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les matières premières locales dans les pâtisseries de diverses régions de France

Pâtisserie de France

Thème : les matières premières locales dans les pâtisseries de diverses régions de France

Problématique : La place et l’avenir de la pâtisserie française lorsque l’on met au premier plan l’origine locale des matières premières

  • Plan

Introduction

Partie I –    Le marché des produits fermiers en France

Chapitre I –  Marché des intrants dans la production pâtissière en France

  1. Consommation et production pâtissière en France
  2. Marché des principaux inputs de la production pâtissière
  3. a) Le Sucre
  4. b) L’œuf
  5. c) La Farine

Chapitre II – Les produits fermiers et les circuits courts

  1. Concepts de produits fermiers et circuits courts
  2. Quelques chiffres
  3. Les attentes des consommateurs
  4. Typologie des consommateurs
  5. a) Influence de l’âge
  6. b) Influence de la Catégorie Socioprofessionnel (CSP)
  7. c) Influence du lieu de résidence
  8. Perception positive des produits fermiers
  9. Des arguments sur le plan économique

Partie II –   Forces et faiblesses de l’utilisation des matières premières locales dans la pâtisserie

Chapitre I –  Des éléments moteurs pour l’utilisation des matières premières locales

  1. La promotion du « made in France » sur le domaine de la pâtisserie
  2. Le locavorisme, l’écologie et le bio
  3. a) Du côté des industriels et des distributeurs
  4. b) Raisons écologiques
  5. c) Le bio
  6. d) Des idées à saisir
  7. La recherche de la qualité
  8. a) Les normes de qualités : les labels
  9. b) Les tendances du goût en gastronomie française
  10. c) Les nouvelles tendances de la pâtisserie
  11. Les tendances dans le domaine sanitaire

Chapitre II – Des éléments à améliorer

  1. Marques et notoriété
  2. a) Exploitation industrielle
  3. b) Exploitation artisanale
  4. La barrière du prix élevé
  5. De nouvelles tendances à prendre en compte

Conclusion

Bibliographie

 

Introduction

 

Des études ont révélé que les français essayent d’écourter d’année en année le temps consacré au déjeuner (avec une demi-heure, une baisse d’une minute par an) avec un accroissement des déjeuners pris hors foyers. De plus, les repas se voient de plus en plus simplifiés jusqu’à ne plus respecter la trilogie classique (entrée, plat, dessert). La situation de la pâtisserie entre autres est mise en cause par cette sorte de perturbation sur les comportements des consommateurs. En outre, le développement au niveau du marché de l’agroalimentaire laisse entendre un avenir prometteur pour les différentes branches de ce secteur.

Avec un marché en forte concurrence et une conjoncture instable et incertaine au niveau national, le développement dans la branche pâtisserie semble requérir des éléments spécifiques, inhabituels, apportant plus de valeurs, de synergies et moins de contraintes. Cette recherche d’éléments optimaux amène à réfléchir sur la place et l’avenir de la pâtisserie lorsque l’on met au premier plan l’origine locale des matières premières, dont des produits fermiers. L’idée n’est pas tellement nouvelle, notamment dans d’autres branches, mais une analyse plus approfondie de cette problématique devrait permettre de mettre en évidence certains facteurs devant promouvoir les activités des professionnels de la pâtisserie.

Dans la présente étude il convient d’entamer les analyses par un approfondissement du côté des intrants, dont l’élément clé : les produits fermiers. La première partie sera ainsi consacrée à l’inventaire non exhaustive des existants, autant sur le domaine de la pâtisserie que sur celui des produits fermiers ainsi que les caractéristiques spécifiques de ces derniers.

Les études sur les opportunités et les faiblesses de la combinaison de la production pâtissière avec les produits fermiers occuperont la deuxième partie. Il sera ainsi question de déterminer les principaux avantages que cette combinaison devrait apporter, mais également les conséquences non positives que cela pourrait engendrer avec quelques propositions de résolutions des problèmes constatés.

 

  • Le marché des produits fermiers en France

 

Afin de mieux définir l’environnement de l’étude, il est important dans un premier temps de se pencher sur les paramètres et les variables qui agissent sur la problématique posée. Successivement alors, seront analysés dans le contexte de la production pâtissière en France, sans pour autant prétendre à d’analyse exhaustive :

  • le marché des matières premières qui aurait sans doute d’incidences importantes sur le secteur ;
  • le concept de produits fermiers et des cycles courts.

 

  • Marché des intrants dans la production pâtissière en France

 

Le secteur de la production pâtissière serait évidemment l’un des plus évolués depuis son enrichissement d’histoire au XVIè siècle et amplifié par de multitude d’innovation au XXè siècle. Les tendances n’a nullement stagnées au fil des années et les progrès techniques ont toujours essayé de répondre présents en apportant de meilleure perspective et d’amélioration de la qualité productive.

Ce phénomène de développement de la pâtisserie française, pratiquement sur tout le plan (économique, social, culturel, …) est dorénavant manifeste et se concrétise au niveau de multiples faits et réalités :

  • croissance de l’industrie du secteur qui est désormais dominé par de puissantes firmes (Charles Victor, Services Traiteur Pâtissier, MEERT Tradition, …) ;
  • prolifération de myriade d’organismes professionnels relatifs à la filière pâtissière comme les confédérations ayant pour vocation de défendre et promouvoir les intérêts des artisans pâtissiers (le CNAP ou Confédération National des Artisans Pâtissiers, par exemple), les nombreux centres de formation professionnelle sur le métier (Centre Féminin d’ Etudes de la Pâtisserie, Ecole Nationale Supérieure de la Pâtisserie, …), les diverses partenaires qui se consacrent à ce domaine (Centre Technique des Métiers de la Pâtisserie, les Fonds d’Assurance Formation, Journal du Pâtissier,…), ainsi que les divers concours pour la promotion des métiers de pâtissier.

Dans ce contexte, une approche plus profonde du secteur de la pâtisserie devrait donner plus d’idées afin de mieux apprécier la place de la pâtisserie au cœur de la société française, mais aussi d’être plus prévisible sur l’avenir du secteur lorsque l’on essaye de s’adapter à de nouvel environnement, ou de modifier certaines variables. De prime abord, effectuer un état des lieux concernant la consommation et la production s’avère nécessaire. Il faut quand même noter que l’on ne se présume pas pouvoir effectuer des études complètes, mais juste celles qui devraient aider à cerner les réalités qui permettraient ensuite de parvenir aux fins décrites précédemment. Ceci étant, les analyses qui seront étalées ne seront pas réalisées de façon à suivre des études strictement techniques, ou économiques, ou sociales, … mais tourneront plutôt autour de la question de l’avenir de la pâtisserie dans le cadre des produits fermiers comme matières premières principalement utilisées.

 

  1. Consommation et production pâtissière en France

 

A défaut de statistique fiable en matière de consommation, il est préférable de se pencher sur certaines études qui pourraient apporter les informations utiles sur la présente étude. En effet, des recherches faites en 2009-2010 sur la consommation alimentaire ont révélé une certaine tendance au rapprochement des pratiques de consommation des ménages français. Du coup, il est possible d’estimer qu’une famille française consacre en moyenne 15% de son budget aux produits de la pâtisserie.

Si l’on accorde plus d’attention sur l’évolution de la statistique de la production pâtissière (qui est souvent confondue avec celle de la boulangerie), on voit nettement que celle-ci est dominée largement par la production industrielle. Désormais, l’indice (base 100 en 2005) brut de la production industrielle dans ce secteur présente une certaine stagnation notamment depuis 2003. D’ailleurs, les données démontrent que cette stagnation est le résultat d’un développement des produits mieux adaptés à l’évolution des consommateurs (comme les préparations pour gâteaux, les cakes et les gâteaux fourrés) au détriment des produits génériques traditionnels tels que les quatre-quarts, les madeleines, … Le marché local français présente tout de même un volume total de près de 145 000 tonnes par an de produits pâtissiers (production industrielle et importation confondue) avec un taux d’accroissement du chiffre d’affaires positif chaque année.

Pourtant, selon les chiffres de l’INSEE en 2007 qui démontrent d’ailleurs les tendances du secteur, le baromètre annonce une belle expansion et une incessante progression du développement de la production pâtissière. En effet, à cette époque, l’on compte environ 4 800 entreprises œuvrant dans le domaine de la pâtisserie (industrielle et artisanale confondues) avec un chiffre d’affaire qui atteigne 1,5 milliards d’euros dont la moitié est accaparée par la production de pâtisserie fraiche. C’est un secteur non encore saturé et offre d’emploi à quelque 22 000 professionnels. En France, toujours en 2007, l’on dénombrait plus de 4 200 points de vente spécialisés en la matière.

 

  1. Marché des principaux inputs de la production pâtissière

 

Selon les professionnels de la pâtisserie, les ingrédients courants dans la fabrication des produits pâtissiers sont : le sucre, l’œuf, les matières grasses dont l’huile, et la farine de blé bien entendu. Ces principales matières premières conditionnent évidemment, non seulement l’aspect économique des produits finis mais surtout la qualité et le côté social de ces derniers. En d’autres termes, il y a lieu de préciser que le processus de production entre déjà dans la définition de la segmentation du secteur selon les types de consommateurs potentiels et effectifs.

Tout ceci annonce ainsi l’importance de l’attention que l’on doit accorder aux études de certains de ces principaux inputs de la pâtisserie française.

 

  1. Le Sucre

 

Toutes les formes (à l’état brut, sirop,…) et tout type (sucre blanc, sucre mi-blanc, cassonade, sucre glace,…)  de sucre sont utilisés dans la pâtisserie.

En France, la consommation annuelle de sucre par habitant est passée de 5kg à la moitié du XIXè siècle à 35kg dans les années 70. Selon des enquêtes sur la consommation individuelle de glucides simples (sucres), celle-ci présente une certaine stabilité et va dans les 100g par jour.

Avec une production mondiale qui se chiffre à 120 millions de tonnes de sucre, la France tient le premier rang quant à la production de sucre de betterave[1]. Ceci n’est pas étonnant avec un rendement de 14 tonnes à l’hectare en 2011 pour produire un volume total de 4,7 millions de tonnes (toute production confondue), et exporter 2,5 millions de tonnes.

Faut-il encore insister sur le fait que la production du Sucre, notamment celui entrant dans la fabrication pâtissière, est pratiquement en dehors de la production artisanale.

 

  1. L’œuf

 

La production mondiale donne des chiffres de 62,4 millions de tonnes d’œufs en 2009 (pour les œufs de poule ; les œufs hors poule pèsent un peu moins de 5 millions de tonnes).

La question d’hygiène est primordiale dans la consommation des œufs et nécessite beaucoup de précaution pour en assurer la fraîcheur. En effet, le nettoyage des œufs après la ponte augmente la perméabilité de leur coquille et ainsi le risque d’infection par des micro-organismes. L’œuf rincé est alors à l’utilisation immédiate.

