Les normes IFRS engendrent-elles une volatilité comptable qui ne reflète pas la réalité économique ?
Les normes IFRS engendrent-elles une volatilité comptable qui ne reflète pas la réalité économique ?
Sommaire
Synthèse2
Introduction5
- Comptabilité traditionnelle : Avant IFRS 137
- Application des nouvelles normes comptables internationales9
2.1. Présentation de l’IFRS 13 et définition de la juste valeur9
2.2. Comptabilisation à la juste valeur12
2.3. Difficultés d’application des principes15
- Impact de la juste valeur sur la comptabilité19
3.1. Comptes de bilan19
3.2. Comptes de gestion20
- Avantages et inconvénients de l’application du référentiel comptable international23
4.1. Pertinence des états financiers IFRS pour les investisseurs23
4.2. Critique sur la juste valeur par rapport à sa mesure 25
- Rôle de la juste valeur dans la crise financière27
- Cas pratique30
6.1. Présentation de l’étude de terrain30
6.2. Présentation et analyse des résultats 32
6.3. Vérification des hypothèses38
6.4. Résolution de la problématique39
Conclusion42
Bibliographie43
Annexes46
Synthèse
Depuis 1er janvier 2015, l’Union européenne a décidé d’adopter les normes comptables internationales en IFRS (International Financial Reporting Standards). Par conséquent, tous les pays membres se doivent de les appliquer dans le cadre de l’élaboration de l’information financière les concernant. Les principales concernées par ces normes comptables internationales sont alors les sociétés qui présentent des comptes consolidés.
Face à cette situation, il convient pour ces dernières de se référer aux normes IFRS lors de la comptabilisation de leurs actifs et passifs, mais également lors de l’évaluation de ces éléments. Elles doivent désormais se référer au principe de la juste valeur.
La juste valeur se définit comme le prix pour lequel un actif pourrait être échangé, entre parties bien informées, consentantes, et agissant dans les conditions de concurrence normale. Toutefois, cette pratique présente des conditions. Pour que la juste valeur soit possible, il est indispensable de s’assurer que la contrepartie de l’élément échangé correspond exactement à la valeur réelle de cet élément.
L’application des normes internationales d’information financière, fondées généralement sur le principe de la juste valeur a fait l’objet d’études particulières dans le cadre du présent travail. Ces études se portent notamment sur les raisons de l’adoption des normes IFRS, qui se rapportent à la nécessité de disposer d’un référentiel international afin de faciliter la présentation et la compréhension de l’information financière.
Ces études ont également permis de cerner les principes de base de la norme IFRS 13 « Évaluation à la juste valeur », ainsi que ceux de la juste valeur. Dans cette démarche, les difficultés liées à l’application de cette méthode ont été relevées, tant au niveau des sociétés concernées par les normes internationales que des investisseurs présents et futurs.
Les normes IFRS, comme tout autre référentiel comptable, ont mis en exergue le fait que le principe de « fair value » présente bien des avantages, notamment du point de vue des investisseurs, ainsi que des inconvénients qui ont alimenté les critiques sur la pratique.
Pour le Conseil des normes comptables internationales (IASB), le principe de la juste valeur est un moyen qui permet d’avoir une vision sur l’image fidèle de la situation économique réelle. Il s’agit d’ailleurs d’un objectif qui a été fixé lors de l’élaboration de chaque norme internationale.
Le cas pratique étudié dans le présent mémoire démontre pourtant qu’au niveau des entreprises concernées, la méthode d’évaluation à la juste valeur présente des inconvénients majeurs qui sont la nécessité d’actualiser constamment les valeurs des actifs, notamment lors de chaque présentation des informations financières ; et la volatilité des écritures comptables qu’elle entraîne.
Du point de vue de l’IASB, cette volatilité comptable ne présente aucun inconvénient compte tenu du fait qu’il reflète exactement la réalité au niveau des marchés, et par conséquent, la réalité économique.
Afin d’avoir une vision plus claire, des études de terrain ont été menées. L’objectif est d’avoir un point de vue concernant des cas concrets rencontrés au sein d’entreprises étant amenées à se référer aux normes IFRS et à appliquer la méthode d’évaluation des éléments du bilan à la juste valeur.
À partir de ces études, il a été constaté que l’application du principe de la juste valeur au sein des sociétés en comptes consolidés requiert un changement radical au niveau de leur système comptable, et ce, sur tous les plans : organisationnel, outils, ressources, compétences.
De plus, en matière de niveau d’informations à fournir, ces entreprises estiment que la liste est assez longue, ce qui présenterait un risque notamment au niveau de la sécurité et la confidentialité. Par ailleurs, le fait de devoir actualiser à chaque fois les éléments du bilan, et de contrôler les conditions remplies au niveau des informations à fournir prend énormément de temps pour les exploitants.
Par ailleurs, les entreprises faisant l’objet de l’étude de terrain ont également démontré que les normes IFRS présentent pareillement des avantages auxquels elles n’avaient pas accès en appliquant la comptabilité traditionnelle. Ils concernent notamment la comparabilité des sociétés, ainsi que la conformité et le standard sur le plan international.
La problématique centrale de ce mémoire se porte sur l’implication des normes IFRS dans la création de volatilité comptable pouvant entraîner une image infidèle à la réalité économique. Il a surtout été relevé que les événements et faits liés à cette question sont interdépendants.
Introduction
La mondialisation est un phénomène auquel aucune entreprise ne peut échapper. En effet, dans ce contexte, les échanges ont été libéralisés, et ce, à tous les niveaux : flux de marchandises, flux de personnes, flux financiers, et flux informationnels. Cette situation présente des avantages pour tous les agents économiques, du fait que l’accès à tous ces éléments est facilité.
Du point de vue des entreprises, les évolutions technologiques accompagnées par cette mondialisation, ont fait naitre au sein des consommateurs de nouveaux comportements qu’il convient d’appréhender. Le marché est alors dominé par une concurrence accrue, d’où la nécessité de mettre en œuvre tous les moyens permettant de rester compétitif.
L’internationalisation se présente comme une solution pour ces dernières, compte tenu du fait qu’elle permet à la fois à une entreprise d’explorer d’autres marchés, celui du local étant saturé, et de développer sa croissance. Le recours à l’international exige toutefois le respect de nombreuses règles et conditions : compétences à l’international, connaissance du terrain, maitrise des règles comptables et financières.
L’importance de la mise en place de normes standardisées en matière de reporting financier a alors été ressentie. En effet, ce dernier présente de nombreux avantages tels que l’ouverture de la société à de nouveaux investisseurs, qui ont la possibilité de comprendre la situation financière de l’entité plus aisément.
C’est dans cette optique que les normes IFRS ont été adoptées par l’Union européenne à partir de l’année 2005. En matière d’évaluation d’actifs, la norme IFRS 13 prévoit la méthode de la juste valeur qui se base sur le prix de marché des éléments en question. Cette pratique a été adoptée dans le but d’avoir une image fidèle de la situation de l’entreprise, chose impossible lors de l’évaluation au coût historique, fondement de la comptabilité traditionnelle.
Cette pratique présente toutefois des inconvénients pour les entreprises, telle que la nécessité de mettre à jour la valeur des actifs à chaque présentation de la situation financière. C’est la raison pour laquelle la problématique du mémoire a été formulée de la manière suivante :
« Les normes IFRS engendrent-elles une volatilité comptable qui ne reflète pas la réalité économique ? »
Afin de pouvoir répondre à la question, six points seront abordés dans le mémoire. Le premier se porte sur la présentation de la comptabilité traditionnelle basée sur le coût historique. Le second point traite des nouvelles normes comptables, et principalement IFRS 13 « Évaluation de la juste valeur » ainsi que son application. L’impact de la juste valeur sur la comptabilité sera analysé dans le troisième point, et ce, au niveau des comptes de bilan et des comptes de gestion.
Les avantages et les inconvénients de l’application du référentiel comptable international seront abordés au quatrième point. Le cinquième point concerne l’analyse de la part de contribution de la juste valeur sur la crise financière. Quant au dernier point, il est consacré à l’étude de terrain. Une enquête a été menée auprès d’exploitants des informations financières afin de servir d’illustration en ce qui concerne l’impact des normes IFRS sur la comptabilité des entreprises.
