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L’Ubérisation de la Grande Distribution : Enjeux, Avancées et Perspectives

SOMMAIRE

SOMMAIRE.. 1

REMERCIEMENTS. 3

INTRODUCTION.. 4

PREMIERE PARTIE : CADRE ET CONTEXTE DE L’ETUDE.. 6

Chapitre 1 : LES PREMICES DU CONCEPT D’UBERISATION.. 7

  1. L’innovation. 7
  2. La digitalisation. 9
  3. La libre concurrence. 12

Chapitre 2 : LE CONCEPT D’UBERISATION.. 15

  1. Source du concept et son évolution historique au niveau mondial 15
  2. Les principes fondateurs de l’ubérisation. 22

DEUXIEME PARTIE : OBSERVATION ET ANALYSE DES PRATIQUES DANS LA GRANDE DISTRIBUTION   27

Chapitre 1 : PRESENTATION DE LA METHODOLOGIE. 28

Chapitre 2 : ETUDE DE CAS. 31

  1. Etude sur le cas d’un produit non-alimentaire en phase d’être « ubérisé » : la perceuse. 31
  2. Etude sur le cas d’un produit alimentaire non encore « ubérisé » : les aliments frais. 39

Chapitre 3 : ANALYSE SWOT DE L’UBERISATION DANS LE MILIEU DE LA GRANDE DISTRIBUTION   54

  1. Les impacts positifs. 54
  2. Les impacts négatifs. 57

Chapitre 4 : PROPOSITIONS ET PRECONISATIONS. 61

TROISIEME PARTIE : DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS. 62

Chapitre 1 : COMPARAISON ENTRE LES PRATIQUES ACTUELLES ET CELLES DES ANNEES « PRE-UBERISATION » EN MATIERE DE DISTRIBUTION.. 63

  1. Les pratiques des années « pré-ubérisation » dans la Grande Distribution française. 63
  2. Les pratiques actuelles dans la Grande Distribution. 63
  3. Les faiblesses de la grande distribution d’aujourd’hui 64

Chapitre 2 : COMPARAISON ENTRE LE MODELE AMERICAIN ET LA CONCEPTION EUROPEENNE  66

  1. La conception Européenne. 66
  2. Le centre commercial moderne américain : le « Mall ». 67

Chapitre 3 : LA SOCIETE UBERISEE DE DEMAIN : QUELLES VALEURS POUR LES GENERATIONS FUTURES EN L’ETAT ACTUEL DES CHOSES. 69

  1. La place de la technologie. 69
  2. Les relations clients-fournisseurs. 76
  3. Le rôle de l’Etat 78

Chapitre 4 : L’UBERISATION : FEU DE PAILLE OU VERITABLE REVOLUTION ?. 80

CONCLUSION.. 83

BIBLIOGRAPHIE.. 86

WEBOGRAPHIE.. 88

TABLE DES MATIERES. 90

 

 

 

REMERCIEMENTS

 

 

 

INTRODUCTION

 

Avec ce nouvel ère du numérique, nous assistons à l’avènement de 2 phénomènes qui semblent liés l’un à l’autre : d’une part, la domination de l’économie libérale et d’autre part, l’essor considérable du digital dans notre quotidien. Cette vague est à l’origine d’un véritable bouleversement dans nos manières de penser, d’agir, de produire, de consommer, bref notre manière de vivre.

C’est avec l’apogée de l’innovation, la digitalisation et la libre concurrence ainsi que la recherche d’une meilleure alternative à notre modèle économique actuel qu’est née une nouvelle économie plus libérée des règles imposées par l’économie traditionnelle : l’ « ubérisation ». Elle est qualifiée de phénomène de disruption ou d’innovation de rupture dans la mesure où les positions dominantes sont bousculées par de nouveaux acteurs économiques plus novateurs et même, elle est en passe de remettre en cause les systèmes de valeur dans l’économie en place. Le concept d’ubérisation gagne en notoriété et semble s’immiscer petit à petit dans de plus en plus de secteurs d’activités dont la grande distribution. Mais parallèlement, l’ubérisation s’est retrouvée plus d’une fois au cœur de débats et d’incidents plus ou moins graves dans différents pays, reflétant ainsi la complexité des enjeux et des défis qu’elle impose de relever dans le cadre de sa mise en pratique.

L’ubérisation telle que nous l’avons présentée suppose donc une certaine difficulté tant il est difficile de délimiter précisément où elle commence et où elle finit. Ce constat est d’autant plus vrai pour le cas de la grande distribution, qui constitue un véritable outil de mesure pour apprécier l’évolution de la société en termes de demande, de pratique et de services. S’inscrivant dans ce cadre, une question se pose alors de savoir si oui ou non l’ubérisation a commencé dans le domaine de la grande distribution. Dans cette optique, le présent travail aura pour but de fournir des éléments de réponses destinés à déterminer à quel stade de l’ubérisation la grande distribution se trouve-t-elle à l’heure actuelle et jusqu’où ira ce concept pour inquiéter autant les entreprises traditionnelles.

Afin de répondre à cette problématique, il est pertinent de comprendre dans un premier lieu le fondement même de ce concept et son ascension fulgurante dans le monde. Ensuite, une observation sera menée sur les pratiques de l’ubérisation dans la grande distribution française pour nous faire une idée de l’avancée de ce nouveau modèle économique dans le secteur. Dans cette démarche, nous analyserons dans un premier temps l’évolution d’un produit non alimentaire en phase d’être « ubérisé » dans le domaine du bricolage. D’autre part, il serait intéressant de le comparer à un produit alimentaire non encore « ubérisé ».

Les hypothèses retenues dans le cadre de cette étude sont :

  • l’identification des variables qui va permettre de déterminer les facteurs limitatifs à la mise en œuvre de l’ubérisation,
  • la détermination des impacts de l’ubérisation qui nous permettra d’apprécier les différentes dimensions des changements induits par l’ubérisation.

 

Afin de valider ces hypothèses, nous allons essayer de nous projeter vers l’avenir en comparant le modèle américain et la conception européenne d’une part, les pratiques actuelles et la société ubérisée de demain d’autre part. Nous pourrons ainsi déterminer si l’ubérisation a déjà commencé ou si elle prépare son élan pour conquérir le secteur de la grande distribution française.

Ainsi, nous présenterons succinctement dans notre travail les parties suivantes : tout d’abord une partie théorique qui se consacrera à la présentation et à l’explication de concepts importants liés au thème, ensuite une partie analytique qui sera dédiée à la présentation de la méthodologie adoptée, ainsi qu’au développement des questions de recherche choisies par l’auteur, enfin, une troisième et dernière partie dans laquelle seront présentées les discussions et les recommandations préconisées par l’auteur en réponse à la problématique posée par le thème.

 

 

PREMIERE PARTIE : CADRE ET CONTEXTE DE L’ETUDE

 

 

 

Chapitre 1 : LES PREMICES DU CONCEPT D’UBERISATION

 

Nous assistons actuellement à une nouvelle ère portée par l’essor du digital, se traduisant par l’utilisation massive des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC), des réseaux sociaux et des multiples services du web dans notre quotidien. En parallèle, l’économie libérale continue sa domination dans le monde et s’exprime à travers une lutte sans merci que se livrent les entreprises de nos jours, utilisant tous les moyens à disposition pour devancer les concurrents.

C’est dans cet état actuel des choses que l’« ubérisation », parfait mélange entre ces deux phénomènes, s’immisce petit à petit dans de plus en plus secteurs d’activités. En effet, prenant source aux Etats-Unis avec la société Uber (d’où il tire son nom), ce concept s’est véritablement « internationalisé » ces dernières années en s’exportant aux quatre coins du globe, proposant des services de plus en plus variés et affectant par la même occasion de nombreux secteurs d’activités dont la grande distribution.

Notre étude commence par la compréhension du fondement même de l’ubérisation pour pouvoir aborder le thème en profondeur et bien analyser ses forces et ses faiblesses dans le cadre de notre observation. Pour ce faire, il convient de connaître les facteurs qui ont grandement joué dans sa naissance et son expansion exponentielle. Le concept est né de la convergence de trois phénomènes simultanés arrivés à maturité : l’innovation, la digitalisation et la libre concurrence.

 

  1. L’innovation

1.1.      Définition

Selon la dernière édition du Manuel d’Oslo (OCDE/ Eurostat, 2005), l’innovation se définit comme « la mise en œuvre d’un produit (bien ou service) ou d’un procédé nouveau ou sensiblement amélioré, d’une nouvelle méthode de commercialisation ou d’une nouvelle méthode organisationnelle dans les pratiques de l’entreprise, l’organisation du lieu de travail ou les relations extérieures ». Pour être nommée comme telle, elle doit apporter effectivement un élément de nouveauté soit pour l’entreprise (au sein même de son unité), soit pour le marché (lorsque c’est l’entreprise qui est à l’origine de l’introduction sur le marché), soit sur le plan international (quand elle met en place une innovation qui n’existe nulle part ailleurs dans le monde). Il existe 4 types d’innovation :

– L’innovation de produit : le lancement d’un bien ou d’un service nouveau ou quelque peu transformé en termes de caractéristiques fonctionnelles, de spécifications techniques, de composants, de logiciel intégré ou d’usage, etc.

– L’innovation de procédé : la mise en place d’un processus de production ou de distribution novateur qui inclut d’importantes améliorations sur le plan technique, le matériel et/ou le logiciel.

– L’innovation de commercialisation : l’introduction de solutions plus performantes sur le plan marketing, le packaging, le conditionnement, les nouvelles techniques pour la  promotion des produits, le positionnement, la politique tarifaire, les méthodes de vente, les nouveaux canaux de distribution, etc.

– L’innovation d’organisation : la mise en place de systèmes de management efficaces qui permettent d’accroître la productivité du travail pour plus de compétitivité. Elle inclut également de nouvelles méthodes organisationnelles sur les relations extérieures de l’entreprise.

1.2.      L’impératif d’innovation

Dans la course aux profits et pour pouvoir sortir la tête hors de l’eau et devenir ainsi plus compétitives, les entreprises ne cessent d’innover pour répondre aux besoins des consommateurs. Ces derniers l’ont compris, ils ont désormais le choix final et ils font en sorte de toujours plébisciter le service ou le produit qui lui convient le mieux. Ils sont toujours à la recherche du meilleur service, plus rapide, plus ergonomique et plus économique.

L’essor du numérique, combiné à une exigence incessante des consommateurs, a contraint les entreprises à se réinventer et à proposer des services toujours plus innovants en termes de prix très attractifs, de qualité et d’instantanéité.

Pour apporter des solutions adaptées à leurs exigences, des entrepreneurs ont repéré les imperfections du marché et ont décidé de bousculer les structures traditionnelles ainsi que les offres et règles en place.

1.3.      Innovation et économie numérique

L’économie numérique fait référence à toutes les activités économiques et sociales qui sont générées par les nouvelles technologies comme les réseaux internet, le e-commerce, le m-commerce, etc. Selon le McKinsey Global Institute (2014), cette nouvelle économie représente 5,5% de la valeur ajoutée créée et sa portée sur la contribution au développement de la France s’avère être plus importante que celle de l’économie traditionnelle. D’après toujours le rapport de McKinsey France, 3,3% de la population active travaillent dans le numérique tandis que dans une même proportion, des emplois indirects ou induits sont créés.

En parallèle, l’innovation est le moteur même de la croissance d’une entreprise. Elle implique le besoin d’une main d’œuvre qualifiée qui est en mesure de rechercher des idées et de mettre en œuvre des techniques innovantes, de les développer et de les introduire sur le marché. Seules les entreprises qui disposent des compétences requises comme les « start-up » sont à même de s’adapter aux mutations technologiques et structurelles.

Au-delà du fait que l’innovation numérique contribue à la croissance économique en général, elle produit des effets non négligeables sur l’environnement et les activités des entreprises :

– une intensification de la concurrence avec l’arrivée de nouveaux entrants, des prix de plus en plus compétitifs et transparents, des produits et services de plus en plus personnalisés, etc.

– une transformation importante de l’expérience client qui permet le décuplement des occasions d’interaction entre les marques et les consommateurs,

– une optimisation de la prise de décision grâce aux nombreuses applications qui permettent d’interpréter rapidement et efficacement les infimes changements sur le marché,

– une numérisation des processus opérationnels, autrement dit, le numérique permet de traiter d’innombrables données qui vont permettre aux dirigeants de prendre des décisions pertinentes et précises.

Pour toutes ces raisons, nous pouvons déjà avancer que l’expansion de l’innovation numérique constitue une rupture historique avec les structures en place, de par son ampleur et son instantanéité. Elle a des répercussions sur les entreprises dans tous les secteurs. Il est dans leur intérêt d’en comprendre les enjeux et d’en tirer avantage pour être plus compétitives.

  1. La digitalisation

Aujourd’hui, digitaliser est le mot d’ordre pour pouvoir se démarquer dans tous les secteurs, y compris la grande distribution. Désormais, la création de valeur de l’ère industrielle qui s’articule autour des biens et services, n’est plus d’actualité. Un phénomène disruptif est venu bouleverser le modèle économique d’antan pour une nouvelle économie axée sur l’expérience client. Mais pour pouvoir comprendre le grand changement, nous allons dresser un panorama global sur l’héritage de la révolution industrielle.

2.1.      De l’ère industrielle à l’ère digitale

Bien que l’ère industrielle nous semble un lointain passé, elle a laissé un certain héritage toujours ancré dans le processus de production des entreprises traditionnelles. En effet, le leitmotiv est basé sur une organisation du travail dont le seul but est de produire massivement des produits et services standardisés, qui répondent aux besoins de la majorité des consommateurs. Avec un modèle économique qui trouve son inspiration du taylorisme et du fordisme, les acteurs classiques s’activent à produire toujours plus et plus vite, en suivant des tâches à la chaîne, bien spécialisées et précises. La relation avec les clients est également standardisée, avec un objectif généralement tourné vers la hausse de la productivité, sans réelle complicité. Mais avec l’avènement d’Internet, la donne est en train de changer. Ce modèle industriel qui était le moteur de croissance de bien d’entreprises dans le monde durant plus d’un siècle et demi, semble s’essouffler avec l’avènement d’Internet.

Cet espace où tout un chacun peut s’exprimer librement, est en train de donner le pouvoir aux internautes qui y ont l’opportunité de donner leur avis sur tout. Dès lors qu’un service ou un produit déplait, l’information se répand rapidement. Les méthodes de marketing classiques comme les messages publicitaires n’ont plus vraiment d’effets sur les consommateurs. Face à une clientèle devenue très expressive et infidèle, les entreprises doivent désormais adopter de nouvelles stratégies pour la reconquérir à travers la complicité, le dialogue et une expérience client unique. Les clients d’aujourd’hui sont plus sensibles à la création de valeur autour des produits et services. C’est dans ce contexte que la digitalisation entre en scène pour cibler leurs attentes de manière rapide et efficace et leur proposer des services personnalisés.

2.2.      L’enjeu de la numérisation

Le passage au numérique représente un véritable enjeu pour les entreprises qui souhaitent rester compétitives. Dans un contexte économique qui évolue rapidement, cette démarche permet de rendre fluides les échanges d’informations, internes et externes, et de faciliter la gestion ainsi que le suivi des machines, outils de production, etc. La numérisation est le meilleur moyen pour les entreprises de conquérir de nouveaux marchés, de répondre aux besoins des clients dans les délais les plus brefs, de moderniser les postes de travail pour plus d’efficacité et d’efficience. En somme, elle permet d’accroître la productivité tout en minimisant les coûts liés à la production et aux temps nécessaires entre les échanges de données.

Dans le domaine du digital, les entreprises françaises accusent encore un certain retard par rapport aux entreprises européennes, selon les analystes du net. En effet, les trois quart de ces dernières sont dotées d’un site web pour seulement deux tiers pour les entreprises françaises. Aussi, presque un tiers des entreprises des 28 pays de l’Union Européenne font usage du médial social contre un cinquième en France. Ce retard digital face à l’utilisation des nouvelles technologies peut engendrer une perte de compétitivité, à l’inverse de la rentabilité opérationnelle affichée par les entreprises qui ont misé sur une innovation numérique.

2.3.      Le big data

Mais pour profiter des retombées positives de la numérisation, il est primordial de devenir un acteur du numérique à part entière. Pour cela, il faut maîtriser l’informatique, en termes de traitement automatique de l’information ainsi que de données. Savoir déchiffrer les données et en faire bon usage est la clé pour mieux comprendre les clients, connaître leurs attentes et y répondre de manière ciblée.

Nombreuses sont les opportunités pour collecter des données : capteurs posés sur des produits, navigation sur internet, enquêtes, formulaires d’achats, tickets de caisse, etc. Cette masse d’informations qui se présente sous forme de données hétéroclites sont difficilement exploitables sans un système spécialisé tel que le big data. Ce dernier permet de stocker les données et de les traiter grâce aux algorithmes pour être facilement interprétées par les entreprises. Le big data est un atout essentiel, que ce soit pour un usage interne ou externe, pour venir en aide aux entreprises notamment dans la prise de décision, afin de mieux affiner le ciblage des besoins de leurs clients. Selon Marc Atallah, directeur au cabinet Deloitte France, « On exploite désormais toutes les données dont on dispose sur un client, en les mettant toutes au même niveau, sans les hiérarchiser : leur âge, leur profession, les boutiques autour de chez eux, cela nous permet d’établir des profils de clients totalement nouveaux » dont le but est de « Savoir quel client viser, quel client garder, quel client est le plus rentable. »

2.4.      Un impératif dans l’entreprise moderne

La digitalisation est un des leviers qui a contribué à la naissance du concept d’ubérisation. Avec l’avènement du numérique, du big data et du logiciel, de nombreuses plateformes peuvent désormais mettre en relation un client avec des « collaborateurs » dispersés un peu partout dans le monde et lui fournir dans les meilleurs délais, un produit ou un service à un prix défiant toute concurrence. L’accessibilité rapide et vulgarisée à cet univers numérique est le facteur déterminant pour que des besoins de part et d’autre se rejoignent et se complètent. Il permet donc de créer de la valeur en faisant en sorte que les offres convergent vers la demande ; ce qui favoriserait l’économie de l’usage.

En parallèle, l’accès à Internet par les consommateurs finaux s’est pratiquement démocratisé. Les smartphones, les tablettes, les appareils connectés permettent un accès simple, facile et généralisé aux applications Web, qui sont conçues pour être accessibles au grand nombre.

Grâce à leur maîtrise des nouvelles technologies, les start-up spécialisées dans le développement informatique ont su mettre sur le marché un produit numérique bien finalisé qui répond aux attentes des consommateurs.

 

  1. La libre concurrence

« Un processus de rivalité entre entreprises », selon M. Emmanuel Combe, professeur d’économie et vice-président de l’Autorité de la concurrence.

3.1.      Définition

Par définition, la libre concurrence est un système économique où règne la loi de l’offre et de la demande. C’est un marché où les règles du jeu sont claires et où tous les acteurs sont au fait de toutes les informations sur les prix, sur l’homogénéité des produits, sur les méthodes de production, les stratégies de vente, etc. Le rôle de l’Etat consiste à veiller au bon fonctionnement des marchés, à lutter contre les ententes douteuses et à sanctionner les mauvaises pratiques.

La concurrence serait idéale si les offreurs de produits et services vendent au prix du marché, sans qu’aucun d’eux ne dispose du pouvoir de fixer les prix ou d’influencer les décisions des autres acteurs. Elle serait déloyale du moment qu’un des acteurs (monopole) ou un groupe d’acteurs (oligopole) a la possibilité de fixer un prix, une quantité ou une qualité.

La concurrence est l’élément fondamental qui permet la mondialisation de l’économie libérale. Jusqu’ici, en matière d’économie de marché, c’est la méthode la plus efficace d’organisation qui a pu rivaliser avec le modèle étatique où c’est l’Etat qui fixe l’orientation de l’économie. La base de toute concurrence est la liberté d’entreprendre. Cela se traduit par l’absence de barrières à l’entrée du marché, la libre circulation des facteurs de production (flux de capitaux), des services ainsi que la liberté d’implantation. En jouant sur le plan international, les entreprises nationales sont dans l’obligation de s’adapter pour survivre, les incitant ainsi à se spécialiser et à se moderniser.  Dans le même temps, les échanges avec les firmes étrangères favorisent les transferts de technologie et d’informations. L’essor de cette philosophie amène les entreprises à se créer des positions dominantes (au regard des fusions ou acquisitions en masse) pour faire face aux nombreux concurrents et à absorber les plus faibles. En parallèle, soucieuses de mettre en place des stratégies de monopole dans un marché libre, les entreprises cherchent des moyens juridiques pour se protéger face au développement de la concurrence dont notamment les brevets, les marques, etc.