La production, le transport ainsi que les conditionnements de cette matière première sont donc très délicats et ceci suppose que les consommateurs (que ce soit des consommateurs finaux ou des producteurs tels que les entreprises de pâtisserie) sont de plus en plus exigeant en matière de traçabilité, c’est-à-dire en ce qui concerne l’origine de ces produits. Les normes en France imposent alors des règles strictes sur la commercialisation et notamment sur l’étiquetage des œufs sur le marché français, à savoir :

  • la date de péremption : la date de consommation recommandée ne doit pas dépasser 28 jours après la ponte ;
  • le mode d’élevage doit figurer sur l’étiquetage : en plein air, en sol ou en cage

Les œufs bio devraient porter cette mention, et doivent provenir de l’agriculture biologique à 90% avec quelques règles fixées dans les normes : une partie de l’alimentation des poules doivent provenir de leur lieu d’élevage, une densité de 6 poules au mètre carré, les poules pouvant aller à l’extérieur, avec 8 heures de repos par jour au minimum. Il n’existe pas de réglementation des indications « œufs de ferme » et celles-ci n’ont pas de vraie valeur.

87% des poules pondeuses en France sont élevées en cages.

 

  1. La Farine

 

L’intérêt dans ce paragraphe est de porter l’étude sur la mise en valeur de l’utilisation de la farine dans la fabrication pâtissière. Le taux de blutage, ou encore le taux de cendre, caractérise les différents types de farine dans l’hexagone. Autrement dit, les différentes variétés de farine sont classées en fonction de la masse de cendre restant après calcination d’une certaine masse (100g en général) de farine, donc selon sa teneur en matière minérale, et cela détermine sa qualité et sa destination d’utilisation. A titre d’exemple, la farine « T55 » désigne un type de farine qui, après calcination de 100g de farine de blé dans un four de laboratoire à 900°C, ne donne que 0,55g de cendre.

En quelque sorte, ce processus qui détermine la classification d’un échantillon de farine donne des idées sur la pureté de la farine produite puisque c’est surtout le son (l’enveloppe de la graine de blé) qui contient les matières minérales. La farine qui rentre dans la production pâtissière devrait désormais appartenir à la catégorie « T45 », c’est-à-dire avec un taux de cendre inférieur à 0,55g. En ce qui concerne « l’impureté », c’est notamment aussi le son qui contient les pesticides et les autres agents chimiques utilisés sur les cultures de blé. Ce qui fait que la farine de type « T55 » est conseillée en agriculture biologique afin d’éliminer les résidus chimiques dans la farine.

De même, le taux protéique (teneur en gluten) permet de déterminer la destination de la farine dans la chaîne de production. En effet, l’industrie de la boulangerie préfère la farine à fort taux protéique, tandis que la fabrication pâtissière exige, en général, un taux relativement bas de teneur en gluten (moins de 10%) afin de permettre des préparations qui requièrent un faible mixage.

 

  • Les produits fermiers et les circuits courts

 

Il s’agit dans ce chapitre de  détailler les marchés des principaux ingrédients des produits pâtissiers en France au regard des produits dits fermiers. Avant d’aller plus loin dans ce domaine, il est d’abord nécessaire de bien définir l’environnement de cet autre circuit des produits agricoles.

 

  1. Concepts de produits fermiers et circuits courts

 

Par opposition au secteur industriel qui produit dans un contexte d’économie d’échelle, les produits fermiers se situent quant à eux dans le cadre de la production artisanale, relativement de petites quantités. Il est important de noter que l’appellation « produits fermiers » ou encore « cycle court » ne veut pas nécessairement impliquer des produits exclusivement à l’état brut. En effet, des transformations et des préparations préalables dont l’utilisation de machine peuvent intervenir avant la commercialisation sans pour autant nuire au label « fermiers » des produits en question. Parmi ceux-ci, on peut par exemple citer :

  • les produits bruts non transformés comme les fruits, les légumes, les œufs, etc.
  • les boissons comme le vin, les jus, le lait, etc.
  • les produits transformés ou semi-transformés dont l’huile, les fruits et légumes conservés (confitures, …), etc.

L’important alors pour que l’appellation « fermier » reste en état se situe au niveau des processus de production qui doivent être artisanaux et dans une moindre quantité par rapport à la production industrielle.

En parlant de cycle court, il s’agit des marchés dont il y a un seul intermédiaire au plus entre les producteurs et les consommateurs, au-delà desquels, l’appellation en question se voit être éteinte. Dans cet ordre d’idée, il est possible de distinguer deux catégories de type de marché :

  • la vente directe où il n’y a absolument aucun intermédiaire entre les producteurs et les consommateurs. On y rencontre entre autre :
  • les ventes à la ferme,
  • les ventes collectives où les producteurs viennent à tour de rôle vendre aux consommateurs directement les produits des exploitants adhérents,
  • les ventes sur les marchés (marchés paysans, par exemple),
  • les ventes en tournée ou à domicile où l’on constitue une gamme diversifiée dans une camionnette avec quoi les producteurs effectuent un circuit à proximité des habitations presque périodiquement,
  • les ventes par correspondance où l’on met à disposition des acheteurs des catalogues les produits des agriculteurs, notamment par Internet,
  • les ventes organisées à l’avance de paniers garnis des produits locaux où les consommateurs s’engagent à acheter régulièrement un panier à prix fixe,
  • et les accueils à la ferme (avec consommation sur place).
  • la vente indirecte avec un seul intermédiaire comme aux restaurations et aux marchands détaillants.

Faut-il aussi rappeler qu’en tant que produits agroalimentaires, ces produits fermiers proviennent tous des fermes, et en ce qui concerne la présente étude, celles des diverses Régions de France essentiellement.

 

  1. Quelques chiffres

 

Selon l’observation faite par l’Agence bio (baromètre CSA) en 2006 sur le secteur, l’on parle que 70% des consommateurs privilégient les produits fermiers (l’on dénombre aussi 60% qui préfèrent les produits biologiques). On estime désormais que le quart des consommateurs de produits agroalimentaires accordent le terme « fermiers » à la définition des produits biologiques. De plus, avec des fortes tendances aux produits biologiques et au locavorisme (cf. infra) il faut s’attendre à un fort élargissement du marché des produits fermiers dans les décennies qui suivent cette observation.

Ces statistiques se montrent encore plus élevées dans certaines localités ; selon des enquêtes faites dans la ville de La Roche-sur-Yon, chef-lieu du Département de la Vendée (Pays de la Loire), on enregistre jusqu’à plus de 4/5 de préférence aux produits fermiers, en 2007.

En termes de consommation effective, les ménages français allouent 12,5% de leur budget alimentaire aux produits fermiers selon l’INSEE en 2006.

Concernant les circuits de vente, 88 000 agriculteurs, soit 16,3% pratiquaient la vente directe en 2005 ; 50 000 d’entre eux possèdent d’unité de transformation (47%). Les filières les plus touchées par la vente directe concernent celles les fruits et légumes (4%), l’horticulture, la viticulture et la filière animale. Ce type de vente est encore plus développé dans le Sud-Est de la France, dont dans la Région Rhône-Alpes qui compte plus de 1000 exploitants dans la pratique pour quelques 100 000 consommateurs.

 

Il est ainsi évident de dire que les consommateurs deviennent de moins en moins sceptiques en ce qui concerne l’origine de leur alimentation et ce phénomène est surtout expliqué par divers facteurs qui alimentent la motivation vers les produits fermiers

 

  1. Les attentes des consommateurs

 

Parmi les principaux moteurs qui nourrissent la motivation vers les produits fermiers, l’on en dénombre quelques uns qui illustrent mieux la tendance la consommation en ces débuts du XXIè siècle.

En avant première, l’on peut dire que les consommateurs sont en quête de produits qui valorisent le mieux la notion de terroir et de tradition. Cette tendance est de plus en plus affirmée sur le plan gastronomique ; les nombreux salons et foires en la matière font pratiquement la conclusion que la valeur de l’authenticité et du lien social prend la première place dans ce que recherchent les consommateurs.

Ensuite, vient l’incontournable question de l’environnement écologique qui imprègne des marques partout. Les produits biologiques (qui sous-entendent parfois le label « fermiers ») sont ainsi mis en vedette comme l’une des véritables alternatives à diverses pratiques afin de limiter les émissions de CO2, de réduire l’utilisation des emballages et conditionnements ne respectant pas l’environnement. Bref, la notion d’éco-responsabilité est désormais associée à celle des produits du cycle courts.

De temps en temps, on invoque aussi l’absence de nombreux produits (surtout alimentaires) dans des circuits de distribution traditionnels. Le meilleur moyen d’y remédier pour la plupart des consommateurs est d’aller directement aux sources, c’est-à-dire chez le fermier habituel. Bien que les marchés des circuits traditionnels offrent la proximité pour des produits de substitution, bien d’acheteurs n’hésitent pas de dépenser plus pour étancher leur soif d’un produit spécifique.

Il ne faut pas non plus minimiser l’importance que la majorité des consommateurs accordent à la traçabilité de leurs produits alimentaires. Les produits fermiers répondent favorablement à cette attente en offrant la meilleure traçabilité, et donc plus de sécurité aux consommateurs.

Enfin et non moindre, les consommateurs finaux deviennent encore plus exigeants en matière de qualité gustative et nutritive et cela se comprend quant à la diversité accrue de l’offre.

Il faut dire, en somme, que toutes ces motivations sont confirmées autant dans le domaine de la gastronomie française en général que dans celui de la production pâtissière en particulier.

Du côté de l’offre, la prolifération du marché des cycles courts s’explique entre autres par le fait que cette pratique améliore encore plus le revenu des producteurs et assure en quelque sorte la durabilité de leurs exploitations. L’on peut citer comme raisons :

  • l’augmentation des marges des producteurs par rapport à d’autres circuits,
  • la réduction des besoins en fonds de roulement, c’est-à-dire que les ventes à crédit se voient de plus en plus être remplacées par des ventes au comptant (paiement directe, voire à l’avance),
  • la réduction d’autres coûts dont ceux du transport.

Il en est sorti que, quoi que les intérêts économiques s’opposent un peu entre consommateurs et producteurs sur le marché des produits fermiers, l’accent est surtout mis sur d’autres plans que l’argent du côté de la demande. L’intérêt commun du cycle court (autant pour les producteurs que pour les consommateurs) se trouve au niveau de leur relation (offreur-demandeur). Ainsi, le contact direct (ou semi-direct) entre les deux protagonistes permettrait d’entretenir un meilleur moyen pour encore mieux servir les attentes des consommateurs : les échanges et les partages devraient conduire à améliorer la qualité (et/ou la quantité) de la production, voire définir des modes de production spécifique et particulière, relatifs aux attentes des demandes. Il n’est d’ailleurs pas rare de trouver des producteurs motivés surtout par une volonté de valoriser des produits que les chaînes industrielles n’arriveraient pas à réaliser.