- Comptabilité traditionnelle : Avant IFRS 13
Cette première partie est destinée à la présentation de la comptabilité traditionnelle qui a été appliquée avant l’émergence des normes internationales. En matière de mesure comptable du résultat et d’évaluation, la méthode du coût historique représente le fondement de la comptabilité traditionnelle. Le plan comptable général (PCG) est le référentiel utilisé dans le cadre de cette pratique.
En effet, le PCG 1999 précise dans son article 321-1 les règles suivantes : « À leur date d’entrée dans le patrimoine de l’entreprise, les biens acquis à titre onéreux sont enregistrés à leur coût d’acquisition, les biens acquis à titre gratuit à leur valeur vénale et les biens produits à leur coût de production ». Il s’agit alors du nominalisme ou du principe des coûts historiques.
Il s’avère opportun de présenter en premier lieu le concept de coût historique. Il s’agit de la valeur d’un bien au moment de son enregistrement comptable. Dans le cas où le bien a été acquis, son coût historique correspond à sa valeur d’acquisition. Si le bien a été obtenu de manière gratuite, son coût historique est représenté par sa valeur vénale ou par sa valeur d’usage lors de son obtention. Lorsque le bien a été produit par l’entreprise, son coût de production est considéré comme son coût historique.
Ainsi, lors de l’enregistrement et de l’évaluation des biens qui intègrent leur patrimoine, les entreprises appliquaient la méthode du coût historique. Il convient alors de souligner les points suivants :
- Les coûts d’investissement qui se rapportent à la production doivent être comptabilisés dans le bilan en retenant la valeur à laquelle ils ont été acquis lors de l’achat. Toutefois, les entreprises tiendront compte des amortissements.
- La méthode du coût historique n’évalue pas la fonction production qui est délimitée entre les actifs du bilan et les résultats attendus. Les entreprises constatent ainsi les performances à travers les éléments inscrits dans le compte de résultat pour chaque exercice comptable.
L’intérêt pour les entreprises d’appliquer la méthode d’évaluation au coût historique repose sur le fait qu’elles disposent de la possibilité de ne pas être influencées par tout mouvement au niveau des marchés externes lors du processus de production. De plus, les actifs sont considérés comme des éléments qui, combinés avec d’autres ressources au sein d’une entreprise, permettent la réalisation d’une activité productive.
D’un point de vue général, la méthode du coût historique a alors pour objectif de se référer uniquement à la valeur nominale de la monnaie de sorte que les variations du pouvoir d’achat ne présentent aucun impact sur l’évaluation. Cette pratique cadre bien avec l’article L123-4 du Code de commerce qui stipule que « Les comptes annuels doivent être réguliers, sincères, et donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l’entreprise », étant donné qu’elle considère l’unité monétaire comme une unité de mesure stable.
Les actifs de l’entreprise conservent de ce fait leur valeur au moment de l’écriture comptable, et ce, même en cas de dépréciation au fur et à mesure de l’avancement dans le temps et de leur exploitation par l’entreprise. Il convient de noter que la méthode du coût historique permet également la comptabilisation des éventuelles pertes pouvant être générées, mais en aucun cas les éventuels profits pouvant être réalisés. C’est la raison pour laquelle elle est considérée comme le principe de la prudence.
Il convient toutefois de préciser que lors de l’application du coût historique, tout élément n’étant pas représenté en coût ne pourra être comptabilisé. Il s’agit notamment des produits dérivés qui, de manière générale, ne nécessite pas de flux financiers à l’origine. Ceci, compte tenu du fait que l’exploitant n’a pas la possibilité de les constater, et par conséquent, ne pourra pas en tenir compte pour l’appréciation des cash-flows futurs. Ainsi, il est constaté que seules les transactions sont comptabilisées dans la méthode du coût historique.
Dans le cadre de l’application du coût historique, une entreprise est peu incitée à céder un instrument financier, étant donné le fait que sa valeur de marché est considérée comme inférieure à son coût historique. Il a également été relevé que comptabiliser un élément à son coût historique est adapté dans le cas des actifs et des passifs détenus jusqu’à l’échéance.
Ainsi, le coût historique représente la pratique comptable qui permet aux entreprises de comptabiliser les coûts et de traduire leur usage dans le processus de développement du patrimoine. Il est également appliqué afin de servir de référence lors de la comptabilisation des postes d’actif et de passif, compte tenu du fait qu’il peut être vérifié, ce qui le rend plus objectif.
- Application des nouvelles normes comptables internationales
Depuis l’année 2005, l’application des nouvelles normes comptables internationales reconnues sous le sigle IFRS (International Financial Reporting Standards) est obligatoire en Europe, pour les sociétés en comptes consolidés. Il s’agit de normes d’information financière internationale élaborées par le Conseil des normes comptables internationales ou IASB (International Accounting Standards Board). Dans un contexte de mondialisation, une libre circulation est accordée pour les personnes, les marchandises, les capitaux, et par la même occasion, les informations. Par conséquent, il a été considéré comme indispensable pour les informations financières de présenter un caractère standard, d’où la mise en œuvre de ces nouvelles normes. Les sociétés cotées étant amenées à établir des reportings internationaux, elles sont les premières concernées par ces nouvelles normes.
Ainsi, la mise en place des nouvelles normes comptables internationales en Europe s’explique pour deux raisons. La première se porte sur le fait que l’Union européenne a exprimé le besoin d’un référentiel comptable homogène en son sein. La seconde raison concerne le fait que l’économie actuelle laisse de plus en plus place au savoir et à l’immatériel. Les pratiques comptables imposées par l’IASB sont fondées sur le principe de la juste valeur ou « fair value », et la norme IFRS 13 « Évaluation de la juste valeur » a été spécialement élaborée afin d’asseoir ce principe.
- Présentation de l’IFRS 13 et définition de la juste valeur
Homologuée le 11 décembre 2012 et publiée dans le journal officiel de l’UE le 29 décembre 2012, la norme IFRS 13 « Évaluation de la juste valeur » comporte les informations relatives à la juste valeur.
Étant donné que la norme IFRS 13 se base sur le principe de la juste valeur, il convient en premier lieu de la définir. Il s’agit en effet d’un concept qui est apparu dans les années 50, mais qui a commencé à prendre son sens à partir des années 90. Le principe de la juste valeur a été lancé avec l’évolution des normes comptables américaines. Désormais, la quasi-totalité des normes comptables internationales font référence à la juste valeur.
La juste valeur peut être définie comme la somme contre laquelle un élément (notamment actif) pourrait être échangé lors d’une transaction de type courant entre deux parties informées et consentantes, ces dernières agissant dans des conditions de concurrence normale. La norme IAS 32 « Instruments financiers : présentation » définit la juste valeur de la manière suivante : « le montant pour lequel un actif peut être échangé, ou un passif émis entre deux parties volontaires et bien informées, dans le cadre d’une transaction à intérêts contradictoires ».
La norme IFRS 13 apporte également une définition de la juste valeur, et elle sera retenue dans le cadre du présent mémoire : « le prix qui serait reçu pour la vente d’un actif ou payé pour le transfert d’un passif lors d’une transaction normale entre des intervenants du marché à la date d’évaluation ».
La norme IFRS 13 s’applique aux normes IFRS nécessitant ou permettant des évaluations à la juste valeur ou la communication d’informations sur la juste valeur. Il existe toutefois des exceptions auxquelles la norme ne pourra s’appliquer :
- Les transactions dont le règlement est fondé sur les actions (IFRS 2 « Paiement fondé sur des actions »),
- Les transactions de location (IAS 17 « Contrats de location »), et
- Les évaluations similaires à la juste valeur mais n’étant pas des justes valeurs. Il s’agit notamment de la valeur nette de réalisation (IAS 2 « Stocks ») ou encore de la valeur d’utilité utilisée (IAS 36 « Dépréciation d’actifs »).
