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Les stratégies narratives dans le roman « A Mercy » de Toni Morrison

Thème : Les stratégies narratives dans le roman « A Mercy » de Toni Morrison

 

Introduction

 

A Mercy (traduit en français par « un don »), est le neuvième livre de la célèbre écrivaine afro-américaine Toni Morrison. Il met en scène la vie d’une jeune esclave noire : Florens qui, offerte par sa mère à un cultivateur américain du nom de Jacob Vaark, ressentira de l’abandon à cause de cet acte perpétré alors qu’elle avait à peine 14 ans. 

 

Son départ vers le nouveau Monde et son arrivée dans la gigantesque ferme de Jacob lui permettront de rencontre et de côtoyer quotidiennement trois femmes avec lesquelles elle nouera des liens ambigus parsemés à la fois  de beauté et d’horreur. Ce livre, narrant le destin des quatre femmes esclaves de Jacob sonne comme un appel au secours, comme la description de la détresse de chacun des personnages, comme un sacrifice tendant vers l’abandon (Florens) et par la recherche d’un salut.

 

L’approche par la narration que nous allons développer tout au long du mémoire permettra de mettre une lumière sur l’histoire d’une Amérique primitive et tortionnaire des années 1680 dont le commerce et la vie sont basés sur l’esclavage et l’emploi démesuré de mains d’œuvres humaines. Etudier les voix narratives dans le roman permettra de comparer le style d’écriture mixte employé par l’auteure : mélange de stratégies narratives occidentales et afro-américaines ou africaines. Une comparaison entre la culture américaine à cette époque, la culture africaine, la culture afro-américaine et la culture occidentale est également perceptible. 

 

Plan

 

  1. Généralités :

 

  1. Brève biographie et actualité sur l’auteur
  2. Résumé du livre 
  3. La culture afro-américaine au centre du livre
  4. Le patrimoine restant chez les esclaves

 

  1. Etude du roman :

 

  1. Les thématiques du livre :
  1. Le sacrifice
  2. L’esclavage
  3. L’abandon et la relation mère-fille
  4. Le traumatisme vécu par chaque personnage du livre
  1. L’histoire des esclaves : Lorens, Sorrow, Lina et Rebekka
  2. L’esclavage et la lutte pour la survie

 

III- Les stratégies narratives dans le livre

  1. Les différentes structures narratives :

1.1. Structure narrative afro-américaine : La signification de la culture noire-américaine dans le roman

1.2. Structure narrative occidentale : 

a-   Utilisation du temps narratif :

  • La narration ultérieure
  • La narration antérieure
  • La narration simultanée

 

b-   Focalisations :

  • Focalisation zéro
  • Focalisation interne

 

  1. Les niveaux narratifs
  • Utilisation de l’analepse

 

  1. La vitesse narrative
  • La pause
  • La scène
  • Le sommaire

 

  1. La fréquence évènementielle
  • Le mode itératif
  • Le mode répétitif

 

  1. Les voix narratives
  • La narration homodiétégtique et autodiégétique
  • La narration hétérodiégétique et extradiégétique

 

  1. La place des personnages dans la narration :
    1. Une narration focalisée sur les femmes esclaves :
  1. Florens comme narratrice, personnage principale et intrigue de l’histoire
  2. La place de la femme et son rôle dans l’intrigue du roman :
  3. La mère de Florens obligée de donner sa fille à Jacob
  4. Rebekka, une épouse esclave et une européenne au bon cœur
  5. Lina, la servante bienveillante
  6. Sorrow, une « hybride » peu commune

 

  1. Le racisme, l’esclavage et l’outrage à la personne comme source de narration

 

 

INTRODUCTION 

 

A Mercy, le neuvième roman de Toni Morrison, est un chef d’œuvre relevant à la fois de la culture, de l’histoire et de la narration. L’auteure, une afro-américaine couronnée de succès de par ses romans phares tels que Song of Solomon et Beloved , y raconte, comme dans la plupart de ses œuvres (sinon toutes), l’histoire du peuple afro-américain opprimé et voué à l’esclavage et le racisme dans les années 1670.

 

A Mercy n’échappe est un carrefour où se rencontrent différentes cultures représentées par quatre femmes et un homme qui vont former les personnages principaux de l’histoire. Tout se passe dans la gigantesque ferme de l’Européen Jacob Vaark et de sa femme Rebekka et tourne autour du destin d’une jeune esclave noire nommée Florens et des autres esclaves qui, comme elle, entretiennent la demeure de Vaark et lui servent de bonnes, à savoir Lina, la servante amérindienne bienveillante et Sorrow, une « hybride » peu sociable.

 

Dans ce roman, Toni Morrison fera grâce de son talent de « Prix Nobel de littérature 1993 » pour rendre l’histoire non seulement vivante mais également transperçante, bouleversante et presque réelle. La jeune fille d’une quinzaine d’années au cœur de l’intrigue sera, dès le début jusqu’à la fin de l’histoire, la narratrice et le personnage principal du roman. Entre lois en défaveur des noirs, traite des esclaves martyrs du peuple afro-américain, le lecteur assiste également à une démonstration de sentiments et de ressentiments de Florens qui ne comprendra jamais la raison pour laquelle sa mère l’a offerte en esclavage à un Blanc et ne lui pardonnera jamais cet acte d’abandon.

 

L’écriture de Toni Morrison sera passée « aux cribles » afin d’en dégager les structures narratives. Nous nous intéresserons aux aspects cultuels, historiques et significatifs de la romancière qui se plaît souvent à mélanger deux styles opposés : l’occidental et l’afro-américain.

 

Les 167 pages illustrant le livre sont donc centrés sur le destin de Florens, mais aussi sur la vie de chacun des personnages principaux cités précédemment. Afin de mieux cerner le livre et l’écriture de Toni Morrison, mais aussi de comprendre l’histoire et le personnage de Florens, nous allons nous livres à une étude des stratégies narratives dans le roman. D’où le thème : « Etude des stratégies narratives dans le roman « A Mercy » de Toni Morrison ». 

 

Cette étude nous permettra de détecter les différents styles d’écriture dont Toni Morrison a usé afin de produire ce chef d’œuvre littéraire. En effet, le livre ruisselle de stratégies narratives à la fois afro-américaines et occidentales, ce qui en fait une véritable encyclopédie culturelle.

 

Pour parvenir à nos fins, nous allons étaler ce mémoire sur trois grandes parties distinctes. En premier lieu, nous traiterons les généralités en fournissant une brève biographie de l’auteure, un résumé du livre, un aperçu de la culture afro-américaine dépeinte dans le livre et une esquisse du patrimoine restant chez les esclaves. 

 

Nous nous enfoncerons dans les détails de notre travail dans la seconde partie intitulée « étude du roman ». Il sera question ici des différentes thématiques du livre, de l’histoire de Lorens, Sorrow et Lina, les trois principales esclaves de Vaark et de l’esclavage et de la lutte pour la survie à laquelle elles se livrent jour et nuit.

 

C’est dans la dernière partie de notre étude que nous nous focaliserons amplement sur les différentes stratégies narratives constituant le roman. Dans cette partie, nous aborderons les structures narratives et la place des personnages dans la narration.

 

L’approche par la narration que nous allons développer tout au long du mémoire permettra de mettre une lumière sur l’histoire d’une Amérique primitive et tortionnaire des années 1680 dont le commerce et la vie sont basés sur l’esclavage et l’emploi démesuré de mains d’œuvres humaines. Etudier les voix narratives dans le roman permettra de comparer le style d’écriture mixte employé par l’auteure : mélange de stratégies narratives occidentales et afro-américaines ou africaines. Une comparaison entre la culture américaine à cette époque, la culture africaine, la culture afro-américaine et la culture occidentale est également perceptible. Nous tenterons donc une approche subtile par la narration. 

  • Généralités :

  1. Brève biographie et actualités sur l’auteur

 

Chloe Anthony wofford, alias Toni Morrison, est une auteure afro-américaine née aux Etats-Unis le 18 février 1931. Issue d’une famille modeste, elle reste très attachée à sa sœur et à sa grand-mère pour qui elle invente des histoires ou des rêves fantastiques afin que celle-ci les traduise et les transforme en chiffres qu’elle utilisera pour jouer à la loterie. Sa jeunesse se passe sans encombre et sera marquée par la ségrégation contre les noirs et le racisme qui sera le thème le plus appréhendé par ses nombreux livres. D’ailleurs, tous ses ouvrages relateront de la condition de la race noire : du racisme, de la ségrégation, de l’esclavage, de la quête de liberté, de la recherche d’identité culturelle, etc.

 

Son premier roman intitulé « The bluest eye » sort en 1969 raconte l’histoire d’une petite fille noire qui veut avoir les yeux bleus. Certes, les critiques l’accueillant sont optimistes, mais ce livre ne la propulsera pas encore au sommet et sera mal vu par les auteurs noirs à l’époque qui traitaient pour la plupart de sujets complexes et plus réalistes tels que la sociologue ou la psychologie. No découragée par le manque de succès commercial pour ce premier livre, elle sort ensuite des chefs d’œuvres dignes de ce nom qui la propulseront au sommet de son art et qui, au fil des temps, feront d’elle la première femme noire-américaine à recevoir un prix Nobel de littérature (1993) : 

 

  •  Sula, 1973 (Sula, 1992)
  • The Song Of Salomon, 1977 (Le chant de Salomon, 1996)
  • Tar Baby, 1981 (Tar Baby, 1996)
  • Beloved, 1987 (Beloved, 1989)
  • Jazz, 1992 (Jazz, 1998)
  • Paradise, 1994 (Paradis, 1998)
  • Love, 2003 (Love, 2004)
  • A Mercy, 2008 (Un don, 2009)
  • Home, 2012 (Home, 2012)

 

Home est donc le dernier roman en date pour cette écrivaine hors pair qui vient de fêter ses 82 ans février dernier et continue d’animer divers colloques, séminaires, débats et rencontre comme ceux organisés par le Musée du Louvre en 2006 portant le titre de « Etranger chez soi ». Ses œuvres sont quasi polyvalentes, allant des contes et livres pour enfants jusqu’aux essais.

 

  1. Résumé du livre 

 

“In the 1680s the Atlantic slave trade was still in its infancy. In the Americas, virulent religious and class divisions, prejudice and oppression were rife, providing the fertile soil in which slavery and race hatred were planted and took root.

 


Jacob is an Anglo-Dutch trader and adventurer, with a small holding in the harsh north. Despite his distaste for dealing in “flesh,” he takes a small slave girl in part payment for a bad debt from a plantation owner in Catholic Maryland. This is Florens, “with the hands of a slave and the feet of a Portuguese lady.” Florens looks for love, first from Lina, an older servant woman at her new master’s house, but later from a handsome blacksmith, an African, never enslaved.

 


There are other voices: Lina, whose tribe was decimated by smallpox; their mistress, Rebekka, herself a victim of religious intolerance back in England; Sorrow, a strange girl who’s spent her early years at sea; and finally the devastating voice of Florens’ mother. These are all men and women inventing themselves in the wilderness.

 


A Mercy reveals what lies beneath the surface of slavery. But at its heart it is the ambivalent, disturbing story of a mother who casts off her daughter in order to save her, and of a daughter who may never exorcise that abandonment.”

 

L’histoire se passe donc dans une Amérique antique et encore sauvage où règne l’esclavage et le commerce des hommes. La mère de Florens (dont le nom ne sera jamais dévoilé tout au long de l’histoire et qui sera désignée par sa fille par l’appellation « minha mae » signifiant « mère ») abandonne cette dernière entre les mains d’un homme blanc, blond et grand du nom de Vaark. Cet acte signe le paiement d’une dette que la femme noire devait à son maître et amant.

 

La mère de Florens, employée dans une des nombreuses plantations appartenant à Jacob Vaark, doit une dette à son patron qui lui exige de lui remettre son fils qu’elle allaite encore. Vivant dans une époque où la femme n’a pas de valeur et où les esclaves femelles sont maltraitées voire même violées, elle préfère céder sa fille qui, selon elle, a “ the hands of a slave and the feet of a Portuguese lady.”