Les nombreuses crises importantes qui frappent le secteur agroalimentaire dans ces quelques décennies autour de l’année 2000 (problèmes génétiques, maladies et épidémies, …) ont conduit les consommateurs à réviser leurs habitudes de consommation. Le bouleversement est ainsi senti tout au long de la chaîne de production jusqu’aux assiettes que les consommateurs se voient mêmes être obligés de revenir à la terre.

 

  1. Typologie des consommateurs

 

Même si l’on affirme la tendance réelle vers les produits fermiers, en réalité, l’intensité de cette ruée ne se résume pas à la généralisation des pratiques même si l’on écarte ceux qui sont indifférents à la provenance de leur alimentation.

 

  1. Influence de l’âge

 

D’abord, il est constaté que la consommation des produits fermiers est très influencée par l’âge du consommateur. En ce sens, l’on peut dire que ces catégories de produits alimentaires attirent moins la population relativement jeune que les plus âgées. Il est possible de classé les comportements des consommateurs selon leur tranche d’âge :

  • Inférieur à 30 ans : Le manque d’habitude dans ce groupe d’âge et appuyé par des raisons économiques (prix généralement élevé des produits fermiers) ont eu le dessus. Cette tranche d’âge reste non-acheteuse et préfère tant bien que mal leurs circuits de distribution traditionnellement familiers. Cependant, ces consommateurs semblent-ils vouloir améliorer leurs achats des produits fermiers lorsque le label national sur ces produits existe et vérifié comme garantie. Potentiellement, ces jeunes gens n’hésiteraient pas à se lancer sur ce type de produits si leurs points de vente habituels (les grandes et moyennes surfaces) proposeraient de rayons spécialisés en produits fermiers par exemple.
  • De 30 à 45 ans : Ils ne sont pas indifférents sur le sujet mais présentent tout de même une certaine difficulté à s’organiser dans la réalisation de leurs achats. Ils sont désormais acheteurs mais dans une proportion assez limitée en évoquant, eux aussi, le niveau relativement élevé des prix de ces produits fermiers. Les principales raisons qui accroîtraient les budgets qu’ils allouent à cette catégorie de produits seraient la proximité (points de vente spécialisés à moins de 10 mn de leur domicile et rayon spécialisé dans les grandes surfaces, par exemple) et une relation de confiance avec les producteurs.
  • Entre 46 et 60 ans : Ce sont des acheteurs réguliers, une fois par semaine en moyenne. Toutefois, leur problème se situe au niveau de l’insuffisance et/ou l’absence constatée de l’offre. Ils préfèrent l’achat direct à la ferme ou sur les marchés et souhaitent que des marchés organisés et réguliers leur soient disponibles à proximité de leurs lieux de résidence. Enfin, il semble que cette tranche d’âge privilégie surtout les producteurs auxquels ces consommateurs ont une relation de confiance.
  • Plus de 60 ans : Ils sont désormais des acheteurs réguliers et inconditionnels des produits fermiers sur les marchés et entretiennent avec les producteurs des relations afin de garantir des produits de première qualité.

 

  1. Influence de la Catégorie Socioprofessionnel (CSP)

 

Il est très évident de mettre les agriculteurs et les artisans commerçants à la tête de la liste des consommateurs inconditionnels des produits fermiers. En tout cas, presque toutes les catégories socioprofessionnelles semblent être favorables à ce type de produit, notamment les retraités.

Cependant, presque les tiers des personnes de profession intermédiaire et des ouvriers se déclarent non consommateurs, selon une enquête réalisée en 2007. Il faut noter que parmi les non consommateurs, 25% environ se déclarent ainsi par choix délibéré (notamment par indifférence par rapport aux autres types de produits). Les restent les sont généralement, soit par ignorance (ils ne se sont jamais posés la question, apparemment), soit par impossibilité comme argument (moins de 22%).

 

  1. Influence du lieu de résidence

 

De faibles disparités sont enregistrées dans la pratique au niveau du lieu d’habitation : Les ruraux sont en tête suivis par les citadins, et enfin les habitants des périurbains. Plus précisément, les habitants de la campagne sont plus habitués des achats à la ferme (plus de la moitié) que dans les circuits des grandes et moyennes surfaces. Les achats des consommateurs de produits fermiers des zones périurbaines s’effectuent surtout dans les grands magasins tandis que les citadins privilégient plus les marchés.

Il est à remarquer d’ailleurs que plus des tiers des personnes qui habitent loin des zones rurales et qui sont favorables aux produits fermiers n’hésitent pas à se déplacer pour effectuer des achats à la ferme.

L’utilisation d’autres points de vente (par correspondance sur Internet et via l’AMAP) n’est pas encore développée dans les habitudes des consommateurs de ces produits, et ce quelque soit leur zone d’habitation.

En somme, tout ceci avance déjà une illustration de ce que l’on devrait rencontrer dans le secteur de la pâtisserie avec l’utilisation des produits fermiers comme matières premières. En outre, ce type de produits devrait apporter des images positives et attrayantes à la pâtisserie, avec les difficultés à surmonter que cela pourrait engendrer.

 

  1. Perception positive des produits fermiers

 

Il faut reconnaître que les produits fermiers ont énormément de chance de se présenter comme produits vedettes, et cela se confirme pratiquement toujours auprès des consommateurs. Désormais, c’est seulement une partie relativement moindre (estimée à moins de 5%) de la société française qui reste indifférente par choix délibéré en ce qui concerne la question.

Du côté de l’opinion publique, les produits fermiers sont pour la plupart de temps associés à de concepts plutôt riches en image positive. D’abord, le mot « qualité » est le plus souvent évoqué quand la question est abordée, tout en insistant sur une comparaison avec les produits issus des cycles plus longs. En effet, ce concept de « qualité » sous-tend aussi plusieurs autres qui tournent autour de thèmes très populaires sur lesquels les français accordent énormément d’attention particulière.

La notion de « santé », par exemple, met en difficulté les produits concurrents des fermiers en pointant du doigt les problèmes de traçabilité et de manque de fraîcheur de la production en masse industrielle. Consommer des bons produits n’est pas seulement une affaire de normes et d’étiquetage pour la société moderne bouleversé trop par d’incidents portant parfois atteinte à la sécurité sanitaire des consommateurs. La demande devient encore plus exigeant et prend très au sérieux les concepts de « naturel, sain et frais », autant de raisons pour faire de la confiance quelque chose de concret et visible que la meilleure manière d’y parvenir consiste à aller aux sources, trouver soi-même les « bons » produits fiables auprès des producteurs fondamentales.

Par opposition aux produits manufacturés dans les grandes distributions, les produits fermiers prévale des valeurs du secteur de l’artisanat en les associant avec des touches d’exotisme culturel et les valeurs sociales. Il n’est pas seulement question de relation de confiance avec les fermiers producteurs puisque les marchés des produits de la ferme reflètent des liens sociaux très vifs que les points de vente à cycle long ne peuvent pas se permettre entièrement. En fait, ces marchés des produits « frais » sont comme un symbole de solidarité sociale, des lieux de rencontre qui dépasse largement les bornes des seuls domaines économiques. Désormais, les batailles impitoyables des marques commerciales y sont remplacées par les notoriétés des connaissances qui accordent beaucoup plus d’attention aux besoins évoqués de leurs clients familiers. Ce qui fait, qu’en dehors de ces marchés spécialement organisés pour les produits fermiers, la notion de label est évoquée par les acheteurs en signe de garantie tout en restant muet sur la question de convivialité et de lien social.

En parlant de relation de confiance, l’on constate que les acheteurs privilégient beaucoup plus les conseils des fermiers producteurs à ceux des commerçants habituels. Cela est compréhensible lorsque l’on découvre que les consommateurs apprécient moins les ventes à domiciles, ils accordent de l’importance à la relation sociale que l’acte d’achat lui-même devrait créer, et avec les producteurs, et avec les autres consommateurs. Ils ne sont pas non plus très intéressés par les pratiques de ventes où ils devraient seulement récupérer les marchandises commandées auprès des points de relais ou dans les lieux de travail.

 

  1. Des arguments sur le plan économique

 

Les producteurs fermiers entretiennent une relation commerciale spécifique avec les points de vente traditionnels, notamment les grandes et moyennes surfaces. Visiblement, ces points de vente ne réservent pas de rayon spécifique aux produits fermiers, mais ces derniers ont quand même le privilège de se placer en tête de gondole. En fait, les commerciaux tentent de capturer une partie des images positives que reflètent les produits de la ferme pour la faire projeter à tous les autres marchandises issues des autres circuits de production. La notoriété des produits fermiers est alors utilisée pour faire en sorte de les utiliser comme produits d’appel dans les grands magasins.

D’habitude, ce sont les producteurs eux-mêmes qui négocient la présentation de leurs produits chez les grandes et moyens surfaces, et la réputation de produits phares les mets au premier plan avec des prix raisonnablement plus élevés que ceux des autres produits classiques présents sur les rayons. Cette situation présente ainsi un double avantage et promet la pérennisation, voire l’amélioration du règne des produits fermiers qui, malgré qu’ils soient étalés avec les autres types de produits, restent dans les cycles de distribution dits « courts » :

  • D’un côté, les consommateurs ne devraient éprouver aucune difficulté à les trouver dans les rayons des grands magasins même si ces premiers n’ont pas les moyens de s’offrir le lux d’aller directement dans les fermes ;
  • D’un autre côté, les producteurs peuvent bénéficier des marges plus conséquentes (qui devraient couvrir les frais de distribution, ceux-ci est généralement à la charge des producteurs eux-mêmes). Les fermiers auront aussi plus de temps consacré à leurs activités de production, les activités de ventes sont ainsi quasiment sous-traitées par les magasins de grandes distributions, en quelque sorte. Les producteurs devraient alors avoir un pouvoir de négociation relativement élevé par rapport à leurs concurrents industriels.

Toutefois, ces points de vente peuvent apporter quelques nuisances à l’égard de ces produits de la ferme et à leur image. En effet, l’image de la grande distribution se sent dégrader auprès du grand public. De plus, en voit la montée en puissance des autres points de vente spécialisés en la matière comme les points de vente collectif et les systèmes de commercialisation nouveaux tels que les magasins Grand Frais et la Ferme du Sart. En somme, certes que les grandes distributions bénéficient encore d’une forte demande, mais l’évolution des comportements des consommateurs devrait conduire les producteurs des fermes à réviser leur politique de distribution.

Toujours en ce qui concerne les circuits courts, une autre opportunité s’offre aux producteurs des produits fermiers en s’adressant à des enseignes non alimentaires mais qui proposent des espaces disponibles non négligeables, même si ces derniers sont relativement moindres, pour ces produits de la ferme. L’on peut citer à titre d’exemple IKEA, GAMM VERT et JARDILAND. Les produits fermiers pourraient y bénéficier d’une assez bonne fréquentation de leurs magasins quoi que ces groupes reflètent des images en dehors de la vente de produits alimentaires.

