Le Handicap au sein des Familles : Défis et Perspectives d’Intégration Sociale
« Acceptation du handicap de l’enfant par sa famille »
PARTIE I : INTEGRATION DE L’ENFANT HANDICAPE AU SEIN DE SA FAMILLE
Section 1 : Les perceptions négatives envers le handicap de l’enfant
- Traumatisme parental face au handicap de leur enfant
- Réactions de la fratrie
- Concept de surcharge
- Handicap comme stigmate (concept de stigmatisation)
Section 2 : Acceptation du handicap de l’enfant par sa famille
- Prise en charge de l’enfant handicapé par ses parents (non exclusion)
- Renforcement de la fratrie avec l’enfant handicapé
– intervention de la communauté pour l’acceptation ou intégration de l’enfant handicapé dans la famille
PARTIE II : RESULTATS DE PRE ENQUETE SUR LE TERRAIN ET ANALYSE
Section 1 : Résultats d’une enquête auprès d’une famille ayant un enfant handicapé
- Le handicap et les principales caractéristiques de l’enfant
- Le handicap et les différentes réactions sociales
Section 2 : Résultats de l’enquête au niveau d’un centre pour assistance sociale
- L’assistance sociale dans sa généralité
- Le handicap et les réactions des membres de la famille
Section 3 : Analyse des données et actions nécessaires à entreprendre
- Conséquences sur la vie en générale de la famille
- Les actions possibles et nécessaires à entreprendre
INTRODUCTION
La présence d’un enfant handicapé provoque des changements profonds au sein d’une famille. Des tensions et des stress peuvent en effet survenir.
L’Organisation Mondiale de la Santé ou OMS définit le handicap comme une déficience qui correspond à toute perte de substance ou altération d’une structure ou fonction psychologique, physiologique ou anatomique. En outre, le handicap est une incapacité qui correspond à toute réduction partielle ou totale de la capacité d’accomplir une activité d’une façon ou dans les limites considérées comme normales pour un être humain. Enfin, le handicap se définit comme un désavantage social pour un individu, qui résulte d’une déficience ou d’une incapacité qui limite ou interdit l’accomplissement d’un rôle normal.
Dans notre recherche, nous avons ciblé comme échantillon de population les enfants atteints de handicap mental, qui se définit comme étant la conséquence d’une déficience intellectuelle. Le handicap mental ne peut se soigner mais il peut être compensé par des aménagements de l’environnement ainsi qu’un accompagnement humain. Ses origines peuvent être diverses- héréditaire, génétique, prénatale, postnatale,…- mais dans 30% des cas, elles restent inconnues. En outre, le handicap mental se distingue du handicap psychique qui est la conséquence d’une maladie mentale.
La loi du 11 février 2005 relative aux personnes handicapées définit que « toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d’un poly-handicap ou d’un trouble de santé invalidant aura un statut particulier lié à sa pathologie ».
Le handicap n’est pas seulement un problème qui se présente pour les handicapés, pour les parents, ni le problème des seuls spécialistes, c’est à la société toute entière que l’existence en son sein de handicapés crée les plus larges obligations. Malheureusement, le handicap reste encore un tabou dans notre société actuellement.
Le modèle social du handicap induit un certain changement de valeurs et pratiques de la société, dans le but de lever la barrière -sur l’insertion sociale de la personne handicapée- qui entrave l’épanouissement du handicapé. En effet, les principaux problèmes des handicapés dérivent surtout des barrières que pose la société à leur égard, à savoir les préjugés et les stéréotypes.[1] Les personnes handicapées deviennent réellement handicapées de par leur environnement, les attitudes de cet entourage, les politiques, les pratiques et les organisations de leur société.
La naissance d’un enfant handicapé déclenche aussi bien chez les parents que les enfants toute une série d’émotions, de sentiments, de comportements ou d’attitudes. Beaucoup d’enfants voient le jour avec un haut risque d’handicap, notamment dans la région Ile-de-France. Un recensement effectué par l’OMS indique en effet que chaque année, en Ile-de-France, sur 174 000 naissances, on compte environ 1% d’enfant à haut risque d’handicap du fait de leur grande prématurité. Il a été noté que 20 à 35% des déficiences sévères de l’enfant sont d’origine prénatale. De plus, 5 à 10% de ces déficiences résultent de circonstances post- néonatals en lien soit avec un traumatisme ou dans des cas plus rares à une infection ou tumeur.
Les parents ou plus précisément la famille de l’enfant handicapé sont souvent confrontés à des chocs lors de la connaissance de ce handicap. Certaines personnes arrivent à accepter, ou au moins à comprendre la situation. Par contre, d’autres ressentent un sentiment négatif voire discriminatoire envers l’enfant handicapé. Les réactions et sentiments éprouvés par les membres de la famille dérivent souvent de la manière dont l’interlocuteur, notamment les médecins, va avoir sur la pathologie. Les familles réagissent chacune à leur manière en fonction de leur histoire, de leur vécu et de la représentation qu’elles ont de cet handicap.
Par ailleurs, il est équitable que l’enfant handicapé soit traité et considéré comme tous les autres enfants. Les enfants ayant un handicap sont semblables aux autres enfants. Il arrive des fois que les familles ayant un enfant handicapé nécessitent un accompagnement. Dans cette optique, il est d’une importance majeure que les travailleurs sociaux interviennent et prennent part pour le soutien de ces familles.
Les parents sont les premiers à apporter l’élément affectif indispensable à l’épanouissement de l’enfant et plus particulièrement de l’enfant handicapé. A cet effet, ils restent le refuge de ce dernier contre la sècheresse, la monotonie de sa vie. La difficulté extrême pour les parents d’assumer le handicap de leur enfant demeure souvent un facteur handicapant supplémentaire dont le retentissement sur le comportement ultérieur du handicapé peut être très important.
Le devoir social d’aide aux familles dans l’intégration de l’enfant handicapé au sein de la famille et de la société se trouve primordial. La société a intérêt à prendre conscience de sa responsabilité particulière. L’intégration demeure un objectif, non pas comme une fin mais plutôt comme le moyen d’un plus grand épanouissement. Il est nécessaire qu’il y ait des conditions grâce auxquelles se trouvera compensé ou atténué le désavantage ou l’infériorité des handicapés par rapport aux conditions normales d’action ou d’existence.
En outre, les handicapés ont droit à la vie et au respect dans toutes les circonstances de leur vie. Le respect des handicapés pourrait se traduire au fait de veiller à ce qu’ils n’aient pas à supporter l’inégalité. De plus, le droit à la vie des handicapés c’est surtout prioritairement celui d’une prise en charge médicale et éducative aussi précoce que possible. Dans la plupart du temps, les handicapés n’ont pas vraiment besoin d’ « assistance » mais plutôt et surtout de compréhension. C’est dans ce sens qu’il importe de leur donner les moyens d’assumer leur différence et de vivre.
Il convient de permettre aux handicapés de s’épanouir en fonction de leurs potentialités même si cet épanouissement suppose une modification de l’organisation couramment admise pour les non handicapés.
L’adaptation familiale au handicap se trouve une problématique multidimensionnelle.
A travers nos expériences professionnelles au domicile des familles, nous avons assisté bien souvent au désespoir- la question « pourquoi nous ? » est souvent évoquée-, au rejet mais quelquefois à l’acceptation de la venue d’un bébé handicapé dans une famille.
Notre démarche est de comprendre pourquoi malgré la mise en place des politiques sociales en faveur des personnes handicapées, les familles connaissent encore des difficultés. Il est également dans notre intérêt de comprendre les trajectoires familiales à travers les transformations des liens familiaux lorsqu’un membre de la famille est atteint d’un handicap. En tant que future professionnelle Assistante de Service Social (ASS), ceci constitue un intérêt particulier pour nous. Centrée sur la famille, une telle question se trouve en lien direct avec notre future pratique. En effet, notre enjeu professionnel est de bien évaluer les situations réelles des familles pour pouvoir proposer des actions adaptées aux familles. Par ailleurs, notre intérêt est axé sur les facteurs qui peuvent conditionner ou favoriser la réussite d’un accueil d’enfant porteur de handicap au sein de sa famille.
Quelle est la place de la personne atteinte de handicap dans la société ? Pourquoi, malgré la mise en place des politiques sociales, les familles connaissent autant de difficultés ? Quel impact ou quelle place peut avoir un travailleur social dans l’accompagnement de ces familles ?
En tout, nous pouvons nous demander, pourquoi à situation économique équivalente, certaines familles parviennent à composer avec le handicap de leur enfant alors que d’autres sont dans le rejet de la différence. C’est en effet notre question de départ.
Autant de questions nous mènent à aborder dans une première partie l’intégration de l’enfant handicapé au sein de sa famille. Il a été aperçu que pour les parents dits « normaux » ; il était quelquefois difficile d’accepter le handicap de leur enfant, il est ainsi essentiel d’appréhender le concept d’intégration afin de comprendre la raison pour laquelle il représente l’axe principal dans la législation liée aux handicaps.
Dans la deuxième partie, nous allons présenter les résultats de pré- enquête sur terrain, tout en analysant ces résultats pour tenter de répondre à toutes ces questions.