3.2.      Opportunités à saisir

L’ouverture à la concurrence est une opportunité pour les nouvelles entreprises de pénétrer des marchés jusqu’ici inaccessibles, car dominés par des géants en position de monopole comme ce fut le cas des taxis. Il fut un temps où ces derniers avaient l’avantage d’être les seuls sur le marché et ainsi de fixer à leur guise les prix des services et/ou produits qu’ils offraient sans libre arbitre, pour pouvoir garder une part importante de marché. La donne a donc changé…

Face à une lutte acharnée pour la survie, la concurrence incite vivement les entreprises à imaginer de meilleurs produits et méthodes de production révolutionnaires afin d’augmenter le choix des consommateurs. Des entrepreneurs audacieux, à l’instar des initiateurs des start-up, ont su saisir les opportunités qui fleurissent grâce à l’avènement du numérique, profiter de conditions particulièrement avantageuses et d’intervenir en marge du cadre règlementaire fixé par les normes étatiques. Cela permet dans la foulée de forcer les acteurs traditionnels bien ancrés dans leurs secteurs à se remettre en cause et à suivre les exigences de la demande.

3.3.      Avantages pour les consommateurs

Ce modèle économique qui privilégie la politique de concurrence permet la stimulation de l’esprit d’entreprise ainsi que la productivité des entreprises. Du coté des consommateurs, la concurrence leur profite à tous dans la mesure où de nouveaux intermédiaires essaient par tous les moyens de devancer leurs désirs en proposant des produits et services répondant parfaitement à leurs besoins et à des prix plus que compétitifs. La concurrence contribue grandement à la baisse conséquente des prix et à l’amélioration de la qualité des produits et services. Cette veille concurrentielle incite les entreprises à offrir une multitude de choix aux clients pour différencier leurs produits des autres et à innover sans cesse en produisant ce qu’il y a de meilleur, de la fabrication des produits jusqu’aux services offerts, en passant par les techniques de production.

3.4.      Désavantages

En contrepartie de ces avantages que fait miroiter la concurrence, les actions prises pour diminuer au maximum les coûts de production n’entraînent pas qu’une diminution des prix, mais aussi bien des baisses de salaires, quand ce n’est pas la délocalisation des emplois ou même la désintermédiation. Toutefois, même si la concurrence permet soi-disant d’améliorer la qualité des produits et services, il n’en est pas souvent ainsi puisque certaines entreprises profitent de la situation pour faire du neuf avec du vieux, en ajoutant juste quelques modifications aux produits ou services pour se démarquer. D’autres vont jusqu’à tricher (comme par exemple sur la composition des produits) pour pouvoir proposer des prix plus que compétitifs et concurrencer ainsi les entreprises « honnêtes ». Dans ces circonstances, la concurrence offre une multitude de choix aux consommateurs mais, cette variété n’est souvent que trompeuse, dans la mesure où des stratégies en marketing bien pensées sont mises en avant pour donner une perception factice aux consommateurs et leur apporter l’illusion qu’un produit ou service est bien meilleur qu’un autre.

 

 

 

Chapitre 2 : LE CONCEPT D’UBERISATION

 

« L’ubérisation est un phénomène réel qui est la poursuite d’un mouvement plus profond de digitalisation, de robotisation de l’économie toute entière » selon Bruno TEBOUL, Ubérisation = Economie déchirée ?, Editions Kawa, Mai 2015.

 

  1. Source du concept et son évolution historique au niveau mondial
1.1.      La source du concept

Trouvant sa source dans un contexte de crise écologique et économique, le concept d’« ubérisation », connue actuellement sous le nom plus rassurant d’économie de partage ou économie collaborative, serait le levier pour aborder de manière constructive le changement et pour proposer une alternative plus évidente à l’économie libérale. Mais dans un certain paradoxe, certains observateurs voient ce phénomène comme un élément disrupteur, autrement dit, en franche rupture avec les pratiques d’autrefois. Pour Guillaume Sarlat, auteur du livre « En finir avec le libéralisme à la française » (Editions Albin Michel) pour le Figaro, «L’Ubérisation, tout le monde en parle aujourd’hui : tous les business models des grands groupes seraient sur le point d’être disruptés, ubérisés, désintermédiés, commoditisés, en un mot pulvérisés par une multitude de startups beaucoup plus innovantes. » En bref, ce phénomène nouveau s’apparente comme la solution idéale pour la résolution d’un problème où les acteurs traditionnels n’ont pas su apporter des solutions satisfaisantes. Boris DESCARREGA, responsable d’études socio-économiques à l’Observatoire Société et Consommation (ObSoCo) dépeint l’ubérisation comme « l’arrivée d’un nouvel entrant qui vient bousculer un marché donné, issu de l’univers du numérique et de l’économie collaborative, et qui utilise le travail indépendant, voire le travail des particuliers, comme le fait BlaBlaCar ou Airbnb ». La « coopérative attitude » centrée sur de nouvelles formes d’économie sociale, solidaire et circulaire, entre peu à peu dans les mœurs et influe les comportements tant des consommateurs que des dirigeants d’entreprises traditionnelles qui doivent se remettre en question.

1.1.1.      Le déclenchement

Le terme « ubérisation » n’est né que depuis la fin de l’année 2014 à l’initiative de Maurice Levy, le PDG de Publicis Groupe lors d’une interview au Financial Times en décembre 2014, mais il gagne en notoriété du fait que l’arrivée des nouvelles plateformes en ligne bouleverse les circuits de distribution et bouscule les structures traditionnelles. Avec l’innovation numérique, la recherche constante de compétitivité et la volonté d’indépendance des Français, on assiste à un changement rapide des rapports de force. Désormais, le libre échange couplé à une maîtrise des données constitue un facteur de succès pour aligner l’offre sur les besoins réels et désirs informulés des consommateurs.

La secousse vient de la société américaine Uber qui détient en peu de temps (depuis 2009) le monopole de la commande de voitures avec chauffeur, au détriment des taxis. Elle a réussi le pari de mettre en relation directement les clients et des chauffeurs privés grâce à des logiciels et des algorithmes sous-jacents. Elle propose des prix cassés et une prestation rapide qui répondent pleinement aux attentes de la clientèle.

1.1.2.   Un processus bien maîtrisé

Depuis la commande jusqu’au paiement, tout le processus est dématérialisé ; ce qui fait qu’il n’y a plus de barrières d’entrée et plus de longues attentes pour trouver un taxi. Le service permet à des particuliers désireux d’arrondir leurs fins de mois, d’utiliser leur propre véhicule pour le transport de passagers. De quoi susciter l’intérêt des clients qui ont désormais l’opportunité de devenir des prestataires de service, sans devoir payer des charges comme le paiement des impôts, de la licence… et des clients potentiels de bénéficier d’un service instantané et à prix très attractif.

En analysant les données digitales provenant des utilisateurs comme la géolocalisation grâce aux algorithmes, Uber est en mesure de faire converger l’offre et la demande instantanément et de manière automatisée. Afin de mieux optimiser ses offres, il mise sur l’analyse du trafic pour faire varier le prix du service et de le rendre le plus efficient possible, en définissant en temps réel le trajet optimal en fonction des conditions de circulation.

1.1.3.   Un concept très attrayant

Comme le lancement du projet est rapide et se met en place avec relativement peu de contraintes et de moyens, le concept trouve preneur à une vitesse prodigieuse et s’exporte dans les grandes villes des pays du monde. Aujourd’hui, Uber a atteint des sommets qui forcent l’admiration.

Uber : 6 ans d’existence, 6 chiffres record

8 millions d’utilisateurs 
250 villes desservies
1,2 milliard de dollars levés en juin 2014
1 million de courses quotidiennes
160 000 taxis
26 millions de dollars de chiffre d’affaires mensuel à New York

Sources: Statistic Brain, VentureBeat

  • Son évolution historique dans le monde
1.2.1. La force du concept

L’ubérisation ou l’économie de partage ou l’économie collaborative est louée pour son offre économique alternative et pour sa contribution à l’émergence d’un nouveau modèle plus humain. Elle doit son succès phénoménal au fait que tous les acteurs s’y retrouvent d’un point de vue financier. De même, les utilisateurs semblent satisfaits des services d’Uber ; ils rassurés par le système de notation des chauffeurs qui diffuse instantanément l’information sur la qualité de service et par la géolocalisation qui leur indique en temps réel la position de leur voiture.

La force du concept ne vient pas de la technologie informatique elle-même mais de «  l’effet mathématique exponentiel de l’agrégation ». Notons comme un exemple sur un site de location de produit, plus il y a d’offreurs et plus se crée de la valeur économique d’échange et de partage.

L’idée part d’un service de transport de personnes mais elle commence à gagner de nombreux secteurs dont le logement, la musique, l’immobilier, la finance « peer-to-peer », les ressources humaines en ligne, le covoiturage, le commerce de détail, les services juridiques, etc.

Les domaines d’activités concernés :

  • Transport : Uber
  • Achat de matériel d’occasion : Leboncoin, Ebay
  • Covoiturage : Blablacar
  • Location d’appartement : Airbnb
  • Consommation agricole locale : La ruche qui dit oui, Les paniers de Martin
  • Financement participatif : Ulule, Kickstarter
  • Monnaies complémentaires : Brixton pound
  • Mise en commun de connaissances : Wikipédia, Wikia, Linux, etc.
  • Production : Hackerspace
  • Echange de biens et services : accorderies, etc.

L’économie collaborative est dominée par quatre secteurs

 

Une progression spectaculaire

  • 24,4 Mrds € : le chiffre d’affaires généré par l’économie collaborative en 2013
  • 93,9 Mrds : le poids que cela devrait peser en 2016, selon les estimations

Source : Cabinet Deloitte

1.2.2. Mais pourquoi un tel engouement ?
  1. Motivation sociétale

Tout part de la notion du partage. Les consommateurs d’aujourd’hui semblent plus enclins à vouloir tout partager, ce qui il y a quelque vingt ou trente années encore, était une idée impensable. C’est là une différence culturelle fondamentale : la génération actuelle apporte une moindre importance à la notion de propriété. Privilégiant l’usage à la possession, elle n’est plus ainsi aussi réticente à se soustraire à des nécessités en apparence aussi pesantes que l’espace par exemple : désormais la proximité territoriale n’est plus un impératif pour conclure un accord. Ou encore le temps : la rapidité des recherches permet de faire converger des volontés qui n’auraient parfois même jamais pu se rencontrer sans cet outil fabuleux.

  1. Motivation économique

Par ailleurs, avec le mouvement écologique et environnemental qui gagne du terrain, l’accent est mis sur le non-gaspillage. Les consommateurs se tournent de plus en plus vers une meilleure alternative aux modèles économiques actuels par :

  • L’optimisation de la valeur des biens qu’ils possèdent (automobile, maison, etc.),
  • Un complément de leur salaire face à la crise de 2008 qui perdure
  • La monétisation de leur excès d’inventaire (espace en plus, chambre inoccupée, etc.)
  • L’achat à des prix les plus bas
  • L’obtention de prêts moins onéreux
  1. Motivation d’expérience en tant que clients

Les particuliers plébiscitent de plus en plus l’efficacité et la meilleure expérience client des services de l’économie de partage, qui proposent en général des transactions sans numéraire, avec des factures envoyées par mail et des commentaires en ligne. Plus l’expérience séduit les clients, plus ces derniers annotent des recommandations en faveur de l’entreprise, mais si le service client les déçoit, la répercussion des déconvenues des consommateurs sera dévastatrice pour l’image et les revenus de l’entreprise. Grâce à l’effet de partage, les conséquences seront fatales pour cette dernière dans la mesure où la majorité des clients tient compte des recommandations et avis sur Internet avant d’effectuer un achat ou de souscrire à un service.

  1. Motivation technologique

Grâce à l’essor du digital, aux plateformes mobiles (smartphones, apps) de plus en plus précises et personnalisées, au paiement sécurisé en ligne, aux réseaux sociaux, à l’attrait des communautés d’intérêt, aux nouveaux « business models on line », nous assistons à l’heure actuelle au passage d’une société de la consommation à une économie de l’usage. Loin de l’univers taylorisé d’antan où le client était habitué à une offre basée sur un « produit banalisé », l’ubérisation offre la simplicité d’usage, le libre accès aux données, l’interface conviviale des outils de dernière technologie mobile ainsi que l’opportunité offerte à chacun d’avoir la sensation ultime « exister » enfin grâce aux réseaux sociaux, aux avis partagés, etc.

En conséquence, le client devient fournisseur, le rapport est plus direct avec peu ou pas d’intermédiaire. Avec ce modèle économique qui contourne les traditionnelles « barrières à l’entrée » et qui échappe aux contraintes d’investissement, de coût et de masse salariale, il est évident que les produits ou services proposés auront plus de choix, de flexibilité et seront moins couteux. Dans la foulée, la transaction se concrétise avec le moins de désagrément possible tandis qu’une interaction plus sociale s’instaure entre les deux parties.

1.2.3. Un succès qui gagne de nombreux secteurs

Dans un contexte de crise qui mine la productivité et qui impacte sur le développement économique, l’économie des plates-formes apparait comme la solution pour sortir de la léthargie. Cette mutation vers une économie collaborative apparaît ainsi inéluctable. Selon une étude, d’ici à 2025, on assistera à une ascension prodigieuse de l’économie de partage dans de multiples secteurs d’activités.

 

Source: PWC Analysis.

 

1.2.4. Les limites de l’ubérisation

Il est indéniable que ce nouveau modèle économique apporte un accès meilleur à l’emploi, un travail autonome, ainsi que des revenus complémentaires pour les « consommacteurs ». Par ailleurs, ces derniers bénéficient d’horaires de travail plus souples tout en ayant la possibilité d’acquérir de nouvelles compétences. Mais en même temps, cette situation engendre un état de stress et des difficultés dans la gestion de la vie professionnelle et vie privée. Au regard de son statut précaire, ce travail ne permet pas d’accéder facilement aux prêts et au logement. Sans les assurances sociales ainsi que l’application de la législation du travail, le salarié n’est pas protégé en cas de pertes de ressources ou de difficultés particulières. Pour Bruno TEBOUL, cette nouvelle économie ne représente pas un facteur d’accélérateur de croissance : « Il faut en finir avec cette naïveté de principe. Joseph Shumpeter, avec sa théorie de la destruction créatrice, est mort et enterré. Nous ferions mieux de parler de disruption destructrice. »

1.2.5. Disruption numérique ?

Les transformations inévitables qu’engendre le dynamisme de l’économie numérique entraineront des effets de « destruction créatrice » sur tous les secteurs d’activité. De profonds changements auront lieu notamment sur le fonctionnement du marché. Une innovation à grande échelle génère des gains de productivité, l’apparition de nouvelles activités et par conséquent de nouveaux emplois, facteurs de croissance. Elle profite aux entrepreneurs innovants à même de restructurer leurs activités, d’adapter leurs procédés, d’améliorer leur processus, de façon à tirer avantage au maximum de cette nouvelle économie. En parallèle, non seulement d’autres emplois sont condamnés à se dissoudre, mais également certaines entreprises dont les technologies désuètes ne font pas le poids face aux bouleversements technologiques ; fragilisant ainsi leur position sur le marché et leur avenir. La question est cruciale pour les entreprises traditionnelles : faut-il suivre le marché et se risquer à investir massivement pour essayer de survivre ou mieux vaut-il attendre au risque d’être dépassées par des acteurs plus innovants ?

On parle de phénomène d’économie disruptive dans la mesure où cette révolution a conduit à une rupture conséquente des modèles historiques, par la transformation des processus de production avec l’introduction de nouvelles technologies dans l’univers de l’entreprise, permettant ainsi la modification de la chaîne de valeur, mais également par l’essor de nouvelles stratégies, l’apparition de nouveaux intermédiaires tels que les réseaux sociaux, les plateformes légales de diffusion, etc., la création de nouveaux modèles qui engendrent une réorganisation sectorielle majeure. Cette transformation numérique entraine des retombées positives pour les entreprises qui profiteront d’une hausse de la productivité, d’une absence des barrières à l’entrée et donc, d’une accessibilité facile aux nouvelles opportunités, aux nouveaux marchés ainsi qu’à de nouveaux clients. La disruption numérique est également à l’origine des profonds changements du comportement des consommateurs qui, grâce à un accès plus important à l’information, deviennent de plus en plus exigeants dans leur mode de consommation et leur processus de prise de décision. Face aux crises qui perdurent, ces derniers sont en outre de plus en plus attirés vers l’économie collaborative (vente, troc, location, don, etc.), remettant en cause la frontière historique entre fournisseur et client. Désormais, ce ne sont plus ni les usines ni les capitaux des entreprises qui font la puissance, mais c’est bel et bien le nombre de clients ou de membres auxquels sont constituées les entités.

2.          Les principes fondateurs de l’ubérisation

« L’ubérisation est un néologisme qui peut s’utiliser pour décrire comment une start-up à travers une plateforme numérique permet de mettre en relation les entreprises et ses clients », note Bruno TEBOUL, auteur du livre Ubérisation = Economie déchirée ?, Editions Kawa, Mai 2015.

L’ubérisation se résume en quelques mots : c’est un nouveau modèle de commerce qui supprime les intermédiaires en mettant directement en contact l’offre et la demande grâce à des plateformes, souvent des applis.

La naissance du terme « Ubérisation du travail » fait référence à « la société Uber qui fait travailler via son service Uberpop accessible par Internet, des personnes cherchant un complément de revenu, voire un revenu à part entière, dans un cadre très précaire » (David VALLAT). En fin de compte, le principe part d’« une économie de la frugalité qui croise des motivations écologiques et une situation de crise économique » selon David VALLAT dans « Une alternative au dualisme Etat-Marché : l’économie collaborative, questions pratiques et épistémologiques ».

2.1. Son fondement

Son essor considérable se fonde sur un financement conséquent de capital-risque qui lui permet de tenir longtemps avant de prétendre à des bénéfices. Le capital-risque représente un investissement effectué soit par des personnes physiques (business angels), soit par des sociétés de capital-risque, soit par fonds de capital risque, soit par l’intermédiaire de FCPR (Fonds Communs de Placements à Risques), de FCPI (Fonds Communs de Placement dans l’Innovation), et de FIP (Fonds d’Investissement de Proximité). L’objectif pour ces investisseurs est de participer financièrement à une entreprise prometteuse à fort potentiel de croissance, dans la perspective de revendre leurs titres dans 5 ou 7 ans afin réaliser une plus-value conséquente. Ils choisissent les entreprises dans lesquelles ils vont investir en fonction de nombreux critères : la pertinence du dossier, l’expérience et les qualifications des capital-risqueurs, la potentialité du produit ou du service proposé sur le marché, la particularité de l’offre en matière d’innovation, etc. Contrairement aux institutions bancaires à la recherche de garanties, les investisseurs s’impliquent davantage dans l’avancement du projet, en partageant les risques de lancement ainsi que les profits de l’entreprise en cas de réussite. Comme toute naissance d’une entreprise, la première phase consiste au financement initial qui est crucial pour la viabilité du projet, ensuite s’ensuit la création, en d’autres termes la « start-up », se caractérisant par la mise en œuvre de la production jusqu’à sa mise sur le marché. Si le projet est viable, il connaît une phase de croissance considérable qui requiert un fonds important pour son développement. Etant financée à l’excès, la plateforme est en position de réprimer ses concurrents et de s’octroyer des commissions importantes au passage. Par la même occasion, cela permet de casser les prix et de conquérir rapidement de nouveaux marchés dans le monde. Les investisseurs restent en moyenne entre 3 et 7 ans au capital de la société, le temps nécessaire pour cette dernière de renforcer sa structure financière, de s’enraciner profondément sur le marché et de prospérer. Enfin, la phase de maturité se concrétise par l’entrée en bourse ; les apporteurs de fonds se retirent en cédant leurs parts.

2.2. Les nouvelles formes économiques

L’ubérisation est la formidable opportunité pour les nouveaux entrepreneurs d’aujourd’hui de pallier leur envie dévorante d’une alternative aux modèles économiques actuels. Ce nouveau modèle économique s’articule autour de trois grands principes :

  • L’économie collaborative : dont le principe fondateur est la relation participative. Le consommateur est à la fois créateur et utilisateur.

