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L’évolution de la psychose : De Pinel à Lacan

Sommaire

  1. Introduction générale. 2
  2. Approche théorique. 4
  3. La psychose. 4
  4. Dimension narcissique chez le sujet psychotique. 4
  5. La structuration subjective dans la triangulation familiale. 8
  6. Structuration du sujet dans son rapport à l’autre. 10
  7. Psychotique malade du signifiant 10
  8. La schizophrénie. 13
  9. Le traumatisme selon Ferenczi 14
  10. La notion de rupture dans le traumatisme. 14
  11. Confusions de langage traumatique. 15
  12. Traumatisme et vécu dans l’enfance. 15
  13. Origine du traumatisme. 15
  14. Concept de dissociation. 16
  15. Réalités cliniques du traumatisme. 17

III.      Analyse du cas clinique. 19

  1. VIE FAMILIALE ET AFFECTIVE.. 19
  2. Parents. 19
  3. Fratrie. 20
  4. Maritale Sentimentale. 21
  5. VIE PERSONNELLE\SOCIALE.. 22
  6. Scolarité. 22
  7. Vie sociale. 23
  8. VIE PROFESSIONNELLE.. 26
  9. Cursus. 26
  10. VIE AMICALE.. 28
  11. Amis, vie sociale. 28
  12. Loisirs. 30
  13. VIE MEDICALE.. 30
  14. Première Hospitalisation le 11/04/1996 sous la demande d’un tiers (HDT) 30
  15. Centre hospitalier Loire Vendée Océan. 31
  16. Hospitalisation sous la demande d’un tiers signé par sa sœur. 31
  17. Entrée à la Passerelle le 17/09/2007. 32
  18. Attentes de M.B concernant la psychothérapie. 33
  19. Interprétation du cas clinique. 34
  20. Conclusion. 35
  21. Bibliographie. 36

VII.    Annexes. 39

 

 

 

I.                   Introduction générale

Pinel sera le premier à s’intéresser à la psychose ainsi qu’il la décrit en 1978 au sein de son ouvrage « La nosographie philosophique » qui consiste en une classification des maladies mentales basées sur le principe des sciences naturelles.

Par la suite, Charcot s’intéressa également à la psychose, notamment il élabora le concept de psychose hystérique.

C’est en 1980 que Freud va remettre en cause l’article de Charcot portant sur « Les mécanismes psychiques des phénomènes hystériques » et va révolutionner en quelque sorte l’approche des maladies mentales. Il va élaborer tout au long de sa vie un modèle explicatif de la structuration et des mécanismes psychiques.

D’autres théories psychanalytiques vont ensuite se développer sur ce modèle bien qu’en dehors des axes que celui que Freud à pu développer, par exemple, Winnicott et Mélanie Klein.

Freud ne pensait pas possible le transfert analytique dans la psychose, cependant Lacan pense que le transfert peut provoquer le déclenchement de la psychose.

D’après Freud, il existe un mécanisme de défense qui repose sur une interversion dans la psychose. Il traduit d’ailleurs cette transposition, cette permutation à travers deux cas cliniques : la psychose « par débordement » et « par hallucination » qui se manifeste par des confusions hallucinatoire, ce qui rappelle des grandes similitudes dans l’étiologie de la schizophrénie avec la « Dementia Praecox d’Emile Kraepelin».

De plus, Freud souligne l’importance des symptômes associés au délire dans la paranoïa qui seraient étroitement liés à des estimations inconscientes relatives au sexe, un souvenir érotique inhibé[1].

Cette révélation entrainerait un mécanisme de défense qui s’effectue par jaillissement du Moi dans l’extérieur et dont la représentation est contradictoire.

Le concept d’autoérotisme (1899) comme origine et cause de la paranoïa est ainsi apparu dans le sens ou :

  • Freud met en exergue les symptômes[2] par rapport à la maladie tout en se focalisant principalement sur l’acquis, à savoir la dynamique défensive, au lieu de l’inné, le naturel.
  • Freud, soulève une différence entre le sexe et la réalité traumatisante rejetée par le Moi à travers un mécanisme de dénégation délirante.

La théorie Freudienne de ce qu’est la psychose relèverait ainsi de la paranoïa de laquelle s’est formé, pathologiquement, un retrait de la libido, du concept sexuel de l’objet du Moi : « Ainsi le Moi paranoïde est-il surinvesti-égoïste, mégalomane »[3] [4].

Freud délimitera alors cette dynamique libidinale en partant de l’autoérotisme pour arriver au choix objectal d’une autre personne à travers le narcissisme en trois étapes immuables :

  • Le regroupement des pulsions sexuelles autoérotiques qui va identifier comme objet d’amour l’accaparation du corps
  • Le choix homosexuel de l’objet
  • L’hétérosexualité

Freud évoquera que dans la psychose il y a un trouble entre l’interaction du Moi et le monde extérieur, puisqu’il y a un déni de la réalité.

Freud se rapprochera alors de Bleuler dans sa conception de la schizophrénie en prônant la faible implication de l’étiologie sexuelle de la paranoïa dans la schizophrénie. Toutefois, chez le paranoïaque interviendrait « le facteur […] actif des blessures sociales » qui serait étroitement lié à la « composante homosexuelle de la vie affective » [5][6].

D’ailleurs, tant la schizophrénie que la dérive archaïque à l’autoérotisme rend compte de ce caractère en tant qu’outil, instrument de l’homosexualité.

Pour le cas du patient M.B, l’on se basera davantage sur la théorie Lacanienne qui n’est que la continuité et l’approfondissement de la théorie Freudienne de même que la conception du traumatisme selon Ferenczi.

La théorie de la psychose conjointement à celle de la schizophrénie sera abordée dans une partie théorique en abordant les différentes étapes de la structuration d’un sujet dit « normal » et psychotique en partant de l’enfance et de l’émergence du symbolique ainsi que les conséquences de la structuration d’un sujet psychotique dans son rapport à l’Autre et dans la construction de la chaine signifiante.

L’analyse du cas clinique sera ensuite effectuée afin de déterminer les causes de la psychose du patient M.B avant de conclure.

 

 

 

II.                Approche théorique

A.                La psychose

Le terme « psychotique » ramène principalement à des « idées délirantes ou des hallucinations prononcées » qui sont fortement soulignées par la « perte des frontières du moi ou une perturbation grossière de la perception de la réalité »[7] [8].

Quatre (04) types différents de troubles psychotiques sont rencontrés:

  • La schizophrénie
  • Les psychoses délirantes chroniques (paranoïa, psychoses hallucinatoires chroniques, paraphrénies)
  • Le trouble psychotique bref ou bouffées délirantes aiguës
  • Le trouble schizo-affectif.

Le trouble psychotique rencontré fréquemment et le plus classique étant la schizophrénie.

Lacan affirme que la psychanalyse ne doit pas reculer devant la psychose, et surtout que la théorie Lacanienne se veut être la continuité et l’approfondissement de la théorie Freudienne, l’essai explicatif de la psychose se basera donc sur les différentes étapes de la structuration d’un sujet « normal » et « psychotique » en débutant dès l’enfance afin de déterminer l’émergence du symbolique, de même que sur le rapport du sujet psychotique à l’Autre complémentairement à la construction de la chaine signifiante.

1.                  Dimension narcissique chez le sujet psychotique

a)                  Le cas Schreber analysé par Freud

Le cas Schreber est abordé au travers de la notion de la libido et du narcissisme.

Tout d’abord le terme de narcissisme est défini comme étant « l’amour que porte le sujet à un objet qui est lui même »[9]. En reprenant le terme des sexologues créé à partir du mythe de Narcisse qui était amoureux de son image, Freud introduira en 1910 ce terme afin de rendre compte du choix d’objet chez les homosexuels.

En 1911, il va proposer le stade de l’évolution sexuelle intermédiaire entre l’auto-érotisme et l’amour d’objet.

Ce n’est qu’en 1914 qu’il va introduire le terme « narcissisme » dans l’ensemble de la théorie psychanalytique de part son article intitulé « Pour introduire le narcissisme ». D’ailleurs, le Narcissisme est une fixation orientée sur soi-même se traduisant par un investissement de la libido sur le Moi, c’est une étape normale dans le développement de l’enfant. Alors que chez l’adulte la notion de narcissisme est un retour à ce stade archaïque du développement. La libido est « l’énergie psychique des pulsion sexuelles »[10].

A cette période, l’enfant rassemble ses pulsions sexuelles qui agissaient sur un mode auto-érotique pour conquérir un objet d’amour et commencer par prendre son corps comme objet d’amour : c’est un temps de la construction de l’autoérotisme et de la relation d’objet où la libido va investir dans des zones du moi et de l’autre c’est ce que Freud appellera le narcissisme primaire.

Ce n’est qu’après avoir investi les objets, que la libido peut faire retour sur le moi : c’est le narcissisme secondaire : étape qui va conduire l’enfant à choisir un objet doué d’organes génitaux identiques aux siens puis par la suite différents des siens.

Il est à rappeler que les pulsions homosexuelles sont détournées de leur objectif sexuel et employées pour les pulsions sociales.

En rattachant la découverte de la dimension narcissique chez le sujet psychotique, Freud repérera une faille dans la construction libidinale qui est située quelque part entre le stade de l’auto-érotisme et du narcissisme. Effectivement, une production délirante d’ordre morbide étant une tentative de reconstruction de ces investissements, Freud en vient à confirmer que ce qui fait défaut dans la psychose c’est « ce qui est aboli du dedans revient du dehors ».

La tentative de guérison ramènerait la libido et supprimerait ainsi le refoulement, autrement dit c’est la libido libérée qui se fixerait sur le Moi.

C’est ainsi qu’il va y avoir une régression du Moi avec un retour au stade du narcissisme : le stade où le Moi du sujet est l’objet unique et c’est ce qui fait défaut. La régression peut aller jusqu’au stade de l’auto-érotisme infantile avec l’abandon de la relation d’objet.

Freud va dégager les causes de ce refoulement dans le stade du narcissisme. La libido va se trouver détachée du monde extérieur, elle va venir renforcer par la régression plusieurs point de fixation, elle va venir également renforcer le désir ainsi que le fantasme homosexuel d’après Freud ce qui va influencer le sujet à sexualiser les investissements sociaux notamment ceux avec le même sexe. La libido qui se libèrerait représenterait un danger pour le sujet dans le sens où elle va ramener des représentations inacceptables. Cette menace est colossale par le fait qu’elle va constituer une fixation de ces sujets au stade du narcissisme, ce qui ferait la menace de la castration un danger vital de la désagrégation du Moi. Le mécanisme qui va être utilisé par le sujet comme tentative de résolution pour remédier à cela, c’est la projection.

b)                  La paranoïa

Dans le cas de Schreber, particulièrement paranoïaque, il y a défense de son fantasme de désir homosexuel par la fabrication d’un délire de persécution de cet ordre.

Par cela, il se protégeait de se désir homosexuel qui était au centre du conflit morbide, le délire met en relation les rapports affectifs de l’individu avec son prochain avec l’érotisme.

Comme toutes les formes de paranoïa se ramènent à diverses façons par la contradiction d’une proposition unique, la persécution va se traduire par « Moi  (un homme) », je l’aime (lui, un homme), il peut y avoir un délire de persécution du type « je ne l’aime pas, je le hais ». Effectivement, le mécanisme de formation des symptômes de la paranoïa vise que les sentiments, la perception intérieur, soient remplacés par une perception venant de l’extérieur », c’est à dire qu’il va y avoir une transformation effective par la projection tel que « je le hais » deviendrait « il me hait » ce qui justifie la haine que le sujet lui porte, le réel sentiment interne va donc se retranscrire en perception externe.

Le délire de jalousie, le changement de la qualité de la personne qui aime suffisent à projeter le processus entier hors du Moi pour aboutir aux délires de grandeur qui font référence à une surestimation sexuelle du Moi.