La réalisation de notre travail s’appuie sur des recherches bibliographiques et des enquêtes sur terrain.
Les enquêtes exploratoires nous ont permis d’échanger avec différentes personnes. Ces enquêtes vont en effet éclairer notre question de départ.
PARTIE I : INTEGRATION DE L’ENFANT HANDICAPE AU SEIN DE SA FAMILLE
Malgré le fait qu’un enfant soit né handicapé, il est évident et normal qu’il soit intégré dans sa propre famille. Tous les enfants issus des mêmes parents doivent être nécessairement adoptés de la même façon. La famille est essentielle au développement de l’enfant. Elle est, en effet, à l’origine des actions à initier en faveur de cet enfant. Dans la réalité, il existe des perceptions négatives à l’égard du handicap de l’enfant, mais il se trouve également que certaines familles acceptent ce handicap.
Avec le recul, nous pouvons concevoir que la présence d’un enfant handicapé puisse avoir un impact sur tous les membres de la famille. Par ailleurs, il est reconnu que la famille est un tout et que ses membres s’influencent mutuellement. Le vécu de chaque membre de la famille teinte également la dynamique familiale. Aussi, conscient du fait que la déficience d’un des membres de la famille entraîne des bouleversements d’une importance capitale, il est nécessaire de considérer la dimension familiale, notamment le vécu familial dans l’intégration sociale d’un enfant handicapé.
Dans notre travail, nous allons surtout nous intéresser sur le cas des enfants subissant un handicap mental, en particulier les enfants âgés de 0 à 6ans. Selon la classification internationale des handicaps, le handicap mental ou déficience mental ou « déficience de l’intelligence » se définit par les perturbations du degré de développement des fonctions cognitives telles que la perception, l’attention, la mémoire et la pensée ainsi que leur détérioration à la suite d’un processus pathologique. Pour l’Union Nationale des Associations de Parents et Amis de Personnes Handicapées ou UNAPEI, le handicap mental se traduit par des difficultés plus ou moins importantes de réflexion, de conceptualisation, de communication et de décisions.
Section 1 : Les perceptions négatives envers le handicap de l’enfant
- Traumatisme parental face au handicap de leur enfant :
Lors de la connaissance de l’handicap d’un enfant, presque les parents subissent une profonde blessure narcissique. Les parents sont, en général, sous le choc qui se manifeste par des émotions très vives voire parfois extrêmes. Toutefois, nous pouvons dire que ces réactions sont normales.
La naissance d’un enfant avec un handicap provoque souvent un effondrement des rêves des parents et bouleverse tout autant les projets d’avenir imaginés par ces derniers. L’enfant handicapé est considéré comme un enfant que les parents n’auraient jamais rêvé d’avoir. Dans ce sens, les parents sont contraints de vivre une pénible confrontation entre les désirs qu’ils ont eus auparavant et la réalité en face. Certaines personnes cherchent les moyens de fuir la réalité.
Lors de l’annonce du handicap aux parents, ceux-ci ont souvent du mal à comprendre ou à seulement entendre ce qui est dit. Certains parents semblent même perdre tout contact avec la réalité pour un instant.
Les parents éprouvent souvent un sentiment de choc, de confusion, voire de déception. Parfois même, on rencontre des réactions extrêmes de la part de ces parents. En outre, la naissance d’un enfant handicapé implique une anxiété et une grande douleur pour les parents. Il est triste de voir qu’il existe des parents qui nient l’identité de l’enfant. Pire encore, certains souhaitent la mort de l’enfant handicapé ou envisagent tout de suite comme solution un emplacement en institution. En effet, le sentiment de colère, de l’hostilité et de ressentiment peut porter les parents au rejet de leur enfant et au désir du décès de ce dernier.
Nous pouvons donc dire que la venue d’un enfant avec un handicap provoque un choc ainsi qu’une certaine négation au niveau des parents.
En considérant le choc subi par les parents, nous savons que les parents attendent un enfant normal ou désirent un enfant « sain ». Par conséquent, la naissance d’un enfant handicapé signifie pour eux la perte de l’enfant normal. A cet effet, il est normal qu’un processus de deuil de l’enfant désiré prenne place. L’enfant handicapé est alors indirectement considéré comme un enfant non désiré, voire indésirable. Par ailleurs, dû au choc ou à la déception significative, il se peut que les parents aient une explosion émotive ou expriment une indifférence apparente à l’égard de l’enfant. Il y a ici un risque d’ignorance de l’enfant. La connaissance du handicap de l’enfant peut également générer des sentiments d’affolement, d’égarement et de confusion. De plus, certains parents montrent une réaction émotive de non-réceptivité face au handicap de leur enfant.
Pour la négation provenant des parents, certains d’entres eux souffrent au point de nier la condition de l’enfant en devenant trop ou pas assez optimiste à l’égard du potentiel de développement de l’enfant.
Outre ces problèmes, les parents ressentent un désespoir ainsi qu’une colère. Ils se sentent, dans ce cas, inadéquats et coupables et ils tendent à se douter d’eux-mêmes. Ces sentiments peuvent avoir des impacts négatifs sur la vie familiale.
A travers ces différents faits, nous pouvons dire que des parents ne sont pas en mesure de s’adapter au handicap de leur enfant. En d’autres termes, il existe une grande inadaptation de leur part. Cette inadaptation se manifeste souvent par une incapacité des parents à faire face aux problèmes occasionnés par le handicap de leur enfant. Ils sont en fait confrontés à de multiples responsabilités incontournables. Certains parents sont vraiment loin de s’adapter à la situation du fait du manque d’argent pour prendre soin de l’enfant. Nous savons bien que la prise en charge d’un enfant handicapé nécessite une très grande attention provenant de leur parent mais également et surtout une somme d’argent non négligeable pour assurer tous les soins nécessaires. De plus, cette inadaptation peut se traduire et se manifester sur la vie de couples des parents. Plus précisément, l’inadaptation à la situation induit à des difficultés conjugales.
Par ailleurs, lorsqu’il devient évident que la situation est inévitable, les parents tendent à faire face à différentes sortes et différents niveaux de problèmes. Du fait du désespoir, de la tristesse, de l’anxiété, de la honte continuels certains parents ne parviennent plus à fonctionner normalement dans leur vie quotidienne. Par exemple, ils ont une incapacité de fonctionner normalement à leur travail. Au niveau de la société, ces sentiments amènent les parents à se replier sur eux-mêmes et à ne plus oser planifier des projets. Les parents souffrent également du regard que peuvent apporter les autres sur eux.
Enfin, étant donné que la naissance d’un enfant handicapé est évidente, ceci représente un impact sur la crainte des parents d’avoir encore un enfant handicapé. Le traumatisme hante les parents.
Ainsi, beaucoup de parents ont du mal à accepter le handicap de leur enfant. La connaissance de cette situation implique toujours, et chose normale, à un choc et un désespoir pour les parents. Ces derniers sont traumatisés à l’idée qu’ils vont avoir un enfant handicapé à prendre en charge. Des sentiments de colère, d’hostilité, de honte, d’anxiété, de tristesse peuvent être présents au niveau des parents.
- Réactions de la fratrie :
La fratrie joue un rôle important dans l’intégration de l’enfant handicap dans la famille. La présence d’un enfant handicapé peut avoir un impact sur tous les membres de sa familles, notamment ses frères et sœurs. Ce ne sont pas seulement qui évoquent des perceptions négatives envers le handicap d’une enfant mais ses frères et sœurs également. Ce sont surtout les enfants qui éprouvent des sentiments pas très bons envers leur frère ou sœur handicapé. De plus, les enfants ne peuvent totalement cerner et comprendre l’existence d’un enfant handicapé au sein de la famille. En effet, cette fratrie joue un rôle important dans la vie intrapsychique, intersubjective et concrète des personnes durant toute une vie. Par contre, il est à noter que la présence de la fratrie et leur appui peut améliorer la vie de l’enfant handicapé.
La plupart du temps, la naissance d’un enfant handicapé engendre la présence d’émotions mixtes à savoir la tristesse, le sentiment de culpabilité et d’injustice.
Un sentiment d’inconfort peut souvent être rencontré au niveau des frères/ sœurs d’un handicapé surtout sur la question de leur identité. Brusset (1987) affirme que « dans la logique des relations fraternelles, vouloir comprendre son frère c’est tenter de se comprendre soi-même, se définir en négatif »[2]. A cet effet, il est difficile pour l’enfant non handicapé de se référer au frère/sœur handicapé.
Les frères et sœurs d’un enfant handicapé sont confrontés à des problèmes psychologiques ou des problèmes d’identité face à l’enfant handicapé. Par ailleurs, un ressentiment[3] peut se produire au niveau de la fratrie. Ce ressentiment peut toutefois engendrer la colère au point de souhaiter le départ ou la disparition de l’enfant handicapé. Il arrive même des fois que l’enfant « normal » considère l’enfant handicapé comme source de tous les problèmes au sein de la famille. A part cela, la présence d’un enfant handicapé dans la famille est prise par les enfants comme une honte[4]. Ils ont en effet peur du regard des autres et des préjugés que peuvent faire les autres sur eux et tous les membres de la famille. La honte du regard des autres, de la différence est en effet très culpabilisante, car elle affecte l’image que l’on fait de soi et de celui qu’on aime, et qu’on doit aimer. La honte est aussi souvent mal tolérée par les parents, car elle renvoie à leur propre honte.
