de l’autre sexe, auquel correspond son comportement social, le principe du respect de la vie privée justifie que son état civil indique désormais le sexe dont elle a pris l’apparence. Le principe de l’indisponibilité ne fait pas obstacle à une telle modification »[30].

Telle a été la réaction rapide de la jurisprudence française après la condamnation européenne qu’elle a subie en 1992. Désormais, la jurisprudence française reconnait le changement de sexe sous plusieurs conditions. Ces conditions sont au nombre de trois : que la personne présente le syndrome du transsexualisme, qu’elle ait subi des opérations et des traitements médico-chirurgicaux, et enfin qu’une telle intervention ait donné l’apparence physique se rapprochant de l’autre sexe.

 

 

  • 1 : La volonté de changer de sexe

Chez la plupart des individus, l’identité psycho-sexuelle coïncide avec le corps sexué. Mais il arrive que ce ne soit pas le cas. C’est notamment le problème que rencontre les transsexuels. C’est pourquoi, la définition traditionnelle n’est plus compatible avec les systèmes juridiques actuels. Le droit européen, jusqu’à une époque récente, ne retenait que le sexe biologique. L’individu devait nécessairement être rattaché à l’un des deux sexes masculin ou féminin. Désormais, le sexe psychique est reconnu comme étant un des éléments de la définition même du sexe. Il faut donc reconnaître que celui-ci prend une place importante dans la définition juridique du sexe. De ce fait cela n’a-t-il pas des conséquences sur la place même du sexe à l’état civil?  Si l’on fait le choix de faire primer le sexe psychique sur le sexe biologique, le sexe ne change-t-il pas de nature et ne devient-il pas plutôt un droit de la personnalité? Les solutions sont controversées puisque d’un état à l’autre le résultat n’est pas le même.

En principe, le droit européen admet au nom du respect de la vie privée qu’une personne puisse masquer son sexe initial lorsque celui-ci n’est plus approprié et ne reflète plus le sexe apparent. La Cour européenne des droits de l’homme s’appuie sur l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme qui proclame le droit de toute personne au respect « de sa vie privée et familiale ».

Par le biais de cette admission, la Cour considère que le sexe est à la fois un élément de l’état civil et un droit de la personnalité. Finalement, elle décide de faire un compromis entre l’intérêt général et l’intérêt privé. La Cour semble prendre en compte le développement de la personne humaine. Celle-ci a donc choisie de se rallier à l’avis de la Commission Européenne des droits de l’homme qui a exprimé très tôt un avis favorable envers la reconnaissance du nouveau sexe d’un transsexuel à l’issue d’un traitement médical[31].

 

 

  • 2 : Les interventions pour un changement de sexe

Il faut d’emblée faire le point. Aucune prescription légale ne disposait clairement cet aspect figé de la mention du sexe dans un acte de naissance. Elle peut donc en principe faire l’objet d’une rectification lorsqu’en raison de la malformation des organes génitaux externes, le sexe déclaré à l’état civil s’avère ne pas correspondre à l’évolution ultérieure de la personne.

 

 

  • La nécessité d’une intervention

Dans ce cas, « il ne s’agit pas à proprement parler de changement de sexe mais bien de la détermination du sexe depuis la naissance »[32]. La modification de la mention du sexe suit dans ce cas la voie de l’action en rectification dont l’objet n’est pas de changer l’état de la personne mais de corriger l’erreur commise lors de la rédaction de l’acte de l’état civil[33].

Le véritable changement de sexe consiste à reconnaître la possibilité pour une personne d’apporter la modification de son état qui ne correspondrait plus à la réalité, une situation qui intéresse les transsexuels mais aussi les pseudo-hermaphrodites[34]. L’hostilité des juges, faisant face à une condamnation européenne, a pu être dissipée pour ouvrir un droit au changement de sexe aux transsexuels[35].

Pour essayer de rectifier ce que les intéressés pourraient arguer d’erreur de la nature, les transsexuels prévoient des interventions, souvent chirurgicales, afin de retrouver son identité sexuelle. Mais les interventions de changement de sexe ne sont pas toujours entérinées par la jurisprudence. En effet, celle-ci fait la distinction entre une intervention volontaire et une intervention nécessitée.

La circulaire du 14 mai 2010 explique que le traitement médico-chirurgical « a été entendu comme exigeant l’ablation des organes génitaux d’origines et leur remplacement par des organes génitaux artificiels du sexe revendiqué »[36].

 

 

  • La condition de l’intervention réduite

Les juges exigent aujourd’hui une opération de conversion sexuelle, souvent assortie d’expertises médicales avant de prononcer la modification de la mention de sexe à l’état civil. Mais certains ont décidé de se prononcer sans qu’une intervention chirurgicale ait intervenu.

La cour d’appel de Rennes avait ainsi admis que, « lorsqu’une personne a pris une apparence physique la rapprochant de l’autre sexe, auquel correspond son comportement social, le principe du respect de la vie privée justifie que son état civil mentionne désormais le sexe dont elle a l’apparence »[37]. La cour d’appel d’Aix-en-Provence s’est prononcée dans le même sens par un arrêt rendu le 9 novembre 2001.

La circulaire du 14 mai 2010 apporte la précision, les magistrats « [pourront] donner un avis favorable à la demande de changement d’état civil dès lors que les traitements hormonaux ayant pour effet une transformation physique ou physiologique définitive, associés, le cas échéant, à des opérations de chirurgie plastique (prothèses ou ablation des glandes mammaires, chirurgie esthétique du visage…), ont entraîné un changement de sexe irréversible, sans exiger pour autant l’ablation des organes génitaux ».

La Cour d’appel de Nancy avait ainsi sommé « de produire (…) tout document médical établissant le caractère irréversible du changement de sexe ou de genre consécutif au traitement d’hormonothérapie entrepris »[38]. Le certificat fourni par médecin psychiatre révélait dans cette affaire que « Delphine R. G. a eu un traitement hormonal depuis 4 ans, est en inversion de genre depuis cette date, ceci de façon irréversible ; (…) elle ne présente pas de troubles psychiatriques ».

Pour la cour, « ces constatations médicales et les termes mêmes employés par ces médecins, établissent le caractère irréversible du changement entrepris et des modifications du métabolisme qui en résultent ».

Dès lors, nonobstant l’absence de chirurgie des organes génitaux, la cour reçoit favorablement les demandes de Delphine R. G. Pour les magistrats, en effet, « l’état civil d’une personne doit indiquer le sexe dont elle a l’appartenance ». Remarquons le recours au terme « appartenance » et non, comme dans les arrêts de 1992, à celui « d’apparence ».

