LES RÈGLES DE LA SOUS-CAPITALISATION FACE À L’OPTIMISATION FISCALE
LES RÈGLES DE LA SOUS-CAPITALISATION
FACE À L’OPTIMISATION FISCALE
SOMMAIRE
PARTIE I – LA SOUS-CAPITALISATION DES ENTREPRISES, UN MOYEN
D’OPTIMISATION FISCALE
SOUS-PARTIE I – LE CONCEPT : OPTMISATION FISCALE 5
Chapitre I – Distinction de l’optimisation fiscale
des autres pratiques d’économie d’impôt 6
Chapitre II – Les bases fondamentales du tax planning 9
Chapitre III – Les instruments de lutte contre l’optimisation fiscale 12
SOUS-PARTIE II – LA SOUS-CAPITALISATION 14
Chapitre I – Généralités : Sous-capitalisation 15
Chapitre II – L’extension du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation
par la loi de finances pour 2011 31
PARTIE II – VERS UN DIFFERENTIEL DE DROIT COMPARE ENTRE LES LEGISLATIONS FRANCAISE ET ALLEMANDE
Chapitre I – Les points de ralliement entre les deux législations 36
Chapitre II – Les impacts majeurs de la grande réforme
fiscale outre-Rhinoise de 2008 43
Chapitre III – Les améliorations pouvant être apportées à la législation
française de lutte contre la sous-capitalisation 45
Conclusion générale 47
Table des matières 48
Bibliographie 51
INTRODUCTION
Dans la vie d’une entreprise, la fiscalité revêt une importance qui n’est plus à démontrer. En raison bien sûr, des coûts qu’elle génère. Mais aussi, parce qu’il n’est pas, en général, une décision ou un choix, afférent à la conduite des affaires d’une entreprise, qui, ne comporte une incidence fiscale et ne doive être arrêté sans prendre en compte cette dernière. Par exemple, si une société donnée souhaite s’investir dans un domaine d’activité déterminée, elle peut soit, recourir à ses fonds propres, c’est-à-dire les sommes investies par les associés, notamment les réserves et le résultat de l’exercice clos dernièrement, soit, faire appel à des sources extérieures de financement (prêts). Indubitablement, sa décision ne sera pas neutre sur le plan fiscal, car si la société choisit la deuxième alternative, c’est-à-dire l’emprunt, les intérêts qui y sont afférents constitueront des charges d’exploitation déductibles au bénéfice imposable, tandis que le recours aux réserves n’implique aucun droit de déduction. Or l’impôt est une charge comme toute autre pour la société. Et en tant que tel, le dirigeant social ne se contentera pas seulement de prévoir le montant de l’impôt que la société pourrait payer, mais, il s’assurera aussi à l’amenuiser.
Aussi, la fiscalité est-elle devenue une technique de gestion. Une technique dont l’essentiel se ramène à rechercher la voie fiscale la moins imposée. Généralement, on qualifie cette technique : optimisation fiscale. Et parmi les moyens pour ce faire, on a la sous-capitalisation, un « mécanisme de régulation visant, dans les groupes de sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés intégrées ou non, à permettre la déduction des intérêts versés par l’une ou plusieurs des sociétés du groupe à des entreprises liées au sens de l’article 39, 12 du CGI lorsqu’il est constaté [..] » que les capitaux propres de la société qui a versé les intérêts sont insuffisants par rapport à ses dettes.
Cependant, de telle circonstance n’est pas dépourvue de risque. En effet, l’entreprise emprunteuse sous-capitalisée s’expose facilement à une cessation des paiements, qui pourrait déboucher à sa disparition, surtout en cas de dégradation rapide éventuelle de sa situation financière ou commerciale. Ce qui constitue une situation préjudiciable tant pour les créanciers sociaux – qui pourraient fort probablement ne plus recouvrer ce qui leur est dû – que pour l’économie de l’Etat auquel la société relève – car la dissolution d’une entreprise veut dire la disparition d’un centre de production de biens ou services et un outil de travail, donc une cellule du tissu économique local, régional, national, dont la survie est d’intérêt général et dont la protection relève, aux yeux du législateur, de l’ordre public économique et social.
De telle situation ne pourrait laisser passif qu’un législateur absolument libéral ou résolument fataliste, qui n’a sans doute jamais existé. Ce qui nous amène dès lors à la question de savoir les règles de la sous-capitalisation face à l’optimisation fiscale. Dans la première partie du développement qui va suivre, nous mettrons en lumière la sous-capitalisation en tant que moyen d’optimisation fiscale (Titre I). Cependant, étant donné que, d’une part, l’Allemagne et la France entendent faire converger leurs législations nationales respectives touchant la fiscalité des entreprises et, que d’autre part, le régime juridique français relatif à la sous-capitalisation s’est inspiré du droit allemand, la comparaison entre le droit français et le droit allemand en la matière mérite une attention (Titre II).
SOUS-PARTIE I. – LE CONCEPT D’OPTIMISATION FISCALE
Avant de voir les bases fondamentales du tax planning (Chapitre II) et les instruments principaux mis à la disposition de l’Administration fiscale pour lutter contre l’optimisation fiscale – plus précisément pour préserver la matière imposable – (Chapitre III), il importe de distinguer l’optimisation fiscale des autres pratiques d’économie d’impôt (Chapitre I).
CHAPITRE I. – DISTINCTION DE L’OPTIMISATION FISCALE DES AUTRES PRATIQUES D’ECONOMIE D’IMPÔT
La quête de l’optimisation fiscale (Section I) doit d’abord passer par une distinction entre cette notion et les autres notions visant une économie d’impôt que sont la fraude et l’évasion fiscales (Section II).
SECTION I. – L’optimisation fiscale
- 1. – Définition
L’optimisation fiscale peut être comprise comme l’usage de procédés légaux dans le dessein d’amenuiser la charge fiscale que le contribuable aurait normalement supportée. Elle consiste principalement à minimiser le montant d’une matière imposable, comme celui des bénéfices des sociétés commerciales.
L’habileté fiscale trouve son fondement dans le principe de la liberté de gestion de l’entreprise qui postule la non-immixtion de l’Administration dans la gestion des entreprises. Aussi, l’Administration ne peut-elle reprocher à une entreprise d’avoir eu recours à l’emprunt pour financer son investissement alors que ces capitaux propres n’étaient pas insuffisants. La liberté de gestion permet dès lors, entre autres, à tout exploitant d’être seul juge de l’opportunité de sa gestion dans le but de parvenir à la voie fiscale la plus avantageuse.
- 2. – Avantages principaux de l’optimisation fiscale pour l’entreprise
L’optimisation fiscale a une conséquence direct tant sur la compétitivité de l’entreprise par rapport à ses concurrents que sur sa trésorerie.
- – La fiscalité de l’entreprise et la concurrence
L’impôt est l’un des composants du prix de revient pour une entreprise. Ainsi, il n’est pas sans incidence sur le prix des biens commercialisés ou des services prestés. Le fait est qu’une majoration des taux d’imposition de l’entreprise, par exemple, débouche sur une augmentation du coût de revient. Ce qui implique une augmentation des prix de vente afin de garder la marge bénéficiaire. Ladite augmentation aura éventuellement pour conséquence la diminution des ventes au profit des produits dont la fiscalité est moins faible, ce qui aura pour conséquence une répercussion défavorable sur le chiffre d’affaires de l’entreprise.
Bref, si deux actifs génèrent les mêmes flux de liquidités, mais que l’un est imposé plus lourdement que l’autre, il est patent que le prix de l’actif favorisé fiscalement sera supérieur à celui de l’actif plus fortement taxés.
- – La fiscalité de l’entreprise et sa trésorerie
Généralement, la trésorerie d’une entreprise peut être définie comme étant le reliquat découlant de la différence entre la totalité des ressources dont une entreprise dispose pour fonctionner et la totalité des besoins de financement nécessaires à son fonctionnement. Elle représente le montant des liquidités facilement mobilisables dont dispose une entreprise pour faire face à ses dettes qui arrivent à leur terme. Dès lors, il est patent que l’impôt a un effet négatif sur la trésorerie d’une entreprise. Aussi, la réduction de la charge fiscale par l’usage de différents procédés d’habilité fiscale peut avoir un effet positif sur la trésorerie d’une entreprise et contribue d’une manière indirecte à l’amélioration de ses performances.
SECTION II. – L’évasion et la fraude fiscales
- 1. – Evasion fiscale
Si l’évasion fiscale a, tout d’abord, entre les deux guerres, désigné la forme internationale de la fraude fiscale, tel n’est plus le cas à présent. Aujourd’hui, la majorité de la doctrine et de la jurisprudence considère l’évasion fiscale comme le fait de se soustraire à tout ou partie de l’impôt dans les limites de la loi, en ne violant donc aucune disposition légale particulière. Autrement dit, l’évasion fiscale est le fait de se soustraire le maximum de matière imposable à l’application de la loi fiscal en général ou d’un tarif d’impôt particulier, sans transgresser la lettre de la loi en mettant systématiquement à profit toutes les possibilités ouvertes de minorer l’impôt soit par ses règles soit par ses lacunes.
Il y a deux méthodes d’évasion fiscale : l’abstention qui consiste à ne pas accomplir l’opération taxable (également appelée évitement matériel de l’impôt) et la substitution qui consiste à remplacer un acte un autre moins taxé.
- 2. – Fraude fiscale
Tout le monde sait que l’on ne peut frauder le fisc. Il est interdit de faire une fausse déclaration, de dissimuler des revenus ou de produire des conventions qui ne reflètent pas la volonté et l’accord des parties. La fraude fiscale consiste en la violation de la loi fiscale en vue d’échapper totalement ou partiellement au paiement d’un impôt, voire en vue d’obtenir des remboursements d’impôts auxquels le contribuable n’a pas droit, est évidemment illicite et interdite. De manière plus succincte, la fraude fiscale est le fait de soustraire illégalement à la loi fiscale tout ou partie de la matière imposable qu’elle devrait frapper.
La fraude fiscale peut prendre les deux formes suivantes :
– La dissimulation. – Elle consiste à omettre de déclarer tout ou partie de la matière imposable. Dans ce cas, « l’altération de la vérité se situe uniquement dans les rapports du contribuable avec le fisc, c’est-à-dire dans la déclaration fiscale que la loi impose de faire.
– La simulation. – L’altération de la vérité peut également se situer à un stade antérieur au rapport du contribuable avec le fisc.
La simulation consiste à révéler au fisc un acte différent de celui qui lie réellement les parties. L’acte révélé n’est dès lors qu’une apparence et ne correspond pas à la volonté véritable des parties contractantes. La simulation suppose deux conventions : l’une, apparente (acte apparent ou simulé), que l’on présente au tiers; l’autre secrète (dénommé contre-lettre) entre les parties concernées.
La simulation implique que les parties n’acceptent pas toutes les conséquences de l’acte apparent, celui-ci est uniquement destiné à tromper le tiers, et en matière fiscale, le tiers en question est évidemment l’Administration fiscale ; mais la convention qui fait la loi des parties dans leurs rapports entre elles est la contre-lettre.
Si la simulation porte sur l’existence même de l’acte apparent, elle rend l’acte fictif ; si elle sert à en maquiller la nature juridique, il y a déguisement ; si elle a pour objet d’en déplacer les effets, elle réalise une interposition de personne.
CHAPITRE II. – LES BASES FONDAMENTALES DU TAX PLANNING
L’habileté fiscale suppose non seulement le respect de la règlementation fiscale en vigueur (Section I) mais aussi la tenue d’une comptabilité régulière (Section II) et la considération des règles portant la facturation (Section III).
SECTION I. – Respect de la règlementation fiscale en vigueur
- 1. – Evitement de la déduction de pseudo charges d’exploitation
Le fait d’enfreindre certaines dispositions du droit fiscal pourrait fort probablement déboucher sur des pénalités fiscales assez conséquentes.
S’agissant de la déduction d’une charge, la condition générale posée par la jurisprudence est celle de la conformité de la charge à l’intérêt de l’entreprise.
L’article 39-1 du CGI, faisant application en matière de BIC du principe général posé par l’article 13-1 selon lequel le revenu imposable est un revenu net, dispose que le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges. Ce principe général de déductibilité connaît cependant des exceptions tant légales que jurisprudentielles. Par exemple, la loi interdit expressément la déduction de certaines sanctions pécuniaires (article 39-2 du CGI : « Les sanctions pécuniaires et pénalités de toute nature mises à la charge des contrevenants à des obligations légales ne sont pas admises en déduction des bénéfices soumis à l’impôt »). Aussi, est-il interdit de déduire du bénéfice imposable, les pénalités de retard découlant du non-respect du délai imparti pour la déclaration des revenus. Concernant toujours la non déductibilité de certaines sanctions pécuniaires, la règle prétorienne réserve un sort particulier aux amendes pénales pour lesquelles, en dehors de toute prévision légale, la déduction est rejetée, qu’il s’agisse de la déduction de la somme proprement dite ou de la déduction de la provision constituée pour faire face à un risque de condamnation. Il en est ainsi, notamment, de la provision constituée pour faire face au paiement d’une amende pénale susceptible d’être encourue par application de l’article 97 de la loi du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle.
