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Le Phénomène de l’Enfant Consommateur : Stratégies Marketing et Éthique

Mémoire

Les enfants publivores

Année universitaire 2008-2009

Remerciements

Sommaire

Introduction

PARTIE I. Développement de la publicité destinée aux enfants en Belgique 

 

  1. Evolutions sociologiques de la place de l’enfant

1.1. De la notion d’enfance

1.1.1. L’enfant en définition

1.1.2. Des tranches d’âges distinctes 

1.2. L’accès des enfants à la consommation 

1.2.1. Genèse de la consommation infantile

1.2.2. Avènement de l’enfant consommateur 

1.3. Une hyper-sensibilité à la marque

  1. Des raisons sociologiques

2.1. Une responsabilisation plus précoce 

2.2.  Un pouvoir d’achat parental accru

  1. La position de la législation belge

3.1. Constitution du jury 

3.2. Compétences du jury 

3.3. Compétences du jury 

3.3.1. …Des demandes d’examen préalables 

3.3.2. …Aux plaintes consommateurs 

 

PARTIE II.  Analyse publicitaire et impact de la publicité sur l’enfant et son environnement : L’enfant consommateur

 

  1. Un important pouvoir d’achat

1.1. Le pouvoir d’achat des jeunes

1.1.1. L’argent de poche

1.1.2. Un  véritable budget 

1.2. Une cible prometteuse 

1.2.1. Une gamme traditionnelle de produits

1.2.2. Un pari sur l’avenir   

1.2.3. L’enfant cible  

  1. Le fond stratégique des théories marketing 

2.1. Connaître la cible

2.2. Développer la croyance 

2.3. Savoir communiquer  

2.3.1. Influencer les enfants ? 

2.3.2. Influencer les parents  

 

PARTIE III. Les modes de promotion d’une marque

 

3.1. L’analyse des mécanismes d’attractivité des enfants 

  3.1.1. L’identification 

    3.1.2. L’implication

3.1.3. Le packaging

3.2. Des techniques de promotion de la marque

3.2.1. L’événementiel comme support

3.2.2. La commercialisation dans l’éducation

3.2.3. Les médias « classiques »

 

3.3. Etudes de cas 

3.3.1. Exemple d’un jeu vidéo

3.2.2. La promotion des divertissements « adultes » auprès des enfants

3.2.3. Analyse du cas de la Peugeot 806

 

  1.      Les limites de la publicité destinée aux enfants
    1. Les risques d’une dérive ? 

1.1. Problématisation

1.1.1. L’exposition des enfants 

1.1.2. La responsabilisation des annonceurs

  1. La « spot mania » : principe de précaution ou danger réel ?

2.1. L’obsession du petit écran

2.1.1. Evaluation  du temps d’exposition 

2.1.2. Incitation ou manipulation ? 

2.2. Une dangerosité en question

2.2.1. L’impact sur les plus jeunes  

2.2.2. Une nocivité non prouvée

2.2.3. La portée du pouvoir de prescription

  1. Pistes d’actions pour une éthique marketing 

3.1. Coordonner l’action publique 

3.2. Une éducation à la consommation

 

Conclusion

 

Introduction

 

Les stratégies marketing actuelles voient plus que jamais en l’enfant une cible à part entière, dotée d’un pouvoir d’achat et susceptible d’acheter en masse leurs produits. Pour expliquer ce phénomène, citons les évolutions sociologiques de la famille qui octroient à l’enfant de nouveaux comportements d’achat, mais encore un travail de sensibilisation des publicitaires et des marques effectués depuis les années 80. 

 

Ainsi donc, le début du XXIe siècle a signé l’avènement de l’enfant consommateur. Celui-ci possède non seulement les moyens d’acheter les produits qu’il aime, mais dans une mesure propre à chaque famille peut se faire le prescripteur des achats de toute la famille, voire des adultes.

 

Cette nouvelle donne s’est accompagnée d’une floraison de marques dont beaucoup décrivent un panorama marketing connu de tous. Parmi elles, les enseignes emblématiques telles que Mc Donald’s, Coca-Cola, Disney, Kellog’s, Reebok, Nintendo, Sony, font partie intégrante d’une « culture marketing globale ». En parallèle, l’explosion de médias ciblés sur les publics jeunes ont permis la création de magazines, radios, chaînes de télévision dédiés aux seuls enfants. Même les marques tournées vers les adultes commencent à briguer l’enfance, soit en tant que cible prescriptrice, soit directe. 

 

La précocité avec laquelle les enfants accèdent au comportement d’achat n’est pas sans poser de sérieuses questions quant à la responsabilité des publicitaires et des marques. Les plus jeunes enfants sont-ils en mesure d’absorber sans conséquences nocives un message publicitaire ? Et à mesure que les stratégies marketing s’inspirent d’études sur la psychologie des enfants, leurs communication ne s’apparente-t-elles pas davantage à une manipulation qu’à une incitation à l’achat ?

 

Toujours est-il qu’avec l’Internet et la télévision, voir même sur le terrain de l’école, les enfants sont hyper sollicités. Forts de ce constat, nous nous poserons donc la question d’une éthique marketing où la marque et le diffuseur tiennent compte de leur impact et en mesurent les risques et dérives éventuelles. 

 

Pour y répondre, ce mémoire s’articulera en trois temps : une première partie évoquera le concept d’enfant consommateur d’un point de vue sociologique ; une seconde partie présentera les outils et stratégies des marques pour asseoir leur emprise sur la cible des enfants. Enfin, une dernière partie s’attachera à montrer les dérives découlant d’une influence trop grande des publicités sur les jeunes et les éventuels moyens de s’en prémunir. 

 

  1.      Développement de la publicité destinée aux enfants en Belgique

 

 

PARTIE I- Développement de la publicité destinée aux enfants en Belgique 

 

« Viser les jeunes, c’est assurer l’avenir de la marque. »

 

  1. Evolutions sociologiques de la place de l’enfant

 

1.1. De la notion d’enfance

 

1.1.1. L’enfant en définition

 

Le mot enfant désigne un « fils ou fille, tout individu de l’espèce humaine qui est dans l’âge de l’enfance. » 

 

Au sens légal, un enfant concerne tout être humain dans l’âge de l’enfance et étant âgé de moins de 18 ans, où il atteint sa majorité et donc sa pleine capacité juridique sauf disposition antérieure. 

 

Dans le cadre de ce mémoire, nous tiendrons compte de cette définition large en mettant cependant l’accent sur la tranche 0 – 12 ans qui précède l’âge de l’adolescence. De cette façon, nous tâcherons de montrer la précocité d’adoption du comportement de consommateur à l’époque actuelle. 

 

1.1.2. Des tranches d’âges distinctes 

 

La population enfantine présente en effet une grande hétérogénéité. Nous nous calquerons donc sur la propre segmentation retenue par le marketing portant sur les enfants cibles de la consommation. 

 

Le fait est que les 4 grands groupes concernés par ce découpage stratégique correspondent également aux grands stades développementaux de l’enfant déterminés par la psychologie. Ceux-ci évoquent l’acquisition des différentes facultés permettant de traiter et de comprendre l’information reçue à l’occasion d’une promotion marketing dont ils sont la visée. 

 

En croisant donc la théorie du traitement de l’information et les grands sous-âges de l’enfance, nous présentons les quatre groupes de la manière suivante : 

 

  • Groupe des 0 – 3 ans : il correspond au stade de la pré attention où il n’y a pas réellement de traitement d’information et où les réponses sont de nature physiologique ;

 

  • Groupe des 4 – 7 ans : c’est le stade de l’attention focale où les enfants commencent à percevoir le monde en fonction d’une sensibilité propre ;

 

  • Groupe des 8 – 12 ans : ce stade de la compréhension permet aux enfants de penser en termes catégoriques, de comprendre un message et de le mémoriser ;

 

  • Groupe des 13 – 17 ans : au cours de ce stade dit d’élaboration, les enfants sont en mesure d’’avoir une pensée abstraite, de procéder à des comparaisons personnelles, d’argumenter leurs choix et surtout d’avoir un esprit critique à l’égard des messages.

 

1.2. L’accès des enfants à la consommation 

 

Avant que les entreprises parviennent à mettre au point leurs stratégies publicitaires ciblant de façon adéquate les enfants d’aujourd’hui, celles-ci ont dû réaliser un véritable travail e sensibilisation s’étendant sur quelques décennies et préludant nos comportements d’aujourd’hui. 