 

 

Section 2 : Les conditions de forme

Le changement de sexe est maintenant admis par le droit positif français. Il reste à traiter des formalités et les démarches à adopter pour changer le sexe mentionné dans l’acte de l’état civil. Des procédures sont également prévues pour les autres documents officiels. Souvent, le changement de sexe s’accompagne également du changement de prénom pour que celui-ci soit en adéquation avec le nouveau sexe de l’intéressé.

 

 

  • 1 : La procédure de changement de sexe

 

 

  • Les formalités pour l’état civil

En France, il n’y a pas de règles établies pour changer de sexe. La loi ne fixe pas de conditions. En réalité, tout dépend du lieu où la demande est faite. Il faut cependant rappeler que le Code civil impose d’être rattaché à l’un ou l’autre sexe. Il n’y a pas de statut intermédiaire, ni même la possibilité d’échapper à un rattachement à l’un des deux sexes.

Pour le changement de sexe, il faut déposer une demande auprès du Tribunal de Grande Instance de son domicile ou de son lieu de naissance. La durée de la procédure est de 6 à 30 mois. Comme nous l’avons expliqué, il n’y a pas de conditions fixées par la loi. Il est donc utile de bien choisir où l’on souhaite constituer son dossier afin d’éviter une procédure trop longue ou trop coûteuse.

Enfin, l’acte intégral de naissance ne fera apparaître le changement qu’en mention marginale, sans effacer l’identité antérieure. Ce n’est que sur l’extrait d’acte de naissance que la nouvelle identité sera seule mentionnée.

 

 

  • Les formalités consécutives

Le changement de l’état civil n’est qu’une étape dans le processus transidentitaire. Une multitude de démarches administratives est nécessaire pour établir la nouvelle identité sur tous les documents officiels historiques et à venir (carte d’identité, passeport, permis de conduire, titres de propriété, diplômes, etc.).

Cependant, cette reconstruction de l’identité administrative est rarement parfaite. Certains documents antérieurs à ce changement tels que les bulletins de paye, les contrats de travail, les abonnements ou encore les quittances de loyer ne peuvent être modifiés rétroactivement. Le transsexuel devra donc assumer son passé puisque le changement de sexe n’est pas rétroactif. En vertu du principe de l’immutabilité, le jugement de changement de sexe ne fait que s’ajouter en marge de l’acte de naissance, laissant subsister le sexe d’origine. Le transsexuel ne peut donc obtenir un état civil neuf.

 

 

  • 2 : Le changement de prénom

En principe, le prénom d’une personne ne peut pas être modifié. Toutefois, le Code civil a prévu que« toute personne qui justifie d’un intérêt légitime peut demander à changer de prénom. La demande est portée devant le juge aux affaires familiales à la requête de l’intéressé ou, s’il s’agit d’un mineur ou d’un majeur en tutelle, à la requête de son représentant légal. L’adjonction, la suppression ou la modification de l’ordre des prénoms peut pareillement être décidée. Si l’enfant est âgé de plus de treize ans, son consentement personnel est requis »[39].

La jurisprudence a dégagé un droit à la modification du prénom devenu inadéquat après un changement d’apparence sexuelle. Ce droit a donc été reconnu aux transsexuels. La Cour européenne des droits de l’homme a ainsi jugé que le refus de leur accorder un changement de prénom est contraire au principe du respect de la vie privée « dès lors qu’il cause à la personne intéressée des désagréments excessifs et rompt ainsi le juste équilibre à ménager entre ses intérêts et l’intérêt général »[40].

On peut ajouter que la jurisprudence admet généralement le changement de prénom du transsexuel même lorsque la personne intéressée n’a pas encore sollicité ou obtenu la modification de l’indication de son acte de naissance relative à son sexe[41].

Cependant, une minorité de juges se montrent plus réticents et n’autorisent le changement de prénom qu’après que la mention du sexe sur l’état civil ait été modifiée. L’intérêt serait d’éviter de créer une distorsion entre le prénom et le sexe originaire toujours indiqué dans l’acte de naissance[42]. Le changement de prénom reste donc soumis à l’appréciation souveraine du juge qui est le seul à pouvoir apprécier l’intérêt légitime de cette demande.

 

 

Pour conclure cette partie, après un débat mouvementé sur le sort des transsexuels et des intersexués, la jurisprudence française a fini par admettre la possibilité de changer le sexe mentionné dans l’acte de l’état civil. Mais qu’induit ce changement de sexe ?

 

 

Partie II :

Les conséquences du changement de sexe

 

Le changement de sexe prévoit la reconnaissance d’un droit à rectifier la mention du sexe dans l’acte de l’état civil. Ce changement de sexe permet à l’intéressé de recouvrer un bien être, intérieur mais également extérieur. Mais cette rectification n’est pas sans conséquences. Les conséquences qui peuvent avancées sont celles que relèvent le mariage et la filiation. Mais cette possibilité ouvre surtout le débat sur l’utilité de la mention du sexe dans l’acte de l’état civil.

Le changement de sexe n’opère que pour l’avenir. La personne n’est pas réputée avoir été du sexe qu’elle revendique depuis sa naissance, mais seulement depuis la décision prononçant le changement de sexe. Cela signifie que le jugement qui prononce ce changement est constitutif d’état et non un jugement déclaratif. C’est pourquoi, la personne dont le sexe juridique a changé doit être envisagée comme ayant possédé deux états différents. Cela entraîne donc des conséquences tant au niveau familial, qu’au niveau social.

 

 

 

Chapitre I : Les conséquences sur le droit de la famille

 

 

Le changement de sexe provoque un bouleversement au niveau familial puisque l’état du transsexuel n’est plus le même. Les conséquences d’une telle situation doivent être analysées au regard du mariage et de la filiation.

 

 

Section 1 : La question du mariage

Deux situations doivent être relevées ici. En effet, la récente loi adoptée sur le mariage pour tous apporte des modifications substantielles en la matière. Si auparavant le divorce était prononcé puisque le droit positif consacrait de la différence de sexe des époux, le mariage pour tous risque de changer cette donne et permettre le maintien des liens conjugaux.

 

  • 1 : Le droit avant la loi sur le mariage pour tous

 

  • Le sort du mariage conclu avant le changement de sexe

 

Le mariage conclu avant le changement de sexe suscite des questionnements vis-à-vis de sa validité. En effet, en France avant la promulgation de la loi pour le mariage pour tous le 17 mai dernier, le mariage ne pouvait être conclu qu’entre un couple de sexe différent. La différence de sexe entre époux était une condition de validité du mariage[43]. Le changement de sexe de l’un des époux entrainait un changement de situation juridique.

La question était alors de savoir le sort du mariage antérieur à ce changement de sexe? La solution consacrée a été le divorce. Le divorce permet à l’union antérieure de prendre fin seulement pour l’avenir. Avant la réforme du divorce opérée par la loi du 26 mai 2004, le divorce du transsexuel était souvent prononcé pour faute à ses torts. Pourtant, l’opération du transsexuel est à but thérapeutique et donc ne devrait pas être jugée comme étant fautive. Depuis cette réforme, cette solution n’est plus admise.