En outre, certains enfants sont hostiles vis-à-vis d’un frère ou d’une sœur handicapé(e). A cet égard, ces enfants montrent des gestes assez alarmants envers l’enfant handicapé et les parents. A l’instar, il se trouve que ces enfants disent des paroles ou font des gestes qui peuvent blesser l’enfant handicapé. Envers leur parent, les enfants « normaux » tendent à manifester une désobéissance, une insolence ou des réactions agressives.[5]
Du côté de la relation avec les parents, il y a un certain sentiment d’exclusion de la dyade aimante (amour de la mère à l’enfant)[6]. Puisqu’il existe un enfant handicapé dans la famille, les autres enfants ou la fratrie ont peur de perdre leur place et l’affection de leur parent. Aussi, la venue d’un enfant handicapé fait aussi naître une jalousie exprimée par les enfants « normaux ». Les frères et sœurs ont souvent du mal à accepter que l’enfant handicapé reçoive une plus grande attention de leur mère et que sa présence peut leur imposer des contraintes sociales non voulues.
Ensuite, les frères et sœurs aînés ont souvent tendance à surinvestir leur frère ou sœur handicapé (e). De ce fait, ils deviennent plus anxieux et s’imposent des limites dans leur propre vie. En particulier, les sœurs plus âgées ont une plus grande disposition aux troubles psychiques ou aux problèmes de relation avec leurs pairs.
Pour les enfants « normaux », la naissance d’un enfant handicapé provoque en eux un sentiment de culpabilité[7]. Les enfants se sentent coupables par rapport au handicap, et ce pour plusieurs raisons. Ils se sentent en effet coupables de ne pas pouvoir consoler leurs parents et généralement d’aider à la situation. Par ailleurs, ces enfants ressentent un sentiment de culpabilité d’être normaux, ils se sentent souvent responsables du handicap. De plus, le fait d’être compétent et de dépasser largement les capacités de leur frère handicapé provoque en eux une culpabilité importante.
- Concept de surcharge :
La sensation d’être débordée par les événements ou d’avoir un poids sur les épaules peut être exprimé par les parents ayant à leur charge les soins d’un enfant handicapé. La présence d’un enfant handicapé dans la famille entraine de nombreuses répercussions sur la vie sociale et quotidienne da toute la famille. Dans la plupart du temps, la naissance d’un enfant handicapé suppose une surcharge pour la famille concernée.
Mais qu’en est-il de la surcharge ? La surcharge est un concept spécifique à la situation du donneur de soins, qui sont les parents, et représente une mesure plus sensible des effets de la prise en charge du soin. Selon Montgomery (1989), la présence d’une personne dépendante, de l’enfant handicapé dans notre cas, est en soi oppressive ou surchargeante et qu’elle constitue un coût à payer pour la famille[8]. Ainsi, la surcharge se mesure par une évaluation de la distance sociale et le stigmate du handicap vécu par la famille. De plus, la surcharge se traduit par quelque chose de négatif pour les parents qui doivent procurer les soins nécessaires.
Par ailleurs, le concept de surcharge peut être vu sous deux angles distincts à savoir la surcharge objective et la surcharge subjective :
- La surcharge objective concerne les responsabilités actuelles et les coûts observables qui sont les conséquences de la prise en charge des soins. Cette surcharge se rapporte aux événements concrets et aux activités directement reliés à la prise en charge des soins. Elle correspond aux bouleversements dus à la présence de l’enfant handicapé sur la vie quotidienne de la famille. En effet, la présence d’un enfant handicapé implique de nombreuses demandes faites à sa famille et provoque des impacts sur les ressources familiales.
- La surcharge subjective se traduit par les coûts ressentis par la personne qui prend en charge l’enfant handicapé, l’appréciation à partir du jugement du donneur de soins (ou les parents). La surcharge subjective concerne le coût psychologique que doit payer la personne qui vit et qui s’occupe de l’enfant handicapé intellectuel. En quelque sorte, la surcharge subjective est la perception qu’a le donneur de soins de l’impact de cette prise en charge sur sa santé émotionnelle et physique, sa vie sociale et ses finances.
Par ailleurs, quand la famille possède un enfant handicapé, ceci affecte la ressource financière de celle-ci. L’argent est un facteur important qui agit sur l’adaptation des parents à l’enfant handicapé et qui leur permet d’atteindre une meilleure qualité de vie. En effet, la présence de soucis financiers accentue la difficulté des parents à faire face aux stress physique et émotionnel reliés à la prise en charge des soins de l’enfant handicapé.
Des études ont montré que dans certains cas, la condition financière de la famille est exacerbée par sa situation économique. La famille endosse un stress suite à l’augmentation des dépenses qu’elle a à supporter. De plus, parfois l’un des parents doit cesser son activité professionnelle afin de prendre soin de l’enfant. Ainsi, cette perte d’une part du revenu familial renforce davantage le stress vécu au quotidien.
En outre, la prise en charge d’un enfant handicapé produit parfois un stress ou une tension au niveau de la famille. Cette tension amène à des changements cognitif, affectif, psychologique chez les parents entrainant ainsi un sentiment de surcharge. La naissance de l’enfant handicapé associée à sa prise en charge est considérée comme un agent stresseur au niveau de la famille. On peut noter que la présence de l’enfant handicapé devient un stress prolongé pour ses parents.
Il nous est utile de voir les facteurs influençant la surcharge afin de mieux cerner ce concept.
- Le niveau d’autonomie de l’enfant et la sévérité de son handicap influent beaucoup sur la surcharge que peuvent avoir les parents sur l’enfant. Nous pouvons dire que plus le handicap est sérieux, plus le stress des parents augmente. En général, l’enfant présentant une déficience intellectuelle procure plus de stress psychologique que celui qui a un handicap physique.
- Au point de vue socio-économique et des ressources financières des parents, l’enfant handicapé a un impact négatif sur les possibilités des parents de trouver un emploi et d’acquérir un revenu satisfaisant. Cette situation se fait surtout ressentir au niveau d’une famille monoparentale.
- La surcharge est également influencée par les relations existant entre les parents et l’enfant handicapé. Une intervention des travailleurs sociaux peut ainsi être utile. Il est évident que le support social réduit et atténue les effets du stress. De plus, il influence le processus d’adaptation au handicap.
La naissance d’un enfant handicapé est souvent considérée comme la naissance d’une surcharge pour toute une famille. Cette notion de surcharge affecte de façon significative les parents qui sont les premiers donneurs de soins, ils en sont même les sources. La surcharge due à la présence de l’enfant handicapé induit également des bouleversements au niveau des membres de la famille. Cette dernière ne peut pas échapper au stress au quotidien.
- Le handicap comme stigmate (Concept de stigmate ou stigmatisation) :
Pour comprendre la notion de stigmatisation, il est d’une importance majeure de prendre en compte la conception de Erving Goffman[9].
La notion de stigmatisation[10] évoquée par E. Goffman s’inscrit dans une analyse de la déviance. Cette dernière peut en effet amener aux situations d’exclusion, de ségrégation ou de marginalité. Dans cette optique, un individu ou l’enfant est qualifié de « stigmatisé » lorsqu’il présente un attribut qui le disqualifie lors de ses interactions avec les autres. Aussi, le stigmate correspond à toute caractéristique propre à l’individu qui, si elle est connue, le discrédite aux yeux des autres ou le fait passer pour une personne de statut inférieur aux autres. Nous pouvons constater donc une modification de la relation entre l’enfant handicapé et les autres membres de sa famille.
En outre, le stigmate peut être visible ou invisible. D’une part, le stigmate se rapporte aux phénomènes apparents tels que le handicap, la couleur de la peau, etc… L’individu est dans ce cas qualifié de « discrédité » et son problème est surtout de contrôler correctement l’interaction troublée par l’existence de ce stigmate. D’autre part, le stigmate invisible fait référence aux phénomènes invisibles, à savoir un passé non connu par les autres, etc… Dans ce cas, la personne est dite « discréditable ».
La rencontre ou la présence d’une personne dont le stigmate est visible nous pose souvent des problèmes quant au développement de l’interaction. A cet effet, tout ce qui est « naturel », ou tout au moins, qui peut être accompli de manière routinière devient problématique et réclame ainsi une réflexion profonde. Le stigmate visible a pour particularité de s’imposer dans la perception de l’interlocuteur. A cet effet, il en ressort une image générale du stigmatisé.
Si nous prenons le côté des personnes dites « normaux », nous pouvons tirer deux attitudes possibles. D’une part, les « normaux » peuvent considérer l’enfant handicapé comme correspondant à un type de personnes qui se présentent normalement à leurs yeux. D’autre part, si cette reconnaissance n’a pas lieu, les normaux peuvent et risquent de traiter le stigmatisé comme une « non-personne ».
Par ailleurs, le stigmate rejoint souvent le préjugé, la discrimination, l’image de soi et la représentation sociale.