 

1.2.1. Genèse de la consommation infantile 

 

En effet, depuis les années 1950, s’est produite la lente genèse des consommateurs d’aujourd’hui. Mais il fallut attendre les années 60, après les efforts d’après-guerre inhérents à la reconstruction, pour que les populations accèdent à un pouvoir d’achat permettant de justifier la publicité en tant que telle. Ceci a convergé avec l’essor démographique sans précédent du baby boom et qui s’est accompagné de l’essor des entreprises ainsi mises en demeure de produire afin de répondre aux nouveaux besoins de consommation.

 

Au cours des années 70, les publicitaires ont commencé à promouvoir, avec l’aide des entreprises, nombre de produits destinés aux enfants, entament ainsi une période de sensibilisation nécessaire à développer le réflexe d’achat. Ceci préluda le tournant décisif des années 80 où véritablement ces derniers ont commencé à acquérir la légitimité de choisir les produits qu’ils voulaient consommer sous réserve de l’acceptation parentale. 

 

1.2.2. Avènement de l’enfant consommateur 

 

Les résultats tirés de l’observatoire des 6-14 ans « Kids’ attitudes 2005 » présentés par les forums d’Ipsos sont éloquent sur la façon dont le processus décrit plus haut s’est accéléré depuis les années 90.   

L’étude n’hésite pas à parler d’une « nouvelle génération d’enfants directement née avec Internet ». L’enquête rapporte ainsi que :

 

  • Chez les 6-8 ans :
  • un enfant sur quatre a la télé dans sa chambre. 
  • de 30% des 6-8 ans utilisent déjà aussi internet» 

 

  • Dès 8 ans :
  • 80% d’entre jouent aux consoles de jeux 

 

  • Vers 13-14 ans :
  • un enfant sur deux a également une console de jeu, un lecteur de CD, 
  • et un sur quatre un ordinateur.
  • 80% utilisent déjà aussi internet

 

De fait, les 6-14 ans sont très marqués par les nouvelles technologies maniant indifféremment musique, image, information avec une rapidité et une facilité déconcertantes. 

 

1.3. Une hyper-sensibilité à la marque 

 

Dans un ouvrage publié en 2000 intitulé No Logo – La tyrannie des marques, Naomi Klein retrace montre que le marketing de marque découle d’une prise de conscience qui date des années 80. A cette époque, l’image de marque est devenue une chose déterminante pour valoriser le produit. 

 

Etablir une relation privilégiée entre le consommateur et la marque constitue en effet le défi de sa pérennisation. Il faut faire en sorte de trouver le positionnement qui fera la différence, sortir des idées reçues et maintenir cette qualité de renouvellement dans le temps en se réinventant régulièrement. Une marque doit de fait s’adapter à un marché qui évolue en permanence, notamment sur le secteur de l’enfance. Cette modularité est gage de connivence, laquelle s’apprécie sur le long terme. 

 

Les spécialistes du marketing dans le secteur de l’enfance en ont conscience depuis le début et vise des cibles de plus en plus jeune à travers une iconographie fidélisatrice.  Le Center for a New American Dream rapporte en effet que les bébés de six mois peuvent déjà se représenter des images mentales de logos et de mascottes et que dès deux ans, la fidélité est établie. 

 

  1. Des raisons sociologiques

 

Pour expliquer comment ce phénomène plaçant l’enfant au cœur du processus de l’achat, évoquons à présent les raisons internes à cette mise en condition. Si en effet les entreprises et les publicitaires ont joué de concert sur la corde de la sensibilisation, l’évolution sur les dernières décennies du contexte familial a également été très propice à cela. 

 

Avec l’atteinte de stabilisation démographique correspondant à l’indice de 2,1 enfants par femme, les familles ont expérimenté une configuration nouvelle où l’enfant n’était plus celui d’une grande famille, élevé dans l’esprit du partage et de la suffisance. En outre, il se voyait soudain intégré à une fratrie de deux ou trois enfants et donc exposé à une autre place au sein de la famille et vis-à-vis des parents. Avec, en parallèle, la hausse du pouvoir d’achat des foyers, et l’éclatement du modèle familial traditionnel, il se voyait accéder à une plus grande autonomie dans l’acte d’achat, et adoptait dans les cas les plus extrêmes le statut « d’enfant gâté » voire « d’enfant roi. »  

 

 

 

2.1. Une responsabilisation plus précoce

 

L’augmentation inédite des taux de divorces et de séparations a considérablement modifié la structure familiale. Le nombre de familles monoparentales s’est donc envolé ces dernières années et a contribué à définir un rôle et une place de l’enfant nécessairement autre que dans la famille traditionnelle. 

 

Ainsi, à compter du million et demi de familles monoparentales estimé en 1999, le chiffre n’a eu de cesse de progresser pour accentuer cette tendance de l’enfant grandissant avec un référent parental en moins, et donc la nécessité de prendre certains aspects de la vie matérielle en charge et une marge décisionnelle plus importante en matière d’achat. 

 

 Ces enfants nommés « les enfants clés au cou » sont rompus à une certaine forme de liberté qui explique leur propension à se responsabiliser précocement et donc à verbaliser tout aussi précocement leurs besoins au travers d’un réflexe d’achat. Réflexe d’autant plus prononcé qu’ils le justifient parfois par une forme de chantage dû à la séparation et en guise de compensation. 

  •  Un pouvoir d’achat parental accru

Bien évidemment, ce réflexe précoce d’achat n’aurait pu s’ancrer dans les pratiques sans une hausse significative du pouvoir d’achat des familles. 

 

Cette montée du pouvoir d’achat s’explique à travers les constats suivants :

 

  • l’accession massive des femmes au monde du travail : en ce début de XXIe siècle, 70% des couples parentaux travaillent tous les deux. Le sacrifice de la carrière au nom de l’éducation de l’enfant n’est plus la règle, de sorte que l’aisance matérielle est plus rapidement atteinte ; 

 

  • le recul de l’âge de première maternité : en parallèle, l’âge moyen de la maternité était de l’ordre de 29,7 ans en 2005 contre 26,5 ans au début des années 1980. de façon plus significative, entre 1977 et 2005, les bébés ayant une mère de plus de trente ans est passé de 25% à 50%.

 

Dans ces conditions, l’enfant arrive dans un contexte financier plus favorable à l’achat. D’autant plus que manquant de temps pour s’occuper d’eux, les parents s’exonèrent de leur culpabilité en compensant par des achats répondant au plaisir de leurs petits. 

 

La formation de l’enfant consommateur est donc à la synthèse du travail de sensibilisation des publicitaires et de libération de l’expression du désir dans la sphère familiale. 

 

  1. La position de la législation belge

 

Le Conseil de la Publicité, créé en 1967, est l’association représentative de l’ensemble du secteur de la publicité en Belgique. Afin d’examiner et d’assurer la conformité des messages publicitaires avec les règles en vigueur et l’éthique, le Conseil de la Publicité a créé en 1974 un organe d’autodiscipline : le Jury d’Ethique Publicitaire (JEP). Le Conseil de la Publicité est composé des organisations représentatives des annonceurs, des agences de publicité et des médias. Depuis 2008, le JEP dispose tant d’un organe de première instance que d’un organe d’appel. 

 

3.1. Constitution du jury 

 

Depuis le 1er janvier 2008, le JEP est composé paritairement, à savoir une moitié de membres

issus de la société civile et une moitié de membres issus du secteur publicitaire. Les membres issus de la société civile proviennent des milieux / secteurs suivants :

 

  • association de consommateurs (à savoir Test-Achats),
  • consommateurs / citoyens sélectionnés en collaboration avec la Fondation Roi Baudouin,
  • membres issus du secteur de la recherche et du monde académique.

 

Le Jury de Première Instance est composé d’un Président et de minimum quatre membres et maximum 6 membres, nommés par le Conseil d’Administration du Conseil de la Publicité, et ce pour un terme de trois ans. Leur mandat ne peut être renouvelé que 2 fois sans interruption.

 

Le Jury siégeant en appel est composé d’un Président et de minimum seize membres et maximum vingt membres, nommés par le Conseil d’Administration du Conseil de la Publicité, et ce pour un terme de trois ans. Leur mandat ne peut être renouvelé que 2 fois sans interruption.