Le divorce pouvait être prononcé pour altération définitive du lien conjugal selon les articles 237 et suivants du Code civil. Cette possibilité se fonde sur le fait que souvent le couple s’éloigne et cesse toute communauté de vie suite à ce changement de sexe. Le divorce pouvait également être prononcé pour faute aux torts du transsexuel mais dans le cas où celui-ci « ne ménagerait pas son conjoint dans les implications conjugales générées par son nouveau statut »[44].

Pour cela, nous pouvons prendre l’exemple de l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Nîmes le 7 juin 2000. Christian G., marié et père de famille, avait obtenu en 1998 un jugement qui a reconnu son état de transsexuel et décidé qu’il devrait être considéré désormais comme de sexe féminin, son prénom étant désormais Christine. Son épouse ayant saisi le Tribunal puis la Cour d’appel, le divorce fut prononcé aux torts exclusifs du mari.

Les juges ont retenu que « les mutilations subies par lui devaient être reconnues comme une faute et que son comportement féminin et son habillement en femme depuis plusieurs années constituaient une insulte à sa femme et une violation grave des obligations et devoirs du mariage. Ils énoncent que l’acquisition du sexe féminin qui implique une modification de l’état pour l’avenir oblige au prononcé du divorce puisque le mariage ne peut être contracté entre personnes du même sexe et que cette règle est d’ordre public. Ils ajoutent que le responsable de cette obligatoire séparation ne peut être que le transsexuel, quand bien même sa volonté n’y serait pour rien »[45].

Cependant, la doctrine s’accordait à penser que le mariage du transsexuel devait être frappé de caducité puisque l’un des éléments essentiels au mariage est la différence de sexe, prescription d’ordre public.

Bien que le divorce s’impose ici comme la solution au problème, un cas récent nous démontre que le mariage conclu avant le changement de sexe pouvait être maintenu selon certaines circonstances.

La cour d’appel de Rennes en date du 16 octobre 2012 rend une décision qui sort de l’ordinaire. Le tribunal de grande instance de Brest[46], saisi en premier ressort, avait rejeté la demande de changement de sexe en se fondant sur la prohibition du mariage homosexuel. Mais la cour d’appel de Rennes infirme le jugement et ordonne le changement de sexe.  Il en ressort de cet arrêt un principe: les liens familiaux du transsexuel ne doivent avoir aucune incidence sur le changement de sexe. Cela comprend le lien de filiation, donc les enfants, mais aussi le mariage.

Dans notre cas précis, ce qui nous intéressait c’est l’incidence du lien matrimonial sur le changement de sexe. La cour d’appel se démarquait des solutions passées puisqu’elle autorisait le changement de sexe sans toucher au lien d’alliance. Le célibat n’est pas une condition au changement de sexe. Seules les conditions posées par la Cour de cassation en date du 11 décembre 1992 doivent être prises en comptes dans le débat. Ces conditions n’ont pas été contestées en l’espèce. C’est pourquoi, le mariage ne pouvait être remis en question.

La Cour d’appel énonce que « le choix de poursuivre la vie commune (…) relève d’un choix privé dans lequel elle n’a pas à intervenir ». Le mariage relève donc de la vie privée des époux et il en est de même pour sa fin.  De plus, l’acte de mariage du transsexuel n’était pas modifié par le jugement de changement de sexe qui ne vaut que pour l’avenir. « L’acte de mariage est en effet un cliché juridique du mariage au moment de sa célébration » selon Claire Neirinck[47].

Enfin, nous pouvons observer que cette décision n’était pas unique en son genre puisque d’autres pays qui n’autorisent pas le mariage homosexuel ont jugé inconstitutionnel la dissolution du mariage du transsexuel. Ce fut le cas pour l’Allemagne[48] et l’Autriche[49]. Ces décisions « appellent l’Etat à reconnaître qu’il est plus important de protéger tous les individus sans exception contre un divorce imposé par l’Etat que d’avoir quelques rares cas où ce principe conduit à des mariages entre personnes de même sexe »[50].

Si toutefois, le mariage conclu avant le changement de sexe suscitait encore des réflexions, qu’en était-il du mariage conclu après le changement de sexe?

 

 

  • Le mariage conclu après le changement de sexe

En principe, une fois que le transsexuel a fait toutes les démarches lui permettant de changer d’état civil et que sa demande avait aboutie, rien ne s’opposait, en droit français, à ce qu’il se marie avec une personne d’apparence physique différente de la sienne mais d’un sexe génétique identique.

C’est par le biais de l’article 12 de la Convention européenne des droits de l’homme que le droit au mariage des transsexuels est consacré. En effet, l’article 12 dispose qu’« à partir de l’âge nubile, l’homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l’exercice de ce droit ».

Avant 2002, la Cour européenne des droits de l’homme considérait que le droit au mariage des transsexuels n’avait pas à être garanti car l’article 12 ne protégeait que le « mariage traditionnel entre deux personnes de sexe biologique opposé »[51].

Cependant, la Cour européenne des droits de l’homme considérait par la suite qu’il ne fallait pas s’arrêter à la lettre de l’article 12 qui mentionne un homme et une femme, et limitait fortement la marge d’appréciation des États, tout en constatant l’absence de convergence des législations nationales dans ce domaine.

Le mariage était devenu un droit qui leur est accordé. Tout refus par un état était par la suite sanctionné par la Cour européenne. Cela fut le cas pour la Grande-Bretagne lors de deux arrêts de la CEDH en date du 11 juillet 2002, dont l’arrêt Goodwin c. le Royaume-Uni. La CEDH avait clairement affirmé l’obligation de reconnaître ce droit aux transsexuels. D’après elle, « la non-concordance des facteurs biologiques chez un transsexuel opéré ne constituait plus un motif suffisant pour refuser son changement juridique de sexe dès lors qu’un tel refus empêchait ce dernier de se marier avec une personne de son choix »[52].

En l’espèce, la requérante se plaignait de la non-reconnaissance juridique de sa nouvelle identité sexuelle et dénonçait en particulier l’impossibilité pour elle de se marier.  Selon la Cour, il appartient à l’État de déterminer les conditions et formalités concernant le mariage des transsexuels, mais elle « ne voit aucune raison justifiant que les transsexuels soient privés en toutes circonstances du droit de se marier».