Exemple : Wikipedia où un article peut-être modifié ou amélioré par un lecteur.

  • L’économie du partage : dont le principe fondateur est la valorisation de biens inactifs. Dans ce cas, le consommateur qui possède un actif, peut l’offrir à un autre pour qu’il l’utilise à son tour.

Exemple : Uber, Airbnb

  • L’économie circulaire : dont le principe fondateur repose sur le troc ou la récupération de produits gaspillés afin de créer de la valeur marchande à partir d’actifs non marchands.

Exemple : Les Accorderies

2.3. Une reconfiguration du modèle économique historique

Le phénomène numérique apporte son lot de gloires et de désillusions. Face à l’expansion exponentielle de l’ubérisation, les grands dirigeants des entreprises traditionnelles s’inquiètent des éventuelles répercussions et transformations inévitables sur le développement de leur entité. Pourtant rodés aux mécanismes de la libre concurrence, ils ne devraient pas s’étonner que de nouveaux acteurs téméraires puissent menacer leurs positions jusqu’ici jamais inquiétées.

2.3.1. La désintermédiation

Les changements majeurs qui résultent de ce nouveau modèle économique bouleversent manifestement la chaîne matérielle classique : production, échange et consommation. Même si le risque de désintermédiation est réel avec l’arrivée du web, il ne faut pas oublier que derrière presque chaque élimination d’un ou plusieurs intermédiaires, se cache un nouvel intermédiaire. C’est seulement que ce dernier sait se faire discret et patient pour revendiquer calmement après sa position stratégique.

« Amazon a remplacé les libraires, eBay a remplacé les salles des ventes et antiquaires, Apple au bord de la faillite à la fin des années 90 a réussi in extremis à remplacer les disquaires grâce à son offre de musique légale construite sur le couple iTunes/iPod… (…) Google est le courtier dominant du marché de « l’information gratuite » qu’il a contribué à forger, Facebook est dans un premier temps devenu le courtier dominant des liens sociaux, LinkedIn, celui des contacts professionnels, Youtube, celui de tout ce qui se filme… » selon Christophe DESHAYES, Paris Tech Review, janvier 2016.

2.3.2. Un monopole à l’ère du numérique

Le nouvel intermédiaire des temps modernes est relayé au second plan car c’est la plateforme qui sert d’infrastructure numérique pour structurer un écosystème autour de lui et gérer les liens que les participants nouent entre eux. Ce système collaboratif ne met en concurrence que les échanges entre les participants. Ainsi, un acteur ne peut devenir concurrent de la plateforme elle-même. Cela reflète donc un marché à intermédiaire unique, donc en situation de monopole.

2.3.3. Les impacts sur l’emploi

D’après les analystes, la numérisation de l’économie engendrerait des destructions massives d’emplois. Selon McKinsey Global Institute (2014), 3,5 millions auront disparu d’ici 2025, en grande partie à cause de l’ubérisation. Certes, cette dernière créera de nouveaux emplois mais uniquement réservés à des salariés très qualifiés maîtrisant les outils scientifiques et technologiques, aggravant encore plus les inégalités sur le marché du travail, dont les grands perdants seront bien évidemment les demandeurs d’emplois peu qualifiés. En parallèle, le travail indépendant qui s’est dégradé depuis les années 1950, a repris son développement en début des années 2000 grâce à l’essor du numérique et notamment des plates-formes digitales. Les travailleurs indépendamment ont la possibilité de proposer leurs compétences à des emplois qu’ils ont du mal à décrocher sur le marché du travail habituel, et ainsi d’arrondir leurs fins de mois difficiles. En même temps, la croissance du travail indépendant entraîne dans son sillage un certain embrouillement entre le statut de salarié et de non-salarié, dû au fait que de nouvelles formes d’emplois hybrides apparaissent. En effet, cela est rendu possible grâce une législation de plus en plus souple qui offre l’opportunité aux indépendants et freelances de bénéficier d’un statut de salarié en faisant appel à une société de portage salarial comme Didaxis. Grâce à un pourcentage prélevé sur les prestations facturées aux clients de ces derniers, Didaxis leur assure des droits à la retraite ou à l’assurance de chômage au même titre que les salariés ordinaires. « Le portage salarial c’est l’ubérisation sans la précarisation du travailleur » souligne Guillaume CAIROU, le président de Didaxis.

 

En fin de compte, même si l’ubérisation continue de conquérir à grand pas de nombreux secteurs d’activités, les entreprises traditionnelles se mobilisent pour appréhender au mieux l’arrivée de ce nouveau modèle économique. Certains dirigeants tentent de s’adapter en se ralliant au concept, d’autres contre-attaquent et décident de créer une manœuvre qui leur profite et malheureusement pour le reste, c’est la fin annoncée de leur carrière pour n’avoir pas su prendre les devants à temps.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DEUXIEME PARTIE : OBSERVATION ET ANALYSE DES PRATIQUES DANS LA GRANDE DISTRIBUTION

 

 

 

Chapitre 1 : PRESENTATION DE LA METHODOLOGIE

 

Ces dernières années, le visage de la Grande Distribution a changé et le secteur est en pleine mutation. Aujourd’hui, le pouvoir d’achat est en berne, la taille des ménages rétrécit et la population vieillit. Dans la foulée, les consommateurs sont de plus en plus avertis et deviennent de plus en plus exigeants dans le choix de ses produits. Toutes ces évolutions ainsi que le changement incessant des goûts des consommateurs qui présentent en plus des profils différents, font que les entreprises ont du mal à répondre à la demande. De même, les clients ne sont plus enclins à se déplacer pour faire leurs courses, ce qui remet en cause le concept de l’hypermarché. La Grande Distribution doit donc trouver de nouvelles stratégies et redoubler d’efforts pour fidéliser ses clients actuels et acquérir de nouveaux clients. Peut-être que les solutions qu’attend la Grande Distribution pour aujourd’hui et pour demain, résident dans le renforcement des offres de services, le déploiement de magasins de proximité, l’adoption d’une meilleure politique tarifaire, l’e-commerce… Mais avec la vague déferlante de l’ubérisation qui est en train de secouer tous les secteurs d’activités, la Grande Distribution a-t-elle changé de stratégie ? Les menaces sont-elles assez sérieuses pour que la Grande Distribution envisage à l’heure actuelle de fermer les lieux de vente physiques et de se tourner vers l’application de ce concept pour se remettre à flot ? Si oui, à quelle stade se situe son évolution ?

Pour trouver des éléments de réponse, nous allons procéder en deux étapes. En premier lieu, nous allons étudier deux cas distincts qui illustrent très bien le changement qui s’opère sur la sphère de la grande distribution. D’une part, notre observation se focalisera sur un produit non alimentaire en phase d’être « ubérisé », dans le domaine du bricolage : la perceuse. L’idée est de mettre en exergue tous les services qui gravitent autour du produit pour le transformer en « projet de service ». Cela nous permet par la même occasion, d’analyser tous les facteurs à prendre en compte pour que ce nouveau modèle économique puisse se mettre en place. D’autre part, nous nous focaliserons sur des produits alimentaires non encore « ubérisés », plus précisément les aliments frais qui représentent le cœur même de l’offre et de l’activité des grandes surfaces alimentaires. Cela nous permettra de mettre en évidence tous les facteurs qui entravent la mise en place de ce nouveau modèle économique qui privilégie l’usage intensif des nouvelles technologies. En second lieu, nous allons effectuer une analyse SWOT d’un extrait d’une publication de WYMAN Oliver dans Consommation et Grande Distribution, Volume 3, Edition Marsh& McLennan Companies, 2014. Il serait intéressant d’avoir un aperçu de ce que pourrait devenir la Grande Distribution française si un géant comme Amazon viendrait à menacer sérieusement le marché sur le sol français. Cette analyse nous permet de déterminer les impacts de l’ubérisation et d’apprécier les différentes dimensions des changements qui en découlent. Nos enseignes classiques seront-elles assez robustes pour résister à la concurrence ? Pourront-elles envisager à leur tour d’adopter cette stratégie disruptive ?

Après les recherches effectuées, nous allons pouvoir présenter des hypothèses que nous pourrons vérifier et étayer à la suite de notre étude de cas.

Le marché de la Grande Distribution française paraît stable malgré d’importantes évolutions sur plusieurs décennies. Malgré un marché en forte expansion dans le monde, nos enseignes françaises sont pour le moment bien implantées sur notre sol. Jusqu’ici, les géants étrangers ont du mal à franchir le pas ou n’ont pas pris le risque de le franchir. La question est de savoir si les enseignes classiques résisteront longtemps aux assauts de géants étrangers comme Amazon ou Wal-Mart ou si elles sont suffisamment bien ancrées pour résister à la vague déferlante de l’ubérisation.

Les recherches effectuées sur l’évolution actuelle du phénomène d’ubérisation ainsi que sur l’analyse de l’évolution de la Grande Distribution française depuis plusieurs années nous ont menées à développer et axer nos recherches sur les hypothèses suivantes :

Hypothèse 1 : Certains facteurs limitent la mise en œuvre de l’ubérisation dans la Grande Distribution française.

Sous-hypothèse a : Les produits non alimentaires répondent plus aux exigences du modèle économique d’« ubérisation » que les produits alimentaires.

Sous-hypothèse b : L’appréhension des impacts et des changements induits par l’ubérisation représente un grand handicap dans l’expansion du nouveau modèle économique dans la Grande Distribution française

Hypothèse 2 : Les modes de consommation actuels jouent un rôle prépondérant dans l’expansion de l’ubérisation dans la Grande Distribution française.

 

 

 

Chapitre 2 : ETUDE DE CAS

 

Comme l’a avancé l’économiste autrichien Joseph Schumpeter il y a de cela plusieurs décennies, « nos sociétés évoluent vers des tendances en perpétuelle mutation, tirées par les grappes d’innovations qui impactent fortement nos modes de consommation ». Il faut adapter à ces nouveaux modes de consommation de nouveaux modes de vente, c’est ce que celui-ci appelait la « destruction créatrice ».

1.      Etude sur le cas d’un produit non-alimentaire en phase d’être « ubérisé » : la perceuse

1.1. Panorama global du marché du bricolage

En 2014, le marché des GSB en France est représenté majoritairement par 5 principaux groupes de distribution qui gèrent plusieurs enseignes, ainsi qu’une liste de distributeurs indépendants ou hard discount à l’instar de Mr Bricolage, Bricomarché, Bricorama, Brico Leclerc, etc.

  • Deux grands groupes sortent du lot : Kingfischer (Castorama et Brico Dépôt) et Adeo (Leroy Merlin, Weldom) qui détiennent plus de la moitié des parts de marché. En parallèle, les enseignes Mr Bricolage et Bricomarché réalisent le tiers de ces leaders.
  • Le reste regroupe les quincailleries et autres petits distributeurs qui constituent 70 % des enseignes du marché mais qui ne réalisent que le cinquième du chiffre d’affaires global.

Source UNIBAL (Union Nationale des industriels du Bricolage, du Jardinage et de l’Aménagement du Logement)

Au cours de la dernière décennie, le marché du bricolage a connu une hausse constante jusqu’à l’arrivée de la crise de 2008, entrainant dans son sillage l’effondrement du secteur de l’immobilier. Malgré d’importantes difficultés, c’est un marché encore très porteur (fascination des ménages français pour l’amélioration de leur habitat, essor du concept « Do it Yourself » à cause du budget serré, etc.) qui nécessite de profondes remises en question pour se redresser rapidement.

Toutefois, ce ralentissement des activités ne se ressent pas de la même manière au niveau des différents circuits de distribution.

Pour les grandes surfaces de bricolage dont la surface est supérieure à 400 m2 comme par exemple Leroy Merlin, Castorama, etc., leurs chiffres d’affaires accusent une légère hausse due notamment à des stratégies plus payantes (prix attractifs, offres plus abondantes, etc.). De même pour les enseignes hard discount (Brico Dépôt, etc.) qui restent compétitives en raison de leur politique de bas prix.

Les commerces inférieurs à 400 m2 de surface sont plus ébranlés par ces changements. En situation de précarité, les quincailleries ne disposent pas assez d’offres pour attirer les clients et ne peuvent non plus suivre la politique tarifaire très agressive menée par les concurrents : les clients se tournent par conséquent vers les grands groupes du marché. En parallèle, les distributeurs indépendants sont très isolés et n’arrivent pas à en découdre avec les délais de paiement de plus en plus limités. Ils sont ainsi de plus en plus forcés d’intégrer les groupements puissants ou bien de se restructurer en profondeur.

Pour maintenir leurs parts de marché et séduire de nouveaux clients, les enseignes de bricolage doivent autant que possible diversifier leur offre de produit, miser sur un service de proximité et personnalisé ainsi que voir de plus près le déploiement des sites Internet.

En effet, le marché du bricolage fait face à une grande mutation, les modes de consommation changent. Nous assistons à une évolution de la clientèle qui se féminise de plus en plus, à des clients qui remettent tout le temps en question leurs achats et qui privilégient désormais la rénovation à la construction neuve.

1.2. Evolution des modes de consommation

En 1993, Castorama lance Brico-Dépôt, la première enseigne discount du secteur du bricolage. A leur tour, d’autres enseignes suivent la même tendance à l’instar de Bricoman du groupe Adeo, Batkor, Bricoram, l’Entrepôt du Bricolage, etc. Avec des offres qui répondent aux attentes des bricoleurs à savoir, plus de marques de distributeurs (MDD) et un minimum de marques nationales, un choix limité de références ainsi que des prix les plus bas, ces enseignes du discount ont réussi à faire évoluer le marché et par la même occasion, à changer l’attitude des consommateurs. Du fait de la crise et par souci d’économie, le bricolage n’est plus la chasse gardée des connaisseurs mais suscite également l’intérêt des amateurs et des femmes qui préfèrent se lancer dans la réalisation des travaux plutôt que d’engager un professionnel. Selon une enquête menée par l’INSEE sur l’emploi du temps des Français entre 1986 et 1996, le temps consacré au bricolage sur le temps des loisirs est en progression de 2% par an. Entre-temps, on assiste à un certain déclin de la culture « technique » au profit d’une expérience plus douce du bricolage. Les fabricants et les distributeurs devaient donc répondre aux attentes des « nouveaux » bricoleurs en proposant des produits faciles d’utilisation et très pratiques, tout en tenant compte des caractéristiques des produits, de leur dimension sécuritaire (pour éviter les risques de mauvaise utilisation ou accident), des matériaux utilisés, etc. Comme le souligne Philippe ROSSI d’UNIBAL : « La qualification des utilisateurs est passée dans les produits ». A l’heure de la technologie, le profil des bricoleurs est en train de changer. Avec la démocratisation croissante du bricolage, les distributeurs essaient de s’adapter à la mutation en apportant de la valeur ajoutée aux magasins avec plus de conseils personnalisés, de formations, de services de pose à domicile, d’applications i-phone, de prestations e-commerce, etc.

1.3. Processus d’ubérisation d’un produit non-alimentaire : « la perceuse » dans le domaine du bricolage

Le phénomène d’ubérisation est en train de toucher plusieurs secteurs dont le bricolage. Comme riposte, de nombreuses entreprises du commerce physique ont décidé de prendre les devants pour ne pas se faire concurrencer sur leur propre terrain. Elles ont ainsi suivi ce nouveau concept économique, mais avec des stratégies différentes. Les unes comme Leroy Merlin sortent les grands moyens et investissent directement dans une start-up américaine Techshop, qui vient d’ouvrir son premier Fab Lad en région parisienne. Le concept est simple : les bricoleurs peuvent utiliser des machines industrielles en contrepartie d’un abonnement tout en échangeant de bons procédés. Son concurrent Castorama prend le même chemin et noue un partenariat avec une autre start-up américaine.

Certaines préfèrent participer directement dans les plateformes de partage pour ne pas voir partir leur clientèle à l’instar de Mr. Bricolage, qui a mis en place un site de location entre particuliers : La Dépanne.

1.4. Les stratégies adoptées par chaque enseigne

« N’est-il pas plus pertinent d’avoir accès à une perceuse plutôt qu’en être propriétaire si l’on bricole une ou deux fois par an ? » remarque David VALLAT dans « Une alternative au dualisme Etat-Marché : l’économie collaborative, questions pratiques et épistémologiques ».

Cette constatation illustre à la perfection le concept d’économie de partage qui s’incruste peu à peu dans de nombreux secteurs dont le bricolage. Comme nous l’avons abordé dans la première partie, l’économie collaborative est née du principe de renoncer à la propriété au profit de l’usage des biens, compte tenu de la crise écologique et économique. Cela permet dans la foulée d’éviter un énorme gaspillage et de contribuer au développement durable.

Notre observation part de l’étude du processus d’ubérisation d’une perceuse, dans le domaine du bricolage. L’idée est de mettre en exergue tous les services qui gravitent autour du produit pour le transformer en « projet de service ». Cela nous permet par la même occasion, d’analyser tous les facteurs à prendre en compte pour que ce nouveau modèle économique puisse se mettre en place.

1.4.1. Plateforme communautaire

Un des principaux acteurs de la distribution du bricolage, Mr Bricolage se démarque par une croissance constante et rapide. L’enseigne mise sur le conseil, le service et la proximité pour assurer son développement. Elle s’implante donc majoritairement dans les villes moyennes et en infime partie en zone rurale. Mr Bricolage est « le numéro 1 des enseignes préférées des Français » selon une étude marketing effectuée en 2004 et appuyée en 2005 par MKO (groupe Marketing Office). En 2009, il occupe le troisième rang du bricolage en France en rachetant les enseignes Les Briconautes et les Jardinautes. En 2011, il noue un partenariat avec La Boîte à Outils SAS. Ensemble, ils vont développer un format de magasins de type Discount sous l’enseigne L’Entrepôt du Bricolage. En 2012, l’enseigne se mobilise pour mettre en place sa stratégie internet et conquérir le commerce de demain : multiplication des enseignes, des formats et des canaux de distribution. Pour ce faire, elle compte sur le concept de web-to-store, et fixe comme objectif de mettre en ligne plus de 275 sites de magasins. Fidèle à sa politique et flairant les opportunités que peuvent rapporter le e-commerce et la digitalisation qui prennent de plus en plus de l’ampleur, elle décide de prendre les devants.

Désirant s’engager dans l’économie du partage et continuer dans sa politique de proximité, Mr Bricolage met en route le site ladepanne.fr. Partant du principe que 83% des Français préfèrent désormais faire usage d’un produit plutôt que d’en être propriétaire, l’enseigne décide d’adapter son offre à cette nouvelle mode de consommation, et facilite dans la foulée le concept de l’entraide et de la débrouille en répondant à une demande réelle. « Ce portail va venir enrichir notre modèle de commerce. L’économie du partage représente 12 milliards d’euros sur le marché mondial. C’est une tendance de fond sur laquelle nous devons nous inscrire » annonce Jean-François BOUCHER, PDG de l’enseigne.

Ce site permet de mettre en relation gratuitement les consommateurs et les prêteurs qui possèdent une perceuse qui dort dans leur garage par exemple. Les transactions ne se font pas sur le site puisque les usagers fixent eux-mêmes le prix et les modalités d’échange. L’intérêt pour l’enseigne est de participer juste à cette économie de la débrouille. Elle espère ainsi attirer une nouvelle clientèle plus jeune et la fidéliser étant donné que sa clientèle oscille entre 30 et 60 ans, soit un âge moyen de 54 ans. En effet, les points accumulés sur chaque échange équivalent à des bons d’achat dans le magasin, poussant par la même occasion les visiteurs à fréquenter un de leurs magasins. Le site est lancé à grand renfort d’une vaste campagne de recrutement menée notamment sur Facebook et Youtube ainsi que par voie d’affichage en magasin. En fin de compte, c’est une plateforme qui permet de prospecter de nombreux nouveaux utilisateurs en faveur de l’enseigne. Les premiers usagers du service auront l’occasion de témoigner ensuite dans une campagne radio.

  • Comment ça marche ?

Phase 1 : Je cherche un outil / Je mets en ligne un outil

D’un côté,  je cherche une perceuse à louer ou à acheter près de chez moi. Je vais sur le site ladepanne.fr pour en trouver. Je fais confiance au prêteur pour me donner un outil fiable et de bonne qualité.