 

3.2. Compétences du jury 

 

Le Jury est compétent pour l’examen du contenu des messages publicitaires diffusés dans les médias de masse (tv, cinéma, radio, journaux, magazines, affiches dans la rue, publicité via Internet). En outre, le Jury formule des avis de réserve et des recommandations de modification ou d’arrêt de la publicité, conformément à son règlement.

 

Les décisions du Jury sont basées sur :

  • d’une part, la législation générale, la loi sur les pratiques du commerce et sur l’information et la protection du consommateur et la législation par catégorie de produits et de services,


  • d’autre part, les conventions, les codes et règles auto-disciplinaires nationaux et internationaux complétant la législation et tout particulièrement le Code consolidé de la Chambre de Commerce Internationale sur les pratiques de publicité et de communication de marketing, approuvé par le Conseil de la Publicité.

Lorsque le Jury considère qu’un message publicitaire diffusé dans les médias de masse n’est pas conforme à la législation et/ou aux codes/règles en vigueur, il prend alors une décision de modifier ou d’arrêter la publicité. Toutefois, le Jury étant un organisme d’autodiscipline, il n’entend pas appliquer de censure ni tendre à favoriser/faire prévaloir une idéologie ou un goût particulier : dès lors qu’un message publicitaire ne soulève que des réserves en matière de décence et/ou de bon goût, il s’abstiendra de formuler une décision de modification ou d’arrêt, mais se limitera à communiquer un avis de réserve aux annonceurs et, si nécessaire, aux médias/fédérations professionnelles en leur laissant la responsabilité de la suite à y donner.

 

3.3. Compétences du jury 

 

3.3.1. …Des demandes d’examen préalables 

 

Le nombre de demandes d’examen préalable a augmenté par rapport à 2007, à savoir une augmentation de 10%. La part que représentent ces demandes dans la totalité des activités du Jury est de 8%, à savoir une diminution par rapport aux années précédentes (en 2001 : 9%, en 2002 : 17%, en 2003 : 12%, en 2004 : 22%, en 2005 : 17%, en 2006 : 23% et en 2007 : 16,5%), mais ceci est dû à l’augmentation importante du nombre total de plaintes, ce qui a pour cause que cette proportion, vue de manière globale, est moins importante. 

 

En 2008, les demandes d’examen préalable provenaient :

  • des agences publicitaires (44)
  • des annonceurs (11)
  • des médias (1).

3.3.2. …Aux plaintes consommateurs 

 

Le nombre de plaintes de consommateurs a augmenté par rapport à 2007. La répartition des plaintes par catégorie de produits et/ou de services montre que les catégories les plus concernées sont les suivantes :

 

  • automobiles et accessoires : 194 plaintes, soit 29 % (8% en 2007),
  • produits relatifs à la santé/bien-être: 179 plaintes, soit 26,5 % (1% en 2007),
  • informatique, télécom : 48 plaintes, soit 7% (8,5% en 2007).

 

 

 

  1.      Analyse publicitaire et impact de la publicité sur l’enfant et son environnement

 

  1.  Analyse publicitaire et impact de la publicité sur l’enfant et son environnement: L’enfant consommateur


 

Les enfants constituent un public cible privilégié par nombre d’annonceurs publicitaires depuis deux décennies et ce de façon croissante. Pour médiatiser leurs produits sur les moins de 18 ans, les marques n’hésitent en effet pas à investir dans des actions coûteuses de communication adressées aux enfants. Si ces investissements sont réalisés, c’est qu’ils induisent des résultats positifs au bénéfice direct des marques. Cette efficacité de la publicité bien menée, quelle que soit son support, repose en effet sur des théories stratégiques dûment étudiées et probantes.

 

  1. Un important pouvoir d’achat

 

Selon Joël-Yves Le Bigot, spécialiste et pionnier du junior marketing en Europe, le pouvoir d’influence économique direct ou indirect des enfants consommateurs peut même se mesurer à hauteur de 43% de la consommation familiale, soit plus de 12,340 milliards d’euros.

 

1.1. Le pouvoir d’achat des jeunes

 

1.1.1. L’argent de poche

 

 

Ce pouvoir d’achat de l’enfant en tant qu’« agent économique », s’analyse d’emblée par le biais de ses propres ressources, à savoir son argent de poche. 

 

Si la pratique de l’argent de poche ne peut être généralisée à tous les foyers, eu égards aux difficultés économiques de certains, Joël-Yves Le Bigot montre qu’en 2006, l’argent de poche est reçu régulièrement à proportion de :

 

  • 26% des 2 – 13 ans ;
  • 50 % de 8-10 ans ;
  • 45% chez les 13 – 17 ans.

 

Ainsi, retenons que 70 % des 11-17 ans bénéficient ou régulièrement ou sporadiquement d’argent de poche. 

 

Il faut mentionner également que nombre d’enfants voient leurs économies personnelles issues de l’argent de poche par ailleurs grandies 

 

  • des étrennes de Noël (80%) ;
  • des anniversaires (83%) ;
  • des menues monnaies héritées des services rendus (35%) ;
  • Des bons résultats scolaires (23%).

 

1.1.2. Un  véritable budget 

 

Au final, Joël-Yves Le Bigot estime la manne que représente l’argent de poche à quelques 131,1 millions d’euros par an chez la tranche des 4 à 10 ans. De façon plus globale, l’Institut de l’enfant évalue le pouvoir d’achat des moins de 18 ans à environ 3 milliards d’euros. 

 

Pour entrer dans le détail, l’agence Altavia Junium précise qu’en 2001 le budget propre mensuel des 11-17 ans atteignait les 52,60 euros et que ces derniers pesaient pour 95 milliards d’euros de consommation à titre familial. 

 

Il faut certes considérer que l’argent de poche augmente avec l’avancée en âge de l’enfant dans le cadre de sa responsabilisation et de ses exigences croissantes. Certains passages rituels en sixième, seconde ou dans l’enseignement supérieur matérialisent du reste une nette progression du pouvoir d’achat de l’enfant.  

 

Ceci s’observe à travers le graphique suivant : 


 

Les marques ne s’y sont d’ailleurs pas trompées en axant majoritairement leur communication vers les classes d’âges les plus âgées. Par exemple, Adidas positionne environ 80 % de ses investissements sur la cible des 12-20 ans.

 

Ce constat du pouvoir d’achat des enfants est du reste suffisamment clair pour que les entreprises voient en l’enfant une cible réelle tantôt à même d’acheter au titre de ses propres deniers et de celui de parents affranchis à l’idée de satisfaire leurs enfants. 

 

1.2. Une cible prometteuse 

 

1.2.1. Une gamme traditionnelle de produits

 

Le pouvoir d’achat des jeunes et des enfants, qu’il soit indirect ou direct, ne constitue pas le seul intérêt que les publicitaires et les entreprises voient dans cette cible particulière. 

 

D’une part, ils entendent bien sûr conforter des habitudes de consommations sur des produits phares ou pérennes. Joël-Yves Le Bigot rappelle en ce sens les postes de dépenses privilégiés par les enfants au moyen de leur argent de poche :

 

  • les CD (34%),
  • les cassettes audio (30%), 
  • les magazines et journaux (29%), 
  • les vêtements (26%),
  • les places de cinéma (25%). 

 

1.2.2. Un pari sur l’avenir   

 

D’autre part, les annonceurs voient dans cette cible jeune, malléable et évoluant de façon dynamique, des possibilités multiples telles que :

 

  • initier de nouveaux modes de consommation ;
  • faire jouer par les enfants un rôle réel dans la prescription des achats parentaux ;
  • se constituer un réservoir de clients de demain qui se matérialisera sur tous les plans socioculturels de la société.

 

Ces trois niveaux de profitabilité matérialisent ainsi ce que les stratèges du marketing appellent le marché « 3 en 1 » décliné en marché primaire, marché d’influence et marché d’avenir.

 

1.2.3. L’enfant cible  

 

De tels enjeux expliquent que les annonceurs se donnent le plus possible les moyens de séduire dès le plus jeune âge et de façon continue cette clientèle non seulement en devenir, mais déjà opérationnelle. Car, de fait, et c’est là le propos de ce mémoire, l’enfant possède une place de consommateur à part entière et ne constitue, bien au contraire, aucunement une sous classe de consommateurs. En outre, quand on constate que « certains hypermarchés ont mis à disposition des mini caddies pour permettre aux enfants de faire leurs propres courses », on ne peut prendre autrement l’enfant que comme un vrai consommateur, potentiel ou pas. 