La même solution a été rendue lors d’un arrêt en date du 7 janvier 2004. K. B. et National Health Service Pensions Agency. Cet arrêt concernait également le droit au mariage. Mais ajoutait le problème des conséquences sociales de celui-ci. En l’espèce, la requérante K. B. vivait depuis longtemps une relation stable avec un transsexuel (femme devenue homme). Le droit anglais ne leur permettait pas de se marier et, de ce fait, le concubin transsexuel ne pouvait pas prétendre recevoir une pension veuvage à la mort de K. B., cette pension étant réservée aux époux mariés.

Le requérant faisait donc valoir, devant les juridictions internes, que l’impossibilité de se marier était discriminatoire au regard de l’article 141 C.E. de la directive 75/117 du 10 février 1975, qui garantit le principe de l’égalité des rémunérations. La Cour de justice des Communautés européennes partage cette opinion et juge discriminatoire la législation britannique qui rendait impossible le mariage d’un transsexuel vivant en couple, le privant par la même occasion de cette pension veuvage réservée aux personnes mariées.

En dehors même de toute considération relative à la jurisprudence européenne, le droit français ne s’opposait pas non plus à l’union des transsexuels. En effet, plusieurs arrêts vont dans le sens de la Cour européenne. Nous pouvons prendre l’exemple d’un arrêt en date du 6 avril 1903.

La Cour de cassation rappelle qu’une des conditions de l’existence du mariage est la différence des sexes et elle retient comme critère d’appréciation de cette différence l’apparence extérieure du sexe, le sexe anatomique. Or, le transsexuel opéré a bien un sexe anatomique conforme à celui indiqué par son acte d’état civil. Le mariage peut donc être célébré puisque son sexe anatomique correspond à son sexe juridique.

De plus, un arrêt de la Cour d’appel de Papeete en date du 1er septembre 2011 va dans le même sens puisqu’il a condamné le refus par un maire de célébrer le mariage d’un couple dont la future mariée transsexuelle avait obtenu un changement d’état civil après son traitement chirurgical[53].

En outre, d’un point de vue formel, le seul document exigé pour le mariage est une expédition de l’acte de naissance, conformément à l’article 70 du Code civil. Ce document mentionne seulement le nouveau sexe du transsexuel. Le mariage des transsexuels était donc possible en droit français autant d’un point de vue pratique que d’un point de vue théorique.

 

 

  • 2 : La situation après l’adoption du mariage pour tous

Le mariage pour tous permet l’union légale de deux personnes du même sexe. Cette institutionnalisation veut établir l’égalité entre tous devant la loi. Si les personnes de même sexe ne pouvait établir qu’un PACS auparavant, dorénavant, il leur est permis de conclure un contrat de mariage, autant que les hétérosexuels, avec les conséquences qui s’en suivent.

Mais la consécration de cette solution a été précédée par des esquisses d’assouplissement de la part de la jurisprudence. Sans attendre la promulgation de ladite loi, certaines décisions ont commencé à accueillir le maintien des liens du mariage conclu avant le changement de sexe.

 

 

  • Une jurisprudence récente assouplie

Jusqu’à présent il n’a jamais été admis que le transsexuel pouvait conserver les liens de son mariage antérieur à son changement de sexe. Si cela n’a pas été accepté c’est tout simplement parce que le droit français prohibait le mariage entre les couples de mêmes sexes.

Néanmoins, la Cour d’appel de Rennes par un arrêt en date du 16 octobre 2012 a remis en question cette prohibition. En l’espèce, le transsexuel qui demande le changement de sexe est le père biologique de trois enfants mineurs et manifeste le désir, rejoint par celui de son épouse, de rester marié.

Tout d’abord,  le tribunal de grande instance de Brest saisi en premier ressort a rejeté la demande de changement de sexe en se fondant sur la prohibition du mariage homosexuel[54]. Par la suite, la cour d’appel de Rennes infirma le jugement et ordonna le changement de sexe.

La Cour d’appel s’est fondée sur l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme pour permettre le maintien du lien d’alliance. Cet article énonce que « toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale ». « La Cour d’appel refuse de faire du célibat une condition du changement de sexe et n’examine que les conditions posées par la Cour de cassation[55].

Tous ces arguments représentaient donc une évolution considérable pour le mariage des transsexuels conclu avant la promulgation du mariage pour tous, qui, quant à lui, a supprimé toutes ces considérations que nous venons d’exprimer.

 

 

  • La consécration de la loi sur le mariage pour tous

Face à la récente loi qui ouvre le mariage aux couples de même sexe, le problème du mariage pour les transsexuels semble disparaître. En effet, le problème tournait autour de la reconnaissance du sexe du partenaire transsexuel. Lorsque le transsexuel change de sexe le couple peut se trouver confronter au problème des couples de même sexe qui est celui de l’empêchement à mariage.

La législation passée ne permettait pas aux couples de même sexe de se marier. Les personnes transgenres mariées se voyaient dans l’obligation de divorcer avant que leur nouveau sexe soit officiellement reconnu. Le plus souvent, ce divorce sera forcé et ira à l’encontre de la volonté du couple marié, qui souhaitait continuer de former une famille juridiquement reconnue, notamment lorsqu’il a des enfants à charge. Cela entraîne des conséquences négatives puisqu’il arrivait que le divorce entraîne la perte de la garde des enfants du parent qui a décidé de changer de sexe.

Avec l’apparition récente de cette loi, les couples que l’on considère être de même sexe peuvent désormais se marier ; cela signifie que les personnes transgenres déjà mariées pourront le rester même s’il s’avère qu’ils forment ainsi un couple homosexuel. Ce qui semblait être un obstacle à mariage ne l’est plus.

Les transsexuels déjà mariés ne seront plus dans l’obligation de divorcer s’ils souhaitent changer de sexe sur leur état civil. Le problème du mariage conclu avant le changement d’état civil est donc réglé.

Concernant le mariage conclu après le changement de sexe, celui-ci non plus ne connaitra plus d’obstacles. En effet, si un transsexuel décide de changer de sexe et que son partenaire est considéré comme étant du même sexe on ne pourra leur interdire le mariage. Mais quid du sort des enfants qui découlent des relations de celui qui change de sexe ?

 

 

Section 2 : De la filiation

Le changement de sexe ne peut ignorer le sort des enfants, de ceux qui sont nés avnt le changement, mais également de ceux à venir.

 

 

  • 1 : Des enfants nés avant le changement :

Le transsexuel peut avoir eu des enfants avant de commencer ses traitements chirurgicaux. Nous nous interrogeons alors sur les conséquences du transsexualisme sur l’état civil de ses enfants et surtout sur l’établissement de leurs liens de filiation.

En principe, les enfants nés de la précédente union garde le lien de filiation antérieurement établi. Cela est du au fait que le jugement est constitutif et non déclaratif ce qui signifie qu’il n’a d’effet que pour l’avenir. Par conséquent, il n’est pas rétroactif. Ainsi, les enfants du transsexuel conservent les mêmes liens avec lui. Leur père, même devenu une femme aux yeux de l’état civil, reste leur père et ne peut devenir une mère.