De l’autre côté, un usager n’a pas besoin de sa perceuse tous les jours, or celle-ci peut servir à lui faire gagner de l’argent pour arrondir ses fins de mois. Il la dépose sur la dépanne. Il fait confiance à l’emprunteur pour rendre la perceuse en bon état et dans les délais convenus au départ.

S’ensuit ensuite une discussion entre les deux parties pour trouver une entente sur le rendez-vous et le règlement.

Phase 2 : J’ai besoin d’aide

J’ai trouvé le bon outil mais je ne sais pas comment m’en servir correctement. La communauté est là pour m’éclaircir et me dépanner. Je peux en profiter pour consulter à tout moment les conseils des professionnels…

Si le prêteur ne dispose pas de tous les accessoires nécessaires dont j’ai besoin (par exemple des forets), je peux consulter les offres de location d’outils, d’accessoires et de consommables que Mr Bricolage propose en ligne en partenariat avec KILOUTOU.

Phase 3 : Plus je participe, plus je gagne des points

Mettre en ligne un outil et laisser mon avis, remplir le profil… Toutes ces actions me rapportent des points que je peux convertir en chèque cadeau sous forme de bons d’achat dans les magasins.

  • Analyse du processus

Même si la création du site La Dépanne concurrence en quelque sorte ses magasins, Mr Bricolage peut toujours compter sur les bons d’achat en ligne pour inciter les usagers à se rendre dans les locaux des magasins. Ainsi, les internautes qui n’ont pas l’occasion de visiter les rayons de bricolage pourront devenir de potentiels clients. Ils seront encore plus en confiance et motivés grâce au système de notation attribué aux utilisateurs ainsi que les avis favorables laissés par les internautes bricoleurs sur le site. En effet, le facteur « confiance mutuelle » est un élément majeur à prendre compte pour que le processus puisse bien se passer. Selon le sondage mené par le site spécialisé dans le domaine de la location entre particuliers placedelaloc.com révélé le 26 janvier 2016, il en ressort que les Français se font de plus en plus confiance entre eux. En effet, huit sur dix des personnes interrogées affirment avoir confiance en cette économie collaborative, non sans avoir d’abord pris leur précaution. 77 % avouent jeter un œil aux profils des anciens utilisateurs pour se rassurer,  37 % des sondés consultent les avis et les notations mis en ligne, 26 % prennent en compte le prix et 21 % s’en tiennent au descriptif de l’objet en question.

Comme Internet est devenu incontournable dans le parcours d’achat, le site La Dépanne est présent sur desktop, sur tablette et bientôt sur une application mobile pour favoriser la dimension sociale que l’enseigne compte instaurer. « L’économie de partage n’est pas seulement un phénomène économique et commercial, il est aussi social et culturel » soutient Jean-françois BOUCHER, PDG de Mr Bricolage.

Le trafic généré par les échanges ainsi que les inscriptions participent grandement à la notoriété de l’enseigne. Pour ajouter plus de poids aux discussions, les experts de Mr Bricolage interviennent pour donner des conseils pertinents qui viendront compléter ceux des internautes bricoleurs. Même si l’enseigne semble adopter volontairement une stratégie de retrait, il n’en reste pas moins qu’elle suit de près les échanges et intervient au bon moment pour se faire connaître et espérer toucher un grand nombre d’internautes.

1.4.2. Le concept du Click and Collect

Bien que les ventes sur le web dans le secteur du bricolage restent encore modestes, il n’en reste pas moins que c’est une grande opportunité pour accompagner le processus de vente et inciter les consommateurs à se rendre en magasin. Comme c’est le cas du concept « Click & Collect » qui remporte un franc succès dans les grandes surfaces du bricolage au Royaume-Uni. Le groupe Kingfisher a flairé les atouts que peut engendrer cette stratégie en France et a décidé de l’appliquer au niveau de ces 2 enseignes françaises Castorama et Brico Dépôt.

Partant sur le concept de Drive, ce nouveau service baptisé sous la bannière « Retrait Express en 2 heures » permet aux clients de passer leurs commandes sur internet et de les récupérer en zone de retrait dans l’enceinte du magasin dans les plus brefs délais. Castorama s’est fixé comme challenge de fixer le délai minimum entre la confirmation de la commande et la récupération en deux heures. En seulement quelques clics, les clients peuvent disposer de leurs nouveaux outils sans devoir subir l’attente interminable dans les magasins. Le concept est simple, rapide, gratuit et répond parfaitement aux attentes des clients éternellement pressés.

1.4.3. L’Alliance avec une start-up

Pour anticiper le développement du phénomène d’ubérisation dans le secteur du bricolage, l’enseigne Leroy Merlin a préféré prendre les devants et s’allier avec une start-up américaine Techshop pour l’ouverture d’un atelier collaboratif, plus grand qu’un Fab lab déjà présent dans certains de ses magasins. En effet, comme les nouveaux bricoleurs d’aujourd’hui, occasionnels ou professionnels, sont plus exigeants en matière d’assistance et de services, l’enseigne adopte une stratégie de différenciation qualitative en offrant plus services. Ce type d’atelier dispense des cours de bricolage et accueille également les clients qui désirent tester de nouveaux outils, bricoler ou assister à des démonstrations de fabrication d’objets réalisées par des experts. Les clients auront à leur disposition diverses machines comme des imprimantes 3D, des fraiseuses, des ponceuses, des perceuses, une cabine à peinture, ainsi que d’autres outils et accessoires. « Les imprimantes 3D, les découpeuses laser et autre fraiseuse numérique que l’on trouve dans les Fablabs offrent à tous un accès à une nouvelle forme de bricolage, pas uniquement individuel, un bricolage interconnecté » (ANDERSON, 2011 ; 2012). Le concept n’est pas tout à fait gratuit puisque l’accès au public suivi d’un accompagnement, se fera après une souscription d’abonnement. Mis à part les amateurs de technologies et de création, d’autres profils sont attendus comme les étudiants en architecte, les professionnels de l’immobilier, les modélistes, les retraités, etc.

L’intérêt pour l’enseigne est de créer des échanges avec les participants et mieux répondre aux exigences des clients qui requièrent plus de conseils personnalisés et de services. Dans la foulée, le concept génère des rentrées d’argent tant du côté de l’abonnement que du côté des frais de cours en salle.

1.5. Un marché toujours stable malgré les nouvelles pratiques

Avec l’ascension prodigieuse du commerce collaboratif dans le secteur, on peut donc en conclure que le phénomène d’ubérisation entame bel et bien son entrée dans le secteur de la grande distribution du bricolage. Toutefois, les phases d’approche sont encore timides et le concept n’est pas encore bien en place pour pouvoir estimer les impacts dans le secteur. En tout cas, le secteur du bricolage n’est pas pour autant vraiment inquiété puisque les enseignes se protègent du mieux qu’elles peuvent, malgré l’influence des nouvelles tendances telles que la démarche collaborative, la location d’outils, le marché de l’occasion ou le troc.

Par ailleurs, l’expérience « plaisir » dans les achats de bricolage ainsi que les manœuvres déployées par les enseignes dans ce sens sont toujours en faveur du commerce physique. Bien que la digitalisation soit très présente sur le marché du bricolage, elle aura un impact mitigé sur l’intention d’achat dans la mesure où les contenus web se portent souvent sur les caractéristiques techniques, l’offre ainsi que les tutoriels et conseils. Les usagers se servent avant tout du web pour trouver des informations nécessaires pour préparer leurs achats en magasin. « Les consommateurs effectuent beaucoup de recherches sur internet, mais pour finir par acheter en magasin. Il y a plus de webrooming que le showroming » selon les analyses de Matthias Berahya-Lazarus, président du BONIAL. De même, comme ce sont des produits qui nécessitent un investissement assez conséquent, les consommateurs tiennent à les toucher et constater de visu avant de les acheter.

 

                        2. Etude sur le cas d’un produit alimentaire non encore « ubérisé » : les aliments frais

2.1. Historique des modèles de distribution agroalimentaire française

La Grande Distribution voit le jour en 1949 en France, quand Edouard Leclerc a ouvert son premier libre-service à Landerneau, en Bretagne. C’est à cette époque-là que pour la première fois, le client peut se servir lui-même. Le concept « Tout sur sous un même toit » est importé des Etats-Unis où à la même période, l’automobile se démocratise et où les magasins spécialisés s’installent petit à petit à la périphérie des grandes villes américaines en mettant à la disposition des clients, des chariots, de grands parkings et des stations d’essence. Toujours en 1949, Edouard Leclerc et Jean-Pierre Le Roch ont ouvert le premier supermarché Leclerc à Paris. Après leur séparation en 1969, Jean-Pierre Le Roch met en place l’enseigne EX qui deviendra par la suite Intermarché.

C’est en 1963 que la grande distribution « à la française » devient un symbole avec la création d’une véritable grande surface (2500 m2) Le Carrefour en banlieue parisienne. L’apparition de ce nouveau format de distribution représente une révolution dans la mesure où elle faisait disparaître petit à petit les commerces de proximité (bouchers, primeurs, quincaillers) et octroyait aux consommateurs le pouvoir de tout acheter et en grandes quantités dans un seul et même lieu. La grande philosophie à l’époque était de vendre le moins cher possible en réduisant les intermédiaires et les coûts.

En 1969, le premier centre commercial adossé à un hypermarché est inauguré avec Auchan. Les années 60 ont donc vu l’essor de deux formats majeurs de la grande distribution : les supermarchés qui passent de 200 à plus de 5000 et les hypermarchés qui se sont multiplié et atteignent les 1200. Toutefois, dans les années 80 apparaît un nouveau format de distribution importé d’Allemagne : le Hard Discount.

Dans les années 90, des lois ont été adoptées (Loi Galland, Loi Raffarin, etc.) afin de règlementer le secteur et tenter de réguler un développement anarchique. En effet, les magasins traditionnels se regroupés en centrales d’achats pour pouvoir commander directement les marchandises et s’imposer face aux fournisseurs. Cinq centrales d’achat sortent ainsi du lot et forment 90% du marché français de la distribution : Carrefour, Lucie (Leclerc et Système U), Opéra (Casino, Cora, Franprix, Leader Price et Monoprix Prisunic), Intermarché et Auchan. En 2006, ce système qui privilégie plus les distributeurs que les fournisseurs et les consommateurs, est remis en cause par la Loi Dutreil, qui donne par la même occasion un regain de souffle à la Grande Distribution.

En parallèle, le lancement du e-commerce a bouleversé la position bien ancrée de ces géants de la Grande Distribution et a remis en question leurs circuits de distribution bien rôdés. Au-delà du fait que les consommateurs ne sont plus obligés de sortir de chez eux pour effectuer leurs courses affectant par la même occasion le taux de fréquentation des grandes surfaces, les acteurs traditionnels n’ont plus le plein pouvoir pour communiquer avec le client et influencer son choix. De nouveaux acteurs ont décelé les potentialités énormes que présente ce nouveau mode de consommation et ont décidé d’être très présents sur Internet. Afin de mieux s’incruster dans ce nouveau marché, les magasins traditionnels ont pris les devants et ont créé des sites internet pour se faire connaître dans un premier temps et pour vendre par la suite. Pour frapper encore plus, les distributeurs traditionnels ont adopté une nouvelle stratégie pour à la fois garder un lien privilégié avec les consommateurs et asseoir leur position face aux nouveaux entrepreneurs : le Drive. Ce nouveau service permet de répondre aux attentes du client en termes de rapidité en passant sa commande directement de chez lui, tout en maintenant la relation physique avec le distributeur lors du retrait de ses courses en point de vente.

A l’heure actuelle, le secteur de la Grande Distribution française se départage en deux groupes bien distincts :

  • les enseignes indépendantes : Intermarché, Système U, E. Leclerc
  • les enseignes intégrées : Carrefour, Auchan, Casino

Jusqu’ici, rares sont les groupes étrangers qui ont réussi à percer le marché comme c’est le cas de l’allemand Métro et de hard discounters comme Lidl.

2.2. Les hard discounters

Les premiers magasins de hard discount ont percé le marché français en 1988. Ce nouveau format de distribution rencontre un franc succès grâce notamment au pouvoir d’achat de plus en plus laminé des ménages, à un contexte d’inflation et à un faible taux de couverture des grandes et moyennes surfaces (GMS). Dans les années 2000, cette formule séduit encore de plus en plus de consommateurs français. En 2005, le nombre de points de vente avoisine les 3700, soit 1000 de plus qu’en 2001. On dénombre ainsi quelque 15 millions de ménages qui fréquentaient ces enseignes, soit un marché de 12% des ventes de produits de grande consommation. Malgré cet essor considérable, les acteurs concurrents tardent à s’incruster sur le créneau.

2.3. L’évolution du comportement des consommateurs

Les tendances à la consommation influent grandement sur l’activité de la Grande Distribution. D’après une étude menée par l’agence conseil en média Mediaedge auprès de ménages aux revenus nets mensuels compris entre 1500 et 3500 euros, on constate que les Français réservent 27 à 43 % de leurs revenus mensuels aux « achats plaisir ». Ils préfèrent économiser en passant par le hard discount pour les produits alimentaires, afin de privilégier l’achat de produits haut de gamme. Pour conquérir ce marché très porteur et dynamiser leurs ventes, les enseignes en hard discount se modernisent et remplissent leurs rayons d’articles textiles, d’équipements de maison et de matériel audiovisuel, à grand renfort de promotions alléchantes. A leur lancement, ces initiatives ont remporté un certain succès, mais pour la première fois depuis des années, les Français semblent délaisser les supermarchés à bas prix. Cette baisse des fréquentations est due en grande partie à la contre-offensive menée par les enseignes classiques pour freiner le hard discount. Face à ces évolutions manifestes du comportement des consommateurs, la grande distribution traditionnelle a dû prendre des mesures défensives. En effet, au regard du développement considérable de ce concept, certaines enseignes classiques comme Carrefour (ED), Casino, (Leader Price) ou Intermarché (Netto) ont décidé de créer leur propre réseau de magasins discount.

2.4. Le contexte actuel

Aujourd’hui, la Grande Distribution fait face à une évolution majeure des modes de consommation. Les Français ne font plus leurs courses comme avant et sont de plus en plus nombreux à commander leurs produits en ligne ou dans les épiceries spécialisées, à se faire livrer ou à récupérer leurs achats dans les « Drive ». D’après le cabinet d’études Xerfi : « Le modèle trop peu différencié et le gigantisme des magasins sont de moins en moins adaptés aux attentes des consommateurs », surtout que la population française compte de plus en plus de personnes vivant seules et devient plus vieillissante. Les consommateurs sont donc de plus en plus attirés par les magasins de proximité ou spécialisés dans la mesure où ils aspirent à donner plus de sens à leurs modes de consommation.

Ce tableau nous démontre que bien que les hypermarchés affichent une légère hausse du taux de fréquentation, ils sont concurrencés par les commerces alimentaires spécialisés, le hard discount et les magasins de surgelés. Mais plus surprenante encore est la nette progression du taux de fréquentation via internet qui passe de 2,6% en 2005 à 8% en 2012, et bien plus si l’on en juge la situation actuelle. C’est donc un marché en pleine expansion qui est favorisé par les nouvelles applications et qui répond de plus en plus aux attentes des consommateurs.

Les conséquences de la crise économique de l’année 2008 ainsi que l’expansion prodigieuse de l’avènement du numérique, l’essor du hard-discount et de l’e-commerce contraignent ainsi les grands groupes à innover et à se réinventer, en revoyant leur offre vers plus de flexibilité et de compétitivité.

2.5. Le commerce électronique

Comme nous l’avons vu précédemment dans l’évolution des modes de consommation dans la Grande Distribution Alimentaire, les goûts des consommateurs sont plus exigeants en matière de choix, de prix, de flexibilité et de proximité. Pour ne pas être dépassées par la concurrence qui devient plus rude, les enseignes ont décidé de tirer partie de la digitalisation et de l’internet pour répondre à leurs attentes. Dans cette optique, elles inventent le Drive qui est une variante améliorée du commerce électronique. Mais avec la montée en puissance du digital, il est désormais possible d’effectuer autrement ses courses comme c’est le cas du m-commerce, de la géolocalisation, etc.

2.5.1. Définition

« Le commerce électronique (e-commerce) est l’ensemble des achats, ventes et échanges de biens et services sur des réseaux sociaux électroniques, particulièrement Internet. Le commerce électronique couvre les trois aspects d’information sur les produits (rôle d’influence des prospects), de prise de commande et de fidélisation (préparation de ventes futures) », selon la définition du Mercator (Mercator 9è édition, p. 424 (B to C), 1051 (B to B)).

Avec des consommateurs de plus en plus volages, l’e-commerce est le support incontournable dans la mesure où la souplesse qu’il offre permet de s’adapter rapidement et à faible coût aux moindres évolutions de la demande. Il permet de contourner les contraintes de temps, de lieu et économiques (facteur prix et coût des transports). Au lieu de flâner entre les rayons d’un hypermarché, les clients préfèrent désormais errer sur la toile à la recherche de nouveautés et de promotions.

2.5.2. Le marché du e-commerce

Le commerce électronique a connu une croissance exponentielle depuis le début du millénaire. Selon Fevad, « l’e-commerce e enregistré au premier trimestre 2015, avec des ventes une hausse de 13,7% en valeur, … Le nombre d’acheteurs en ligne augmente également de 846 000 personnes sur un an, et atteint désormais les 35 millions. »

L’attrait du e-commerce s’explique également par les innovations considérables dont les sites font preuve : optimisation accrue de la visibilité, toujours plus de services qui rejoignent les aspirations des consommateurs, prix toujours concurrentiels qui se révèlent être en moyenne inférieurs au commerce physique, offres de plus en plus alléchantes, rapidité de la livraison et fiabilité de l’acheminement, etc. Par ailleurs, l’expérience achat y est exacerbée : catalogues plus fournis, comparateurs de prix, démonstrations de produits, appréciations des internautes, etc.

2.5.3. Qu’en est-il de l’alimentaire ?

Malgré l’engouement des consommateurs pour les achats en ligne, il est un produit où ce canal de distribution rencontre encore des difficultés majeures dans son application dans le e-commerce : celui de l’aliment frais. En effet, la majorité des produits alimentaires requiert des conditions de conservation strictes qui auront forcément des impacts sur le prix, en plus des frais de livraison. Au final, le coût des achats est sensiblement plus élevé que dans les magasins.

2.5.4. Un e-commerce à tendance « low cost »

Dans leur quête perpétuelle de bonnes affaires, les ménages qui disposent d’assez de temps libre avec la hausse du taux de chômage, sont à la poursuite d’offres promotionnelles et de remises abondantes sur Internet. Situation de crise oblige, le commerce électronique doit appliquer une politique tarifaire agressive. Il s’ensuit alors une perte de valeur généralisée qui tend à amplifier encore plus la crise plutôt que de l’amorcer. En parallèle se développent les transactions entre particuliers qui y voient de belles opportunités pour s’échanger des services, produits, faire du troc, proposer des locations, etc. En fin de compte, la concurrence intensive pousse les distributeurs et les fournisseurs à comprimer leurs marges, entrainant une situation globale de déflation.

2.6. Le concept de Drive

Il est vrai que le commerce en ligne est un des leviers de développement pour le secteur de la Grande Distribution mais il faut savoir proposer le concept qui s’adapte réellement aux besoins des consommateurs tout en tenant compte de certains facteurs comme la logistique, la disponibilité des clients, etc. Certaines enseignes ont tiré des leçons sur l’échec de la livraison de courses à domicile proposée par Carrefour avec Ooshop ou Cora avec Houra par exemple. En effet, le concept n’a pas su faire face aux soucis logistiques et surtout à l’impatience des clients qui étaient contraints d’attendre la livraison chez eux. Mais par-dessus tout, les prix de livraison revenaient trop chers à la plupart des consommateurs. Alors plutôt que de livrer elles-mêmes les produits, les enseignes ont créé le Drive où les clients viennent eux-mêmes chercher leurs courses.