 

En tant que tel, l’enfant devenu consommateur pour des raisons à mi-chemin de la sociologie et du marketing, se fait aussi « cible » alléchante de nombre de marques qui ne laissent pas de voir dans ce vivier trois niveaux d’implication à la consommation : 

 

  • l’enfant consommateur qui utilise les produits ;
  • l’enfant acheteur doté d’un pouvoir d’achat ;
  • l’enfant prescripteur qui possède un pouvoir de décision sur ses propres produits et encore ceux de ses parents ;
  • l’enfant influenceur susceptible de prendre toute la part de la décision d’achat au travers d’un véritable travail de négociation, voire de harcèlement auprès des parents.

 

Ces quatre niveaux constituent en l’esprit quatre approches stratégiques encadrant les démarches marketing des produits. Nous verrons comment celles-ci se déclinent au cours de la seconde partie. 

 

  1. Le fond stratégique des théories marketing

 

2.1. Connaître la cible

 

Ce que les annonceurs s’efforcent de faire pour atteindre et convaincre leurs cibles enfantines consiste depuis au moins deux décennies à saisir, décrypter, analyser et comprendre le monde de l’enfance, ses mécanisme, de façon à les cerner et à insuffler en eux des attentes auxquels ils s’identifieront. 

 

La question qui se pose est donc de comprendre ce qui sensibilise les enfants et plus encore ce qui excite leur envie dans le sens de la consommation. Pour ce faire, les annonceurs se base sur des études d’ordre scientifique, associant chercheurs et psychologiques dédiés à leur cause et missionnées de cartographier leurs besoins émotionnels et sociaux sur la base de l’analyse de :

 

  • leurs comportements ;
  • leur imaginaire ;
  • leurs créations artistiques ;
  • leurs rêves.

 

En découlent des stratégies marketing d’entreprises parfois complexes et très précises en mesure d’atteindre cet objectif de toucher au plus près les enfants et d’activer leur réflexe d’achat. 

 

L’analyse de la cible de l’enquête, les 6-14 ans, a donné lieu à une typologie amenant à cinq principales stratégies de promotion de la marque. Nous les explicitons ainsi : 

 

  • les market’acteur : ceci évoque le besoin des enfants à ne pas être pris pour des « petits » et la réponse des stratégies marketing consistant à les rendre acteurs de la marque. On pense à la façon dont Fanta Danemark invite les enfants à faire les voix off des spots publicitaires ou Nike de customiser ses baskets sur le web ;  

 

  • Le marketing de la « frustration » : cette stratégie se base sur l’effet de frustration et d’attente relatif à la sortie d’un produit. Ainsi, l’annonce de lancement de la Play Station Portable de Sony a été faite 4 mois avant sa sortie effective ; 

 

  • Génération test : a contrario des premières stratégies promotionnelles adressées aux enfants sur la base d’un discours basé sur l’imaginaire et le ludique, les marques visent désormais les arguments matériels dans une optique consumériste. Le principe repose sur l’adage selon lequel « les enfants ne croient que ce qu’ils testent et expérimentent » certaines grandes marques comme QuickSilver proposent de tester directement leurs nouveaux surf, ou d’autres sites  Internet à être testés ; 

 

  • Family Teen : cette catégorie porte sur le désir des pré-ados à se retrouver en famille pour évoquer les marques qu’ils affectionnent. En retour, les stratégies des publicitaires consistent à jouer sur ce rapport intergénérationnel en prônant les indémodables. Ainsi Astérix est le héros préféré de 62% des garçons de 11-14 ans et le dernier épisode de Star Wars, constitue un complément très apprécié des enfants de l’ancienne trilogie ; 

 

  • L’achat rebelle : dernière catégorie, l’achat rebelle traduit cette habitude des ados rompus aux nouvelles technologies d’acquérir par le biais de l’Internet, des enchères, de la vente d’occasion, sur la base d’une négociation de l’achat. On pense à eBay et aux réseaux collectifs de médias, de jeux vidéos. 

 

La marque, d’une façon ou d’une autre fait donc partie intégrante de la vie des 6-14 et traduit une évolution pour les générations suivantes encore plus précoce. 

 

2.2. Développer la croyance 

 

La théorie marketing demeure toutefois basée sur un modèle fonctionnel constant instauré sur le schéma suivant :

 

Connaissance                         Intérêt                            Croyance                         Action

 

Ce qui se traduit par : stimuler la sensibilité d’un en enfant au stimuli d’un produit suscite en lui un intérêt débouchant sur la croyance qu’il possède les qualités de lui faire plaisir, laquelle déclenche en dernier lieu le comportement d’achat. 

 

2.3. Savoir communiquer  

 

On comprend incidemment la nécessité de maîtriser une communication qui relaie cette connaissance de l’enfant et adapte les techniques d’influence à sa sensibilité. 

 

Rappelons que le projet de tout annonceur est triple dans son approche de la cible enfants : 

 

  • influencer les enfants ;
  • influencer les parents ;
  • influencer l’un et l’autre.

 

Pour concevoir au mieux la communication garantissant ce triple effet d’influence, les annonceurs mesurent les retombées de leurs annonces sur la base de recherches scientifiquement validées. 

 

2.3.1. Influencer les enfants ? 

 

Les recherches portant sur l’influence de la publicité sur les enfants sont nombreuses. Citons à titre d’exemple et dans la perspective de synthèse qu’ils offrent les travaux de Brée en 1993 et de Guiochard en 1995.  

 

Dans leurs études, ceux-ci tentent d’établir un lien entre l’attitude de l’enfant devant l’annonce publicitaire et ce qu’il pense de la marque. Le but étant de trouver l’axe de corrélation leur plus fin possible. Ainsi, une publicité bien menée doit faire surgir chez l’enfant des sensations en adéquation avec le message véhiculé par la marque. 

 

Ainsi, il ressort de la synthèse de ces auteurs que la mise en scène et les éléments d’exécution de l’annonce tels que les personnages, la musique, l’histoire ou le décor impactent de façon primordiale l’enfant. En outre, dans le cadre du message visuel, on constate que « Ce qui est montré semble ainsi plus déterminant que ce qui est dit sur le produit. » De sorte que la réaction affective vécue par l’enfant est d’abord relayée par un élément contextuel de la publicité et auquel il arrime et développe sa croyance, plus tard, en relation avec le produit.

 

2.3.2. Influencer les parents  

 

Pour sa part, l’influence des parents est de deux ordres :

 

  • directe, dans le cas où le parent voit l’annonce ;
  • indirecte, dans le cas où l’enfant est le seul agent de cette influence.  

 

Les parents sont donc influencés deux fois, dans une chronologie qui dépend de la nature du produit et du fait qu’ils l’aient vu ou non à la réclame. 

 

Le comportement prescripteur de l’enfant intervient, une fois qu’il est sensibilisé à la marque, comme nous l’avons vu, par le truchement d’éléments exécutifs de l’annonce. L’influence se fera alors par le biais d’un gimmick, d’un générique, d’un slogan, scandés par l’enfant au long cours de la journée. 

 

L’influence des parents dépend donc de facteurs divers d’exposition qui sont convergents les uns avec les autres :

 

  • le degré de répétition de l’élément retenu par l’enfant ;
  • l’identification de la marque par le parent ;
  • le visionnage de la publicité par le parent ;
  • les qualités et l’attractivité même du produit. 

 

 

On conçoit donc que plus la publicité est réussie, facilement assimilable et répercutable, plus la marque est susceptible de déclencher un comportement d’achat de consommation directe ou d’ordre prescriptif. 

 

  1. Les modes de promotion d’une marque

 

 

Il est bien évident que l’objectif premier de l’annonce publicitaire est de vendre sa marque. Par enjeux, nous entendons cependant les étapes opérationnelles qui vont permettent de passer du réflexe d’achat à sa concrétisation.

Ces enjeux apparaissent plus clairement quand on conçoit l’adage suivant : « on ne naît pas consommateur mais on le devient ! »

Chaque marque voudra ainsi que l’enfant cible devienne son consommateur. Pour cela elle tentera d’instaurer des relations conviviales avec lui à travers l’organisation d’événementiels ludiques visant à construire sa notoriété et à susciter un effet de fidélisation. 

 

3.1. L’analyse des mécanismes d’attractivité des enfants 

 

Ce rapport privilégié à la marque suppose la mise en jeu de mécanismes dont l’actionnement doit satisfaire l’enfant, le conduire à choisir sa marque plutôt qu’une autre.