- 2. – Respect des conditions afférentes aux avantages fiscaux
Afin de pouvoir bénéficier des avantages fiscaux, le contribuable se doit de respecter certaines conditions propres à chaque avantage. Par exemple, pour se prévaloir l’exonération d’impôt sur les sociétés prévues à l’article 208 quater A du CGI, il faut que l’entreprise ou l’activité ne soit pas créée dans le cadre d’une concentration, d’une restructuration d’activité préexistante exercée en Corse.
- 3. – Respect des règles afférentes à la déclaration des revenus générés par l’entreprise
A côté des conditions qui sont propres aux différents avantages fiscaux dont peuvent bénéficiés les contribuables, il y a une condition à caractère général qu’ils doivent considérer. Elle est dictée par l’article 302 nonies du CGI : « Les allégements d’impôt sur le revenu ou d’impôt sur les sociétés prévus aux articles 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 decies, 44 terdecies, 44 quaterdecies, 44 quindecies, 208 quater A et 208 sexies ne s’appliquent pas lorsqu’une ou des déclarations de chiffre d’affaires se rapportant à l’exercice concerné n’ont pas été souscrites dans les délais et qu’il s’agit de la deuxième omission successive ».
A part le fait de ne pas pouvoir bénéficier des avantages fiscaux, le contribuable, qui a omis de déclarer ses revenus dans le délai qui lui est imparti, s’expose à des pénalités de retard.
En outre, le CGI a exigé que la déclaration annuelle des revenus soit faite en respectant une multitude de règles de fond et de forme, ce qui complique relativement la déclaration de l’impôt et expose l’entreprise à un risque sur le plan fiscal, dans la mesure où la déductibilité de certaines charges est conditionnée par le respect desdites règles.
SECTION II. – Tenue d’une comptabilité régulière
Pour une meilleure gestion fiscale, le contribuable est également contraint de tenir une comptabilité probante afin d’éviter tout risque de rejet de comptabilité par le contrôleur fiscal. Qu’est-ce qu’on entend par comptabilité probante ? L’article L 123-14 du Code de commerce dispose : « Les comptes annuels doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l’entreprise ». En proposant cette contrainte, le législateur définit non seulement l’objet ultime du processus comptable (fourniture d’une image fidèle) mais également ses deux axiomes fondamentaux (régularité et sincérité), ce trio constituant le sommet de ce que les comptables nomment l’édifice comptable.
Un rejet de comptabilité peut se produire, notamment, en cas de non présence de pièces justificatifs ou de documents comptables, de comptabilisation d’opérations qui n’ont même pas eu lieu.
SECTION III. – Respect des règles touchant la facturation
En ce qui concerne les pays de la zone euro, auxquels la France fait partie, les règles de base de la facturation sont prévues par la directive du Conseil de l’Union européenne 2006/112/CE adoptée le 28 novembre 2009. Ladite directive rassemble tous les textes des pays des 27 afférents à la facturation de la TVA. Dans l’Hexagone, c’est la loi des finances rectificative de l’année 2007 qui a transposé cette directive.
Quand on parle des règles touchant la facturation, on ne peut se passer du droit d’enquête du fisc prévu dans le Livre des Procédures Fiscales. En effet, ledit droit a été reconnu à l’Administration fiscale pour qu’elle puisse procéder à des recherches approfondies pour déceler les infractions aux règles de facturation.
Pour être probante, une facture doit porter toutes les mentions qui sont édictées, en application de l’article 289 du CGI, par le décret du Conseil d’Etat de 2003 portant mentions obligatoires devant figurer sur les factures. Depuis le 1er juillet 2003, les factures émises dans l’Hexagone doivent comporter un certain nombre de mentions dont, entre autres, le nom complet et l’adresse de l’assujetti et de son client, le numéro de TVA intracommunautaire de l’assujetti en ce qui concerne les ventes nationales, le montant de la TVA à payer et le total hors taxe et la taxe correspondante mentionnés distinctement.
CHAPITRE III. – LES INSTRUMENTS DE LUTTE CONTRE L’OPTIMISATION FISCALE
Pour une meilleure conservation de la matière imposable, deux principaux instruments sont mis à la disposition de l’Administration fiscale. L’abus de droit (Section I) d’une part, et l’acte anormal de gestion (Section II) d’autre part.
SECTION I. – L’abus de droit
Si l’entreprise est libre dans la gérance de ses affaires sans que l’Administration puisse s’y immiscer, cette liberté n’est pas, toutefois, absolue. Elle ne peut pas faire l’objet d’abus. Elle ne peut être utilisée pour frauder la loi. En droit fiscal, l’abus de droit est régi par l’article L 64 du Livre des Procédures Fiscales. Ledit article, dans sa rédaction issue de l’article 35 de la loi 2008-1443 du 30 décembre 2008 (loi de finances rectificative pour 2008), permet à l’administration d’écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes ayant un caractère fictif, ainsi que les actes qui, recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, n’ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé, si ces actes n’avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles.
Avant la loi mentionnée ci-dessus, le champ d’application de l’article L 64 était assez restreint. Mais depuis, la notion d’abus de droit a reçu une définition plus générale. Le nouveau texte de l’article L 64 supprime notamment toute énumération des impôts visés. Désormais, la procédure de l’abus de droit concerne tous les impôts et peut être mise en œuvre indifféremment lorsque la situation constitutive de l’abus porte sur l’assiette, la liquidation de l’impôt ou son paiement. Cette nouvelle définition de l’abus de droit couvre, comme auparavant, les situations de fictivité juridique. Elle couvre également les situations de fraude à la loi. Toutefois, la définition légale vise les actes recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes ou de décisions alors que la jurisprudence ne faisait référence qu’aux actes recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes. Il importe cependant de préciser que la procédure d’abus de droit n’est pas applicable en cas de rescrit, c’est-à-dire, lorsqu’un contribuable, préalablement à la conclusion d’un ou plusieurs actes, a consulté par écrit l’administration centrale en lui fournissant tous éléments utiles pour apprécier la portée véritable de ces actes, et que celle-ci n’a pas répondu dans un délai de six mois ou a confirmé que l’opération présentée ne constituait pas un abus de droit.
Quid des sanctions afférentes à un abus de droit en matière fiscale ? Pour les propositions de rectifications notifiées à compter du 1er janvier 2009, l’abus de droit entraîne l’application de l’intérêt de retard (CGI art. 1727) et d’une majoration de :
– 40 % dès lors qu’il y a abus de droit ;
– 80 % si le service établit que le contribuable est l’instigateur principal ou le bénéficiaire principal de l’abus de droit (CGI art. 1729, b).
L’administration rappelle que l’application de la majoration de 80 % nécessite une démonstration et une motivation étayées dans la proposition de rectification. Cette démonstration peut être apportée par tous moyens, notamment par référence à des pièces saisies suite à une opération de visite et de saisie ou par référence aux fonctions et au rôle du ou des intéressés dans l’opération en cause. A défaut de cette démonstration, seule la majoration de 40 % est applicable.
La loi de finances rectificative pour 2008 a également modifié les dispositions de l’article 1754, V-1 du CGI relatives au débiteur des pénalités. Celles-ci sont dues par le redevable de la cotisation d’impôt ou de la restitution d’une créance indue, toutes les parties à l’acte étant solidairement responsables de leur paiement avec le contribuable. Auparavant, les pénalités étaient dues solidairement par toutes les parties à l’acte. La jurisprudence interprétait ce texte comme réservant l’application des pénalités aux personnes parties à l’acte écarté par l’administration. La nouvelle rédaction de l’article 1754, V-1 permet ainsi d’appliquer les sanctions au contribuable contrôlé, qu’il soit ou non partie à l’acte.
SECTION II. – L’acte anormal de gestion
Nonobstant le fait que l’Administration ne peut pas s’introduire dans la gestion des entreprises, elle est toutefois en droit de remettre en cause les actes qui ne se rattacheraient pas à la gestion normale de l’entreprise (opérations non accomplies dans l’intérêt de l’entreprise).
Le champ d’application de la théorie de l’acte anormal de gestion peut être rangé dans deux rubriques :
– L’entreprise supporte des charges n’entrant pas dans ses intérêts. Exemple, dépenses faites par l’entreprise au bénéfice des gérants alors que lesdites dépenses ne constituent en rien une contrepartie de services rendus, des dépenses afférentes à des biens immobiliers qui ne sont même pas affectée à l’exploitation de l’entreprise.
– La renonciation totale ou partielle de l’entreprise à un produit sans contrepartie. Il en est ainsi des avances sans intérêts consenties à des tiers, cession d’un bien de l’entreprise à un prix modique.
L’acte anormal de gestion a pour conséquence principal la réintégration au bénéfice imposable de la pseudo-charge d’exploitation.
SOUS-PARTIE II. – LA SOUS-CAPITALISATION
Dans cette seconde sous-partie, nous nous focaliserons d’une part, sur le concept : sous-capitalisation en général (Chapitre I) et d’autre part, sur l’extension du champ d’application du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation par la loi de finances pour 2011 (Chapitre II).
CHAPITRE I. – GENERALITES : SOUS-CAPITALISATION
Avant d’examiner le régime juridique portant sur la sous-capitalisation (Section II), il est nécessaire de voir ce qu’on entend par cette notion (Section I).
SECTION I. – Notion de sous-capitalisation
La sous-capitalisation est une pratique de transfert de bénéfices par le biais d’intérêts, rencontrée dans les groupes de sociétés.
Elle est basée principalement sur la création de filiale dont les activités sont financées par un prêt à long terme avec intérêts octroyé par la société mère. D’emblée, on ne voit dans ce schéma qu’une simple décision de gestion. Mais, en réalité, on est en présence d’une structure de transfert de bénéfices. Les bénéfices de la filiale emprunteuse sont transférés vers la société mère sous forme d’intérêts. Le but n’est autre que de bénéficier du régime fiscal de faveur des revenus provenant d’intérêts. En effet, conformément au 1-3° de l’article 39 du CGI, parmi les charges déductibles du résultat des entreprises imposables à l’impôt sur les sociétés, on a les intérêts d’emprunts se rapportant à d’autres personnes que l’exploitant lui-même, sous réserve que le capital ait été entièrement libéré. Cependant, ce droit de déduction ne peut pas faire l’objet d’abus compte tenu des risques qu’il peut engendrer (v. supra : Introduction – paragraphe 3).
SOCIETE MERE
FILIALE
SOUS-CAPITALISEE
Depuis que la sous-capitalisation a fait l’objet d’un rapport de l’OCDE, elle est de plus en plus contrôlée. En France, le régime juridique de la sous-capitalisation est prévu principalement par le II de l’article 212 du CGI, introduit par l’article 22 de la loi de finances rectificative pour 1990 n° 90-1169 du 29 décembre 1990.
SECTION II. – Régime juridique de la sous-capitalisation
- 1. – Présomption de sous-capitalisation
Une entreprise est présumée sous-capitalisée, en application de l’article 212, II-1 du CGI, si le montant global des intérêts déductibles en application du I du même article et dus à des entreprises liées, excède simultanément les trois limites suivantes :
– le produit correspondant au montant desdits intérêts multiplié par le rapport existant entre une fois et demie le montant des capitaux propres, appréciés au choix de l’entreprise à l’ouverture ou à la clôture de l’exercice, et le montant moyen des sommes mises ou laissées à disposition de l’entreprise par l’ensemble des entreprises liées (ratio d’endettement) ;
– 25 % du résultat courant avant impôt préalablement majoré desdits intérêts, des amortissements pris en compte pour la détermination de ce même résultat, et de la quote-part de loyers de crédit-bail prise en compte pour la détermination du prix de cession du bien à l’issue du contrat (ratio de couverture d’intérêts) ;
– le montant des intérêts servis à cette entreprise par des entreprises liées (ratio d’intérêts servis par des entreprises liées).
- Ratio d’endettement
En application des dispositions de l’article 212, II-a, une entreprise n’est pas considérée comme sous-capitalisée si elle respecte le ratio d’endettement, à savoir si le montant moyen des avances consenties par l’ensemble des entreprises liées n’excède pas une fois et demie le montant des capitaux propres
Pour calculer ce ratio, il convient de prendre en compte le montant moyen des sommes mises à disposition par l’ensemble des entreprises liées. Les sommes mises à disposition par des entreprises liées s’entendent de toutes les avances c’est-à-dire non pas les seuls apports de fonds consentis par les sociétés liées mais, plus généralement, le montant de toute créance sur l’entreprise rémunérée par des intérêts ou assimilés. Contrairement aux capitaux propres, ces avances ne sont pas prises en compte pour leur montant à la date d’ouverture ou de clôture de l’exercice mais pour leur montant moyen. Ce montant moyen est obtenu par le rapport entre la somme des avances quotidiennes consenties par des entreprises liées au cours de l’exercice et le nombre total de jours de cet exercice.