 

Jacob Vaark cède suite aux supplications de la femme et prend la fillette avec lui. L’enfant, déroutée et comprenant peu ce qui lui arrive, voit tout son univers basculer quand elle saisit enfin l’ampleur du geste de sa mère et comprend sa situation. L’intrigue de l’histoire apparaît suite à cet acte qui est le déclencheur de tout un récit de plus de 160 pages. En voyant sa mère et son petit-frère s’éloigner, Florens voit son passé se détacher peu à peu d’elle et n’a pas de choix que de suivre son « bienfaiteur », car, contrairement à ce qu’elle croit, Jacob est son délivreur et procurera à sa mère « […] a mercy. Offered by a human. ». Le choix de la mère de Florens s’apparente à un acte de salvation car elle croit déceler en Jacob ce qu’elle ne trouve chez aucun autre homme blanc à cette époque : de l’humanité et de la considération. Contrairement à tous ceux qui regardent sa fille avec une évidence peu cachée de perversion, Jacob, lui, lui fait plutôt l’effet d’un Seigneur qui ne lui volera ni sa dignité, ni sa virginité, ni son identité.

 

Commence alors un long périple qui mènera Florens jusqu’au Maryland, voguant vers une destinée inconnue et nouvelle. Arrivée sur place, elle fait la connaissance de trois femmes qui vont partager leur quotidien avec elle : Rebekka, une femme blanche que Jacob a « importée » de Londres et qu’il a pris pour épouse, Lina, une servante amérindienne et Sorrow, une autre fille recueillie et sauvée par Vaark. Elle s’amourache également d’un jeune africain représentant, à ses yeux, la liberté car il n’est l’esclave de personne. 

 

Tour à tour, chacun des personnages sera dépeint par le narrateur qui autodiégétique qu’est Florens et des scènes quotidiennes seront narrées tout au long du roman : la vie des esclaves dans le grand domaine de Vaark, leur relation et les différentes manifestations au profit du peuple noir ou africain et des blancs pauvres et sales tels que la révolte de Bacon, la ségrégation, etc. La révolte de Bacon est un des évènements les plus marquants de l’histoire de la race noire en Amérique, aussi Toni Morrison a voulu la retranscrire pour rappeler le geste des quelques centaines de noirs africains, de serviteurs blancs et de noirs affranchis ont soulevé le régime gouvernemental de l’époque.

 

Elle s’explique dans un entretien accordé au Nouvel Observateur : « Les propriétaires, se jurant de ne jamais laisser une chose pareille se reproduire, établirent des lois, parmi lesquelles celle-ci : tout homme blanc pouvait mutiler ou tuer n’importe quelle personne noire, pour quelque raison que ce soit, à quelque moment que ce soit ? (…) Voilà de quoi nous avons hérité : on a transformé les pauvres en antagonistes. Cela donne un sens à la couleur de peau; cela permet à des Blancs pauvres comme Job d’éprouver un petit sentiment de supériorité tout simplement parce qu’ils sont blancs et pas noirs.« 

 

Dans la plantation de Jacob Vaark, seuls des esclaves importés d’Afrique servent de main d’œuvre et s’occupent de toute la culture, la population autochtone n’y est donc pas présente. 

 

  1. La  culture afro-américaine au centre du livre

 

Dans A Mercy, comme dans toutes ses œuvres, Toni Morrison accorde une place prépondérante à la culture et aux mœurs des noirs américains. Le roman à lui seul est un recueil, une sorte d’ouvrage retranscrivant le dessein de ce peuple en l’an 1680. Plusieurs passages démontrent la primitivité de leur culture et sa race africaine.

 

Nous assistons donc au peuplement de l’Amérique par les noirs-américains qui sont des natifs africains asservis et affranchis en tant qu’esclaves du peuple blanc. Florens en est un bel exemple et représente tout un peuple tyrannisé et détruit par l’esclavage et le commerce d’esclave. A l’époque où l’histoire se déroule, la culture de tabac fait rage et les cultivateurs ont recours à la traite d’esclaves afin d’obtenir des esclaves dévoués, obéissants et non payés et des récoltes massives et fructueuses.

 

Jacob échappe à la règle et présente en lui plus d’humanitude et de considération que les autres blancs. Chacun des esclaves, en partant de Lina jusqu’à Sorrow, détecte cette humanité chez lui et, par la même occasion, lui vouera du respect et de l’affection inavouées.

 

La lecture de A Mercy révèle la vie du peuple noir-africain durant l’époque de la révolte de Bacon, leurs croyances et leur mode de vie. Toni Morrison livre de nombreuses habitudes et croyances. Elles se reflètent dans l’agissement des personnages, mais également dans la narration elle-même. Le destin de Sorrow mêlé et associé çà l’eau est un exemple imparable.

 

On constate que la jeune fille est étroitement liée à cette matière qui constitue l’un des quatre éléments fondamentaux de la vie. Son arrivée dans l’ « éden » de Jacob fait suite à un naufrage du bateau sur lequel elle vivait : « Before coming to the sawyer’s house, Sorrow had never lived on land. Now the memories of the ship, the only home she knew, seemed as stolen as its cargo: bales of cloth, chests of opium, crates of ammunition, horses and barrels of molasses. Even the trace of Captain was dim. After searching for survivors and food, fingering spilt molasses, from the deck straight into her mouth, nights listening to cold wind and lapping sea, Twin joined her under the hammock and they have been together ever since.”(P. 117)

 

Cette affiliation avec l’eau se poursuit quand, étant tombée enceinte, Sorrow s’est vue enlever son enfant par Lina qui l’a noyé dans l’eau : «Although Sorrow thought she saw her own newborn yawn, Lina wrapped it in a piece of sacking and set it a-sail in the widest part of the stream and far below the beavers’ dam. It had no name. Sorrow wept, but Twin told her not to. « I am always with you, » she said. That was some consolation, but it took years for Sorrow’s steady thoughts of her baby breathing water under Lina’s palm to recede.” (P.123)

 

Plus tard, alors que Lina commence à se languir de l’absence de Florens dont la missive est d’aller retrouver le « blacksmith » pour guérir sa maîtresse qui agonise de maladie sur son lit, elle va chercher Sorrow qui manque à l’appel et qui, par habitude, parle avec son enfant au bord de la rivière. Elle pense que son enfant lui parle à travers la rivière : « Where to go? She couldn’t endure the self-pity that drove Mistress to tempt harmful spirits, so she decided to look for Sorrow down by the river where she often went to talk to her dead baby.” (P. 63)

 

Toujours dans les cultures et traditions noire-américaines, nous pouvons citer les facultés du blacksmith à guérir grâce à des procédés pour la plupart primitifs, sans avoir recours à de simples médicaments. Pourtant, cette médecine sauvera la vie à deux femmes : Sorrow et Rebekka.

 

  • Guérison de Sorrow: “It was pure luck that the smithy was right there and saw her fill. He picked her up and laid her down on the pallet where he slept. Sorrow’s kce and arms were welting. The smithy touched her neck boils, then shouted. Sir poked his head out of the door

frame and Florens came running. Mistress arrived and the smithy called for vinegar. Lina went to fetch it, and when it came, he doused Sorrow’s boils and the skin of her face and-arms, sending her into spasms of pain. While the women sucked air and Sir frowned, the blacksmith heated a knife and slit open one of the swellings. They watched in silence as he tipped Sorrow’s own blood drops between her lips”. (P.125), “Riveted by that hot knife and blood medicine they deferred. Fanning and vinegar-soaked boils only.” (P.127)

 

  •        Guérison de Rebekka : “Mistress dosed her eyes. When she opened them they were glassy and she blotted them with the back of a bandaged hand. She thanked him again and again, then told Lina to prepare him something to eat.” (P. 129)

 

Nous assistons donc à un étalage très précis et instructif de la culture noire-américaine dans toute sa splendeur, que Toni Morrison a su creuser et exploiter afin d’enrichir et de rendre plus vivant le roman. Cet étalage de culture continue de nous ébahir avec les différentes présentations des patrimoines restant chez les esclaves que nous allons approfondir ci-dessous.

 

  1. Le patrimoine restant chez les esclaves

 

Chacune des femmes présentes dans la ferme de Jacob Vaark. Lina est la première à arriver sur les lieux et à entretenir le domaine jusqu’à l’arrivée de Rebekka. C’est une amérindienne ayant été recueillie par des presbytériens qui lui ont inculqué le savoir-vivre et la connaissance de Dieu. Etant esclave, elle se dévoue corps et âme à ses maîtres, entretenant la ferme avec la plus grande fermeté et autant d’amour et de passion qu’il ne lui en faut.

 

Elle garde des souvenirs et des séquelles de son village natal qui a été ravagé par la guerre et dont elle est l’unique survivante. Son caractère à la fois bienveillant, solennel et protecteur est encouragé par une éternelle méfiance envers les autres, par une sorte de sixième sens qui l’avertit du danger (Sorrow qui, selon elle, porte malheur à la ferme car les enfants de Rebekka et de Jacob sont morts juste après son arrivée et le blacksmith qu’elle craint être capable de faire du tort ou du mal à sa petite protégée Florens). Dans chacun de ces cas, ses intuitions s’avèrent exactes et se réalisent.

 

 Son origine amérindienne lui a également octroyé la possibilité d’invoquer certains esprits pour protéger ce qui lui est cher, elle est capable de chasser les mauvais esprits et possède certaines croyances telles que le fait de regarder son reflet dans un miroir qui peut attraper, voler ou prendre les âmes : « On top of a few lengths of silk lay a small mirror set in an elaborate frame, its silver tarnished to soot. « Gi’ me, » said Mistress. Lina picked up the mirror thinking, No, please. Don’t look Never seek out your own face even when well, lest the reflection drink your soul. « Hur-ee, » moaned Mistress, her tone pleading like a child’s. Helpless to disobey, Lina brought it to the lady. She placed it between the rnittened hands, certain now that her mistress will die. And the certainty was a kind of death for herself as well, since her own life, everything, depended on Mistress’ survival, which depended on Florens’ success. (P.59 et 60).

 

La croyance en deux morts est également évoquée brièvement dans le roman. Quand Florens part à la recherche du blacksmith et qu’elle demande asile pour la nuit auprès de Widow Ealing, celle-ci, en entendant parler de la souffrance de Rebekka et de sa mort imminete, fait référence à deux morts : « My Mistress is dying I say. My errand can save her. She frowns and looks toward the fireplace. Not from the first death she says. Perhaps from the second.” (P.108). 

 

Bien que le forgeron soit un homme libre, il est important d’aborder ici le savoir-faire et le savoir-guérir qu’il a pratiqué à deux reprises maintenant dans le récit. Ces méthodes, ancestrales, se révèlent être efficace contre la maladie de Sorrow mais également contre la variole.

 

  1. Etude du roman :

 

  1. Les thématiques du livre :

 

  1. Le sacrifice

 

Selon une étude menée par Emmanuelle Andrès en 2009, l’écriture de Toni Morrison ruisselle d’actes de sacrifice, que ce soit dans Beloved, dans The bluest eye ou dans A Mercy. On note la présence de personnages principaux de race noire tels que Sula, Beloved, Salomon ou Florens.

 

Nous retrouvons une quête et une soif d’identité, une recherche d’idéal et souvent une renonciation à un être ou à une chose chère comme la liberté. Dans Beloved, le sacrifice est la vie de Beloved elle-même que sa mère a ôtée afin de lui éviter les vices d’un monde esclavagiste dans lequel elle aurait grandi dans le malheur et la privation de liberté. L’acte de sacrifice est ici représenté par sa nature juste, l’idée de sacrifice étant une vie offerte au prix d’un sort favorable. 

 

A Mercy n’échappe pas à ce concept car l’héroïne : Florens, est également un sacrifice. La différence est qu’elle vit. Ce sacrifice ne sera jamais compris par la fillette, ni par la jeune fille qu’elle est devenue au fil du temps. Pour elle, il signifie abandon : “His laughter had not subsided when the woman cradling the small boy on her hip came forward. Her voice was barely above a whisper but there was no mistaking its urgency. « Please, Senhor. Not me. Take her. Take my daughter. « Jacob looked up at her, away from the child’s feet, his mouth still open with laughter, and was struck by the terror in her eyes. His laugh creaking to a close, he shook his head, thinking, God help me if this is not the most wretched business.”(P.26)

 

Bien qu’elle soit encore petite, Florens est consciente de ce qui lui arrive, d’être vendue en esclavage à un étranger sans pour autant en connaître la raison. Ets-ce de l’indifférence, de la haine ou du mépris ? Elle l’ignore. De nombreuses nuits, elle rêve de cet instant, d’une mère tenant son petit garçon par la mère, lui tournant le dos, puis essayant de lui dire quelque chose, de lui délivrer un message, en vain. Car chaque fois que la bouche de la minha mae s’ouvre, Florens feint  l’indifférence et se tourne pour ne plus voir son visage. 