Cependant, à la suite du changement d’état civil de leur ascendant, ils auront juridiquement deux pères ou deux mères[56]. « Le transsexuel subit ainsi une sorte de dédoublement sexuel ». Dans sa relation avec l’enfant, son sexe originel se maintiendra, tandis que dans ses relations avec les autres tiers, il disparaîtra au profit d’un sexe opposé.

Les relations entretenues avec l’enfant ne pourront pas être limitées du seul fait du transsexualisme de son parent. Mais il reste un cas où le droit de visite du parent transsexuel est réduit : cela est le cas lorsque celui-ci est atteint d’un trouble émotionnel susceptible de provoquer des perturbations psychologiques chez l’enfant[57].

Une autre problématique pouvant être relevée est le cas des enfants dont la filiation n’est pas établie. Il faut ici prendre en compte l’action ou l’acte qui établit le lien de filiation, en tenant compte du sexe du transsexuel à la date de la conception de l’enfant. Cela peut aboutir à des cas assez surprenants. Si nous prenons l’exemple d’une action en recherche de maternité d’un transsexuel devenu homme. Il faudra dans ce cas prouver l’accouchement ce qui mène à des situations de dédoublement de sexe.

Nous observons donc que le transsexualisme pose des questions inédites concernant le droit de la famille, et dans notre cas particulier, le droit de la filiation. Le droit de la famille doit donc s’adapter à ces nouveautés. Nous remarquerons que cette adaptation s’avère également nécessaire dans le cas des enfants nés après la transformation du transsexuel.

 

 

  • 2 : Les enfants nés après le changement :

Le transsexuel ne peut obtenir son changement de sexe qu’à la suite d’une opération de conversion sexuelle. Cette opération conduit à la stérilité de celui-ci. Le transsexuel désirant fonder une famille devra passer par d’autres techniques telles que la procréation médicalement assistée ou encore l’adoption. Il peut aussi tenter de se faire passer, de façon frauduleuse, pour le parent d’un enfant qui n’est pas le sien, en reconnaissant l’enfant d’un autre.

 

 

  • Les techniques de procréation médicalement assistée:

L’application des techniques de procréation médicalement assistée n’est pas ouverte au transsexuel à vocation féminine. L’homme devenu femme ne dispose pas des facultés génitrices ou gestatives des femmes et ne peut, en droit français, se faire aider dans son désir d’enfant par une mère porteuse.

En revanche, le transsexuel devenu homme peut invoquer les dispositions de la loi du 29 juillet 1994 pour que sa femme ou sa concubine puisse avoir accès à une insémination artificielle avec le sperme d’un tiers donneur. L’article L. 2141-2 du Code de la santé publique, issu de la loi no 94-654 du 29 juillet 1994, pose les conditions d’accès à l’assistance médicale à la procréation.

L’article sus cité prévoit que « l’assistance médicale à la procréation est destinée à répondre à la demande parentale d’un couple. Elle a pour objet de remédier à l’infertilité dont le caractère pathologique a été médicalement diagnostiqué ou d’éviter la transmission à l’enfant ou à un membre du couple d’une maladie d’une particulière gravité. L’homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer, mariés ou en mesure d’apporter la preuve d’une vie commune d’au moins deux ans et consentant préalablement au transfert des embryons ou à l’insémination».

Cependant, le transsexuel devenu homme a, à l’origine, toutes ses facultés procréatrices. Sa stérilité n’est due qu’aux opérations qu’il a subies. Peut-il s’agir d’une « infertilité dont le caractère pathologique a été médicalement diagnostiqué » ? Le transsexualisme est la pathologie. La stérilité n’en est que la conséquence. Mais il semblerait que ces nuances n’ont en pratique aucun intérêt puisque les équipes médicales ont déjà répondu favorablement aux demandes des transsexuels.

Néanmoins, la reconnaissance de l’enfant qui en est issu par la transsexuel ne traduit pas son lien de filiation biologique. Ce n’est pas pour autant qu’une action en contestation de la filiation de l’enfant né à l’aide d’une technique de procréation médicalement assistée est possible. En effet, depuis la loi du 29 juillet 1994, l’article 311-20 du Code civil interdit cette action. Mais elle demeure effective si la naissance et la reconnaissance ont eu lieu avant la loi de 1994.

La Cour de cassation en date du 18 mai 2005 avait dès lors accepté d’annuler la reconnaissance faite par un transsexuel au motif qu’elle n’était pas conforme à la vérité biologique[58]. La même décision fut prise par un arrêt de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence le 12 mars 2002[59].

Dans cette dernière affaire, une femme vivait depuis 1981 en concubinage avec une autre femme. Elle eut recours en 1991 à une insémination artificielle avec tiers donneur et donna naissance, le 27 décembre suivant, à un enfant qu’elle reconnut le jour même. Le 8 déc. 1993, sa concubine obtint en justice la rectification de la mention de son sexe sur son état civil. Devenu M. S…, il reconnut l’enfant le 4 mai 1994, mais, le concubinage ayant pris fin, la mère forma en 1995 une action en contestation de reconnaissance sur le fondement de l’article 339 du Code civil.

Par jugement en date du 29 janv. 1997, le Tribunal de grande instance de Nice fit droit à cette demande et prononça l’annulation de la reconnaissance paternelle. La Cour d’appel confirma la nullité de la reconnaissance effectuée par le transsexuel. Selon elle, le transsexuel ne pouvait pas invoquer l’article 311-20 du Code civil qui interdit la contestation de la reconnaissance du père après une insémination avec donneur. Celui-ci n’avait pas participé à l’assistance médicale à la procréation puisque dès l’origine il était réticent à l’idée d’avoir un enfant. De plus, l’insémination avait eu lieu avant 1994, date de l’entrée en vigueur de la loi bioéthique. L’action de la mère était donc recevable au regard de l’article 339, alinéa 3 du Code civil.

En dehors de ces cas, on admettrait que le transsexuel est juridiquement le père de l’enfant conçu, conformément à l’article 311-20 du Code civil. La France est même allée plus loin que ne l’exigeait le droit européen. En effet, dans l’arrêt X, Y et Z contre Royaume Uni, la Cour européenne a estimé que « l’article 8 ne saurait passer pour impliquer que l’État défendeur est dans l’obligation de reconnaître comme le père d’un enfant une personne qui n’en est pas le père biologique »[60].