Durant le processus de projection, le sujet va rendre la production délirante acceptable à la conscience : « il me hait » (pour le délire de persécution), « je m’en aperçois, elle m’aime » (pour le délire érotomaniaque).

c)                  Le narcissisme et le stade du miroir par Lacan

Lacan va suivre la démarche Freudienne en reprenant la notion de narcissisme que Freud avait développée en 1914.

Pour Lacan, le narcissisme est la libido investie sur le corps propre mais également la relation imaginaire dans les relations entre les humains, c’est à dire que l’on s’aime dans l’Autre, nos identifications érotiques vont émerger entraînant l’établissement de la base des tensions agressives.

Pour comprendre la construction du sujet il faut débuter par le stade de l’auto-érotisme qui selon Lacan se définit comme « une des conséquences régulières de la causation première du désir, et l’angoisse de castration ne serait pas un dernier terme, mais seulement une modalité spécifique de la fonction de l’objet qui ce désir la cause. Ce qui est opérant dans cette fonction doit d’abord être considéré à partir d’une coupure entre le sujet et l’Autre, qui n’est pas uniquement le fait du signifiant mais qui résulte de sa rencontre avec certaines particularités anatomiques ou physiologiques de l’humain, coupure qui résonne avec celle qui est propre au langage articulé. Cette coupure se produit entre l’enfant et la mère, puis ultérieurement entre le sujet et l’Autre, mais aussi à l’intérieur de l’unité subjective. Elle détermine trois termes et non pas deux, mais dont l’un reste élidé tout en agissant, ce qui a un certain nombre de conséquences sur le fonctionnement du désir et son rapport à la jouissance. »[11].

C’est ce que Lacan va conceptualiser par le stade du miroir[12].

Ce stade fonctionnerait sans parole, il va mettre en jeu la représentation que l’enfant va se faire de son unité, il ne fonctionnerait pas s’il n’y avait pas le nom étant donné que l’enfant à conscience de son unité qui répond au nom dont on l’appelle.

On peut alors dire que le nom propre est en quelque sorte le répondant symbolique de cette forme qui constitue l’image du corps.

Mais l’accent est mis sur « le virage du –je- spéculaire au –je- social » c’est à dire le moment où le sujet va se dire que c’est lui dans le reflet du miroir.

C’est à dire que ce virage va donner la possibilité de se reconnaître dans le miroir. C’est ce virage qui donne la possibilité de se désigner dans une image ou une forme avec toutes les conséquences qui peuvent en découler : de la rivalité ainsi que de l’agressivité.

Cette reconnaissance en tant qu’unité n’est pas inscrite dans les gènes et c’est bien pour cela que parfois elle n’a pas lieu.

C’est à ce carrefour que l’on peut voir émerger la psychose.

Le stade du miroir est la possibilité de se désigner en tant que Moi. Le « Je » spéculaire peut dans certains cas ne pas se voir évolué au « je » social ce qui revient à dire que la personne se voit dans le miroir mais ne se reconnaît pas, c’est comme si elle voyait une autre personne totalement étrangère à elle-même.

Dans ce cas, le sujet n’a pas été captivé par son image et l’image n’a pas été constituante pour lui.

Le stade du miroir est une identification primordiale de l’enfant à cette image qui va nommer la structuration du « je ».

Il met un terme au fantasme de corps morcelé.

Le narcissisme secondaire s’inscrit dans la suite du stade du miroir et c’est l’instant où l’enfant va investir un objet extérieur à lui.

C’est à partir de cette non reconnaissance ainsi que cette image non constituante que le sujet va avoir de lui même au stade du miroir que Lacan va fonder sa théorie en différenciant la névrose de la psychose.

 

 

2.                  La structuration subjective dans la triangulation familiale

a)                  La relation fusionnelle

Selon Freud, la schizophrénie résulterait de la défaillance du Moi, de la fonction du Moi face au monde extérieur, notamment aux contraintes, aux conflits amenés par la réalité : « conflit entre le moi et le monde extérieur [13]».

De plus, Freud évoque dans la schizophrénie la présence d’un émoussement, une restriction certaine qui serait engendrée par « la perte de relation avec le monde extérieur »[14].

Ce conflit, cette rupture avec le monde extérieur serait dus au fait que la libido lui ait été retiré pour être exclusivement dirigée vers le « Moi ». Autrement dit, il s’agirait principalement de la conséquence d’un Œdipe inachevé compte tenu du fait que la fonction de ce dernier occupe le centre de toutes structures cliniques. C’est ce que Freud désigne par ailleurs comme une « régression temporelle de la libido » qui permettrait de distinguer la schizophrénie de la paranoïa.

La schizophrénie serait alors déterminée par la retraite et la fixation de la libido qui lui permettrait d’accéder à un état auto-érotique proche du développement archaïque qui se situerait antérieurement à l’étape du miroir qui offre une image fragmentée du corps propre.

A ce stade, l’Autre n’est pas présent, la fixation ne permet d’ailleurs pas de différencié suffisamment le monde extérieur. Effectivement, le seul sujet que le malade perçoit qui est lui-même se traduit à travers un corps-organisme morcelé et dont les sensations se manifestent à travers l’incohérence de son discours : perceptions désorganisées.

La paranoïa se différencierait donc de la schizophrénie par la position postérieure de l’ancrage de la libido qui aurait pour conséquence un état narcissique.

Un narcissisme qui traduit un monde extérieur affermi complémentairement à la présence de l’Autre avec une perception du corps propre comme une unité allégorique.

Il y a ainsi une notion de forclusion dans la schizophrénie, forclusion subséquente à un rejet qui est qualifié de symbolique car provoquant une commutation de la réalité.

De ce fait, Freud préférera le terme de paraphrénie pour définir la schizophrénie par déductions psychodynamiques. Effectivement, il apparaitrait que la schizophrénie puisse être traduite comme une névrose narcissique, tel que les psychoses de type maniaco-dépressives et paranoïaques, qui dépendrait directement du refoulement, d’une inhibition, d’une restriction.

A travers ce refoulement, la libido initialement rattachée à « l’objet premier » se détacherait tant des personnes que du monde extérieur pur se focaliser, s’accumuler et s’ancrer sur le « Moi ». C’est cette fixation qui rend alors le sujet prédisposé à la maladie.

b)                  L’intrusion de la figure paternelle

(1)               Le père imaginaire

Le père imaginaire va venir de manière intrusive en ce manifestant par une remise en cause de l’identification phallique. L’enfant va prendre en compte l’intérêt que va porter la mère au père dans la réalité. L’enfant va alors se convaincre qu’il ne peut pas tout assouvir pour l’Autre dans la réalité de son existence et par conséquent ne pouvant pas être l’objet maternel.

L’identification phallique et sa remise en cause peut être effective grâce à la médiation signifiante de la mère.

La mère est dénuée du phallus dans l’espace imaginaire de la relation fusionnelle, c’est à se moment là que le rôle du père doit être effectif, déloger le désir de l’enfant car il a le phallus. On peut considérer ce phallus comme le rival de l’enfant auprès de l’Autre.

La figure paternelle va venir faire vaciller l’identification de l’enfant à savoir s’il doit être ou pas le phallus.

(2)               La médiation signifiante

Il y a deux principes qui vont permettre à l’enfant d’avoir accès à la remise en cause de l’identification phallique.

Le premier étant la médiation signifiante de la mère, c’est à dire que l’identification va être suscitée par les exigences de la réalité. C’est à l’aboutissement de cette médiation que la dimension symbolique va faire son apparition dans la dialectique œdipienne et qu’elle va être structurante ou non.

Lors de cette médiation la mère va signaler à l’enfant qu’il n’est pas l’objet qui lui manque. L’enfant va donc comprendre qu’il n’est pas l’objet du phallus pour la mère et que par conséquent qu’il n’a rien à attendre de cette identification imaginaire du phallus.

Toutefois il est important que la mère exprime sa dépendance au père et que le père confirme celle-ci afin de se positionner comme celui instaurant la loi. C’est ainsi que nait le registre symbolique et la chaine signifiante.

(3)               Au sein de la psychose

Lacan va conceptualiser ce qui fait défaut dans la psychose, au niveau de la chaine signifiante.

On peut dire que dans la psychose il y comme un « trou symbolique » qui fait référence à un manque que l’on peut assimiler au déficit du signifiant du nom-du-père, qui ne parvient pas à est le substitut du désir de la mère. Lacan nommera ce concept « la forclusion du nom-du-père ».

En s’appuyant sur l’étude des écrits du président Schreber, Lacan va essayer de définir l’élément qui est organisateur de la chaine signifiante sur lequel porte la forclusion au sein des psychoses.

Le terme de forclusion est issu de monde juridique qui signifie la perte de faculté à faire valoir un droit à l’expiration d’un délai. Lacan va élargir l’interprétation freudienne concernant le rôle majeur des tendances homosexuelles du président Schreber dans l’apparition de sa psychose. L’accent sera mis sur l’élément paternel présent dans la problématique de Schreber, son inéluctabilité  subjective à affronter la question de l’identification paternelle pour identifier le signifiant primordial forclos nommé le nom-du-père. Pour Lacan cette fonction paternelle est fondamentale, elle est structurante pour le sujet et lorsque celle-ci n’a pas été inscrite dans la chaine signifiante alors elle part à la dérive.

3.                  Structuration du sujet dans son rapport à l’autre

Lacan atteste que le sujet va dépendre essentiellement de ce qui ce passe en l’Autre. L’inconscient se constituant au discours de L’Autre, c’est au sein du discours de l’Autre que le sujet va donc réceptionner le message qui lui aura été transmis par l’Autre.

Cependant si ce message n’est pas acceptable pour le sujet, alors ce qui n’aura pas été admis a été disposé dans l’Autre fera retour à son insu, le lapsus en est l’exemple.

Le discours se trouve au lieu de l’Autre c’est à cet endroit que la parole de l’Autre prend ascendance. Lacan va décrire dans le séminaire III[15] et dans ses écrits[16]le schéma L qui va faire circuler la parole à partir du grand Autre. Ce circuit correspond à la chaîne signifiante nommée ainsi par Lacan ; elle va traverser l’axe symbolique A-S (S faisant référence à l’existence du sujet et A au grand Autre) et l’axe imaginaire entre le Moi et l’image de son semblable. Il est essentiel que l’entité de l’Autre soit établie  pour fonder l’adresse du sujet qui parle.

Dans la psychose, l’Autre est forclos. Il y a un transfert au niveau de l’axe imaginaire a-a’. « Le sujet est séparé de lui-même par l’ordre du langage, et se retrouve représenté en un tenant-lieu qui fonctionne en place de a (Moi) »[17]. Le Moi va se prendre pour le « je » (S)Le discours vient de l’autre et non de l’Autre. Il va s’agit de son propre message qui parvient au sujet de cet autre semblable, son double.

Dans le contexte des hallucinations verbales, le sujet est totalement identifié à son Moi, avec le quel il parle, c’est en fait « lui qui parle à lui ».

Dans la psychose se dévoile le discours intérieur du sujet lorsqu’il y a des hallucinations visuelles, verbales, auditives…ce discours peut être analysé comme étant vécu par le sujet. L’hallucination est une forme de rejet ; au lieu ou l’objet indescriptible est rejeté dans le réel, un mot se fait entendre, venant à la place de ce qui n’a pas de nom. N’ayant pas suffisamment de signifiant pour nommer l’objet, il va déclencher le débordement imaginaire.