 

Ces rêves, ou cauchemars sont traduits par Florens comme d’étranges circonstances : “You can think what I tell you is a confession, if you like, but one full of curiosities familiar only in dreams and during those moments when a dog’s profile plays in the steam of a kettle. (…) Stranger things happen all the time. You know. I know you know. One question is who is responsible? Another is can you read? If a pea hen refuses to brood I read it quickly and, sure enough, that night I see a minha mae standing hand in hand with her little boy, my shoes jamming the pocket of her apron. “(P.3)

 

Selon elle, ce que la minha mae tente de lui dire est important : “How they raise them to look at me hard, saying something I cannot hear. Saying something important to me, but holding the little boy’s hand.”(P.8). Mais quelle que soit son importance, elle ne le saura jamais car sa mère est aujourd’hui morte sans jamais avoir pu lui fournir l’explication rationnelle à la situation.

 

La narration ne permet pas non plus de découvrir cet acte de sacrifice qu’à la fin du livre, quand la mère de Florens explique son geste à une Florens qui ne peut plus l’entendre, quand elle tente vainement de se justifier : One chance, I thought. There is no protection but there is difference. You stood there in those shoes and the tall man laughed and said he would take me to close the debt. I knew Senhor would not allow it. I said you. Take you, my daughter. Because I saw the tall man see you as a human child, not pieces of eight. I knelt before him. Hoping for a miracle. He said yes. It was not a miracle. Bestowed by God. It was a mercy. Offered by a human. » (P.166 et 167)

 

Un indice perceptible est également l’horreur figée sur son visage quand Jacob a voulu l’emmener elle, ou son fils. Quand elle implore Jacob de prendre sa fille, celui-ci reconnaît une terreur inexplicable dans ses yeux à tel point qu’il accepte l’offre.

 

Dès lors, Florens porte en elle le fardeau de l’abandon et construit sa nouvelle vie sur ce concept. Arrivée en Amérique, le Nouveau Monde, au bout d’un voyage en bateau avec son maître, elle reste marquée par cet abandon et ses faits au point de ne pouvoir sortir un mot durant quelques jours. Cet abandon ou plutôt cet acte sacrificiel incompris comme tel, change les manières et les caractères de la jeune fille, la rendant fragile, docile et presque sans défense. 

 

La clémence et la salvation que Dieu lui a offert par les mains d’un homme lui sont étrangères. Elle se réfugie dans cet acte d’abandon jusqu’à ce que le blacksmith passe à la ferme et qu’elle oublie tout de son passé ou de son présent au profit d’un futur imaginaire et enchanteur avec lui. En se basant sur les faits réels narrés dans le livre, c’est Jacob qui l’a sauvée des griffes de l’effroyable Senhor D’Ortega qui en voudra probablement plus tard à sa virginité et la souillera à ses dépens. 

 

Au fil du récit, ce sera son amour pour le blacksmith qui la délivrera de son sentiment de mal-être. 

 

  1. L’esclavage

 

A Mercy raconte l’histoire de quatre femmes esclaves devant leur vie et leur survie à un riche cultivateur au XVIIe siècle. Selon l’ONU (Organisation des Nations Unies) (1926, 1956), l’esclavage est « l’état ou condition d’un individu sur lequel s’exercent les attributs du droit de propriété ou certains d’entre eux ». 

 

La traite des esclaves représente « tout acte de capture, d’acquisition ou de cession d’un individu en vue de la réduire en esclavage; tout acte d’acquisition d’un esclave en vue de le vendre ou de l’échanger; tout acte de cession par vente ou échange d’un esclave acquis en vue d’être vendu ou échangé, tout acte de commerce ou de transport d’esclaves ainsi que les actes conduits par des institutions et des pratiques analogues à l’esclavage : servitude pour dettes, servage, mariage forcé, etc ».

 

Les évènements politiques dans le monde entier durant cette période a accentué la pratique de l’esclavage qui consiste à force des gens à travailler pour soi sans rémunération et dans de piètres conditions. Un esclave est un être renonçant à tous ses droits et vivant dans l’ombre de son maître, accomplissant diverses tâches sans distinction et subissant parfois le mépris de ce dernier tel que les moqueries, le viol, les coups, etc.

 

Ce serait à Babylone que l’esclavage est apparu, en Mésopotamie.  Le Code d’Hammourabi (entre 1792 et 1750 avant Jésus-Christ) définirait l’esclavage sous forme d’une hiérarchisation de la société sous le règne d’Ammourabi, roi de Mésopotamie :

  • Les awīlum et muškēnum ou hommes libres
  • Les subalternes
  • Les wardum ou esclaves.

 

En ces temps, les esclaves bénéficiaient encore de quelques privilèges tels que le fait de ne jamais être séparés de leur femme et de leurs enfants. Cependant, ils encouraient la peine de mort pour chaque entrave enregistrée. Concernant la traite ou le commerce d’esclaves, l’article 7 du Code d’Hammourabi stipule que « si quelqu’un achète le fils ou un esclave d’un autre homme, sans témoin ou contrat, de l’argent ou de l’or, un esclave mâle ou femelle, un bœuf ou un mouton, un âne ou autre chose, ou s’il le prend en charge, il est considéré comme un voleur et sera mis à mort ».

 

L’article 15 confirme que « si quelqu’un vole un esclave de la cour ou un esclave affranchi il sera mis à mort ». Dans l’article 16, on découvre la mise à mort, une peine capitale très répandue à l’époque, pour ceux qui hébergeraient des esclaves en fuite. Ceux qui les livrent ont toutefois droit à une récompense de la part des maîtres de ces dernier (article 17 : que « si quelqu’un vole un esclave de la cour ou un esclave affranchi il sera mis à mort ».)

 

L’évolution de l’esclavage dans le monde entier est frappante, et cela au fil des années. Ainsi, on note :

  • Les travaux forcés
  • L’esclavage sexuel
  • L’esclavage des enfants (mineurs).

 

Le tableau ci-après illustre l’histoire de l’esclavage en Amérique jusqu’à l’époque où l’histoire de Florens a lieu :

 

Année Fait marquant
1619
  • Installation des premiers colons britanniques en Virginie. 
  • Première mention d’esclaves africains dans les colonies américaines
1640 Dans la colonie de Virginie, la condamnation de John Punch, un indentured servant noir, à la servitude à vie après une tentative d’évasion est la première trace connue d’une différenciation de la jurisprudence sur la base de la couleur de la peau. En 1654, une cour du comté de Northampton se prononce contre John Casor, le déclarant propriété à vie de son maître. Les colons s’engouffrèrent dans un vide juridique : puisque les déportés africains n’étaient pas citoyens britanniques par leur naissance, ils n’étaient pas nécessairement couverts par la loi commune britannique (Common law).
1660 Le succès du tabac en Europe entraîne un développement important de la culture de « l’herbe à Nico » et, partant, du système des plantations, d’abord en Virginie puis au Maryland et dans les Carolines. L’explosion de la demande, les profits importants associés à la culture entraînèrent une demande en main d’œuvre que ne parvenait pas à satisfaire le système de l’engagisme.
1672 Les Britanniques supplantent les Néerlandais dans le domaine maritime et créent la Compagnie royale d’Afrique dans le seul but de développer le commerce négrier dans l’Atlantique. Alors que le commerce avec les empires ibériques est saturé, les colonies britanniques représentent un débouché potentiel important.
La conjonction d’intérêt qui s’opère entre les deux parties, planteurs sudistes et négriers, pose les jalons d’un développement rapide de la traite à destination de l’Amérique du Nord.
1676 Révolte de Nathaniel Bacon, déclenchée dans la colonie britannique de Virginie par des Blancs vivant sur la Frontière avec les Indiens, rejoints plus tard par des esclaves noirs et des serviteurs blancs. Seuls les noirs seront punis…
1680 Dans le Sud, la population noire reste minoritaire bien que proportionnellement plus importante que dans le Nord: on l’estime à environ 8 000 pour 15 000 colons. À la fin du XVIIe siècle, tous les Noirs déportés sur le sol nord-américain se voient imposer le statut d’esclave.
1690 et 1705 Le Connecticut puis la Virginie adoptent les « codes noirs », qui généralisent explicitement ce statut, en définissant les droits des propriétaires sur des individus considérés comme des biens meubles et donc dépourvus de droits.

 

Source : http://www.histoquiz-contemporain.com/Histoquiz/Lesdossiers/interviews/noirsus/Dossiers.ht

 

L’époque durant laquelle l’histoire de Florens et des trois autres femmes esclaves avec elle prend vie se situe en 1680, durant la révolte de Bacon. Suivant les activités dans la ferme de Jacob, on peut conclure que celle-ci se spécialisait, comme la plupart des fermes à cette époque, dans la culture du tabac.

 

Etant un Seigneur haut placé, Jacob déteint de nombreuses plantations en dehors de son havre qu’il dirige de mains de fer et grâces auxquelles il reçoit beaucoup d’argent. D’Ortega est un cultivateur au même statut que lui et pratique la traite des esclaves. En suivant l’histoire de chaque femme dans le récit, on constate que seule Rebekka n’a pas été esclave dans le passé. 

 

Florens est la fille d’une esclave de D’Ortega, ce qui fait d’elle une esclave née et, à moins qu’elle ne soit vendue (comme c’est le cas dans l’histoire), elle aura aidé sa mère à rendre service à la famille de son maître. Lina est également une sorte d’esclave, bien que recueillie par les presbytériens, car ils faisaient état de sa couleur de peau et ne la traitaient pas de la même manière qu’ils traitaient leurs semblables. Il en est de même pour Sorrow, la petite indienne. Au début, elle jouissait d’un peu de liberté sur le bateau du Capitaine qui l’a embarqué avec lui, en lui conférant quelques tâches et des habits de garçon. Après le naufrage du bateau, elle a été recueillie par une famille qui l’a en quelque sorte élevée et employée avant d’être vendue à Jacob.

 

Rebekka, elle, a été vendue uniquement pour devenir la femme de ce dernier, non pour lui servir d’esclave proprement dit. Pourtant, arrivée à la plantation, elle doit également s’adonner aux tâches qu’on lui confère, au même titre que les esclaves elles-mêmes. Cependant, son statut diffère des leurs, elle donne des ordres et exécute en même temps comme bon lui semble, et est surtout l’esclave de Jacob, non du travail.

 

Pour Jacob, sa ferme n’est pas une « industrie » fonctionnant avec une traite d’esclave empreinte d’inhumanité. Il essaie d’établir un climat convivial et familial au sein de cette dernière et considère sa ferme comme un éden. Il refuse de pratiquer la traite d’esclaves et de considérer ses « esclaves » comme tels, leur faisant jouir d’un hébergement sain et sécuritaire.

 

Malgré les efforts de Jacob, il n’en demeure pas moins que Florens, Lina et Sorrow sont toutes esclaves, tout comme Rebekka, car elles ont des contrats de vente et sont sa propriété. La couleur de peau, la race et la différence d’intelligence (savoir écrire ou lire) est également un facteur distinguant ces femmes esclaves des autres.

 

Le petit plus du point de vue culturel de A Mercy est la manière dont Toni Morrison reconstitue l’histoire même des Etats-Unis d’Amérique. La scène se passe dans le Maryland et la Virginie, les principales villes ayant adopté l’esclavage en premier en Amérique. Elle met en scène des personnages de différentes origines et couleurs de peau, réunis au sein d’une même ferme, vivant de la même manière, tous excepté Jacob et le forgeron, esclaves à leur manière.

 

Ce qui attire le plus dans ce paysage, c’est que l’esclavage, au lieu de départager les peuples et de les éloigner, les rapprochés dans le cas de la ferme de Jacob. En effet, il ne faut pas négliger la variété ethnique et raciale que Toni Morrison a si aisément regroupée en un seul endroit : deux indiennes (qui ne viennent pas de la même tribu), une africaine, une anglaise, deux blancs, un africain libre et un anglo-saxon.

 

A cette époque, les colons venus d’Europe envahissaient le Maryland et la Virginie et l’esclavage prend de l’ampleur. Blancs, indiens et africains peuvent être à la fois esclaves ou propriétaires. Les esclaves sont la propriété de leurs maîtres et vouent leur existence à les servir. Les esclaves menaient la vie dure, sans liberté, attachés à leurs maîtres, sans identité ni dignité. Quand la révolte de Bacon, conduite par des esclaves mécontents de leur sort a éclaté, naît avec elle la ségrégation.

 

Suite aux concertations gouvernementales et à la création de nouvelles lois, il a été décidé qu’une protection totale de l’homme blanc serait de mise. Le nègre ou le noir est semblable à une chose inutile, inconsidérée. Après des enquêtes minutieuses, les noirs ont été jugés seuls coupables et seuls punis. Un blanc peut tuer un ou des noirs qu’importe la raison. Il leur est interdit de posséder ou d’utiliser une arme, les réunions ou les déplacements leur sont interdits. Dans toute l’Amérique, l’homme noir est devenu une proie pour l’homme blanc, même pour un serviteur ou un esclave blanc.