2.6.1. Pourquoi une telle expansion ?

La formule Drive représente un enjeu majeur pour la grande distribution dans la mesure où elle a conquis d’emblée les consommateurs qui ne veulent plus perdre leur temps à faire des courses. Le concept est simple, pratique et permet un gain de temps considérable : le client commande ses courses et paie sur un site spécialisé, puis se rend sur le parking d’un Drive où des personnels dédiés mettent les achats dans le coffre, après présentation de la facture. Le tout en quelques minutes. Et l’important et non des moindres : les prix sont exactement les mêmes, que ce soit au Drive ou en Grande surface. De surcroît, cela permet aux ménages de mieux maîtriser leur budget et de ne commander que ce dont ils ont besoin sans dépenser plus que prévu et sans être tenté par l’achat impulsif. Selon une étude du cabinet Kantar, 89% des consommateurs pensent que le Drive leur permet de gagner du temps et 63% estiment qu’il évite de faire des excès inutiles d’achat.

2.6.2. Les modèles de Drive

Depuis l’apparition du Drive dans la grande distribution, nous constatons trois modèles prépondérants :

– l’entrepôt accolé : comme son nom l’indique, il est adossé à un point de vente tout en étant indépendant en termes de réserves et de commandes. Ses atouts résident dans la baisse des coûts de logistique, l’apport de nouveaux clients et l’agrandissement de la zone de chalandise. Ce type de Drive n’est toutefois pas très rentable sur le plan gains de productivité tandis que son offre est très limitée en termes de références (5000 à 6000) à cause du manque surface.

– le Drive Solo : est un grand entrepôt indépendant implanté dans des zones stratégiques proches des grandes circulations et des distributeurs concurrents dans le but d’attirer de nouveaux clients ; donc il n’y a pas de risque de cannibalisation des ventes. Tout comme l’entrepôt accolé, il requiert un fonds de roulement considérable et doit par conséquent atteindre un certain niveau de chiffre d’affaires pour être rentable alors que ses produits sont limités (5000 à 6000) faute de place.

– le picking magasin : ce type de Drive placé à proximité du point de vente, se caractérise par le fait de préparer les commandes dans l’enceinte du magasin lui-même. Il a pour avantage de ne nécessiter que peu d’infrastructures tandis que l’organisation logistique est facilitée par le stockage du magasin-mère. Le principal problème est  que les préparateurs de commandes sont en surcharge à l’heure de pointe lorsque le nombre de commandes devient nombreux, entrainant souvent par la même occasion, d’importantes ruptures de stocks.

2.6.3. Son évolution

Le premier Drive est lancé en 2004 à Marcq-en-Barœul dans le Nord par l’enseigne Auchan. Le concept est vite imité et amélioré avec une diffusion plus large du commerce électronique. Les enseignes Leclerc emboîtent le pas en 2006, suivies de près par les autres. « L’accélération a lieu en 2008/2009. C’est la fin des tests et l’arrivée massive du haut-débit », constate Matthias Berahya-Lazarus, président de BONIAL. Carrefour a pris du retard pour pouvoir mieux appréhender le marché. Face à l’engouement des consommateurs et à la montée en puissance des autres distributeurs, il se lance enfin en 2011 et ouvre près de 200 drives ensuite. En 2014, on dénombre plus de 2 500 points de retrait se départageant entre plusieurs enseignes : Le Drive Intermarché, CourseU.com, E. Leclerc Drive, Carrefour Drive, Casino Drive, Auchan Drive, Monoprix Drive, Leader Price Drive, Cora Drive et Match Drive.

2.6.4. Les adeptes du concept

Sans surprise, ce sont surtout les jeunes couples et les familles avec enfants mineurs qui sont les plus séduits par le concept Drive du fait de leur manque de temps et de leur sensibilité face aux prix. Par contre, les couples ou célibataires d’âge moyen et sénior restent fidèles aux modes d’achat traditionnels comme le montre l’étude Xerfi ci-après.

D’après une enquête de DGE-CSA, la répartition des clients des drives selon leur catégorie socioprofessionnelle est surreprésentée par les cadres et professions intellectuelles supérieures, les professions intermédiaires ainsi que les employés. Cela s’explique par leur manque de temps pour effectuer les courses et leur accès facile à Internet. Sans surprise, ce sont les chômeurs ou inactifs qui sont sous représentés en raison des contraintes économiques et de plus de disponibilité pour faire les courses dans les magasins.

2.6.5. Les limites du Drive 

Qualifié comme le bon concept pour le commerce électronique alimentaire, le Drive rencontre encore des  difficultés dans son application notamment au niveau des produits frais comme les fruits, les légumes, les viandes, les poissons, etc. Même si les consommateurs privilégient ce système très commode, le Drive met un frein à leurs achats dans ce panel de produits dans la mesure où ils aiment toucher, sentir et choisir avec précision leurs produits frais qui engagent leur santé au quotidien. En effet, selon une enquête lancée par Kantar, seuls 45 % des clients achètent des aliments frais et/ou surgelés au Drive tandis que 90 % préfèrent s’approvisionner en grandes surfaces. L’idéal serait que les distributeurs trouvent un nouveau concept Drive qui incite plus les clients à sortir de leur voiture.

En outre, le nombre limité des références disponibles représente également un frein non négligeable pour la bonne marche de ce concept. Seuls les produits phare sont répertoriés afin d’éviter les pertes. Chez Leclerc, on dénombre environ 6 000 références contre plus de 100 000 dans un hypermarché. Cela donne une bonne raison aux consommateurs de fréquenter les magasins spécialisés qui ont vu leurs chiffres d’affaires décoller ces dernières années.

Même si les Drives semblent apporter la solution à la baisse de fréquentation chez les hypermarchés, il existe un risque de cannibalisation entre les Drives et les maisons mères. Un client qui est satisfait de ses achats via le Drive peut privilégier ce parcours d’achat et ne plus fréquenter les grandes surfaces. Selon Olivier Dauvers dans un article d’octobre 2013 des Echos : « Un magasin qui ouvre un Drive va récupérer entre la moitié et 2/3 de sa propre clientèle et conquérir entre 1/3 et la moitié de nouveaux clients mais il n’a pas le choix : s’il n’a pas Drive, aujourd’hui il perd ses clients. » Pourtant, selon Kantar Wordpanel dans une interview pour La Tribune : « Le Drive aura un impact négatif sur la fréquentation en magasin. Les comptes d’exploitation des hypermarchés pourraient en souffrir ».

2.7. Le concept du Click et Collect

Le click and collect représente un nouvel enjeu pour les distributeurs afin d’élargir sa cible de clients. Ce concept répond aux attentes des consommateurs qui sont toujours autant attirés par la gratuité des coûts de livraison ainsi que l’instantanéité de la réception de leur commande. Service permettant aux clients de commander leurs produits en ligne et de les chercher plus tard dans un magasin à proximité de leur lieu d’habitation, ce concept rassemble tous les avantages du commerce électrique et du commerce physique. Du côté des consommateurs, le click and collect est l’occasion de gagner du temps, d’économiser, de voir le produit et de l’échanger immédiatement s’il ne convient pas, d’être conseillé vers d’autres alternatives le cas échéant, etc. Du côté des enseignes, c’est une belle opportunité pour mieux se positionner face à l’e-commerce, pour attirer les consommateurs vers les lieux de vente physiques et augmenter ainsi la fréquentation en magasin, pour séduire de nouveaux clients, pour proposer d’autres services ou produits complémentaires, etc. En définitive, le click and collect est une nouvelle tendance qui possède toutes les capacités pour apporter un certain dynamisme au commerce de détail du futur. En l’exploitant de manière optimale, les distributeurs seront non seulement en mesure de retenir leurs clients les plus fidèles, mais aussi de favoriser leur impulsion d’achat et conquérir ainsi une nouvelle clientèle.

2.8. Le commerce via le mobile

Le m-commerce n’en est qu’à son balbutiement mais il commence petit à petit à faire son chemin dans le parcours d’achat des consommateurs modernes, qui privilégient plus être équipés en mobile plutôt qu’en terminaux informatiques. Le mobile est en passe de devenir ou constitue déjà le nouveau levier de croissance pour la grande distribution. Le mobile commerce fait référence à l’ensemble des activités commerciales réalisées souvent en situation de mobilité, par le biais des terminaux mobiles à l’instar des smartphones, tablettes, etc. Pour s’aligner aux nouvelles habitudes des consommateurs et de gagner du terrain sur le marché des achats en ligne, les enseignes ont intérêt à intégrer le mobile dans leur stratégie commerciale et leur canal de distribution.

2.8.1. Le mobile : un atout majeur pour faire des achats en ligne

Le mobile commerce répond pleinement aux attentes des consommateurs qui passent de plus en plus leur temps en déplacement. Alors pour optimiser leur temps, ces derniers profitent des atouts que leur offrent les mobiles comme l’instantanéité, la personnalisation de l’acte d’achat ou un accompagnement pour finaliser l’achat. Toutefois, la plupart des achats en ligne se concrétise à la maison par le biais des tablettes aux heures de forte audience (en fin de journée entre 21 h à minuit).

Les smartphones d’aujourd’hui offrent de plus en plus de fonctions diversifiées et performantes. En étant connectés à internet, ces téléphones peuvent accéder au commerce électronique avec comme atout majeur : la mobilité. Il est possible d’y passer des commandes en scannant des codes-barres à deux dimensions. Le mobile facilite également les transactions financières avec la possibilité de commander et de payer directement un produit en utilisant les codes QR. Par ailleurs, la lecture des codes barres est un moyen idéal d’avoir accès à un grand nombre d’informations en ligne telles que les comparateurs de prix, les fiches produits, les démonstrations, etc.

2.8.2. Des consommateurs de plus en plus mobiles

Selon une étude parue en avril 2011 de l’Observatoire des nouvelles tendances de consommation de CCM Benchmark, alors que la France compte plus de 16 millions de « mobinautes », 3,3 millions de Français se sont déjà essayés au m-commerce. En 2012, selon FEVAD, on compte 31 millions de cyberacheteurs, 22,3 millions de personnes se sont connectées à Internet mobile par un site ou une application, soit 41,2% des individus vivant en France. En tout cas, ce nouvel outil numérique n’a pas encore délivré tout son potentiel, c’est donc un marché à explorer… Selon toujours Fevad ainsi qu’une étude menée par le CNCC (Centre National des Centres Commerciaux) et Bearing Point, « les réseaux sociaux jouent un rôle croissant sur les quatre étapes clés du cycle d’achat : découverte, information, décision et achat. Le consommateur d’aujourd’hui n’achète plus tout seul : 76% des consommateurs français ont déjà eu recours aux médias sociaux pour préparer un achat, 62% ont déjà renoncé à un achat sur un avis négatif et 53% ont opté pour une marque à laquelle ils n’avaient pas pensé ».

2.8.3. Un changement dans le processus d’achat

Le mobile a littéralement modifié le visage du processus d’achat. Comme les consommateurs sont connectés en effectuant désormais leurs courses, ils ont donc l’opportunité de comparer  facilement et en temps réel, les produits en place et ceux en ligne. Ainsi, les smartphones incitent les consommateurs à être encore plus volages rien qu’en consultant les avis des internautes sur le produit convoité ou en trouvant moins cher ailleurs à l’aide des comparateurs de prix. Par ailleurs, ces derniers remettent toujours en question leurs achats et ont besoin d’informations dans le moindre détail surtout dans le domaine alimentaire. Ils veulent savoir les ingrédients utilisés, la politique écologique de l’entreprise, etc. Selon Fevad, 40 % des clients avec smartphones affirment être connectés en faisant leurs courses, 40% ont déjà contrôlé les renseignements recueillis en magasin et 18% ont déjà changé d’avis après vérification. Selon une enquête de la FEVAD en 2012, près d’un tiers des Français se sont servis de leurs mobiles pour se renseigner sur les produits ou services ou pour surveiller leur commande comme le montre le tableau ci-dessous :

2.8.4. Des opportunités pour les enseignes

Les distributeurs l’ont compris, la présence du mobile dans le quotidien des consommateurs représente une belle opportunité à ne pas négliger. Par exemple, ils ont ainsi développé des applications qui permettent de dresser une liste de courses et d’en comparer les prix. C’est ainsi que Leclerc a mis en place la première application « Qui est le moins cher ? » pour montrer aux clients que les prix de ses produits sont imbattables. Pour répondre à leur souhait de pouvoir accéder aux informations depuis n’importe quel support, les enseignes ont pris l’initiative d’adapter leurs sites internet en « site mobile ». Les marques comme Nestlé ou Maggi s’y mettent aussi et ont décidé de créer leurs propres applications (Devenir Maman par Nestlé, Croquons la vie avec Nestlé, Nestlé Fitness, etc.) qui ont pour but d’accompagner les consommateurs dans leur quotidien, en élaborant des recettes par exemple ou en proposant des jeux, etc. Ces applications ont été élaborées  afin d’être sollicitées soit en situation de mobilité soit à la maison pour comparer les prix, pour se mettre aux fourneaux ou pour s’informer.

2.8.5. La géolocalisation

La géolocalisation depuis un mobile ouvre des potentialités énormes aux acteurs commerciaux. C’est désormais un allié incontournable pour fidéliser et conquérir de nouveaux clients en offrant de bons plans ou des comparateurs de prix dans une zone géographique bien définie. Etant donné que le mobile est désormais l’objet fétiche des consommateurs qui y stockent une multitude de données leur concernant, il devient une aubaine pour les enseignes qui y voient une belle opportunité pour affiner leur stratégie marketing sur terrain. Il est possible de récolter ces données et de les exploiter pour s’informer sur les comportements d’achat des clients ou d’interagir avec eux quand ils sont présents aux abords environnants d’un point de vente. Bien qu’un certain nombre de clients appréhende encore la géolocalisation en raison d’une réticence à divulguer les données personnelles, d’autres la voient comme l’occasion de connaître les bons plans à côté et attendent des offres alléchantes que leur proposent les commerçants.

2.8.6. Géolocalisation : un potentiel à exploiter pour la distribution

La géolocalisation représente désormais une excellente stratégie marketing sur terrain pour les distributeurs qui auront l’occasion d’attirer les potentiels clients qui se retrouvent à proximité d’un magasin à l’aide d’applications bien pensées. Déjà, on remarque un réel engouement de la part des clients pour les services géolocalisés qui leur proposent de bonnes affaires. Ils sont près de 10 millions aujourd’hui à se servir de la géolocalisation pour profiter de sa praticité et de services typiques. Grâce à l’exploitation de données très précises, les enseignes sont en mesure de réaliser un ciblage géographique plus pointu, non seulement en termes de zone de chalandise mais également en ce qui concerne la situation contextuelle (en voiture, en vacances, etc.) ainsi que l’attitude comportementale des clients (fréquence d’achat, enseigne, etc.). Ces données récoltées représentent une manne pour les distributeurs de connaître en profondeur les habitudes d’achat des consommateurs afin pour mettre en place des manœuvres plus ajustées. Ainsi, ils misent sur deux types de stratégie pour séduire les clients via les services géolocalisés. D’une part, une stratégie « pull » qui se base sur une initiative du client mais sous l’influence de la marque comme la notification de bons de réduction ou l’obtention de cadeaux ou d’un tirage au sort dès qu’il est présent sur la zone géographique ciblée. D’autre part, la stratégie « push » s’adresse directement au client dès lors qu’il a consenti à être contacté et géolocalisé, en proposant des informations sur des ventes flash ou des offres promotionnelles à ne pas rater.

 

 

Chapitre 3 : ANALYSE SWOT DE L’UBERISATION DANS LE MILIEU DE LA GRANDE DISTRIBUTION

 

Nous allons poursuivre notre étude avec l’analyse SWOT d’un extrait d’une publication de WYMAN Oliver dans Consommation et Grande Distribution, Volume 3, Edition Marsh& McLennan Companies, 2014.

« Amazon Fresh, dont l’arrivée est annoncée en Allemagne, représente-t-il un danger pour les distributeurs français ?

Amazon Fresh, un développement important pour la croissance future d’Amazon, est en train de s’étendre aux Etats-Unis et a de fait été annoncé en Allemagne. Les modalités de ce service évolueront et s’adapteront certainement, dans la logique du modèle de cette entreprise. Dans une de ces versions, aux Etats-Unis, il s’agit d’un concept plutôt haut de gamme, avec un abonnement de l’ordre de 300 dollars par an et des prix qui, contrairement à ce que propose Amazon par ailleurs, ne sont pas nécessairement les plus bas. Le nom, Amazon Fresh est habile, le service ne proposant pas que des produits frais. Il offre plus de 400 références de fruits et légumes et 500 en viande et en poisson, sur un total de 10 000 à 30 000. Pour Amazon, il s’agit d’un moyen de plus pour livrer fréquemment et efficacement chez les consommateurs. C’est une façon de développer un « tuyau », par lequel faire passer, ensuite, différents types de marchandises. Pour la distribution française, l’arrivée d’Amazon Fresh pourrait avoir des conséquences importantes. Compte tenu de la pression sur la rentabilité des magasins d’aujourd’hui – en moyenne 2% en net et 20% en brut – une simple baisse des volumes de 5% peut entrainer, selon nos calculs, une réduction du parc de magasins de 10% à 15% à terme. Grâce au « Drive », mais aussi à leur compétitivité en matière de coûts et de prix, les distributeurs alimentaires français ont les moyens de résister. La force des magasins physiques est – et doit être encore plus, l’attractivité des rayons frais. »

 

  1. Les impacts positifs

1.1. Les Forces

Comme nous l’avons vu précédemment, la Grande Distribution tente tant bien que mal de faire face aux bouleversements qui ne cessent de secouer le marché. Malgré ce que les prévisions laissent penser sur l’essor du e-commerce, le commerce physique a toujours sa place sur le marché. En effet, il existe un grand nombre de catégories de produits où le lieu de vente physique est incontournable comme c’est le cas des aliments frais. D’autant plus que nous assistons actuellement à une certaine reconversion des pure-players vers le réseau physique de distribution afin d’exploiter de nouveaux leviers de croissance et de lutter contre l’effet du webrooming. D’après The Guardian (2015), même le leader du e-commerce Amazon s’y met aussi en testant un point de retrait dans l’Indiana, afin d’établir un premier contact physique avec sa clientèle. Cette nouvelle stratégie constitue un enjeu majeur pour la marque pour tenter de personnifier son identité et ainsi, de mieux se rapprocher de ses clients. En effet, l’avenir des pure-players commence à être remis en cause dans la mesure où les enseignes traditionnelles se ruent vers le secteur du e-commerce pour profiter de ce créneau très porteur. Cela s’explique autrement par le fait que même si le secteur du commerce électronique connaît un développement croissant en France, son attractivité s’essouffle au fil des années comme le démontre le tableau ci-dessous, d’après les données de la FEVAD.

Evolution de la croissance annuelle de l’activité e-commerce en France, et en valeur

 

Le magasin est l’endroit parfait pour offrir une expérience d’achat remarquable. De surcroît, les clients disposent d’un large choix sur les produits, qu’ils peuvent à tout moment toucher, sentir et comparer de visu, sans compter qu’ils peuvent demander conseil et assistance durant leur parcours d’achat. Avec des magasins de produits frais implantés un peu partout en France, le marché est assez couvert.

Pour les clients qui privilégient l’achat en ligne, le concept Drive est là pour combler les ventes malgré une baisse des commandes en matière d’aliments frais. Avec ses coûts plus compétitifs que les autres alternatives, le Drive répond aux besoins de nombreux ménages.

La Grande Distribution française ont les moyens et la volonté de résister aux offres d’Amazon au regard de sa belle réussite sur le concept Drive, mais aussi de sa capacité à innover. Le cas le plus explicite dernièrement est la conception des casiers d’enlèvement qui offrent aux clients la possibilité de récupérer leurs achats suivant leurs disponibilités.

Même si le vrai danger pour les distributeurs français face à la pénétration sur le marché d’un nouveau distributeur alimentaire, est la baisse des volumes dans les lieux de vente physiques actuels, ils auront toujours à leurs actifs des clients fidèles, des habitudes alimentaires établies depuis des décennies ainsi qu’un vaste choix de produits.

En outre, avec un abonnement de l’ordre de 300$ par an et avec des prix réservés à une clientèle plutôt haut de gamme, les distributeurs français ont une longueur d’avance avec leur compétitivité et leur maîtrise des coûts et prix.

1.2. Les Opportunités

Avec un marché du frais toujours en mode croissance, les changements inciteront encore plus les enseignes existantes à se remettre en question et exploiter toutes les opportunités qu’elles ont en main. La dernière nouveauté en date est la création d’un nouveau concept de magasin qui allie le Drive et les aliments frais par le groupe Auchan. Le magasin dédié aux produits frais sera à proximité du Drive et des clients qui viendront récupérer leurs courses en voiture. Par la même occasion, le concept invitera les visiteurs à descendre un peu de leur voiture. Cette stratégie vise à remédier aux lacunes du concept Drive actuel sur la faible part de produits frais sur les commandes.