   

 

    3.1.1. L’identification 

 

 

Tout d’abord, l’un des premiers mécanismes à activer dans le rapport à la marque tient en le pouvoir d’identification de l’annonce. Ceci interroge différentes dimensions à mettre en corrélation :

 

  • un univers singulier de la marque ;

 

  • des valeurs identificatrices fortes, en ce sens qu’elles s’adressent précisément à une cible ;

 

  • le moyen de l’identification via un personnage symbolique. 

 

Ces trois dimensions convergent en effet puisque le personnage va venir incarner à la fois les valeurs de la marque et celles auxquelles l’enfant est supposé être sensible en fonction de sa tranche d’âge d’appartenance. On pense au bonhomme Malabar, au personnage de Nesquik ou le singe de Choco Pops, parmi tant d’autres dont la mission consiste à faire l’apprentissage de la marque. 

 

    3.1.2. L’implication

 

La technique promotionnelle doit également développer l’implication de l’enfant par le biais d’animations ou de rendez-vous promotionnels. L’enfant peut donc se rendre sur place, dans l’enceinte du grand magasin, d’un magasin de jeux vidéo pour un essai, pour l’essayage de vêtements ou d’articles de sports. 

 

De cette manière, il s’investit dans une relation avec la marque qui l’implique de façon physique et émotionnelle dans un cadre socialisé où se vit publiquement le rapport à la marque. L’enjeu est donc de placer l’enfant dans un contexte de situation réelle de façon à lui faire éprouver in vivo la pleine satisfaction du produit qui devient incidemment un besoin. 

 

Certaines pratiques promotionnelles font des cadeaux ou des remises significatives qui assimile la marque à la « bonne fée » selon l’expression de Derceville. 

 

A tout le moins, ce phénomène d’implication de l’enfant suppose la pertinence de l’approche promotionnelle qui doit tenir compte des trois variables que sont : 

 

  • le type par de marché (premier, second ou troisième) ; 

 

  • la technique promotionnelle utilisée ;

 

  • l’âge de l’enfant.

 

    

 

3.1.3. Le packaging

 

 

Le packaging, de par sa nature visuelle, est un déterminant important de la marque. Il constitue en effet la part matérielle de la valeur de la marque. Pour ainsi dire, le packaging constitue le lien le plus infime entre la convoitise et l’achat. C’est donc sur lui que se cristallise le désir de l’enfant, se posent ses mains…

 

Ainsi, de nombreuses marques visent des packagings de petite taille, adaptés à une préhension enfantine et leur permettant d’être transportés à l’école. Par exemple, les promoteurs conçoivent désormais des sachets de céréales uniques qui sont plus agréables et pratiques pour l’enfant que les gros paquets. 

 

Le packaging possède donc un rôle affectif dans le sens où il affecte les sens et l’émotionnel. Il est également vecteur de reconnaissance visuelle, au-delà du nom de la marque. Il constitue donc un élément d’aide à la décision d’achat. 

 

      

3.2. Des techniques de promotion de la marque

 

La marque étant conçue et existante, il s’agit désormais de la promouvoir auprès de la population cible par le biais d’opérations de communication. 

 

3.2.1. L’événementiel comme support

 

Evoquons ainsi, parmi les plus employées, les techniques suivantes de construction de la notoriété : actions dans les écoles, actions dans les entreprises, tourisme industriel, portes ouvertes, animation dans un point de vente, fête thématique dans un point de vente, festival, concours, un événement « enfant » dans un événement « adulte », événement de rue, road show.

 

Bien évidemment, l’effet d’omniprésence constitue une valeur primordiale pour que l’entreprise puisse se doter d’une identité continue à travers la perception de la marque. Cet effet peut être réussi par le marketing dit viral qui s’apparente plus ou moins au « bouche à oreille. » Il s’agit d’identifier les enfants leaders d’un groupe ou d’une communauté et de leur transmettre la marque. Par voie de conséquence, celui-ci est amené à communiquer sur le produit auprès de ses camarades.

 

Ceci constitue également une façon pour les entreprises de saisir ce que veulent les adolescents par le biais de quelques sujets référents. 

 

3.2.2. La commercialisation dans l’éducation

 

Même l’école, terreau de l’éducation et de la liberté iconographique, est devenue un lieu d’expression de la marque de son corollaire, le message publicitaire. Seulement les entreprises n’ont pas manqué d’y voir un exceptionnel terrain d’investigation et de spéculation.

 

Le milieu scolaire a l’avantage de concentrer les différentes cibles et de constituer une zone test grandeur nature pour le lancement de nouveaux produits ou marques auxquels les professeurs et les parents sont parfois partis prenantes. 

 

Les stratégies marketing employées relèvent  

 

  • de la commande de matériel scolaire ; 
  • la fourniture d’équipement 
  • les repas-minute et boissons gazeuses ; 

 

Le tout se voit orchestré et promu par le biais d’affichages dans l’enceinte de l’école, sur les autobus scolaires, les ordinateurs, et mille autres procédés qui font de l’école une zone expérimentale de la marque et notamment de la fidélisation par répercussion de l’effet de mode. 

 

3.2.3. Les médias « classiques »

 

3.2.3.1. Les canaux de promotion des marques 

 

Il existe de nombreux canaux de promotion de la marque. Nous ne citerons que ceux qui relèvent de la télévision et d’Internet, tout en gardant à l’esprit que la radio, les magazines, constituent également des leviers puissants.

 

Internet et la télévision sont deux des médias les plus ciblés par les annonceurs et cumulent donc un maximum d’efforts, de créativité et de technique.

 

  • Internet fait partie de la culture quotidienne des jeunes qui pour la plupart sont quasiment nés avec. Les enfants subissent une hyper-sollicitation durant leur navigation dont les parents ne soupçonnent généralement pas l’ampleur. D’autant que la publicité faite aux enfants sur Internet n’est pas réglementée. De ce fait, les entreprises peuvent très facilement fidéliser par le biais d’inscriptions aux newsletters, de communautés, réseaux d’aficionados. 

 

  • La publicité télévisée représente quant à elle un canal très usité par les publicitaires pour atteindre les enfants. Depuis les années 1980, cette offensive publicitaire s’observe et captive toutes les tranches d’âges. Sachant que chaque enfant passe deux heures et dix-huit minutes en moyenne en France pour les quatre-dix ans, et qu’un enfant sur quatre, entre huit et douze ans, possède son propre téléviseur, le nombre de spots projetés constitue environ 10 % des images visionnées. La publicité étant courte, attractive, avec des slogans et images fortes, l’enfant peut facilement les mémoriser. La publicité est donc devenue un moment d’écoute à part entière, une institution. 

 

Seulement jusqu’où les entreprises, le publicitaires peuvent-ils aller pour séduire les enfants. Ne doit-on pas réglementer ces spots et autres messages diffusés en permanence. Y a-t-il un danger à la surexposition ? Autant de questions auxquelles nous allons répondre dans la troisième partie de ce mémoire. 

 

Leur hypersensibilité aux nouvelles technologies a conduit les enfants à une sensibilité égale vis-à-vis des marques relayées par les médias dont ils bénéficient. Une enquête réalisée en ce sens par Ipsos en 2005 portant sur  2000 foyers soumis à un questionnaire de 200 questions a ainsi permis de mesurer le degré d’adhésion et de réceptivité de jeunes à quelques 200 marques. 

 

3.3. Etudes de cas 

3.3.1. Exemple d’un jeu vidéo 

Le jeu GTA IV illustre singulièrement notre propos en cela qu’il est interdit aux moins de 18 ans dans la mesure où il contient des contenus explicites de violence et de sexualité. 

Pour autant, les adolescents et même les jeunes enfants souhaitent l’acquérir en raison du fait qu’il correspond pleinement aux types de jeux qu’ils apprécient et surtout qui les attirent. Comme nous l’avons vu, l’enfant cible a une tendance naturelle à tendre vers des produits destinés aux classes d’âges supérieures, dans le cadre de son apprentissage de la vie. 

En outre, ce jeu polémique est clairement interdit aux moins de 18 ans et son acquisition suppose de montrer sa carte d’identité pour en attester. Cependant, les vendeurs savent pertinemment qu’un enfant accompagné d’un adulte peut procéder en toute légalité à cet achat puisqu’il y va de la responsabilité parentale d’autoriser l’enfant à son usage. 