 

 

  • L’adoption

Le transsexuel peut tenter d’adopter un enfant, seul ou avec son conjoint. Obtiendra-t-il alors facilement l’agrément qui constitue la première phase du processus d’adoption ? La seule décision rendue à ce sujet est une décision ancienne du Tribunal administratif de Versailles du 16 juin 1992[61]. Le Tribunal a considéré que le refus d’agrément opposé au transsexuel n’était pas justifié. Il est même considéré comme discriminatoire par la CEDH[62] qui a jugé que le refus d’agrément d’une personne homosexuelle était discriminatoire.

Cependant, l’obtention de l’agrément n’est que la première phase d’un processus très long, à l’issue duquel il n’est pas certain qu’un transsexuel puisse se voir confier un enfant. Cela pousserait certains d’entre eux à agir par des voies extra légales.

 

 

  • Les mesures de protection des enfants

Les transsexuels peuvent donc être tentés par l’établissement mensonger d’un lien de filiation. Celui-ci se concrétiserait le plus souvent par une fausse reconnaissance. Le Tribunal de grande instance de Marseille, le 27 janvier 1982 a déjà eu l’occasion de juger un cas similaire. En l’espèce, un homme s’est fait opérer au Maroc et avait obtenu la rectification de son acte d’état civil. Une de ses amies avait accouché et cet enfant avait été reconnu par le transsexuel et son ami.

Le ministère public était intervenu sur le fondement de l’article 339 du Code civil pour contester cette reconnaissance et avait obtenu gain de cause. En effet, d’après le Tribunal, «dès lors que la mère prétendue se trouve dans l’impossibilité physiologique de concevoir un enfant, par voie de conséquence, les déclarations à l’état civil effectuées par l’ami de celle-ci sont à l’évidence mensongère, tant en ce qui concerne sa prétendue paternité que sur la maternité affirmée»[63].

Nous pouvons aujourd’hui constater que la possible rectification de l’acte d’état civil des transsexuels a largement facilité la transgression de la loi. En effet, un transsexuel changeant de sexe et formant après cet acte un couple hétérosexuel avec son conjoint permet de faire illusion sur les sexes des parents retranscris sur l’état civil de l’enfant en cause. On ne peut dans ce cas contester le lien de filiation puisqu’il respect la réglementation qui veut qu’un enfant soit né d’un père et d’une mère.

 

 

 

Chapitre II : Les conséquences sociales

 

Le genre est une expérience interne et personnelle de l’intéressé. Néanmoins, un changement de sexe induit des conséquences sur sa vie, sur la vie de ses proches, mais également sur sa vie sociale. Une réflexion est permise sur la question. Professionnellement, quelles en sont les conséquences ?

La plupart des réglementations, quelles soient nationales ou internationales consacre le droit d’accès au marché du travail est reconnu. En droit français, le préambule de la constitution de 1946 prévoit que « chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi ».

L’article L 122-45 alinéa 1 du code du travail ajoute qu’ « aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses mœurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son patronyme ou en raison de son état de santé ou de son handicap ».

En droit international, l’article 23 de la Déclaration universelle des droits de l’homme garantit chacun du «droit au travail, au libre choix de son travail, à des conditions équitables et satisfaisantes de travail et à la protection contre le chômage ». Il en est de même pour d’autres conventions. La liste est longue en la matière.

 

 

  • 1 : La réalité des transgenres

Malgré toutes les réglementations existantes en matières d’accès à l’emploi, un bon nombre de problèmes persistent pour les personnes transgenres. Plusieurs enquêtes nous démontrent que l’accès à l’emploi pour eux n’est pas facilité. Le taux de chômage, par exemple, est beaucoup plus en hausse les concernant. Selon l’étude Engendered Penalties 31% seulement des transsexuels travaillent à plein temps.

Plus précisément, 40 % des femmes transgenres travaillent contre 57 % des femmes en général et 36 % des hommes transgenres contre 72 % des hommes en général. On constate que face à cette situation certaines personnes transgenres au chômage, en particulier les femmes, ne trouvent pas d’autres solutions que l’industrie du sexe.

 

Dans le cas où ces personnes trouvent du travail, d’autres problèmes sont rencontrés, notamment s’agissant de leur difficulté à conserver leur emploi. En effet, les démarches juridiques de reconnaissance du changement de sexe obligent les transsexuels à mener une double vie par peur de perdre leur emploi. Beaucoup de problèmes en pratiques ont une incidence sur la possibilité, pour eux, de continuer de travailler.

A titre d’exemple, un contrat de travail peut préciser que l’employé est un homme, alors que les conditions d’accès à la chirurgie de conversion sexuelle exigent que la femme transgenre se présente vêtue comme une femme au travail, ce qui n’est pas très cohérent.

D’après l’étude Engendered Penalties, 23 % des personnes interrogées ont ressenti le besoin de changer d’emploi à cause de la discrimination fondée sur l’identité de genre. Parmi les personnes qui n’affichent pas leur identité de genre, 42 % ont adopté cette attitude par peur de perdre leur emploi[64].

 

 

  • 2 : Le changement de sexe et les qualifications professionnelles antérieures

Les attestations et diplômes délivrées portent l’ancien nom et sexe de la personne transgenre. Cela peut lui porter préjudice puisqu’elle ne pourra continuer à bénéficier de sa formation universitaire et professionnelle, et de ce fait, pouvoir se porter candidate à des emplois correspondant à ses qualifications au lieu de se prétendre sans formation.

La différenciation des sexes semblent donc prendre une importance pour l’accès à l’emploi. L’identité de genre ne serait-elle pas plus appropriée pour éviter ce genre d’incidences. Probablement que oui puisque si l’on permet l’instauration d’une identité de genre, le contrat de travail, par exemple, sera conforme à l’identité de la personne ce qui évite par la suite tous les problèmes rencontrés ici présents. Ceci étant dit, le problème lié à la discrimination au sein de son entreprise reste entier. Mais cela concerne un autre débat.

 

 

  • 3 : L’accès à la sécurité sociale

On rencontre un dernier problème concernant l’accès au marché du travail qui est l’inégalité en matière de retraite. Lorsque le transsexuel souhaite changer de sexe celui-ci est contraint le plus souvent à divorcer afin de suivre un traitement de conversion. Ainsi, le transsexuel n’aura pas le droit de toucher sa pension de réversion alors même qu’il a dû divorcer contre son gré.

 

 

 

Conclusion :

Pour conclure ce travail, Jusqu’à une époque récente, les rapports entre l’état civil et le sexe semblaient justifiés. « Le corps humain […] présente un trait remarquable, et certainement scandaleux, qui est la différence sexuée et le rôle différent des sexes dans la reproduction. […] Il s’agit là d’un butoir ultime de la pensée, sur lequel est fondé une opposition conceptuelle essentielle : celle qui oppose l’identique au différent, un de ces thematha archaïques que l’on retrouve dans toute pensée scientifique ancienne comme moderne, et dans tous les systèmes de représentation »[65].