La relation entre l’enfant handicapé et les membres de la société est souvent médiatisée par un jugement à priori. En effet, le préjugé est conçu comme une « attitude de l’individu comportant une dimension éducative, souvent négative, à l’égard des types de personnes ou de groupes, en fonction de sa propre appartenance sociale ». Le préjugé à l’égard de l’enfant handicapé peut ainsi être considéré comme une discrimination. Ce phénomène correspond à une attitude composée d’une croyance et d’une valeur qui se traduit dans les conduites. Ainsi, les conduites exprimées par la famille de l’enfant handicapé montrent ainsi une discrimination à l’encontre de cette personne.
Section 2 : Acceptation du handicap de l’enfant par sa famille
- Prise en charge de l’enfant handicapé par ses parents (acceptation par les parents) :
Il est souvent difficile de gérer la vie familiale lorsqu’il y a un enfant handicapé au sein de la famille. Les parents sont les premiers à s’adapter et à composer avec la situation qui se présente devant eux. Bon nombre de parents sont très vulnérables à ce point, les comportements étant évoqués dans la Section 1 de notre travail. Par contre, certains s’adaptent rapidement et accordent une acceptation à l’égard de l’enfant handicapé.
Selon Young (1977), « le degré de vulnérabilité des parents se reflète dans leur capacité individuelle de résister au stress et de réagir en situation de crise. Ainsi, la gamme de stratégies dont disposent les parents, c’est-à-dire les mécanismes à l’aide desquels ils affrontent les menaces à leur intégrité, et leur personnalité particulière déterminent de façon importante le succès de leur adaptation à la situation »[11]
Suite au handicap l’enfant, les parents se doivent de composer avec cette réalité en faisant appel à leurs propres ressources. En effet, la présence d’un enfant handicapé implique directement un besoin financier significatif. L’utilisation aux mieux des ressources financières des parents montrent qu’ils prennent en considération l’enfant handicapé. En d’autres, ils n’ignorent point l’enfant. De plus, les parents répartissent les responsabilités lorsqu’il y a un enfant handicapé dans la famille, preuve qu’ils s’adaptent et qu’ils gèrent la situation. Par ailleurs, dans certains cas, nous pouvons constater une surprotection de l’enfant par ses parents, et surtout par la mère.
L’adaptation de la famille à la situation de handicap de l’enfant se fait d’une façon progressive. La reprise des activités par les parents, la présence d’une plus grande affection pour tous les membres de la fratrie représentent cette adaptation. Dans ce cas, tous les enfants sont considérés presque de la même façon. Ceci implique qu’il n’y a pas trop de différence même si l’un d’eux est handicapé. Cette situation renforce d’autant plus la relation entre les frères et sœurs. De plus, l’adaptation progressive des parents face au handicap de l’enfant se traduit par une atténuation des sentiments négatifs. Les parents montrent petit à petit l’acceptation et l’intégration complète de l’enfant dans la famille. L’enfant est, de cette façon, non exclu du cercle familial.
En outre, l’acceptation de l’enfant se manifeste par la reconnaissance par les parents des limites et du potentiel de l’enfant. Les parents prennent en charge l’enfant, en lui procurant des actions éducatives issues de leurs propres initiatives. Il y a donc ici une participation importante des parents. Une telle participation indique en effet que les parents se sont engagés à prendre en charge et à s’occuper de leur enfant handicapé. De par ces actions, il se trouve que la situation de l’enfant est envisagée sous un angle plus positif. A cet effet, les attitudes à son égard changent également dans le sens positif. Lorsque les parents acceptent le handicap de leur enfant, ils ont toute une volonté de donner à celui-ci toutes les chances d’un développement harmonieux. Nous pouvons également constater un rapprochement des parents avec l’enfant handicapé.
Le choc du handicap et l’adaptation à cette situation ne concerne pas seulement certains membres de la famille, mais bien tous ses membres ainsi que l’unité familiale. Si les parents s’adaptent et essaient d’intégrer l’enfant handicapé dans la vie familiale, les membres de la fratrie en sont également concernés.
- Renforcement de la fratrie avec l’enfant handicapé et responsabilité:
La présence d’un enfant handicapé parmi les membres de la fratrie change les attitudes des frères ou sœurs. Ces attitudes peuvent être positives ou négatives. Les attitudes positives impliquent une acceptation par les membres de la fratrie de l’enfant handicapé.
De par la présence d’un enfant handicapé, les frères ou sœurs évoquent une attitude responsable et protectrice envers celui-ci. En effet, ces enfants deviennent plus gentils, attentionnés et responsables. Parfois, ils adoptent un rôle parental, un rôle d’éducateur par rapport à l’enfant handicapé. Nous pouvons définir ce phénomène par le terme « parentalisation »[12] des membres de la fratrie. Ces derniers prennent dans ce cas la responsabilité pour seconder les parents, les soulager du poids du handicap. L’idée est ici de compenser le handicap que les parents ont à endosser au quotidien. Cette prise de responsabilité représente évidemment la reconnaissance du handicap du frère ou de la sœur. La parentalisation de la fratrie implique une plus grande maturité des enfants. De plus, elle implique une plus grande autonomie et confiance en soi de l’enfant. Ce dernier essaie au mieux de s’adapter et de comprendre la réalité en face.
Par ailleurs, pour montrer une adaptation à la situation et pour un meilleur renforcement de la fratrie avec l’enfant handicapé, les membres de la fratrie démontre une certaine adaptation quant aux compétences et difficultés de ce dernier. Par exemple, les frères et sœurs vont se divertir avec un jeu par lequel ils peuvent tous participer, aussi bien les normaux que le handicapé. Cette situation nous montre une non-exclusion de la part de la fratrie. Les enfants évoquent même un sentiment de proximité de la famille. Cette tendance à la proximité familiale améliore davantage l’intégration et l’acceptation de l’enfant handicapé.
A part cela, la rivalité est souvent impossible entre la fratrie[13]. L’attitude et le sentiment ressenti pour l’enfant handicapé empêche souvent les enfants d’exprimer une quelconque jalousie ou agressivité vis-à-vis de l’enfant handicapé. En effet, les enfants reconnaissent le handicap de l’un d’eux et respectent celui-ci. L’enfant handicapé est assez vulnérable et les autres membres de la fratrie n’ont pas le courage de lui faire du mal.
La vie de la fratrie d’enfant handicapé peut se trouver enrichie due à la prise de conscience, de responsabilité de ces enfants. Il arrive que la fratrie développe une plus grande compétence sociale, faire preuve d’une plus grande tolérance envers les autres et démontrer de plus grandes capacités d’empathie.
Pour une meilleure adaptation de la famille au handicap de l’enfant et pour l’acceptation de celui-ci dans la famille, il est quand même important d’éviter les positions extrêmes. Plus précisément, la famille ne doit pas s’imbriquer dans la maladie comme si c’était le point central de la vie et ne pas se désengager les uns des autres. En outre, la présence d’un enfant avec handicap mobilise souvent de manière importante ses parents et sa fratrie. Cet état de fait peut favoriser une plus grande implication de tous les membres et peut générer aussi plus d’occasion de cohésion.
Tous ces faits démontrent que la famille de l’enfant handicapé est prête à l’accepter et l’intégrer dans la vie quotidienne familiale. L’enfant ne subit ainsi aucun rejet de la part de sa famille.
- Les interventions pour le soutien de la famille et pour une meilleure intégration de l’enfant handicapé dans sa famille et dans la société :
Au niveau de certaines familles, on reconnait qu’il y existe des capacités adaptatives face au handicap d’un enfant. Ces capacités correspondent en effet à un ajustement positif chez ces familles. Dans ces familles, les parents s’efforcent d’équilibrer les besoins liés à la déficience de l’enfant et de maintenir des frontières bien établies. En outre, elles essaient de développer une compétence dans la communication et reconnaitre un sens positif à la situation qu’elles ont à faire face tous les jours. De plus, nous pouvons remarquer que ces familles maintiennent une flexibilité et une cohésion familiale. Bon nombre de familles réussissent à reconnaitre et à utiliser adéquatement leurs capacités internes et externes sans avoir recours à une intervention familiale, mais d’autres non.
Pour une adaptation de la famille au handicap de l’enfant, il est souvent nécessaire que la communauté ou des professionnels interviennent, ne serait-ce que pour peu. De plus, la famille vit en communauté et il est toujours essentiel d’avoir leur soutien. L’objet d’une intervention pour le soutien de la famille concerne la famille toute entière plutôt qu’un seul de ses membres. Une intervention familiale se doit donc de considérer les besoins de tous les membres de la famille : ceux de l’enfant handicapé, des frères et sœurs, des parents comme unité. Etant donné qu’une telle intervention n’est pas l’individu, plus précisément l’enfant handicapé, mais plutôt le système familial, aucun membre de la famille ne peut être considéré comme le porteur du problème au sein de la famille.
Une éducation familiale et soutien devrait être exercée au sein de la famille. Il s’agit ici d’éduque tous les membres de la famille, fratrie incluse, au sujet du handicap de l’enfant et de voir comment composer avec le handicap. Dans cette intervention donc, il est d’emblée de fournir de l’information, du soutien instrumental et émotionnel à la famille. Les membres de la famille nécessite cette information afin qu’ils puissent comprendre la situation et adapter leurs comportements et attitudes en retour. En effet, dans une méconnaissance ou une incompréhension, la confusion peut se manifester chez les parents, de même pour les membres de la fratrie. Pourtant, ce phénomène est susceptible d’amener à un contexte relationnel chaotique. Il est ainsi possible que des tensions et conflits fraternels et familiaux apparaissent et que la fratrie rejette l’enfant handicapé.