En droite ligne de notre propos, nous savons très bien que l’enfant est la cible prescriptrice qui incite le parent à faire un tel achat. La promotion des jeux vidéos, qui sont la panacée des moins de 18 ans, consiste donc en des annonces publicitaires faussement destinée aux adultes pour être par ailleurs le plus souvent diffusées sur Internet, dans des sites « jeunes » auxquels les enfants ont très largement accès.   

Ainsi, un vendeur de Micromania à Paris, confie que « de nombreux gamins de 14 ans se voient refuser le jeu, car il faut montrer sa carte d’identité. » Toutefois, il avoue que « le plus jeune enfant auquel j’ai vendu un jeu avait 7 ans ! Son père qui connaissait la violence du titre était même content de lui faire plaisir! » 

Ce constat dénote donc de deux choses : d’une part, la publicité est efficace sur une clientèle à laquelle le jeu est supposée interdit, d’autre part, le pouvoir prescriptif des enfants peut être très fort et engage la responsabilité, ou l’irresponsabilité des parents. 

3.2.2. La promotion des divertissements « adultes » auprès des enfants

 

Dans le même ordre d’idée, conformément à un rapport publié en 2000 par la Federal Trade Commission des Etats-Unis, l’industrie du cinéma, de la musique et des jeux vidéo expose de façon habituelle les jeunes enfants à des produits destinés aux adultes. 

Dans une étude menée en ce sens par la FTC, sur 44 films catégorisés pour les adultes, quelques 80 % ciblaient des publics d’enfants en matière promotionnelle et notamment aux heures de grande écoute des publicités télévisées. De la même façon, des musiques populaires aux contenus explicites ont été largement diffusées dans des émissions jeunesse. 

En guise de justification, l’un des diffuseurs exprima clairement l’intention camouflée de viser les enfants sous l’étiquette confortable de produits pour adultes : « Notre objectif consistait à traquer cette insaisissable clientèle d’adolescents et à nous assurer que chaque jeune âgé entre 12 et 18 ans serait exposé au film. »

Pour reprendre notre propos sur les jeux vidéo, la même étude concluait que près de 70 % des annonceurs promouvaient des jeux pour adultes sur des médias destinés aux enfants. 

 

3.2.3. Analyse du cas de la Peugeot 806

 

 

 

« Peugeot 806. La voiture que les enfants conseillent à leurs parents. »

 

Le cas du lancement de la 806 à la fin de l’année 1994 par Peugeot est un cas frappant d’activation de ce pouvoir latent de prescription des enfants. Au point que se positionnant pour la première fois sur le secteur des monospaces dont Renault battait le haut du pavé depuis 10 ans, la firme a tout misé sur une la cible prescriptrice des enfants. 

 

3.2.3.1. Clientèle cible

 

La cible acheteuse visée se veut plutôt jeune, se tenant dans une tranche d’âge de 35 à 45 ans, constituée de cadres et de cadres supérieures ayant deux ou trois enfants. En raison même de son âge, la cible possède des enfants supposés d’une dizaine d’années, donc en âge de prescrire l’achat. 

 

Seulement jusqu’à présent, les enfants n’avaient pas de prérogative en matière d’achat de voiture, terrain réservé des parents, et notamment des hommes. La stratégie de communication va donc se faire extrêmement novatrice en dotant ostensiblement les enfants d’un pouvoir décisionnel. 

 

Au final, les enfants deviennent la cible prescriptrice de l’achat de la Peugeot 806. Fort de cette initiative, la stratégie des publicitaires consistera à matérialiser ce renversement des valeurs.

 

3.2.3.2. La communication 

 

Pour y parvenir, la stratégie de lancement va répondre à deux objectifs :

 

  • convaincre la cible prescriptrice en montrant qu’il s’agit d’un véhicule idéal pour la famille « qui se vit aussi bien à l’avant qu’à l’arrière » ; 

 

  • ensuite, il est question d’inverser les rôles : les enfants sont adultes et se souciant du plaisir des parents affirment ne reculer devant rien pour les amener à choisir la 806.

 

La communication est instructive à bien des titres. Elle montre que dans la mesure où la publicité instaure de nouvelles règles, dans une temporalité et un espace donnés, à savoir le spot publicitaire, avec une finalité ludique, rigolote, les parents et les enfants sont partis prenante de ce jeu. On constate donc qu’il est moins question de manipulation que d’invitation claire et nette à vivre autrement un produit traditionnel. Ce qui confirme à nouveau à quel point l’enfant est la clé de l’introduction de l’innovation dans la sphère familiale. 

 

3.2.3.3. L’événementiel 

 

Le concept de la publicité s’est avéré efficace, mais la stratégie de Peugeot ne s’en est pas tenue là. Elle s’est imposée dans l’organisation d’événements auprès du grand public de façon à s’assurer sur le terrain d’une sensibilité simultanée des parents et des enfants. 

 

On cite les mesures suivantes : 

 

  • la présence d’un jeu 806 dans les magazines pour enfants pour s’assurer de leur complicité : partenariats via un jeu le « Journal de Mickey » et « Picsou magazine » ;

 

  • des invitations aux enfants à venir à la concession avec leurs parents pour essayer le véhicule.

 

A l’issue de ces événements concourants au spot publicitaire, la 806 est devenue en quelques six mois le premier monospace français en terme de volume de commandes au point d’enregistrer une demande supérieure à l’offre. Preuve du pouvoir prescripteur de l’enfant ou simple engouement familial pour un produit avantageusement rendu ludique ?

 

Pour en avoir le cœur net, il s’agit d’évoquer ce pourvoir de prescription quand il s’anime sur des produits censément inappropriés à une clientèle d’enfants. Comment expliquer, dans ces conditions, que ces derniers soient sensibles à la publicité qui, dans l’ordre des choses, s’adresse à un public adulte ?  

 

  1.      Les limites de la publicité destinée aux enfants

 

  1. Les limites de la publicité destinée aux enfants : vers un étbique marketing

A l’instar de Suède, qui a interdit la publicité télévisée pour les moins de douze ans, le questionnement éthique dû à l’influence de cette dernière sur les plus jeunes est plus que jamais d’actualité. Par ailleurs, est-il normal d’inciter les enfants à la consommation ?

 

C’est bien là que se situe le débat d’une éthique portant sur le marketing. Est-il légitime d’user de moyens aussi efficaces et élaborés pour séduire la cible enfant et susciter en elle le réflexe d’achat, même sous le prétexte économiquement tenable qu’ils ont un pouvoir d’achat direct et indirect ?

 

  1. Les risques d’une dérive ? 

 

1.1. Problématisation

 

1.1.1. L’exposition des enfants 

 

Cette cible de l’enfance reconnue comme étant dotée d’un pouvoir d’achat, précocement de part son âge, et de plus en plus tôt, laisse présager un certain nombre de dérives potentielles pour certaines et matérialisées pour d’autres. 

 

Ainsi, l’axe de ce mémoire est bien de s’interroger sur la place qu’on dévolue à l’enfant dans le cadre de l’acte d’achat. En outre, notre problématique se définit de la façon suivante : Quels comportements induit une hyper-sollicitation marketing des  enfants consommateurs ? 

 

Cette question soulève conséquemment la notion d’éthique marketing, et s’interroge sur la légitimité et les risques d’une assimilation totale de l’enfant à un consommateur adulte. 

 

1.1.2. La responsabilisation des annonceurs

 

Le colloque « Regards croisés sur la consommation enfantine » tenu les 25 et 26 mars 2004 titrait une intervention de Nicolas Revenu « Que reste-t-il de l’enfance quand le marketing s’en mêle ? »

 

Cette réflexion traduit bien le fond de notre démarche et investigue sur le phénomène d’intrusion de la publicité et plus largement du marketing dans la communication adressée aux enfants. Dans son allocution, Nicolas Revenu montre que depuis 20 ans les jeunes sont devenues de vrais agents économiques dotés d’une influence grandissante au sein de la famille et sur la nature des achats. 

 

Dans ce sillage, des associations familiales dénoncent fréquemment la publicité et  jugent parfois ses communications commerciales comme relevant de gradation d’appréciation suivante :  

 

  • gênantes : car interférant avec la démarche éducative familiale et se déclinant du point de vue de l’habillement de l’alimentation par exemple ;

 

  • troublantes : en cela que les enfants occupent une trop grande place décisionnelle dans le processus d’achat familial ; 

 

  • dangereuses : puisque la publicité substitue à l’équilibre familial des modèles culturels tendancieux voire licencieux que ce soit au niveau de la violence ou de l’apprentissage de la sexualité.  