La norme IFRS 13 est ainsi appliquée lors de la détermination de la juste valeur des actifs, des passifs, ainsi que des instruments de capitaux propres d’une société. En matière d’informations relatives à la juste valeur, la norme présente deux objectifs. Le premier est d’apprécier les techniques d’évaluation des données qui sont utilisées. Le second est d’apprécier l’effet des évaluations sur le résultat net, ainsi que sur les autres éléments du résultat global, à condition que les évaluations soient fondées sur des données observables.
La norme IFRS 13 détermine également les éléments qui doivent être fournis par une société, lors de son application. Il s’agit notamment des informations suivantes :
- La juste valeur à la fin de la période de présentation de l’information financière ;
- Le niveau de la hiérarchie de la juste valeur, qui est défini suivant les données utilisées dans l’évaluation ;
- La valeur des transferts de juste valeur réalisés le cas échéant ;
- Une présentation des techniques d’évaluation et des données qui ont été utilisées ;
- Un rapprochement entre les deux soldes (ouverture et clôture) ;
- Le montant total des profits ou des pertes concernés par la période ;
- Une description sur les processus d’évaluation ;
- Une description circonstanciée de la sensibilité de l’évaluation de la juste valeur à des changements (dans le cas des données non observables) ; et
- Les informations liées aux catégories précisées par l’entreprise afin de faciliter l’évaluation de la juste valeur.
Cependant, il est important de noter qu’il existe des éléments qui ne sont pas considérés par la norme internationale dans les informations à fournir. Il s’agit notamment :
- Des actifs du régime qui sont évalués à la juste valeur selon la norme IAS 19 « Avantages du personnel » ;
- Les participations dans un régime de retraite évaluées à la juste valeur selon la norme IAS 26 « Comptabilité et rapports financiers des régimes de retraite » ; et
- Les actifs pour lesquels la valeur recouvrable représente la juste valeur diminuée des coûts de la vente (IAS 36 « Dépréciation d’actifs »).
- Comptabilisation à la juste valeur
Lors de la comptabilisation initiale d’un actif ou d’un passif suivant la norme IFRS 13, il convient de tenir compte de deux types de prix : le prix d’entrée et le prix de sortie. Le prix d’entrée représente le prix de transaction qui a été payé pour l’acquisition de l’actif, ou pour le règlement du passif. Quant au prix de sortie, il s’agit de la juste valeur de l’actif ou du passif.
Il est toutefois possible que le prix de transaction (prix d’entrée) représente également la juste valeur. Pour pouvoir le déterminer, il convient de tenir compte des situations dans lesquelles le prix de transaction pourrait ne pas correspondre à la juste valeur lors de la comptabilisation initiale. Le tableau suivant illustre ces situations.
Tableau 1 : Situations dans lesquelles le prix de transaction ne représente pas la juste valeur lors de comptabilisation initiale
Situations | Détails |
Transaction conclue entre parties liées | Toutefois, si la transaction a été conclue à des conditions du marché, le prix de la transaction peut servir de donnée afin d’évaluer la juste valeur. |
Transaction conclue sous la contrainte | Des cas peuvent se présenter où le vendeur est contraint d’accepter le prix qui lui est proposé, car il est face à une difficulté financière par exemple. |
Différence entre l’unité de comptabilisation représentée par le prix de transaction et celle de l’actif ou du passif évalué à la juste valeur | Cas se présentant lorsque :
|
Différence entre le marché sur lequel la transaction a eu lieu et le marché principal | Il peut s’agir des marchés sur lesquels l’arbitrage intervient. L’entité est alors un arbitragiste qui conclut des transactions avec des clients sur le marché de détail alors que le marché principal (ou le plus avantageux) pour la transaction de sortie est un marché de contrepartistes. |
Source : Obtenu à partir du paragraphe B4 de la norme IFRS 13
Selon la norme IFRS 13, l’entreprise doit appliquer les techniques d’évaluation de la juste valeur les plus appropriées aux circonstances. Dans sa démarche, elle doit disposer des données nécessaires en quantité suffisante et surtout favoriser l’utilisation des données d’entrée observables et pertinentes à celles qui ne le sont pas.
Il existe alors trois techniques d’évaluation de la juste valeur : l’approche par le marché, l’approche par les coûts, et l’approche par les flux futurs.
- L’approche par le marché
L’approche par le marché est la première technique d’évaluation de la juste valeur. Elle repose principalement sur les prix de transaction, puisque la valorisation de la juste valeur est réalisée en considérant le contexte du marché.
Cette démarche représente une garantie que l’exploitant de la société ne prend pas comme référence des données et éléments spécifiques internes lorsqu’il procède à l’évaluation à la juste valeur. Par conséquent, l’évaluateur doit remplir certaines conditions et être en mesure de :
- Avoir à sa disposition le maximum d’informations nécessaires à l’évaluation ; et
- Conclure une transaction sans avoir à se sentir contraint ou obligé dans toute la démarche.
La valorisation à la juste valeur doit toujours être effectuée en se basant sur une utilisation optimale de l’actif, ce qui ne correspond pas forcément à l’utilisation effectuée par l’entreprise.
L’approche par le marché est alors basée sur les prix, mais également sur d’autres informations pertinentes générées par des transactions de marché. Elles peuvent être sur des actifs, des passifs, ou encore sur un groupe d’actifs et de passifs, comme une entreprise par exemple. Ces derniers étant identiques ou peuvent être comparés, en d’autres termes similaires.
- L’approche par les coûts
L’approche par les coûts reflète le montant qui serait requis actuellement afin de remplacer la capacité de service d’un actif. Ce montant est appelé coût de remplacement.
L’approche se base sur l’estimation du coût de remplacement d’un actif par un autre actif qui apporte les mêmes services. Sur le plan comptable, elle correspond à la méthode de remplacement et est perçue comme une méthode économique, notamment pour les sociétés en comptes consolidés.
- Approche par les flux futurs
L’approche par les flux futurs est une technique d’évaluation de la juste valeur qui est aussi connue comme étant l’approche par le résultat. Elle consiste pour la société à convertir les montants futurs, notamment ceux qui concernent les flux de trésoreries, en un montant unique actualisé.
Lorsque l’exploitant choisit d’appliquer l’approche par les flux futurs, la juste valeur reflète les attentes actuelles du marché par rapport à ces montants futurs. Elle est surtout adoptée lors d’une absence de marché actif fiable.
- Difficultés d’application des principes
L’application des principes de la juste valeur engendre une certaine difficulté pour les exploitants. Les difficultés rencontrées sont notamment dues au passage du coût historique à la juste valeur. Ces difficultés concernent tant les investisseurs que pour les entreprises qui les appliquent.
- Difficultés rencontrées par les investisseurs
Pour les investisseurs, les difficultés liées à la juste valeur résident dans l’ambiguïté dans laquelle ils se trouvent compte tenu de l’abondance de l’information. En effet, les fluctuations du marché donnent une impression de volatilité aux informations financières. Or, le point de vue des dirigeants d’une entreprise est important pour les investisseurs. Par conséquent, la volatilité des résultats rend les dirigeants moins objectifs quant à l’évaluation de la performance de l’entreprise.
- Difficultés rencontrées par les sociétés
Au niveau des entreprises, il a été constaté que les difficultés d’application des principes de la juste valeur se posent au niveau du pilotage, du coût, de l’information, et de la sécurité.
En matière de pilotage, les marchés financiers portent une certaine pression sur les sociétés. La juste valeur correspond à une approche de marché basée sur le court terme qui, par conséquent, ne peut être adaptée à un système de pilotage à long terme. Les entreprises éprouvent alors des difficultés à adapter leurs mécanismes de pilotage aux attentes du marché, ainsi qu’aux principes de la juste valeur.
Une évaluation à la juste valeur au sein d’une société est réalisée sous la responsabilité de ses dirigeants, notamment en matière de processus et de choix des hypothèses. Par conséquent, ces derniers doivent mettre en place un système de surveillance afin de s’assurer du respect des principes imposés. Ce qui les entraîne non seulement à mobiliser des coûts supplémentaires, mais également à rendre leur système de pilotage plus complexe.