Mais en raison de l’émergence du transsexualisme que la question de l’identité sexuelle s’est posée. En effet, le contentieux qui est apparu à propos des transsexuels concerne la possibilité de changer la mention du sexe inscrite dans les actes de l’état civil. Cela remet en cause la vision que la société pouvait avoir du sexe qui n’était perçu jusque là que comme un moyen d’identification physique d’une personne.

Désormais, avec le transsexualisme, il faut aussi prendre en compte le caractère psychologique de l’identité de la personne. Il faut ainsi étudier les raisons qui peuvent justifier la différenciation du sexe à l’état civil, afin de voir s’il n’est pas plus judicieux d’intégrer une identité de genre.

Mais ce projet se heurte au rôle traditionnel de l’état civil qui est avant tout probatoire. L’état civil a pour rôle premier « de constater de manière authentique, sur des registres tenus à cet effet, les principaux événements dont dépend l’état des personnes »[66].

Mais le rôle de l’état civil ne peut être réduit à des registres. Outre cette fonction classique d’identification des individus, son rôle est aujourd’hui en pleine mutation : « alors que celui-ci n’était naguère envisagé que comme un moyen de preuve de l’identité civile, il occupe désormais un rôle reconnu dans la constitution de l’identité psychologique »[67].

Une autre approche préconise d’appréhender l’état civil comme « l’ensemble des qualités inhérentes à la personne que la loi civile prend en considération pour y attacher des effets de droit »[68]. Cette approche opère une sélection des éléments pour ne retenir que ceux qui constituent certaines conditions d’application des règles juridiques. L’état civil devient ainsi « l’instrument qui regroupe certaines conditions d’application des règles juridiques »[69].

Il ne s’agit pas de remettre en cause la vocation du sexe en tant qu’élément d’identification de la personne, mais de vérifier dans quelle mesure il est nécessaire que cet élément figure dans l’état civil. La nécessité de mentionner le sexe dans l’état civil ne s’explique que si la différence des sexes emporte l’application d’un régime juridique particulier.

Mais l’état actuel du droit positif révèle que le fait d’appartenir à un sexe plutôt emporte peu de conséquences sur le statut juridique de la personne. En effet, Les règles discriminatoires qui accordaient à la femme un statut juridique inférieur à celui de l’homme sont de plus en plus refoulées pour faire place l’égalité des sexes dés le XXe siècle[70]. L’égalité des sexes, qui est aujourd’hui consacrée par la Constitution, notamment dans le Préambule de 1946, s’est peu à peu affirmée dans les différentes branches du droit.

 

[1] Civ. 6 avr. 1903, DP 1904 I.395, concl. Baudoin ; S. 1904. 1. 273, note A. Walh

[2] En ce sens, voir R. Stoller, Recherches sur l’identité sexuelle à partir du transsexualisme, Gallimard, 1978, p. 28

[3] Comp. C. Fortier et L. Brunet, Changement d’état civil des personnes « trans » en France : du transsexualisme à la transidentité : Droit des familles, genre et sexualité, Anthémis, 2012, p. 63

[4] R. Stoller, Recherches sur l’identité sexuelle à partir du transsexualisme, Gallimard, 1978, p. 28

[5] T. Hammarberg, Droits de l’homme et identité de genre, oct. 2009, p. 6 ; Principes de Jogjakarta, mars 2007, p. 6, note n° 2.

[6] CA Paris, 18 janvier 1974: D. 1974, jurispr., p. 196, concl. Granjon

[7] M.Gobert, Le transsexualisme, fin ou commencement, JCP 1988 I. 3361 et, Le transsexualisme ou la difficulté d’exister, JCP 1990. I 3475

[8] Irma Arnoux, « Les droits de l’être humain sur son corps », Presse Universitaire de Bordeaux, Pessac, 2003, p. 121

[9] L. Bereni, S. Chauvin, A. Jaunait et A. Revillard, Introduction aux Gender Studies, De Boeck, 2008, p. 25 ;

  1. Picquart, Ni homme ni femme, Enquête sur l’intersexuation, La Musardine, 2009, p. 109

[10] Voir notamment G. Houbre, Dans l’ombre de l’hermaphrodite : hommes et femmes en famille dans la France du XIXe siècle : Clio 34/2011, p. 85

[11] CA Montpellier, 8 mai 1872 : DP 1872, 2, p. 48 ; CA Douai, 14 mai 1901 : S. 1901, 2, p. 303 ; Trib. civ. Alais (aujourd’hui Alès), 23 janvier 1873 : DP 1882, 3, p. 71 ; contra CA Caen, 16 mars 1882 : DP 1882, 2, p. 155

[12] Cass. civ., 6 avril 1903  op cit

[13] Cass. 1re civ., 16 décembre 1975 : Bull. civ. I, n° 374 ; D. 1976, jurispr. p. 397, note R. Lindon (1re esp.).

[14] Cass. 1re civ., 7 juin 1988 ; Cass. 1re civ., 10 mai 1989

[15] C. civ., art. 57, al. 1er.

[16] É. Badinter, Fausse route : Odile Jacob, p. 196

[17] Voir D. Lochak, « Dualité de sexe et dualité de genre dans les normes juridiques », p49

[18] N. Rubel, « Désexuation de l’état civil, laïcisation du droit sexuel », p.282

[19] D. Borrillo, « Le sexe et le droit: de la logique binaire des genres et la matrice hétérosexuelle de la loi », p.263

[20] G. Nicolau, « Genre du droit/ Genres de droits », p. 29

[21] L. Ortiz, « A propos du genre: une question de droit », p.4

[22] D. Lochak, « Dualité de sexe et dualité de genre dans les normes juridiques », p.43

[23] D. Borrillo, « Le sexe et le droit: de la logique binaire des genres et la matrice hétérosexuelle de la loi », p.267

[24] CA Paris, 18 janvier 1974: D. 1974, jurispr., p. 196, concl. Granjon

[25] Civ. 1ere, 16 décembre 1975, JCP 1976. II. 18503 ; Astrid Marais, « Droit des personnes », Dalloz, 2012, pages 100

[26] Civ. 1Ere, 30 novembre 1983, JCP. 1984 20222, obs. J. Penneau

[27] Civ. 1ère, 3 et 31 mars 1987, D. 1987 445 note P. Jourdain

[28] Cass. 1re civ., 21 mai 1990 : JCP G 1990, II, 21588, rapp. J. Massip ; concl. F. Flipo

[29] CEDH, 25 mars 1992, req. no 13343/87, Botella c/ France, D. 1993. 101, note J.-P. Marguénaud  , JCP 1992. II. 21955, note T. Garé, D. 1992. Somm. 325, obs. J.-F. Renucci  , RTD civ. 1992. 540, obs. J. Hauser