 

La cohabitation de Florens et des autres esclaves ainsi que sa relation avec des esclaves blancs tels que Willard et Scully à cette époque est sans doute une merveille, un signe que l’esclavagisme ne sépare pas tant que ça les nations. Par contre, son évolution au sein de l’histoire prouve bel et bien qu’il est à l’origine du racisme qui sévissait en Amérique.


Aujourd’hui, l’esclavage prend des formes moins visibles et plus cachées qu’avant. Mais compte-tenu de l’histoire de l’esclavage en Amérique et de ses séquelles, l’ONU a proclamé l’année 2004 comme étant la commémoration de la lutte contre l’esclavage et de son abolition (selon la résolution 57/195 du 18 décembre 2002). Le 10 mai est déclaré « Journée des mémoires de la traite négrière, de l’esclavage et de leurs abolitions » et le 2 décembre la « Journée internationale pour l’abolition de l’esclavage ».

 

  1. L’abandon et la relation mère-fille

 

L’histoire de Florens et le récit dans A Mercy sont basés sur un seul fait : « la mère de la cède à Jacob signifiant son abandon». Le début du roman parle des « shoes », des chaussures trop grandes pour Florens mais qu’elle s’évertue à mettre. En entamant son récit, Florens parle de ses rêves devenus traumatisants, de ses souvenirs d’enfance matérialisés en rêves qui la hantent et l’habitent. D’une peur insatiable due à l’abandon mais aussi au rejet qu’elle comprend à travers l’acte de sa mère.

 

Florens pense que sa mère préfère son frère à elle et en devient meurtrie. Pour combler cet abandon, elle cherche du réconfort auprès de Lina qui, dès sa venue dans la ferme, la couve, prend soin d’elle, passe tout son temps avec elle, et obtient même les faveurs de Rebekka pour elle. Lina, fatiguée de sa solitude, s’est trouvée une amie et une « fille » en qui elle se voit : “Lina, having taken off her shawl and wrapped it around the child’s shoulders, picked her up and carried her into the cowshed. Thereafter, the girl belonged to Lina. They slept together, bathed together, ate together. Lina made clothes for her and tiny shoes from rabbit skin.”(P.124)

 

“Lina had fallen in love with her right away, as soon as she saw her shivering in the snow. A frightened, long necked child who did not speak for weeks but when she did her light, singsong voice was lovely to hear. Somehow, some way, the child assuaged the tiny yet eternal yearning for the home Lina once knew where everyone had anything and no one had everything. Perhaps her own barrenness sharpened her devotion. In any case, she wanted to protect her, keep her away from the corruption so natural to someone like Sorrow, and, most recently, she was determined to be the wall between Florens and the blacksmith. » (P.60)

 

Lina s’attache à Florens qui s’attache également à elle. Toutes deux créent un lien mère-fille intense, au point que Lina se croit dans le droit et en devoir de la mettre en garde contre le blacksmith, de la protéger contre les mauvais sorts et surtout de la protéger contre Sorrow. Au commencement du récit, Florens, qui est le narrateur premier, dévoile le nom de Lina qui est le premier nom à apparaître dans le récit : «  a result, Lina says, my feet are useless, will always be too tender for life and never havethe strong soles, tougher than leather, that life requires. Lina is correct. Florens, she says, it’s 1690” (P.4).

 

Bien que cette scène ne soit pas totalement représentative, on peut facilement deviner l’importance de Lina dans la vie de Florens, et vice versa.

 

L’abandon que sa mère lui a légué pour seul sentiment est une arme pour Florens. Elle s’en nourrit, mais loin de développer de la haine, elle se contente de souvenirs et de dévoiler ses ressentiments. Le sacrifice que sa mère a fait pour sauver sa vie ne sera jamais qu’ne narration, inconnue de la principale intéressée et loin d’elle. Florens a pu fuir l’abandon dans les bras tendres et affectueux de Lina. 

 

En faisant la connaissance du forgeron (blacksmith) et en devenant son amant, Florens pense pouvoir combler son sentiment d’abandon au point d’aller le retrouver, non seulement car elle a été envoyée afin de l’envoyer sauver la vie de sa maîtresse, mais également car elle souhaite oublier le monde, ses souffrances, ses agonies et ses peurs en vivant à ses côtés : « And you know the ancestors approve when two owls appear at the very instant you say their names so you understand they are showing themselves to bless you. See, you say, see how they swivel their heads. They approve you also, you tell me. Do they bless me too, I ask. Wait, you say. Wait and see. I think they do, because I am coming now. I am coming to you.” (P. 68)

 

Pour Florens, cet africain libre représente tout, aussi quand il la chasse de chez lui après avoir malencontreusement brisé le bras de Malaik, un petit garçon réfugié chez lui, Florens ressent à nouveau de l’abandon, un abandon toujours aussi incompréhensible, jouant avec sa vie et la suivant même jusque dans ses amours. Déçue, abattue et découragée, elle retourne à la ferme de Rebekka, là où jamais personne ne l’a jamais abandonnée, là où Lina a toujours pris soin d’elle, tentant de la protéger contre le mal et considérant sa vie à un niveau d’importance que jamais personne d’autre ne lui avait accordé.

 

Dans la relation mère-fille qui prend également une place assez particulière dans le roman, nous pouvons prendre exemple sur Sorrow, qui a mis sa fille au monde avec un courage et une volonté imparables, aidée de Willard et de Scully. Sorrow, une « sauvage » à la nature agressive et frivole, est enceinte d’un enfant dont Lina soupçonne Jacob comme étant le père, sans toutefois donner des précisions. 

 

Elle a déjà porté un enfant que Lina a noyé dans l’eau. Pour éviter que cela ne se reproduise, elle part hors de la ferme pour mettre son enfant au monde, y parvient et, depuis cet évènement, comprenant enfin le vrai sens de la maternité, change de manière et devient une vraie femme dévouée à son enfant.

 

L’abandon a causé plusieurs métamorphoses chez les esclaves, en particulier chez  Florens et Rebekka. Après que sa mère l’ait abandonnée, Florens est devenue un petit être fragile et naïf cherchant désespérément l’amour auprès d’un africain libre qui n’a d’autres soucis que sa liberté. Rebekka, quant à elle, a souffert de l’abandon inopiné de son mari mort de la variole. Après avoir fait son deuil, elle s’est tournée vers Dieu, passant le plus clair de son temps à prier, étant trop faible pour vaquer à ses anciennes occupations : « Mistress has cure but she is not well. Her heart is infidel. All smiles are gone. Each time she returns to the meetinghouse, her eyes are nowhere and have no inside.[…] Her dress is dark and quiet. She prays much.” (P. 159).

 

Le comble dans l’histoire de Florens, c’est qu’elle ait été offerte à Jacob par sa mère afin que son maître, le seigneur D’Ortega puisse payer la dette qu’il doit à ce dernier. On note ici la servitude d’une esclave qui ne peut échapper aux volontés de son maître. La vie d’un esclave à cette époque n’a pas de valeur ni de sens pour les blanc ou les maîtres, elle appartient à ces derniers qui en décident comme bon leur semble.

 

  1. Le traumatisme vécu par chaque personnage du livre

 

  Florens, Sorrow, Lina, Rebekka, Jacob et même Willard et Scully ont tous un lourd passé empreint de traumatisme. Avec le racisme et les révoltes populaires qui font rage, on constate que chacun des personnages a vécu l’innommable. Lina a vu les siens mourir d’une épidémie et est la seule survivante de son village amérindien. Ce qui la rend nostalgique et presque fâchée contre elle-même d’avoir survécu là où de nombreuses personnes de la même race qu’elle ont péri.

 

Florens a été abandonnée par sa mère à un inconnu à l’insu de son frère. Hantée par le souvenir de cet instant fatidique, elle est terrifiée par les mères et les petits garçons : « When I ask what reason she says he is a man. Mistress says nothing. Neither do I. But I have a worry. Not because our work is more, but because mothers nursing greedy babies scare me. I know how their eyes go when they choose. How they raise them to look at me hard, saying something I cannot hear. Saying something important to me, but holding the little boy’s hand.” (P.10)

 

Sorrow est tétanisée par la solitude. Après que le bateua qui l’abritait a coulé, elle a eu peur de se retrouver seule, si bien qu’elle a inventé un ami imaginaire du nom de Twin avec lequel elle s’amuse, qui lui suffit et qui la comprend : « Sorrow concentrated on mealtimes and the art of escape for short walks with Twin, playtimes between or instead of her tasks. On occasion she had secret company other than Twin, but not better than Twin, who was her safety, her entertainment, her guide.” (P.119)

 

Le personnage de Twin prête la confusion car on ne sait pas exactement s’il s’agit du vrai nom de Sorrow ou d’u ami imaginaire qu’elle a inventé. Le traumatisme d’avoir perdu son premier enfant, noyé par Lina, a également poursuivi Sorrow qui, depuis, a pris l’habitude d’aller lui parler au bord de la rivière. 

 

Jacob et Rebekka, quant à eux, sont victimes du mauvais sort qui semble s’être installé depuis la venue de Sorrow. Ils ont perdu leurs enfants (John Jacob et son frère et Patrician) à la suite d’une fièvre. Depuis, Jacob préfère voyager : “As the sons died and the years passed, Jacob became convinced the firm was sustainable but not profitable. He began to trade and travel.” (P.87). Il est devenu insatiable, peu heureux de ce qu’il a et se voit construire une troisième demeure gigantesque qui réussira sou peu, avec la venue régulière du forgeron, à le retenir à la ferme. Cependant, il mourra sans avoir vu sa maison achevée.

 

  1. L’histoire des esclaves : Lorens, Sorrow, Lina et Rebekka

 

  1. Lorens :

 

Lorens devait avoir 8 ou 9 ans lorsque sa mère l’a offerte à Jacob en paiement d’une dette et qu’il l’a emmenée dans sa ferme. Arrivée sur place, elle s’est immédiatement attiré l’affection et l’amour de la servante amérindienne Lina : « Lina had fallen in love with her right away, as soon a she saw her shivering in the snow. A frightened, long necked child who did not speak for weeks but when she did her light, singsong voice was lovely to hear. Some how, some way, the child assuaged the tiny yet eternal yearning for the home Lina once knew where everyone had anything and no one had everything. Perhaps her own barrenness sharpened her devotion. In any case, she wanted to protect her, keep her away from the corruption so natural to someone like Sorrow, and, most recently, she was determined to be the wall between Florens and the blacksmith”. (P. 60)

 

Avec un cœur dévasté et brisé par l’abandon de sa mère, elle se réfugie dans le silence quelques jours après son arrive dans la ferme. Mais la sympathie de Lina et de Rebekka, la « Mistress » l’aident à s’accommoder au final. De tous les esclaves présentes dans la ferme, Florens est la mieux instruite : elle sait lire et écrire. Fragile de nature, elle tombe profondément amoureuse d’un forgeron africain chargé de quelques tâches dans la ferme. Ses petites visites lui suffisent pour l’aimer et tous deux deviennent amants.

 

Quand Rebekka tombe malade, à cause de la variole qui fait rage à cette époque, Florens est tenue de retrouver l’africain qui, auparavant, a déjà fait preuve d’une méthode de guérison très efficace qui a sauvé la vie de Sorrow. Son amour pour le forgeron ne connaît pas de frontières, aussi décide-t-elle de rester avec lui pour toujours une fois qu’elle aura  retrouvé sa maison : « And you know the ancestors approve when two owls appear at the very instant you say their names so you understand they are showing themselves to bless you. See, you say, see how they swivel their heads. They approve you also, you tell me. Do they bless me too, I ask. Wait, you say. Wait and see. I think they do, because I am coming now. I am coming to you.” (P. 68)

 

Elle est la narratrice de l’histoire et le personnage principal de l’intrigue. Florens rêve fréquemment d’une mère- de sa mère- qui se tient un petit garçon par la main- son frère- et qui essaie de lui dire une chose importante, mais qu’elle n’arrive jamais à entendre, ni à comprendre: « That is a better dream than a minha mae standing near with her little boy. In those dreams she always wanting to tell me something. Is stretching her eyes. Is working her mouth. I look away from her. My next sleeping is deep”. (Page 101)

 

Son traumatisme est caractérisé par la redondance, voire même la répétition de ce cauchemar qu’elle fait à propos d’une mère et d’un petit garçon (de sa mère et de son frère). 