4.                  Psychotique malade du signifiant

Les conflits latents vont être représentés par des enchainements langagiers rigoureux que l’on va pouvoir percevoir dans les mots d’esprit permettant d’évoquer un désir, les lapsus, les oublis, ces différentes problématiques seront rencontrées sur le concept du signifiant selon Lacan. Le signifiant se définit comme un « élément du discours, repérable au niveau conscient et inconscient, qui représente le sujet et le détermine »[18]. Il y a un lien conventionnel entre le signifiant, le son, et le signifié, le sens.

a)                  Signifiant

Chez le psychotique il y a un défaut de la chaine signifiante se traduisant par un manque. C’est de cette carence du signifiant dont va témoigner le délire. Lacan note que le délire peut-être plus ou moins compréhensible, mais ce qui le caractérise « …c’est qu’il est inaccessible, inerte, stagnant par rapport à toute dialectique »[19]

Lacan parlera de « signifiant dans le réel », le signifiant s’inscrit dans le réel lorsque la chaine signifiante part à la dérive. Mais pour Lacan ce manque du signifiant n’est pas la cause essentielle qui va conduire à la psychose, il y a également des causes occasionnelles qui se traduisent par des évènements de vie mais qui fait toujours appel au signifiant du Nom-du-père ce qui rend son défaut efficient. Parfois cette défaillance peut avoir des conséquences ce déclenchant tardivement à la rencontre d’Un père réel, qui pourrait être illustré par le cas Schreber. [20]

b)                  Les signifiants au sein de la psychose

Lacan cadre et délimite son enseignement au niveau du : Réel, Imaginaire et du Symbolique, notamment à l’ordre symbolique.

Il aborde ainsi la schizophrénie par son statut parlètre, autrement dit qui « mérite » l’écoute.

Lacan apporte ainsi dans sa théorie le fonctionnement psychotique qui pourrait être transposable à la schizophrénie[21].

Selon Lacan, la psychose ne fait pas partie de l’imaginaire comme une image non satisfaisante du père mais plutôt d’un déficit symbolique par le rejet fondamental d’un signifiant comme le serait le phallus par rapport à la castration, autrement dit la forclusion du Nom-du-père[22].

L’holophrase serait également applicable à la schizophrénie d’après Lacan. Effectivement, l’holophrase ou concept de solidification du couple des signifiants engendrerait l’arrêt, l’interruption des lois du langage, notamment la métonymie et la métaphore, subséquemment à l’éradication du lien, de l’intervalle qui devrait être présent entre le couple des signifiants pour qu’il puisse représenter le sujet.

Le fonctionnement mental du malade schizophrène est donc traduit par l’holophrase dans l’aliénation étant donné que le sujet est présent pour l’Autre par le signifiant tout en étant absent par l’impossibilité de lien identitaire, d’identité entre l’objet et le signifiant ; et dans la séparation compte tenu que c’est dans cet intervalle de lien que le sujet pourrait s’harmoniser et se coordonner à l’objet[23].

Il est donc essentiel de tenir compte de la rupture dans le rapport au signifiant. D’ailleurs Lacan représentait comme corollaire le trouble du lien qui permet l’unité, l’association dans la notion bleulérienne.

En somme, le vide, la béance résultante de la forclusion nécessiterait une prise en considération, une localisation de l’Autre, d’un tiers-lieu de l’Autre dans lequel le psychotique pourrait, par transfert, restaurer la fonction de sa parole, de son langage schizophrénique.

 

 

B.                 La schizophrénie

Si par « La paranoïa, je veux dire la psychose »[24], Lacan traduira la schizophrénie comme « la psychose lacanienne » durant la présentation du cas clinique d’un malade dénommé Gérard Plumeau.

Complémentairement au concept d’Œdipe inachevé de Freud, Lacan se réfère à la fonction paternelle, au père dans le sens où le complexe d’Œdipe ne peut se faire qu’en présence d’in tiers dénommé l’ordre du père ou nom du père. Or, cela est intimement lié avec la réalisation de la sexualité par le biais de la question d’identité sexuelle : un homme ou une femme.

En d’autres termes, l’identification au père entraînant une représentativité dans l’inconscient notamment l’unicité du signifiant phallique, le complexe d’Œdipe constitue les prémices de la de la réalité humaine, particulièrement sa conquête.

La psychose représenterait alors un trou, une rupture au niveau du signifiant. Le sujet n’arrive pas à définir la réalisation du « père » dans l’allégorique et se tourne vers une image d’un père  qui subsume au lieu d’assumer l’image paternelle.

Cela se traduirait par une sexualisation d’une relation aliénante, asservissante et spéculaire étant donné le reflet agressif de la relation lors de la phase du miroir. La forclusion effaçant complètement l’Autre dans lequel devrait se fixer l’imago paternelle.

Lacan souligne ainsi l’absence de lien, de réponse, de réaction de l’Autre au cri de la fonction paternelle. De surcroît, pour le sujet psychotique, « c’est la fonction réelle du père dans la génération » qui ne peut s’intégrer.

 

 

C.                 Le traumatisme selon Ferenczi

1.                  La notion de rupture dans le traumatisme

Selon Ferenczi, le traumatisme serait induit et provoqué par une rupture, un arrêt d’activités psychiques conjointement à l’installation d’un état de type passif tel une soumission qui est dépourvu de résistance, comme si paralysé, anesthésié, déconnecté de la réalité … entraînant subséquemment un arrêt de la perception et de la pensée.

D’ailleurs, Ferenczi affirme que le traumatisme est : « un choc inattendu non préparé et écrasant, agit pour ainsi dire comme un anesthésique »[25].

Le traumatisme provoque ainsi le retrait du sujet par rapport à lui-même à travers une, des effractions de la psyché qui se traduit par une séparation, un clivage de la totalité de la personne en une partie douloureuse, endolorie qui s’avère brutalement destructrice et une autre partie aussi flegmatique qu’omnisciente.

Ferenczi expose d’ailleurs des situations de clivages, de ruptures en cascade qui vont induire une dislocation de la vie psychique, un éparpillement de la personnalité qui peut aboutir à l’éradication du psychisme de la personne. Effectivement, le morcellement, les fragmentations subséquentes au traumatisme dépossède la personnalité, l’âme … un corps sans âme qui ne ressent rien, ne perçoit rien …

 

 

2.                  Confusions de langage traumatique

Dans sa compréhension du traumatisme psychique, Sandor Ferenczi estime que certains traumatismes face à une réalité certaine sont délaissés et induisent une confusion de langue.

Cependant, Ferenczi de dire qu’: « à partir des obstacles à la réunion des éléments de la personnalité en une unité, on peut peut-être remonter à la manière dont se constitue le clivage lui-même. Au cours d’une torture psychique ou corporelle, on puise la force de supporter la souffrance dans l’espoir que tôt ou tard cela va changer ; on maintient donc l’unité de la personnalité. Mais si la quantité et la nature de la souffrance dépassent la force d’intégration de la personne, alors on se rend ou cesse de supporter, cela ne vaut plus la peine de rassembler ces choses douloureuses en une unité, on se fragmente en morceaux. Je ne souffre plus, je cesse même d’exister tout au moins comme Moi global. Les fragments isolés peuvent souffrir chacun pour soi. La cessation de la souffrance globale et son remplacement par des fragments de souffrance pourraient apporter ce soulagement soudain qui fait que des pleurs, la lutte, les cris s’inversent brusquement en rire »[26].

En d’autres termes : la rupture de M. B rupture avec cette jeune femme de 19 ans, qui partageait sa passion pour les mathématiques et dont la relation pouvait être qualifiée de sérieuse car ils habitaient déjà ensemble durant ces six  (06) mois, pourrait s’apparenter à une sorte de torture tant psychique que corporelle : rupture sans explication ni raison apparente.

3.                  Traumatisme et vécu dans l’enfance

Les termes « carence de l’objet primaire » et de « non-réponses » sont également utilisés par Ferenczi dans Confusion des langues entre adultes et enfants (1933) pour décrire les blessures non cicatrisées lors de l’enfance, blessures qui paralysent et inhibent la réflexion, la capacité de penser du sujet.

C’est dire donc que la cause du traumatisme n’est pas extérieure mais plutôt intérieure et serait la résultante d’une « absence de réponse de l’objet face à une situation de détresse » qui est perçue comme un « viol de la pensée ».

D’ailleurs, «Le vécu affectif analytique représente en soi pour le patient une sorte de « prise de conscience » et s’accompagne d’une certaine protection contre une rechute dans le refoulement… Cette sécurité est substantiellement augmentée par le rattachement à un vécu antérieur »[27]. C’est dire la présence d’un refoulement subit dans le passé qui se traduit par un traumatisme lors de répétition de ce refoulement.

4.                  Origine du traumatisme

Selon Ferenczi donc, l’origine du traumatisme est externe et peut être soit un accident, une agression, un bouleversement qui va entraîner un dysfonctionnement, une désorganisation de l’appareil psychique du sujet qui l’immerge dans un chaos psychique conjointement à une dévastation de toutes ses enveloppes psychiques le rendant vulnérable car atteignant le plus profond de lui-même, notamment lors d’épisodes traumatiques à répétition.

C’est ce qu’illustre Ferenczi lorsqu’il a observé l’émoi des soldats effrayés qui se traduisait par une paralysie corporelle qui remémore et schématise la position du corps lors de traumatisme que représentent les explosions lors des guerres[28].

5.                  Concept de dissociation

La notion de dissociation, référence internationale, dans la prise en charge du psycho traumatisme rejoint également la théorie de Ferenczi dans son concept de fragmentation dans le traumatisme[29] : « L’effet immédiat d’un traumatisme dont on ne peut venir à bout aussitôt est la fragmentation. Question : cette fragmentation est-elle seulement la conséquence mécanique du choc ? Ou est-elle déjà aussi, en tant que telle, une forme de la défense, c’est-a` -dire de l’adaptation ?»[30].

D’ailleurs, en clinique du traumatisme, Ferenczi parle de mécanismes d’« autoclivage narcissique » qui s’assimilerait à une expérience de mort imminente. Effectivement, la « sortie hors du corps »[31], qui est décrite telle une « curieuse réaction de dépersonnalisation » devant un danger mortel[32], reste un phénomène intriguant qui est intimement lié au paranormal qui figure parmi les expressions dissociatives connues.

Toutefois, des recherches en neurosciences ont apportés des précisions quant à la présence de principes neurologiques qui sont traduits par des illusions[33] ou encore des conflits sensoriels entre la vision et la perception[34] dans cette notion de « sortie du corps ».

 

 

6.                  Réalités cliniques du traumatisme

En termes de faits, deux réalités cliniques du traumatisme sont évoquées par Ferenczi :

  • des mobilisations immédiates face aux réactions par rapport à l’agresseur et l’agression
  • des modalités d’affrontements face aux effets perpétués de l’agression

a)                  La commotion :

La commotion qui se traduit par un choc, un traumatisme à l’origine de la rupture de Soi : « Un choc inattendu, non préparé et écrasant, agit pour ainsi dire comme un anesthésique. Mais comment cela se produit-il ? Apparemment par l’arrêt de toute espèce d’activité psychique, joint à l’instauration d’un état de passivité dépourvue de toute résistance. La paralysie totale de la motilité inclut aussi l’arrêt de la perception, en même temps que l’arrêt de la pensée. La conséquence de cette déconnection de la perception est que la personnalité reste sans aucune protection. Contre une impression qui n’est pas perçue, il n’est pas possible de se défendre»[35].