◼ Appréciation du ratio d’endettement. – Si le montant moyen des avances, tel que défini ci-avant, est inférieur à une fois et demie le montant des capitaux propres ou le montant du capital social, l’entreprise pourra alors déduire immédiatement la totalité des intérêts servis au titre de l’exercice aux entreprises liées. Au contraire, si le montant moyen desdites avances est supérieur à une fois et demie le montant des capitaux propres ou le montant du capital social, l’entreprise remplit dès lors le premier critère de sous-capitalisation.
- Ratio de couverture d’intérêts
En application des dispositions de l’article 212, II-1, b du CGI, une entreprise n’est pas présumée sous-capitalisée si elle respecte le ratio de couverture d’intérêts, c’est-à-dire si le montant total des intérêts dus à des entreprises liées n’excède pas 25 % du résultat courant avant impôts préalablement majoré desdits intérêts, des amortissements pris en compte pour la détermination de ce même résultat et de la quotepart de loyers de crédit-bail prise en compte pour la détermination du prix de cession du bien à l’issue du contrat.
Pour l’application de ce deuxième ratio, le résultat courant avant impôts s’entend du solde intermédiaire de gestion du même nom déterminé dans les conditions prévues par l’article 532-7 du plan comptable général. Il s’agit du résultat déterminé comme suit :
Produits (Colonne 1) | Charges (Colonne 2) | Soldes intermédiaires de gestion (Colonne 1 – Colonne 2) |
Vente de marchandises
Production vendue Production stocké Production immobilisée Total |
Coût d’achat des marchandises vendues
ou Déstockage de production Total |
Marge commerciale
Production de l’exercice |
Production de l’exercice
Marge commerciale Total |
Consommation de l’exercice en provenance de tiers |
Valeur ajoutée |
Valeur ajoutée
Subventions d’exploitation Total |
Impôt, taxes et versements assimilés
Charges de personnel Total |
Excédent brut (ou Insuffisance brute d’exploitation) |
Excédent brut d’exploitation
Reprises sur charges et transferts de charges Autres produits Total |
ou insuffisance brute d’exploitation
Dotation aux amortissements et aux provisions Autres charges Total |
Résultat d’exploitation (bénéfice ou perte) |
Résultat d’exploitation
Quote-part de résultat sur opérations faites en commun Produits financiers Total |
Résultat d’exploitation
Quote-part de résultat sur opérations faites en commun Charges financières Total |
◼ Résultat courant avant impôts (bénéfice ou perte) |
◼ Appréciation du ratio de couverture d’intérêts. – Conformément à l’article 212, II-1,b du CGI, est considérée comme sous-capitalisée une entreprise dont le montant des intérêts dus à des entreprises liées au cours de l’exercice excède le quart de son résultat courant avant impôts retraité, tel que défini ci-avant (ratio de couverture d’intérêt). Pour apprécier ce ratio, est prise en compte la somme des intérêts dus à des entreprises liées sous déduction des intérêts dont la déduction n’aurait pas été admise en déduction sur le fondement du I de l’article 212.
- Ratio d’intérêts servis par des entreprises liées
Conformément à l’article 212, II-1, c du CGI, une entreprise ne sera pas présumée comme sous-capitalisée lorsque le montant des intérêts qui lui sont dus par l’ensemble des entreprises liées excède celui des intérêts qu’elle-même doit à des entreprises qui lui sont liées. Ce ratio exclut en particulier du dispositif de sous-capitalisation les entreprises ayant un rôle pivot dans le circuit de financement, c’est-à-dire servant d’intermédiaire entre des entreprises liées prêteuses et des entreprises liées emprunteuses.
Pour apprécier ce ratio, il convient de prendre en compte l’ensemble des intérêts courus sur les avances accordées à des entreprises liées. Toutefois, ne peuvent être pris en compte pour l’appréciation de ce ratio les intérêts dus par des entreprises liées dont la déduction n’a pas été admise chez ces dernières et pour lesquels l’entreprise prêteuse a demandé à bénéficier du régime mère-fille.
Bref, lorsque les trois critères définis ci-dessus sont remplis, c’est-à-dire lorsque les intérêts dus à des entreprises liées excèdent les limites définies plus-haut, l’entreprise est présumée être en situation de sous-capitalisation ce qui, sauf dans les situations à faible enjeu fiscal, devrait la conduire à différer sur les exercices ultérieurs la déduction de tout ou partie des intérêts dus à des entreprises liées au cours de l’exercice. Cependant, cette présomption peut être écartée si l’entreprise démontre que son endettement global est inférieur à celui du groupe auquel elle appartient.
- 2. – Mécanisme de la preuve contraire
Conformément aux dispositions de l’article 212, III du CGI, les intérêts dus à des entreprises liées au titre d’un exercice ne sont pas soumis au nouveau dispositif de sous-capitalisation, si une entreprise qui est présumée sous-capitalisée, au regard des trois critères définis ci-avant, apporte la preuve que le ratio d’endettement global du groupe auquel elle appartient est supérieur ou égal à son propre ratio d’endettement global au titre de l’exercice considéré. Cette preuve contraire, strictement définie par la loi, est exclusive de tout autre mode de preuve. Au titre d’un exercice considéré, la preuve contraire consiste à comparer le ratio d’endettement global de l’entreprise avec celui du groupe auquel elle appartient.
- Ratio d’endettement global de l’entreprise
Le ratio global d’endettement d’une entreprise correspond au rapport existant entre le montant total de ses dettes et de ses capitaux propres. Il s’agit donc d’un ratio d’endettement global et non pas seulement du ratio d’endettement intra-groupe. Ainsi, les dettes s’entendent au sens comptable. Il s’agit donc des passifs certains dont l’échéance et le montant sont fixés de façon précise (article 212-2 du PCG). Il s’agit en pratique des emprunts et dettes auprès des établissements de crédit, des emprunts obligataires convertibles, des autres emprunts obligataires, des emprunts et dettes financières diverses, des avances et acomptes reçus sur commandes en cours, des dettes fournisseurs et comptes rattachés, des dettes fiscales et sociales, des dettes sur immobilisations et comptes rattachés, des autres dettes.
Actif | Exercice N | Passif | Exercice N |
Net | |||
Actif immobilisé (dont prêt à F = 200) | 480 | Capitaux propres (dont résultat de l’exercice = + 20) | 90 |
Actif circulant | 210 | Provisions pour risques et charges (provisions pour litige avec un tiers) | 10 |
Dettes (dont issues du groupe à la fin de l’exercice = 300 (société J) + 160 (société K) = 460) | 590 | ||
Total général | 690 | 690 |
Pour le calcul de ce ratio d’endettement global, les capitaux propres s’entendent de la même manière que pour la définition du ratio d’endettement visé à l’article 212, II-1, a. Par ailleurs, ledit ratio est calculé à la clôture de l’exercice au titre duquel l’entreprise est présumée sous-capitalisée au regard des trois ratios définis ci-dessus. Ainsi, le montant des capitaux propres et des dettes est celui figurant au bilan de clôture de l’exercice concerné.
Le ratio d’endettement global de l’entreprise L sera donc de 6,56 (590/90).
- Ratio d’endettement global du groupe
Conformément au deuxième alinéa de l’article 212, III du CGI, le ratio d’endettement du groupe, c’est-à-dire de l’ensemble des entreprises sous contrôle exclusif au sens du II de l’article L 223-16 du Code de commerce d’une même personne morale, est déterminé à partir de la comparaison entre :
– l’ensemble des dettes des entreprises du groupe, à l’exception de celles envers des entreprises appartenant au groupe ;
– des capitaux propres minorés du coût d’acquisition des titres des entreprises contrôlées et retraités des opérations réciproques réalisées entre les entreprises appartenant au groupe.
◼ Périmètre du groupe. – Sont prises en compte, pour le calcul du ratio d’endettement du groupe, l’ensemble des entreprises françaises ou étrangères qui présentent entre elles, au sens du II de l’article L 233-16 du Code de commerce, des liens de contrôle exclusif. Le groupe auquel il est fait référence s’entend, comme pour l’établissement des comptes consolidés en norme française, des entreprises sous contrôle exclusif d’une même société ou personne morale (« la société consolidante »), même si le mécanisme de la preuve contraire n’est pas réservé aux entreprises comprises dans un périmètre de consolidation. Il comprend la société mère « consolidante » et toutes les entreprises sous contrôle exclusif de cette société.
En application des dispositions de l’article L 233-16, II du Code de commerce, le contrôle exclusif par une société résulte :
– soit de la détention directe ou indirecte de la majorité des droits de vote dans une autre entreprise ;
– soit de la désignation, pendant deux exercices successifs, de la majorité des membres des organes d’administration, de direction ou de surveillance d’une autre entreprise. La société consolidante est présumée avoir effectué cette désignation lorsqu’elle a disposé au cours de cette période, directement ou indirectement, d’une fraction supérieure à 40 % des droits de vote, et qu’aucun autre associé ou actionnaire ne détenait, directement ou indirectement, une fraction supérieure à la sienne ;
– soit du droit d’exercer une influence dominante sur une entreprise en vertu d’un contrat ou de clauses statutaires, lorsque le droit applicable le permet.
Le contrôle exclusif s’entend donc du contrôle de droit ou contractuel ou bien encore de fait, qu’il soit direct ou indirect. Par ailleurs, la notion de contrôle exclusif étant identique à celle utilisée pour l’établissement des comptes consolidés en normes françaises, les précisions apportées par le règlement n° 99-02 du Comité de la réglementation comptable (CRC) relatif aux comptes consolidés des sociétés commerciales et entreprises publiques sur la notion de contrôle exclusif trouveront donc à s’appliquer pour le mécanisme de preuve contraire.
◼ Contrôle de droit. – L’appréciation des droits de vote détenus indirectement par une personne morale s’opère en additionnant les pourcentages de droits de vote détenus par chaque entreprise du groupe, c’est-à-dire dont la société mère (« consolidante ») détient le contrôle exclusif, et non en multipliant les pourcentages de détention à chaque degré de filiation.
GROUPE
◼ Contrôle contractuel. – Le contrôle contractuel d’une entreprise sur une autre est démontré si la première entreprise exerce sur la seconde une influence dominante en vertu d’un contrat ou de clauses statutaires, pour autant que le droit le permette. A cet égard, le règlement du CRC n° 99-02 susvisé précise que l’influence dominante existe si l’entreprise consolidante a la possibilité d’utiliser ou d’orienter les actifs de l’entreprise contrôlée de la même façon qu’elle contrôle ses propres actifs. S’agissant des entités ad hoc, c’est-à-dire des structures juridiques distinctes, créées spécifiquement pour gérer une opération ou un groupe d’opérations similaires pour le compte d’une entreprise, il convient de se référer aux précisions apportées par le règlement du CRC n° 99-02 pour déterminer si elles doivent ou non être comprises dans le périmètre du groupe.
◼ Contrôle de fait. – Il peut être présumé ou démontré. Ainsi, une société est présumée exercer un contrôle de fait sur une autre entreprise, lorsque les deux conditions suivantes sont simultanément remplies :
– elle a disposé, pendant deux exercices successifs, directement ou indirectement, d’au moins 40 % des droits de vote ;
– aucun autre associé ou actionnaire ne détient, directement ou indirectement, une fraction supérieure à celle de l’entreprise.
Le pourcentage des droits de vote est déterminé dans les conditions précisées ci-avant (v. supra : Contrôle de droit). Lorsqu’il ne peut être présumé dans les conditions définies ci-avant, le contrôle de fait doit être démontré. Une telle preuve est apportée si l’entreprise a désigné pendant deux exercices successifs les membres des organes d’administration, de direction ou de surveillance de l’entreprise.
◼ Détermination du ratio d’endettement du groupe. – Comme pour la détermination du ratio de l’entreprise, le ratio d’endettement global du groupe correspond au rapport entre les dettes de l’ensemble des sociétés comprises dans le périmètre du groupe, à l’exception des dettes intragroupe, et les capitaux propres cumulés de l’ensemble de ces mêmes sociétés retraités de certaines opérations intragroupe. En d’autres termes, le ratio d’endettement global du groupe correspond à la comparaison de l’endettement du groupe, c’est-à-dire à l’agrégation des dettes de la société « consolidante » et des différentes entreprises sous contrôle exclusif, et des capitaux propres du groupe. Toutefois, ces deux termes doivent faire l’objet de retraitements afin d’éliminer les opérations entre la société « consolidante » et les sociétés sous contrôle exclusif ou entre ces dernières.