 

  1. Lina :

 

La vie de Lina et son histoire sont également marquées par un traumatisme. La mort des villageois, sa survie, sa vie avec les presbytériens, comment ils lui ont donné le nom de Messalina qu’on a écourté pour donner Lina, comment ils ne l’emmenaient pas à l’église le dimanche mais lui gardaient une place dans leur prière de bénédiction durant les trois repas de la journée, comment ils l’ont abandonné et comment elle est entrée au service de Jacob qui, en ces temps-là, n’était pas encore marié et attendait sa femme ; tous ces évènements ont endurci sont coeur. 

 

En vivant avec les presbytériens, elle a appris qu’il ne faut pas s’habiller avec des habits faits en peau d’animal car cela offense Dieu. Elle ressent également des remords pour être la seule survivante de son village. Lina est gentille et sincère et est triste quand Jacob abat les arbres, ce qui cause pas mal de malheurs à ce dernier. Pourtant, derrière sa tendresse et son esprit juste se cache une femme peu éhontée qui n’hésite pas à tuer l’enfant de Sorrow en pensant qu’elle a apporté assez de malheur à la ferme pour y élever encore un enfant.

 

De part sa nature sauvage et indienne, Lina s’adonne à quelques pratiques proches de la sorcellerie : « But it was she who taught him how to dry the fish they caught; to anticipate spawning and how to protect a crop from night creatures. Yet neither of them knew what to do about fourteen days of rain or fifty-five of none.” (P. 49). « Lina placed magic pebbles under Mistress’ pillow, kept the room fresh with mint and forced angelica root in her patient’s festering mouth to pull bad spirits from her body. She prepared the most powed5.d remedy she knew: devil’s bit, mugwort, Saint-John’s-wort, maidenhair and periwinkle; boiled it, strained it and spooned it between Misuess’ teeth. She considered repeating some of the prayers she learned among the Presbyterians, but since none had saved Sir, she thought not. He went quickly. » (Page 50)

 

Elle apprend à Florens que chaque être a un esprit qui le protège, ce qui, dans la culture afro-américaine, relève du mythe. Les esprits sont des familles, des ancêtres ou des amis passés vers l’au-delà pour nous protéger et nous guider. Lina invoque souvent ces esprits pour veiller sur la ferme et ses occupants.

 

Dans le récit, Lina s’occupe de tout comme une mère. Elle aime prendre en charge tout ce que Rebekka et Jacob n’arrivent pas à contrôler, elle souhaite également que chaque chose suive ses plans et ses calculs. Lina est le symbole même de la femme noire- américaine : de celle qui se voue à l’honneur et à la dévotion envers ses maîtres. Elle a les traits caractéristiques d’un esclave asservi et docile à l’extérieur et d’une femme calculatrice et méticuleuse à l’intérieur.

 

  1. Sorrow : 

 

Sorrow a été achetée par Jacob, survivant à un naufrage de bateau : “But if the blacksmith’s work was a frivolous waste of a grown man’s time, his presence was not. He brought one girl to womanhood and saved the life of another. Sorrow. Vieneyed Sorrow with black teeth and a head of never groomed woolly hair the color of a setting sun. Accepted, not bought, by Sir, she joined the household after Lina but before Florens and still had no memory of her past life except being dragged ashore by whales. « Not whales, » Mistress had said. « Certainly not. She was treading water in the North River in Mohawk country, half drowned, when two young sawyers trawled her in. They threw a blanket over her and brought their father to the riverbank where she lay. It’s said she had been living alone on a foundered ship. They thought she was a boy. » (Page 51)

 

Sorrow est une petite fille survivante d’un naufrage de bateau : « Before coming to the sawyer’s house, Sorrow had never lived on land. Now the memories of the ship, the only home she knew, seemed as stolen as its cargo: bales of cloth, chests of opium, crates of ammunition, horses and barrels of molasses. Even the trace of Captain was dim. After searching for survivors and food, fingering spilt molasses, from the deck straight into her mouth, nights listening to cold wind and lapping sea, Twin joined her under the hammock and they have been together ever since.”(Page 117)

 

Elle est un peu bizarre et dans le récit, elle mentionne une personne, dénommée Twin, qui lui ressemblerait et qu’on confond avec elle, si bien que ce dernier a fusionné avec elle et que tous les deux ne font plus qu’un: « She did not mind as they called her Sorrow so long as Twin kept using her real name. It was easy to be confused. Sometimes i twas the housewife or the sons or the sawyer who needed her ; other times Twin wanted company to walk ot talk or play.”  (P.116)

 

La femme qui l’a recueillie en premier lieu l’a nommée Sorrow car elle l’a trouvée en étant abandonnée: “ »Don’t mind her name, » said the sawyer. « You can name her anything you want. My wife calls her Sorrow because she was abandoned. She is a bit mongrelized as you can see. However be that, she will work without complaint. » (Page 120.)

 Elle devait avoir 11 ans.

 

Mais depuis sa venue dans la ferme, d’étranges circonstances sont survenues: la mort des enfants de Jacob et Rebekka entre autres : « Lina was sure the early deaths of Mistress’ sons could be placed at the feet of the natural curse that was Sorrow. After the death of the second infant Lina felt obliged to inform her mistress of the danger.” (Page 55)

 

 « Some people do evil purposefully », said lina. “Others can’t help the evil yhey make”. Mistress looked up. “What are you saying?” Your son, john Jacob. He died afetr Sorrow came.” “Stay Lina. Don’t feed old misery. My baby died of fever.” But Patrician sickened too and did not—” “I said stay. That he died in my arms is enough without adding savage nonsense.” As long as Sir was alive it was easy to veil the truth: that they were not a family-not even a like-minded group. They were orphans, each and all. » ( Page 59)

 

Le destin de Sorrow est lié à l’eau car c’est l’intermédiaire entre elle et son enfant mort. La plupart du temps, quand elle disparaît sans rien dire, on la retrouve au bord de la rivière en train de parler à son enfant : «  Where to go? She couldn’t endure the self-pity that drove Mistress to tempt harmful spirits, so she decided to look for Sorrow down by the river where she often went to talk to her dead baby.” (Page 63)

 

  1. Rebekka

 

Rebekka vit dans une époque où les exécutions en public et toutes sortes de spectacles figées d’horreur et de violence sont populaires. Ses parents sont d’ailleurs de grands fans et assistent à chaque représentation pour une exécution, une pendaison ou une décapitation de quelque monarque qui soit. Ils en ressentent un plaisir immense et sont tristes quand une représentation est annulée ou reportée ou n’est pas assez sanglante ou satisfaisante à leurs yeux. : « She still remembered her parents’ disappointment when the festivities were canceled and their fury at an easily swayed monarch. » (Page 77.)

 

Elle n’aime pas la barbarie qui règne à l’époque et souhaite plus que tout changer de vie. Elle obtient une place en tant qu’apprentie pour devenir servante dans une école religieuse et perçoit l’offre comme son salut, hélas, elle ne se concrétise pas et elle a beau attendre, plus aucune place ne lui est proposée. C’est alors que la demande d’une épouse de la part d’un Seigneur vivant dans une ferme parmi des esclaves est parvenue à ses parents. Son père est enthousiaste, sa mère, voit mal cette « vente », car il s’agit là de vendre leur fille aînée, Rebekka, à un inconnu. Cependant celle-ci se conclue et Rebekka finit par partir de Londres pour rejoindre Jacob dans le Maryland.

 

On peut conclure que Rebekka, de part sa nature polie et renfermée, a reçu une bonne éducation. Elle assure le maintien de l’ordre et de la paix au sein des mains d’œuvres dans la ferme, supplantant son mari lors de ses absences.

 

  1. L’esclavage et la lutte pour la survie

 

Chaque personnage dans A Mercy est assailli par un traumatisme causé par une histoire très personnelle. Lina pense qu’ils sont tous orphelins (orphans), car ils n’ont nulle part où aller, à part à la ferme qui leur sert aujourd’hui de toit. Chacun de ces personnages est un être à part, soumis aux volontés du maître, asservi aux multiples tâches ménagères, domestiques et autres.

 

L’auteur a doté à ses personnages une condition et une forme d’esclavage différentes :

  • Florens servant le maître et effectuant des tâches variées, mais sans grande complexité.
  • Lina, comme une sorte de mère, chargée de prendre soin de chaque nouvelle recrue et de superviser leurs tâches, tout en étant la principale confidente de Rebekka.
  • Willard et Scully, payant une dette contractée à cause d’un voyage, s’occupant de toutes les parties techniques, des réparations, de la construction de la nouvelle maison,
  • Et Sorrow qui fait tout ce qu’il lui est possible de faire.

 

En se focalisant sur l’histoire, on découvre que les personnages principaux ne sont pas forcément entièrement bons ou mauvais. Aucune rivalité sérieuse entre eux n’est réellement racontée dans l’histoire, tous sont juste réunis par les tâches et leur fonction dans la ferme. La lutte pour la survie qu’ils mènent est plus caractérisée par une lutte intérieure, presque psychologique, qu’ils doivent effectuer pour vaincre leur propre traumatisme. Elle est également manifestée par la lutte contre la variole, une épidémie nocive qui décime des villages entier et prend la vie des blancs comme des noirs.

 

  1. Les stratégies narratives dans le livre

 

  1. Les différentes structures narratives :

 

  1. Structure narrative afro-américaine : La signification de la culture noire-américaine dans le roman

 

Chacune des œuvres classiques de Toni Morrison reflète la culture noire-américaine dans toute sa splendeur. La stratégie narrative adoptée relève souvent de l’association du mythe à la réalité et à l’histoire.

 

Comme dans le roman Song of Solomon, la Virginie, capitale éthique de la formation de la race noire-américaine, est au centre de l’histoire. La légende et le mythe se rencontrent en un seul point : la formation de l’Amérique par la venue des différents esclaves noirs ou des blancs puritains.  Dans ce cas-ci, on parle des esclaves noirs spécialement, ceux qui sont opprimés et sous-estimés, persécutés et asservis.

 

La légende veut qu’un africain tel que le forgeron jouirait d’une liberté absolue dans une terre et une époque où tous les noirs sont asservis. Elle veut également, selon l’écriture de Toni Morrison, que ce noir-là soit capable et éhonté de regarder des blancs dans les yeux, les prenant comme s’ils étaient de la même race ou de la même couleur. Par la même occasion, le mythe rejoint également l’idéal, l’irréel et le fantastique en décrivant un monde dévasté par la colonisation et l’esclavage dans lequel des gens de couleur et de races  différentes cohabitent sans difficulté ni malentendu.

 

D’ailleurs, l’esclavage dépeint par Toni Morrison, du point de vue des différents personnages principaux, n’est pas aussi tyrannique ni cruelle qu’il n’a toujours été dépeint par d’autres auteurs. Sa réalité est plus fragile mais palpable et change la cruauté de l’Amérique en ces temps de formation du pays. Le roman relate également quelques repères historiques du point de vue religieux, avec l’existence sur un même territoire des presbytériens, des chrétiens, des papistes, etc.

 

Une croyance aux esprits qui peuvent prendre différents formes et protéger différentes personnes détaille la beauté de la culture et apporte de la magnificence et une subtile touche de magie à la narration que Toni Morrison a su embellir avec des expressions et des métaphores très significatives.

 

Le style de narration est également à retenir dans A Mercy. On note une certaine mixture, un enchâssement au niveau de cette dernière, et un espacement entre la narration de Florens et celle du narrateur extradiégétique qui s’alternent et s’emboîtent. Ainsi, le roman commence avec une narration de Florens, suivie d’une narration de l’histoire de Jacob Vaark et de sa rencontre avec Florens, sa femme etc. Puis, au troisième chapitre, Florens reprend sa narration ensuite c’est au tour du personnage et de la vie de Lina d’être exposés.

 

A nouveau, Florens raconte en s’adressant directement au spectateur représenté essentiellement par le forgeron auquel elle adresse ces « lettres ». Suit une narration sur la vie de Rebekka qui sera suivie par une autre narration de Florens, puis une représentation écrite du parcours et de la vie de Sorrow qui sera encore une fois de plus suivie par une narration de Florens. L’histoire de Willard et de Scully est ensuife dévoilée, suivie par une dernière narration de Florens, et le livre s’achève par une émouvante et tranchante narration par la mère de Florens qui, bien que morte, explique en quelques pages les raisons (hélas jamais entendues par la principale intéressée) qui l’ont poussée à  la livrer à Jacob.