Outre cela, la psychoéducation familiale figure parmi ces interventions utiles. Une telle intervention va permettre à la famille de mieux équilibrer les réponses aux besoins de l’enfant handicapé et à ceux des autres membres de la famille. Lorsque la fratrie voit que tous les enfants sont traités de la même façon, il leur est plus aisé de composer avec le handicap de leur frère ou sœur (adaptation à la situation particulière).
Par ailleurs, des politiques sociales sont également nécessaires pour faciliter l’acceptation de l’enfant handicapé. Des ressources sociales devraient être disponibles et aisément accessibles pour la famille. Il est important que des visites régulières soient faites à la famille pour lui fournir de support. Nous savons bien que les mères se préoccupent beaucoup de l’enfant handicapé, dans ce cadre, des lieux de sociabilité pour elles doivent être envisagés afin de faciliter les échanges entre mères et de recevoir un soutien psycho-social. A part cela, les ressources monétaires sont incontournables pour faciliter l’intégration de l’enfant handicapé dans sa famille. Un support financier plus important aux associations des parents et aux associations humanitaires œuvrant dans ce domaine devrait être priorisé.
PARTIE II : RESULTATS DES ENQUETES ET ANALYSE
Pour mieux cerner notre travail et pour avoir un cas plus réel, nous avons effectué des enquêtes sur terrain, notamment auprès d’une famille ayant à la charge un enfant handicapé et au niveau d’une structure d’accueil. Nous allons ainsi voir ces résultats et les analyser dans un deuxième temps.
La question de départ pour les deux entretiens demeure : « qu’est- ce qui explique qu’à situation économique équivalente, certaines familles parviennent à composer avec le handicap tandis que d’autres sont dans le rejet de la différence ? »
Pour la première enquête (au niveau de la famille), le questionnaire a été subdivisé en rubriques, à savoir :
- L’annonce du handicap
- La découverte du handicap
- L’évolution de la maladie
- L’adaptation familiale
- La réaction de l’entourage
- La position de la société
- Le quotidien de l’enfant handicapé avec ses parents
Pour l’enquête au niveau du centre médico-social, le questionnaire est essentiellement axé sur le cas en général des familles qui fréquentent le centre.
Section 1 : Résultats d’une enquête auprès d’une famille ayant un enfant handicapé
L’enquête présentée ci-après est une enquête auprès d’une famille recomposée.
L’entretien a été effectué avec Madame H, mère de deux enfants. Elle vit en couple avec Monsieur L, père de deux enfants dont la plus jeune, appelé J est porteur de handicap mental. Le couple travaille et ils ont élevé l’enfant J de 16 mois à 6 ans d’un accord amiable avec la mère. Cette dernière avait la charge juridiquement, mais pour des raisons de santé, n’a pas pu y faire face seule.
Il faudrait noter que pendant l’entretien, Monsieur L était présent mais n’a pas souhaité s’exprimer.
- Le handicap et les principales caractéristiques de l’enfant :
Nous allons d’abord aborder la survenue du handicap et de son évolution pour l’enquêté.
Les parents commencent à se rendre compte du handicap de leur enfant au moment où celui-ci montre des comportements qui ne sont pas en adéquation avec son âge. A cet effet, les parents commencent à consulter un spécialiste ou un médecin. La présence du handicap est alors confirmée par le médecin. Les parents de l’enfant, dans notre enquête, l’ont diagnostiqué à ses dix-huitième mois.
Dans notre cas, le handicap de l’enfant s’est manifesté par une épilepsie. Aussi, les parents ont d’abord procédé au soin de l’épilepsie. Mais, les parents se sont ensuite aperçus que l’enfant avait un retard mental, qui était dû à une maladie dite maladie orpheline. Par ailleurs, il y a une aggravation de plus en plus importante des crises d’épilepsie, puisque l’enfant handicapé grandit et que le traitement commence alors à n’être plus adapté.
Nous pouvons nous demander si ces maladies peuvent être génétique ou héréditaire. Les parents ont, en effet, pris la peine de vérifier si c’est le cas. Les parents sont enclins à faire une telle vérification pour éviter des problèmes pour la fratrie, notamment la sœur de l’enfant, et surtout prévenir son futur ou la procréation future.
Nous allons maintenant considérer la vie quotidienne de l’enfant et son avenir.
Dans sa vie quotidienne, l’enfant a quand même la joie de vivre, malgré son handicap.
Quant à ses principales caractéristiques, l’enfant handicapé mentalement est capable d’avoir une réaction d’un enfant de son âge (14 ans). Toutefois, il ne sait ni lire ni écrire. Ainsi, il serait au dessous de son âge. Il se comporte comme un enfant de la maternelle, et il arrive même qu’il joue avec des enfants de la maternelle, des petits donc. De plus, l’enfant ne sait pas parler correctement. Il a des difficultés à s’exprimer. En fait, l’enfant a des difficultés à prononcer certains mots, et la mère précise même que son langage n’est même pas un langage de bébé. Malgré ces barrières, il est quand même capable d’exprimer clairement un besoin. Il faudrait noter qu’il est capable d’avoir des réflexions d’enfants de 14 ans. Les parents essaient d’aider l’enfant à prononcer les mots, mais l’enfant finit souvent par s’énerver. Il est souvent difficile de faire répéter à un enfant un mot maintes fois.
A part cela, l’enfant handicapé peut faire des activités comme tous les autres enfants, mais seulement pas au même niveau que ces derniers. Pour l’enfant dans notre cas, il aime bien les jeux vidéo, les films. Ensuite, il chante beaucoup, il fait un peu la cuisine.
Il est évident que la présence d’un handicap chez un enfant implique des incidences sur son quotidien. Tout d’abord, l’enfant n’est pas en mesure de jouer avec un enfant normal, surtout de son âge et il lui est impossible de jouer dehors tout seul. De plus, il ne peut pas se permettre de faire des activités compatibles à son âge. Pour illustrer ce cas, il ne peut pas partir en colonie de vacances comme sa fratrie. Même s’il existe des colonies de vacances spécialisées, les parents sont incapables de payer. L’enfant devient donc très dépendant de ses parents. Suite à ces différentes situations, l’enfant commence à s’ennuyer à être toujours avec ses parents et ne pas pouvoir faire des activités comme tous les autres. Ce qui est pire encore, l’enfant handicapé est souvent rejeté par les autres enfants de son âge.
Concernant l’avenir de l’enfant, les parents espèrent quand même le meilleur pour lui. En effet, dans les structures d’accueil, l’enfant bénéficie de certaines orientations à savoir la cuisine et l’horticulture. De plus, l’enfant est assez débrouillard que les parents espèrent de lui. En tout cas, son avenir dépend en majeure partie de sa progression au niveau mental. Les parents constatent que l’enfant fait régulièrement des progrès, ce qui est encourageant.
- Le handicap et les réactions sociales :
Face à la connaissance du handicap de l’enfant, non seulement les parents mais les enfants et l’entourage ont des réactions.
Nous allons d’abord nous concentrer sur les réactions des parents et de la fratrie pour le cas qui nous intéresse.
Lors de l’annonce du handicap, il y a eu un effondrement des parents et tout de suite un rejet de la culpabilité à leur niveau. Le cas est d’autant plus complexe pour notre cas, vu que les parents se sont séparés.
Au niveau de la fratrie, l’enquête nous a permis de voir que les membres de la fratrie arrivent quand même à accepter le handicap de l’enfant, même si le frère ne joue pas avec l’enfant handicapé. Ses sœurs consacrent beaucoup de temps pour lui. Autrement dit, on rencontre une préoccupation particulière pour l’enfant handicapé de la part de sa fratrie. En plus cette considération par les demi-sœurs, sa sœur s’occupe de lui tout le temps, vu que sa vraie mère a d’autres occupations. En outre, une telle prise de responsabilité envers l’enfant handicapé produit un impact sur la vie de la fratrie. Par exemple, l’une de ses sœurs s’apprête à être une éducatrice spécialisée. Cette vocation peut évidemment avoir un lien étroit avec la présence de l’enfant handicapé dans la famille.
La présence de l’enfant handicapé dans la famille ne change pas vraiment la vie familiale. Au niveau de la vie de couple, il n’y a pas d’impacts majeurs. Etant donné aussi que le c’est une famille recomposée les deux parties du couple acceptent les enfants de l’autre tels qu’ils sont. Les parents consacrent beaucoup de temps pour l’enfant lorsqu’il est chez eux. Le couple consacre du temps pour eux lorsque l’enfant n’est pas là. De plus, c’est nécessaire pour leur vie de couple. Quant aux activités entre les membres de la famille, la famille enquêtée ne partage plus des activités ensemble surtout que les enfants sont actuellement grands.
Par ailleurs, le handicap de l’enfant a généré quelques changements, mais pas vraiment majeurs dans la famille. Par exemple, l’organisation des vacances étant donné que l’enfant handicapé doit être toujours avec les parents et que les autres sont envoyés en colonie de vacances. A part cela, les parents se préoccupent sur l’idée selon laquelle l’enfant va être accepté ou non par la famille, la grande famille.