Les capitaux propres du groupe sont déterminés, à la date de clôture de l’exercice au titre duquel l’entreprise est présumée sous-capitalisée au regard des trois ratios, par agrégation des éléments figurant au bilan du dernier exercice clos de l’ensemble des entreprises appartenant au groupe. Ainsi, pour les entreprises appartenant au groupe et clôturant leur exercice social à la même date que l’entreprise du groupe présumée sous-capitalisée, l’exercice de référence correspond à l’exercice au titre duquel l’entreprise du groupe est présumée sous-capitalisée.
◼ Comparaison des ratios. – Si le ratio d’endettement de l’entreprise est inférieur ou égal à celui du groupe au sens de l’article L 233-16, II du Code de commerce, déterminé dans les conditions définies ci-dessus, l’entreprise, bien que présumée sous-capitalisée au regard des critères prévus à l’article 212, II du CGI ne sera pas considérée comme sous-capitalisée en définitive. Dans le cas contraire, et quelle que soit l’ampleur du dépassement, l’entreprise sera considérée comme sous-capitalisée. Dans l’hypothèse où le ratio d’endettement global de l’entreprise serait négatif parce que les capitaux propres sont négatifs, l’entreprise sera considérée comme sous-capitalisée.
- Modalités pratiques d’application de la preuve contraire
L’application de la preuve contraire suppose que la société considérée comme sous-capitalisée au regard des trois ratios définis à l’article 212, II-1 du CGI justifie que le ratio d’endettement du groupe, auquel elle appartient, calculé dans les conditions précisées ci-avant, est d’un montant supérieur à son propre ratio d’endettement. A cette fin, cette société doit être à même d’apporter à l’administration tous les éléments et documents afférents aux différentes sociétés du groupe permettant de justifier le montant du ratio d’endettement global du groupe. Il sera admis, par simplification, que le ratio d’endettement global du groupe soit calculé, sous réserve des précisions ci-après, à partir des données publiées conformément aux obligations d’établissement des comptes consolidés en vigueur.
- 3. – Incidences de la sous-capitalisation
Lorsqu’une entreprise est considérée comme sous-capitalisée, c’est-à-dire lorsque le montant des intérêts dus à des sociétés liées excède cumulativement les trois ratios au titre de l’exercice considéré et que l’entreprise n’a pu justifier que son ratio d’endettement global est inférieur ou égal à celui du groupe auquel elle appartient, la déduction d’une fraction des intérêts dus au titre de l’exercice à des sociétés liées est différée au titre des exercices suivants.
- Quote-part d’intérêts différés
Conformément au cinquième alinéa de l’article 212, II-1 du CGI, la fraction des intérêts excédant la plus élevée des trois limites définies plus haut (v. supra : Présomption de sous-capitalisation) ne peut être déduite du bénéfice imposable de l’exercice concerné, sauf si cette fraction est inférieure à 150 000 euros. Lorsque la société est considérée sous-capitalisée au regard des trois ratios et qu’elle n’a pu apporter la preuve contraire, la quotité d’intérêts non déductibles est déterminée en fonction de la plus élevée de ces trois limites.
◼ Plafond en fonction du ratio d’endettement. – La quotité d’intérêts déductibles en application de ce premier plafond est égale à 1,5 fois le montant des capitaux propres ou du capital social, s’il est supérieur, multiplié par le taux moyen d’intérêt versé aux entreprises liées. Ce taux moyen d’intérêt est obtenu par le rapport entre les intérêts déductibles en application de l’article 212, I dus à des entreprises liées au cours de l’exercice et le montant moyen des sommes mises ou laissées à disposition par l’ensemble des entreprises liées au cours de ce même exercice.
◼ Plafond en fonction du ratio de couverture d’intérêts. – Le deuxième plafond correspond au ratio de couverture d’intérêts, soit 25 % du résultat courant avant impôts retraité.
◼ Plafond en fonction des intérêts servis par des sociétés liées. – Ce troisième plafond correspond au montant des intérêts servis par des sociétés liées au cours de l’exercice. La quotité d’intérêts déductibles au titre de l’exercice ne sera déterminée qu’en fonction des deux plafonds précédents, lorsqu’au titre de l’exercice aucun intérêt n’est servi par des entreprises liées et donc qu’aucune avance rémunérée n’a été faite à ces mêmes entreprises par l’entreprise sous-capitalisée.
◼ Calcul de la quotité d’intérêts différés. – Conformément au cinquième alinéa de l’article 212, II-1 du CGI, la quotité d’intérêts dont la déduction n’est pas admise au titre d’un exercice, mais différée au titre des exercices ultérieurs, s’obtient par la différence entre le montant des intérêts dus au titre de l’exercice à des entreprises liées et le plus élevé des trois plafonds définis ci-avant. Toutefois, dans l’hypothèse où cette différence serait inférieure ou égale à 150 000 €, les intérêts dus à des entreprises liées seront déductibles en intégralité.
- Modalités de déduction des intérêts différés
Les intérêts dont la déduction a été différée au titre d’un exercice peuvent être déduits du résultat imposable :
– au titre de l’exercice suivant dans la limite de la différence entre 25 % du résultat courant avant impôts retraité et des intérêts déductibles dus à des entreprises liées ;
– puis au titre des exercices suivants sous la même limite calculée au titre de l’exercice concerné, sous déduction préalable d’une décote de 5 % au titre de chaque exercice.
◼ Limite de déduction au titre de l’exercice suivant. – Elle correspond à la différence entre :
– 25 % du résultat courant avant impôts de l’exercice suivant préalablement majoré des intérêts dus à des entreprises liées et déductibles en application de l’article 212, I du CGI, des dotations aux amortissements pris en compte pour la détermination de ce même résultat et de la quote-part de loyers de crédit-bail prise en compte pour la détermination du prix de cession du bien à l’issue du contrat ;
– et les intérêts déductibles en application du I de l’article 212 et dus à des entreprises liées au titre de l’exercice.
Cette limite de déduction s’entend donc du plafond de déduction en fonction du ratio de couverture d’intérêts, déterminé au titre de cet exercice dans les conditions précisées ci-avant (v. supra : Plafond en fonction du ratio de couverture d’intérêts), minoré des intérêts déductibles dus à des entreprises liées au titre du même exercice. En pratique, les intérêts différés ne pourront pas être déduits au titre d’un exercice où l’entreprise est considérée comme sous-capitalisée au regard des trois ratios, dès lors que les intérêts dus à des entreprises liées excèdent dans cette situation le ratio de couverture d’intérêts.
◼ Limite de déduction à compter du deuxième exercice. – A compter du deuxième exercice suivant celui au titre duquel les intérêts ont été différés, le solde d’intérêts différés non imputés à l’ouverture de chaque exercice subit une décote de 5 %. Les intérêts différés correspondant à ces 5 % de décote ne peuvent plus être déduits du résultat imposable et sont donc définitivement perdus. En application de cette règle, il convient ainsi de distinguer à l’ouverture d’un exercice, pour le calcul de la décote, les intérêts différés créés au titre de l’exercice précédent, qui ne subiront cette décote qu’à l’ouverture de l’exercice suivant, des intérêts différés au titre d’exercices antérieurs qui eux doivent être réduits de 5 %.
- Situation des sociétés de personnes
◼ Détermination de la quotité d’intérêts différés. – Lorsque les droits portant sur des sociétés relevant de l’article 8 du CGI sont inscrits à l’actif d’une personne morale passible de l’IS dans les conditions de droit commun, la part de résultat correspondant à ses droits est déterminée, dans un premier temps comme si la société était soumise à l’IS sur la totalité de son résultat, puis dans un second temps le résultat ainsi obtenu est attribué à chaque associé soumis à l’IS à proportion de ses droits.
Dans un premier temps, il convient de déterminer, si la société est sous-capitalisée au regard des trois ratios mentionnés à l’article 212, II-1 du CGI. Pour apprécier ces différents ratios, il doit être tenu compte de l’intégralité des intérêts dus à des entreprises liées par la société relevant de l’article 8 et des avances correspondantes, ainsi que du montant total des intérêts servis à cette société par des entreprises liées, des capitaux propres (ou du capital social) et du résultat courant avant impôt pour leur montant total et, non pour une fraction correspondant aux seuls droits des associés soumis à l’IS.
Dans un second temps, le résultat imposable, y compris les intérêts différés, est réparti entre les associés soumis à l’IS en fonction de leurs droits dans la société de personnes. Le montant d’intérêts différés imputables sur les exercices ultérieurs s’entend des intérêts non admis en déduction en application de l’article 212, II, c’est-à-dire les intérêts différés compris dans la quote-part de résultat revenant aux associés soumis à l’IS.
◼ Modalités d’imputation des intérêts différés. – Les intérêts différés au niveau de la société de personnes peuvent s’imputer au titre de l’exercice suivant et des exercices ultérieurs, pour déterminer la quote-part de résultat de cette société revenant aux associés soumis à l’IS, sur le résultat déterminé suivant les règles applicables en matière d’impôt sur les sociétés dans les conditions prévues plus haut (v. supra : Modalités d’imputation des intérêts différés).
Ainsi, en pratique, la fraction d’intérêts différés sera déductible au titre de l’exercice suivant du résultat déterminé suivant les règles applicables en matière d’impôt sur les sociétés de l’exercice considéré revenant aux associés soumis à l’IS dans la limite, à proportion des droits détenus par ces associés, du plafond en fonction du ratio de couverture, déterminé au titre de l’exercice, minoré des intérêts déductibles en application de l’article 212, I du CGI dus à des entreprises liées au titre du même exercice. Par ailleurs, si les intérêts différés n’ont pu être imputés au titre de l’exercice suivant celui au cours duquel leur déduction a été différée, le solde pourra être imputé dans la limite précisée ci-avant calculée au titre de l’exercice considéré, sous déduction d’une décote de 5 % au titre de chaque exercice.
- Application du dispositif dans un groupe fiscal
S’inspirant du régime de report des déficits dans le cadre d’un groupe fiscal, le IV de l’article 113 de la loi de finances pour 2006, codifié aux 14ème à 19ème alinéas de l’article 223 B du CGI, prévoit que les intérêts non déduits au niveau de chaque société membre d’un groupe fiscal depuis leur entrée dans le groupe sont déductibles du résultat d’ensemble, sous certaines limites, et non plus du propre résultat ultérieur de chacune de ces sociétés.
◼ Transfert de la déduction des intérêts non déduits au niveau du groupe. – Conformément au 14e alinéa de l’article 223 B du CGI et, par exception aux dispositions prévues au 6e alinéa de l’article 212, II-1, les intérêts résultat d’ensemble, ne peuvent être déduits des résultats ultérieurs de cette société. Dans ces conditions, il convient pour chaque société membre d’un groupe fiscal d’appliquer, dans un premier temps, les dispositions de l’article 212, II en vue de déterminer les sociétés considérées comme sous-capitalisées au regard des trois ratios (ratio d’endettement, ratio de couverture d’intérêts et ratio d’intérêts servis par des entreprises liées) puis, dans un second temps, la quotité d’intérêts différés au titre de l’exercice.
Toutefois, les intérêts dont la déduction a été différée pour la détermination du résultat des sociétés membres du groupe, y compris de la société mère du groupe, ne peuvent plus être imputés sur leurs propres résultats ultérieurs, mais sur le résultat d’ensemble de l’exercice. Cette interdiction d’imputation ne vaut que pour les intérêts différés depuis l’entrée dans le groupe fiscal de la société membre concernée. En revanche, les intérêts dont la déduction a été différée au titre d’un exercice antérieur à l’entrée dans le groupe demeurent déductibles du propre résultat de chaque société membre du groupe dans les conditions précisées ci-avant (v. supra : Modalités de déduction des intérêts différés).
◼ Modalités de déduction des intérêts non déduits au niveau du groupe. – Conformément aux 15ème à 19ème alinéas de l’article 233 B du CGI, les intérêts non déduits au niveau de chaque société membre du groupe au titre d’un exercice peuvent être déduits, sous certaines limites, du résultat d’ensemble de l’exercice au cours duquel ces intérêts ont été différés, ou des exercices suivants.
◼ Détermination du plafond d’intérêts non déductibles. – Pour déterminer la quote-part d’intérêts dont la déductibilité est effectivement différée au niveau du résultat d’ensemble, il convient de calculer la différence entre les intérêts dus à des sociétés liées hors du groupe fiscal majorés des intérêts différés en « propre » déduits au titre de l’exercice (article 223 B, 1°) et le ratio de couverture d’intérêts déterminé au niveau du groupe (article 223 B, 2°).
◼ Calcul du plafond. – Le plafond d’intérêts non déductibles est égal à la différence positive (ou nulle) entre les intérêts visés à l’article 223 B, 1° du CGI et le ratio de couverture d’intérêts du groupe défini à l’article 223 B, 2°. Ainsi, si l’agrégation des résultats courants avant impôts retraités de l’ensemble des sociétés membres du groupe conduit à obtenir un résultat courant avant impôts du groupe négatif, ce dernier est considéré comme nul pour le calcul de ce plafond. Dans cette situation, le plafond est, par conséquent, égal au montant des intérêts dus à des sociétés liées n’appartenant pas au groupe. De la même manière, si aucun intérêt n’est dû à des sociétés liées n’appartenant pas au groupe, le plafond sera considéré comme nul.