Une autre alternative de distribution est le réseau Biocoop (« Biologique » et « Coopérative ») qui a un crédit de 314 points de vente répartis en France en 2009, avec 8 000 produits référencés et plus de 2 800 employés. Ce réseau représente à peu près 12% du marché des produits biologiques dans l’hexagone bénéficie d’une image de qualité auprès des consommateurs. Le hic se trouve à sa réputation de vendre des produits relativement chers, mais il reçoit tout de même une forte demande liée à la volonté des autorités publiques de mettre en avant les produits biologiques, d’un côté, et celle des consommateurs de manger « mieux ».

Ce cas est aussi semblable à celui du réseau Grand frais avec en sus, d’autres avantages tels que leur magasins dégagent une ambiance très proche de celle que l’on retrouve dans les marchés des produits fermiers. En fait, ces avantages tournent un peu plus en faveur des consommateurs compte tenu du nombre élevé des producteurs qui y sont présents, et du coup, les prix suivent le régime à forte concurrence. Il existe en France plus de 300 magasins multi-frais avec un tiers sous l’enseigne Grand Frais, le réseau n’est quand même pas omniprésent sur tout le territoire (présent surtout dans le sud-est.

L’Association pour les Maintient d’une Agriculture Paysanne (AMAP), selon un concept né en Japon, développé au Canada et aux Etats-Unis et exporté en France en 2001, fait intervenir à la fois les consommateurs et les producteurs. L’AMAP établit un contrat entre ces deux acteurs autour de plusieurs modalités telles que le volume et la diversité des produits concernés pour une saison, le prix d’un panier, les conditions de distribution, les techniques agricoles à utiliser (souvent dans l’agriculture biologique). Les consommateurs achètent à l’avance leurs paniers et cela constitue une sorte de sécurité alimentaire de qualité de leur côté, et une garantie d’un réel revenu pour les producteurs puisque les consommateurs sont solidaires des pertes éventuelles. Le nombre des AMAP est désormais estimé à 1 000 répartis dans tous les Régions de la France. L’AMAP présente néanmoins quelques faiblesses quant au prix (relativement élevé), à l’offre (qui est souvent insuffisante), et aux CSP (nécessairement des CSP supérieures au regard de la moyenne de la population.

Désormais, bien que développés dans une large mesure, notamment à cause des changements progressifs des comportements des consommateurs qui deviennent de mieux en mieux en faveur des produits fermiers, leur avenir est quelque peu menacé. D’un côté, la forte croissance avec les produits de l’industrie agricole rendent les produits fermiers moins compétitifs auprès des CSP à faible revenu compte tenu de leurs prix. D’un autre côté, l’on s’attend à une réduction massive des mains d’œuvre dans ce secteur. En effet, l’entreprise artisanale de la ferme est fréquemment une affaire de famille, et quand les enfants quittent le cocon familial (études, mariage, …) les relèves manquent. Le Service de la Statistique et de la Prospective du Ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et de la Pêche a constaté une baisse de la part des exploitations en vente directe sur le nombre total des exploitations agricoles françaises : 15,6% en 2007 contre 27% un peu plus de vingt ans auparavant.

L’effet contraire pourrait aussi poser un problème : Le fort développement enregistré au niveau de l’activité des artisans fermiers risque de détériorer le caractère même des produits fermiers (industrialisation) et sa réputation de produits de qualités premières. En outre, certaines filières du secteur sont souvent surreprésentées et saturées (filières maraichères, horticoles et vinicoles) tandis que d’autres se raréfient.

Les perspectives concernant les produits fermiers se dessinent, et cela induira des conséquences sur les dérivés de ces produits, plus précisément à la pâtisserie lorsque celle-ci se place dans l’utilisation des matières premières issues des cycles courts.

 

  • Forces et faiblesses de l’utilisation des matières premières locales dans la pâtisserie

 

Déjà, avec les analyses précédentes, il est possible de prévoir les éventuelles forces et faiblesses que les produits fermiers apportent lorsque ceux-ci s’insèrent comme matières premières dans la fabrication pâtissière. En fait, il faut noter que cette utilisation se place dans le cadre de la notoriété de ces produits de la ferme afin que les produits pâtissiers concernés puissent en bénéficier. Dans cet ordre d’idée, l’utilisation en tant que consommation intermédiaire des produits fermiers relevant de la présente étude implique que :

  • les matières premières consommées dans la production pâtissière doivent être entièrement ou en partie issues des cycles courts (un seul intermédiaire au plus avec les fournisseurs). Par exemple, le cas d’une certaine marque de produits pâtissiers qui se vante « utiliser à 80% » du lait venant des fermes d’une certaine localité, n’est pas à écarter de la présente étude.
  • la quantité des produits fermiers utilisés dans l’input n’est considérée importante que si en dessous de laquelle, la notoriété évoquée précédemment peut s’éteindre. Ainsi, il se peut que l’on n’incorpore dans une fabrication pâtissière donnée qu’un seul ingrédient issu des produits de la ferme, les restes venant des industries agroalimentaires. Tant que les consommateurs puissent reconnaître cet ingrédient comme porteur d’une valeur ajoutée conséquente dans les marchandises de cette fabrication, cette dernière rentre dans le domaine de la présente étude. L’on peut alors citer en tant que tel (à titre d’exemple) une tarte aux framboises des plantations des fermes d’une telle localité : dans ce cas, par exemple, seules les framboises proviennent obligatoirement des produits fermiers, les origines des autres ingrédients (farine, huile, …) importent peu même si ces derniers composent majoritairement en terme de quantité la tarte en question.
  • le secteur d’activité n’est pas obligatoirement l’artisanat dans la fabrication pâtissière : les entreprises industrielles qui remplissent les conditions susmentionnées sont prises en compte dans le cadre de cette étude, et cela quelque soit leurs tailles et les quantités de leur production.

Tout de même, le secteur de l’artisanat devrait bénéficier d’une attention particulière d’autant plus que la majorité des cas relèverait de ce secteur. En fait, compte tenu de l’offre assez limitée de la plupart des produits fermiers, leur manufacture dans le cadre de production industrielle s’avère très difficile à réaliser, voire impossible dans certains cas.

Ce secteur mérite une étude plus poussée justifiée par le fait que c’est un secteur clé notamment dans la filière agroalimentaire, plus particulièrement en France. Généralement en effet, les produits artisanaux sont considérablement plus prisés que leurs concurrents industriels. Il n’est pas étonnant d’appréhender souvent des utilisations frauduleuses des mentions « Artisan, Artisanal, Maison » puisque ces allégations se trouvent valorisantes, surtout pour les produits alimentaires (50 points de vente ont été détectés en 2007).

Dans l’Union Européenne, les 98% des entreprises sont artisanale et/ou appartenant à la catégorie de Petits et Moyennes Entreprises (moins de 20 salariés). En France, le secteur de l’artisanat a regroupé en 2010, quelque 920 000 entreprises dont 95 000 nouvellement immatriculées l’année antérieur (soit une progression de 5,4% par rapport à 2008). L’artisanat représente désormais environ 20% du produit intérieur brut (PIB) français. Ces entreprises sont réparties ainsi : 41% dans la zone urbaine de faible densité de population (moins de 200 000) et 31% en milieu rural

Parmi les 510 activités répertoriées, le secteur est composé de 250 métiers dont 11% sont relatifs à l’alimentation. La plupart des entreprises effectivement artisanales emploient au plus 10 personnes, avec un nombre total d’employés de 3,1 millions dont 5% travaillent dans le secteur de l’alimentation. Dans cette dernière, le chiffre d’affaires des artisans et commerçants de l’alimentation s’est amélioré de plus de 1% à l’issue de 2010 par rapport à l’année antérieure. Cependant, du côté financière, 21% d’entre eux présentent encore une situation de détérioration dans leurs comptabilités, en 2010 (contre 34% en 2009) avec une crainte de déficience financière pour les 24% en 2011 contre 14% seulement qui envisagent une croissance.

En tout cas, les chapitres suivants traitent des opportunités et des faiblesses de la pâtisserie avec comme arguments « les produits fermiers » que ce soit dans l’artisanat ou dans l’industrie.

On note cependant que le fait de citer une pratique ou une recette typique à telle ou telle Région ou localité ne constitue pas de motif pour faire rentrer un produit ou une entreprise dans le domaine de cette étude. On peut citer par exemple, la « brioche vendéenne » qui est certes une spécialité bien connue (pour ne pas dire propre) à la Vendée. Or, ce produit porte ainsi cette appellation en faisant référence à sa recette de fabrication et non pas à l’origine des matières premières qu’il utilise.

 

  • Des éléments moteurs pour l’utilisation des matières premières locales

 

  1. La promotion du « made in France » sur le domaine de la pâtisserie

 

Depuis 2010, le concept « made in France » fait beaucoup parler de lui qui, pour les consommateurs, est perçu comme un signe de qualité et d’authenticité. La question de l’emploi (avec celle de la traçabilité, traitée plus bas) est l’une des principales raisons qui motivent les consommateurs à privilégier les marques françaises sur le marché. En effet, selon des études réalisées par le Cabinet Xerfi en 2011, le marché des produits qui ont mis en avance leur régionalisation a connu une croissance de 0,4% en volume. La promotion de ce marché s’explique par la volonté des consommateurs d’appuyer le maintien de l’emploi en Région.

Ce phénomène s’est beaucoup amplifié avec la crise économique qui persiste dans les débuts de la seconde décennie du XXIè siècle. Les français ne sont plus indifférents de l’origine des produits qu’ils consomment puisque la moitié d’entre eux auraient l’habitude de vérifier systématiquement le pays fabricant avant de les acheter. Les citoyens s’inquiètent vraiment de l’avenir de leur pays face aux bouleversements notamment économiques qui gagnent du terrain avec la mondialisation.

Le sondage a permis de vérifié que 94% pensent qu’ils pourraient soutenir l’industrie française ainsi que l’emploi en achetant des produits made in France. Ce phénomène touche bien évidemment et surtout le secteur de l’agroalimentaire (en tête avec 90% d’intention des sondés) que tous les autres.

Une autre motivation importante de l’achat des produits de marque française est la recherche de garantie sur la qualité des produits (environ 92% des sondés). Mais les français se soucient aussi des conditions de fabrication de ces produits notamment de celles des salariés et 87% des enquêtés choisissent l’origine française car cela leur assure que les normes sociales des salariés en France sont relativement beaucoup plus respectueuses. Il en est de même sur le plan écologique et en matière d’optimisation du transport des marchandises.

D’autres études, dont celles réalisées par Opinion Way, stipule que 91% des français estiment que l’avenir du made in France repose sur l’artisanat et la production locale. Cela devrait faire réjouir les professionnels de la pâtisserie puisque la majorité des entreprises de ce secteur sont artisanales. Ainsi, l’opinion espère plus sur la croissance et les emplois générés par de milliers de petites entreprises que sur quelques dizaines de grandes firmes.