 

1.2. Structure narrative occidentale : 

 

  1. Utilisation du temps narratif :

 

  • La narration ultérieure

 

Selon Gérard Génette , quatre types de narration peuvent exister simultanément ou une à une dans un roman :

  • La narration ultérieure
  • La narration antérieure
  • La narration simultanée et 
  • La narration intercalée

 

Dans le cas d’une narration ultérieure, le narrateur évoque des évènements passés. Un bon nombre d’exemples de narration ultérieure sont détectés dans le roman, aussi présenterons-nous juste un petit échantillon. A titre d’exemple, nous pouvons citer les passages où le narrateur raconte l’histoire des différents personnages en employant un temps passé : « The man moved through the surf, stepping carefully over pebbles and sand to shore. Fog, Atlantic and reeking of plant life, blanketed the bay and slowed him. He could see his boots sloshing but not his satchel nor his hands.” (P.09)

 

En analysant plus profondément la narration, nous pouvons déceler l’utilisation de la narration ultérieure pratiquement dans tous les chapitres où le narrateur extradiégétique (externe à l’histoire) raconte l’histoire. On peut alors en déduire que le narrateur a pour fonction de raconter uniquement les faits qui se sont produits dans le passé, utilisant le « present perfect, le past simple ou le past continuous » dans de nombreux passages.

 

La fonction principale du narrateur et de la narration simultanée est de reproduire les faits sans y intervenir, sas pouvoir non plus y changer quoi que ce soit, car ils sont déjà écrits tels quels. La narration ultérieure est la forme de narration la pus classique, utilisée tant pour les conte de fées que pour les romans classiques. Elle permet au lecteur de situer l’histoire dans un espace-temps, la renvoyant implacablement au passé, pour lui permettre d’accumuler les informations nécessaires qu’il doit connaître.

 

La narration antérieure peut être contée par toutes sortes de narrateurs à différents niveaux (homodiégétiques, intradiégétiques, autodiégétiques, métadiégétiques, etc.)

 

  • La narration antérieure

 

La narration antérieure décrit souvent des faits ou des évènements qui ne se passet ni dans le présent ni dans le future, seulement dans l’imaginaire. Elle est symbolisée par les prophéties ou les récits d’actes impossibles à accomplir ou qui ne seront jamais accomplis à cause de l’interférence de facteurs que l’on ne peut repousser ni éviter.

 

Dans A Mercy, la scène qui représente le mieux une narration ultérieure est celle durant laquelle Rebekka fantasme sur son défunt mari, devinant ce il aurait dit s’il avait encore été là à cet instant précis : « Then as she stood in molten sunlight, pulling the comers of her apron together, the comfortable sounds of the farm would drop. Silence would fall like snow floating around her head and shoulders, spreading outward to wind-driven yet quiet leaves, dangling cowbells, the whack of Lina’s axe chopping firewood nearby. Her skin would flush, then chill. Sound would return eventually, but the loneliness might remain for days. Until, in the middle of it, he would ride up shouting,

« Where’s my star? »

« Here in the north, » she’d reply and he would toss a bolt of calico at her f a t or hand her a packet of needles. Best of all were the times when he would take out his pipe and embarrass the songbirds who believed they owned twilight. A still living baby would be on her lap.

Patrician would be on the floor, mouth agape, eyes aglow, as he summoned rose gardens and shepherds neither had seen or would ever know. W~ t hi m, the cost of a solitary, unchurched life was not high.” (P.93)

 

La narration antérieure renvoie souvent à une impossibilité d’accomplir ou de voir se réaliser ce que l’on imagine. Dans ce cas-ci, Rebekka ne peut qu’imaginer si son mari avait encore vécu au moment où elle parle. Elle s’imagine ce qu’il aurait dit, ce qu’il aurait fait, combien cela aurait été agréable de l’avoir en ce moment.

 

Grâce à l’utilisation de la narration antérieure  sur ce passage précis, on détecte une vague de tristesse et de mélancolie submergeant le personnage de Rebekka. On peut ressentir ce qu’elle ressent, l’emploi du mode conditionnel est tel qu’on a l’impression de pouvoir toucher la peine enveloppant Rebekka de nos propres mains. La narration simultanée rapproche donc, dans ce cas, le personnage du lecteur qui prend connaissance de ses sentiments et de ses désirs les plus profonds, quitte à connaître l’impossible.

 

  • La narration simultanée

 

La narration est dite simultanée quand le temps de narration et le moment durant lequel l’histoire narrée se passe sont identiques. Il s’agit donc d’une narration qui se passe en même temps que l’action racontée. Les scènes représentant une narration simultanées dans le livre sont très nombreuses. Parmi toutes, nous pouvons citer toutes les scènes et tous les passages incluant Florens en tant que narratrice autodiégétique.

 

En tant que telle, elle s’exprime au présent, mais pas au présent de l’indicatif, plutôt au present continuous, ce temps même qui distingue ce roman des autres. Dans sa thèse, Emmanuelle Andrès décrit l’usage du present continuous comme une « prolongation » (D’ou la tendance de Florens, la narratrice, d’utiliser la forme en BE+ing, comme dans une prolongation)

 

Lorsque Florens raconte comment elle a accidentellement brisé l’épaule de Malaik et a provoqué un saignement du coind esa bouche dû à un coup sur le coin de la chaise, nous pouvons constater l’emploi du present continuous et de la narration simultanée : « The stool is on its side. Seeing me the boy returns to screaming and that is when I clutch him. I am trying

to stop him not hurt him. That is why I pull his arm. To make him stop. Stop it. And yes I do hear the shoulder crack but the sound is small, no more than the crack a wing of roast grouse makes when you tear it, warm and tender, from its breast. He screams screams then faints.

A little blood comes from his mouth hitting the table corner. Only a little. He drops into fainting just as I hear you shout. I don’t hear your horse only your shout and know I am lost because your shout is not my name. Not me. Him. Malaik you shout. Malaik. » (P.139 et 140)

 

La narration simultanée permet au lecteur d’embrasser la scène, de vivre son intensité et d’y assister bien qu’étant loin. C’est un rapprochement avec ce que le ou les personnages présents dans le passage cité. Elle sert à focaliser l’attention du narrataire sur ce qui se passe au moment même du récit du côté de chaque personnage, comme il le vit et quelle sensation ou quel sentiment il transmet au lecteur (cela dépend de la scène décrite : angoisse, joie, tension, détente, etc.)

 

  1. Focalisations :

 

  • Focalisation zéro

 

Dans la focalisation zéro, le narrateur est considéré comme « Dieu » car il sait tout et même plus que le personnage lui-même. Au fil de la lecture du livre, on détecte la présence d’une focalisation zéro, surtout quand le narrateur devient extradiégétique.

Les passages contenant une focalisation zéro sont ceux dans lesquels le narrateur  est au courant de chaque pensée et des différents faits et gestes de certains personnages, sans que les autres les connaissent. Dans ces passages, le narrateur détient une suprématie, une pleine puissance et un niveau de connaissance nettement plus élevé que les personnages. Il peut donc choisir les informations qu’il va délivrer. 

Citons le passage mettant en scène les pensées de Scully vis-à-vis de Lina qui, vraisemblablement, semble l’attirer physiquement ou de Sorrow pour laquelle il aurait également pu avoir des sentiments : « Willard judged people from their outside: Scully looked deeper. Although he relished Lina’s nakedness, he saw a purity in her. Her loyalty, he believed, was not submission to Mistress or Florens; it was a sign of her own selfworth- a sort of keeping one’s word. Honor, perhaps. And while he joined Willard in making fun of Sorrow, Scully preferred her over the other two servants. If he had been interested in seduction, that’s who he would have chosen: the look of her was daunting, complicated, distant. The unblinking eyes, smoke gray, were not blank, but waiting. It was that lying-in-wait look that troubled Lina. Everyone but himself thought she was daft because she talked out loud when alone, but who didn’t?” (P. 151 et 152)

 

La focalisation zéro donne confère donc tout le savoir au narrateur qui sait tout. Le lecteur ressent donc une certaine distance par rapport au personnage qui manque d’informations et recherche un rapprochement avec le narrateur qui, tout au long de son récit, peut lui informer sur ce qui l’intrigue.

 

  • Focalisation interne

Dans la focalisation interne, le niveau de connaissance du narrateur et du personnage principal est à égalité. La focalisation interne peut donc être interprétée comme une narration intradiégétique, c’est-à-dire que le narrateur, un personnage du livre, est au courant de tout ce que le personnage sait, et vice versa. Toutes les scènes présentant une narration intradiégétique avec Florens en tant que narratrice sont donc à considérer avec ce type de focalisation : « I run away into the cowshed to stop this thing from happening inside me. Nothing stops it. There is only you. Nothing outside of you. My eyes not my stomach are the hungry parts of me. There will never be enough time to look how you move. Your arm goes up to strike iron. You drop to one knee. You bend. You stop to pour water first on the iron then down your throat. Before you know I am in the world I am already kill by you. My mouth is open, my legs go softly and the heart is stretching to break.”(P.38 et 39).

 

La représentation de la focalisation interne dans cette scène est saisissante car, bien que Florens ne fait que raconter, elle est capable de décrire les faits et gestes du forgeron qui n’est pourtant pas là au moment de la narration. Ceci implique que le forgeron n’a aucun secret pour le narrateur qui n’est autre qu’un personnage du livre.

 

Nous sommes d’ailleurs en présence d’une narration intradiégétique impliquant une focalisation interne et une narration simultanée. Le narrateur est ici appelé « héros-narrateur ».  Cette situation, selon Génette, produirait une « forte illusion de réalisme et de vraisemblance ». Le narrateur verra donc la scène avec beaucoup de réalisme, attestant de lui-même de sa véracité, bien qu’il n’en sache rien en temps normal.

 

  1. Les niveaux narratifs

 

  • Utilisation de l’analepse

 

Une narration présente une analepse quand le narrateur raconte un évènement du passé avant le moment de l’intrigue principale. L’analepse est définie par certaines personnes comme un flashback. Dans A Mercy, tout le passage décrivant le voyage entamé par Jacob afin de se rendre chez D’Ortega, son arrivée, l’imploration de la mère de Florens afin que Jacob prenne Florens au lieu de sa fille, etc. constitue une analepse ou un « flashback ».

 

Tout ce passage représente une époque passée, voire même lointaine. Au moment du récit, de l’intrigue principale, Florens a quinze ans, alors que Jacob est venu la prendre, elle n’avait que 8 ou 9 ans. Dans ce roman, l’analepse surgit non pas au tout début de la narration comme cela est fréquent, mais plutôt après le premier acte, c’est-à-dire qu’ne sorte de sommaire la précède, ce qui rend le style d’écriture de Toni Morrison unique et agrémenté de suspense.

 

  1. La vitesse narrative

 

En nous basant toujours sur les travaux de recherche de Gérard Génette en matière de narratologie, nous allons distinguer les différentes vitesses narratives que le roman A Mercy contient. 

 

– La pause :

Dans la pause, l’histoire proprement dite est entrecoupée par quelques séquences de narration. On distingue donc plusieurs pauses dans le roman, à commencer par le chapitre suivant le premier chapitre qui commence le récit. Il s’agit de la narration de la rencontre entre Jacob et Florens, du voyage de celui-ci afin d’arriver chez le cultivateur D’Ortega, etc.

La principale intrigue se distingue par la description véhiculée par la pause par une différence dans le temps de la narration, c’est-à-dire que l’histoire évènementielle connaît plusieurs petites coupures pour que la narration puisse continuer. Dans notre roman, la narration entre l’histoire évènementielle et l’intrigue elle-même se rencontrent à la fin du livre.

Les pauses enregistrées dans la narration sont donc représentées par des chapitres entier, soit par 6 pauses entrecoupant l’évènement perturbateur qui est la quête de Florens (ramener le forgeron dans la maison du maître afin de guérir sa femme.

– La scène : 

Dans le roman que nous analysons, la scène est caractérisée par toutes les narrations simultanées que le personnage principal effectue. A fortiori, il s’agit dans cette œuvre de tous les passages où le narrateur autodiégétique Florens intervient. Le temps de conjugaison de la narration est au présent, preuve que le narrateur et la narration sont synchronisés dans l’espace-temps. Les scènes incluant la quête de Florens chargée de retrouver le forgeron pour qu’il guérisse Rebekka représentent la scène dans le livre.

Le sommaire :

Le sommaire est la partie révélant un résumé partiel du récit. Dans l’ouvrage que nous étudions, le sommaire est constitué par la première partie du livre, à partir de la page trois. Le sommaire ci-contre inclut l’intervention d’un narrateur homodiégétique et autodiégétique employant le pronom Je et s’adressant au lecteur à l’aide du pronom personnel « you ».

La longueur du sommaire peut être variable, dans notre cas, le sommaire fait presque 4 pages et révèle partiellement ce qu’il en est de l’intrigue. Les informations fournies ne sont pourtant pas exhaustives, et dans ce cas-ci, elles ne sont pas dans le bon ordre et n’adoptent pas un ordre chronologique spécifié. 