Dans lequel, « Le choc est l’équivalent à l’anéantissement du sentiment de soi, de la capacité de résister, d’agir et de penser en vue de défendre le soi propre. Il se peut aussi que les organes qui assurent la préservation du soi abandonnent, ou du moins réduisent leur fonction à l’extrême »[36]

Au niveau de l’enfant, l’effet est immédiat lors de traumatisme assimilé à un choc psychique et/ou physique qui se manifeste par la fragmentation la dissociation de toutes ses enveloppes psychiques subséquemment aux ressentis physiques et/ou psychiques de l’enfant durant l’agression : « Le moment de l’abandon total de la maitrise extérieure (alloplastique) et de l’instauration de l’adaptation interne (au cours de laquelle devient concevable de se réconcilier même avec la destruction du moi, c’est-a-dire avec la mort, en tant que forme d’adaptation) sera éprouvé comme une délivrance ( ?), une libération ».[37] 1

Face à cela, des mécanismes de défense peuvent s’élaborer sous forme archaïque qui se traduit par des sensations d’étouffement, d’écrasement, submergeant le sujet dans ses défenses psychiques : « Dans les moments de grande détresse face auxquels le système psychique n’est pas a la hauteur, ou quand les organes spéciaux (nerveux et psychiques) sont détruits avec violence, des forces psychiques très primitives s’éveillent, et ce sont elles qui tentent de maitriser la situation perturbée. Dans les moments ou le système psychique fait défaut, l’organisme commence à penser»[38].

b)                  La survie psychique :

« Le moi abandonne entièrement ou partiellement le corps, la plupart du temps à travers la tête, et observe de l’extérieur ou de haut le destin ultérieur du corps en particulier ses souffrances »[39].

Effectivement, il s’agira de la défragmentation dont l’origine reste encore assez vague : mécanisme de défense ou d’adaptation ? Réaction directe au traumatisme ? : « Le clivage en deux personnalités qui ne veulent rien savoir l’une de l’autre, et qui sont groupées autour de différentes tendances, fait l’économie du conflit subjectif. […] Un enfant est frappe par une agression imparable, conséquence : il rend son âme avec la conviction totale que cet abandon de soi-même (évanouissement) signifie la mort. Mais justement, la relaxation totale qui s’établit par l’abandon de soi peut créer des circonstances plus favorables pour pouvoir supporter la violence. »[40].

 

 

 

III.             Analyse du cas clinique

Célibataire, Monsieur B. âgé de 42 ans est le dernier d’une fratrie de quatre (04) enfants : il a une sœur et deux frères.

A.                VIE FAMILIALE ET AFFECTIVE

1.                  Parents

Monsieur B. décrit son père, décédé, comme quelqu’un de motivant et encourageant contrairement à sa mère qu’il définit comme une personne démotivante, démoralisante et déprimante. Effectivement, il entretient une relation ambiguë avec sa mère qui relève même du conflit. De plus, il souligne fortement le fait que ses parents étaient beaucoup plus laxiste avec lui, cela peut-être parce qu’il était le « petit » dernier de la fratrie ?

De plus, il souligne fortement le fait que ses parents étaient beaucoup plus laxiste avec lui, cela peut-être parce qu’il était le « petit » dernier de la fratrie ?

Avec sa mère, le patient entretient des relations conflictuelles qui pourraient être intimement lié avec la réalisation de sa sexualité par le biais de la question d’identité sexuelle : un homme ou une femme.

Une problématique alcoolique chez ses parents est par ailleurs soulevée.

L’image du père comme décrite par monsieur B est ici conforme à celle de Lacan qui, complémentairement au concept d’Œdipe inachevé de Freud, se réfère à la fonction paternelle, au père dans le sens où le complexe d’Œdipe ne peut se faire qu’en présence d’un tiers dénommé « l’ordre du père » ou « nom du père ».

D’ailleurs, il y a comme un « trou symbolique » dans sa relation avec son père après son décès, qui fait référence à un manque que l’on peut assimiler au déficit du signifiant du nom-du-père, et que la mère ne parvient pas substituer, Lacan nommera le concept de « la forclusion du nom-du-père ».

De plus, selon Lacan, la psychose ne fait pas partie de l’imaginaire comme une image non satisfaisante du père mais plutôt d’un déficit symbolique par le rejet fondamental d’un signifiant comme le serait le phallus par rapport à la castration, autrement dit la forclusion du Nom-du-père[41].

En somme, le vide, la béance résultante de la forclusion nécessiterait une prise en considération, une localisation de l’Autre, d’un tiers-lieu de l’Autre dans lequel le psychotique pourrait, par transfert, restaurer la fonction de sa parole, de son langage schizophrénique.

Incontestablement, M.B adopte une position infantile et parfois immature notamment avec sa mère :

  • « J’ai renoué avec ma mère, elle m’a téléphoné il y a 2/3 jours pour me dire qu’il y avait un courrier pour moi, elle m’a dit à demain, c’était déjà pas mal parce qu’elle aurait pu ne pas le dire »
  • « J’avais une petite amie, qui me disait « Jean-Pierre c’est bien tout ça, mais tu fais un peu l’enfant ! » la relation que j’avais avec elle, je pense qu’elle avait la bonne analyse sur peut-être ce côté enfant, on voit ça dans l’analyse transactionnelle, le rôle parent/enfant »
  • « c’est pareil il y a une dizaine d’année j’étais avec une fille qui me disait que j’étais un peu immature »

Il semblerait donc que cela soit à l’origine de son célibat à 42ans ?

2.                  Fratrie

Son affect pour sa fratrie est tel qu’il décrit son frère ainé et sa belle sœur comme des exemples à suivre, d’ailleurs, il adore être avec ses neveux avec lesquels il se dit le « deuxième capitaine de bord » après son frère.

Sa sœur est mentionnée dans son dossier comme une personne qui dit à M.B ce qu’il doit faire, elle est dans une dynamique « maternante » envers son frère.

Etre le dernier de la fratrie présente des avantages comme le fait d’être plus choyé que les autres, toutefois, une énorme pression pèse sur les épaules du dernier qui est toujours comparé à ses aînés, ses aînés qui sont bien que plus tolérants avec lui sont pourtant moins sensible à ses exploits.

Il existe ainsi un contraste non évident : l’enfant trop protégé aura du mal à se prendre en main par peur d’être jugé, notamment par la fratrie.

Adulte, il aura du mal a être pris au sérieux sans que cela ne passe par des moments de désaccords violents, de conflits pour proclamer son statut d’adulte, sa maturité, son droit et sa capacité de décision.

D’ailleurs, même si le benjamin est « destiné à rester petit, c’est au petit dernier de prouver le contraire. Ce qui est souvent un moteur pour sa vie » affirme Françoise Peille Psychologue, clinicienne.

Au sein de sa fratrie coexiste ainsi un complexe dans leur intimité qui se traduirait par des sentiments de rivalité, de jalousie.

Comme dans toute fratrie certes, les enfants se partagent l’amour des parents, ce qui induit des conflits et rivalités fraternels, qui est le ou la préférée ? qui est le meilleur ?

Se référant à Lacan qui atteste que le sujet va dépendre essentiellement de ce qui ce passe en l’Autre. Le patient M.B semble dépendre des avis de ses aînés, or « L’inconscient se constitue du discours de L’Autre. C’est au sein du discours de l’Autre que le sujet va réceptionner le message qui lui aura été transmis par l’Autre, cependant si ce message n’est pas acceptable pour le sujet, alors ce qui n’aura pas été admis a été disposé dans l’Autre et fait retour à son insu, le lapsus en est l’exemple. »

De plus, souhaitant la reconnaissance de ses aînés, M.B prend exemple sur son frère et sa belle-sœur qui joue parfaitement le rôle de mère, de parent pour lui…

M.B semble n’exister qu’à travers eux.

La notion de forclusion associée à l’Autre entre ici en jeu. Effectivement, dans la psychose, l’Autre est forclos.

Selon Lacan, il y a un transfert au niveau de l’axe imaginaire a-a’. « Le sujet est séparé de lui-même par l’ordre du langage, et se retrouve représenté en un tenant-lieu qui fonctionne en place de a (Moi) »[42].

Le Moi va se prendre pour le « je » (S) Le discours vient de l’autre et non de l’Autre. Il s’agit de son propre message qui parvient au sujet de cet autre semblable, son double.

Ce que traduisent les dires du patient MB :

  • «  Mon frère ainé a de l’autorité, il faut que j’affine tout ça, quitte à rester en conflit avec d’autres, faut que je vois… au risque de me retrouver seul, et de me retrouver dans mon cocon, voilà, ce n’est pas grave parce que je pense qu’en faisant des activités je vais rencontrer d’autres personne »
  • «  le seul reflet que j’ai en tête c’est mon frère qui lui est très cultivé et ma belle sœur aussi. A l’heure actuelle je ne trouve pas des gens comme ça. »

3.                  Maritale Sentimentale

Etre encore célibataire à 42 ans présente un certain retentissement psychologique, que ce soit en termes de maturité, d’indépendance que de prise de décision et de risque par conséquence et particulièrement la peur de l’engagement : « Les mœurs sociales ont toujours eu un impact sur le développement des relations amoureuses et les valeurs qui y sont attribuées ».

Toutefois, la question se pose : A moins que cela ne soit une marque d’autonomie : est-ce que ce célibat est un problème pour lui ? Ce célibat est-il la conséquence de ses  relations conflictuelles avec sa mère ? Résultant du traumatisme lié à l’image maternelle ? Ce célibat traduirait-il une perte de repères de M.B ?

En se tournant vers ses relations amoureuses qui sont relativement sommaires, Monsieur B. dit qu’il recherche une femme « structurée », « autoritaire ». Ce qui signifie que M.B émet son besoin, un manque qui puisse être lié avec sa relation avec sa mère ?

D’ailleurs, les dires de MB quant à ses relations compliquées, voire même platoniques semblent parler d’eux mêmes:

  • « J’ai rencontré Isabelle hier soir, une nouvelle rencontre, un peu comme si je sortais et le hasard voulait… à voir… à développer la relation même si ça ne devrait pas aller très loin, c’est toujours positif »
  • « Je suis un solitaire, j’ai aimé des femmes en silence et mon éducation n’a pas fait que… en maternelle c’était une fille que j’aimais bien et j’ai jamais osé, en 6ème on m’avait mis à côté d’elle j’étais « nerveux », vous voyez j’étais déjà « nerveux »

En revenant dans son histoire, il est intéressant de constater que sa rupture avec la jeune femme qu’il a connu en Espagne pourrait être une cause éventuelle de traumatisme : à l’âge de 19ans, il y avait la rupture avec cette jeune femme qu’il a connue en Espagne qui étudiait dans le domaine des mathématiques, elle venait le visiter sur Nantes pendant les 6 mois qui on suivi leur rencontre, elle logeait dans l’appartement de M.B (dormait ensemble) qu’il partageait avec l’un de ses frères pendant leurs études respectives.

Avec elle, M. B. disait se sentir bien, elle « l’aiguillait » comme sa mère aurait du le faire ?

Le fait qu’elle ait rompue et qu’elle ne lui a pas donnée d’explication pourrait être perçu comme un traumatisme, une torture psychique car il n’a jamais compris pourquoi elle l’a quitté.

De plus, ses dires montrent qu’il a eu beaucoup de difficultés à se détacher de cette jeune femme.

« Dans les moments de grande détresse face auxquels le système psychique n’est pas a la hauteur, ou quand les organes spéciaux (nerveux et psychiques) sont détruits avec violence, des forces psychiques très primitives s’éveillent, et ce sont elles qui tentent de maitriser la situation perturbée. Dans les moments ou le système psychique fait défaut, l’organisme commence à penser»[43] disait Ferenczi en faisant notion de réalité clinique du traumatisme.

Le concept de dissociation par Ferenczi peut également être soulevé ici étant donné que la rupture peut s’assimiler à la notion de dissociation, le concept de fragmentation dans le traumatisme[44] : « L’effet immédiat d’un traumatisme dont on ne peut venir à bout aussitôt est la fragmentation. Question : cette fragmentation est-elle seulement la conséquence mécanique du choc ? Ou est-elle déjà aussi, en tant que telle, une forme de la défense, c’est-a` -dire de l’adaptation ?»[45].