Au niveau de la mesure de la performance économique de l’entreprise, il est difficile pour l’exploitant de différencier la performance intrinsèque de l’entité des facteurs qui ont permis l’évolution des marchés. L’entreprise ne dispose alors pas de point de repère lui permettant d’évaluer la performance de la stratégie mise en place, ainsi que du pilotage.
En matière de coût, l’application de la méthode d’évaluation à la juste valeur requiert une mobilisation d’une somme assez importante au sein d’une entreprise. Cette nécessité s’explique par le fait qu’il est important pour l’entreprise de considérer toutes les tendances du marché pour disposer de l’information actuelle.
Les principales raisons de l’engendrement de ce coût sont notamment :
- La nécessité de mise en place d’un système d’évaluation continue ;
- Le recours à des experts en matière d’évaluation ;
- L’implémentation d’un système d’information afin de répondre aux exigences liées à l’actualisation de l’information ; et
- Le besoin en formation des ressources comptables et financières.
L’information représente une source de difficultés pour les entreprises lors de l’application de la juste valeur. En effet, lors d’une étude menée sur des groupes d’entreprises en matière de difficultés liées à la juste valeur, il a été relevé que la liste des informations à fournir dans le cadre de l’application de la norme IFRS 13 est relativement longue, et concerne différentes catégories, comme il est présenté dans le tableau ci-dessous.
Tableau 2 : Catégories d’information liées à IFRS 13 et à la juste valeur
Catégories d’information | Normes |
Les objectifs primordiaux d’information | IFRS 13 : paragraphes 91, 92 et 94 |
Les actifs financiers et les passifs financiers évalués à la juste valeur | IFRS 13 : paragraphes 93 et 98 |
Les justes valeurs classées au niveau 3 de la hiérarchie pour les actifs financiers et les passifs financiers | IFRS 13 : paragraphe 93 |
Les instruments financiers qui ne sont pas évalués à la juste valeur, mais dont la juste valeur est indiquée | IFRS 7 : paragraphes 25, 26, 28 et 30 |
Source : Obtenu à partir des éléments fournis par NIFC Canada, 2013.
Afin d’avoir une vision plus claire de la longueur des informations à fournir, les informations qui sont exigées en matière de justes valeurs classées niveau 3 (ligne 4 du tableau 2) sont présentées en Annexes.
Selon ces entreprises, leur attention devrait plutôt être portée sur les informations qui sont jugées pertinentes et utiles pour les investisseurs, et non sur le traitement d’une longue liste d’information.
En ce qui concerne la sécurité, elle est principalement liée aux informations que l’entreprise doit fournir dans le cadre de l’application de la juste valeur. En effet, plus la liste est longue, plus les tiers sont informés sur la situation de l’entité, ce qui entraîne une facilité d’accès à des informations personnelles de cette dernière pour ses concurrents. De plus, la majorité de ces informations se portent sur les modèles de gestion adoptés par l’entreprise, et par conséquent, sur ses décisions.
- Impact de la juste valeur sur la comptabilité
L’impact de la juste valeur ne se porte pas uniquement sur les sociétés en comptes consolidés et les investisseurs, mais également sur la comptabilité en elle-même. Cette partie est alors destinée à l’analyse de l’impact de la juste valeur sur les comptes de bilan, ainsi que sur les comptes de gestion.
- Comptes de bilan
La comptabilité est un poste qui a pour utilité de fournir aux actionnaires ainsi qu’aux tiers, notamment le personnel, les clients, les créanciers, les fournisseurs, et les pouvoirs publics, une image fidèle en ce qui concerne sa situation financière. Il a été constaté que lors de l’application du coût historique, il s’avère impossible de refléter cette image fidèle.
Cette situation s’explique par le fait que les éléments qui figurent au bilan de la société sont exprimés à la valeur à laquelle ils ont été acquis ou produits ou encore émis. Pourtant, cette valeur, au fil de l’avancement du temps, peut présenter une valeur qui diffère largement de cette valeur dite théorique.
Cette différence entraine notamment des survaleurs qui rendent difficiles les opérations de fusions, et des grands groupes comme Vivendi ont en été victimes. Renoncer à l’application de normes comptables européennes au profit des normes comptables internationales a alors été la décision adoptée.
L’adoption du principe de la juste valeur a alors été décidée par l’IASB afin d’éviter ce genre de situation désagréable. Cette décision implique le fait que les éléments qui sont inscrits au bilan de l’entreprise doit désormais être appréciés suivant leur valeur de marché. Si l’objectif était de refléter une image fidèle de la situation financière d’une société, le principe de la juste valeur se présente comme convaincant.
Cependant, il a été relevé que cette pratique présente encore des difficultés en matière de comptabilisation. Le premier problème se porte sur le fait qu’il est impossible d’obtenir la valeur de marché connue de tous les éléments inscrits au bilan d’une entreprise.
Cette difficulté concerne tant les éléments matériels tels que les équipements et les stocks de produits intermédiaires, que les éléments immatériels tels que les licences et brevets, ou encore les éléments financiers tels que les crédits octroyés par les banques. Dans de telles circonstances, la valeur de marché de ces éléments est estimée en se basant sur des conventions qui ne reflètent pas forcément la réalité.
De plus, l’entreprise doit veiller à s’informer sur la valeur des actifs et passifs de son bilan chaque année et procéder à l’actualisation dans le cas d’un changement. Or, le contexte actuel est marqué par une forte volatilité des prix. Il est alors rare que la juste valeur d’un élément ne change pas d’une année à l’autre.
Ainsi, la juste valeur provoque au niveau des comptes du bilan une volatilité qui se traduit par le changement des tendances du marché des éléments qui y sont inscrits. Cette situation a d’autant plus été relevée au niveau des banques qui affichaient une perte de plus de 100 milliards de dollars en 2008. L’application de la juste valeur a ainsi provoqué au niveau de leurs comptes de bilan une très forte volatilité.
- Comptes de gestion
L’application du principe de la juste valeur présente des impacts sur l’organisation comptable d’une entreprise, mais surtout sur son compte de résultat. D’abord, il a été constaté que la juste valeur contribue à plus de transparence du fait qu’elle étaye de manière claire et précise les méthodes qui ont été appliquées pour aboutir à un résultat, et de manière générale, il n’est pas issu d’une performance mais d’un certain détournement des règles comptables.
La juste valeur a un important impact sur les résultats de la société, du fait qu’il devient indispensable d’actualiser chaque année la valeur des éléments inscrits dans le bilan. Par conséquent, lorsqu’un actif augmente de valeur d’une période à une autre, une plus-value sera inscrite dans le compte de résultat. Ce qui a pour conséquence un gonflement des profits. Dans le cas inverse où la valeur de l’actif sur le marché est en baisse, une moins-value sera amputée du résultat.
En effet, à la date de clôture de chaque exercice, il est indispensable de procéder à l’ajustement de la juste valeur des actifs, et de les comptabiliser à la baisse ou à la hausse. Le tableau suivant présente les deux méthodes de comptabilisation de l’impact de la variation ultérieure de la juste valeur des actifs.
Tableau 3 : Méthodes de comptabilisation de l’impact de la variation ultérieure de la juste valeur des actifs
Actifs financiers | Variation ultérieure de la juste valeur | Comptabilisation de l’impact de la variation |
-Détenus à des fins de transaction
-Autres actifs financiers à la juste valeur par le biais du compte de résultat |
Positive ou négative | En résultat net |
-Disponibles à la vente | Positive ou négative | En autres éléments du résultat global |
Source : Obtenu à partir de l’ouvrage d’ALLALI Chérif-Jacques, 2015
Une telle variation pourrait engendrer le renforcement des variations cycliques de l’activité réelle de l’entreprise. De manière générale, les prix sur le marché augmentent lorsque les ventes sont en hausse. Par contre, les prix chutent dès lors que les ventes sont en baisses. La juste valeur est alors un élément qui présente un effet en désaccord avec les cycles de l’activité.