Il est à préciser que pour la détermination du résultat d’ensemble, le résultat de chacune des sociétés du groupe, y compris le résultat propre de la société mère, est rectifié par cette dernière pour éviter soit une double déduction, soit une double imposition de certaines opérations, telles que la neutralisation de certaines provisions ou des abandons de créances, des subventions directes ou indirectes consenties entre des sociétés du groupe. Le retraitement prévu aux 15e à 18e alinéas de l’article 223 B du CGI s’inscrit dans le même objet que ces retraitements en considérant le groupe comme une entité unique pour l’appréciation de la sous-capitalisation au regard du ratio de couverture d’intérêts.
◼ Montant déductible du résultat d’ensemble. – La déduction au niveau du résultat d’ensemble est égale à la différence positive entre le montant total des intérêts différés au niveau de l’ensemble des sociétés membres et le plafond défini ci-avant. Cette déduction revient ainsi à plafonner le montant des intérêts différés au niveau du groupe au montant des intérêts qui n’auraient pas été admis en déduction en application du ratio de couverture d’intérêts prévu à l’article 212, II-1, b, si le groupe était constitutif d’une seule entité.
◼ Modalités de report des intérêts différés sur le résultat d’ensemble des exercices ultérieurs. – Conformément au 19e alinéa de l’article 223 B du CGI, les intérêts non déduits au titre d’un exercice par les sociétés membres du groupe dont la déduction a été transférée au niveau du résultat d’ensemble, mais qui n’ont pu être déduits du résultat d’ensemble au titre de cet exercice dans les conditions définies ci-avant, sont déductibles du résultat d’ensemble de l’exercice suivant ou des exercices ultérieurs, après application d’une décote de 5 %, dans la limite :
– du ratio de couverture d’intérêts du groupe défini à l’article 223 B, 2° calculé au titre de l’exercice considéré ;
– minoré des intérêts mentionnés à l’article 223 B, 1° et des intérêts déduits du résultat d’ensemble au titre de ce même exercice.
Les dispositions du 19e alinéa de l’article 223 B ont ainsi pour objet d’admettre en déduction les intérêts différés au niveau du résultat d’ensemble suivant la même limite que celle prévue à l’article 212, II en considérant le groupe comme une entité unique. Afin d’atteindre pleinement cet objectif, il sera admis que le ratio de couverture d’intérêts ne soit pas minoré des intérêts déduits du résultat d’ensemble au titre de l’exercice. Comme pour l’application des dispositions de l’article 212, II, les intérêts différés au niveau du résultat d’ensemble doivent être réduits de 5 % à l’ouverture de chaque exercice à compter du deuxième exercice suivant celui au cours duquel leur déduction a été transférée au niveau du groupe. Ainsi, les précisions apportées sur les modalités d’application de la décote sont transposables au niveau du groupe.
CHAPITRE II. – L’EXTENSION DU DISPOSITIF DE LUTTE CONTRE LA SOUS-CAPITALISATION PAR LA LOI DE FINANCES POUR 2011
Auparavant, les intérêts servis à des entreprises liées directement ou indirectement au sens de l’article 39, 12° du CGI étaient les seuls visés par le dispositif de lutte contre la sous-capitalisation. Mais depuis la loi n° 2010-1657 du 29 décembre de finances pour 2011, tel n’est plus le cas. En effet, l’article 12 de ladite loi limite également la déduction des intérêts dus à des entreprises non liées dès lors que le remboursement des avances correspondantes était garanti par une sûreté octroyée par une entreprise liée à l’entreprise qui a emprunté.
SECTION I. – Les sommes laissées ou mises à la disposition par des entreprises liées
- 1. – Principe
Les dispositions de l’article 212 du CGI s’appliquent aux intérêts rémunérant toutes les sommes mises ou laissées à disposition d’une entreprise par une entreprise qui lui est liée directement ou indirectement au sens de l’article 39, 12 du CGI.
Par sommes laissées ou mises à la disposition de l’entreprise par des entreprises liées, il convient d’entendre pour l’application de l’article 212 du CGI, non pas les seuls apports de fonds consentis par les sociétés liées mais, plus généralement, le montant de toute créance sur l’entreprise rémunérée par des intérêts ou assimilés. Par conséquent, les précisions apportées par la documentation administrative 4 C 551 en date du 30 octobre 1997 sur la nature des sommes visées par les dispositions de l’article 212 demeurent applicables.
◼ Situation des instruments financiers hybrides. – Sont qualifiés de titres hybrides les instruments financiers dont les caractéristiques combinent à la fois certaines particularités des capitaux propres, telles que l’absence de date de remboursement prédéfinie ou la faculté pour l’émetteur de suspendre leur rémunération en l’absence ou en cas d’insuffisance de bénéfice, avec des caractéristiques propres aux dettes, telles que le versement d’une rémunération à un taux fixe ou variable prédéfini dès l’émission, l’absence de droits de vote et de droit au boni de liquidation. Pour l’application des dispositions du nouvel article 212 du CGI, il convient, lorsque l’analyse au cas par cas des caractéristiques du titre permet de conclure à la déductibilité des intérêts dus dans les conditions de droit commun, c’est-à-dire à leur assimilation fiscale à des dettes, de considérer que les sommes ainsi mises à disposition sont susceptibles d’entrer dans le champ du dispositif de sous-capitalisation chaque fois que l’entreprise qui les détient est liée directement ou indirectement à leur émetteur.
◼ Financement par le biais d’un fonds commun de placement. – Il est rappelé qu’en application des dispositions de l’article L 214-20 du Code monétaire et financier, le fonds commun de placement, qui n’a pas la personnalité morale, est une copropriété d’instruments financiers et de dépôts dont les parts sont émises et rachetées à la demande des porteurs à la valeur liquidative majorée ou minorée selon le cas des frais et commissions. En outre, ce statut juridique s’accompagne d’un régime fiscal particulier, notamment en matière d’imposition des revenus. Ce statut juridique et fiscal aboutit à faire du fonds commun de placement un groupement de personnes qui, bien que non doté de la personnalité morale, n’en constitue pas moins, au point de vue fiscal, une véritable entité. Dans ces conditions, les sommes mises à disposition d’une société par un fonds commun de placement seront soumises aux dispositions de l’article 212 du CGI sous réserve que ce fonds soit lié directement ou indirectement au sens de l’article 39, 12 avec cette société.
- 2. – Exclusions
- Exclusions explicites légales
◼ Offre au public d’obligations. – Ne sont pas visés par le dispositif de lutte contre la sous-capitalisation, « les intérêts servis à une entreprise non liée à l’entreprise emprunteuse à raison des avances laissées ou mises à disposition sous la forme d’obligations dont le remboursement est garanti par une entreprise liée au débiteur et qui sont émises dans le cadre d’une offre au public au sens de l’article L. 411-1 du Code monétaire et financier ou d’une règlementation étrangère équivalente ».
◼ Refinancement forcé. – Sont aussi exclus de l’extension du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation, « les intérêts versés à raison de sommes laissées ou mises à disposition à la suite du remboursement d’une dette préalable, rendu obligatoire par un changement de contrôle du débiteur ou en exécution d’une procédure de sauvegarde ou d’un redressement judiciaire ».
◼ Prêts et avances octroyés aux SCI de construction-vente et garantis par des sociétés liées. – Les intérêts dus à raison d’emprunts contractés par des sociétés civiles immobilières de construction-vente et garantis par un ou plusieurs de leurs associés sont, à compter des exercices clos au 31 décembre 2011 exclus du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation. Les SCI visées par cette règle sont celles qui ont pour objet la construction d’immeubles en vue de les vendre et dont le régime juridique est prévu par les articles L. 211-1 et suivants du Code de la construction et de l’habitation.
- Autres exclusions
Sont écartées du dispositif de l’article 212 du CGI, les avances :
– accordées par des entreprises liées aux fournisseurs ou clients dans le cadre de relations commerciales normales ;
– consenties par des établissements de crédit à des sociétés liées dans des conditions identiques à celles accordées à leurs autres clients ;
– octroyées par des sociétés liées aux entreprises chargées au sein du groupe de la gestion centralisée de la trésorerie en vertu d’une convention.
SECTION II. – Les sûretés visées selon le projet d’instruction administrative 4 H-3-11
Depuis la loi de finances pour 2011, les intérêts dus à raison des avances laissées ou mises à disposition dont le remboursement est garanti par une sûreté octroyée par soit, une entreprise liée à l’entreprise emprunteuse, soit une entreprise dont l’engagement est, lui-même, garantie par une sûreté accordée par une entreprise liée au débiteur, entrent dans le champ d’application du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation.
Sont visées toutes les sûretés personnelles et réelles.
- 1. – Les sûretés personnelles
Est sûreté personnelle, tout engagement de payer souscrit, à titre accessoire, à titre principal ou encore à titre indemnitaire, dans le but de garantir l’obligation d’un débiteur.
Sont donc visés :
– le cautionnement. – contrat par lequel une personne, la caution, s’engage à l’égard d’un créancier à payer la dette d’un débiteur, appelé débiteur principal, au cas où celui-ci serait défaillant.
– la garantie autonome. – engagement par lequel le garant s’oblige, en considération d’une obligation souscrite par un tiers, à verser une somme, soit à première demande, soit suivant des modalités convenues.
– la lettre d’intention. – document par lequel un tiers exprime à créancier, en des termes variables et parfois volontairement imprécis, son intention de soutenir son débiteur afin de lui permettre de remplir ses engagements. Cependant, il importe de préciser que seule une lettre de confort en vertu duquel son auteur est de plein droit responsable du préjudice causé par la défaillance du débiteur qui est prise en compte. Autrement dit, il faut que l’obligation souscrite dans la lettre de patronage soit de résultat et non de moyens.
- 2. – Les sûretés réelles
Est sûreté réelle, tout droit préférentiel conféré, dans le garantir l’obligation d’un débiteur, au créancier sur le patrimoine ou sur tels biens déterminés dudit débiteur ou d’un tiers, qu’il s’agisse d’un droit réel principal ou accessoire ou que ce droit ne relève pas la catégorie des droits réels.
Est donc concerné par le dispositif de lutte contre la sous-capitalisation, l’ensemble des sûretés réelles : sûretés réelles immobilières (hypothèques), sûretés réelles mobilières qu’elles soient avec dessaisissement (droit de rétention, gage, fiducie), qu’elles soient sans dessaisissement (gage sans dépossession, hypothèques mobilières, réserve de propriété).
Cependant, il est à préciser que le II de l’article 212 du CGI ne s’applique pas aux avances laissées ou mises à dispositions « dont le remboursement est exclusivement garantie soit, par le nantissement des titres du débiteur, soit, par le nantissement des créances détenues sur ce débiteur, soit, par le nantissement des titres d’une société détenant directement ou indirectement le débiteur ».
A l’occasion du 14ème Conseil des ministres franco-allemands (CMFA) qui s’est tenu au Palais de l’Elysée le 6 février 2012, le couple « Merkozy » (l’ex-Président de la République française, Nicolas Sarkozy, et la Chancelière allemande, Angela Merkel), a validé le Livre vert sur la convergence franco-allemande en matière de fiscalité des entreprises. Cinq thèmes de convergence prioritaires ont été identifiés, dont notamment, le régime de groupe, le traitement fiscal des charges – en particulier les intérêts versés à raison d’emprunt –. Dans cette seconde partie, on va examiner d’une part, les points de ralliement entre la législation française et la législation allemande en matière de sous-capitalisation (Chapitre I) et d’autre part, les impacts majeurs de la grande réforme fiscale outre-Rhinoise de 2008 (Chapitre II). Et enfin, on verra les améliorations pouvant être apportées à la législation française dans le domaine (Chapitre III).
CHAPITRE I. – LES POINTS DE RALLIEMENT ENTRE LES DEUX LEGISLATIONS
L’ancienne règlementation française de la sous-capitalisation, qui s’est inspirée de la législation allemande, était facilement contournable. D’où la refonte du dispositif de lutte contre cette pratique par l’article 113 de la loi de finances pour 2006.
SECTION I. – Le dispositif de limitation de la sous-capitalisation avant
la loi de finances pour 2006
- 1. – Dispositif facilement contournable
Comme il a été déjà précisé ci-avant, parmi les charges imputables du résultat des entreprises imposables à l’impôt sur les sociétés, on a les intérêts à raison d’emprunts se rapportant à d’autres personnes que l’exploitant lui-même. Cependant, comme une entreprise est susceptible de se financer par emprunt, il est patent qu’il y ait une tentation de sous-capitaliser une société par la maximisation du montant des intérêts imputables pour diminuer le résultat imposable. De telle tentation existe surtout dans les groupes de sociétés internationaux, du fait que dans lesdits groupes, l’endettement entre société permet un transfert de bénéfices des sociétés filles sous-capitalisées vers la société mère. D’où la nécessité de mettre en place un dispositif de lutte contre la sous-capitalisation. Aussi l’article 22 de la loi finances rectificatif pour 1990 a-t-il introduit dans le CGI l’article 212.