Comme les produits frais sont en quelque sorte le cœur de l’offre et des activités d’un magasin de grande distribution puisqu’ils sont cruciaux pour les clients, il est essentiel de devenir irréprochable sur cet axe. Les consommateurs doivent toujours avoir l’impression que les aliments frais sont toujours meilleurs dans les magasins que dans les courses en ligne. Dans le cas contraire, les courses en ligne auront l’avantage au regard de la praticité du parcours d’achat. La recherche de la performance afin de gagner en fraîcheur revient à réduire au maximum le temps d’approvisionnement, renforcer les services conseils très sollicités par les consommateurs en magasin et soigner la présentation des produits en rayon.

Plutôt que d’appréhender l’arrivée des nouveaux entrants, les distributeurs traditionnels devraient se rapprocher un peu plus de leurs clients en augmentant leur niveau de satisfaction. Certains d’entre eux envisagent de miser sur des étalages plus attractifs et sur un meilleur accueil des clients sur les rayons frais qui nécessitent des services conseils accrus. La démocratisation de la digitalisation est une aubaine pour les enseignes en place de pouvoir anticiper l’évolution des modes de consommation des clients et de proposer des solutions qui y répondent de manière précise.

 

  1. Les impacts négatifs

2.1. Les Faiblesses

Le concept Drive ne répond pas toujours aux besoins des consommateurs notamment en matière d’aliments frais. En effet, l’assortiment des produits de cette catégorie est souvent restreint alors qu’Amazon propose 400 références de fruits et légumes ainsi que 500 en viande et en poisson. De plus, les packagings de ses produits sont minutieusement étudiés pour être facilement livrables. Les distributeurs français devraient repenser le processus d’achat des clients et faire en sorte que le Drive qui les a séduits depuis le début puisse satisfaire leurs exigences. Lorsqu’ils trouveront un meilleur moyen de faire converger le commerce en ligne et le Drive, ils seront mieux armés face aux « pure players » tels qu’Amazon.

Par ailleurs, la livraison à domicile qui représente une solution de réception de courses très intéressante est à la traîne en raison du coût élevé de livraison. Cette option ne serait satisfaisante que si les volumes livrés et la fréquence sont conséquents.

La guerre des prix que se livrent les distributeurs internes depuis plusieurs années a une répercussion non négligeable sur leur marge bénéficiaire, et donc sur la rentabilité des magasins d’aujourd’hui.  Cette situation précaire peut fragiliser les distributeurs même en cas d’une diminution modérée des ventes.

Les distributeurs d’aujourd’hui peinent encore à faire face au phénomène de « showrooming », qui prend de l’ampleur face à l’expansion du e-commerce. Cette tendance, décuplée par l’utilisation massive des smartphones, se traduit par le fait que les clients viennent en magasin pour tester, essayer, voir de visu, demander des conseils et toucher les produits qu’ils ont repérés en ligne, pour finalement finaliser leur achat en ligne après, afin d’y profiter des prix plus compétitifs. Certains clients vont même jusqu’à prendre en photos ou scanner le produit convoité. En quelque sorte, le lieu de vente physique se transforme en véritable « showroom » et n’est qu’une référence pour les consommateurs. Le showrooming représente un véritable fléau, voire un défi de taille pour les commerçants physiques qui voient leurs chiffres d’affaires chuter. Il engendre également un conflit d’intérêt entre les marques et les distributeurs qui servent uniquement de cabine d’essayage au profit des marques. L’idéal est de trouver une solution gagnante pour les deux parties sans qu’aucune ne soit lésée. Mais en même temps, les commerces physiques ont à leur portée de grandes opportunités pour se rapprocher un peu des clients et retourner la situation en leur faveur. C’est l’occasion de développer l’attractivité de leurs lieux de vente physiques en alliant un service personnalisé exceptionnel à un système de gestion des commandes efficace, en les abordant de manière créative et décloisonnée. Pour cela, il convient de mettre en place des stratégies adaptées aux changements sur la manière de consommer des clients. L’accent est donc mis sur l’amélioration de l’expérience client, sur la satisfaction optimale des clients par un service plus personnalisé et centré sur le client, sur la transformation d’un magasin en lieu de découverte et d’interaction avec le produit, et pourquoi pas sur un espace à l’intérieur duquel le showrooming est mis en avant. Par ailleurs, l’adoption d’une politique tarifaire plus agressive peut contribuer à diminuer l’écart avec les acteurs en ligne.

2.2. Les Menaces

L’entrée sur le marché de la distribution en Allemagne du géant Amazon représente une menace sérieuse pour la Grande Distribution française dans la mesure où cette start-up ne comptera sûrement pas s’arrêter à si bon chemin mais continuera de conquérir de nouveaux marchés en Europe, dont la France.

  • Ce qui fait d’Amazon une menace concurrentielle réelle

Amazon Fresh est un service de livraison à domicile qui fait suite à des achats en ligne. Il mise sur des offres aux meilleurs prix, l’assortiment le plus large, la proximité ainsi qu’une logistique bien maîtrisée pour attaquer directement le marché en place. Son surnom de géant du e-commerce n’est pas volé puisqu’il met un point d’honneur à être toujours impeccable sur le service et sur son image de marque vis-à-vis des clients. Et cela passe par le conditionnement qui n’a rien à avoir avec un pack ordinaire de livraison. C’est un véritable outil de communication entre l’enseigne et le client. Le « Fresh pack » se démarque par un design bien pensé et une note d’impeccabilité à l’image même des produits frais qu’il y a à l’intérieur. Au final, cela inspire la confiance des clients qui en redemandent.

Sa force repose également sur sa longue liste de références de produits livrables, qui porte non seulement sur des produits frais mais aussi sur d’autres marchandises exploitées par la chaine. Par cette stratégie, Amazon espère répondre à tous les besoins quotidiens des consommateurs et asseoir par la même occasion sa marque sur la zone ciblée.

La question est de savoir si l’offre d’Amazon convaincra les clients français qui sont toujours réticents à payer pour se faire livrer. Le prix de la livraison de l’entreprise américaine ne se fait pas sur chaque transaction mais déduit d’un abonnement annuel d’environ 300 $. Mais avec ce montant, les consommateurs pourront être livrés le jour même de la commande ou au plus tard le lendemain. Certes, sa politique au niveau du prix n’est pas très compétitive par rapport aux Drives mais il faut rester tout de même vigilant étant donné qu’Amazon a toujours su tirer avantage du e-commerce et a réussi à bousculer des secteurs bien ancrés sur le marché à l’instar du secteur de la librairie.

  • Que penser du concept d’Instacart ?

Cette startup américaine qui opère dans le secteur de la livraison de courses à domicile, a été créée par un ancien d’Amazon en 2012 et déjà, elle connaît une croissance exponentielle notamment aux Etats-Unis. Mais le concept pourrait s’exporter dans le monde tant il séduit de plus en plus les consommateurs qui y voient leur compte. A l’instar de la société Uber, Instacart mise sur le réseau de personnes disposant de véhicules, qui sont disposées à effectuer des courses pour d’autres personnes dans les enseignes indiquées et de les livrer à leur domicile, moyennant une petite compensation. Grâce aux algorithmes, il est plus facile de faire converger les besoins des demandeurs avec les disponibilités des livreurs. S’inspirant de l’économie du partage, ce concept se démarque par la rapidité de livraison et un coût de livraison plus que compétitif, en moyenne deux heures pour 3,99 $ alors que le Google Shopping express affiche 4,99 $. Les utilisateurs ont le choix entre un paiement par livraison ou un abonnement s’élevant à 99 $ par an pour un service illimité à des horaires très étendus (de 9 heures à minuit tous les jours de la semaine suivant l’ouverture des magasins). De même, les produits achetés affichent les mêmes prix que ceux en magasin. Donc, pas d’entrepôts ni de camions de livraison pour alourdir les charges. Instacart se focalise sur le strict nécessaire à savoir la qualité du service et des délais de livraison courts. De même, l’application est conçue pour rendre service au consommateur avec un design et un certain minimalisme qui fait état des produits essentiels allant jusqu’à 30 000 références des enseignes des environs comme Costco, Whole Foods, etc. Mise à part une offre alléchante, c’est la vague de l’économie collaborative qui permet à la startup de se frayer un chemin dans la concurrence ardue et de se développer de manière rapide, même à l’échelle internationale. Toutefois, le problème majeur réside dans la non-convivialité de son site qui n’affiche pas la disponibilité d’un tel ou tel produit. Par ailleurs, le livreur doit habiter à proximité pour un service instantané et la commande ne doit pas être trop importante pour ne pas trop charger le porteur. Au regard de ses nombreux atouts qui ont de grandes chances de séduire les consommateurs français, Instacart est de ce fait une startup que les distributeurs sur place devraient surveiller de près tout comme Amazon.

En définitive, au regard des forces et faiblesses de la grande distribution française, l’arrivée de nouveaux distributeurs alimentaires en ligne pourrait représenter une menace notamment sur une possible diminution du volume des commerces physiques, sans pour autant réussir à supplanter complètement les structures en place. Les enseignes traditionnelles devraient renforcer leur présence sur Internet et tirer avantage du potentiel des nouvelles technologies, pour se rapprocher un peu plus des clients et les séduire à nouveau. Le challenge dès aujourd’hui et pour l’avenir est d’améliorer l’offre en place pour être plus efficace, d’être plus opérationnel et réactif face aux changements incessants des modes de consommation et de rester alertes sur toutes les évolutions venant de la concurrence.

 

 

Chapitre 4 : PROPOSITIONS ET PRECONISATIONS

 

Avec ce déferlement prodigieux du numérique, l’innovation et la digitalisation sont en train de bouleverser sérieusement nos manières de penser, d’agir, de produire, de consommer, bref notre manière de vivre. Le commerce en ligne remet en question le fondement même des canaux de distribution traditionnels avec le concept du multicanal et transforme peu à peu les fondamentaux du commerce de détail. Pour trouver un juste milieu entre la grande distribution traditionnelle et le commerce en ligne, les enseignes ont mis en place le Drive ou le Click et Collect. Mais ce nouveau concept n’a pas encore rempli tout son potentiel puisque le problème lié aux produits alimentaires frais est toujours d’actualité. A l’heure actuelle, face à la volatilité des consommateurs, les modèles de distribution sont en situation de précarité. Les distributeurs doivent toujours être aux aguets pour déceler le moindre changement dans le comportement des consommateurs pour pouvoir anticiper et prendre les devants dans la mise en place de nouvelles stratégies.

En donnant un tremplin aux partages d’avis et aux appréciations, le commerce électronique a mis à mal les marques qui n’ont plus désormais le pouvoir de gérer leur réputation à leur guise. Le client est littéralement le roi et détient le privilège de menacer l’avenir des distributeurs avec seulement quelques avis négatifs. Les enseignes ont donc intérêt à choyer ses clients qui peuvent devenir un atout majeur en tant qu’ambassadeurs de la marque.

Le plus grand défi pour les grandes surfaces est de trouver le meilleur moyen de convaincre les clients à fréquenter de nouveau les magasins. Face à l’expansion exceptionnelle du e-commerce, les enseignes devraient concentrer leurs efforts sur la création d’une certaine complémentarité entre les offres proposées en ligne avec celles dans les commerces physiques, optimiser leur présence sur les réseaux sociaux et se servir au mieux des outils interactifs.

Quant à savoir si l’ubérisation de la grande distribution a commencé, nous pouvons en tout cas avancer qu’elle avance pas à pas dans cette direction puisque les nouvelles technologies sont en train d’entamer une rupture certaine entre les modes de consommation traditionnels et ceux d’aujourd’hui. En effet, les enseignes en ligne répondent à un modèle économique entièrement nouveau, qui s’incruste dans un marché jadis stable. Une chose est sûre, le changement aura lieu d’ici quelques années, mais il n’en tient qu’aux enseignes traditionnelles de savoir prendre la bonne direction qui engage l’avenir de leur commerce.

Le futur scénario le plus probable pour que l’ubérisation change définitivement le mode de distribution traditionnel, c’est que le Drive puisse passer au niveau de l’industrialisation. Cela permettra de donner un nouveau tournant à ce parcours d’achat en faisant converger définitivement le commerce en ligne et le commerce physique. Pour cela, lorsque le consommateur passe sa commande, un coursier indépendant (par exemple un chauffeur de VTC) se charge de retirer les produits en magasin puis de les livrer à l’adresse indiquée. Ainsi, les clients n’auront plus à se soucier des coûts de déplacement et des diverses contraintes (embouteillage, etc.) tandis que l’heure de livraison est précise ; ce qui éviterait aux clients d’attendre des heures. Le coursier pourrait aussi choisir lui-même les produits dans les rayons ; ce qui plairait encore plus aux consommateurs exigeants sur le choix de leurs produits. Ainsi, les distributeurs existants seront mieux armés pour faire face à la concurrence et affronter le futur avec plus d’optimisme.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

TROISIEME PARTIE : DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS

 

 

 

Chapitre 1 : COMPARAISON ENTRE LES PRATIQUES ACTUELLES ET CELLES DES ANNEES « PRE-UBERISATION » EN MATIERE DE DISTRIBUTION

 

1. Les pratiques des années « pré-ubérisation » dans la Grande Distribution française

Ayant fait son apparition en début des années 60, la grande distribution française a su gagner les faveurs des consommateurs à l’époque grâce au concept révolutionnaire du « Tout sous le même toit ». Cela répond parfaitement à leur désir de profiter enfin de  l’abondance après des années de privation durant la guerre. C’est ainsi qu’une nouvelle génération portée sur un grand besoin de consommation est née, poussée par une approche commerciale très attractive à leurs yeux : de grands magasins en périphérie qui leur proposent en libre service un large choix de produits normalisés à bas prix. La Grande Distribution a réussi ce coup de maître grâce à une bonne maîtrise des coûts de production et à une logistique efficace ; désormais près des deux tiers de la consommation alimentaire passe par cet axe. Dans les années 2000, ce modèle qui était le moteur faisant tourner la distribution depuis quarante ans, est remis en cause par l’émergence de nouvelles exigences sociétales, environnementales et surtout d’un phénomène qui va changer la donne : la digitalisation. En effet, les distributeurs traditionnels se contentent encore de fournir les produits et les services des marques jusqu’aux consommateurs finaux sans tisser de véritables liens privilégiés avec ces derniers. Or, les clients d’aujourd’hui aspirent à consommer mieux, en faisant attention à leur santé, en recherchant une alimentation plus saine, en plébiscitant des produits plus authentiques voire plus naturels, etc.

  1. Les pratiques actuelles dans la Grande Distribution

Le consommateur moyen actuel est très différent de celui d’après-guerre, son nouvel idéal n’est plus d’ordre « matériel » mais plutôt « immatériel ». Il reproche désormais à la grande distribution d’être trop éloigné de son idéal avec sa démesure, ses courses effrénées, ses services impersonnels et son environnement trop froid. Le client d’aujourd’hui aime être informé de tout, être éduqué, être accompagné, être écouté et veut même partager (consommation collaborative). Pour toutes ces raisons, le commerce en ligne commence à combler les désirs des consommateurs grâce à son excellent service client, son immense catalogue de produits ainsi que le plaisir de faire ses achats chez soi. Pour ne pas voir perdre leurs clients, les distributeurs classiques ont dû se réinventer en créant des sites e-commerce et le concept « Drive ». D’autant plus que l’entrée de nouveaux acteurs plus coriaces remet tout en question avec des pratiques qui sont en contradiction avec le commerce physique comme l’instauration d’un relationnel privilégié avec le client. En effet, il est plus que jamais essentiel de nouer un contact direct avec le consommateur dans la mesure où Internet par l’intermédiaire des smartphones, influe grandement sur la volatilité de celui-ci en lui permettant de consulter des avis extérieurs sur le produit convoité ou de vérifier en temps réel s’il peut trouver une offre plus alléchante ailleurs. Le consommateur des années 2010 se retrouve entre deux feux : son désir de tout acheter au meilleur prix et celui de donner du sens à ses achats, ce qui l’amène à la chasse perpétuelle du meilleur prix ainsi que d’un bon plan. Dans le même temps, nous assistons à de profondes mutations dans la société où la ménagère qui faisait ses courses dans une grande surface à l’époque des Trente Glorieuses fait place à une nouvelle population composée en grande partie par des familles monoparentales, des séniors et des célibataires. Faute de temps et face au rythme effréné des courses quotidiennes, l’heure est au commerce de précision où la proximité géographique représente un atout majeur pour se rapprocher des consommateurs. Désormais, les magasins en périphérie n’ont plus la côte tandis que les points de vente en centre ville qui sont beaucoup plus accessibles et pratiques pour effectuer les achats facilement et rapidement, sont de plus en plus sollicités. Les enseignes devraient miser sur de nouveaux canaux de vente pour ne pas se faire dépasser : centres commerciaux urbains, points de retraits, drives, commerces de flux, magasins automatiques qui proposent dans des lieux fréquentés des denrées du quotidien, etc.

3. Les faiblesses de la grande distribution d’aujourd’hui

Au cours de cinq décennies, la grande distribution a montré qu’elle est forte et qu’elle est à même de toujours se remettre en cause quelles que soient les difficultés auxquelles elle fait face et qu’elle est en mesure de s’adapter aux diverses évolutions du marché et des modes de consommation, quitte à revoir petit à petit les fondements mêmes qui ont contribué à son succès. Même si sa capacité d’adaptabilité et d’innovation forcent l’admiration, sa marge de manœuvre est toujours dictée par des années d’impératif de retour sur investissement rapide qui ruine parfois tous ses efforts pour s’épanouir. Elle se lance coûte que coûte dans des stratégies innovantes pour pouvoir répondre aux nouveaux modes de consommation sans vraiment analyser les retombées à long terme. Prenons comme exemple l’enseigne Carrefour qui, à partir de 2011, s’est transformé en Carrefour Planet dans une volonté de militer en faveur du développement durable mais pas seulement. C’est un nouveau concept d’hypermarché qui est entièrement repensé pour faire vivre aux clients une belle expérience du parcours d’achat où le plaisir, la convivialité et le confort d’achat sont au rendez-vous. Toutefois, pour arriver à renvoyer vraiment une image plus respectueuse de l’environnement du groupe, elle doit revoir certaines pratiques qui ne sont pas toujours cohérentes vis-à-vis de l’engagement prôné comme les produits bio qui ne sont pas représentés massivement comme il le devrait. En fin de compte, cette nouvelle appellation résonne plus comme une stratégie marketing qu’un authentique engagement. Le concept n’a pas donc engendré l’effet escompté tant au niveau économique que stratégique. L’enseigne a donc dû trouver de nouveaux créneaux comme les Drives pour se repositionner et rattraper son retard sur ce secteur très porteur.

Par ailleurs, bien qu’il soit indéniable que c’est sa politique tarifaire tournée vers le prix bas qui a propulsé la grande distribution vers la réussite, c’est cette même culture ancrée depuis 50 ans qui aujourd’hui, met un frein au plein épanouissement du secteur. A trop vouloir attirer les clients par les prix les plus bas, les enseignes accentuent l’infidélité de ces derniers qui vont à la chasse aux meilleurs prix au détriment des marques.