En outre, les parents passent beaucoup de temps avec l’enfant handicapé. D’après notre enquête, les parents accordent toute leur journée à l’enfant. A l’instar, manger avec l’enfant le matin, rendez-vous avec l’orthophoniste, jouer avec l’enfant dans le jardin. Pendant les vacances, les parents consacrent encore plus de temps pour l’enfant : déjeuner ensemble, aller à la piscine, aller faire la pêche, ainsi que d’autres loisirs.
Quant aux autres activités, surtout professionnelles, on ne rencontre pas trop de changement. Toutefois, les parents avouent qu’il serait possible qu’il y ait un changement d’emploi du temps dans le cas où l’enfant était toujours chez eux. Ils auraient été alors obligés de prendre quelqu’un pour s’occuper de l’enfant ou bien de réduire leur temps de travail.
A propos de la relation des parents avec les autres membres de la fratrie, les parents n’ont pas trop de moments privilégiés avec eux. Dans la plupart du temps, ce sont les enfants qui ne veulent pas, ce qui implique d’autant plus la prise en charge de l’enfant handicapé.
En général, la présence d’un enfant handicapé dans la famille enquêtée ne pose pas de problème ni pour les parents ni pour les membres de la fratrie. Toute la famille montre en effet une certaine adaptation quant à la présence de cet enfant.
Outre ces considérations, les moments de crise de l’enfant handicapé provoque souvent des impacts, surtout au niveau des parents. Ces moments impliquent en effet un bouleversement total pour eux. De plus, étant donné la situation sociale de l’enfant, une pression se manifeste pendant ces moments de crise. Un certain énervement se présente souvent et il est ainsi difficile de gérer la situation à laquelle ils font face. A part cela, c’est pendant ces moments de crise que les parents ont un sentiment de culpabilité.
Si nous considérons les réactions de l’environnement proche de l’enfant handicapé, on constate qu’il peut y avoir des réactions aussi bien négatives que positives. Pour les membres de la famille proche, ils expriment un bon accueil pour l’enfant handicapé et sa famille. De plus, la famille est assez compréhensive du fait qu’avoir un enfant handicapé à la charge induit beaucoup de travail et de soucis, et que c’est des responsabilités supplémentaires pour les parents. Au niveau des voisins et des amis, des réactions négatives peuvent être rencontrées. Cependant, les parents ne prennent pas en compte ces réactions et préfèrent même ne plus revoir ceux qui adoptent ces réactions vis-à-vis de l’enfant. Ces réactions se manifestent surtout par des gestes de discrimination ou stigmatisation. Par exemple, il est déjà arrivé qu’une grand-mère interdise son petit fils de venir jouer avec l’enfant handicapé, ou un enfant qui traite l’enfant handicapé de débile. Les gens ont toujours un regard bizarre envers l’enfant handicapé à partir du moment où celui-ci commence à faire des gestes qui ne sont pas en adéquation avec son âge.
Face à de telles situations, les parents se sentent mal pour leur enfant. Il se trouve ainsi qu’ils ont des sentiments d’agressivité envers ceux qui actent pareillement.
Il est important de noter qu’à travers l’enquête, il a été vu que il n’y a personne qui aide la famille concernée, ni les membres de la famille ni au niveau de professionnels. Les parents se contentent donc de subir la situation et de la gérer de leur manière.
Section 2 : Résultats d’une enquête auprès d’un centre pour assistance sociale
Cette deuxième enquête est un entretien avec une assistante de service social dans un centre d’Action Médico-social Précoce ou CAMSP.
Les CAMSP reçoivent les enfants porteur de handicap de 0 à 6 ans avec ou sans diagnostic posé. Il est utile de savoir que de tels organismes sont généralement polyvalents et il en existe très peu qui soient spécialisés.
- Le Centre d’Action Médico-social Précoce (CAMSP) dans sa généralité :
Le CAMSP est un centre d’assistance sociale polyvalent qui accueille des jeunes enfants porteur de handicap qui ont été ou non diagnostiqués. Le centre reçoit des familles domiciliées dans le département.
Concernant l’accès des parents à mettre leur enfant sous la responsabilité du CAMSP, ils sont généralement orientés par un hôpital, c’est-à-dire ont déjà des dossiers de bilans d’engagés avec un diagnostic ou pas. Dans certains cas, ils viennent de médecine libérale, de pédiatre ou d’autre. Il se peut que les parents soient conseillés par la Protection Maternelle Infantile (PMI) ou bien les écoles. En effet, en présence d’un psychologue scolaire celui-ci oriente les parents vers le CAMSP lorsque l’enfant fait face à une difficulté d’adaptation.
Les parents choisissent un tel centre d’assistance sociale du fait de leur efficacité. Parfois, les parents ont recours à la médecine traditionnelle mais ceci ne provoque aucun gène pour le CAMSP. En effet, les parents sont souvent enclins à remettre leur enfant au sein du centre. Les parents ont de plus en confiance au centre. La raison en est que ces derniers voient une progression et évolution de leur enfant. De plus, grâce au centre, les parents ressentent un certain essoufflement, un soulagement. Ils ont besoin également de relais et que leur enfant aille à l’école. En outre, certains parents ont un besoin de reprendre leur travail, vu que c’est lourd et contraignant.
Au niveau de l’organisation et du rôle du CAMSP, ce center se trouve être utile pour les familles ayant un enfant handicapé à leur charge.
Le CAMSP est composé de spécialiste. Les « patients » sont consultés par deux médecins en consultation conjointe. Le centre dispose de pédiatres, psychiatre, neuro-pédiatres, psychologues, orthophonistes, psychomotriciennes, éducateur spécialisé, kinésithérapeute. Le centre fait aussi une synthèse de l’enfant handicapé, de sa famille et ce dont il a besoin et des difficultés qu’il a. Parfois, le centre demande un bilan de psychomotricité pour voir l’évolution du « patient ». Une évaluation psychologique peut également être sollicitée.
La présence d’un enfant handicapé dans la famille nécessite une prise en charge assez particulière. En effet, il est nécessaire qu’il y ait toujours une personne qui veille à l’enfant. En d’autres termes, le handicap de l’enfant nécessite une présence constante au quotidien puisque l’enfant peut se mettre en danger, faire des bêtises, etc… C’est dans ce cadre que la présence du CAMSP est nécessaire. C’est bien le rôle du centre.
Le rôle du CAMSP est essentiellement d’accompagner les parents et les membres de la fratrie. Vu le cadre et l’équipe qui compose le centre, l’équipe est très proche des parents et des membres de la fratrie. En fait, l’équipe voit les frères et sœurs et organise des réunions pour eux. Les parents profitent quant à eux de s’exprimer dans un espace de parole. Les parents expriment ainsi toutes les contraintes et difficultés qu’ils ont vis-à-vis de la société.
- Le handicap et les réactions des membres de la famille :
L’annonce du handicap de l’enfant perturbe considérablement les parents et les membres de la fratrie. Une perturbation qui touche la professionnelle et sociale de toute la famille. C’est en effet une situation assez compliquée pour les parents.
L’annonce du handicap est souvent une responsabilité de l’hôpital.
Lors de l’annonce du handicap, les parents ressentent immédiatement une souffrance, une douleur. Par ailleurs, beaucoup de parents expriment un sentiment de culpabilité. Il existe des couples qui se rejettent la faute l’un sur l’autre, ce qui implique une possibilité de séparation.
Certains parents acceptent facilement le handicap de leur enfant. Une telle adaptation ou acceptation peut avoir un lien avec la religion ou la coutume. Il arrive que des parents acceptent la situation puisqu’ils mettent en tête et croient que le handicap de leur enfant est la volonté de Dieu. Par contre, d’autres le considèrent comme une malédiction. A l’occurrence de cette dernière situation, on constate que certains parents vont avoir recours à la médecine traditionnelle.
L’annonce du handicap peut également générer quelques réactions plus ou moins normales des parents. Ces derniers sont d’abord soulagés d’obtenir un diagnostic de leur enfant mais à la fois soulagés d’avoir trouvé le cœur de leur inquiétude. A part cela, ils sont inquiets pour leur enfant, notamment pour son futur ou son avenir. Par ailleurs, les parents vont faire une investigation et donc faire des recherches sur internet pour mieux savoir à propos de la maladie de leur enfant. D’autres parents réagissent d’une autre façon et vont choisir la fréquentation d’une association. En fait, nous pouvons dire que les centre pour assistance sociale constitue un autoporteur de quelque chose de dynamique et positif.
D’autres réactions peuvent également être rencontrées. Il arrive que les parents ne sortent pus du fait des regards des autres. Toutefois, ils avouent quand même que leur enfant est handicapé. De plus, il faut qu’ils acceptent ce handicap et l’avouer au niveau de la société sinon la situation va être de plus en plus difficile.
Les impacts de la présence d’un enfant handicapé au sein de la famille sont essentiellement négatifs, selon l’assistante sociale enquêtée dans le cadre de notre travail.