 

Ainsi donc, et forts de cette approche, nous tenterons d’expliciter les stratégies marketing au cours de la seconde partie en insistant sur les mécanismes appropriés à l’enfance. Enfin, une dernière partie donnera un panel des dérives possibles de façon à cerner les limites de la publicité à l’égard des enfants.

 

  1. La « spot mania» : principe de précaution ou danger réel ?

 

2.1. L’obsession du petit écran

 

2.1.1. Evaluation  du temps d’exposition 

 

Une enquête du Journal de Genève portant sur des enfants français et suisses de 7 à 12 ans révèle que les enfants passent en moyenne deux heures et demie par jour devant la télévision. 

 

Incidemment, ceux-ci sont très largement exposés aux spots publicitaires et constituent un public cible. Sans atteindre en France la démesure outre-atlantique, les petits américains voient ainsi défiler annuellement 30 000 spots publicitaires. De quoi donner une indication sur leur degré d’exposition à la publicité et la tendance générale qui affecte les pays occidentaux. 

 

Pour aller dans ce sens, Claude-Yves Robin, directeur général de la chaîne thématique française Canal J constate en effet que « L’enfant est de plus en plus prescripteur et il exprime ses goûts de plus en plus tôt ».  

 

2.1.2. Incitation ou manipulation ? 

 

Le fond du questionnement porte en réalité sur les résultats potentiels de cette incitation marketing et soulève la difficulté de délimiter la zone réelle d’influence de l’enfant. En effet, l’acte publicitaire, au-delà de son message, comporte des techniques diverses oeuvrant dans le sens d’une séduction de la cible. 

 

Derrière ce principe de précaution dont les détracteurs de la publicité intempestive se réclament, se cache la crainte d’une manipulation. La télé entre donc de plain-pied dans le débat d’une attraction obsessionnelle à laquelle on prête volontiers aussi bien qu’on s’en défend un caractère manipulatoire. 

 

Il semble que le caractère de manipulation doive s’interpréter dans une réflexion portant sur les comportements inhabituels des enfants et leur propension à harceler pour obtenir ce qu’ils veulent et à nier dans une part anormale les principes éducatifs familiaux. 

 

2.2. Une dangerosité en question

 

Cependant, la question de la dangerosité a du mal à établir une corrélation directe entre le degré d’exposition et les comportements des enfants. C’est pourquoi elle suscite un débat enflammé. 

 

D’un côté, on retrouve les proscripteurs qui craignent les conséquences d’un message publicitaire chez les plus jeunes qui ne sont pas en mesure de le comprendre. De l’autre, les partisans de la liberté de publicité se murent derrière des arguments pas forcément probants. 

 

Il en ressort donc une incertitude générale : la publicité a certes des effets, et c’est là le sens de toute démarche marketing, mais dans quelle mesure cet effet est-il susceptible de devenir nocif ?

 

2.2.1. L’impact sur les plus jeunes  

 

L’enfant possède-t-il le recul d’interpréter ce qu’il voit ? A partir de quel âge ? 

 

L’Académie américaine de pédiatrie, particulièrement inquiétée par le sort de ses enfants qui passent de nombreuses heures devant la télévision, rapporte en guise de réponse que « de nombreuses études ont démontré que les enfants, avant 8 ans, ne sont pas en mesure de faire la différence entre une émission et une publicité. », 

 

Erling Bjürstrom, professeur en communication, pense dans ce sens que les enfants de moins de 10 ans n’ont pas la capacité de distinguer un message à teneur commercial et incidemment de le distinguer d’un autre type de programme. 

 

Sous cet angle, la question de la précocité d’exposition semble être évacuée. Si ce n’est que nombre de psychologues tendent à dénoncer les pratiques manipulatrices de publicitaires. Ainsi l’Académie américaine de pédiatrie reconnaît-elle en amont « que la publicité qui leur est destinée est trompeuse ».

 

Conséquemment, on peut se demander si, malgré cette absence de sensibilité à l’achalandage commercial, les plus jeunes ne soient tout de même conditionnés dans une autre, sur la base d’accroches plus inconscientes. C’est en tout cas le parti de la  Suède qui, au titre de l’Europe se fait figure de proue de la lutte anti matraquage publicitaire. Sa législation interdit en effet aux heures de grande écoute la diffusion de publicités mettant en scène des personnages familiers des plus jeunes. 

 

2.2.2. Une nocivité non prouvée

 

A l’ordre du jour en Europe, la question de la nocivité du matraquage publicitaire est cependant repoussée par les publicitaires sur la base d’arguments de valeur et de péremption diverses : 

 

  • premièrement, Robert Gerson, ancien président pour la France de la firme Mattel distribuant notamment la poupée Barbie affirme que « rien n’empêchera les chaînes thématiques de diffuser de la publicité aux enfants » en raison d’un développement incessant des chaînes de télévision du câble ; 

 

  • deuxièmement, l’association Advertising Education Forum, coposée d’annonceurs et d’agences de communication, a récemment publié les résultats d’une enquête portant sur 5 000 parents répartis dans 20 pays européens et révélant que selon 85% des sondés, la publicité influencerait peu ou pas du tout leur progéniture. Quatre enquêtes en Suède, en Belgique, aux Pays-Bas et en Grande-Bretagne au titre de la Commission européenne avalise par ailleurs cette thèse : « Il n’existe pas de preuves convaincantes, écrit-t-il, que la publicité affecte les valeurs des enfants, leurs habitudes alimentaires, la consommation de tabac et d’alcool (…) Les enfants sont plus influencés par leurs parents et leurs camarades de jeux que par les médias. Et il conclut : les gens exagèrent le pouvoir de la publicité parce qu’elle est omniprésente. »

 

  • enfin, un troisième niveau d’argumentation vise à plutôt responsabiliser les parents que de priver les enfants de publicité en leur apprenant à faire le tri :  « c’est aux parents et aux enseignants d’apprendre aux enfants les réalités du monde commercial. Tout comme on leur apprend à regarder avant de traverser la rue », rapporte ainsi le journal The Economist.

La question de l’influence nocive des spots publicitaires montrés à outrance n’est donc aucunement démontrée. Cependant, ils possèdent un impact certain sur les comportements d’achat chez les 10-17 ans, quant à eux pleinement en mesure de détecter une communication commerciale. Nous aborderons donc la question d’une éthique marketing sous l’angle de l’addiction au produit que les spots sont en mesure de susciter, avec pour effet d’instaurer un comportement parfois outrancièrement agressif de décision d’achat jusque dans la sphère familial. En outre, la question éthique se pose en tant que la publicité peut décentrer la position de l’enfant dans la famille et lui octroyer une zone de pouvoir suir ses propres parents. 

 

2.2.3. La portée du pouvoir de prescription 

 

Ainsi, la question de l’impact des publicités sur les comportements des enfants et notamment ceux des adolescents pose la question de l’influence que celles-ci lui laissent supposer détenir. Et c’est peut-être en cela que le message publicitaire est basé sur une duperie quand il laisse entendre aux enfants qu’ils ont le pouvoir et la prérogative de l’achat. 

 

 

On démontre ce pouvoir de la prérogative de l’achat des enfants à travers un triple constat montrant qu’ils sont susceptibles de réaliser des achats de produits :

 

  • de leur tranche d’âge en tant que consommateurs ;

 

  • d’une autre tranche d’âge, précocement, comme les téléphones portables, en tant que « cible vivier » ;

 

  • destinés initialement aux parents, tels que la voiture, en tant que prescripteurs.

 

Une étude plus poussée nous montre que ce pouvoir de prescription grandit avec l’âge et peut donc atteindre des sommes conséquentes pour des biens onéreux. Une classification du pouvoir d’achat en fonction des biens permet de signifier cette disposition : 

 

  • à 6 ans, les enfants ont leur mot à dire sur les produits familiaux courants ;

 

  • à 9 ans, leur influence s’étend aux achats d’équipements ;

 

  • à 12 ans, ils deviennent imbattables sur les achats de produits techniques.