Pour les entreprises, la juste valeur rend leur situation plus difficile au moment de la baisse des ventes, car c’est également durant cette période que les prix augmentent. Le schéma ci-dessous illustre l’impact de la juste valeur sur les résultats de l’entreprise en tenant en compte les variations cycliques de l’activité des entreprises.
Figure 1 : Impact de la juste valeur sur les résultats d’une société
Source : Obtenue à partir des éléments fournis par Alternatives Économiques N° 217, 2003.
Par ailleurs, bien que le principe de la juste valeur soit imposé au sein des sociétés présentant des comptes consolidés, il s’avère que les modèles de valorisation sont conçus selon la propre initiative de chaque entreprise. Quant aux principes de validation des méthodes qui sont appliquées par cette dernière, seul un auditeur légal dispose du pouvoir de les approuver. Tous ces constats mèneraient à dire qu’une entreprise a tout de même une part de possibilité d’influencer la juste valeur.
- Avantages et inconvénients de l’application du référentiel comptable international
L’application du référentiel comptable international, qui est basé sur le principe de la juste valeur présente, comme toute méthode, des avantages et des inconvénients. En effet, un référentiel comptable international accorde une pertinence qui rassure les investisseurs. Toutefois, une critique se porte sur le principe de la juste valeur en ce qui concerne sa mesure. Ces sujets seront alors développés dans cette section.
- Pertinence des états financiers IFRS pour les investisseurs
La pertinence des états financiers IFRS pour les investisseurs se traduit par le fait qu’ils représentent une norme standardisée avec une portée internationale d’un côté, et le fait qu’ils soient fondés sur le principe de la juste valeur d’un autre. La juste valeur est un moyen qui rapproche la valeur comptable de la valeur de marché et qui facilite la comparaison des sociétés.
- Moyen de rapprochement de la valeur comptable de la valeur de marché
Dans un contexte d’innovation financière, l’évaluation au coût historique de certains produits ne peut être pertinente. La juste valeur appréhende les diverses modifications et tendances au niveau du marché. Par conséquent, les éléments qui sont enregistrés et comptabilisés sont actualisés et ajustés suivant le prix du marché. Cette démarche permet aux investisseurs d’avoir une vision de la réalité des prix lors de la consultation des données comptables.
De plus, la valeur de marché est considérée comme réelle. Elle offre la possibilité d’intégrer l’information concernant le prix du marché de manière instantanée. Ce qui se présente comme avantageux pour les investisseurs qui vont engager leurs fonds dans l’entreprise. Étant donné que l’information est plus proche de celle exploitée par la société, elle permet l’introduction d’incitations adéquates entre les dirigeants de l’entreprise et les investisseurs.
La démarche de rapprochement de la valeur comptable de la valeur de marché permet pareillement à l’entreprise la possibilité de comptabiliser de manière totale la valeur ainsi que toute la performance dont elle présente. Ce qui le démarque de la méthode du coût historique où tout ce qui n’est pas représenté en coût ne pourra être inscrit en comptabilité.
Par ailleurs, la notion de juste valeur est associée à celle de marché, puisque les actions mises en œuvre ont directement des impacts sur les décisions que prendra l’entreprise. La juste valeur n’est alors pas fondée sur l’existence d’une transaction. Elle offre la possibilité de valoriser la décision de l’entreprise visant à conserver, par exemple, un ou plusieurs dispositifs financiers.
- Moyen de facilitation de la comparaison des sociétés
La juste valeur dispose d’un critère de comparabilité qui permet de rendre possible la comparaison des sociétés. Cette dernière est fondée sur la valorisation de ces entreprises. La valorisation est également réalisée suivant le principe de la juste valeur.
La juste valeur est une pratique qui accorde la possibilité de disposer des instruments financiers équivalents pour des valeurs comparables, et ce, même si leur date d’entrée dans les comptes n’est pas la même. Avec la mise à disposition d’une gestion dite active des risques de prix, il est possible d’écarter la diminution de valeur des actifs, ainsi que l’augmentation de celle des passifs. La juste valeur permet alors de tenir compte de la réalité dans les états financiers.
La juste valeur présente également une qualité de neutralité. Par conséquent, elle est évaluée en référence à des éléments externes, notamment des valeurs de marché. En cas d’absence d’un marché actif, la juste valeur peut aussi être évaluée en référence à un modèle fondé sur des paramètres provenant de données externes. La juste valeur apparaît alors comme une valeur dite neutre, qui ne peut être influencée par la simple volonté de l’entreprise.
- Critique sur la juste valeur par rapport à sa mesure
Bien que la juste valeur présente divers avantages pour l’entreprise et pour les exploitants, comme il a été analysé précédemment, l’approche fait aussi l’objet de débats soulevant bien des inconvénients. Les principaux concernent les difficultés d’évaluation en cas de marché non liquide, ainsi que la volatilité des résultats et des capitaux propres.
- Cas de marchés non liquide : difficultés d’évaluation de la juste valeur
Les inconvénients du principe de la juste valeur sont notamment liés à la divergence entre pertinence et fiabilité. Étant donné que la comptabilité à la juste valeur apporte de l’information en se référant aux conditions actuelles du marché, elle est plus disposée à formuler des attentes que des chiffres passés.
De ce fait, même si le principe de la juste valeur se présente comme la mesure la plus pertinente pour les actifs et les passifs, il a été relevé que la pratique n’offre pas la possibilité de procéder à la valorisation la plus adéquate des actifs ou des passifs qui sont détenus jusqu’à l’échéance.
Par conséquent, si les marchés ne présentent pas de liquidité, l’estimation de la juste valeur est inévitablement déterminée suivant le jugement de la direction de l’entreprise, cette dernière devant tenir compte des renseignements privés et des hypothèses incertaines au sujet des valeurs futures (les flux de trésorerie futurs et les taux d’actualisation) pour ce faire.
Ainsi, en cas de marché non liquide, l’évaluation de la juste valeur sera fondée sur un « jugement personnel » qui pourrait présenter une certaine subjectivité. Dans ce cas, la réalité et la fiabilité du résultat obtenu ne pourront être totalement garanties.
- Capitaux propres : volatilité au niveau des résultats
La pratique de la méthode liée à la juste valeur requiert le fait que le bilan soit réévalué de manière régulière. Or, la volatilité qui est engendrée par cette évaluation à la juste valeur ne permet pas toujours de constater toutes les modifications réelles, notamment en ce qui concerne les événements économiques de l’entreprise.
Ainsi, il n’est pas toujours évident de traduire de façon fidèle la réalité des transactions. Il en est de même en ce qui concerne la situation financière générale et celle de la société en comptes consolidés.
De plus, il a été constaté que le fait de comptabiliser systématiquement tous les instruments financiers représente une source potentielle de volatilité, notamment au niveau du résultat et des capitaux propres de l’entreprise. La valorisation des actifs à la juste valeur présente alors un impact sensible sur les bilans des entreprises, ce qui entrainera au niveau du résultat et des capitaux propres une volatilité accrue.
- Rôle de la juste valeur dans la crise financière
La crise financière qui s’est généralisée en 2008 a relevé des lacunes liées à la juste valeur. Il a été constaté que pour la première fois, des produits qui font l’objet d’une récente création ont été testés en grande quantité. Il va sans dire que leur évaluation à la juste valeur a également été initiée avec leur création.
Si la question centrale se porte sur l’implication de la juste valeur dans la crise financière, il convient de procéder à une analyse détaillée des conséquences de ces divers faits.
Il a été constaté que de nombreux marchés ont témoigné d’une insuffisance en matière de liquidité. Les entreprises qui avaient l’habitude d’évaluer leurs actifs en se référant au prix du marché ont alors été contraintes d’appliquer d’autres méthodes qui consistaient notamment à estimer ces éléments en se basant sur des modèles qui ne présentent pas des données observables sur le marché. D’où la constatation des lacunes au niveau de l’application de la juste valeur.