Aux termes dudit article (version en vigueur avant la loi de finances pour 2006) :
« Les intérêts afférents aux sommes que les associés laissent ou mettent à la disposition de la société sont admis dans les charges déductibles dans les conditions prévues au 3° du 1 de l’article 39.
Toutefois, la déduction n’est admise, en ce qui concerne les associés ou actionnaires possédant, en droit ou en fait, la direction de l’entreprise ou détenant plus de 50% des droits financiers ou des droits de vote attachés aux titres émis par la société, que dans la mesure où ces sommes n’excèdent pas, pour l’ensemble desdits associés ou actionnaires, une fois et demie le montant du capital social. Cette limite n’est pas applicable :
- – […] ;
b – aux intérêts afférents aux avances consenties par une société ou à une autre société lorsque la première possède, au regard de la seconde, la qualité de société mère au sens de l’article 145 […] ».
L’exclusion au dispositif de lutte contre la sous-capitalisation des intérêts dus à raison des sommes mises ou laissées à disposition par une société ou à une autre société lorsque la première possède, au regard de la seconde, la qualité de société mère au sens de l’article 145 du CGI a été le catalyseur de la remise en cause prétorienne récente, en raison de son caractère discriminatoire au détriment des sociétés filles dont la société mère est établie hors de l’Hexagone. Nonobstant le fait que l’article 212 a pour vocation de lutter contre l’optimisation fiscale via la sous-capitalisation, cela n’empêchait pas les détournements du fait que la limitation de l’imputabilité ne s’applique qu’aux avances mises ou laissées à disposition par les associés personnes physiques ou des sociétés mères étrangères, et n’inclut pas celles versées par d’autres sociétés du groupe. Aussi, de 2000 à 2003, le montant moyen des redressements s’est-il élevé à 17,1 millions d’euros.
- 2. – Remise en cause prétorienne du dispositif
- Remise en cause par le Conseil d’Etat
Comme il a été indiqué ci-avant, les intérêts afférents aux avances consenties par une société ou à une autre société lorsque la première possède, au regard de la seconde, la qualité de société mère au sens de l’article 145 du CGI sont des charges imputables dans les conditions prévues par l’article 39, 3° du CGI. Autrement dit, dès lors que la société mère et la filiale sont françaises, le dispositif de lutte contre la sous-capitalisation ne s’applique pas. Mais si la société mère est établie hors de la France, ledit dispositif s’applique. Indubitablement, il y a là une discrimination. Et c’est d’ailleurs ce caractère discriminatoire découlant de la combinaison des articles 145 et 212 du CGI qui est contestable. Une contestation basée sur le droit communautaire, et plus précisément sur le principe de la liberté d’établissement prévu par l’article 52 du traité de Rome du 25 mars 1957 qui institue la Communauté Européenne (TCE). Ainsi, le Conseil d’Etat a refusé, dans deux grands arrêts « SARL Coréal Gestion » et « Andritz », à l’Administration fiscale française le droit d’appliquer le dispositif de lutte contre la sous-capitalisation à une filiale d’une société allemande (SARL Coréal Gestion) et à une filiale d’une société autrichienne.
Dans le premier jugement, le Conseil d’Etat avance : « Les stipulations de l’article 52 du traité instituant la Communauté européenne (devenu, après modification, l’article 43), relatives à la liberté d’établissement des ressortissants d’un Etat membre sur le territoire d’un autre Etat membre et aux termes desquelles cette liberté « comporte l’accès aux activités non salariées et leur exercice, ainsi que la constitution et la gestion d’entreprises, et notamment de sociétés…, dans les conditions définies par la législation du pays d’établissement pour ses propres ressortissants », s’opposent, notamment, « aux restrictions à la création d’agences, de succursales ou de filiales » par les ressortissants d’un Etat membre sur le territoire d’un autre Etat membre. Il résulte de l’interprétation donnée de ces stipulations par la Cour de justice des Communautés européennes qu’est de nature à constituer une telle restriction l’application par un Etat membre d’un traitement fiscal inégal aux sociétés filiales constituées sur son territoire en conformité de sa législation selon que leur société mère s’y trouve ou non, elle-même, établie, dès lors qu’au regard de l’objet de l’impôt en cause, les unes et les autres de ces sociétés filiales sont dans une situation objectivement comparable. La circonstance qu’en seule raison de ce qu’elle n’a pas d’établissement en France, une société ne se trouve pas soumise au régime fiscal français des sociétés mères n’est pas de nature à caractériser l’existence, entre une société filiale constituée par elle en France et les sociétés filiales françaises de sociétés établies en France et soumises audit régime, d’une différence de situation objective telle que cette société filiale puisse, sans qu’il en résulte une restriction à la liberté d’établissement contraire aux dispositions de l’article 52 du TCE (devenu, après modification, l’article 43), se voir appliquer un traitement moins favorable en vue de la détermination des bases d’impôt sur les sociétés dont elle est redevable. Par suite, les dispositions du 1° de l’article 212 du code général des impôts ne peuvent fonder une imposition qui aurait cet effet ».
Dans le second, il précise que : « Les dispositions de l’article 57 du code général des impôts n’ont pas pour objet ou pour effet d’autoriser l’administration fiscale à apprécier le caractère normal du choix opéré par une entreprise étrangère de financer par l’octroi d’un prêt, de préférence à un apport de fonds propres, l’activité d’une entreprise française qu’elle détient ou contrôle et à en tirer, le cas échéant, de quelconques conséquences fiscales.
- Remise en cause par la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) du dispositif allemand d’anti-sous-capitalisation
Dans son arrêt « Lankhorst-Hohorst Gmbh », la Cour de justice des communautés européennes déclare le dispositif de lutte contre la sous-capitalisation de l’Allemagne non compatible avec l’article 52 du TCE (devenu, après modification, l’article 43) en raison de la différence de traitement fiscal (imposition aux taux de 30% en tant que dividendes occultes, ou imputabilité en tant que charges) des intérêts servis par une filiale résidente, selon que la sociétés mère était ou non résidente.
Selon les termes du dispositif dudit arrêt : « […] l’article 43 du TCE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une mesure telle que celle contenue à l’article 8 bis, §1, 2° du KStG ». L’article 43 du TCE s’oppose à ce qu’une règle fiscale d’un État membre de l’Union européenne prévoyant que les rémunérations des capitaux externes qu’une société a obtenus d’un actionnaire, telle la société mère doivent être considérées comme des bénéfices occultes distribués, ne s’applique qu’aux rémunérations des fonds obtenus d’un actionnaire ne bénéficiant pas du crédit d’impôt, dès lors que les sociétés mères résidentes bénéficient, dans la grande majorité des cas, du crédit d’impôt, à la différence en règle générale, des sociétés mères étrangères qui n’en bénéficient pas. « Une telle différence de traitement entre filiales résidentes en fonction du siège de leur société mère constitue une entrave à la liberté d’établissement, en principe interdite par l’article 43 du TCE. La mesure fiscale en cause (l’article 8 bis du KStG) rend moins attrayant l’exercice de la liberté d’établissement par des sociétés établies dans d’autres États membres, lesquelles pourraient en conséquence renoncer à l’acquisition, à la création ou au maintien d’une filiale dans l’État membre qui édicte cette mesure ».
SECTION II. – Le dispositif de limitation de la sous-capitalisation suite à
la loi de finances pour 2006
- 1. – Elargissement du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation
- Intérêts concernés – Principes
Tirant les conséquences des arrêts du Conseil d’Etat du 30 décembre 2003 n° 249047 Coréal Gestion et n° 233894 Andritz, l’article 113 de la loi de finances pour 2006 (Loi 2005-1719 du 30 décembre 2005) a réformé le dispositif de lutte contre la sous-capitalisation prévu à l’article 212 du CGI. Ainsi, les nouvelles dispositions de l’article 212 précité visent désormais tous les intérêts dus par une entreprise à une entreprise liée directement ou indirectement au sens de l’article 39, 12 du CGI. L’exception dont bénéficiaient les sociétés ayant la qualité de société mère au sens de l’article 145 du Code déjà cité est supprimée.
Sont visés par les nouvelles dispositions de l’article 212, II du CGI, les intérêts dus par une entreprise à l’ensemble des entreprises liées et déductibles conformément au I. En d’autres termes, les nouvelles dispositions prévues à l’article 212, II s’appliquent aux intérêts :
– qui rémunèrent des sommes mises à disposition par des entreprises liées. En ce sens, il s’agit des mêmes intérêts que ceux visés par l’article 212, I ;
– mais qui sont déductibles en application de l’article 212, I, soit en totalité parce que le taux d’intérêt est inférieur au taux de référence ou, dans le cas contraire, lorsque l’entreprise a apporté la preuve que ce taux d’intérêt est un taux de marché, soit partiellement à hauteur du taux de référence ou, s’il est supérieur au taux de marché c’est-à-dire au taux égal à la moyenne annuelle des taux effectifs moyens pratiqués par les établissements de crédit pour des prêts à taux variable aux entreprises d’une durée de plus de deux ans.
Il importe de préciser qu’à l’occasion de cette refonte du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation, l’article 113 de la loi de finances pour 2006 introduit une mesure d’assouplissement, codifiée à l’article 212, I du CGI, en autorisant désormais les entreprises dont le taux d’intérêt servi aux entreprises liées est d’un montant supérieur au taux d’intérêt prévu à l’article 39, 1-3° du même Code à apporter la preuve que ce taux n’est pas excessif au regard du taux du marché.
- Exceptions
Conformément à l’article 212, II-2 du CGI, le mécanisme de sous-capitalisation prévu au II-1 du même article ne s’applique pas aux intérêts dus à raison des sommes ayant servi à financer :
– des opérations de financement réalisées dans le cadre d’une convention de gestion centralisée de la trésorerie d’un groupe par l’entreprise chargée de cette gestion centralisée ;
– l’acquisition de biens donnés en location dans les conditions prévues à l’article L 313-7, 1 et 2 du Code monétaire et financier.
Le dispositif de lutte contre la sous-capitalisation ne s’applique pas non plus aux intérêts dus par les établissements de crédit mentionnés à l’article L 511-9 du Code monétaire et financier.
Ces trois exceptions sont donc conditionnées soit par la nature juridique de l’entreprise bénéficiaire des sommes mises à disposition par des sociétés liées (des établissements de crédit), soit par la nature de l’activité ou de l’opération à laquelle sont affectées les avances faites par des sociétés liées (la gestion centralisée de la trésorerie ou des opérations ponctuelles de crédit-bail).
- Intérêts dus par les établissements de crédit
Sont placés hors du champ d’application du dispositif de sous-capitalisation, les établissements de crédit mentionnés à l’article L 511-9 du Code monétaire et financier, c’est-à-dire les établissements de crédit agréés en qualité de banque, de banque mutualiste ou coopérative, de caisse municipale, de société financière ou d’institution financière spécialisée. A cet égard, il est rappelé que les établissements de crédit sont des personnes morales qui effectuent à titre de profession habituelle des opérations de banque au sens de l’article L 311-1 du Code monétaire et financier (lesquelles comprennent la réception de fonds du public, les opérations de crédit, ainsi que la mise à la disposition de la clientèle ou la gestion de moyens de paiement) ainsi que des opérations connexes à leurs activités de banque, au sens et dans les conditions des articles L 311-2 et L 511-2 de ce même Code. En revanche, ne sont pas concernées par cette exception les compagnies financières définies à l’article L 517-1 du Code monétaire et financier, de même que les compagnies financières holdings mixtes mentionnées à l’article L 517-4 du même Code.
En application des articles L 511-22 et L 511-24 du Code monétaire et financier, les succursales en France des établissements de crédit ayant bénéficié des procédures communautaires de reconnaissance mutuelle sont soumises aux dispositions du même Code applicables aux établissements de crédit, à l’exception des articles L 511-10, L 511-14, L 511-35 et L 511-38 à L 511-40 du Code précité. Dans ces conditions, les succursales en France d’établissements de crédit ayant leur siège dans d’autres Etats membres sont également visées par cette exception. Toutefois, il est rappelé que cette exclusion des succursales d’établissement de crédit du dispositif de sous-capitalisation ne fait pas obstacle à la possibilité pour les services de contrôle d’analyser la capitalisation, et éventuellement de dénoncer son caractère insuffisant. En effet, la répartition des charges financières entre établissement français et siège étranger doit en tout état de cause rester conforme au principe de territorialité, tel qu’il est posé par l’article 209-I du CGI et l’article « Bénéfices des entreprises » des conventions fiscales (article 7 du modèle de l’OCDE) et ses commentaires relatifs à la détermination des bénéfices imputables aux établissements stables.