Le gain de terrain de ce concept de made in France met déjà les signes de piste qui, si bien entretenus, devraient conduire les consommateurs à ne pas rester dans les seuls arguments de patriotisme. Il est important de trouver des moyens pour faire amplifier ce processus, mais aussi de diriger ensuite les préférences des consommateurs à savourer les différentes localités de leur grand pays. Ainsi, pour mieux favoriser le made in France, les idées se focalisent autours de quelques domaines que les consommateurs jugent agir et proposent des arguments robustes :

  • Le choix des secteurs porteurs compte en premier lieu avec de l’investissement important en matière de recherches et développement. Même si le secteur industriel est le mieux placé dans cet ordre d’idée, le côté de la pâtisserie (essentiellement artisanal) n’en est pas moins concerné.
  • Beaucoup reposent aussi l’avenir du made in France entre les mains de l’éducation pour apprendre les jeunes le gout de produire.
  • Certains demandent l’instauration d’un label (et cela est d’autant plus intéressant sur la combinaison de la pâtisserie avec les produits fermiers) afin d’aider les consommateurs à être informés de la provenance de leur alimentation.
  • Les tenants de ce concept vont jusqu’à demander des barrières aux produits concurrents étrangers, des arguments très protectionnistes.

Ainsi, les tendances ne s’arrête désormais pas au seul domaine de la nationalité du produit, mais elles pénètrent jusqu’aux différentes localités du pays par le biais du locavorisme, nécessairement.

 

  1. Le locavorisme, l’écologie et le bio

 

Le sondage effectué par BVA pour Metro Cash&Carry France (3ème édition de l’Observation du commerce indépendant) a indiqué que plus de la moitié des français sont sensibles à l’origine géographique de leur consommation. Ces consommateurs ont déclaré qu’ils consomment presque habituellement des produits issus de leur localité.

Le locavorisme est d’ailleurs une tendance comportementale de sorte que les personnes qui en est les sujets, les « locavores », choisissent de ne consommer généralement que des produits locaux quand cette opportunité se présente. Concernant le terme « local », avec la divergence des idées, la notion de « one hundred miles » donne un aperçu en proposant qu’un produit est dit « local » lorsqu’il provient d’une distance moins de 100 miles (soit 160 km) du consommateur. Pour certains, le concept de local affecte tout les produits d’une Région qui devraient avant tout répondre à une culture. Il est dit aussi que les locavores tolèrent certains produits non locaux (que l’on appelle exception Marco Polo) qu’il n’est pas possible de procuré localement.

Dans un premier sens, il est facile de comprendre que le concept de locavorisme est très proche de celui de cycles courts. En effet, le cycle court prône la proximité entre producteur et consommateur à deux niveaux complémentaires :

  • proximité géographique : relative à la distance spatiale entre aires de production et de consommation ;
  • proximité organisationnelle : relative au nombre d’acteur qui entre en jeu dans la relation producteurs-consommateurs (nombre d’intermédiaire).

Les cycles courts peuvent être considérés comme l’un des piliers du locavorisme qui permettent aux consommateurs de nouer des liens social et culturel particuliers, et avec les producteurs, et avec leurs localités. Les cycles courts leurs permettent aussi de relocaliser leur alimentation.

 

  1. Du côté des industriels et des distributeurs

 

Au profit du locavorisme et du cycle court, des marques de produits industriels se permettent d’attirer les attentions des consommateurs par une connotation locale au grand bonheur des amateurs de produits fermiers. Certaines entreprises axent leur communication autour du lieu d’implantation de leurs manufactures et/ou de celui des localités de leurs matières premières. Pour ne citer que quelques exemples marquants, les distributeurs ont développés des campagnes spécialisés avec des Régions qui éditent leurs propres labels comme « Nos Régions ont du Talent » de Leclerc, ainsi que « Reflets de France » de Carrefour.

Quelquefois, les investissements iront jusqu’à des recadrages importants dans ce domaine afin de répondre mieux à la tendance du marché et celle des consommateurs avec des résultats plutôt encourageants. La Société Sodiaal, par exemple a lancé en 2001 la marque Candia avec le slogan « Le lait de ma Région » pour commercialiser les laits UHT demi-écrémés dont les processus de production et de distribution (collecte, transformation, conditionnement et vente) se déroulent dans une même zone géographique (Pays de Loire, Rhône-Alpes, Plaines du Nord et Pyrénées). En seulement une année, le groupe a pu vendu 3,2 millions de litres de cette marque et ainsi projette d’étendre le projet à d’autres Régions (Aquitaine et Midi-Pyrénées).

Les grands distributeurs n’hésitent pas non plus de frapper fort dans leur campagne en avançant le caractère local d’une partie non négligeable de leurs marchandises. Par exemple, chez Cora-Match, l’on affirme que 37% des fournisseurs, dont des locaux, effectuent des livraisons directes d’un ou de deux magasins, et cela sans même passer par la centrale et la codification. Il y a aussi le cas de Casino qui développe le concept « Le meilleur d’ici » en assurant que ses produits proviennent essentiellement à moins de 70 km de chaque magasin qui compte entre 25 et 47 fournisseurs locaux.

Certaines Régions font aussi énormément d’effort pour promouvoir les productions locales comme c’est le cas de la Bretagne avec la marque collective « Produit en Bretagne » qui s’affiche en tant que référence et modèle pour les autres marques territoriales en France. Chaque année, depuis 2001, la Région sélectionne les nouveautés qui se démarquent comme « Produit en Bretagne » (en 2012, entre autres, on cite les Chips bio nature de Bret’s ou encore les Madeleines Chocolat extra moelleuses de Ker Cadélac).

La Région de Bretagne joue sur un double argument auprès de ses habitants, voire ailleurs pour les amateurs des produits bretons : soutien de l’emploi et de l’environnement en France et dans la Région. Les conditions d’adhérence dans le « Produit en Bretagne » sont d’ailleurs :

  • Un centre de décision doit se trouver dans la Région,
  • L’exploitant doit partager les valeurs de cette association,
  • Des responsables de qualité issus des entreprises membres de l’association en donnent l’agrément,
  • Les matières premières devraient dans la mesure du possible être issues de la Région.

Les exemples ne manquent pas sur le sujet (dont « Bienvenue en Gourmandie » de la Normandie, « Produit en Limousin » de l’Association limousine des industries alimentaires, « Savourez l’Alsace », « Bravo l’Auvergne », etc.) qui promettent d’énormes opportunités notamment pour la pâtisserie en empruntant la voie des produits fermiers (locaux).

 

  1. Raisons écologiques

 

Le locavorisme est aussi souvent associé à la préoccupation que l’on accorde pour un meilleur respect de l’environnement. L’étude faite par Cetelem a révélé que 56% des consommateurs français tiennent compte du caractère écologique d’un produit avant l’acte d’achat. Le respect des normes en matière environnementale est plus facilement vérifiable pour les producteurs qui exploitent dans la localité près de chez soi.

Aussi, des indicateurs réels pourraient donner des idées pour porter le choix sur des produits locaux comme la distance réelle du circuit de distribution en termes de consommation d’énergie (plus long, plus de carburant et donc plus d’émission nocive), ou encore les conditionnements d’emballage (moins, voire inexistence d’emballage pour certains produits à livrer dans un périmètre assez réduit).

 

  1. Le bio

 

A côté du locavorisme, toujours dans un argument de consommer mieux notamment en produits agroalimentaire, le bio se démarque avec des critères plus exigeants (en matière d’hygiène, comme le disent les adeptes du bio). Selon le règlement CE 2092/91, le produit bio en acquiert le label avec un mode de production n’employant aucun produit chimique de synthèse, ni d’Organismes Génétiquement Modifiés (OGM). Les pratiques sont très spécifiques dans l’agriculture biologique comme l’emploi d’engrais verts, la lutte naturelle contre les parasites. L’utilisation d’agent de conservation, de produits fertilisants et des produits de traitement est très limitée.

Les produits pouvant bénéficier de la dénomination « bio » ne doivent pas être composés moins de 95% d’intrants biologiques. Les règlements qui varient d’ailleurs selon les pays, déterminent les utilisations des 5% restant dans la production biologique. Des certifications sont délivrées par des certificateurs agréés par l’Etat (au nombre de 5 dans l’hexagone) aux agriculteurs biologiques.

En fait, le bio est souvent présenté comme un concurrent de taille du locavorisme ; en tout cas, la tendance en faveur de la consommation des produits agroalimentaires biologiques pourraient aussi renforcer les liens entre les producteurs et les consommateurs. La production et la consommation concernant cette catégorie de cette autre tendance comportementale ne devraient pas alors être négligées d’autant plus que les consommateurs bios sont les plus intéressés sur l’origine de leur alimentation. Les analyses de ce secteur qui est loin d’être marginal indiqueraient sur l’opportunité éventuelle d’attaquer ce segment de marché pour la pâtisserie avec les produits fermiers.

Le marché du bio est un des secteurs en plein développement durant la première décennie du XXIè siècle. En effet, ce marché a connu une forte croissance avec des taux importants allant jusqu’à 25% entre 2006 et 2010. Avec un chiffre d’affaire atteignant les quelques 3,65 milliards d’euros en 2011, ce marché est pratiquement doublé dans un espace de 5 ans seulement. L’Agence Bio a précisé que ce sont surtout les boissons, l’épicerie et les produits frais qui ont les plus participés à cette croissance (60% en valeur).

Toutefois, les influences de la crise économique sur les portefeuilles des consommateurs n’ont pas épargné ce secteur avec une prévision de croissance plus sombre dans les débuts de la deuxième décennie du XXIè siècle. La baisse du pouvoir d’achat des consommateurs devraient les conduire à délaisser ces produits bios pour mieux gérer leurs budgets familiaux vers des aliments moins chers. Une étude du Cabinet Xerfi a même prévu que la moitié des produits bios se retrouveront dans les grandes distributions en 2015, l’un des circuits les moins prisés par les tenants du bio.

Désormais, la croissance du marché du bio devraient être considérablement ralentie par la crise avec seulement 5% en 2012, en passant de 8% en 2013 pour plafonner à 5% dans les deux années qui suivent, Le chiffre d’affaires prévu en 2015 serait de 4,5 milliards d’euros, un volume considérable malgré ces faits.

Penser à adopter le marché bio dans le cadre de la production pâtissière nécessite alors de bien réfléchir au moins sur deux points :

  • Bien que ralenti, la croissance de ce marché perdurera encore des années : mais pour combien de temps ? La crise l’affaiblira-t-il davantage jusqu’à mettre en danger la notoriété des marques qui en avaient bénéficié des années durant ?
  • La concurrence avec le locavorisme (ce dernier qui gagne du terrain) ne va-t-elle pas nuire les produits bios jusqu’à mettre en cause les produits fermiers et les dérivés de ces derniers ?