Il a d’abord été relevé que les entreprises avaient du mal à s’adapter à cette situation, étant donné que durant la période post-crise, elles avaient la possibilité d’accéder à de nombreuses sources d’information pour évaluer les prix de leurs actifs et passifs. Parmi ces entreprises, certaines se sont référées à des prix sur des marchés primaires afin d’avoir des données approximatives à la juste valeur. Cette démarche a eu pour conséquence le fait que les difficultés d’évaluation s’intensifient dès lors que ces marchés venaient à disparaitre.
Ensuite, les sociétés qui n’ont pas envisagé de seconde issue face à la crise, ainsi que celles qui ne se sont pas consacrées au développement de modèles d’évaluation complets ont rencontré de plus grandes difficultés.
Ainsi, pour un groupe de produits complexes et récemment développés, les principales difficultés rencontrées sont celles liées à l’absence de liquidité et à des problèmes d’évaluation importants.
Un autre point à ne pas négliger est le fait que les modèles d’évaluation développés ont été conçus en tenant compte d’une situation économique favorable. De ce fait, aucun modèle n’a été envisagé de sorte de permettre de prévoir une dégradation de la situation. Par conséquent, aucun des modèles n’a considéré tous les facteurs de risque jugés pertinents.
Les principaux risques qui n’ont pas été pris en compte lors de la définition des modèles d’évaluation suivant la juste valeur sont alors le risque lié au modèle, le risque lié à la contrepartie, et surtout celui lié à la liquidité. De plus, les produits qui ont été développés concernaient notamment des prêts hypothécaires présentant un niveau de risque assez élevé, et qui par conséquent, étaient sensibles aux éléments suivants :
- Les variations des taux d’intérêt ;
- Les prix de l’immobilier ; et
- Les incitations des emprunteurs.
Il peut alors être affirmé que la crise financière a été marquée par le doute et l’incertitude qui ont envahi les investisseurs, ces derniers ayant perdu confiance. Ce phénomène s’explique par le fait que les parties qui devaient supporter les risques n’ont pas été clairement déterminées. De plus, les types de risque auxquels ils étaient exposés n’ont pas non plus été définis. L’absence de transparence a alors été constatée en termes de modèles d’estimation de la juste valeur de ces éléments complexes.
En effet, la connaissance des modèles appliqués lors de l’évaluation d’un élément est indispensable pour les investisseurs, afin qu’ils puissent appréhender correctement l’information financière. Les informations suivantes doivent alors être portées à la connaissance des investisseurs :
- Les expositions concernées ; et
- Leur méthode d’évaluation : techniques appliquées, données d’entrée utilisées, hypothèses formulées, et degré de sensibilité de la valorisation en tenant compte de plusieurs scénarios.
Ainsi, la juste valeur a présenté des lacunes au niveau de trois domaines bien distincts, tels qu’ils sont présentés dans le schéma suivant.
Figure 2 : Domaines présentant des lacunes en matière de juste valeur lors de la crise financière
Source : Investigations personnelles obtenues à partir des éléments du mémoire.
- Cas pratique
La mise en place des normes IFRS au sein des entreprises cotées résulte d’une décision prise par l’Union européenne afin de permettre de se conformer à des règles internationales et de présenter des informations que tous peuvent aisément comprendre. En effet, les investisseurs ont besoin de réaliser diverses actions avant de prendre une décision. Dans leur démarche, il est naturel qu’ils cherchent à comparer les entités afin de choisir celle qui leur convient le mieux.
Avec les normes IFRS, cette étape peut être possible, d’autant plus, ils ont une vision plus claire de la situation financière des sociétés concernées. Ces dernières doivent alors respecter les règles imposées par ces normes internationales et appliquer la méthode d’évaluation de la juste valeur préconisée par la norme IFRS 13 « Évaluation de la juste valeur ».
Cette présente partie est destinée à analyser l’impact de ces normes IFRS sur la comptabilité des sociétés en comptes consolidés. Dans un premier temps, la manière dont l’étude se présente sera abordée. Dans un second temps, les résultats et les analyses seront présentés.
- Présentation de l’étude de terrain
- Problématique et hypothèses
Il convient en premier lieu de rappeler la problématique de l’étude, qui se formule de la manière suivante :
« Les normes IFRS engendrent-elles une volatilité comptable qui ne reflète pas la réalité économique ? »
La problématique est engagée sur le sujet qui concerne l’impact des normes IFRS sur la comptabilité des entreprises cotées. Dans ce contexte, il est important de tenir compte des éléments suivants :
- Les effets des normes IFRS sur la comptabilité des entreprises ;
- Les origines de la volatilité comptable ; et
- Leur impact sur la réalité économique.
À partir de ces éléments, il est indispensable de formuler des hypothèses sur lesquelles baser l’étude. Une hypothèse est considérée comme une proposition de réponse à la problématique posée. Dans le cadre de cette étude, deux types d’hypothèses seront proposés :
- Une hypothèse générale qui représente la réponse globale anticipée de la problématique ; et
- Des hypothèses secondaires qui approfondissent l’hypothèse générale.
Hypothèse générale
Les normes IFRS engendrent une volatilité comptable qui reflète la réalité économique.
Hypothèses secondaires
- La volatilité comptable est due à la volatilité des prix fixés sur le marché.
- La volatilité des prix sur le marché reflète la réalité économique.
Grâce à ces pistes de recherche, il est désormais possible de déterminer les faits à observer.
- Méthode de recherche
Afin de pouvoir répondre à la problématique, il convient de récolter des données sur le terrain. Dans cette démarche, il est indispensable de choisir le terrain et de déterminer l’échantillon, ceci afin de collecter les éléments nécessaires et de les analyser par la suite.
Le terrain est alors représenté par les entreprises présentant des comptes consolidés, et qui se réfèrent aux normes IFRS. En ce qui concerne la construction de l’échantillon, la taille s’est arrêtée à 20 entreprises dont les activités et les structures sont variées. Les interlocuteurs sont alors les exploitants au sein de ces sociétés.
En ce qui concerne la manière de collecter les données, l’entretien semi-directif a été choisi, de sorte qu’il permet d’avoir le maximum d’information sur un sujet bien déterminé, sans avoir à influencer l’interlocuteur.
La réalisation de cet entretien requiert des préparations et l’établissement en amont d’un guide d’entretien. Ce dernier a été conçu en se basant sur les éléments de la revue de littérature. Les étapes de réalisation du guide se présentent alors comme suit :
Figure 3 : Étapes d’élaboration du guide d’entretien
Source : Obtenue à partir de l’ouvrage de Didier Roche, 2009.
Les thèmes sur lesquels est basée l’étude de terrain sont alors les suivants :
- Prise de connaissance de l’entreprise ;
- Prise de connaissance de l’interlocuteur ;
- Impacts généraux de l’adoption des normes IFRS ;
- Avantages des normes IFRS ;
- Inconvénients des normes IFRS ;
- Perception sur la volatilité comptable.
Le guide d’entretien est présenté en Annexes.
- Présentation et analyse des résultats
Les résultats des entretiens seront présentés en fonction des thèmes abordés, tel qu’ils ont été analysés.
- Prise de connaissance de l’entreprise
Les 20 entreprises faisant l’objet de la présente étude sont des sociétés ayant des comptes consolidés et ayant adopté les normes IFRS. Le tableau ci-dessous synthétise leur présentation.
Tableau 4 : Présentation des entreprises de l’étude de terrain
Sujets | Éléments | Nombre | Pourcentage |
Activité | Construction | 5 | 25% |
Immobilier | 2 | 10% | |
Transport | 4 | 20% | |
Tourisme | 3 | 15% | |
Équipements | 6 | 30% | |
Total | 20 | 100% | |
Taille | Moins de 50 | 4 | 20% |
Entre 50 et 100 | 9 | 45% | |
Plus de 100 | 7 | 35% | |
Total | 20 | 100% | |
Durée d’existence | Moins de 5 ans | 3 | 15% |
Entre 5 ans et 10 ans | 11 | 55% | |
Plus de 10 ans | 6 | 30% | |
total | 20 | 100% |
Source : Obtenu à partir de l’étude de terrain
Ainsi, 30% des entreprises œuvrent dans le domaine des équipements, 25% dans la construction, 20% dans le transport, 15% dans le tourisme, et 10% dans l’immobilier. En matière de taille, 45% des sociétés ont entre 50 et 100 collaborateurs, 35% plus de 100 collaborateurs, et 20% ont moins de 50 collaborateurs. En ce qui concerne leur durée d’existence, 55% des entreprises ont existé plus de 5 ans, 30% ont été créées sur une durée de plus de 10 ans, et 15% ont moins de 5 ans.