D’ailleurs, Ferenczi affirme que le traumatisme est : « un choc inattendu non préparé et écrasant, agit pour ainsi dire comme un anesthésique »[46].

De plus, Freud évoque dans la schizophrénie la présence d’un émoussement, une restriction certaine qui serait engendrée par « la perte de relation avec le monde extérieur »[47] à laquelle serait symbolisée sa rupture.

B.                 VIE PERSONNELLE\SOCIALE

1.                  Scolarité

Après une mauvaise note en mathématiques (5/20), Monsieur B se sentait très mal, il a eu une pulsion de défenestration. (passage à l’acte) comme le confirme ses dires :

  • « …Et puis je me rappelle avoir eu à un moment de ma scolarité une mauvaise note en mathématique et suite à ça j’ai eu des pulsions, c’est à dire que j’ai voulu me jeter de la fenêtre… »
  • « J’en ai parlé à mes parents quand on était tous ensemble, ma sœur était jeune, on était à un repas et je dis à ma mère « Maman, j’ai essayé de me suicider »

et puis ma mère m’a répondu

«  Oulala, non…on en parle pas » elle a étouffé le sujet. Donc voilà j’en avais parlé, mais ma mère aussi est fragile. Ma mère parlait qu’elle allait se suicider car son couple n’en était pas un… Je dois à mon père et à ma mère car nous avons fait de hautes études, ils se sont sacrifié »

Le fait de ne pas avoir pu en parler ouvertement avec sa mère, semble aggraver encore plus sa défenestration et induire un traumatisme qui sera à l’origine du retrait du sujet par rapport à lui-même à travers une, des effractions de la psyché qui se traduit par une séparation, un clivage de la totalité de la personne en une partie douloureuse, endolorie qui s’avère brutalement destructrice et une autre partie aussi flegmatique qu’omnisciente : la tentative de suicide.

2.                  Vie sociale

Monsieur B. aime se sentir utile aux yeux de la société. De surcroît, il semble accorder une grande importance à structurer, organiser son quotidien.

Il y a des périodes où le patient éprouve des difficultés à organiser sa vie quotidienne, son hygiène, son argent et surtout il se sent débordé, emprisonné :

  • « Dès fois seul j’arrive à faire beaucoup plus de chose, je me sens bien seul, quand il y a trop de monde je ne peux pas gérer »
  • « Certaines personnes je suis content de les revoir mais ils débordent un peu… ils débordent sur ma vie privée, ça me fait faire la vaisselle, de simple chose mais ça me les fait faire quand même…Je n’ai pas le temps tellement de gens passent chez moi… Certains passent souvent chez moi et d’autres se rajoutent des fois, je n’ai pas d’autorité et de fermeté donc je laisse déborder… »

D’ailleurs, Ferenczi expose des situations de clivages, de ruptures en cascade qui vont induire une dislocation de la vie psychique, un éparpillement de la personnalité qui peut aboutir à l’éradication du psychisme de la personne. Effectivement, le morcellement, les fragmentations subséquentes au traumatisme dépossède la personnalité, l’âme … un corps sans âme qui ne ressent rien, ne perçoit rien … Ce concept peut ici être assimilé à ce sentiment de débordement, d’étouffement du patient qui semblent également le paralyser.

En outre, «Le vécu affectif analytique représente en soi pour le patient une sorte de « prise de conscience » et s’accompagne d’une certaine protection contre une rechute dans le refoulement… Cette sécurité est substantiellement augmentée par le rattachement à un vécu antérieur »[48]. C’est dire la présence d’un refoulement subit dans le passé qui se traduit par un traumatisme lors de répétition de ce refoulement.

Ce qui expliquerait le comportement de M.B qui a une tendance au passage à l’acte en particulier sous forme de fugues avec cessation brutale de l’activité professionnelle, suicide, vol de voiture :

Les sentiments de persécution perçus par M.B peuvent s’expliquer par « Le choc est l’équivalent à l’anéantissement du sentiment de soi, de la capacité de résister, d’agir et de penser en vue de défendre le soi propre. Il se peut aussi que les organes qui assurent la préservation du soi abandonnent, ou du moins réduisent leur fonction à l’extrême »[49],

En effet, il exprime beaucoup d’inquiétude, car il pense que son voisin l’espionne et donc par conséquent ne se sent pas en sécurité. Une perte de confiance en lui semble également apparaître :

  • « Je prends l’exemple du Groupe d’Entraide Mutuelle (GEM), quand j’arrive je prends le journal et personne ne me propose de jouer à la belotte, il y a des clans, des fois je parle et d’un seul coup il y a un vide, alors je me dis que je parle trop vite peut-être, je suis avec certaines personne qui je pense m’analysent bien… Eux aussi auraient du caractère, parce que le fait de se parler, on ne se rend pas transparent, et si je suis amené à les voir toutes les semaines ou deux semaines, ils vont vite me juger, le fait de parler on se dévoile »
  • « …Dans ma tête je me dis « attention » à cette personne… »
  • « Je suis allé à la piscine la semaine dernière, puis il y avait Cécile une jeune femme qui me fait rigoler, je me suis dit « tiens elle est sympa c’est assez rare » »

Il reprend d’ailleurs le mot « choc » dans ses propres paroles lorsqu’il parlait des gens qu’il rencontre lors d’activités : « peut-être que je vais trop vite, ou bien une trop grande facilité dans la communication, peut-être que parfois je choc ».  bien que de nature sociable, utiliser le mot « choc » traduit une certaine dénigration de son sentiment de soi.

Son état aigrit semble également découler de cette perte d’estime de soi, perte de repères et sensation d’insécurité qui l’empêche de vivre, d’avoir la joie de vivre :

  • « ça m’aigrit, aigrit je le suis depuis longtemps… Depuis une dizaine d’année je n’ai pas eu de joie intense…Peut-être la malchance, peut-être le fait que je me sois trompé… peut-être lié à mon éducation ? Mon éducation qui a été tortueuse pas assez disciplinaire, pas assez droite, j’étais laissé un peu seul face à moi même, j’évoluais dans un monde assez seul…J’aurais souhaité une éducation stricte, que je sois plus cadré, mieux cadré. Je reprends l’exemple de mon neveu Antoine qui a loupé son baccalauréat, disant à mon frère que les professeurs allaient le cadrer. Pas assez cadré donc… »
  • Je poursuis en lui reprenant sur le « pas assez cadré ? » il me répond : « C’est à dire des limites dans ce que je fais, je suis un peu comme un électron qui tourne puis à la fois aigrit depuis longtemps, bon il y a des rigolades mais pas de grandes joies »

De fil en aiguille s’est alors manifesté son sentiment de solitude :

  • « J’étais un peu isolé, j’étais seul à Dijon enfin tout seul en appartement et célibataire »
  • Je demande à M.B s’il souffrait de cette solitude, il me répond : «  Non j’allais à la piscine, j’étais occupé, je travaillais, je me baladais, je découvrais, je travaillais à l’époque donc je me levais à 6h du matin et puis je finissais à 19h. J’avais l’avantage d’avoir un véhicule de fonction et d’aller voir les gens que je connaissais. Mais là c’est pareil du fait que j’étais seul, mes parents ne venaient pas, mon frère venait de temps en temps, je n’exprimais pas mon ressenti, mes émotions et mes dérèglements psychiques que j’avais dans ma tête personne autour de moi pouvait vraiment me forcer, m’aiguiller… »

En remontant dans son enfance, sa vie avec ses frères et sa vie sociale, le stade du miroir de Lacan[50] semble se refléter dans son histoire, notamment ses dires. En effet, le stade du miroir va mettre en jeu la représentation que l’enfant se fait de son unité, il ne fonctionnerait pas s’il n’y avait pas le nom, si l’enfant à conscience de son unité qui répond au nom dont on l’appelle. On peut dire que le nom propre est en quelque sorte le répondant symbolique de cette forme qui constitue l’image du corps.

Mais l’accent est mis sur « le virage du je spéculaire au je social » c’est à dire le moment où le sujet va se dire que c’est lui dans le reflet du miroir. C’est à dire que ce virage va donner la possibilité de se reconnaître dans le miroir. C’est ce virage qui donne la possibilité de ce désigné dans une image ou une forme avec toutes les conséquences qui peuvent en découler de la rivalité ainsi que de l’agressivité qui se retrouvent dans ses dires :

  • « Dans ma tête je pense, je comptabilise, je multiplie… »
  • Concernant les mathématiques« C’est presque une obsession ! Enfin ce n’est pas une obsession mais… ce n’est pas une intuition, c’est ma méthode de penser, ma lubie de faire des maths »
  • « Les mathématiques c’est quelque chose de vital, ce que je veux dire par là, c’est que j’aurai pu faire un bac scientifique, les mathématiques ce n’est pas nécessairement vital mais intéressant en tout cas, puisqu’on est confronté beaucoup aux chiffres, quand je paye à la caisse si on me demande 2,80€ je ne vais pas donner 3€. Je sais ce que c’est la valeur des chiffres. Je peux parler dans une conversation en logarithme. Je peux parler mathématiques de chose qui sont psychique ou psychologique »
  • « Je peux vous dire que ma vie pour l’instant évolue de façon rythmique et en terme mathématique, c’est à dire comme un logarithme, au début ça avance mais après ça se stabilise et ce n’est pas de façon exponentielle, c’est à dire que je passe par l’abscisse et je monte, je monte un peu comme les études. C’est comme vous, vous êtes en Master 1, ensuite en Master 2…ça évolue quoi. Je me sens poussé par mes neveux, ils passent des bacs scientifique, je n’ai pas envie non plus d’être à la ramasse par rapport à eux »

Monsieur B. aime se cultiver et lire est d’ailleurs son passe temps favori, mais son traitement à des effets indésirables qui ne lui permet plus de s’adonner à son loisir préféré à cause des troubles attentionnels et des troubles de la mémoire subséquents.

 

C.                 VIE PROFESSIONNELLE

1.                  Cursus

M.B a effectué son service militaire comme chauffeur vaguemestre puis, il a travaillé à Dijon chez Hachette pendant 8 mois, il a démissionné de ce post pour revenir à St Jean de Monts au domicile familial, y faisant en juillet 1995, une saison dans un bar au centre nautique. Ensuite il a travaillé à la poste à Levallois Perret, dans un bureau où travaillaient son frère et sa belle sœur.

Il réussi à s’y maintenir pendant 5 ans, puis passa son concours de facteur préposé en 2002, donna sa démission le 9 mars 2002. Il fut pris facteur stagiaire à Houilles, puis 2 ans, comme facteur intérimaire à Paris, il logeait au foyer de la Poste à Levallois, puis à Nanterre.

Il fut hospitalisé deux fois et connu plusieurs arrêts de travail.

Il revient en Vendée, en Janvier 2004. Il a travaillé en intérim, jusqu’en janvier 2007 : Gendreau, Mie Caline… c’était des missions de durée moyennes à courtes.

A l’automne 1995, il suit une nouvelle formation sur Nantes de Logistic-Marketing-export. A partir de là commence les troubles du comportement avec des voyages ou fugues (des les propos des parents) à Dijon, Marseille, Avignon, Rennes, Paris pendant quelques jours à 10 jours. Ses comportements sont de plus en plus bizarres. Lors de la dernière fugue en Avril 1996 il commet une tentative de vol de voiture à Nantes. Appréhendé par la gendarmerie, il est amené à l’hôpital aux vues de son comportement. Son oncle, domicilié dans la région Nantaise, signe une demande d’hospitalisation à la demande d’un tiers.

Avec un BTS en gestion, Monsieur B. pense s’être trompé de filière, que la gestion n’est pas son domaine de prédilection étant donné qu’il désirait s’orienter vers la littérature, il a nettement marqué le fait que ses parents ne l’ont pas tellement aiguillé dans ses études. D’ailleurs, s’il avait choisit la voie de la littérature, Monsieur B. affirme qu’il aurait été « un autre homme ».