 

  1. Des idées à saisir

 

La notion du « consommer local » donne ainsi de nombreuses leçons applicables également dans la production pâtissière en France. D’abord, concernant la typologie de la clientèle, le concept pourrait être assimilé plus facilement auprès des consommateurs « habituels » des produits fermiers (qui ne sont pas nécessairement des locavores exclusifs). Le sondage de BVA pour METRO Cash & Carry France en 2001 a par exemple permis de voir que ce sont surtout les plus âgés (65 ans et plus) qui en sont les plus nombreux et les plus sensibles à ce sujet. Aussi, 65% des habitués du « consommer local » appartiennent à des foyers de revenus relativement notables. Finalement, les femmes sont les plus enclines à vérifier l’origine géographique d’un produit avant l’acte d’achat.

Certes que ce ne sont pas seulement les consommateurs potentiels des produits pâtissiers combinés avec les matières premières des fermes locales, mais des études plus poussées en matière de segmentation devraient mieux cerner les premières cibles de ces produits. Ces études seront évidemment propres à chaque type de pâtisserie (et donc à chaque matière première concernée) et à chaque localité/Région.

A part les informations déjà cités sur le domaine de la distribution de ces produits fermiers, il est aussi à noter que ce sont les consommateurs français les plus impliqués aux produits locaux qui font plus confiance aux informations fournies par les commerçants indépendants quant à l’origine de ces produits. Le sondage de BVA a indiqué aussi que 37% seulement pensent être informés suffisamment sur ce sujet auprès des leurs restaurants habituels. Le cas de la pâtisserie pourrait s’annoncer un peu plus différemment, mais tout au moins, les producteurs ne devraient pas minimiser ces tendances dans l’espoir de trouver les meilleurs circuits de distribution pour leurs produits.

 

  1. La recherche de la qualité

 

  1. Les normes de qualités : les labels

 

Les labels de qualité et d’origine ainsi que les lieux de fabrication sont autant d’éléments que les consommateurs prennent comme assurance de qualité d’un produit. Sur cette question, des normes existent mêmes, et sur le plan national, et sur le plan régional, définissant les exigences sur les origines des produits alimentaires.

Il y a d’abord l’Appellation d’Origine Contrôlée (AOC) qui indique les produits en provenance d’une Région ou d’une localité donnée. Les caractères et/ou la qualité de ces produits sont attribués essentiellement à ce lieu géographique. Il faut quand même noter que l’AOC regroupe aussi bien les produits résultant du savoir faire des localités désignées en matière de production et non seulement dans le cadre des produits fermiers exclusivement. Toutefois, il n’est pas à exclure que les produits finis de la production pâtissière combinée avec les produits fermiers pourraient emprunter par la suite l’AOC, un des importants supports de garantie de qualité pour les consommateurs potentiels. D’ailleurs, l’AOC est attribuée à un produit via un décret sur proposition de l’INAO (Institut National des Appellations d’Origine). Le produit alimentaire et/ou agricole peut ensuite bénéficier de ce label après consultation de la Commission nationale des labels et de produits agricoles et alimentaires.

Sur le plan européen, l’Appellation d’Origine Protégée (AOP) qui concerne plusieurs produits agricoles et alimentaire est l’équivalent de l’AOC sur le plan français.

A côté de l’AOC/AOP, l’Indication Géographique Protégée (IGP) rassemble les produits alimentaires originaires et spécifiques à une Région géographique donnée. La dénomination d’une Région concernée par l’IGP, désigne un lien plutôt partiel entre la spécificité avec la Région (à une différence près de l’AOC et AOP sous lesquelles ce lien est considéré comme total).

 

  1. Les tendances du goût en gastronomie française

 

La Gastronomie française a eu le mérite d’être inscrite au patrimoine de l’humanité de l’UNESCO le 16 novembre 2010. Ce n’est d’ailleurs qu’un seul aspect manifeste des valeurs accordées et reconnues de la gastronomie française dans son ensemble.

Le Salon International de la Restauration, de l’Hôtellerie et de l’Alimentation (SIRHA) qui s’est déroulé à Lyon en 2011 a permis de déceler quelques grandes lignes en matière de « bon manger » dans la gastronomie française.

A commencer par l’authentique, le vrai, la nostalgie en matière de goût, la gastronomie française se veut être populaire avant tout. La notion de localité et de tradition y est radicalement imprégnée afin de partager des produits à la fois simples et inégalés. Cette piste devrait bien évidemment mener à une forte opportunité pour la production rattachée à une localité mélangée avec la couleur de la tradition locale.

Un second point important dans cette tendance se dessine sur l’attention accordée aux formes, les jeux visuels. Le concept de création prend ainsi de l’ampleur au niveau des couleurs, du design tout en gardant le goût intact. Les consommateurs ne sont aucunement insensibles aux effets de la surprise. Les innovations sur l’apparence extérieure des produits pâtissiers, voire sur les emballages comme sur ceux des produits fermiers qui se veulent désormais très voyants, sont également une voie ouverte sur le développement du couple pâtisserie-produits fermiers.

Ensuite, dans un concept de cuisine transgressive mettant en avant le plaisir et la gourmandise avant même l’hygiène et le moral, la pâtisserie dans le domaine du salé se montre comme vedette. Dans cette optique, les champs de la production pâtissière s’élargissent de plus belle avec plus d’opportunité sur les produits animaux des fermes. Ainsi, ces produits fermiers déjà embellis de qualité et de goût devraient encore plus attirer davantage l’attention des consommateurs dans leur quête du plaisir.

L’intérêt des gourmets aux produits exotiques est aussi de tendance dans la cuisine française qui met en évidence la diversité de provenance des ingrédients. Même si l’accent est surtout mis sur les origines plutôt lointaines des matières premières, cette attente pourrait quand même être rapprochée des ambiances des fermes françaises, et ce de manière à promouvoir la couleur des diverses localités lointaines du pays.

Sous l’angle d’une tendance qualifiée de cuisine néo-classique, la qualité et la richesse en termes de recette apportent une touche de luxe dans la gastronomie française. Le mot d’ordre tourne d’ailleurs autour de la tradition et du savoir faire du Chef, et les ingrédients y sont pour quelque chose. Dans ce contexte du goût du travail, les Chef-pâtissier devrait surtout se prévaloir de la qualité artisanale, non seulement de ses prestations mais également de ses matières premières.

Très important aussi, dans le domaine de l’équilibre alimentaire, la question de santé, celle de l’environnement et du développement économique pèsent énormément dans les habitudes des consommateurs à l’égard de la cuisine française. Sur cette piste, les produits fermiers dont les produits végétaux et laitiers ainsi que leurs dérivés sont les plus privilégiés.

Finalement, le dernier des points autour desquels est axée la tendance du « bon manger » en gastronomie française est accordé à la cuisine chamanique. Considéré comme le goût du primitif, cet aspect de la tendance est caractérisé par la nature sauvage dans les ingrédients des plats français. L’utilisation du miel, par exemple, issus bien évidemment des productions fermières, dans la pâtisserie répond positivement à ce besoin tendanciel.

Bref, ces diverses tendances incontournables peuvent être agrégées une triple contrainte qui se manifeste dans le secteur de la restauration :

  • la qualité des produits déterminée surtout par la provenance de ceux-ci,
  • la beauté et le goût déterminés entre autres par la qualité des matières premières que par les recettes elles-mêmes,
  • et le mode de production de ces matières premières et notamment l’ampleur que le bio s’ancre dans le mode de vie des consommateurs.

 

  1. Les nouvelles tendances de la pâtisserie

 

Du côté de la pâtisserie aussi, en particulier, se dessinent des tendances à prendre en compte avec des conséquences non négligeables dans la promotion de la pâtisserie prônant les produits fermiers dans la fabrication.

Force est de constater que les consommateurs semblent éprouver un certain désintérêt à l’égard de la pâtisserie si l’on prend en compte la tendance de ce XXIè siècle. Des observateurs ont signalés surtout le manque d’originalité, de goût et de créativité en est la principale cause. Dès que cette question est abordée, l’on se rappelle de la situation presque similaire survenue cette fois au niveau du secteur de la boulangerie dans les débuts des années 90. A cette époque, lorsque les artisans boulangers ont réalisé qu’ils perdaient de plus en plus de parts de marché face à la grande distribution, ils ont focalisé leurs efforts notamment dans l’amélioration de leurs techniques de production ainsi que dans la diversification de leurs produits. La riposte que les pâtissiers devraient en mesure d’effectuer concerne essentiellement le domaine de l’inventivité tout en considérant leur métier comme un art.

Conjuguées avec ce phénomène de riposte des artisans pâtissiers au secteur industriel de la pâtisserie, les attentes des clients ont tracées une sorte d’itinéraire pour l’avenir de la production pâtissière française. Les observateurs sont même optimistes sur ce point en espérant une forte diversité de la pâtisserie égalant celle de la cuisine, seulement en quelques années. Ainsi, l’on constate déjà une espèce de mélange de culture couplé avec l’emploi d’ingrédients inattendus comme la farine de riz, les dattes ou encore le haricot rouge dans la pâtisserie. A ce début d’ère de renouveau comme beaucoup laissent entendre, la pâtisserie a de bel avenir devant elle en jouant essentiellement sur les intrants que sur la créativité.

Les pâtissiers ont également compris qu’à chaque type de produits dans leur domaine est attribué une part d’affect important. En effet, à part les habitudes qui guident souvent dans le choix des clients, il faut reconnaître que tel ou tel produit pâtissier évoque une certaine nostalgie pour la plupart d’entre eux : des souvenir d’enfance, des ambiances familiales, une connotation culturelle très forte. Cet affect devrait encore plus soutenu avec l’utilisation des images et des valeurs sentimentales des produits de la terre, puisées dans les valeurs culturelles attribuées à une localité donnée.

L’artisan pâtissier a aussi tendance à mettre du goût dans son œuvre si auparavant, la pratique est surtout concentrer sur le respect des recettes classiques de base. Dans ce sens, la diversité des ingrédients utilisés dont des fruits rentre dans cette tendance mais aussi dans celle qui argumente sur la saisonnalité, le naturel et le local (fraises d’Orgeval, abricots de la Drôme, …). Certains avancent même que ce sont les ingrédients qui provoquent la création.

Entretemps, il faut aussi se rappeler que la question de qualité implique non seulement des normes d’appellations diverses et du suivi des tendances de la clientèle, mais également et surtout du respect des normes sanitaires lorsqu’il s’agit de produit agroalimentaire.

 

  1. Les tendances dans le domaine sanitaire

 

Les normes sanitaires en matière de production pâtissière sont exigeant et régies par des textes règlementaires sur la qualité qui doit être saine du produit (Responsabilité du professionnel en termes d’hygiène et obligation de résultat : Arrêté du 9 mai 1995), sur les règles sanitaires départementales type (octobre 1967 et août 1978) et sur l’hygiène des denrées alimentaires (CE 852-2004). En fait, les risques microbiens sont réels dans ce domaine comme les risques de développement bactérien nuisible à la santé, par exemple dans les pâtisseries à base de certaines crèmes, ou encore les altérations visuels et au niveau du goût des aliments. Les risques sanitaires en pâtisserie peuvent être classés selon trois niveaux : la contamination initiale (des intrants) et secondaire (stock, chaîne de fabrication, manipulation), la multiplication des micro-organismes (rupture de la chaîne du froid), et la survie de ces micro-organismes (insuffisance du cuisson).