- Opérations de crédit-bail et assimilées
Sont visées les sommes mises à disposition du crédit-bailleur par des entreprises liées en vue de financer une opération ponctuelle de crédit-bail entrant dans le champ des dispositions de l’article L 313-7, 1 et 2 du Code monétaire et financier, c’est-à-dire portant sur des biens d’équipement ou du matériel d’outillage, ou des biens immobiliers à usage professionnel.
Nota. – La répétition de telles opérations relève, conformément aux dispositions combinées des articles L 313-1 et L 511-1 du Code monétaire et financier, de la seule compétence des établissements de crédit.
Compte tenu des similitudes que présentent avec les opérations de crédit-bail les contrats de partenariat public-privé définis par l’ordonnance 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat, il sera admis que les sommes mises à disposition des sociétés titulaires de tels contrats par des sociétés qui leur sont liées puissent bénéficier de l’exception prévue pour les opérations de crédit-bail à l’article 212, II-2, 2° du CGI, lorsque ces sommes sont employées à l’acquisition, à la construction, ou à la transformation des investissements, ouvrages ou équipements publics objets du contrat.
Pour pouvoir être réputées affectées au financement de l’opération de crédit-bail, les sommes mises à disposition par les entreprises liées devront réunir les caractéristiques suivantes :
– la décision de mise à disposition des sommes par les entreprises liées au crédit-bailleur devra comporter les principales caractéristiques de l’opération de crédit-bail que ces sommes sont destinées à financer (identification du bien financé, des parties au contrat de crédit-bail, de la durée de celui-ci, du prix de levée d’option et des possibilités de levée d’option anticipée avec leurs modalités) ;
– le remboursement des sommes aux sociétés liées devra s’opérer au moins au même rythme que le versement de la fraction des loyers de crédit-bail correspondant à l’amortissement du capital et être réalisé en intégralité lors de la levée d’option intervenant au terme du contrat de crédit-bail ou de façon anticipée ;
– la mise à disposition des sommes devra intervenir concomitamment au versement des acomptes sur la commande et du solde lors de la réception du bien donné à bail.
- Activité de gestion de la trésorerie
En application de l’article 212, II-2 du CGI, les entreprises chargées au sein d’un groupe de la gestion centralisée de la trésorerie du groupe sont exclues du dispositif de sous-capitalisation à raison des intérêts servis aux sociétés liées dans le cadre de la convention de gestion centralisée de trésorerie. Cette exception ne s’applique donc qu’à la seule centrale de trésorerie (ou aux seules centrales de trésorerie dans l’hypothèse ou le groupe en comporterait plusieurs) et non à l’ensemble des sociétés du groupe ayant adhéré à la convention de gestion centralisée de trésorerie. En d’autres termes, cette exception ne vise pas les intérêts dus à la centrale de trésorerie par les entreprises liées à raison de la mise à disposition des sommes dont elles ont pu bénéficier en exécution de la convention de trésorerie.
La loi bancaire du 24 janvier 1984 a admis la possibilité de créer au sein d’un groupe une société pivot, généralement dénommée « centrale de trésorerie » (mais n’ayant pas le statut d’établissement de crédit agréé), spécialisée dans les activités de financement et de trésorerie du groupe. L’exception relative aux activités de gestion centralisée de trésorerie vise les seules centrales de trésorerie non agréées en tant qu’établissements de crédit.
Pour l’application des dispositions de l’article 212, II-2, une centrale de trésorerie s’entend d’une société d’un groupe ou d’une succursale de l’une d’entre elles ayant notamment pour objet de recevoir, de manière effective, des flux de trésorerie de la part des sociétés du groupe liées à elle par un accord conventionnel et de répondre aux besoins de trésorerie de ces mêmes sociétés.
Cette exception s’applique sous réserve que les opérations réalisées par la centrale de trésorerie soient réalisées dans le cadre d’un accord conventionnel de centralisation de la gestion de la trésorerie signé par toutes ou partie des sociétés du groupe. Cette convention doit définir les missions de la centrale de trésorerie qui peuvent consister à placer ou à redistribuer au sein des sociétés du groupe, selon leurs besoins, les surplus de trésorerie des autres sociétés du groupe, à fournir des garanties aux sociétés du groupe souhaitant emprunter à l’extérieur, à centraliser les emprunts du groupe. Cette convention doit en principe définir les modalités d’intervention de la centrale de trésorerie et les taux de rémunération pratiqués.
Elle s’applique également sous réserve que seules puissent adhérer à cette convention les sociétés qui sont contrôlées directement ou indirectement, au sens de l’article L 511-7, I-3 du Code monétaire et financier, par une même société, ainsi que cette société elle-même. A cet égard, une société est présumée en contrôler une autre si l’une des conditions suivantes est remplie :
– elle détient directement ou indirectement une fraction de capital lui conférant la majorité des droits de vote dans les assemblées générales de cette autre société ;
– elle dispose à elle seule de la majorité des droits de vote dans cette société en vertu d’un accord avec d’autres sociétés ou actionnaires ;
– elle détermine, en fait, par les droits de vote dont elle dispose, les décisions dans les assemblées générales de cette autre société ; il en est notamment ainsi lorsque le capital est dispersé et qu’une participation limitée suffit à l’exercice d’un contrôle.
Le contrôle peut aussi résulter, à défaut de participation majoritaire, de l’exercice d’une influence significative se traduisant par la participation effective à la gestion de l’autre société.
◼ Intérêts concernés par l’exclusion du dispositif de sous-capitalisation. – Il s’agit des intérêts qui rémunèrent les sommes :
– mises à disposition de la centrale de trésorerie par des entreprises liées, au sens de l’article 39, 12 du CGI, parties à la convention de trésorerie, en application de cette même convention ;
– et qui ne sont pas utilisées par la centrale de trésorerie pour financer ses autres activités, lorsque celle-ci n’a pas pour objet exclusif cette activité de gestion centralisée de trésorerie.
Ne sont donc pas exclus du champ d’application du dispositif de sous-capitalisation les intérêts dus par la centrale de trésorerie à raison des sommes qui soit ont été mises à sa disposition par des sociétés liées non parties à l’accord de trésorerie, soit qui sont affectées à une activité autre que celle résultant de la mise en œuvre de l’accord conventionnel de gestion centralisée de la trésorerie. A titre d’exemple, lorsqu’une centrale de trésorerie exerce également une activité de holding et qu’une fraction des avances reçues dans le cadre de la convention de trésorerie est utilisée pour le financement de titres immobilisés, ces avances et les intérêts correspondants sont soumis aux dispositions de l’article 212, II-1 du CGI.
En comptabilité, les flux financiers résultant de l’accord conventionnel doivent être enregistrés dans des comptes spécifiques, de manière à pouvoir être suivis distinctement au niveau de chaque société partie à l’accord. Ces comptes spécifiques peuvent prendre la forme de comptes courants.
CHAPITRE II. – LES IMPACTS MAJEURS DE LA GRANDE REFORME FISCALE OUTRE-RHINOISE DE 2008
Décidée en 2007, la réforme fiscale allemande – mis en œuvre en janvier 2008 – a pour principaux objectifs d’installer en Allemagne un environnement plus attractif pour l’investissement – notamment par l’abaissement du taux de l’impôt sur les sociétés – d’une part, et d’éviter l’érosion de la matière imposable – notamment par la réforme du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation – d’autre part.
SECTION I. – Le taux de l’impôt sur les sociétés
Depuis la réforme fiscale de 2008, le taux de l’impôt sur les sociétés allemand est passé de 25% à 15%. Aussi, en une année, l’abaissement du taux était-il de 10 points. Ce nouveau taux de l’IS s’applique à tous les exercices clos à compter du 1er janvier 2008.
A l’impôt sur les sociétés, s’ajoute la contribution additionnelle au taux de 5,5% dont l’assiette est constituée par ledit impôt. Nonobstant le fait que cette contribution ait été instaurée pour financer la reconstruction de l’ex-RDA, elle est quand même restée en vigueur.
En multipliant les deux taux, on a le taux effectif de l’impôt sur les sociétés qui est de 15,825%.
En France, il existe deux taux d’impôt sur les sociétés. Il y a d’un côté, le taux normal qui est de 33,1/3% et d’un autre côté, le taux réduit de 15% destiné aux Petites et Moyennes Entreprises, qui s’applique dans limite des 38 120 premiers euros de bénéfice.
SECTION II. – La réforme du dispositif anti-sous-capitalisation
Tirant les conséquences de l’arrêt « Lankhorst-Hohorst Gmbh » de la Cour de justice des communautés européennes, le législateur allemand a reformé le régime afférent à la lutte contre la sous-capitalisation.
- 1. – Un plafond pour la déductibilité des intérêts : 30% de l’EBITDA
Le nouveau dispositif s’applique à toutes les charges financières d’une entreprise, importe peu la qualité de l’emprunteur (filiale ou établissement de crédit, etc.). Il y a là une première grande différence avec le régime français en matière de sous-capitalisation, qui, comme il a été précisé ci-avant, ne concerne que les avances intra-groupe. En outre, toutes les charges d’intérêts sont intégralement imputables à hauteur des produits d’intérêts perçus. Quant à l’excédent, il est également déductible intégralement dès lors qu’il ne dépasse pas un seuil égale à 3 millions €. En cas de dépassement de cette limite, le régime anti-sous-capitalisation s’applique dès le premier euro. La somme en surplus n’est déductible qu’à hauteur de 30% de l’Earning before interest tax depreciation and amortization (EBITDA) fiscal de la société en cause. L’EBITDA fiscal ou encore l’EBITDA compensable est défini par le résultat fiscal de la société avant les impôts (Impôt sur les sociétés et Taxe professionnelle), les dotations aux amortissements et les charges d’intérêts nettes. Quid alors de la partie de la charge d’intérêt non déductible ? Elle est indéfiniment reportable sur les exercices suivants jusqu’à épuisement du report. A la différence du droit français, aucun mécanisme d’érosion ne s’applique au montant reporté. En droit français, A compter du deuxième exercice suivant celui au titre duquel les intérêts ont été différés, le solde d’intérêts différés non imputés à l’ouverture de chaque exercice subit une décote de 5 %. Les intérêts différés correspondant à ces 5 % de décote ne peuvent plus être déduits du résultat imposable et sont donc définitivement perdus. Donc, le report des intérêts non-déduits se fait dans les mêmes conditions que les déficits ordinaires, et sous les mêmes réserves (notamment la remise en cause des déficits reportables en cas de cession de titres).
- 2. – La remise en cause des déficits reportables en cas de cession de titres
Suite à la réforme fiscale de 2008, le droit de reporter les intérêts excédents le seuil de 3 millions € dans le cadre des règles de lutte contre las sous-capitalisation est remis en cause :
– en cas de cession de parts ou d’actions représentant plus de 25% mais pas plus de 50% du capital, des droits de vote ou de toute autre droit participatif dans une société de capitaux allemande, les pertes et intérêts reportables de l’entité cédée sont amenuisés à hauteur de la quotité des titres transférés. Ainsi, une cession de 30% des titres conduit à une remise en cause de 30% des sommes reportables ;
– au-delà de 50% de titres transférés, les reports sont intégralement remis en cause ;
– les cessions indirectes sont aussi prises en considération.
De tout ce qui vient d’être exposé, on peut sans doute déduire que les règles allemandes afférentes à la remise en cause des déficits reportables sont assez rigoureuses.
CHAPITRE III. – LES AMELIORATIONS POUVANT ÊTRE APPORTEES A LA LEGISLATION FRANCAISE DE LUTTE CONTRE LA SOUS-CAPITALISATION
SECTION I. – Déductibilité des intérêts visés par le dispositif de lutte contre la sous-
capitalisation et limitation du taux d’intérêt
En application de l’article 212, I du CGI, les intérêts afférents aux avances consenties par une entreprise liée sont déductibles dans la limite de ceux calculés d’après le taux que l’entreprise emprunteuse aurait pu obtenir d’établissements ou d’organismes financiers indépendants dans des conditions analogues, s’il est supérieur au taux de référence défini à l’article 39, 1-3°.
Nota. – La notion d’intérêts renvoie à l’ensemble des rémunérations afférentes aux sommes mises à disposition par des entreprises liées dans la limite de celles de ces rémunérations qui sont prises en compte pour la détermination du taux prévu à l’article 39, 1-3° du CGI.
Les dispositions de l’article 212, I instaurent donc un mécanisme de preuve contraire permettant aux entreprises, lorsque le taux servi est supérieur au taux de référence défini à l’article 39, 1-3°, de justifier de la normalité de ce taux. Le recours à ce mécanisme de preuve contraire est ouvert pour les seules avances accordées par les entreprises liées. En d’autres termes, les avances accordées par des associés soumis à l’IS qui ne seraient pas liés au sens de l’article 39, 12 du CGI, tels que les associés minoritaires qui ne sont pas placés sous le contrôle d’une même tierce personne que l’entreprise dans laquelle ils détiennent des droits, les associés minoritaires ne détenant pas le pouvoir de décision, sont déductibles dans la limite du seul taux de référence défini à l’article 39, 1-3°.