Il apparaît ici que son instabilité dans le travail pourrait être lié à sa perte de confiance et d’estime de soi, d’autant plus qu’il affirme s’être trompé de filière.

Son comportement traduit également l’existence d’un stress, stress post-traumatique subséquent à sa place de benjamin, de petit dernier, à son enfance ? Apparemment, monsieur B était déjà incapable de prendre seul une décision : manque d’autonomie, d’indépendance.

Cependant, il est à noter que pour lui même et sa famille la valeur du travail est primordiale.

Or, sa famille a longtemps minimisé ses problèmes psychiatriques, ce qui n’était pas sans mettre une pression importante sur ses épaules, avec des propos parfois dévalorisants.

  • « J’ai des doutes, surtout concernant l’emploi, est-ce que je dois me sentir capable ? Je pense que c’est jouable de retravailler »
  • « Je ne serais pas là à vous parler de tout ça si j’avais un emploi je pense. Si j’avais un emploi je serais avec des gens, j’échangerai avec des gens qui n’ont pas fait de psychiatrie, parce que avec d’autres gens on discute de médicament, donc voilà »

Ce qui rejoint les dires de Ferenczi : « Le moment de l’abandon total de la maitrise extérieure (alloplastique) et de l’instauration de l’adaptation interne (au cours de laquelle devient concevable de se réconcilier même avec la destruction du moi, c’est-a-dire avec la mort, en tant que forme d’adaptation) sera éprouvé comme une délivrance ( ?), une libération »[51] lors de traumatisme assimilé à un choc psychique et/ou physique qui se manifeste par la fragmentation la dissociation de toutes ses enveloppes psychiques subséquemment aux ressentis physiques et/ou psychiques.

La notion d’argent revient régulièrement dans le discours de M.B tel un des mécanismes de défense qui peuvent s’élaborer sous forme archaïque qui se traduit par des sensations d’étouffement, d’écrasement, submergeant le sujet dans ses défenses psychiques : « Dans les moments de grande détresse face auxquels le système psychique n’est pas a la hauteur, ou quand les organes spéciaux (nerveux et psychiques) sont détruits avec violence, des forces psychiques très primitives s’éveillent, et ce sont elles qui tentent de maitriser la situation perturbée. Dans les moments ou le système psychique fait défaut, l’organisme commence à penser»[52] :

  • « J’essaye de faire attention à mon budget »
  • Evoquant ses oublis et ses absences « ça me fait perdre du temps et de l’argent »
  • Concernant les activités sportives et culturelles « Je ne bénéficie pas de réductions »
  • « il n’y a pas de petites économies »
  • « J’ai commencé à faire des cadeaux de Noel, notamment des jeux de société, des choses dans mon budget »

Bien que le travail semble important à Monsieur G., il ne peut plus travailler étant donné qu’il a décompensé sur son lieu de travail, d’ailleurs il n’a jamais eu de travail fixe, il a fait beaucoup de petits emplois.

 

D.                VIE AMICALE

1.                  Amis, vie sociale

M.B est dans une dynamique depuis plusieurs séances de trier/sélectionner son entourage, il ne veut pas être entouré de personne « Toxiques » c’est à dire qui fument ou boivent, car il se dit influençable. Il a également associé sa mère au toxique (discours inconscient). Il se dit ennuyé par le nombre de passage chez lui, il éprouve des difficultés à s’imposer.

  • « En ce moment je retrouve des amis, je refais une sélection auprès de mes amis, une double sélection, j’essaye d’éviter certaines personnes anxiogènes »
  • « j’essaye de m’entourer de gens qui peuvent m’apporter du mal, des gens qui peuvent me déstabiliser ou faire des choses mal » étonnée de cette remarque, je reformule ce qu’il vient de me dire, il me répond alors : « je ne recherche pas ça, c’est ce que je me disais il y a quelques jours, je préfère être seul que mal accompagné, que de dévier un peu, voilà. Ca me permet d’aller en voiture aider des gens qui sont amis avec moi, des gens positifs. Je suis allé voir ma mère »
  • Après lui avoir posé la question sur les liens qu’il entretenait avec sa mère, il me répondit : « ce n’est pas facile, parce que la semaine dernière j’ai eu une piqure d’Haldol donc ça me fatigue. Donc dans 15 jours si vous me voyez je serai peut-être un peu différent » (association de la mère au toxique)
  • Après avoir demandé à M.B s’il n’avait pas revue sa mère était lié à une dispute ? « Non, un peu d’indifférence, de silence, ce qui est pire… Dans ma tête j’avais l’impression d’avoir un blocage de communication, parce que l’haldol fait effet en moi, c’est compliqué… » (association de la mère au toxique)
  • « Il faut qu’à certains moment je sois plus autoritaire, que je renforce mon caractère »
  • « l’environnement joue beaucoup sur moi… »
  • Concernant un de ses amis « il boit, il boit beaucoup, il fume avec moi, des fois il m’apporte des fruits. Enfin bref j’ai perdu le fil. On a même avec Alexandre consulté un bouquin de BEPC où l’on s’est entrainé à faire des exercices de mathématiques et donc on a réussi, il n’a pas le même cursus que moi, il a un cursus technique » (dimension narcissique)
  • « Alexandre m’a aidé à ranger chez moi, il n’est pas si toxique que ça »

La dimension Narcissique est ici à prendre en compte, bien que le comportement de M. b puisse refléter un regain d‘estime de soi, en effet M.B veut fréquenter des personnes ayant un niveau intellectuel élevé comme lui.

  • « J’ai revue un collègue qui est agrégée d’anglais donc qui a un bon niveau intellectuel »
  • « je me rappelle des mots que ma sœurs me disait, si j’avais continué à travailler dans l’éducation nationale je serai avec des personnes qui ont le CAPES, qui sont intellectuellement posées, qui lisent… »
  • « Je sens que je n’ai pas des personnes autour de moi qui gravite, je suis instruis, j’essaye d’être cultivé, j’aimerai qu’il y ai un échange intellectuel»
  • Il me dit qu’il a repris contact avec un ami « Il a une maitrise d’histoire et tout ça… il m’a stocké des films, donc voilà… Il y a des personnes qui gravitent autour de moi mais je n’apprends pas, ma sœur me dit qu’il faut des personnes de mon niveau, des personnes qui ne font pas d’abus, ça me chagrine un peu j’ai beau faire la moral à ces gens là… »
  • « Quand j’aurai une stabilité même en étant célibataire, quand j’aurai une stabilité avec des amis surtout, trouver des amis qui correspondraient à mon profil, plutôt cultivés, vous voyez ce que je veux dire »

D’un point de vue thérapeutique, M.B semble commencer à faire face à la réalité de sa vie compte tenu du fait qu’il a établi un bilan de sa vie bien que le confortant dans son mauvais choix, il affirme d’ailleurs son regret : il se dit qu’il aurait pu faire de grandes études dans le domaine des mathématiques ou littérature et qu’il aurait été « un autre homme » s’il avait choisi une filière scientifique.

Pourtant, le fait de s’auto dévaloriser malgré ce semblant de prise de conscience traduit réellement la présence et la persistance d’un traumatisme qui semble lié à sa famille, notamment ses frères et soeurs:

  • « Le BTS Gestion ne correspondait pas au niveau que j’avais, au mieux j’aurai choisi une filière scientifique »
  • Concernant son cursus et celui ses frères et sœurs « On dépassait le cadre intellectuel de nos parents, j’aurai pu faire des études plus difficiles mais je n’avais pas de but. »
  • « Mes neveux sont dans une filière scientifique, je ne tiens pas à me faire dépasser non plus »

Il a tendance dans son discours à dévaloriser l’un de ses frères sur le plan intellectuel car il a suivi un cursus « technologique » alors que lui à suivi un cursus « général ». De plus sa sœur lui tient le discours comme quoi M.B dispose d’un bagage intellectuel plus élevé que son frère ayant empreinté une branche « technologique ».

  • « C’est surtout avec mon frère ainé qu’on à des liens comme ça de connaissances »
  • « J’ai vécu avec mon frère ainé et ma belle sœur lorsque je travaillais à la poste. Alors que mon autre frère… excusez-moi de reprendre les dires de ma sœur mais, lui, serait moins intellectuel et serait un peu jaloux, je ne sais pas trop, ça doit être la jalousie, c’est possible »

Le stade du miroir est la possibilité de se désigner en tant que Moi. Le « Je » spéculaire peut dans certains cas ne pas se voir évolué au « je » social ce qui revient à dire que la personne se voit dans le miroir mais ne se reconnaît pas.

Dans ce cas, selon Lacan le sujet n’a pas été captivé par son image et l’image n’a pas été constituante pour lui.

Le stade du miroir est une identification primordiale de l’enfant à cette image qui va nommer la structuration du « je ». il met un terme au fantasme de corps morcelé. Le narcissisme secondaire s’inscrit dans la suite du stade du miroir et c’est l’instant où l’enfant va investir un objet extérieur à lui.

C’est à partir de cette non reconnaissance ainsi que cette image non constituante que le sujet va avoir de lui-même au stade du miroir que Lacan va fonder sa théorie en différenciant la névrose de la psychose.

2.                  Loisirs

« Le clivage en deux personnalités qui ne veulent rien savoir l’une de l’autre, et qui sont groupées autour de différentes tendances, fait l’économie du conflit subjectif. […] Un enfant est frappe par une agression imparable, conséquence : il rend son âme avec la conviction totale que cet abandon de soi-même (évanouissement) signifie la mort. Mais justement, la relaxation totale qui s’établit par l’abandon de soi peut créer des circonstances plus favorables pour pouvoir supporter la violence. »[53].

Ici le clivage de M.B se manifeste par le fait qu’il ait mis en place de nombreuses activité sportives comme à l’époque (Vélo, natation, footing…) alors qu’au fur et à mesure des entretiens il fait comprendre qu’il n’a pas pu faire de sport pour divers motifs (cause hospitalisation de semaine, ses amis ne font pas de sport ce qui ne le motive pas…), il se dit voir des buts et parfois dit le contraire. En d‘autres termes, il n’a même pas pu pratiquer ses anciennes activités, se cachant derrière des prétextes de santé, de problème de motivation, de manque d’estime de soi :

  • « Je me sens perdu dans tous ces gens, perdu parce que sans but, avec des objectifs, des rêves, un but, là je retourne à la piscine, ça me fournis de bonnes idées, je lis, j’essaye de m’entretenir »
  • « Il me manque un but, j’ai des cordes à mon arc mais il me manque un but, ce but c’est par rapport à des choses obsessionnelles, des rencontres, ca va peut-être se débloquer « attention », se débloquer en parlant…je vous parle »

E.                 VIE MEDICALE

1.                  Première Hospitalisation le 11/04/1996 sous la demande d’un tiers (HDT)

Adressé pour délire mystique, toute puissance mégalomane et délire érotique (trouble de l’identité, automatisme mental, hallucinations auditives).

Après résolution de la crise, une entrée à Pin-en mauges est envisagée (Clinique institut psychothérapique psychiatrique).

Entrée au Pin-En-Maugesle 02/07/1996

Il a présenté des troubles dysthymiques, plus des moments dépressifs mélancoliformes, avec anxiété, inhibition et repli.

Le Dr. J parle alors de psychose bipolaire relativement au trouble bipolaire de la schizophrénie.

L’évolution de Mr B. s’est faite dans un sens favorable ; il a critiqué son délire ; sa thymie s’est stabilisée ; il a su nouer des relations de qualité avec ses camarades et il a amorcé des projets de vie autonome. Ceci étant, il sera plus facile pour lui d’être hors de la clinique pour effectuer des démarches en vue de sa resocialisation, ce qui motive sa sortie le 11/12/1996.