Afin de faciliter les démarches dans la prévision de ces risques et la mise aux normes du processus de production, la Confédération française de la pâtisserie et boulangerie-pâtisserie a élaboré pour les artisans professionnels la guide de bonnes pratiques d’hygiène en pâtisserie. De plus, la Chambre des Métiers et de l’Artisanat propose toujours des formations sur l’analyse des risques et la maîtrise des points critiques, selon les règles obligatoires.

En outre, les règlements sur la traçabilité des produits (janvier 2005) exigent une facilité de rappel de ces produits si des problèmes sanitaires apparaissent : traçabilité en amont (fournisseurs) et en aval (points de vente, clients). Avec la production utilisant les produits fermiers, les éventuels problèmes en matière de traçabilité seraient sensiblement réduits, notamment pour la provenance des matières premières.

A l’horizon 2015, le secteur de l’agroalimentaire est essentiellement axé sur la santé-naturalité. Selon des révélations en 2011, ce grand marché en croissance délivre 4 grandes catégories de segment qui mettent en exergue cet axe sanitaire :

  • les aliments sans additif dits « clean label » sont considérés comme le pivot en matière de santé-naturalité et conditionneront en premier le développement du marché alimentaire en France ; l’on a déjà vu que les consommateurs des produits fermiers (et des dérivés de ces produits) réclament l’existence de label national sur ces produits ;
  • les produits biologiques connaîtront encore de croissance non négligeable durant plusieurs années malgré la diminution du pouvoir d’achat amplifiée par la crise économique ;
  • les aliments allégés devraient bénéficier d’un regain d’intérêt dans les années qui suivent la première décennie du XXè siècle : en effet, le progrès technique a permis d’élaborer des produits alimentaires à la fois moins calorifiques et naturels ;
  • les aliments fonctionnels est en période de redressement sur le marché jusqu’en 2015.

Il faut reconnaître que la promotion de la pâtisserie à matières premières fermières rime parfaitement avec ces quatre segments et, du coup, les besoins sanitaires des consommateurs font partie intégrante de l’offre proposée par ce type de marché pâtissier.

 

  • Des éléments à améliorer

 

Le contexte dans le domaine de la pâtisserie d’une part, et dans celui des produits fermiers de l’autre, semble promettre un climat favorable au développement de la production rassemblant ces deux domaines. Mais, il ne faut pas non plus oublier que la combinaison de ces deux éléments verrait aussi naitre les difficultés apportées par chacun d’eux, d’un côté, et celles générées par le processus d’assemblage de ces deux éléments de l’autre côté.

La liste de tous ces éventuels points faibles ne pourrait pas être dressée exhaustivement dans la suivante analyse. L’essentiel est de démontrer l’existence effective de ces facteurs qui pourraient compromettre le développement de l’exploitation, et qu’il n’est pas impossible de trouver les remèdes efficaces à ces facteurs. L’on ne se permet pas ainsi de démontrer des recettes infaillibles à tous les problèmes qui survient, mais seulement d’essayer d’appréhender l’environnement, d’élargir la vision, de trouver les éléments principaux qui interagissent afin d’améliorer une situation donnée.

 

  1. Marques et notoriété

 

Une certaine difficulté apparaît sur le créneau de l’utilisation des produits fermiers dans la production pâtissière lorsqu’il s’agit de savoir sur quelles marques ou quelle notoriété vont se poser les produits finis. Désormais, l’on a constaté que la quasi-totalité des grandes marques dans le domaine de la pâtisserie sont toute relative au secteur industriel. Or, il est constaté que le couple « production de masse » et « produits fermiers » bien que non incompatible, s’avère difficilement concevable. Notamment, lorsqu’il s’agit des produits plus classiques et qui devraient s’asseoir sur la notoriété des fermes d’origine des matières premières.

 

  1. Exploitation industrielle

 

En effet, il est évident qu’une production à grande échelle (pour pouvoir bénéficier des grandes marques déjà existant, dans le secteur industriel), il faut un circuit d’approvisionnement apte à suivre cet objectif, c’est-à-dire un volume d’intrants considérablement élevé. Cependant, les fournisseurs (les producteurs agricoles) doivent être exclusivement des fermiers artisans avec des produits distribués suivant les cycles courts, au moins pour un ingrédient sur lequel va s’articuler la notoriété du produit pâtissier manufacturé. Pour pouvoir combiner alors ces deux secteurs (artisanal en amont et industriel en aval) il est clair que c’est le nombre des fournisseurs qui devrait être suffisamment élevé.

Le premier grand problème dans ce cas de figure se trouve dans le type marché des matières premières sur lequel l’on désire s’établir. Il ne faut pas oublier que les produits fermiers, en plus de la concurrence féroce qu’ils livrent avec l’exploitation agricole industrielle (de grandes exploitations, donc à coûts relativement très bas) ils se livrent parfois aussi entre eux des concurrences, même à faible intensité. L’on peut alors dire que, déjà sur ce point, les fermiers auront du mal à supporter l’avenir de leurs exploitations malgré l’existence de plusieurs associations qui les soutiennent.

Ensuite, et avec une certaine relation d’interdépendance avec le problème précédent, l’exploitation qui intéresse la présente étude (les fermes artisanales) semble diminuer progressivement en nombre et en superficie. En fait, selon un recensement réalisé en 2010, l’on a constaté que de 1980 à l’année de recensement c’est-à-dire en 30 ans, quelques 2,76 ha de terres agricoles ont été perdu, soit annuellement une moyenne de plus de 90 000 ha. Désormais, avec un accroissement annuel du territoire non agricole de l’ordre de 28,1%, la surface agricole baisse annuellement de 8%. En seulement dix ans, le nombre d’exploitation agricole en France a perdu plus de son quart et c’est logiquement les petites exploitations qui en sont les victimes (35% pour les moins de 20 ha, 36% de 20 ha à 50 ha et de 20% de 50 ha à 100 ha). En termes de surface agricole utilisée, l’on a enregistré une diminution de 3,2% par rapport à l’ensemble sur le territoire français. En outre, le nombre des grandes exploitations (donc non artisanales) a été révisé à la hausse : un peu moins d’un quart de leur nombre il y a 10 ans de cela pour les exploitations de plus de 100 ha (contre une baisse 32% pour les moins de 100 ha). L’on a ainsi relevé une forte concentration des surfaces agricoles sur la période entre 2000 et 2010, c’est-à-dire une tendance vers l’industrialisation du secteur.

Pour conclure sur le secteur industriel d’un éventuel projet de combinaison de la production pâtissière avec les produits fermiers, la marge de manœuvre est surtout réduite à une utilisation relativement réduite de ces produits de ferme dans ladite production. En effet, cette combinaison pourrait encore être réalisée, soit en réduisant à la limite du nécessaire la proportion des produits fermiers rentrant dans la fabrication pâtissière, soit en focalisant l’attention des consommateurs sur des ingrédients clés (des fruits, par exemple) mais qui ne sont que plus faiblement utilisés dans une production donnée, lesdits ingrédients devant bien sûr être abondamment disponibles sur les circuits courts. Dans ces cas, la production pâtissière (industrielle) en question ne pourrait se prévaloir qu’une partie seulement de la notoriété potentielle de l’utilisation des produits fermiers.

Tout de même, un programme spécial de partenariat entre les fournisseurs (les fermiers) et l’entreprise de pâtisserie pourrait aussi être une solution plus développée. En effet, il est possible de concevoir un projet de production pâtissière qui intègre les producteurs des fermes. Il est par exemple envisageable de regrouper les fermiers d’une localité dans une association bénéficiant non seulement de la garantie d’achat de l’entreprise des produits agricoles de ces fermes, mais également d’éventuel financement dans le cadre du développement des activités de ces producteurs agricoles. Un tel programme réalisé sur le long ou moyen terme permettrait à l’entreprise de jouir de la notoriété même de ladite association.

 

  1. Exploitation artisanale

 

Dans le cas de la production pâtissière artisanale par contre, ces problèmes n’ont pas vraiment lieu d’être quoi que la concurrence avec les autres utilisateurs de produits fermiers (consommateurs finaux, autres producteurs du « métier de bouche », revendeurs, …) ne simplifie pas la situation. Le réel de la difficulté se trouve essentiellement sur le marché en aval de la production plutôt qu’un problème d’approvisionnement en matière première (en amont).

En fait, vue la taille essentiellement réduite d’une exploitation artisanale en matière de production pâtissière, la bataille pour obtenir une part de marché suffisante pourrait être rude pour la petite entreprise. D’un côté, l’on a affaire à un nombre déjà important de producteurs pâtissiers artisanaux (qui détiennent désormais la part la plus importante du marché en n’oubliant pas que ce secteur est dominé par l’artisanat), de l’autre côté, les grandes marques industrielles qui s’imposent sur les circuits de grande distribution.

Asseoir la production sur une telle faible espérance de développement ne peut ainsi être fiable et prometteur qu’en usant d’une notoriété effective sous peine d’exclusion du marché. Bien entendu, c’est sur la notoriété des produits fermiers que l’essentiel de celle de l’exploitation se pose. Toutefois, l’instabilité du marché face à la conjoncture notamment de la crise ainsi que la constante mutation que l’on constate dans les comportements des consommateurs vont nécessiter une base encore plus solide pour faire face aux éventuels imprévus. Pour une exploitation de taille modeste et financièrement fragile, un choc important (aussi bien du côté de ses fournisseurs que de ses clients) pourrait s’avérer fatale. La reconstruction d’une entreprise ayant déjà fondé une notoriété certaine en appui auprès de sa clientèle sera, par exemple, moins difficilement réalisable que pour le cas d’une production artisanale isolée n’ayant que les seuls produits fermiers comme argument.

A côté des divers supports déjà offerts par les partenaires du métier de pâtissier (les associations, les établissements d’appui, …), il convient encore de faire plus d’effort dans ce sens pour rendre moins fragile les projets. Le domaine de partenariat devrait encore être élargi et consolidé sous une certaine limite au-delà de laquelle l’on risque de détruire l’image que l’on veut instaurer. Il est par exemple préférable que les artisans pâtissiers, ayant le même objectif de développer une production pâtissière en la combinant avec les produits fermiers, se regroupent dans une association, voire sous une marque donnée. Avec un tel partenariat, la possibilité de développement est encore meilleure que celle d’une entreprise industrielle voulant s’aventurer seule dans le domaine. Il est même possible également pour une petite entreprise artisanale de trouver aussi un partenariat avec une marque déjà imposante (industrielle ou non) tout en conservant au premier plan la notoriété des produits fermiers.

En tout cas, l’utilisation des produits fermiers dans la pâtisserie engage aussi dans cette dernière les externalités négatives que ceux-ci subissent déjà sur le marché, dont le problème des prix élevés.