Dû au handicap de l’enfant, les parents pensent arrêter de travailler ou partiellement travailler. Certains parents décident de faire ainsi à cause d’une inquiétude assez importante de leur part. Les bilans hospitaliers fréquents de l’enfant, le suivi quotidien de l’enfant sont autant d’occupations pour les parents. Par conséquent, ils sont tentés d’arrêter ou de ne travailler que partiellement. Au niveau des membres de la grande famille, il est possible qu’il n’y ait pas de relais et c’est ainsi que les parents doivent s’organiser de cette façon.
Par ailleurs, le handicap de l’enfant représente un choc ou une rupture pour les parents. Ces derniers vont avoir une rupture avec la famille par peur de l’annonce du handicap. A cet effet, la famille se distingue des autres et se referme un peu dans sa coquille, sur la cellule familiale. Il y toujours une peur générale qui s’installe autour des parents.
La survenue du handicap dans la famille provoque certains impacts quant à la relation du couple. Les parents, dans la plupart du temps, ressentent une culpabilité et ils se rejettent cette culpabilité l’un à l’autre. Cette situation peut en effet engendrer un divorce des parents. En outre, si l’un des parents est fusionnel avec l’enfant et l’autre ne le supporte pas, il est évident qu’il y ait rupture
Même si la présence d’un enfant handicapé provoque des impacts assez négatifs au sein de la famille, ce handicap peut quand même avoir une bonne influence pour la famille. Une cohésion au sein de cette famille se manifeste lorsque les membres de la famille expriment leurs craintes et inquiétudes, quand ils parlent ensemble de façon réciproque. Ce partage renforce donc les liens familiaux.
L’acceptation du handicap de l’enfant par les membres de la famille dépend de beaucoup de facteurs. D’abord, la référence culturelle et la religion peuvent permettre d’accepter facilement le handicap. Mais il a été remarqué que dans aucun milieu, le handicap de l’enfant est accepté d’une certaine manière.
Il est assez difficile de vraiment dire « accepter » le handicap. Le handicap est plutôt « supporté ». En effet, la présence d’un enfant handicapé dans la famille représente une douleur, une souffrance, et il faut se projeter sur le futur ou l’avenir.
Certains parents sont plus sensibles que d’autres au regard l’environnement. En outre, les facteurs matériels et financiers peuvent compenser les difficultés que les parents rencontrent pour gérer le handicap de l’enfant. En effet, une famille riche peut facilement trouver des solutions de garde et de relais. Une famille aisée peut se permettre de payer une baby sitter pour garder l’enfant et ainsi de souffler un peu, se payer un centre de loisirs spécialisé même si c’est un peu cher. La présence de gens pouvant prendre en charge l’enfant peut compenser la perte de salaire et le manque à gagner des parents.
Dans l’acceptation du handicap de l’enfant, le rôle des proches est très important. Le handicap s’accepte plus facilement lorsque les proches sont soutenant, accompagnants et participants. Malheureusement, c’est rare qu’on rencontre des proches qui remplissent ce rôle. En général, les proches ne sont pas toujours présents, à cause de la peur, ils n’osent pas parler.
Après la considération de ces différents points, il est nécessaire de faire remarquer que des recommandations par les parents et l’assistante sociale sont importantes. Ces propositions d’actions s’adressent en particulier aux pouvoirs publics.
Pour l’amélioration de l’adaptation des familles au handicap de l’enfant, il est utile d’accepter des ouvertures de structures adaptées dès la maternelle. En outre, il est important de mettre plus de personnes ou de personnel pour les handicaps légers, pour intégrer les enfants handicapés dans des milieux ordinaires. Il est vrai qu’il y a déjà des structures en fonction mais, il faudrait développer les nombres des structures existantes en quantité suffisante par rapport au nombre de personnes handicapés et faire en fonction du handicap de l’enfant.
Actuellement, il y a encore quelques lacunes au niveau des politiques sociales pour prévenir les difficultés des familles confrontées au handicap mental de leur enfant. Tout d’abord, on rencontre un manque de moyens, de formation. Il est normal qu’il faille une auxiliaire de vie scolaire pour l’accompagnement de l’enfant dans l’école. Pourtant, les professionnels sont en emploi précaire par manque de formation. A part ces carences, on rencontre un manque de place, d’établissement et de structure d’accueil. Il faudrait également une politique générale d’accessibilité au niveau de tous les domaines.
Section 3 : Analyse des données
- Les conséquences sur la vie en générale de la famille :
De par nos enquêtes, aussi bien au niveau de la famille qu’auprès de l’assistance sociale, des conséquences évidentes peuvent être aperçues.
La prise en charge d’un enfant handicapé peut avoir certains impacts sur la vie personnelle des membres de la famille même si ces impacts ne sont que minimes. Les parents qui prennent en charge l’enfant ont tendance à minimiser l’impact de la situation de handicap sur leur vie personnelle, ils ont tendance à qualifier leur rôle de « normal »
D’abord, des conséquences sur la santé peuvent se manifester. Le stress, la nervosité, l’épuisement moral, l’anxiété voire l’angoisse peut probablement impliquer une répercussion sur la santé. Comme nous pouvons le constater, à travers l’enquête menée auprès de la famille ayant un enfant handicapé, les parents éprouvent ces sentiments : « Mais chaque crise s’est un renouvellement de question qui se pose, est-ce qu’il ne va pas falloir l’hospitaliser, c’est un bouleversement total à chaque grosse crise quand même, même si on est habitué, même si on s’y attend, à chaque fois c’est on se retourne le sang. Et en plus y’a aussi la pression, le fait d’être séparé de sa maman qui n’arrange rien dans l’énervement que ça peut provoquer ». Si nous considérons le long terme, la personne ou les parents qui prennent en charge quotidiennement de l’enfant peuvent s’épuiser.
Par ailleurs, la présence d’un enfant handicapé chez soi peut générer des conséquences sur la santé psychique. Le fait de faire face aux frustrations des membres de la famille, aux propres frustrations des parents, au sentiment de culpabilité peut entraîner en effet des difficultés. La famille est parfois sur les nerfs.
A part cela, il y a lieu d’une tendance dépressive qui va aboutir à un impact sur la santé des parents. Toutefois, des parents essaient de résister pour « tenir le coup ». Ils font ainsi part d’autres stratégies, d’autres ressources pour aborder les difficultés morales plus sereinement. Par exemple c’est la foi qui leur fait tenir le coup. L’assistante sociale auprès du CAMSP confirme cette situation : « Oui, on peut dire qu’il y des parents qui acceptent, alors cela peut-être aussi lié à leur coutume et à leur religion, ils acceptent parce que cela fait parti, c’est « inchala », enfin c’est grâce à Dieu, c’est comme cela et on accepte. » La foi pourrait donc faciliter l’intégration de l’enfant handicapé dans la famille, ou au niveau de la société.
En outre, des conséquences peuvent survenir au niveau de la vie sociale de la famille. Il peut d’abord y avoir une réduction du cercle relationnel et amical. Les parents réduisent leur cercle relationnel du fait des regards des autres. En effet, ils n’acceptent pas que leur enfant soit stigmatisé au niveau de la société : « voisin ce qu’ils pensent cela m’est totalement égal, les amis, s’ils ne comprennent pas, ce ne sont pas des amis. Ceux qui n’ont pas compris, on a préféré ne pas les revoir. » De plus, il se trouve que les parents coupent même toute relation avec certaines personnes : ils mettent fin au contact « à ceux qui voulaient les voir seulement quand l’enfant handicapé n’était pas là ». Il nous semble évident que de telles réactions se manifestent.
La réduction de la vie sociale est liée non seulement à l’état de santé de l’enfant atteint de handicap mental, mais aussi et surtout à l’environnement qui peut intervenir en tant qu’obstacles dans la réalisation d’une quelconque activité. L’attitude de l’entourage- en tout cas la perception que peuvent avoir l’enfant handicapé et les parents- peut impliquer une tendance à la réduction de leur participation sociale.
A part cela, la réduction du cercle relationnel et amical se traduit par une réticence à sortir en raison des regards des autres, voire d’un « rejet ». Il existe des parents qui sont plus sensibles au regard de l’environnement. Par conséquent, ils réagissent de manière un peu malheureuse. Ils finissent par ne plus sortir. Cette situation a été évoquée par l’assistante sociale auprès de CAMSP.
Outre ces regards, l’attitude de l’environnement proche et des amis font souvent partie des causes de la réduction du cercle relationnel de la famille. Le sentiment de responsabilité et de culpabilité induisent également la réduction des relations avec les autres personnes. Le manque de relais pour la prise en charge de l’enfant conduit à une limite de sortie des parents. Dans ce cadre, il se trouve que les familles aisées peuvent avoir plus de chance que celles pauvres ou modestes. Le cercle relationnel pourrait donc être plus ou moins important dans ce cas. En effet, les familles aisées sont capables de payer un baby sitter ou d’autres personnes qui peuvent prendre l’enfant en charge, lors de l’absence des parents.
La réduction des relations avec les autres est parfois synonyme d’isolement des parents voire de tous les membres de la famille et de l’enfant handicapé. L’enfant ne peut pas jouer seul dehors avec les autres enfants, ce qui signifie qu’il va s’isoler au niveau de sa famille, plus précisément avec ses parents. Parallèlement à ce fait, les parents n’ont pas vraiment le temps de se consacrer pour des visites amicales ou familiales. Ils se contentent ainsi de rester dans leur coquille familiale.