Bien que son insertion dans la vie professionnelle fût possible sur la région Parisienne dans les PTT (par le biais de son frère), il en sera radié vers 2000, à cause de sa pathologie subséquemment à un arrêt de traitement et un passage à l’acte par des fugues, une défenestration donc.

Il avait installé un bon suivi avec le centre médico-psychologique (CMP) de Nanterre (psychiatre & équipe).

Il avait été hospitalisé à plusieurs reprises, dont une fois en Hospitalisation d’office (HO) pour errance sur une nationale.

Le Dr S. signale alors des tendances suicidaires régulières qui ne le quitteront jamais tout à fait.

2.                  Centre hospitalier Loire Vendée Océan

Deuxième hospitalisation au Centre hospitalier Loire Vendée Océan le 06/08/2007 après son retour en Vendée pour un travail intérimaire en Décembre 2003

Il est à noter que lors de son passage aux urgences dans ce centre hospitalier, pour une demande d’aide, peut être se sentant coupable par le non respect et suivi du traitement du Dr J., ou encore par l’inacceptation de sa psychose bipolaire, M.B se senti tendu à l’idée de faire une consultation avec le dit médecin.

3.                  Hospitalisation sous la demande d’un tiers signé par sa sœur.

  1. B fut hospitalisé après avoir été retrouvé endormi sur un banc public suite à une absorption médicamenteuse, le contexte restant encore nébuleux : il parle d’un moment d’inattention, à 6h du matin, en conduisant son véhicule, il aurait fait un accident, pensant qu’il n’y avait pas de témoin il a pris la fuite ; la gendarmerie, alertée par un témoin l’a retrouvée dans la journée.

Il présente alors des éléments dissociatifs, avec pensée floue, mauvais contacts avec la réalité, rationalisation morbide, ambivalence.

Après un entretien médical de la famille, les parents semblent affectés par l’évolution déficitaire de leur fils ; « Jean-Pierre ayant des difficultés à ce mobiliser dans les activités de la vie quotidienne » : un projet passerelle est alors proposé.

4.                  Entrée à la Passerelle le 17/09/2007

L’objectif est d’affiner le projet professionnel, d’orienter Mr.B vers des ateliers thérapeutiques ARIA.

Mr. B ne semble pas prêt pour un logement autonome.

Les deux premières semaines se présentent sous forme de prise de contacts : organisation du service, histoire de vie, projet à moyen terme, ce qu’il en pense, ce qu’il sait de la maladie…

Les visites des structures ARIA sont programmées en Octobre. Mr. B se présente à toutes les activités qui l’intéressent, pose des questions appropriées, choisissant l’atelier multimédia aux Bazinière ( ?), puis espaces vert, maraîchage à la ferme de la Vergne.

Un travail sur la reconnaissance de sa maladie est entrepris lors d’entretiens médicaux avec le Dr L., puis, continuation avec les infirmières référentes.

Début 2008 Mr B fut en pré-stage durant3 semaines aux Bazinières à l’atelier multimédia avant de poursuivre trois autres semaines à la ferme de la Vergne aux ateliers espaces verts et maraîchage.

Ce dernier atelier étant le plus approprié pour Mr B. il démarre cette activité le 7 avril 2008. Le bilan du pré-stage au Foyer La fontaine étant « très positif » Mr B. y sera admis le 20 mai 2008.

A ce jour le 19 mai 2008, Mr B. est en stage à la ferme à l’atelier maraichage, il semble moins anxieux actuellement qu’au démarrage de son stage se posant cependant toujours beaucoup de questions sur ses relations avec les autres patients au travail et sur ses capacités à travailler dans un milieu non protégé ? Il a vu en début de semaine l’assistante sociale pour démarrer une demande de MDPH. Au dernier entretien médical Mr B. parle de son départ de la passerelle sans trop d’inquiétude. Se projette dans l’avenir tout en saisissant l’importance de l’étayage soignant.

Mr B. intègre les structures ARIA (Ferme de la vergne : atelier maraichage et foyer la fontaine) et quitte la passerelle le 20/05/08

Mi juillet 2008, il traverse une période hypomaniaque avec euphorie, volubilité et difficulté à se concentrer majorée par l’atelier maraichage. Il a alors des troubles du comportement avec les autres résidents du foyer la Fontaine et les autres stagiaires, plus ou moins insultants, difficulté à se concentrer sur ce qui lui est command, asthénie, et majoration de celle-ci avec des insomnies.

M.B a par moment des périodes de décompensation avec essentiellement dissociation psychique et troubles du cours de la pensée avec rationalisme morbide important, Il nécessite alors des passages séquentiels en hospitalisation de semaine.

Bien qu’il y ait des progrès dans sa thérapie, M. B semble présenter une problématique de séparation qui est confirmée par ses dires :

  • B ne s’est pas rendu à son avant dernier RDV voici son explication « Désolé pour le rendez-vous de la semaine dernière dans ma tête je pensais que c’était le 20 et j’aurai pu téléphoner, mais non… quand je m’en suis rendu aperçu c’était le soir… c’est étonnant (rire), j’imagine que vous vous êtes déplacé pour rien du coup »

Malgré des capacités intellectuelles indéniables, en lien avec des capacités de réflexion, M.B dit avoir des troubles psychiques qui se traduisent notamment par de l’errance, des oublis :

  • « J’errais la nuit, je prenais mon vélo et je partais errer, j’avais des troubles psychiques. »
  • « il y a des choses pas logiques, j’ai des habitudes que je prends, il y a des choses qui ne sont pas logique dans ma tête…Quand je descends les escaliers chez moi, sachant que ma chambre est à l’étage, je me dis « mince j’ai encore oublié mes lunettes » du coup je suis obligé de remonter puis redescendre. »
  • « ça m’embête au quotidien, il y a2 jours je suis monté à la Roche-Sur-Yon j’avais oublié ma carte grise et mon permis de conduire, j’étais obligé de redescendre à Challans pour remonter à la Roche-Sur-Yon. »
  • « J’ai des absence et beaucoup d’oublis, je ne suis pas au top en fait »
  • « J’ai vu une dame que je connaissais qui était en location à saint Jean de Monts « Marie » qui m’avait parlé d’aller voir un psy et on l’a fait, je « volassais » elle voyait que quelque chose n’allait pas puis après je n’ai pas trop suivi les injonction du psychiatre ce qui fait que ça a retardé après. Mais bon je travaillais, j’étais dans l’action.
  • « Les dérèglement psychique m’ont amené en psychiatrie, sans toucher aux toxique mon cerveau s’est embrouillé, je ne sais pas à quoi s’est du, peut-être au voyage dans le train… J’étais seul dans le train, je voyais que je n’étais pas bien, pour dire vulgairement, ça fumait dans ma tête quoi… ça s’embrouillait dans ma tête, j’avais une pression forte, un stress peut-être. Une pression psychique, un dérèglement, peut-être de l’adrénaline… je dormais moins, j’errais la nuit. »

5.                  Attentes de M.B concernant la psychothérapie

« …que vous m’aiguillez, que vous m’écoutiez, que vous m’aiguillez sur les objectifs que j’ai à faire, vous voyez ce que je veux dire ? Une écoute, peut-être des analyses… »

Par ses dires, M.B affirme une nécessité à vouloir se faire entendre, comme si tout ce temps il était réprimé, prisonnier, incapable de vivre sa vie, sa vraie vie, sa bonne filière, sa voie.

Cette sensation d’oppression semble alors faire émerger en lui une suspicion quant à son traitement médicamenteux « Ce n’est pas bon pour la santé, donc vu qu’on me donne beaucoup de médicament… j’ai vu dans une revue qu’on pouvait en prendre mais qu’à court terme sinon ça changeait les méthodes de penser, les comportements, ça perturbait le fonctionnement normal, la pensée de la personne, c’était une revue assez sérieuse… parce que c’est important j’ai beaucoup de médicaments si j’arrêtais mon traitement je pense que mon cerveau fonctionnerait différemment ».

Il affirme que ce sont les médicaments qui le rendent malade, qui le perturbent, qui le font replonger…

 

 

IV.             Interprétation du cas clinique

En interprétant ses dires, il est constaté un moment de lucidité conjoint à un moment d’égarement et d’exacerbation. Or, le trouble schizo-affectif de type bipolaire se traduit par d’extrêmes changements d’humeur qui peut passer de la dépression (humeur basse) à la manie (humeur exacerbée).

Les changements d’humeur de M.B ne sont pas comparables aux dites sautes d’humeur des personnes normales.

En effet, chez le patient bipolaire, les sautes d’humeur peuvent être destructeurs car ils perturbent fortement les rapports humains et engendrent la perte d’emploi et des difficultés financières résultantes de dépenses excessives liées au coup de folie. En relatant l’histoire de M.B, son cursus professionnel est la reproduction exacte de ces sautes d’humeur, notamment de défenestration qui l’on conduit à l’instabilité dans son travail, ses pertes d’emploi et son problème pécuniaire.

De plus, M.B présentent des symptômes typiques à la psychose bipolaire que sont :

  • Idées de grandeur
  • Euphorie
  • Irritabilité
  • Déroute d’idées
  • Impulsivité exagérée (comportement à risque, surmenage, insomnie, accélération du débit verbal, agitation et distractibilité)

Des symptômes qui associent dépression, hypomanie et manie. D’ailleurs, le trouble bipolaire rassemble un désordre à la fois de la pensée et de l’affectif en associant trouble de l’humeur et trouble psychotique.

 

 

 

 

V.                Conclusion

La psychose bipolaire de M.B serait principalement liée à son enfance mettant en évidence la forclusion du père. De plus, les divers stades qu’il a passé relatent la sommité du stade du miroir, du clivage, de la dimension narcissique et explicite le ou les traumatismes mettant en cause la dissociation et la survie psychique du sujet.

Confirmant l’hypothèse du Dr J.R, les dires du sujet ainsi que les caractéristiques comportementales du sujet rejoignent les prospectus éducatifs de Behavioral Family Therapy for Psychiatric Disorders[54]  qui stipulent que: « Le trouble schizo-affectif est une maladie mentale grave semblable à la schizophrénie. Il peut affecter tous les aspects de la vie quotidienne : le travail, les rapports sociaux et les aptitudes à s’occuper de soi-même (comme l’hygiène et la toilette personnelles). Les patients atteints du trouble schizo-affectif peuvent présenter un large éventail de symptômes : contacts avec la réalité (hallucinations et délires), humeur (p. ex., dépression marquée), manque de motivation, incapacité de connaître le plaisir et manque de concentration. La nature grave des symptômes de ce trouble oblige les personnes affectées à être hospitalisées à diverses reprises pour recevoir leur traitement. On peut décrire l’expérience du trouble schizo-affectif comme étant semblable « au fait de rêver en état d’éveil »; c’est dire qu’il peut être difficile, pour une telle personne, de faire la distinction entre le réel et l’imaginaire. [55]»

Il apparaît alors que la psychose bipolaire de M.B serait subséquente au traumatisme selon Ferenczi qui serait induit et provoqué par une rupture : « un choc inattendu non préparé et écrasant, agit pour ainsi dire comme un anesthésique »[56] résultante d’un vécu traumatique dans l’enfance et de la survie psychique à la suite d’un évènement marquant.