 

 

 

 

 

Chapitre 2 : COMPARAISON ENTRE LE MODELE AMERICAIN ET LA CONCEPTION EUROPEENNE

 

1. La conception Européenne

La « société de consommation » a été pour la première fois mentionnée en 1950 par l’économiste John Kenneth Galbraith. Cette époque des Trente Glorieuses qui commence après la guerre sera marquée par une forte croissance économique qui va se répercuter sur le pouvoir d’achat de la population elle-même en hausse. Cette nouvelle économie qui imite le modèle américain, repose sur un concept du taylorisme (production de masse) et du fordisme (la consommation de masse) qui consiste à produire en grande quantité, dépenser sans comptre, consommer et même gaspiller. Elle entraine alors des innovations pour l’équipement des ménages qui vont transformer en profondeur les modes de consommation et les habitudes des consommateurs : le réfrigérateur, la télévision, la publicité, l’automobile, etc. Cet essor de la société contribue à l’expansion de la consommation de masse et dans la foulée, de la grande distribution qui fixe comme but de vendre au maximum tout en minimisant les frais de commercialisation. Grâce aux séminaires américains sur la méthode de vente moderne, les distributeurs français retiennent toujours les formules poignantes de l’américain Bernardo Trujillo, très en vogue à l’époque comme « No parking, no business » ou « Empilez haut et vendez bas », etc. En fait, le modèle américain de la distribution repose sur le principe du volume, autrement dit, au lieu de miser sur une grosse marge bénéficiaire sur le prix donné par le fournisseur, il préfère baisser cette marge et vendre à des prix les plus bas. C’est ainsi que le libre-service est lancé vers la fin des années 40 et le supermarché en 1957. Né aux Etats-Unis, ce dernier format ne rencontre pas encore le succès tant attendu à cause des réticences des consommateurs et des contraintes règlementaires. Ce n’est que vers le début des années 60 que le développement eut lieu et que le concept d’hypermarché, une invention purement française, fut inventé pour trouver « tout sous le même toit », aussi bien des produits alimentaires et non alimentaires à des prix moins chers que le commerce traditionnel. Avec plus de 10 000 m2 de surface, l’hypermarché Carrefour se démarque par sa démesure en termes d’assortiments de produits, de surface de vente, de parking, de nombre de caisses enregistreuses et de Caddies. Certes, le concept part de l’influence américaine mais il a été conçu autrement en misant sur une formule hybride avec la réunion de l’alimentaire et du non-alimentaire, celle en quoi les Américains sont sceptiques quant à la viabilité à long terme et que le grand distributeur américain Wal-Mart n’a adopté que vers 1985.

2. Le centre commercial moderne américain : le « Mall »

Le « Mall » est le symbole de la société consumériste américaine des années 60. Il rassemble en un seul immense bâtiment, des centaines de commerces de détail casés dans des galeries marchandes souvent agglutinées autour d’un grand magasin ou un hypermarché. Parmi les plus gigantesques, on retrouve le « Mall of America » dans le Minnesota qui regroupe dans une superficie de presque 260 000 m2, plus de 500 magasins, salles de cinéma, restaurants, discothèques et autres. C’est un concept conçu au départ pour générer une véritable expérience d’achat et favoriser l’acte d’achat avec un système de climatisation bien pensé, des escaliers mécaniques, une musique d’ambiance qui nous accompagne durant le shopping, des parkings de stationnement gratuits, et quelquefois des parcs d’attraction, etc. Mais il a été très vite rattrapé par son succès et s’est laissé emporter par les impératifs de la consommation. Ce modèle de distribution qui symbolise le rêve américain, fait également rêver l’Europe dont la France et les pays émergents. Pourtant, ces centres commerciaux qui sont devenus emblématiques du mode de vie américain, battent de l’aile aujourd’hui et ils sont de plus abandonnés par la jeunesse américaine.

La montée en puissance du commerce en ligne, l’obsolescence des infrastructures ou tout simplement la variété des offres sur le marché comme le e-commerce expliquent le déclin de ces centres commerciaux qui ont dominé pendant cinq décennies. Par ailleurs, les jeunes consommateurs américains qui ont grandement contribué à leur réussite, aspirent à acheter autrement et recherchent la proximité comme les commerces en plein air, pour éviter le confinement de ces galeries marchandes. Cette génération « Y » déserte désormais le centre commercial en banlieue faute d’automobile, en raison du taux de chômage en hausse et de son pouvoir d’achat en baisse. Ce qui entraine depuis quelques années la fermeture de certains complexes qui n’ont pas su se réinventer ou se diversifier.

Le concept du gigantisme des malls a du mal à s’exporter en France en raison de la difficulté des acteurs sur place à allier les commerces et les loisirs. Avec une vingtaine d’années de retard par rapport aux américains, les distributeurs ont mis en place des adaptations plus économiques, moins gigantesques, plus ciblées et qui veillent à instaurer le concept de « fun shopping ». Le modèle n’a rencontré qu’un succès mitigé dans la mesure où les différents acteurs n’ont pas su juxtaposer les deux activités sur un même espace. A la suite de nombreux échecs, les distributeurs ont préféré s’en tenir au développement des centres commerciaux classiques ou à leur restructuration par des multiplexes par exemple, qui sont des grandes salles dédiées aux loisirs (cinéma avec de grands écrans, jeux vidéo, bars, bowlings, etc.). Dans leur désir de se démarquer et de surprendre les consommateurs, la grande distribution ne cesse d’innover pour grignoter une certaine part de marché, quitte à tâtonner un peu.

 

 

 

Chapitre 3 : LA SOCIETE UBERISEE DE DEMAIN : QUELLES VALEURS POUR LES GENERATIONS FUTURES EN L’ETAT ACTUEL DES CHOSES

 

  1. La place de la technologie

1.1. Emergence d’un consommateur digital

Nous sommes en train de vivre une époque où les clients recherchent constamment des informations en temps réel et où les distributeurs font ce qu’ils peuvent pour répondre à leur demande ; le e-commerce prend de l’ampleur et il commence à changer la donne sur le marché. Le consommateur est le grand gagnant de cette économie qui privilégie l’usage intensif des nouvelles technologies. Il détient un pouvoir qu’il n’a jamais expérimenté depuis la naissance de la société de consommation. Certes, en ce temps-là, il avait le choix mais il n’a pas le pouvoir de faire trembler les distributeurs comme c’est le cas actuellement. Les marques et les distributeurs n’ont plus choix, ils doivent tisser des liens et interagir avec les consommateurs finaux. Ces derniers ont évolué, ils ne sont plus simples spectateurs de la publicité autour d’eux, ils l’analysent, la déchiffrent et bien évidemment la critiquent. Ils émettent leur avis, partagent leurs idées avec les internautes, bref ils deviennent indépendants. C’est donc l’émergence d’un consommateur digital qui est connecté en permanence du matin au soir, aussi bien dans sa vie privée que professionnelle, et même en faisant ses courses.

  • La génération « Y »
    • Définition

La génération « Y » née dans les années 80 a assisté à l’évolution de tous les moyens de communication : internet, ordinateur, téléphone portable, smartphone, tablette, etc. Elle est devenue une adepte précoce de  ces nouvelles technologies et est en quête divertissement, de fun et d’interactivité. Première génération dont la digitalisation va de soi, elle est en désaccord avec certaines valeurs des générations passées telles que les institutions, la famille, la politique, les relations sociales et notamment le monde du travail. Elle est également connue sous le nom de « Digital natives », un néologisme cité pour la première fois en 2001 dans un rapport de Marc PRENSKY dont le thème était l’éducation. Cet écrivain américain y a soulevé que cette génération, qui a mûri dans un monde marqué par les technologies numériques, est en train de changer ses manières d’agir et d’apprendre.

  • Une génération hyper-connectée

Elle arrive en deuxième position sur le plan consommation de réseaux sociaux derrière les jeunes qui ont entre 14 et 24 ans. En troisième position, on retrouve les internautes séniors de plus de 50 ans qui disposent d’un pouvoir d’achat élevé et de temps libre. Contrairement aux idées reçues, ils ne sont pas en retard en ce qui concerne les nouvelles technologies et sont présents sur les réseaux sociaux. Enfin, les mères de famille entre 25 et 49 ans ne sont pas en reste puisqu’elles se connectent régulièrement sur internet pour faire leurs courses en ligne ou se renseigner sur des produits ou pour rechercher de bons plans ou des offres intéressantes mariant service et proximité. En somme, les consommateurs d’aujourd’hui sont hyper-connectés, en toute mobilité et à tout instant.

  • Une génération consumériste

Très équipée en ordinateurs, smartphones et tablettes, la génération « Y » considère les médias habituels tels que la télévision ou la radio comme passés de mode. Les enseignes doivent donc mettre en place de nouvelles méthodes de communication pour mieux approcher leur cible. Ayant grandi dans un environnement technophile où les services et les applications changeants, instantanés et individualistes sont légion, la génération d’aujourd’hui privilégie les notions d’illimité et de rapidité. Et cela se perçoit jusque dans les modes de communication qui utilisent énormément les styles abrégés comme les SMS, Tweets, etc. Dans cette optique, l’attente l’insupporte au plus haut point. Le développement massif des nouvelles technologies a changé leur comportement ainsi que leur niveau d’exigence qui est devenu plus pointu. Autrement dit, la génération « Y » veut accéder à tout et dans l’immédiat. Dès lors, les cartes de fidélité dont les récompenses doivent attendre des semaines ou des mois avant d’être remises ne les attirent pas, elle les veut tout de suite. La génération digitale semble moins fidèle que l’ancienne génération dans la mesure où elle recherche à tout prix l’innovation et l’excellence. Privilégiant le plaisir et l’envie de nouveauté extrême, elle est animée d’un désir consumériste aigu qui la pousse souvent à contracter des crédits à la consommation pour des projets la plupart du temps plus futiles que réellement nécessaires. En plus de l’innovation et de la praticité d’un produit, cette génération recherche une expérience unique autour d’un produit ou service. Contrairement à la génération précédente, la génération d’aujourd’hui accorde une plus haute importance à la notion de qualité qu’à la quantité, de partage que de propriété. Etant le pivot de la cible des enseignes, cette génération est en mode rupture avec les habitudes de consommation d’antan, c’est donc tous les aspects du mix-marketing qui devront être réétudiés par les marques pour atteindre leur cible.

  • Une génération plus sociale

D’après une étude récente de l’Observatoire IFOP sur les réseaux sociaux, 96% des jeunes ayant entre 18 et 24 ans disent être membres de pas moins d’un réseau social en ligne. Contrairement à ce qu’on peut penser, la génération d’aujourd’hui n’est pas asociale mais elle s’attache à de nouvelles formes de sociabilité. Elle accorde une importance autant ou sinon plus que la génération précédente aux liens familiaux. Mais cette relation privilégiée se joue sur le plan des réseaux sociaux. Cette nouvelle forme de sociabilité est stimulée par la consommation. En effet, consommer un même produit ou service au même moment rallie les individus qui présentent les mêmes affinités et exacerbe leur sens de l’identification. Par ailleurs, cette génération est plus participative dans la mesure où elle recherche constamment l’information en temps réel et aime y contribuer.

  • La génération « Z »

Avec des équipements technologiques de plus en plus perfectionnés comme le smartphone qui est devenu plus qu’un simple outil de communication contenant des données personnelles et multiples (courriers, photos, comptes bancaires, etc.), le consommateur de demain sera de plus en plus sollicité par les marques et les distributeurs qui pourront analyser précisément ses attentes en fonction des données reçues et mettre en place des stratégies plus ciblées pour répondre à ses besoins.

Comme la technologie est au cœur de nombreux enjeux, il est essentiel de l’intégrer dans les commerces physiques pour donner un nouveau souffle à la grande distribution, et conquérir de nouveau les consommateurs. Il faut donc être sur tous les fronts pour se rapprocher des clients en misant sur la présence sur les réseaux sociaux (pour tisser des liens privilégiés avec les consommateurs), les différentes innovations (solutions pour les produits non disponibles, les attentes interminables sur les caisses par le self-scanning ou le paiement par mobile, etc.), la dématérialisation (notamment des cartes de visite, des coupons de réduction) ainsi que la réinsertion des vendeurs bien équipés (tablette ou smartphone) dans les rayons pour accompagner, guider et aider les acheteurs à se servir des nouvelles technologies. N’oublions pas les sites internet qui doivent être remis au goût du jour et repensés pour répondre exactement aux exigences des consommateurs et aux objectifs des distributeurs. En parallèle, les grandes surfaces doivent mettre tout en œuvre pour rendre le magasin plus attractif en tenant compte du mobile et du wifi. Les lieux de vente physiques doivent ainsi offrir un libre accès au wifi afin que les clients puissent profiter d’une expérience d’achat connectée et effectuer leurs recherches à leur guise. Par la même occasion, les distributeurs pourront soutirer des informations précieuses sur les consommateurs par le biais du data analystics. Il ne faut pas non plus négliger la géolocalisation pour faciliter le parcours d’achat de ces derniers. En effet, grâce à cet outil performant, les enseignes pourront inviter les clients à leur confier leur liste de courses et leur proposer ensuite un itinéraire d’achat idéal pour retrouver facilement les produits à acheter.

Il va de soi qu’une telle stratégie digitale doit être étudiée avec minutie pour être efficace et espérer des retombées positives sur le long terme. Pour cela, une analyse complète sur les habitudes des consommateurs et sur la marge de manœuvre de l’enseigne est primordiale afin de mettre en place les nouvelles technologies adaptées.

  • L’Internet des objets
    • Définition

L’Internet des objets (IoT) va bien au-delà d’une connexion de machine à machine, il s’agit d’innombrables connexions qui s’établissent entre machines, individus et processus. C’est l’apparition de nouveaux univers d’objets qui se connectent entre eux et qui génèrent une masse de données très précieuse pour les acteurs économiques. Dès lors, le service et la relation à l’utilisateur en sont fondamentalement métamorphosés. Plus que des gadgets, ces objets connectés sont révolutionnaires. La donnée devient ainsi une source de création de valeur qui devient un enjeu stratégique du modèle économique des plateformes. Elle permet d’analyser succinctement les besoins de leurs clients, en examinant les « traces numériques » laissées par l’utilisation d’Internet, et de proposer en conséquence, un service personnalisé et en adéquation avec la situation géographique où se trouve la personne en question. Il est possible de connaître plus en profondeur l’usager en exploitant les autres données plus affinées telles que les habitudes, modes de vie ou relations. Arrivé à maturité, l’usage massif du smartphone, outil mobile par excellence, a rendu accessibles les services numériques à n’importe quel endroit. Cette mutation alliée à l’essor de l’Internet des Objets devrait mener à l’émergence de nombreux nouveaux services.

  • Un concept révolutionnaire

Ces dernières années, Internet est devenu quasi incontournable en matière de diffusion de l’information. Il s’est imposé dans de nombreux domaines comme étant un outil crucial pour les personnes, les entreprises et même les institutions. Mais jusque-là, il n’a pas encore livré tout son potentiel puisqu’en plus des ordinateurs et des terminaux mobiles, ses capacités d’évolution sont encore immenses au regard des prémices de l’interaction qui se dessinent en grandissant entre les objets entre eux ainsi qu’avec nous-mêmes. Cette mutation importante du réseau appelée « l’Internet des objets » semble se développer à une vitesse prodigieuse et s’immiscer petit à petit mais fermement dans notre quotidien. Une nouvelle révolution des modèles économiques se profile à l’horizon et la société de demain sera sans aucun doute affectée même dans certains domaines jusque-là plus ou moins épargnés comme la santé, l’immobilier, l’automobile, etc. L’expansion hors du commun des objets connectés montre que nous sommes à un point de basculement ou ce phénomène qui prend de l’ampleur, nous entrainera dans un monde où les objets « communicants » auront une place prépondérante. D’après le tableau ci-dessous, d’ici 2020, les objets connectés pourraient atteindre les 80 milliards, si aujourd’hui, ils sont environ de 15 milliards, soit une croissance de 30 % par an. Pour aller plus loin dans l’analyse, à chaque seconde, 80 nouveaux objets voient le jour.

Elle est amplifiée par une accessibilité facile de la technologie de pointe qui est intégrable partout et rendue possible par quelques facteurs essentiels : des capteurs de plus en plus puissants à prix abordable, une connectivité qui explose avec la 4 G et 5 G du futur, la miniaturisation des processeurs qui deviennent presque invisibles ainsi que le développement du cloud (capacités de stockage illimitées).

  • Les impacts
1.4.3.1 Reconfiguration des modèles économiques

L’expansion d’une société basée sur les données va sans aucun doute remettre en question les modèles économiques existants. Nous allons vers une société fondamentalement ubérisée qui aura des impacts sur l’économie et une probable reconfiguration des modèles économiques. Ainsi, les frontières entre secteurs et industries vont s’embrouiller et les acteurs qui détiennent des données pleinement exploitables dans d’autres domaines seront tentés de s’incruster sur d’autres secteurs. Nous assisterons à une probable série de ruptures sur la chaîne de valeur de nombreux secteurs.

Dans le domaine de la distribution, le scénario qui a le plus de chances de se produire est que les commerces physiques seront légués au second plan et que les courses en ligne auront le vent en poupe. Dans ce cas de figure, Uber entrera en scène pour effectuer vos courses et les livrer suivant vos besoins et votre rythme de consommation. Il ne s’agit pas d’un service de livraison ordinaire puisque le prestataire en transport s’improvise en logisticien pour devenir le commerçant attitré des consommateurs. Cela est possible grâce aux données récoltées à partir d’innombrables capteurs installés dans de nombreux foyers devenus intelligents. Ces derniers n’ont plus besoin de dresser leur liste de courses sur une application puisqu’Uber est en mesure de livrer rien qu’en analysant leurs besoins en consommation, révélés par tout un écosystème de réseaux qui collectent les données : « Evian chez vous » qui commande automatiquement avant que l’eau potable ne vienne à manquer, un réfrigérateur connecté qui détecte tout ce qui manque en matière de produits alimentaires, la télécommande connectée d’Amazon Dash qui permet de scanner les produits à commander sur le site d’Amazon, etc. Amazon Fresh pourrait s’associer avec Uber pour optimiser encore plus le service de livraison des produits frais. Comme nous l’avons vu précédemment, le succès d’une telle coopération impacterait beaucoup sur le volume de ventes des distributeurs classiques. D’autant plus qu’au-delà du côté pratique du procédé pour ceux qui n’ont pas le temps de faire les courses, le phénomène profite uniquement aux acteurs qui ont intégré le numérique dans leur gestion commerciale, aux dépens des commerces locaux et des relations humaines. Par ailleurs, ces installations à la pointe de la technologie qui simplifient grandement les tâches, incitent les clients à consommer toujours plus.

1.4.3.2 Les données au centre des enjeux

D’ici quelques années, les données seront au centre des enjeux étant donné que tous les acteurs prennent conscience de leur valeur. Toutefois, leur seule collecte est d’une valeur insignifiante sans un écosystème d’agrégation qui les mette en valeur.  De nombreuses entreprises issues de secteurs différents chercheront à les monétiser et les exploiter. Ces données proviennent généralement des applications intégrées aux terminaux mobiles, plus précisément aux smartphones qui sont hyperconnectés : GPS, baromètre, gyroscope, empreintes digitales, détecteur de lumière, etc. Selon la publication d’Olivier WYMAN dans l’Internet des Objets (2015) : « Lorsque vous utilisez une application, celle-ci collecte des données d’accès Internet dans 90% des cas, vos données GPS dans 55% des cas, votre numéro de téléphone dans 65% des cas et votre liste de contacts dans 35% des cas». La valeur des données découle de la manière d’en bien analyser les bonnes. Elle profite ainsi à ceux qui savent les exploiter au mieux. Par exemple, les tickets de caisse sont une source abondante de données que les enseignes traditionnelles minimisent tandis qu’Amazon les analyse de manière intensive. Ce « pure player » est expert dans l’intégration, l’exploitation des données et le développement d’applications spécialement conçues pour l’Internet des Objets. Cette expertise particulière lui permet d’avoir une longueur d’avance et d’affiner ses stratégies en matière d’efficacité et de réduction de coûts, de relever le niveau de service proposé ou de proposer de nouveaux services plus ciblés, de consolider la relation client.

1.4.3.3. Des services d’une efficacité opérationnelle

L’Internet des Objets (IoT) génère des gains de productivité non négligeables ainsi qu’une efficacité opérationnelle aux entreprises qui maîtrisent à la perfection les rouages. En matière de distribution, ce phénomène est un excellent outil pour optimiser la gestion des commandes, de stockage et de transport. La performance de la chaîne d’approvisionnement d’Amazon s’explique par l’usage de milliers de robots intelligents qui veillent à ce que la préparation des commandes soit rapide et efficace. En étant connectés au système central de commandes, ces robots naviguent à travers toute la plateforme par le biais des codes RFID, pour faire diminuer considérablement les coûts de picking. Toutefois, les atouts de l’Internet des Objets ne se limitent pas uniquement à l’efficacité opérationnelle puisqu’il est avant tout un excellent instrument pour innover, pour envisager son activité sous de nouveaux aspects, pour se différencier et devancer ses concurrents, éliminant par la même occasion le risque de désintermédiation.