 

Une étude menée par BVA pour la chaîne de télévision Fox Kids donne une idée de l’ampleur de ce pouvoir prescripteur des enfants quant à la décision :

 

  • 40 % des enfants veulent décider des loisirs de la famille ; 

 

  • 66% des enfants cherchent régulièrement  à décider leurs parents quant au choix du film de cinéma ou des émissions de télévision ;

 

  • 50% des parents accèdent à la formulation de leurs enfants. 

 

Fait que confirme l’étude Mintel réalisée en Grande Bretagne, « Children : the influencing factor » qui matérialise cette influence notamment sur le plan de la sensibilisation des parents aux problèmes de l’environnement, et conséquemment de l’introduction des  produits verts dans les familles.

Ceci dit, les produits verts ne constituent pas les seules prérogatives des enfants en matière de prescription d’achat. Quand en effet la publicité s’en mêle et donne son feu vert, il s’avère qu’un jeu se crée entre l’enfant, l’annonceur et le parent. Cette trilogie s’anime autour d’une sorte d’effet de complicité au sein de la cellule familiale. Cet effet favorise la prise de décision en faveur de l’objet qui, s’il n’était convoité par personne au départ, se retrouve sur toutes les lèvres et se fait le lien entre les plaisirs parentaux et infantiles. 

 

  1. Pistes d’actions pour une éthique marketing

 

Certaines publicités, vantant notamment produits vidéo, jeux ou films, déroulent un discours trompeur de deux manières différentes en cela qu’elles visent un public d’enfants avec des produits d’adultes :

 

  • soit en vendant un produit interdit aux moins de 18 ans dont le marketing et le contenu vise en réalité les adolescents, voire les plus jeunes ;

 

  • soit en diffusant un produit pour adulte derrière une étiquette grand public.

 

Réfléchir sur une éthique marketing revient à ne plus chercher la seule efficacité et pénétration du message auprès de la cible marketing, mais à envisager aussi comment le message peut-être digéré. Il apparaît suite à ce mémoire qu’on ne peut systématiser notre critique en imputant toutes les dérives aux seules marques et publicitaires. 

 

S’interroger sur la probité de certains n’empêche pas de prendre des mesures permettant de mieux encadrer ce monde la communication de la marque en faisant tantôt porter les efforts sur l’élaboration d’une législation plus précise et tantôt sur l’apprentissage d’une éducation à la consommation.  

 

3.1. Coordonner l’action publique 

 

Le premier axe, de portée plus législative, s’inscrit déjà dans une réflexion globale de dimension européenne. Poser un encadrement juridique protégeant l’enfant exposé aux annonces intempestives des marques est le premier pas d’un effort commun. Il n’est pas question d’interdire ou de limiter le flux de messages publicitaires, mais de les relativiser dans un cadre légal, technique et effectif, en :

 

  • en s’assurant que les médias pour enfants ne diffusent que des messages adaptés aux enfants ;
  • en soumettant l’accès aux programmes télé à la responsabilisation parentale ;
  • en légiférant l’Internet actuellement totalement libre en matière de publicité.

 

Ces mesures n’ont rien de coercitives et ne doivent pas être interprétée de façon imposées. Il s’agit juste de poser un cadre, sans quoi, toute dérive peut survenir à un moment où un autre, au bon vouloir d’un diffuseur peu scrupuleux.

 

En outre, il est davantage de poser un cadre de référence servant de support à une éthique marketing et allant dans le sens d’une réflexion globale. Actuellement, le clivage annonceurs/consommateurs est trop marqué. Il s’agit de mettre les deux instances en relation au moyen d’organismes concertatifs missionnés par le gouvernement et dont le but est non seulement de rappeler les règles juridiques mais encore de prendre la mesure des pratiques et dérives quotidiennes. 

 

.

 

3.2. Une éducation à la consommation

 

En définitive, nous préconisons une éducation à la consommation. De fait et selon une observation du Conseil national de la consommation, « Dans une société en perpétuelle évolution, l’éducation à la consommation du jeune enfant à l’âge adulte devient une nécessité pour lui permettre une meilleure intégration dans la vie économique et sociale. Sollicité de toutes parts dans sa vie quotidienne, l’enfant (et donc l’adolescent) doit faire des acquisitions de connaissances variées pour devenir un jeune consommateur averti… ».

 

Cette éducation à la consommation s’explicite d’emblée sur une approche globale de tous ses aspects de façon à ce que les enfants comprennent les mécanismes des stratégies marketing et les règlements de diffusions à travers une études portant sur :

 

  • les droits et contrats de l’image, 
  • les publicités, 
  • la sécurité et qualité des services et des produits, 
  • la lecture et du décryptage des étiquettes, 
  • la santé et prévention sans oublier de la gestion d’un budget.

 

Ceci peut constituer un apprentissage scolaire mais doit également recueillir l’adhésion des parents sans lesquels nulles préventions ne s’ancre dans la durée. En outre, il est question de développer chez l’enfant un esprit critique de façon toute aussi précoce que ne l’est son immersion dans les comportements d’achat. 

 

Conclusion

 

Cette réflexion sur une éthique marketing a guidé notre travail tout au long de ce mémoire. D’emblée, nous avons situé notre propos sur l’enfant consommateur, la façon dont il est le produit d’une évolution sociologique de sa place et de ses prérogatives dans la famille, et d’un travail de sensibilisation des marques. 

 

Dans la logique des choses, l’arrivée de l’Internet, la présence sans cesse affirmée de la télévision, tout a contribué à doter les stratèges de médias de communication et les stratégies d’une efficacité accrue.

 

En s’interrogeant sur les dérives de l’hyper sollicitation dont les plus jeunes sont les victimes, nous nous sommes rendus compte de ce que la force des stratégies de communication des marques tenait à l’invisibilité des mécanismes actionnés. En ce sens, les années 90 et 2000 ont été celles des générations tests.

 

Aujourd’hui, le recul des années laisse entrevoir la nécessité de matérialiser la réflexion éthique de mesures allant dans le sens d’une protection accrue des enfants, d’une clarification de la législation en matière publicitaire et d’une éducation à la culture marketing dans le but d’aiguiser l’esprit critique.

 

Définitivement, notre époque possède des outils redoutables d’efficacité, une compréhension des mécanismes humains lors des comportements d’achat, il est donc temps d’organiser une société de façon à ce que les enfants possèdent eux aussi des outils d’analyse, de compréhension et de distanciation vis-à-vis des messages d’influences divers dont ils sont la cible. 

 

Assurément,  poser une éthique du marketing, c’est réfléchir à la place que nous lui dévoluons dans la société de demain.

 

Bibliographie

 

Ouvrage

 

Naomi Klein – No LogoLa tyrannie des marques, 2000.

 

Mémoires, études

 

Mémoire de Marketing Management & Communication « CONTRIBUTION DE RECHERCHE » – La cible « enfants » – Mathieu Vialettes – 2006/2007

 

http://www.marketing-etudiant.fr/memoires/i/implication-marketing-infantile/Conclusion1.php

 

Mémoire de Marketing Management & Communication « CONTRIBUTION DE RECHERCHE » – La cible « enfants » – Mathieu Vialettes – 2006/2007

 

www.ipsos.fr/CanalIpsos/articles/1627.asp

 

www.insee.fr/fr/insee_regions/reunion/prodser/pub_elec/revue/revue129/revue129_croissance_ demographique.html

 

Articles

 

Le vrai pouvoir d’achat de l’enfant, Action Commerciale N°181 – 22/11/2000 – L. Deschamps

 

Les enfants et la publicité – Nathalie Guichard – Maître de Conférences – Université de Paris I – Panthéon-Sorbonne – Laboratoire de Recherche PRISM-Sorbonne, 5 octobre 2006, Article paru dans le numéro 78 de Réalités Familiales 

 

J’ai vendu une GTA à un enfant de sept ans ! Le Post

 

 Publicitaires, lâchez les enfants!, Pascaline Dumont, journaliste française indépendante. 

 

Sites Internet

 

www.familyservicesottawa.org/…/Enfants%20et%20adolescents/Enfants%20avec%20cle%20au%20cou.pdf

 

www.media-awareness.ca/francais/parents/marketing/cible_enfants.cfm

 

www.mediadico.com

 

www.mondadoripub.fr

www.effie.fr/_95peugeot.htm

 

www.media-awareness.ca/francais/parents/marketing/cible_enfants.cfm

 

www.unaf.fr/articleimprim.php3?id_article=630

 

Annexes

 

Annexe 2

 

Annexe 1

 

Nombre de pages du document intégral:45

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