- Prise de connaissance de l’interlocuteur
Les personnes interviewées sont des individus qui détiennent un poste au sein des entreprises étudiées. Les entretiens menés ont mis en évidence le fait qu’il s’agit de responsables détenant des postes comptables et financiers. Leur durée d’expérience varie de 3 ans à 13 ans.
- Impacts généraux des normes IFRS
Les principaux changements apportés par les normes IFRS se situent au niveau de l’organisation des entreprises (45%), ensuite au niveau des remaniements apportés sur les pratiques comptables (30%). Le format du reporting financier a également été modifié pour 15% des entreprises. 10% ont exprimé la nécessité d’adaptation à ces normes internationales.
Figure 4 : Impact des normes IFRS sur les entreprises
Source : Obtenue à partir de l’étude de terrain
- Avantages des normes IFRS
Les avantages apportés par les normes IFRS pour les entreprises sont divers comme le présente le graphique ci-dessous. Pour 85% des sociétés, l’adoption de ces normes ont permis de bénéficier de la confiance des investisseurs compte tenu de la clarté des informations et du respect des pratiques admises sur le plan international. 75% des entreprises estiment que grâce aux IFRS, l’entreprise est en adéquation avec la situation du marché. Pour 55%, les normes IFRS permettent plus de réactivité dans la prise de décision compte tenu du fait qu’elles ont accès à une quantité importante d’information (45%). Cette situation leur permet également de réaliser une veille stratégique et concurrentielle de manière plus aisée (25%).
Le graphique ci-dessous illustre ces interprétations.
Figure 5 : Avantages des normes IFRS pour les entreprises
Source : Obtenue à partir de l’étude de terrain
- Inconvénients des normes IFRS
En matière d’inconvénients, la totalité des entreprises (100%) admettent le fait que les normes IFRS, basées sur le principe de la juste valeur engendrent une volatilité comptable. Ceci se justifie par la nécessité d’actualiser les comptes à chaque fois qu’il convient de les établir. D’autant plus qu’il est très rare que le prix d’un actif n’évolue pas entre deux périodes.
80% des entreprises estiment que l’application des normes IFRS exige la mobilisation d’un budget important. En effet, la mise en place de ces dernières nécessitent un profond remaniement au sein de ces entreprises, et ce, sur tous les plans. Des outils ont dû être développés, le personnel comptable a dû être formé, et les systèmes d’information améliorés.
80% de ces sociétés ont également considéré la nécessité de réorganisation comme inconvénients majeurs. À cette réorganisation s’accompagnent de longues étapes de plan d’actions et de mise à niveau qui ont des impacts considérables sur les entreprises.
70% des entreprises ont fait part du pilotage complexe engendré par l’adoption des normes IFRS. La mise en place de système de suivi et de contrôle est indispensable. Les procédures de prise de décision et de gestion ont connu des changements afin de mettre en œuvre les nouvelles normes comptables.
Enfin, 35% des entreprises considèrent que le principe de la juste valeur rend les dirigeants incertains lors de la prise de décision. En effet, il est plus difficile de fonder des décisions sur le long terme sur des éléments volatiles.
Le graphique suivant synthétise toutes les données concernant les inconvénients des normes IFRS.
Figure 6 : Inconvénients des normes IFRS sur les entreprises
Source : Obtenue à partir de l’étude de terrain
- Perception sur la volatilité comptable
Comme il a été relevé dans le point précédent concernant les inconvénients présentés par les normes IFRS, les entreprises de l’étude admettent le fait que les normes IFRS engendrent bien une volatilité comptable. En effet, tant que la méthode d’évaluation sera fondée sur la juste valeur, les entreprises devront toujours actualiser leurs comptes à chaque variation des prix au niveau du marché.
En ce qui concerne l’interdépendance entre la volatilité comptable et la réalité économique, les avis sont partagés entre les sociétés. Pour 65% des entreprises, les interlocuteurs admettent que la volatilité ressentie au niveau de leur comptabilité reflète bien la réalité économique, compte tenu du fait qu’elle exprime la situation réelle du marché. Certes, cette volatilité entraine bien des difficultés et ont des mauvaises conséquences sur les comptes, mais elle reste fidèle à la situation économique.
Pour les 35% restants, la volatilité comptable ne reflète pas la réalité économique compte tenu du fait que d’autres paramètres doivent être pris en compte, tels que la procyclicité des prix du sur le marché et les activités des entreprises. De plus, l’évaluation à la juste valeur ne tient pas forcément compte de l’intervalle de temps entre l’établissement de deux situations financières durant lequel les prix auraient également changé.
Figure 6 : Avis sur l’impact de la volatilité sur la réalité économique
Source : Obtenue à partir de l’étude de terrain
- Vérification des hypothèses
Suite aux résultats de l’étude de terrain, il convient de vérifier les hypothèses qui ont été formulées au départ. L’objectif est de voir si ces dernières correspondent ou non aux réponses apportées par l’échantillon sur la problématique. Trois cas peuvent alors se présenter :
- L’hypothèse est confirmée ;
- L’hypothèse est infirmée ; ou
- L’hypothèse est nuancée.
- Hypothèse générale : Les normes IFRS engendrent une volatilité comptable qui reflète la réalité économique
Cette hypothèse générale est nuancée compte tenu des faits suivants :
- La première partie est confirmée par l’étude de terrain : « Les normes IFRS engendrent une volatilité comptable ». Cette affirmation a été admise à l’unanimité. En effet, les normes IFRS sont basées sur la juste valeur, une pratique basée sur le prix actuel d’un actif. Par conséquent, à chaque fois que ce prix change, il convient d’actualiser les comptes. À chaque exercice, l’exploitant se voit alors ajuster les éléments de base sur lesquels se fondent les comptes et par conséquent, les interprétations.
- La seconde partie de l’hypothèse est à la fois confirmée et infirmée. Même si la tendance confirme le fait que la volatilité comptable reflète la réalité économique, il est important de tenir compte de l’avis des 35% de l’échantillon.
- Hypothèse secondaire 1 : La volatilité comptable est due à la volatilité des prix fixés sur le marché
Bien que le sujet n’ait pas fait l’objet d’un développement particulier lors des entretiens, il a été constaté que cette hypothèse secondaire est confirmée. En effet, si les exploitants sont amenés à actualiser leurs comptes, c’est parce qu’ils ont constaté des changements au niveau des prix actuels de leurs actifs et passifs.
Ainsi, la volatilité comptable est bien le résultat des variations des prix sur le marché. Ce qui mène à dire qu’en cas de prix inchangés, il n’y aurait pas de volatilité comptable.
- Hypothèse secondaire 2 : La volatilité des prix sur le marché reflète la réalité économique
Cette hypothèse secondaire est confirmée sans contestation, car les prix sont le reflet même de la situation du marché.
Le tableau ci-dessous récapitule alors la vérification des hypothèses.
Tableau 5 : Vérification des hypothèses
Hypothèse | Formulation | Conclusion |
Générale | Les normes IFRS engendrent une volatilité comptable qui reflète la réalité économique. | Confirmée mais nuancée |
Secondaire 1 | La volatilité comptable est due à la volatilité des prix fixés sur le marché. | Confirmée |
Secondaire 2 | La volatilité des prix sur le marché reflète la réalité économique. | Confirmée |
Source : Obtenu à partir de l’étude de terrain
- Résolution de la problématique
Les normes IFRS engendrent-elles une volatilité comptable qui ne reflète pas la réalité économique ?
Les sujets concernant qui alimentent les débats liés à l’adoption des normes IFRS sont la volatilité comptable et la réalité économique.