Cet isolement peut ne pas être toujours exprimé à priori comme quelque chose de négatifs pour les parents, mais souvent par défaut. Les réactions en faveur de l’isolement peuvent être interprétées comme une manière d’accepter la situation ne minimisant la gravité. Cependant, cette soi-disant « résignation » – qui se traduit parfois par une forme de cynisme- n’exclut sans doute pas l’amertume et la souffrance. Même si les parents ne montre pas totalement leur douleur, la souffrance est évidente, surtout lorsque personne ne les aide, comme dans le cas de la famille enquêtée dans le cadre de notre recherche.
Outre les conséquences sur la santé et la vie en société, des conséquences peuvent également se manifester au niveau de la vie personnelle de chaque membre de la famille. Les conséquences du fait de prendre en charge l’enfant handicapé sur la vie personnelle des parents peuvent toucher leur vie sentimentale, la vie familiale ou encore le temps dont les parents disposent pour faires les activités qu’ils aiment.
Différents sentiments et ressentis peuvent être exprimés par les parents. La présence d’un enfant handicapé a pour conséquence un manque d’intimité entre les parents. Les temps consacrés au couple se trouvent réduits. Pour le cas de la famille dans notre enquête, le couple ne consacre un temps particulier que lorsque l’enfant n’est pas chez eux. Il faudrait remarquer que cette situation peut être gênante et inconfortable pour certains parents, mais pour d’autres ils croient que c’est même nécessaire pour leur vie de couple. D’autre part, pour l’enfant handicapé en particulier, il se peut que la situation lui soit pesante et affecte ainsi sa vie personnelle. Un sentiment de lassitude et d’énervement peut en effet se manifester de sa part. En le stimulant pour le langage, par exemple, l’enfant finit toujours par être las : « Alors le problème, c’est qu’il n’est pas stimulé partout où il est. Donc chez nous, on va le faire répéter 15 fois pour qu’il dise bien et là cela le soule parce qu’il se dit, moi je ne viens pas pour me faire gronder, en gros. Mais chez lui dès qu’il va dire un mot, comme on comprend on lui donne, on ne lui fait pas faire d’efforts. Donc on ne veut pas l’avoir non plus que pour le contrarier. Par exemple pour fromage, il va dire mage et j’insiste fini par s’énerver et dire fomage. »
S’agissant de la vie familiale, il y a des répercussions dues à la présence de l’enfant handicapé. Le temps alloué par les parents aux membres de la fratrie devient inégal. En effet, les parents ont tendance à consacrer beaucoup plus de temps pour l’enfant handicapé. Les autres enfants commencent ainsi à ne plus avoir des relations comme auparavant. Interrogée sur ce sujet, la mère de famille enquêtée avoue ne pas avoir de temps privilégiés avec ses autres enfants. Même si cette mère de famille a répondu que ce sont les enfants qui refusent d’en avoir, nous pouvons quand même penser qu’il puisse avoir des liens avec la présence de l’enfant handicapé. Naturellement, l’impact du handicap sur la vie familiale est d’autant plus important que le temps quotidien de prise en charge consacré à la personne handicapée est élevé.
Cependant, le fait d’avoir un enfant handicapé peut tisser de meilleurs liens entre les membres de la famille et surtout entre la fratrie. L’acceptation par les frères et sœurs implique nécessairement un rapprochement avec le handicapé. Cette acceptation peut même générer de bonnes conséquences quant à la vie future des membres de la fratrie. Pendant l’enquête menée auprès de la famille, il a été remarqué qu’une des sœurs de l’enfant envisage de travailler comme éducatrice spécialisée plus tard.
En lien direct avec le manque de relais, un manque de temps libre pour faire les choses que les parents aiment peut être constaté, c’est même évident. En effet, la personne handicapée a besoin d’une « assistance » en permanence, quotidiennement. Aussi, les parents vont être contraints de laisser à part les activités qu’ils aiment. La catégorie sociale des parents peut par contre atténuer cette situation.
Sur le plan professionnel, la prise en charge par les parents de l’enfant handicapé présente quelques conséquences presque inévitables. La situation de handicap peut conduire à la réduction voire la cessation des activités professionnelles des parents. De par l’enquête auprès du CAMSP, certains parents pensent arrêter de travailler ou partiellement. La question de relais demeure ici une des causes de cet arrêt de l’activité professionnelle. De plus, les inquiétudes à l’issu de l’enfant peuvent être importantes et les parents ne seront pas en mesure de bien remplir leurs tâches.
L’impact du handicap sur la vie professionnelle des parents peut encore se traduire pour les parents par le fait de ne pas chercher ou reprendre un emploi. Le renoncement à une activité professionnelle est plus souvent lié au manque de temps et/ou à la difficulté de laisser l’enfant handicapé au domicile. En outre, nous pouvons dire qu’il n’est pas facile de cumuler une activité professionnelle avec la prise en charge de la personne. La prise en charge de l’enfant nécessite une réorganisation radicale de l’emploi du temps des parents.
Comme nous avons vu que la présence d’un enfant handicapé peut avoir des répercussions sur la vie professionnelle des parents, ceci implique nécessairement des conséquences sur le niveau de vie de la famille concernée. En effet, le choix de cesser leur activité professionnelle peut avoir une incidence sur les revenus, et peut se décider au détriment de la situation financière. Cette incidence sur les revenus peut directement liée à une cessation ou un aménagement de l’activité professionnelle des parents en raison de la situation de handicap. Il s’agit donc d’une conséquence indirecte : lorsque la situation de handicap a un retentissement sur la situation professionnelle, cela peut avoir des impacts sur les revenus.
CONCLUSION
La présence d’un enfant handicapé au sein d’une famille n’est pas chose facile. L’annonce du handicap aux membres de la famille produit assez souvent un bouleversement remarquable. Au début, les parents et les membres de la fratrie éprouvent dans la plupart des cas un sentiment de tristesse, de désespoir, même de honte. Dans ce cas, il est assez difficile d’intégrer l’enfant handicapé dans le cadre familial. Par contre, d’autres familles semblent s’adapter plus facilement à la réalité en face.
Les parents sont les premiers à faire intégrer leur enfant handicapé dans la famille. Même s’il leur est difficile d’accepter la situation, l’enfant a tout son droit de vivre et d’être traité comme les autres enfants de la famille. En outre, les membres de la fratrie jouent un rôle important dans cette intégration. D’une part, ils vont réconforter leurs parents et d’autre part, vont avoir une considération plus particulière pour l’enfant ayant un handicap.
Tout au long de notre travail, nous avons pu voir que l’enfant handicapé peut être stigmatisé non seulement par son environnement proche, mais aussi par la société. De plus, dans notre société, le sujet du handicap est encore tabou. A cause de cette stigmatisation, l’épanouissement de l’enfant se trouve entraver. Les regards des autres, les préjugés et stéréotypes induisent un certain isolement des parents et de l’enfant handicapé. La société a donc un rôle prépondérant dans l’intégration de l’enfant au sein de la famille et surtout de la communauté.
Les assistants sociaux constituent, eux aussi, un des piliers de l’intégration de l’enfant handicapé au sein de la famille. Leur rôle est surtout d’accompagner les parents et les membres de la famille.
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[1] Note for North Yorkshire Physical and Sensory Impairment Partnership Board, “Disability and the Social Model)
[2] Georges BEAUSEJOUR, « Siblings experiences of children with physical disabilities: contribution of family intervention”, Revue québecoise de psychologie, 2004, pp.79-104
[3] Constante LAMARCHE, « Les parents d’un enfant handicapé(Revue de la Littérature américaine) », Santé mentale au Québec, vol.10, n°1, 1995, p.42
[4]C.DAYAN, « La place des frères et sœurs d’enfants handicapés au sein de la famille », p.7
[5] Constante LAMARCHE, « Les parents d’un enfant handicapé(Revue de la Littérature américaine) », Santé mentale au Québec, vol.10, n°1, 1995, p.42
[6] Georges BEAUSEJOUR, « Siblings experiences of children with physical disabilities: contribution of family intervention”, Revue québecoise de psychologie, 2004,p.86
[7] C.DAYAN, « La place des frères et sœurs d’enfants handicapés au sein de la famille », p.7
[8] Sylvie TETREAULT, « La mère de l’enfant handicapé : le concept de surcharge », Revue Francophone de la déficience intellectuelle, vol.2, n°2, p.154
[9] Erving Goffman est un sociologue canadien, il se centre non sur l’individu, mais sur l’interaction et use de métaphores parmi lesquelles la métaphore théatrale.
[10] Dans « Stigmates, les usages sociaux du handicap », 1963, trad. Et publié en français, aux Editions de Minuit, 1975
[11] Constante Lamarche, « les parents d’un enfant handicapé (Revue de la littérature américaine) », Santé mentale au Québec, vol.10, N°1, 1985, pp.36-45
[12] C.DAYAN, « La place des frères et sœurs d’enfants handicapés au sein de la famille »,p.4
[13] C.DAYAN, « La place des frères et sœurs d’enfants handicapés au sein de la famille »,p.3
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