Ainsi, deux situations doivent désormais être distinguées pour déterminer le taux d’intérêt plafond servi aux avances consenties par des entreprises liées :
– soit l’entreprise rémunère les sommes mises à sa disposition par des entreprises liées à un taux d’intérêt inférieur ou égal à celui prévu par l’article 39, 1-3°, dans ce cas le taux d’intérêt sera présumé normal ;
– soit le taux pratiqué est supérieur à la référence ci-dessus, dans cette hypothèse la société pourra justifier de la normalité de ce taux en apportant la preuve que ce taux n’est pas excessif au regard du taux qu’elle aurait pu obtenir auprès d’établissements ou d’organismes financiers indépendants dans des conditions analogues.
Les critères retenus pour déterminer si le taux d’intérêt appliqué lors d’une opération d’avance de fonds est conforme aux conditions du marché correspondent à ceux fixés par la jurisprudence (Conseil d’Etat, 7octobre 1988, SARL Etablissement Pierre Deveugle c/ Ministre de l’Economie, des Finances et du Budget, Aff. n° 50256).
Cependant, pour plus de sécurité juridique et afin d’éviter le cas échéant des discussions avec les services de contrôle, on peut regretter que l’administration n’ait pas retenu un indice de référence du marché en deçà duquel les prêts consentis auraient pu être regardés comme normaux.
SECTION II. – L’instruction administrative définitive afférente aux nouvelles
dispositions du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation
Comme il a été déjà précisé ci-avant (v. supra : Titre II – Chapitre II), les intérêts servis à une entreprise liée au sens de l’article 39, 12 du CGI à raison des sommes laissées ou mises à disposition dont le remboursement est garanti soit par une sûreté accordée par une entreprise liée au débiteur, soit par une entreprise tierce dont l’engagement est lui-même garanti par une sûreté accordée par une entreprise liée au débiteur, entrent dans le champ d’application du dispositif anti-sous-capitalisation.
Cependant, suite à la publication au Bulletin Officiel des Impôts le 5 janvier 2012 de l’instruction 4-H-3-11 – instruction portant commentaire du nouveau dispositif de lutte contre la sous-capitalisation, issu de l’article 12 de la loi de finances pour 2011 – de nombreuses interrogations ont surgi.
Sans doute, on peut se poser la question de savoir la signification de l’expression « sûreté ». En effet, si le projet d’instruction avait prévu une liste exhaustive des sûretés personnelles visées : le contrat de cautionnement au sens de l’article 2288 du Code civil, les garanties autonomes dans le sens donné par l’article 2321 du même Code, ainsi que certaines lettres de patronage au sens de l’article 2322 mais revêtue d’une obligation de résultat, l’Administration a, dans l’instruction citée ci-dessus, ajouté l’expression « notamment » avant d’énumérer les sûretés personnelles citées ci-avant. Aussi, les contribuables sont-ils dans une situation d’insécurité juridique. Ils ne savent pas exactement quelles sont les sûretés personnelles pouvant faire entrer un prêt dans le champ d’application du II de l’article 212 du CGI.
Par ailleurs, il semble que l’Administration retient la solidarité comme étant l’une des sûretés personnelles entrant dans le champ d’application de l’article 212, II du CGI. En effet, elle a ajouté dans l’instruction précitée une section afférente au « cas des co-débiteurs solidaires ». L’Administration admet que lorsqu’une clause du contrat prêt stipule un plafond de solidarité qui est propre à chaque co-emprunteur, la fraction de l’emprunt considérée comme des avances laissées ou mises à disposition par des entreprises liées sera égale au rapport existant entre le montant des plafonds de garantie accordée par les autres co-débiteurs et le montant total de l’emprunt. De telle position n’est pas à l’abri du critique du fait que l’Administration considère que si un prêt a été passé entre un établissement de crédit et plusieurs sociétés liées, chaque société est présumée avoir souscrit à titre personnel la quote-part de l’emprunt qui lui est octroyée.
CONCLUSION GENERALE
Bien que toute conclusion soit périlleuse, et nécessairement partielle ou partiale, Trois remarques peuvent être faites au terme de tout ce qui vient de précéder.
D’une part, et cette constatation n’étonnera pas de la part d’un juriste, des règles sont nécessaires. Le droit n’est ni un épiphénomène, comme l’affirment les marxistes, ni un obstacle au développement optimum des relations d’affaires, comme le prétendent les ultralibéraux. Bien au contraire le législateur doit fixer des règles d’action, sans lesquelles il n’y aurait ni sécurité des transactions ni même véritable liberté d’entreprendre.
Mais l’état actuel du droit fiscal n’est pas satisfaisant. Les règles sont de plus en plus détaillées, de plus en plus instables et d’une qualité technique qui se dégrade sans cesse. Il arrive aussi qu’elles se superposent ou se contredisent, notamment sous l’influence du droit communautaire. Faute de principes durables, le droit fiscal devient un droit conjoncturel, un peu comme le droit des affaires. Il est de plus en plus difficile à interpréter et même à connaître.
Enfin, dans la conduite globale des affaires d’une entreprise, l’optimisation fiscale est une pratique qui va sans dire. Notamment parce que la fiscalité génère des coûts relativement conséquents, surtout pour les grandes entreprises. Un constat qui n’est plus à démontrer. Cependant, dans la quête de la voie fiscale la plus avantageuse, il est essentiel d’avoir une certaine maîtrise des règles fiscales en vigueur.
TABLE DES MATIERES
Sommaire 1
Introduction 2
PARTIE I – LA SOUS-CAPITALISATION DES ENTREPRISES, UN MOYEN
D’OPTIMISATION FISCALE
SOUS-PARTIE I – LE CONCEPT : OPTMISATION FISCALE 5
Chapitre I – Distinction de l’optimisation fiscale
des autres pratiques d’économie d’impôt 6
Section I. – L’optimisation fiscale 6
- 1. – Définition 6
- 2. – Avantages principaux de l’optimisation fiscale pour l’entreprise 6
- A. – La fiscalité de l’entreprise et la concurrence
- B. – La fiscalité de l’entreprise et sa trésorerie
Section II. – L’évasion et la fraude fiscales 7
- 1. – Evasion fiscale 7
- 2. – Fraude fiscale 7
Chapitre II – Les bases fondamentales du tax planning 9
Section I. – Respect de la règlementation fiscale en vigueur 9
- 1. – Evitement de la déduction de pseudo charges d’exploitation 9
- 2. – Respect des conditions afférentes aux avantages fiscaux 9
- 3. – Respect des règles afférentes à la déclaration des revenus
générés par l’entreprise 10
Section II. – Tenue d’une comptabilité régulière 10
Section III. – Respect des règles touchant la facturation 10
Chapitre III – Les instruments de lutte contre l’optimisation fiscale 12
Section I. – L’abus de droit 12
Section II. – L’acte anormal de gestion 13
SOUS-PARTIE II – LA SOUS-CAPITALISATION 14
Chapitre I – Généralités : Sous-capitalisation 15
Section I. – Notion de sous-capitalisation 15
Section II. – Régime juridique de la sous-capitalisation 16
- 1. – Présomption de sous-capitalisation 16
- A. – Ratio d’endettement 16
- B. – Ratio de couverture d’intérêts 17
- C. – Ratio d’intérêts servis par des entreprises liées 19
- 2. – Mécanisme de la preuve contraire 19
- A. – Ratio d’endettement global de l’entreprise 19
- B. – Ratio d’endettement global du groupe 20
- C. – Modalités pratiques d’application de la preuve contraire 23
- 3. – Incidences de la sous-capitalisation 23
- A. – Quote-part d’intérêts différés 23
- B. – Modalités de déduction des intérêts différés 24
- C. – Situation des sociétés de personnes 26
- D. – Application du dispositif dans un groupe fiscal 27
Chapitre II – L’extension du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation
par la loi de finances pour 2011 31
Section I. – Les sommes laissées ou mises à la disposition par des entreprises liées 31
- 1. – Principe 31
- 2. – Exclusions 32
- A. – Exclusions explicites légales 32
- B. – Autres exclusions 32
Section II. – Les sûretés visées selon le projet d’instruction administrative 4-H-3-11 32
- 1. – Les sûretés personnelles 33
- 2. – Les sûretés réelles 33
PARTIE II – VERS UN DIFFERENTIEL DE DROIT COMPARE ENTRE LES LEGISLATIONS FRANCAISE ET ALLEMANDE
Chapitre I – Les points de ralliement entre les deux législations 36
Section I. – Le dispositif de limitation de la sous-capitalisation avant
la loi de finances pour 2006 36
- 1. – Dispositif facilement contournable 36
- 2. – Remise en cause prétorienne du dispositif 37
- A. – Remise en cause par le Conseil d’Etat 37
- B. – Remise en cause par la Cour de justice des communautés
européennes (CJCE) du dispositif allemand d’anti-sous-capitalisation 38
Section II. – Le dispositif de limitation de la sous-capitalisation suite
à la loi de finances pour 2006 38
- 1. – Elargissement du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation 38
- A. – Intérêts concernés – Principes 38
- B. – Exceptions 39
- – Intérêts dus par les établissements de crédit 39
- – Opérations de crédit-bail et assimilées 40
- – Activité de gestion de la trésorerie 40
Chapitre II – Les impacts majeurs de la grande réforme
fiscale outre-Rhinoise de 2008 43
Section I. – Les taux de l’impôt sur les sociétés 43
Section II. – La réforme du dispositif anti-sous-capitalisation 43
- 1. – Un plafond pour la déductibilité des intérêts : 30% de l’EBITDA 43
- 2. – La remise en cause des déficits reportables en cas de cession de titres 44
Chapitre III – Les améliorations pouvant être apportées à la législation
française de lutte contre la sous-capitalisation 45
Section I. – Déductibilité des intérêts visés par le dispositif de lutte contre la
sous-capitalisation et limitation du taux d’intérêt 45
Section I. – L’instruction administrative définitive afférente aux nouvelles
Dispositions du dispositif de lutte contre la sous-capitalisation 45
Conclusion générale 47
Table des matières 48
Bibliographie 51
BIBLIOGRAPHIE
* Ouvrages
– Vincent BESANCON, Optimisation fiscale et abus de droit : l’exemple des entreprises dans la jurisprudence depuis 1994, Thèse en vue de l’obtention du DEA Droit des affaires, Université ROBERT SCHUMAN STRASBOURG III, 1999 ;
– Maurice COZIAN, Les grands principes de la fiscalité des entreprises, Litec, 4ème éd. ;
– Philippe KENEIPE, Trésorerie et finance d’entreprise, De Boeck & Larcier, 1997 ;
– Francis LEFEBVRE, Mémento Groupe de sociétés 2011-2012 ;
– Jacques NOYER, Procédures de contrôle fiscal, L’Harmattan ;
– OCDE, Concurrence fiscale dommageable – Un problème mondial, 1998 ;
– OCDE, Thin Capitalization, Rapport adopté le 26 novembre 1986 ;
– OECD Publishing, Etudes économiques de l’OCDE : Allemagne 2008 ;
– Georges VIRASSAMY, L’entreprise et l’illicite : Colloque des 29 et 30 novembre 2001, L’Harmattan.
* Articles spéciaux
– Huber BRESSON, Sous-capitalisation : une instruction insatisfaisante, Revue Option Finance, 2012 ;
– François HELLIO, Quelques évolutions probables de la fiscalité des entreprises en Allemagne dans le contexte de la convergence franco-allemande, Revue Option Finance, 2012 ;
– Philippe MARINI, Projet de loi de finances pour 2006 : Les moyens des politiques publiques et les dispositions spéciales (Deuxième partie de la loi de finances) – Examen des articles – Volume 1, rapport, Rapport général n° 99 (2005-2006) déposé le 24 novembre 2005 ;
– Patrick MICHAUD, Liberté de gestion et financement de l’entreprise, in Etudes fiscales Internationales ;
– Price Waterhouse Coopers, Fiscalité allemande des entreprises, 3ème éd., 2011.
* Codes et textes
– Code général des impôts ;
– Code monétaire et financier ;
– Instruction administrative du 31 décembre 2007, 4 H-8-07, n° 133 ;
– Instruction administrative du 27 décembre 2011, 4 H-3-11, Impôt sur les sociétés – Dispositions particulières – Déduction des intérêts – Sous-capitalisation, (projet et version définitive publiée au B.O.I. le 5 janvier 2012) ;
– Livre des Procédures Fiscales ;
– Livre vert sur la coopération franco-allemande – Points de convergence sur le fiscalité des entreprises ;
– Loi 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 ;
– Loi n° 2010-1657 du 29 décembre de finances pour 2011 ;
– Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne.
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