  1. La fréquence évènementielle

La fréquence narrative dispose de trois éléments : 

– Le mode singulatif : 

Le mode singulatif est caractérisé par une narration unique d’un évènement qui n’a lieu qu’une fois et qui n’est raconté qu’une fois. Nombreux sont les exemples à prendre en compte, le plus proche étant Sorrow ayant vu les ébats amoureux de Florens et le forgeron qu’elle a inopinément vu de loin. Cet évènement qui ne s’est passé qu’une seule fois n’est aussi raconté qu’une fois.

–  Le mode répétitif :

Dans A Mercy, le souvenir, les cauchemars à propos d’une femme et son garçon que Florens fait presque chaque nuit représentent un mode répétitif dans la narration. Le mode répétitif consiste à raconter à plusieurs reprises un évènement qui ne  s’est passé qu’une fois. Là encore, l’abandon de Florens de sa mère est mis à nu.

Que ce soit dans ses rêves ou dans ses souvenirs, Florens se rappelle presque souvent le traumatisme qu’elle a vécu. Ce cauchemar est le même, sauf que Florens peut, à sa convenance, raconter cette histoire qui n’a eu lieu qu’une fois de différentes manières.

 

  1. Les voix narratives

 

  • La narration hétérodiégétique et extradiégétique

 

Un narrateur est dit « hétérodiégétiqueé ou « extradiégétique » quand il est extérieur à l’histoire qu’il raconte.  Habituellement, il s’exprime çà la troisième personne et est absente de l’histoire. Le cas d’une narration hétérodiégétique nécessite la présence d’une focalisation zéro car le narrateur, qui n’est pas un personnage du récit, sait tout.

 

La narration hétérodiégétique dans A Mercy est reflétée par les actes qui ne sont pas narrées par Florens, à savoir :

  • Celui contenant l’histoire de Jacob,
  • Celui contenant l’histoire de Lina,
  • Celui contenant l’histoire de Sorrow,
  • Celui contenant l’histoire de Rebekka,
  • Celui contenant l’histoire de Willard et Scully,
  • Celui narrant la raison pour laquelle la mère de Florens l’a offerte à Jacob à la fin du livre.

 

On peut donc dire que la domination de la narration hétérodiégétique dans ce roman est aussi importante que celle de la narration homodiégétique. Le narrateur, à ce niveau, n’est pas impliqué dans l’histoire, mais est au courant du moindre évènement survenu dans l’histoire.

 

  • La narration homodiégétique et autodiégétique

 

Le narrateur homodiégétique est celui qui est impliqué dans l’histoire. Dans notre cas, il s’agit de Florens qui est dans de nombreux chapitres, à la fois narratrice et personnage principale. En étant l’héroïne du livre, elle obtient le statut de « Narrateur autodiégétique ». L’histoire qu’elle raconte la concerne, c’est la sienne. 

 

Le narrateur autodiégétique Florens détient une connaissance des personnages proportionnelle à celle du personnage de l’intrigue qui n’est autre qu’elle. Elle emploi, à cette fin, le pronom personnel « je » (I, my, mine, etc.) : « Don’t be afraid. My telling can’t hurt you in spite of what I have done and I promise to lie quietly in the dark- weeping perhaps or occasionally seeing the blood once more- but I will never again unfold my limbs to rise up and bare teeth” (P.3)

 

Dans cette partie et dans chacune des parties à narration homodiégétique dans le roman, le narrateur, c’est-à-dire Florens, s’adresse directement au lecteur en utilisant le pronom personnel « you ». Ce you, nous le découvrons au fur et à mesure de la lecture, ne désigne pas le lecteur proprement dit, mais le forgeron qui, à la fin de l’histoire est, suivant les dires de Florens, l’unique destinataire de ce récit : « I am holding light in one hand and carving letters

with the other. My arms ache but I have need to tell you this. I cannot tell it to anyone but you. I am near the door and at the closing .now. What will I do with my nights when the telling stops? Dreaming will not come again. Sudden I am remembering. You won’t read my telling. You read the world but not the letters of talk. You don’t know how to. Maybe one day you will learn. » (P. 160)

 

  1. La place des personnages dans la narration :

 

  1. Une narration focalisée sur les femmes esclaves : La place de la femme et son rôle dans l’intrigue du roman 

 

Il est évident, à la seule lecture du livre, que le sort des femmes esclaves dans la ferme de Jacob, dans la ville du Maryland, en 1690, est la principale intrigue dans ce neuvième livre de Toni Morrison. La mise en scène à travers l’écriture de la vie d’esclaves noires est devenue une des principales distinctions de Toni Morrison. Porte-parole de la souffrance de son peuple due à la ségrégation, à l’esclavage aboutissant au racisme, Toni Morrison est devenue une véritable ambassadrice de sa race.

 

Elle n’hésite pas à creuser dans les fins fonds de l’histoire de la race noire-américaine et à restituer le passé, à  le reconstituer et à lui insuffler une seconde vie afin de lui conférer le pouvoir d’informer le lecteur, de lui transmettre le message dont elle est porteur.  Pour ce neuvième roman, Toni Morrison a choisi d’être le porte-parole de quatre femmes au passé différent, aux races différentes, à l’âge et à la couleur de peau différents, réunies par un même destin : l’esclavage.

 

De la naïveté de Florens à l’incrédulité de Sorrow, en passant par la loyauté de Lina et la dévotion de Rebekka pour la ferme et pour l’épouse, on peut faire le portrait de ces femmes aux multiples facettes, tantôt à bout par l’esclavage, tantôt mues par une force inconnue afin de garantir leur survie et leur vie par la même occasion.

 

Florens est l’intrigue de l’histoire, mais chacune des quatre esclaves est l’essence même du récit. Sans les manières de Sorrow, sans Lina pour essayer de parer les mauvais sorts qu’elle diffuse, sans la fermeté et l’amitié de Rebekka qui tient la ferme comme une vraie patronne, le récit serait morne, sans distractions.

 

Bien que quatre hommes (Jacob, Scully, Willard et le blacksmith ) sont également concernés par l’histoire, ceux-ci n’y jouent qu’un rôle secondaire et n’apparaissent pas aussi fréquemment que les quatre femmes dans les différents passages. Cette impression touche surtout Willard et Scully, qui ne sont considérés que comme des aides dans la ferme, et qui sont en quelque sorte facultatifs.

 

A l’inverse, le personnage de Jacob est quand même essentiel et joue un rôle prépondérant dans l’histoire. On peut même dire qu’il a déclenché l’intrigue, qu’il a provoqué l’histoire en allant vers D’Ortega pour lui prendre un esclave en échange de la dette qu’il lui doit et, de fil en aiguille, a ramené une Florens dévastée et trahie avec lui dans le Maryland. Le rôle de Jacob est donc de déclencher l’intrigue, mais également de panser les blessures des femmes esclaves dans sa ferme. Il a entre autres sauvé Florens des griffes de la perversion et préservé sa virginité comme sa dignité. Il a également sauvé la jeune Sorrow, tout comme il a épargné à son épouse la barbarie d’une vie anglaise terne et disgracieuse et qu’il a permis à Lina, celle qui a été rejetée par les presbytériens, d’avoir un toit sous lequel vivre.

 

En reconsidérant la place de chaque personnage dans le récit, on se rend compte de la haute considération accordée à celle de la femme, surtout des femmes esclaves dans la ferme de Jacob. Il ne faut pour autant pas négliger le rôle que ce dernier joue dans l’histoire comme dans la vie de chacune de ces femmes qui voient en lui un mari, un chef, un amant et un homme blanc au bon cœur.

 

Dans A Mercy, la femme est un symbole, une icône. Elle représente le destin funeste des esclaves, liés à leurs maîtres, domptés par une obéissance aveugle envers des seigneurs. Les femmes, censées êtres des « êtres fragiles », se révèlent plutôt être des survivantes. Cependant, nous les voyons également sous un autre jour : en tant que femmes au naturel, avec leur peur et leur prison mentale qui, la plupart du temps, les prend en esclavage. C’est de leur tête et de leur mental qu’elles sont le plus esclaves :

 

Florens est esclave de son refus de pardonner, du sentiment d’abandon provoqué par sa mère, de son entêtement à vivre dans le passé, à vouloir se remémorer sans cesse ces souvenirs dramatiques qui ont fait d’elle une fille fragile, effrayée et presque « craintive ». Si bien qu’à la fin, quand elle tente de se réfugier dans les bras du forgeron, celui-ci la repousse suite à l’accident avec Malaik en la qualifiant de « wilderness « (You are nothing but wilderness. No constraint. No mind. P.141)

 

C’est donc dans son for intérieur que la jeune Florence est prisonnière, prisonnière de ses sentiments, de ses souvenirs et de ses sentiments refoulés. Lina, elle, tente de construire une seconde vie après avoir survécu à une terrible épidémie décimant tous le peuple habitant dans son village. Rebekka tente tant bien que mal de remplir dûment son rôle d’épouse pendant que Sorrow, frivole et sauvage, se fraye petit à petit un chemin vers l’âge adulte et la maturité.

 

  1. Florens comme narratrice, personnage principale et intrigue de l’histoire

 

Florens, jeune africaine de 15 ans, est le personnage principal dans A Mercy. C’est suite à l’évolution de son histoire que le récit est né, c’est parce que sa mère l’a offerte à un inconnu et depuis qu’elle a foulé ses terres que la vie des autres esclaves et des Seigneurs ou autres personnages secondaires dans le récit ont été mises à nues. Le récit en a besoin, Toni Morrison le fait comprendre par la place de chacun des personnages dans le récit et par leur rôle respectif.

 

Florens est la narratrice pour mieux capter le lecteur, pour qu’il s’identifie à elle, qu’il la comprenne facilement et qu’il lui soit proche. Elle est également l’intrigue dans l’histoire, l’essence même du récit, celle grâce à qui le récit existe car c’est de sa vie, de son existence t de son être qu’il s’agit.

 

Suivant les structures narratives occidentales employées par Toni Morrison, nous découvrons que la fonction de Florens en tant que narratrice et personnage principal facilite autant la lecture, le rapprochement avec le lecteur que la compréhension du récit. Cette narratrice autodiégétique, narrant sa propre histoire en usant d’un présent non indicatif mais plutôt narratif, est la représentante de tout un peuple martyrisé par l’esclavage.

 

L’évolution de son histoire, depuis qu’elle a été offerte en esclavage à Jacob jusqu’à ce que le forgeron la rejette et qu’elle retourne chez Rebekka à la fin du récit, constitue le déroulement de l’histoire. Son mutisme après l’abandon de sa mère se reflète dans son changement d’attitude après le rejet que le forgeron lui a infligé. Au final, elle comprendra que le monde est un cercle infernal d’abandon et qu’elle ne sera en sécurité que dans la ferme, auprès de Lina, de Rebekka et de Sorrow, des femmes dans la même condition et état d’âme qu’elle capables de la comprendre et de lui donner toute l’affection qu’elle mérite. 

 

  1. La mère de Florens obligée de donner sa fille à Jacob

 

Les conditions de vie de la mère de Florens sont des plus déplorables dans le récit. Etant esclave de D’Ortega, elle vit oppressée, assouvissant chaque désir de son maître. Contrairement à Florens et aux autres femmes du récit, elle est tombée sur le maître typique même de l’anarchiste, de celui qui se considère come être supérieur et puissant. Il fait partie de ces blancs qui se sont évadés de l’enfer.

 

En temps normal, elle ne devrait en rien interférer dans les affaires de son maître, aussi en contractant une énorme dette et ne pouvant payer son créancier, D’Ortega piétine l’amour propre de la mère de Florens en voulant la léguer à Jacob en échange de ses dettes. La mère de Florens est obligée d’accepter son sort, elle ne peut intervenir ni refuser, ses conditions d’esclave l’en empêchent.

 

Pourtant, elle tente une approche qui lui permettra de sauver sa fille, bien que celle-ci n’en sache jamais rien. Elle parvient à persuader Jacob de prendre sa fille, la petite fille mal chaussée et mal vêtue qui, au premier regard, lui donne des fous rires. L’étrangeté de la situation et son aspect presque stupide est pourtant dissoute sous la terreur inscrite sur les yeux et le visage de celle qui vint d’offrir à Jacob son enfant. C’est cette terreur qui le marquera pendant assez de temps pour accepter l’offre.