 

  1. La barrière du prix élevé

 

Le secteur de la pâtisserie a été déjà auparavant (dans la deuxième moitié des années 2000) victime de la flambée du prix des céréales sur le marché international. La crise économique qui s’ensuit vient ensuite aggraver la situation, non seulement de la pâtisserie en général, mais surtout de celle des produits fermiers.

En effet, ces produits considérés comme des lux sont réputés par ses prix relativement élevés par rapport aux autres types de produits, même dans les grandes surfaces. De plus, il est également à envisager d’autres coûts supplémentaires lors d’une exploitation de ces produits en vue de les transformer en produits pâtissiers. Les coûts de transactions (coûts de transport par exemple) seront sans doute plus élevés dans l’approvisionnement chez plusieurs fermiers (pour un volume suffisant d’intrant) que chez un nombre réduit de grands producteurs (donc, non artisanaux).

Il est logique ainsi de s’attendre à ce que les produits de la pâtisserie qui en résultent vont être pénalisés en termes de prix par rapport à ses concurrents. Il faut se rappeler que les concurrents directs d’une telle exploitation sont toutes les entreprises de la branche pâtisserie, qu’elles soient artisanales ou industrielles.

Dans ce cadre économique plutôt défavorable, la solution devrait à priori être recherchée essentiellement du côté de la qualité des produits finis que dans le prix des matières premières. Le segment de la clientèle que l’on devrait s’attendre va ainsi suivre celui des produits fermiers eux-mêmes. Il est alors préférable d’adapter l’offre, et ainsi la structure de la production, à ce type plutôt particulier de clientèle (des clients plutôt moins jeunes, issus des CSP de revenus plus aisés). Il est à remarquer que le prix des produits pâtissiers sera ainsi proportionnel aux quantités des produits fermiers entrant dans la fabrication de ces premiers.

Certes que la tendance dans la consommation des produits alimentaires en général et celle de la pâtisserie en particulier se montrent optimistes dans l’utilisation des produits fermiers. Mais, ces tendances sont très instables, et en termes de prix, la crise pourrait prendre le dessus sur les portefeuilles des consommateurs (comme cela devrait être le cas selon la prévision, sur les comportements des consommateurs de produit bio). Une partie importante de la clientèle pourrait donc se détourner de ces produits pâtissiers fermiers (si l’on peut se permettre une telle appellation) en faveur des concurrents, une situation très difficilement réversible (voire impossible).

Dans ce type de problème, la solution en termes de partenariat déjà évoquée plus haut (dans le domaine de notoriété, cf. supra) devrait également être fructueuse, même en partie. Si l’on confie le marché des matières premières (produits fermiers) à la loi du marché, une relation d’échange avec les producteurs fermiers pris individuellement devrait accroître le pouvoir de négociation de l’entreprise de pâtisserie compte tenu du nombre des agents (un seul demandeur et plusieurs offreurs, une sorte de monopsone) ; cependant, le marché des produits fermiers ne satisfait déjà pas la demande des clients fidèles et l’on risque de voir constamment une envolée des prix de ces produits. Un partenariat avec une association de fermiers devrait accroître la relation de confiance entre cette association et l’entreprise de pâtisserie en question et améliorerait la situation (des traitements favorables comme des prix préférentiels ou encore des accords de crédits de paiement pourraient être octroyés par les fournisseurs).

D’une manière ou d’une autre, l’important dans ce secteur est de toujours chercher à affirmer la qualité des produits finis et de se démarquer ainsi des produits concurrents. La relation avec la clientèle est aussi à entretenir de sorte à familiariser les clients à savourer ces produits dérivés des produits fermiers.

 

  1. De nouvelles tendances à prendre en compte

 

A part des tendances de changement forcé de comportement notamment observées du côté des produits biologiques qui connaitraient un ralentissement de croissance, et la relative concurrence entre ces produits et le locavorisme, d’autres tendances sérieuses pourraient aussi apporter des conséquences non positives sur la combinaison de la pâtisserie et les produits fermiers.

L’on peut par exemple apprécier une sorte de baisse tendancielle de la part de la consommation alimentaire dans le budget annuel de la famille française. A première vue, ce phénomène devrait influer négativement sur les opportunités de croissance du secteur de la pâtisserie en particulier. En fait, en moins de quarante ans (de 1970 à 2007 plus exactement), la dépense de consommation alimentaire est passé de près de 21% pour descendre à 13,6% du budget familial total. Pourtant, la dépense alimentaire familiale a toujours progressé, passant de 1 470 € à 2 640 € (prix constant de 2007). Si l’on estime que cette progression serait due à une relative amélioration sur le revenu moyen des français, l’on peut déduire de ces données plutôt contradictoires que les français sont quand même entrain de délaisser leur alimentation au profit d’autres besoins. Le nombre de besoins a d’ailleurs augmenté (plus de loisirs, les produits issus de la technologie de l’information et de la communication, certains autres besoins ont pris de l’ampleur dans l’ordre de priorité des français, puis, le phénomène de saturation impose une certaine limitation des besoins en nourriture.

En fait, des facteurs importants qui sont relativement nouveau pour la plupart (par rapport au contexte dans les décennies précédant la fin du XXè siècle) entrent dans la détermination des comportements des français en matière d’alimentation. L’Expertise Scientifique Collective réalisée par l’INRA en 2010 a permis de relevé quelques uns d’entre ces facteurs ainsi que la forte relation existant entre santé et habitudes alimentaires.

Il faut dire que l’environnement dans lequel vit un individu avec les éléments qui conditionnent cet environnement (comme la télévision, les bruits) conditionnent les mécanismes physiologiques en matière d’habitudes d’alimentation (comme la faim ou la satiété). La forte mutation qui s’opère notamment sur le plan technologique risque ainsi de déstabiliser énormément les habitudes alimentaires des français dans les quelques décennies à venir. La composition de la ration alimentaire pourrait alors faire l’objet d’une importante révision ainsi que d’autres facteurs liés aux comportements alimentaires comme le lieu d’achat et de consommation, l’horaire des déjeuners, …

L’Expertise Scientifique Collective a toutefois dévoilé que les préférences alimentaires acquises dans la jeunesse sont fortement ancrées. Ces préférences sont par la suite très difficilement modifiables. L’on se demande alors sur le futur de la pâtisserie combinée aux produits fermiers si ces derniers ne sont même pas sculptés dans les habitudes des jeunes gens qui seront, dans quelques décennies, les seuls consommateurs potentiels dans le domaine de la pâtisserie.

Il faut aussi dire que, face à une certaine insuffisance fréquente de l’offre de produits fermiers qui se reflètera certainement dans la production pâtissière qui en résulte, la disponibilité (au même titre que le prix et la qualité des produits) a des effets sur les comportements des consommateurs. Ce qui suppose une sorte d’incertitude qui plane sur l’offre de ces produits, et donc sur la possibilité de développement du secteur à promouvoir sur le long terme.

Sur une large mesure, les professionnels du métier de pâtissier devraient se rendre compte que toutes ces tendances doivent être traitées avec délicatesse. L’instant présent joue considérablement sur l’avenir de leurs projets : c’est dans le moment présent qu’ils doivent façonner les images positives de leurs produits, de leurs entreprises. Les moyens mis en œuvre dans la construction de ces images devraient cibler non seulement les consommateurs potentiels du moment, mais toucher tous les segments de clientèle, autant que possible. En effet, le choix des segments cibles de consommateurs ne devraient pas limiter la communication à ces segments seulement étant donnée l’incertitude qui réserve plein de surprise. En outre, la bonne nouvelle est que les consommateurs sont également influencés de manière conséquente par ces moyens de communication, dont le packaging et la publicité.

Finalement, le savoir-faire des artisans pâtissiers doit être à la hauteur des images qu’ils veulent construire auprès de son public, et ce savoir-faire doit pouvoir pousser au premier plan la spécificité des produits (pâtisserie des produits fermiers).

 

Conclusion

 

L’historique dans le domaine de la pâtisserie montre le formidable essor que cette branche d’activité a connu notamment en chevauchant ces deux derniers siècles. L’apport d’un élément qui n’est pas tellement nouveau dans le domaine mais se comporte raisonnablement bien auprès des consommateurs devrait encore améliorer les résultats attendus. Ainsi, l’utilisation des produits fermiers en tant que matières premières dans la production pâtissière bénéficierait largement des avantages que ces premiers se permettent déjà sur le marché des produits agroalimentaires. Ces points forts sont surtout manifestes sur les images que ces produits des cycles courts pourraient affecter aux produits pâtissiers auprès des consommateurs. Certaines caractéristiques des produits fermiers accorderaient également des avantages à la pâtisserie sur le processus de production, notamment en termes d’approvisionnement en matières premières, c’est-à-dire auprès des fournisseurs.

Toutefois, une telle combinaison ferait aussi hériter la pâtisserie des externalités négatives de ces produits fermiers. Ces points à améliorer sont axés au niveau des prix relativement élevés des matières premières (et donc des produits finis), des problèmes de notoriété sur laquelle devrait se baser l’exploitation (déjà existante ou nouvelle), ainsi que des incertitudes qui risquent de déstabiliser les comportements des consommateurs potentiels.

Tout ceci s’accorde à conscientiser les professionnels des métiers de pâtisserie que leur responsabilité ne s’arrête pas au seul domaine de production, élaborer telle recette, vendre aux consommateurs habituels, … Les pâtissiers devraient se rendre compte que l’avenir de son métier repose sur une multitude de paramètres qu’ils devraient maîtriser le fonctionnement et savoir répondre efficacement. Ils devraient se comporter comme de véritables opérateurs économiques, à la fois gestionnaires, ouvriers, managers, … mais aussi un facteur de lien social, des promoteurs culturels, des gardiens de la tradition tout en adoptant toujours un esprit créatif et novateur.

En somme, les pâtissiers, qu’ils soient artisans ou industriels, sauraient saisir toutes les opportunités, chaque élément à sa disposition pour le faire tourner à son avantage.

 

Bibliographie

 

  • BELLEC, Jean François et al., La qualité dans la filière de la pâtisserie, UPMC, Année 2008-2009.
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  • Pôle d’Innovation Technologique, Bulletin de Veille Pâtisserie, Centre Technique des métiers de la Pâtisserie, n°9 – avril 2012.
  • APCE, Boulangerie-pâtisserie artisanale, Code APE 10.71C, APCE, janvier 2010.
  • ROUSSELOT, David, Etats de l’offre et de la demande en produits fermiers en France, Sup’Etablière et Progress Scion, 2010
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  • TOULLALAN, Maurice, Les enjeux de la production et de l’approvisionnement alimentaires en Ile-de-France, Commission de l’Agriculture, de l’environnement et de la ruralité, mars 2012.
  • PADILLA, Martine, Modèle causal global de la consommation alimentaire, CIHEAM, 2002

[1] Bulletin de conjoncture – marché du sucre n° 501 – Statistiques de juillet 2012. France Agrimer (Bilan français du sucre p.30)

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