[30] Cass., ass. plén., 11 déc. 1992, 2 arrêts, nos 91-11.900   et 91-12.373  , Bull. civ., no 13, JCP 1993. II. 21991, concl. Jéol, note G. Mémeteau, RTD civ. 1993. 97, note J. Hauser  , Defrénois 1993. 431, note J. Massip

[31] aff. Von Oosterwijck (Etat belge) Rapport, 1er mars 1979, Série B, vol. 36, § 59 ; V. Aussi aff. Rees, Serie A, n°106, n°39 et s

[32] G. Goubeaux, Traité de droit civil, Les personnes, LGDJ, 1990, n° 262

[33] CA Paris, 8 décembre 1967, JCP 1968, II, 15518 bis, note P. N. ; D. 1967, p. 289 ; RTD civ. 1968, p. 536, obs. R. Nerson. Adde J.-P. Branlard, Le sexe et l’état des personnes, Aspects historique, sociologique et juridique, LGDJ, coll. Bibl. dr. priv., T. 222, 1993, préf. F. Terré, nos 1810 et s

[34] TGI Dijon, 2 mai 1977, Gaz. Pal. 1977, 2, jur. p. 577 ; TGI Paris, 7 décembre 1982, Gaz. Pal. 1983, 2, p. 607, note G. Sutton ; CA Paris, 24 février 1978, JCP 1979, II, n° 19202, note J. Penneau ; CA Versailles, 22 juin 2000, JCP 2001, II, n°10595, note Ph. Guez ; RTD civ. 2001, p. 849, obs. J. Hauser

[35] J. Petit, L’ambiguïté du droit face au syndrome transsexuel, RTD civ. 1976, p. 263 ; D. Thouvenin, Le transsexualisme, une question d’état méconnue, RD sanit. soc. 1979, p. 291 ; L. Linossier, Le transsexualisme : esquisse pour un profil culturel et juridique, D. 1981, chron. p. 139 ; M. Gobert, Le transsexualisme, fin ou commencement ?, JCP 1988, I, 3361

[36] Circ. DACS n° CIV/07/10, 14 mai 2010 relative aux demandes de changement de sexe à l’état civil : Rev. Droit et santé 2010, n° 36, p. 379

[37] CA Rennes, 26 octobre 1998

[38] CA Nancy, 11 octobre 2010

[39] CCF, art 60

[40] CEDH, 24 janv. 1992, B. contre France : JCP G 1992, II, 21955, note T. Garé

[41] CA Toulouse, 11 oct. 1978 : D. 1980, inf. rap. p. 324. – CA Toulouse, 3 août 2000 : D. 2001, inf. rap. p. 179.

[42] CA Nancy, 14 nov. 2003 : JCP G 2004, IV, 3034

[43] Civ. 1ere, 13 mars 2007, Bull. Civ. I, n°113

[44] TGI Caen, 28 mai 2001

[45] J. MASSIP, « dissolution du mariage pour cause de transsexualisme », Petites affiches, 12 avril 2001 n° 73, P. 20

[46] TGI Brest, 15 déc. 2011

[47] C. Neirinck, Les caractères de l’état civil, in L’état civil dans tous ses états, LGDJ, Droit et société, n° 47, 2008, p. 51

[48] C. const. allemande, 27 mai 2008, 10/05

[49] C. const. autrichienne, 18 juill. 2006, BVerfG, 1BvL 1/04

[50] Rapport du Commissaire aux droits de l’homme, Droits de l’homme et identité de genre, Conseil de l’Europe, 2009, p. 22.

[51] J. POUSSON-PETIT, L’identité de la personne humaine, p.737. On y retrouve les arrêts de la CEDH, Rees du 17 octobre 1986, Cossey du 24 septembre 1990, et Sheffield et Horsham du 30 juillet 1998. Ces arrêts rappellent que le mariage est l’union de deux personnes de sexe biologique différent

[52] Astrid Marais, « Droit des personnes », Dalloz, 2012, pages 106

[53] CA Papeete, 1er septembre 2011, JCP 2011. 1132, note P. Gourdon

[54] TGI Brest, 15 déc. 2011

[55] Cass., ass. plén., 11 déc. 1992, JCP 1993. II. 21991, concl. Jéol et note G. Mémeteau

[56] CA Paris, 2 juillet 1998, préc

[57] CEDH, 30 novembre 2010, n°35159/09, Dr. fam. Janv. 2011, n°1, al. 3, obs. M. Bruggeman

[58] Civ 1ere, 18 mai 2005, Bull. Civ. I, n°211

[59] Aix-en-Provence, 12 mars 2002, D. 2003, p. 1528, note E. Cadou, Dr. fam. 2003, no 100, note P. Murat

[60] C.E.D.H., 22 avril 1997, X, Y, Z c/ Royaume-uni, Recueil des arrêts et décisions 1997-II/ 619, § 52

[61] Trib. adm. Versailles, 16 juin 1992, Revue trimestrielle de la Cour d’appel de Versailles 1993, no 28, p. 63, note I. Rouvière-Perrier

[62] CEDH, 22 janvier 2008,D. 6. 351

[63] Trib. gr. inst. Marseille, 27 janvier 1982, J.C.P. 1983. II. 20028, obs. J. Penneau

[64] Whittle, S, Turner, L, Al-Alami M, Engendered Penalties: Transgender and Transsexual People’s Experiences of Inequality and Discrimination, Wetherby, The Equalities Review, 2007

[65] F. Héritier, Masculin/féminin : la pensée de la différence, Odile Jacob, 1996, p. 17-18

[66] A. Lefebvre-Teillard, v° état civil in Dictionnaire de la culture juridique (dir. D. Alland et S. Rials Quadrige/Lamy/PUF, 2003

[67] D. Gutman, Le sentiment d’identité, LGDJ, coll. Bibl. dr. priv., T. 327, 2000, préf. F. Terré, n° 234. Adde A. Lefebvre-Teillard, op. cit. et A.-M. Leroyer, La notion d’état des personnes, in Ruptures, mouvements et continuité du droit, Autour de Michelle Gobert, Économica, 2004, p. 247, spéc. nos 27 et s

[68] V° état civil in Vocabulaire juridique H. Capitant, Quadrige/PUF, 2001. Rapp. M. Planiol, G. Ripert et R. Savatier, Traité pratique de droit civil français, T. 1, Les personnes, LGDJ, 1952, n° 13

[69] G. de la Pradelle, L’Homme juridique, PU Grenoble/F. Maspero, 1979, p. 146

[70] L. Leveneur, La différenciation des sexes en droit privé contemporain, in Le sexe, la sexualité et le droit, Actes du XVIIe colloque national de la Confédération des Juristes Catholiques de France, Pierre Téqui éditeur, 2002, p. 45, spéc. p. 52 et s

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