 

Le geste de la mère de Florens devrait être louable : elle a permis à sa fille de survivre. Elle a décelé cette humanitude et cette différence chez Jacob, le grand homme blanc et blond, rien qu’en le regardant. Le destin de Florens est scellé dès cet instant, sa mère n’a d’autre choix que de croire que son enfant vivra dans des conditions plus humaines et moins traumatisantes que la sienne, et elle a raison. Le courage qu’il a fallu à la mère de Florens pour défier les ordres de son maitre et donner Florens à sa place lui permet de la sauver. Hélas, sa fille ne saura jamais ce que sa mère, par amour, aura sacrifié pour son bonheur. Florens est un sacrifice même, un sacrifice au caractère sacré et solennel.

 

  1. Rebekka, une épouse, une esclave et une européenne au bon cœur

 

Deux faits contradictoires marquent la narration dans A Mercy. Deux races, deux couleurs et deux statuts s’opposent, s’affrontent et se heurtent : le blanc et le noir. Rebekka fait partie de la race des blancs, des êtres purs qui, par une différence de couleur, se voient tout contrôler et dompter. A cette époque, l’homme dompte l’homme. 

 

Rebekka, bien élevée et polie, fait preuve d’ingéniosité et d’amitié tout en tenant la ferme de son mari. Elle se lie d’amitié avec chacune des femmes esclaves comme elle, bien qu’elle ne fréquente pas beaucoup Sorrow. Florens, étonnée de la voir un jour gifler Sorrow, avoue qu’elle n’a jamais battu ni frappé aucun de ses esclaves auparavant.

 

Ses attitudes, son charisme, son charme et sa façon de se conduire reflètent l’intelligence d’une femme sur laquelle la responsabilité de toute une ferme incombe. En tant qu’épouse, Rebekka est soumise, attendant patiemment quand son mari part en tournée dans les autres plantations, s’occupant avec dévotion de leurs enfants jusqu’à leur mort, prenant soin du personnel et des mains d’œuvres, restant au chevet de son mari lorsqu’il a eu la variole et qu’il en a décédé.

 

En tant qu’esclave, Rebekka est soumise corps et âme à son mari qui n’est autre que son maître. C’est son rôle en tant qu’européenne et blanche qui nous donne surtout une idée de mesure de la bonté d’âme qu’elle a, poussant Lina à lui vouer une affection démesurée. Rebekka ne fait aucun état d’une différenciation de couleur. Elle accueille chaque nouveau venu dans la ferme de son mari avec les mêmes égards, laisse même ses enfants entre les mains de Lina qui est pourtant noire. Elle représente une des rares personnes à posséder un sentiment d’égalité avec les noirs, malgré la différence de couleur, de culture et de façon de penser.

 

  1. Lina, la servante bienveillante

 

Lina joue le rôle de la servante, mais en réalité, comme Sorrow l’indique, elle aime tout contrôler : « Patrician squatted at the edge of the garden eating a yellow apple and watching her. Sorrow waved. Patrician waved back Lima appeared and hurried the little girl away. From then on it was clear to Twin, if not to Sorrow, that Lina ruled and decided everything Sir and Mistress did not. Her eye was everywhere even when she was nowhere. She rose before cock crow, entered the house in darkness, touched a sleeping Sorrow with the toe of her moccasin and lingered while refreshing the embers. She examined baskets, looked under the lids of jats. Checking the stores, thought Sorrow. No, said Twin, checking you for food theft.” (P. 122)

 

Il est vrai que Lina aime tout contrôler, mais la plupart du temps, elle est mue par ses instincts et ses habitudes assez « primitives » d’indienne.  Incapable de protéger les siens contre l’épidémie qui faisait rage dans son village, elle essaie de se rattraper auprès de Florens et de Rebekka. Sa dévotion envers son maître et sa maîtresse fait d’elle une servante plus que redoutable, n’hésitant pas à tuer un nouveau-né afin de préserver la paix, et le bonheur de ses maîtres, mais également de Florens, sa petite protégée. 

 

Mais quelle que soit la bienveillance de Lina, elle n’aime pas Sorrow et n’hésite pas à le lui montrer. Depuis sa venue dans la ferme, Lina la soupçonne d’être à l’origine des malheurs qui s’y produisent.

 

  1. Sorrow, une « hybride » peu commune

 

De tous les habitants de la ferme, Sorrow est la plus antipathique et la plus étrange. D’origine indienne, elle est la seule esclave à être tombée enceinte dans la ferme. Le père de ses enfants reste inconnu et n’est pas un sujet dont on aime débattre dans la ferme. Sorrow a un ami imaginaire (Twin) qui lui dicte ses attitudes et lui montre la voie à suivre.

 

On peut déduire de son histoire qu’elle na pas été heureuse dans sa vie et qu’aujourd’hui plus encore, elle est profondément marquée par la perte de son premier enfant est décidée à garder son second enfant en vie. D’ailleurs, c’est ce second enfant qui sera la source de son changement, une sorte de seconde vie pour elle, une inspiration qui lui donnera le courage d’avancer et de changer, de devenir une mère à  part entière.

 

 

  1. Le racisme, l’esclavage et l’outrage à la personne comme source de narration

 

La souffrance du peuple noir-américain depuis la pratique de l’esclavage menant au racisme est un des thèmes les plus récurrents et les plus exploités par Toni Morrison. Toni Morrison est un écrivain noir-américain qui se sent concerné par l’histoire de sa race et se sent en devoir de la faire connaître aux autres. Ses livres représentent la culture noire-américaine dans tous ses états, depuis sa formation jusqu’à son apogée.

 

Toni Morrison milite pour le droit des noirs. Elle a soutenu le candidat démocrate Barack Obama en 2011. Elle organise et anime divers débats et séminaires autour du thème de la race noire-américaine, de son apparition et de son apogée dans le monde. Elle dénonce l’esclavage et ses pratiques obscènes et inhumaines des maîtres et des seigneurs de l’époque. 

 

Dans A Mercy, elle montre explicitement comment on traitait les noirs à l’époque de la ségrégation : « Then each visitor turns to look at me. The women gasp. The man’s walking stick clatters to the floor causing the remaining hen to squawk and flutter. He retrieves his stick, points it at me saying who be this? One of the women covers her eyes saying God help us. The little girl wails and rocks back and forth. The Widow waves both hands saying she is a guest seeking shelter from the night. We accept her how could we not and feed her. Which night the man asks. This one past she answers. One woman speaks saying I have never seen any human this black. I have says another, this one is as black as others I have seen. She is Afric. Afric and much more, says another. Just look at this child says the first woman. She points to the little girl shaking and moaning by her side. Hear her. Hear her. It is true then says another. The Black Man is among us. This is his minion. » (P.111)

 

Les visiteurs de Widow, des religieux venus pour exterminer les démons qui se font passer pour des humains, n’accordèrent pas le bénéfice du doute à Florens lorsque celle-ci s’est expliquée. Pour eux, Florens était un envoyé du diable, elle représente le passé en chair et en os et apporte le malheur. Quand elle tend la lettre de sa maîtresse expliquant la raison de sa présence dans cette maison et l’importance de sa missive, les gens refusent de toucher à la lettre, lui demandent de la poser sur la table, pensent tout haut que le diable lui-même aurait pu écrire une telle lettre, et interdit à Florens de quitter les lieux jusqu’à ce qu’ils se soient concertés sur ce qu’ils feront d’elle au final. L’état  de santé décadent de Rebekka n’est pas pris en compte, le racisme bouche les yeux et les oreilles de l’homme blanc de sorte qu’il finit par négliger la vie de ses semblables.

 

CONCLUSION

 

Sorti en 2009 chez l’éditeur Knopf, A Mercy de Toni Morrison est une œuvre d’art retraçant l’histoire du peuple noir-américain, depuis ses origines. Florens, une jeune nègre de 15 ans, joue le rôle du personnage principal. Son destin, funeste et ombrageux, est retranscrit dans les 167 pages constituant le roman proprement dit.

 

Florens est encore jeune, mais elle comprend qu’elle a été offerte à un homme blanc par sa mère. Elle comprend l’abandon, la trahison et le manque de considération que sa mère lui témoigne. Manifestement, Florens a pris de travers l’histoire. Mais comment ne pas se tromper quand personne n’est là pour vous expliquer que votre mère vous a sacrifiée au prix d’une meilleure vie  et du bonheur ? Depuis le début du récit, on note une amertume de la part de Florens pour sa mère. Elle ne comprend pas son acte.

 

C’est cette amertume et cette incompréhension qui feront de Florens une battante, malgré bien des apparences. Florens est une femme intelligence. Elle sait compter, multiplier, écrire et lire. C’est une esclave intelligente et mûre qui voyagera jusqu’à la ferme de Jacob et se liera d’amitié avec les femmes de la ferme, tombera amoureuse du forgeron et ira le retrouver après un voyage pénible.

 

Florens est une esclave bien élevée. L’auteure lui a doté la faculté de pouvoir écrire, lire et écrire. Elle est très utile dans la ferme, ce qui provoque la jalousie peu cachée de Sorrow. Ce neuvième roman de Toni Morrison, sur lequel elle ajoute dans une interview «I wanted to stress the sacrifice). Le sacrifice dont elle fait mention ici est celui d’une mère abandonnant la vie de son enfant entre les mains d’un cultivateur et propriétaire de champs de tabac.

 

Le récit se concentre alors sur la vie de cette jeune esclave, mais également sur celle des autres esclaves avec elle, surtout des femmes. Ces femmes vont devenir les symboles d’une Amérique noire-américaine depuis ses origines jusqu’à aujourd’hui. Elles portent un message en chacune d’elles et sont meurtries par un passé lourd et douloureux. Ce traumatisme est leur point commun. Jacob constitue également un autre point commun de grande ampleur pour elles car c’est le sauveur de chacune de ces femmes.

 

Dans cette ancienne Amérique, la cohabitation entre noirs, blanc et indiens est encore possible. Mais la révolte de Nathaniel Bacon vaudra une ségrégation et un racisme démesurés chez le peuple noir-américain. Des lois sont inventées, toutes en faveur du blanc et en défaveur du noir.

 

L’écriture de Toni Morrison que A Mercy renferme condamne l’esclavage et y apporte beaucoup de lumière et de précision. Le mode de vie à l’époque, marqué par le commerce d’esclave et la culture de feuilles de tabac, sera détaillé minutieusement à travers le récit. Toni Morrison, pour toucher le lecteur et l’inviter à aimer et à honorer l’histoire d’une lutte pour la survie et l’esclavage et la liberté d’un peuple, emploie une forme de narration homodiégétique. Elle compte, ainsi, parvenir jusqu’au lecteur et lui délivrer le message important que son livre véhicule.

 

L’auteure explore avec une structure narrative mettant en valeur le style d’écriture occidental et la culture noire-américaine toute l’histoire du peuplement de l’Amérique depuis l’apparition de l’esclavage jusqu’à la pronation du racisme. La narration, tour à tour homodiégétique ou hétérodiégétique, avec une focalisation interne ou externe, est confiée pour la plupart du temps à Florens et au narrateur non impliqué dans la narration.

 

La lecture du livre, grâce à une utilisation précise et concise du mixage de la structure narrative afro-américaine et occidentale, permet de se rapprocher davantage du lecteur qui est représenté par le pronom « you ». Ce you n’est pas uniquement caractéristique d’un lecteur normal mais aussi  – et surtout- de l’être aimé pour Florens, de son amant, du forgeron. Car Toni Morrison a beau dépeindre un univers sombre où tous les personnages, hommes comme femmes, sont en proie à un traumatisme relié à leur passé respectif, elle prouve également que dans ce monde de barbare au XVIIe siècle, l’amour, l’espoir et le respect existaient également.

 

Annexes I

 

Œuvres de Toni MORRISON

 

Romans

 

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MORRISON Toni. Sula. 1973, New York: Plume, Penguin books, 1982, 174 p.

 

MORRISON Toni. Song of Solomon. 1977, New York: Plume, Penguin books,

1987, 337 p.

 

MORRISON Toni. Tar Baby. New York: Knopf, 1981, 306 p.

 

MORRISON Toni. Beloved. 1987, New York: Plume, Penguin books, 1988,

275 p.

 

MORRISON Toni. Jazz. 1992, New York: Plume, Penguin books, 1993, 229 p.

 

MORRISON Toni. Paradise. New York: Knopf, 1998, 318 p.

 

MORRISON Toni. Love. New York: Knopf, 2003, 202 p.

 

MORRISON Toni. A Mercy. New York: Knopf, 2008, 167 p.

 

MORRISON Toni. Home. New York: 2010

 

Bibliographie:

 

Ouvrages 

 

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Sitographie :

 

http://www.louvre.fr/progtems/le-louvre-invite-toni-morrison

http://www.histoquiz-contemporain.com/Histoquiz/Lesdossiers/interviews/noirsus/Dossiers.htm

 

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