Un autre aspect des normes IFRS est le fait qu’elles ont parfois tendance à accorder une prééminence à la réalité économique sur l’apparence juridique. Cependant, l’IASB, représenté par Philippe Danjou, ne partage pas cet avis et déclare que l’environnement juridique des entreprises n’a pas été négligé lors de l’élaboration de ces normes.
Les IFRS sont basées sur des principes qui prennent en compte le contexte international. Par conséquent, il est impossible de tenir compte de toutes les particularités liées aux droits nationaux. C’est la raison pour laquelle les normes ont été laissées neutres sur ce plan.
Les normes IFRS se focalisent alors sur l’analyse de la réalité économique des engagements, afin de fournir une vision complète et pertinente des risques ainsi que des avantages auxquels les entreprises les ayant adoptées sont confrontées. Il va sans dire que cette situation les incite à souvent explorer au-delà de l’apparence juridique d’une opération.
La volatilité comptable se situe au centre des discussions sur les IFRS. Avec l’effet de procyclicité, la plupart des entreprises ont une inquiétude sur le fait qu’une juste valeur généralisée entraine un accroissement de la volatilité des résultats. Face à cette situation, l’IASB a prévu de conserver un modèle d’évaluation mixte en fonction de la situation de l’entreprise et des éléments à évaluer. Ainsi, la méthode du coût historique n’est pas entièrement abandonnée malgré la domination de la juste valeur.
Bien que les IFRS accordent une grande importance à l’élaboration d’une pratique d’évaluation permettant de refléter une image fidèle de la réalité économique, il a été ressenti que le principe de la juste valeur entraine une volatilité comptable qui ne va pas forcément dans le sens de la réalité économique.
Face à de telles circonstances, l’IASB continue d’insister sur le fait que le but principal de la juste valeur est de pouvoir refléter les conditions économiques réelles. Si la pratique entraine une volatilité au niveau des comptes des entreprises, il ne convient pas de la dissimuler ou l’atténuer de manière artificielle. Cette volatilité représente alors la réalité économique, et il est au contraire très important d’en tenir compte.
Pour mieux cerner la situation financière d’une entreprise, tant pour les dirigeants que pour les investisseurs, les comptes qui sont établis doivent représenter de la manière la plus proche possible de la réalité les aspects qui sont sources de volatilité.
Ainsi, les avantages et inconvénients obtenus de la volatilité dépendent de la stratégie, ainsi que du comportement des acteurs, notamment les dirigeants et les exploitants face à une telle situation. Les observations comptables ne représentent qu’un élément permettant une prise de décision.
Conclusion
Pour conclure, la problématique sur laquelle s’est basé le mémoire se porte sur le fait que les normes IFRS pouvaient engendrer une volatilité comptable qui ne reflète pas la réalité économique. Ce sujet se trouve en effet au centre des débats sur l’adoption des normes IFRS et le principe de la juste valeur. Il a surtout été constaté qu’une volatilité des prix des actifs mène directement les entreprises à une volatilité comptable.
En effet, dans la comptabilité traditionnelle fondée sur le principe du coût historique, il y avait très peu de volatilité relevée sur le plan comptable. Les dirigeants avaient alors la possibilité de se focaliser sur des sujets plus stratégiques.
Avec les normes internationales en IFRS, l’exploitant est devenu un actualisateur et un évaluateur d’actifs afin d’atteindre des résultats volatiles et sur lesquels, il est impossible de se baser lorsqu’il s’agit d’une décision à long terme.
Toutefois, il convient de retenir que ces normes ont été établies par les IASB dans une optique d’amélioration, et non de régression. Le concept n’était en aucun cas l’augmentation des tâches des utilisateurs des comptes, mais d’apporter aux entreprises une occasion de se rendre compte de la situation réelle économique et d’agir en conséquence dans la réactivité et la bonne conscience.
Finalement, la volatilité comptable à laquelle les sociétés sont confrontées ne représente que le reflet des conditions réelles du marché, de l’économie, et de l’environnement dans lequel elles sont amenées à évoluer et à s’adapter.
Aussi, le principe de la juste valeur s’intéresse uniquement au présent, même si son application permet de retracer le passé, ainsi que de se projeter dans le futur, grâce à l’observation de la variation des écarts de valeur.
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ANNEXES
Annexe 1 : Liste des informations supplémentaires à fournir concernant les justes valeurs classées au niveau 3 de la hiérarchie
- a) pour les justes valeurs qui sont évaluées de façon récurrente (sous-alinéa 93(h)(i) d’IFRS 13) :
- une description de la sensibilité de l’évaluation de la juste valeur à des changements dans des données d’entrée non observables, lorsqu’un changement de montant dans ces données entraîne une augmentation ou une diminution importante de la juste valeur,
- une explication des corrélations entre les données d’entrée non observables et de la façon dont elles influent sur l’analyse de sensibilité ;
- b) des informations quantitatives sur les données d’entrée non observables importantes utilisées aux fins de l’évaluation sauf si les données d’entrée n’ont pas été élaborées par l’entité. Toutefois, l’entité ne peut pas négliger les données d’entrée quantitatives non observables qui sont importantes pour l’évaluation de la juste valeur et qu’elle peut obtenir au prix d’un effort raisonnable (alinéa 93(d) d’IFRS13) ;
- c) un rapprochement entre les soldes d’ouverture et de clôture pour les justes valeurs qui sont évaluées de façon récurrente (alinéa 93(e) d’IFRS13). Les éléments de rapprochement à présenter sont les suivants :
- les montants comptabilisés dans le résultat net (avec mention du ou des postes du résultat net où ils sont comptabilisés),
- les montants comptabilisés dans les autres éléments du résultat global,
- les montants des achats, des ventes, des émissions et des règlements (indiqués séparément par type),
- les montants des transferts vers ou depuis le niveau 3 de la hiérarchie, les raisons qui les motivent et la politique suivie par l’entité pour déterminer à quel moment un transfert est réputé s’être produit;
- d) pour les justes valeurs qui sont évaluées de façon récurrente ou non et classées au niveau 3 de la hiérarchie, une description des processus d’évaluation suivis par l’entité (alinéa 93(g) d’IFRS13).
- en ce qui concerne le groupe au sein de l’entité qui prend des décisions sur les politiques et les procédures d’évaluation :
- une description le concernant,
- de qui il relève,
- les procédures de communication interne de l’information qui sont en place,
- la fréquence de la calibration, des contrôles ex post et des autres procédures de test des modèles d’évaluation des prix, ainsi que les méthodes employées,
- le processus d’analyse des changements intervenus dans les évaluations de la juste valeur d’une période à l’autre,
- la manière dont l’information de tiers déterminée par l’entité et utilisée pour l’évaluation de la juste valeur a été établie conformément aux IFRS,
- les méthodes employées pour élaborer et corroborer les données d’entrée non observables utilisées dans les évaluations de la juste valeur,
- e) une description des processus d’évaluation suivis pour les justes valeurs classées aux niveaux 2 et 3 de la hiérarchie, et la mention de tout changement dans ces processus (alinéa 93(d) d’IFRS13).
Annexe 2 : Guide d’entretien
Thèmes | Questions |
A/ Prise de connaissance de l’entreprise | 1/ Quelle activité exerce votre entreprise ?
2/ Quelle est la taille de votre entreprise ? 3/ Quelle est sa durée d’existence ? |
B/ Prise de connaissance de l’interlocuteur | 4/ Quelle est votre fonction au sein de l’entreprise ?
5/ Depuis combien de temps occupez-vous ce poste ? |
C/ Impacts généraux de l’adoption des normes IFRS | 6/ Quels sont selon vous les changements apportés par les normes IFRS au sein de votre entreprise ? |
D/ Avantages des normes IFRS | 7/ Quels sont les avantages des normes IFRS pour votre entreprise ? |
E/ Inconvénients des normes IFRS | 8/ Quels sont les inconvénients des normes IFRS pour votre entreprise ? |
D/ Perception sur la volatilité comptable | 9/ Selon vous, les normes IFRS engendrent-elles une volatilité comptable qui ne reflète pas la réalité économique ? Pourquoi ? |
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