 

 

VI.             Bibliographie

  1. Autres troubles psychotiques. Synopsis de Psychiatrie. Psychiatrie de l’adulte I. Kaplan H., Sadock B. eds. Masson. Paris, 1998. pp 219-257.
  2. Bercherie P. Genèse des concepts freudiens. Paris : Navarin, 1983
  3. Blanke O, et al. Stimulating illusory own-body perceptions. Nature 2002;419: 269–70.
  4. C. Soler, L’inconscient à ciel ouvert de la psychose: Presses universitaires du Mirail, coll. Psychanalyse, 2002.
  5. Dictionnaire de la psychanalyse, Larousse P.147
  6. Dictionnaire de la psychanalyse, Larousse P.171
  7. Dictionnaire de la psychoanalyse, Larousse P.265
  8. Dor J., introduction à la lecture de Lacan : l’inconscient structuré comme un langage.
  9. Ehrsson HH. The experimental induction of out-of-body experiences.Science 2007;317:1048.
  10. Ferenczi S. Deux types de névroses de guerre (hystérie). Œuvres complètes, II. Paris: Payot; 1970. p. 238–52.
  11. Ferenczi S. Œuvres complètes, IV. Paris: Payot; 1982
  12. Freud S. Au-delà du principe de plaisir (1920). In : Essais de psychanalyse. Paris : Payot, 1981
  13. Freud S. Les psychonévroses de défense (1894). In : Gesammelte Werke. Paris : PUF, 1973 : 1-14
  14. Freud S. Manuscrit H (1895). In : La naissance de la psychanalyse. Lettres à Fliess. Paris : PUF, 1956
  15. Freud S. Névrose et psychose (1924). La perte de la réalité dans les névroses et les psychoses. In : Névrose, Psychose et Perversion. Paris : PUF, 1973
  16. Freud S. Remarques psychanalytiques sur l’autobiographie d’un cas de paranoïa (dementia paranoïdes) (1911). In : Cinq psychanalyses. Paris : Denoël, 1935
  17. Freud S., (1915) « Deuil et mélancolie » in Métapsychologie, Paris, Gallimard, 1974. (1921) « Psychologie collective et analyse du moi », in Essais de psychanalyse, Paris, Payot, 1971. (1923) « Le moi et le ça », in Essais de psychanalyse, Paris, Payot, 1971. (1924), « Névrose et psychose » ; (1924) « La perte de la réalité dans la névrose et dans la psychose », in Névrose, psychose, perversion, Paris, PUF, 1973.
  18. Freud S., Névrose, psychose et perversion, « Névrose et psychose » et « La perte de la réalité dans la névrose et dans la psychose », PUF, 1981.
  19. G.Chaboudez (2002) l’auto-érotisme de la jouissance phallique.
  20. http://francais.world-schizophrenia.org/disorders/schizo-affective.html
  21. J.Lacan, le stade du miroir, écrits, Paris, Seuil, 1996, P.95
  22. Kim T. Mueser et Shirley M. Glynn, publié par New Harbinger Publications, Inc. (www.newharbinger.com). Deuxième édition, 1999
  23. Lacan J. De la psychose paranoïaque dans ses rapports avec la personnalité. Paris : Le François, 1962.
  24. Lacan J. Le séminaire, Livre III. Les psychoses. Paris : Le Seuil, 1981
  25. Lacan J., 1955, « La signification du délire », in Le séminaire, livre III, Les psychoses, Seuil, 1981, p. 31.
  26. Lacan J., D’une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose in les Ecrits.
  27. Lettre Ferenczi à Freud du 14 février 1924 n° 947
  28. Michel Bousseyroux, Variétésdifférentiables de la psychose. La schizophrénie. La paraphrénie
  29. Noyes R, Kletti R. Depersonalization in the face of life-threatening danger: a description. Psychiatry 1976; 39:19–27.
  30. S. Ferenczi S. (2006), Le traumatisme, Petite bibliothèque Payot, Paris,p. 40.
  31. S. Ferenczi S. (2006), Le traumatisme, Petite bibliothèque Payot, Paris,p. 33.
  32. S. Ferenczi S. (2006), Le traumatisme, Petite bibliothèque Payot, Paris,p. 67.
  33. S. Ferenczi S. (2006), Le traumatisme, Petite bibliothèque Payot, Paris,p. 63-64.
  34. S. Ferenczi S. (2006), Le traumatisme, Petite bibliothèque Payot, Paris,p. 54.
  35. S. Ferenczi S. (2006), Le traumatisme, Petite bibliothèque Payot, Paris,p. 87.
  36. S. Ferenczi, Traumatisme et aspiration à la guérison (1930) (O.C, p. 279).
  37. Sandor Ferenczi. Le Traumatisme, Petit bibliothèque Payot, 2006, Paris- p. 40
  38. Sandor Ferenczi. Le Traumatisme, Petit bibliothèque Payot, 2006, Paris- p. 129
  39. Schizophrénie. Synopsis de Psychiatrie. Psychiatrie de l’adulte I. Kaplan H., Sadock B. eds. Masson. Paris, 1998. pp 176-218.
  40. VINCENT MARK DURAND, DAVID H. BARLOW, MICHEL GOTTSCHALK « PSYCHOPATHOLOGIE: UNE PERSPECTIVE MULTIDIMENSIONNELLE ». TRADUIT PAR MICHEL GOTTSCHALK PUBLIE PAR DE BOECK UNIVERSITE, 2004

 

 

 

VII.          Annexes

[1] Freud S. Manuscrit H (1895). In : La naissance de la psychanalyse. Lettres à Fliess. Paris : PUF, 1956

[2] Bercherie P. Genèse des concepts freudiens. Paris : Navarin, 1983

[3] Freud S. Les psychonévroses de défense (1894). In : Gesammelte Werke. Paris : PUF, 1973 : 1-14

[4] Freud S. Névrose et psychose (1924). La perte de la réalité dans les névroses et les psychoses. In : Névrose, Psychose et Perversion. Paris : PUF, 1973

[5] Freud S. Remarques psychanalytiques sur l’autobiographie d’un cas de paranoïa (dementia paranoïdes) (1911). In : Cinq psychanalyses. Paris : Denoël, 1935

[6] Freud S. Au-delà du principe de plaisir (1920). In : Essais de psychanalyse. Paris : Payot, 1981

[7] Schizophrénie. Synopsis de Psychiatrie. Psychiatrie de l’adulte I. Kaplan H., Sadock B. eds. Masson. Paris, 1998. pp 176-218.

[8] Autres troubles psychotiques. Synopsis de Psychiatrie. Psychiatrie de l’adulte I. Kaplan H., Sadock B. eds. Masson. Paris, 1998. pp 219-257.

[9] Dictionnaire de la psychanalyse, Larousse P.171

[10] Dictionnaire de la psychanalyse, Larousse P.147

[11]G.Chaboudez (2002) l’auto-érotisme de la jouissance phallique.

[12]J.Lacan, le stade du miroir, écrits, Paris, Seuil, 1996, P.95

[13] Freud S., (1915) « Deuil et mélancolie » in Métapsychologie, Paris, Gallimard, 1974. (1921) « Psychologie collective et analyse du moi », in Essais de psychanalyse, Paris, Payot, 1971. (1923) « Le moi et le ça », in Essais de psychanalyse, Paris, Payot, 1971. (1924), « Névrose et psychose » ; (1924) « La perte de la réalité dans la névrose et dans la psychose », in Névrose, psychose, perversion, Paris, PUF, 1973.

[14] Freud S., Névrose, psychose et perversion, « Névrose et psychose » et « La perte de la réalité dans la névrose et dans la psychose », PUF, 1981.

[15] Lacan J., Le séminaire III.

[16] Lacan J., D’une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose in les Ecrits.

[17]Dor J., introduction à la lecture de Lacan : l’inconscient structuré comme un langage.

[18]Dictionnaire de la psychoanalyse, Larousse P.265

[19]Lacan J., 1955, « La signification du délire », in Le séminaire, livre III, Les psychoses, Seuil, 1981, p. 31.

[20]C. Soler, L’inconscient à ciel ouvert de la psychose: Presses universitaires du Mirail, coll. Psychanalyse, 2002.

[21] Lacan J. De la psychose paranoïaque dans ses rapports avec la personnalité. Paris : Le François, 1962.

[22] Lacan J. Le séminaire, Livre III. Les psychoses. Paris : Le Seuil, 1981

[23] VINCENT MARK DURAND, DAVID H. BARLOW, MICHEL GOTTSCHALK « PSYCHOPATHOLOGIE: UNE PERSPECTIVE MULTIDIMENSIONNELLE ». TRADUIT PAR MICHEL GOTTSCHALK PUBLIE PAR DE BOECK UNIVERSITE, 2004

[24] Michel Bousseyroux, Variétésdifférentiables de la psychose. La schizophrénie. La paraphrénie

[25]Sandor Ferenczi. Le Traumatisme, Petit bibliothèque Payot, 2006, Paris- p. 40

[26]Sandor Ferenczi. Le Traumatisme, Petit bibliothèque Payot, 2006, Paris- p. 129

[27] Lettre Ferenczi à Freud du 14 février 1924 n° 947

[28] Ferenczi S. Deux types de névroses de guerre (hystérie). Œuvres complètes, II. Paris: Payot; 1970. p. 238–52.

[29] Ferenczi S. Œuvres complètes, IV. Paris: Payot; 1982

[30] S. Ferenczi, Traumatisme et aspiration à la guérison (1930) (O.C, p. 279).

[31] Il y a toujours une unité qui implique continuellement le corps

[32]Noyes R, Kletti R. Depersonalization in the face of life-threatening danger: a description. Psychiatry 1976; 39:19–27.

[33]Blanke O, et al. Stimulating illusory own-body perceptions. Nature 2002;419: 269–70.

[34]Ehrsson HH. The experimental induction of out-of-body experiences.Science 2007;317:1048.

[35] S. Ferenczi S. (2006), Le traumatisme, Petite bibliothèque Payot, Paris,p. 40.

[36] S. Ferenczi S. (2006), Le traumatisme, Petite bibliothèque Payot, Paris,p. 33.

[37] S. Ferenczi S. (2006), Le traumatisme, Petite bibliothèque Payot, Paris,p. 67.

[38] S. Ferenczi S. (2006), Le traumatisme, Petite bibliothèque Payot, Paris,p. 63-64.

[39] S. Ferenczi S. (2006), Le traumatisme, Petite bibliothèque Payot, Paris,p. 54.

[40] S. Ferenczi S. (2006), Le traumatisme, Petite bibliothèque Payot, Paris,p. 87.

[41] Lacan J. Le séminaire, Livre III. Les psychoses. Paris : Le Seuil, 1981

[42]Dor J., introduction à la lecture de Lacan : l’inconscient structuré comme un langage.

[43] S. Ferenczi S. (2006), Le traumatisme, Petite bibliothèque Payot, Paris,p. 63-64.

[44] Ferenczi S. Œuvres complètes, IV. Paris: Payot; 1982

[45] S. Ferenczi, Traumatisme et aspiration à la guérison (1930) (O.C, p. 279).

[46]Sandor Ferenczi. Le Traumatisme, Petit bibliothèque Payot, 2006, Paris- p. 40

[47] Freud S., Névrose, psychose et perversion, « Névrose et psychose » et « La perte de la réalité dans la névrose et dans la psychose », PUF, 1981.

[48] Lettre Ferenczi à Freud du 14 février 1924 n° 947

[49] S. Ferenczi S. (2006), Le traumatisme, Petite bibliothèque Payot, Paris,p. 33.

[50]J.Lacan, le stade du miroir, écrits, Paris, Seuil, 1996, P.95

[51] S. Ferenczi S. (2006), Le traumatisme, Petite bibliothèque Payot, Paris,p. 67.

[52] S. Ferenczi S. (2006), Le traumatisme, Petite bibliothèque Payot, Paris,p. 63-64.

[53] S. Ferenczi S. (2006), Le traumatisme, Petite bibliothèque Payot, Paris,p. 87.

[54] Kim T. Mueser et Shirley M. Glynn, publié par New Harbinger Publications, Inc. (www.newharbinger.com). Deuxième édition, 1999

[55] http://francais.world-schizophrenia.org/disorders/schizo-affective.html

[56]Sandor Ferenczi. Le Traumatisme, Petit bibliothèque Payot, 2006, Paris- p. 40

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