1.4.3.4. Ciblage optimisé des clients

Dans le commerce de détail, l’IoT fait son chemin puisque désormais il est possible d’analyser le comportement des clients de façon automatique, efficace et discrète grâce au développement des appareils électroniques spécialisés (cellulaires intelligents, Wifi, Technologie Bluetooth, Radiofréquence IRF, etc.) à installer dans les rayons ou à des endroits stratégiques. Les informations recueillies permettent aux distributeurs de retracer le parcours d’achat des consommateurs et de déterminer leur fréquence de fréquentation ainsi que les produits achetés de manière récurrente en consultant l’historique des achats, les cartes de fidélité, les profils des utilisateurs, etc. Selon une étude menée en 2014 par le cabinet Deloitte sous l’initiative du Conseil canadien du commerce du détail : « Le magasin n’est plus simplement un magasin, mais un point de convergence des opinions, des évaluations, des médias sociaux, de la technologie mobile, des attentes, de l’expérience, de la technologie et des attitudes, ce qui crée des connexions. » (Deloitte et Conseil canadien du commerce de détail, Omni-channel: Rethink, reshape, revalue – Retail Study 2014, p. 12.). Des informations plus détaillées sont encore possibles grâce à l’analyse des renseignements hors ligne provenant de la navigation en ligne des consommateurs, les habitudes de déplacement (GPS), des réseaux sociaux, etc. La centralisation des données en ligne (à l’intérieur du magasin) et hors ligne (en dehors du magasin) permet d’affiner en profondeur le profilage des consommateurs et de mettre en place des stratégies marketing plus efficaces et plus ciblées, répondant exactement à leurs besoins et attentes.

Si auparavant la relation client était l’apanage des distributeurs, cette situation est en train d’évoluer avec l’introduction de l’IoT. Avec l’avènement des objets connectés, de nouveaux acteurs provenant d’autres secteurs souhaiteront avoir accès à la relation client à l’instar des industries. L’Internet des Objets offre une multitude de points de contact avec les clients permettant d’interagir avec eux en tout temps, et ainsi de consolider la relation avec eux. Les marques peuvent ainsi suivre et examiner ces points de données (par exemple par l’intégration de tags RFID) et brosser un portrait des comportements des consommateurs. Cette collecte d’informations sur le flux des ventes et le niveau des stocks en magasin, leur permet de rectifier leur politique par zone et en temps réel, et d’adapter leur logistique, leurs promotions ou leurs messages publicitaires.

  1. Les relations clients-fournisseurs

2.1. Consommateur/client : acteur majeur de la production

Avec l’ubérisation qui prône une vision plus dispersée de l’économie actuelle, le consommateur dispose désormais de la possibilité d’être acteur majeur de la production en mettant son bien inactif à la disposition d’un autre consommateur qui en a besoin pour un moment. Cet échange de bons procédés part d’une volonté de changer le modèle économique actuel en privilégiant les échanges de pair à pair, et de profiter d’une administration en commun, sans passer par les Institutions et organisations en place.

Cette nouvelle économie est une forme d’idéologie qui invite le consommateur au bricolage, en d’autres termes, à agir et ne plus être un consommateur passif mais de passer au rang de producteur. « Internet n’a pas seulement permis la mise en œuvre de relations plus horizontalisées qui facilitent la collaboration ; il révèle aussi l’image du bricoleur que chacun peut être (bricoleur dans le monde numérique et/ou bricoleur dans le monde analogique) » remarque David VALLAT.

Ainsi, le bricoleur se forge une expérience à la sueur de son front avec les moyens à sa disposition ; il est ainsi en mesure d’effectuer plusieurs tâches mais inapte à les coordonner de manière à produire à bon escient. A l’inverse, l’ingénieur-producteur classique subordonne toutes les tâches à exécuter de manière à obtenir des matières premières ou des outils conçus intelligemment pour la mise en œuvre de son projet. « Le bricoleur ne cherche pas à comprendre l’ordre derrière le chaos mais simplement à dialoguer avec le monde, à « bidouiller » (par essai/erreur) des solutions (ancrées à des contextes spécifiques) qui contribuent à mieux cerner les problèmes » David VALLAT.

En bref, l’économie collaborative répond au mieux aux aspirations des consommateurs qui prennent désormais part active au développement durable, avec comme système d’administration, un bien en commun.

2.2. Le risque de désintermédiation

Ce nouveau modèle économique comporte néanmoins des risques. En effet, l’ubériseur, l’intermédiaire qui met en relation directe le fournisseur de biens ou services et le client final, pourrait être écarté si les deux parties viennent à sympathiser au fil du temps et trouver une entente qui leur profite. C’est en instaurant une relation de confiance et un véritable engagement que sera assurée la pérennité de cette économie de partage.

A l’heure de l’ubérisation actuelle où les consommateurs finaux deviennent également des fournisseurs de produits ou services, la relation clients-fournisseurs aura donc complètement changé pour la société ubérisée de demain.

  • Une relation privilégiée entre consommateurs et marques

Par ailleurs, avec l’essor phénoménal du commerce électronique, les acteurs traditionnels sont en pleine mutation. Dans la volonté de se démarquer et de se rapprocher un peu plus des consommateurs, les marques se détachent petit à petit des enseignes pour se tourner de plus en plus vers la vente directe. Comme c’est le cas de la marque Evian qui a décidé de changer radicalement son réseau de vente en commercialisant directement ses bouteilles d’eau auprès de ses clients. Grâce au service « Evian chez vous », le client peut commander en ligne et recevoir directement ses bouteilles chez lui.

  1. Le rôle de l’Etat

Comme nous l’avons vu dans nos analyses précédentes, la mutation vers l’ubérisation de l’économie semble inévitable. L’Etat devrait mettre tout en œuvre pour permettre une intégration en douceur pour que le système déjà affaibli, puisse s’accoutumer petit à petit, afin d’éviter des déchirures dans le tissu social.

« Nos Institutions publiques ont aussi une lourde responsabilité pour adapter notre économie et notre société à ces bouleversements : en révisant le code du travail pour protéger les nouveaux acteurs de l’économie dite collaborative, en faisant en sorte que ces nouveaux business ne soient pas constamment en porte-à-faux avec la loi comme ce fut le cas avec UberPop… » comme le souligne Bruno TEBOUL, auteur du livre « Ubérisation=Economie déchirée ? » lors d’une interview dans Capital.fr.

Pour le moment, cette nouvelle économie profite de l’imbroglio sur les lois règlementaires pour contourner habilement certains prélèvements fiscaux et cotisations sociales. L’Etat doit donc remettre tout le système à plat et colmater certaines brèches du système ouvertes par la libéralisation de l’économie, pour ne pas encore accentuer le manque à gagner que les Institutions Publiques subit et qui fragilise l’équilibre des systèmes actuels de redistribution et de protection sociale.

Il est primordial que l’Etat ainsi que les acteurs du numérique et des enseignes traditionnelles se concertent pour la mise en place d’une règlementation ingénieuse qui profite à tous, en d’autres termes, qui puisse concilier les atouts de cette nouvelle forme d’échange et la protection des intérêts des individus. Ils pourront ainsi définir ensemble les meilleures manières d’appréhender au mieux les enjeux et les bénéfices que l’ubérisation doit apporter à tous.

 

 

 

 

Chapitre 4 : L’UBERISATION : FEU DE PAILLE OU VERITABLE REVOLUTION ?

 

Malgré son chiffre d’affaires en forte croissance, la nouvelle économie de disruption qu’est l’ubérisation n’a pas encore démontré la viabilité de son modèle économique à long terme. Il est donc trop tôt pour avancer une hypothèse selon laquelle ce serait une véritable révolution. Mais une chose est sûre, cette figure emblématique de l’économie de partage a réussi à remettre en question la stabilité et la pérennité des structures traditionnelles qui ont toujours tablé sur leurs décennies de position dominante. Mais pour répondre de manière succincte à notre problématique, il convient de définir ce qu’est la révolution.

  1. Définition

Qui dit révolution dit introduction de changements majeurs et notamment d’importants cycles d’innovations qui affectent profondément, non seulement la production industrielle mais également la dynamique économique dans son ensemble, incluant la dynamique sociétale. En d’autres termes, toutes révolutions se caractérisent par un bouleversement radical des idées, des attitudes, des modes de vie, de communication, de travail… En somme, elles induisent une transformation totale du système technique global pour influencer toute la société.

  1. Les différentes révolutions

La première révolution technique fut née vers la fin du quinzième siècle avec l’apparition de la machine typographique. La deuxième grande révolution technique est celle de l’ère industrielle du 19è siècle qui a vu l’introduction de deux innovations techniques révolutionnaires tant mécaniques (usage généralisé du métal, de la machine à vapeur, du charbon, etc.) qu’énergétiques (électricité, pétrole). Elle a transformé une société fondée sur l’agriculture et l’artisanat en une société plus mécanisée. Et la dernière révolution pourrait être celle dont nous sommes témoins à l’heure actuelle et qui se base sur la révolution numérique. Pour beaucoup, cette troisième révolution a débuté dès la fabrication des ordinateurs, des logiciels, et puis qui se poursuit plus tard avec la démocratisation de l’informatique ainsi que l’apparition d’Internet, la messagerie, bref du Web en général. L’essor s’intensifie depuis les années 2000 et 2010 avec une nouvelle dimension du Web ainsi que des réseaux sociaux, l’application massive des terminaux mobiles, le développement de la digitalisation et de l’Internet des Objets. Plus d’un demi-siècle après, nous pouvons dire que le mouvement d’informatisation semble atteindre son point de basculement vers une ère complètement révolutionnaire, celle du numérique. Mais comme tout changement, cette appellation ne fait pas l’unanimité. D’un côté, les « technophiles » la trouvent bien méritée et de l’autre côté, les « technophobes » la contestent, arguant qu’elle n’est que l’aboutissement logique de la révolution industrielle.

 

  1. Caractéristiques de la révolution numérique

Dans cette toute nouvelle révolution, les données représentent la matière première indispensable pour que l’ubérisation s’épanouisse. Comme nous l’avons précédemment, ces données proviennent des innombrables objets connectés qui envahissent notre quotidien et dont les industries ainsi que les entreprises exploitent à volonté puis les transforment afin de produire des produits et services adaptés aux réels besoins des consommateurs d’aujourd’hui. Comparable au pétrole brut de la seconde révolution industrielle, les données ne sont guère exploitables et valorisées que lorsqu’elles ont été transformées et analysées. Toutefois, cette comparaison est très restrictive dans la mesure où le pétrole, en tant que combustible fossile, constitue une ressource naturelle limitée non renouvelable alors que les données s’apparentent plus aux énergies renouvelables, donc infinies, qui n’ont pas encore démontré tout leur potentiel. Elles sont recyclables à volonté et gardent même leur valeur ajoutée quelles que soient les manières dont elles sont exploitées. En somme, l’ubérisation est en franche rupture avec notre mode de vie d’avant et transforme même notre relation avec le monde qui nous entoure. Elle ouvre de nouvelles perspectives aux acteurs en quête d’alternatives sociales et économiques.

  1. Avenir de l’économie actuelle ?

Mais pour que cette économie disruptive soit l’avenir de l’économie, elle doit répondre à quatre facteurs fondamentaux pour s’assurer une pérennité.

Tout d’abord, elle doit réussir à atteindre un certain seuil d’utilisateurs, que ce soit du côté des consommateurs finaux que celui des fournisseurs de produits et services, afin de pouvoir équilibrer l’offre et la demande. Par ailleurs, les ubériseurs doivent faire en sorte que la relation  entre les fournisseurs et les utilisateurs soit basée sur une relation de confiance durable et avantageuse pour tous les acteurs. En outre, il est essentiel de savoir s’adapter rapidement aux entraves inévitables telles que les lois règlementaires qui ne cesseront d’évoluer en raison des perturbations générées par l’ubérisation. Pour cela, il est impératif d’être apte à prendre les devants et se diversifier sous peine de mettre la clé sous porte rapidement. En parallèle, les entreprises traditionnelles ne se laisseront pas écraser et prendront les mesures nécessaires pour se redresser. La meilleure solution, et qui commence à se profiler à l’horizon, est la possible hybridation entre les nouveaux acteurs disruptifs et les structures classiques comme c’est le cas par exemple d’Amazon (pure player), qui pour assurer sa survie future, recherche un partenariat avec les acteurs traditionnels. Dans ce cas, nous pouvons affirmer que l’ubérisation se présente comme un mal nécessaire pour évoluer face à la mutation d’un marché initiée par les consommateurs finaux pour leurs propres bénéfices. Mais cette transition obligée nécessite un encadrement strict pour éviter certaines dérives.

 

 

 

 

CONCLUSION

 

En guise de conclusion, ce mémoire de recherche permet de répondre si l’ubérisation de la grande distribution a déjà commencé. Pour trouver des éléments de réponse, nous avons exploré plusieurs pistes de recherche qui nous ont conduits vers l’étude d’un produit non-alimentaire en phase d’être ubérisé et d’un produit alimentaire qui n’est pas encore vraiment ubérisé. Nous avons également mis en exergue les forces et faiblesses de la grande distribution française face à l’entrée sur le marché d’un géant du e-commerce. Nous avons également pu comparer les habitudes de consommation ainsi que les modèles de distribution entre les générations X et Y puis Z de demain.

C’est donc à travers ces axes stratégiques que nous avons pu faire ressortir de grandes idées selon lesquelles cette nouvelle économie en franche rupture avec les fondements mêmes de la grande distribution depuis des décennies, est en train de gagner bel et bien le marché. Le développement prodigieux des technologies numériques reconfigure l’environnement aussi externe (besoins, concurrence) qu’interne (stratégies, processus) des distributeurs classiques. Il constitue pour ces derniers un phénomène disruptif à plusieurs niveaux : modifications profondes des besoins et attentes des consommateurs (modes de consommation), optimisation des standards de productivité, révision du modèle organisationnel et des infrastructures, accroissement de l’intensité concurrentielle, transformation numérique des processus opérationnels de bout en bout, amélioration des canaux de vente, innovation incessante des produits et services proposés, etc. La réussite d’une enseigne de distribution se mesure à sa capacité à proposer une offre exceptionnelle qui repose sur cinq facteurs essentiels : « le prix, la praticité, l’expérience client, le service et l’offre » (McKinsey France septembre 2014 : « Accélérer la mutation numérique des entreprises : un gisement de croissance et de compétitivité pour la France ». Etant donné que le numérique a de grandes chances de remettre en cause ces cinq éléments, ses effets probables sur la performance globale des enseignes pourraient être conséquents. Dans cette optique, la grande distribution fait partie des secteurs les plus susceptibles d’être ébranlés par l’ubérisation, ce qui change profondément la nature même de la relation existant entre les acteurs traditionnels de la distribution et les clients/consommateurs.

Toutefois, son expansion et les changements que l’ubérisation induit, ne se ressentent pas sur tous les niveaux puisque comme nous l’avons vu dans les parties précédentes, les consommateurs hésitent encore à commander des aliments frais en ligne.

L’essor phénoménal de l’e-commerce et des nouvelles technologies ne signifie pas pour autant faire une croix sur les commerces physiques. Certes, la grande distribution fait face à une mutation profonde, de nouveaux entrants sont en train de menacer la suprématie des distributeurs traditionnels sur le marché et notamment sur l’accès privilégié aux consommateurs. Mais elle a prouvé à de maintes reprises qu’elle est assez forte pour se redresser et faire front à tous les obstacles. Pour ne pas que les enseignes établies voient petit à petit la fidélité de leurs consommateurs s’éroder à mesure que de nouveaux concurrents s’immisceront sur la place, il est dans leur intérêt d’anticiper les changements à venir et d’adopter résolument et rapidement une approche proactive. Dès lors, l’adaptation au numérique devient le mot d’ordre urgent pour les enseignes qui sont déterminées à anticiper les changements et à saisir toutes les opportunités à leur portée.

Comme nous l’avons dans la deuxième partie, une baisse du volume pourrait entraîner la fermeture de certains magasins. Et ce sont les distributeurs physiques qui réussiront à travers l’omni-canal en optimisant la coexistence entre le développement des ventes en ligne et celui en magasin, qui garderont une longueur d’avance. Ce canal de distribution est une opportunité formidable pour les enseignes conventionnelles de reprendre la main face aux ubériseurs. Dans la mesure où la technologie est au cœur de nombreux enjeux, il est plus que jamais essentiel de l’intégrer dans les lieux de vente physiques pour que la Grande Distribution puisse mettre en place des stratégies digitales plus ciblées afin de répondre aux besoins des consommateurs et de les inciter à fréquenter de nouveau les magasins. Rester en marge du numérique n’est donc pas une option, au contraire, c’est une belle opportunité pour les enseignes traditionnelles de mieux appréhender les attentes des consommateurs hyperconnectés d’aujourd’hui et de demain et d’y répondre de manière précise.

La question est de savoir si avec l’accélération du développement de l’internet des objets, qui s’annonce comme une véritable révolution, les modèles de distribution traditionnels seront profondément affectés et s’ils doivent revoir en profondeur leur positionnement historique.

 

 

 

 

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  • BOUCHARD A. CANU S., Capgemini Consulting, Journal of Marketing, Ubériser votre business, une transformation inévitable. Hiver 2015/2016.

https://www.fr.capgemini.com/resource-file-access/resource/pdf/journal_of_marketing_revolution_5_0.pdf

  • DESSE R-P., Les centres commerciaux français, futurs pôles de loisirs ?, 2002.

http://www.cairn.info/revue-flux-2002-4-page-6.htm

  • HANNE H., LEFRANC O., Les 10 premières enseignes sur le marché mondial de la grande distribution (classement, résultats et stratégies), Novembre 2014.

http://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/dgccrf/documentation/dgccrf_eco/DGCCRF__eco32.pdf

  • La Factory NPA, Stratégies digitales des acteurs du Bricolage en France, 27 août 2014.

http://www.lafactory-npa.fr/strategie-digitale-contenus/2014/08/27/etude-strategies-digitales-des-enseignes-bricolage-leroymerlin-castorama/

  • Le Figaro, Cinquante ans de consommation en France, Edition 2009.

http://www.lefigaro.fr/assets/pdf/consommation_insee.pdf

  • Monitor DELOITTE, Ubérisation : Partager ou mourir !?, Juillet 2015.

http://www2.deloitte.com/content/dam/Deloitte/fr/Documents/strategy/deloitte_etude-economie-on-demand_juillet-15.pdf

  • Rapport de P. TERRASSE au Premier Ministre sur le développement de l’économie collaborative, février 2016.

http://www.gouvernement.fr/sites/default/files/liseuse/6421/master/projet/Rapport-de-Pascal-Terrasse-sur-le-développement-de-l-économie-collaborative.pdf

  • Rapport du gouvernement, Le commerce du futur, Novembre 2009.

http://www.entreprises.gouv.fr/files/files/directions_services/etudes-et-statistiques/prospective/commerce-du-futur/commerce-du-futur.pdf

  • SAUVEUR F., Comprendre la Grande Distribution, juillet 2013.

http://up-magazine.info/index.php/societe/mutation-des-services/1689-comprendre-la-grande-distribution-mutations-en-vue-1ere-partie

  • Site de l’INSEE, Le commerce du bricolage : sur un marché dynamique, des acteurs toujours plus costauds, N°1386 –Janvier 2012.

http://www.insee.fr/fr/ffc/ipweb/ip1386/ip1386.pdf

 

  • SUPPLY CHAIN MAGAZINE, Grande Distribution : Quel modèle pour demain ?, Avril 2010.

http://www.supplychainmagazine.fr/TOUTE-INFO/Archives/SCM043/Enquete-43.pdf

 

  • UNIBAL, Le marché français du Bricolage en 2014

http://www.unibal.org/images/unibal/PDF/Teaser_Le_marche_francais_du_Bricolage_2014.pdf

  • WYMAN O., L’Internet des Objets, 2015.

http://www.oliverwyman.com/content/dam/oliver-wyman/global/en/2015/jun/IoT%20Part%201_screen.pdf

 

 

 

TABLE DES MATIERES

SOMMAIRE.. 1

REMERCIEMENTS. 3

INTRODUCTION.. 4

PREMIERE PARTIE : CADRE ET CONTEXTE DE L’ETUDE.. 6

Chapitre 1 : LES PREMICES DU CONCEPT D’UBERISATION.. 7

  1. L’innovation. 7

1.1.       Définition. 7

1.2.       L’impératif d’innovation. 8

1.3.       Innovation et économie numérique. 9

  1. La digitalisation. 9

2.1.       De l’ère industrielle à l’ère digitale. 10

2.2.       L’enjeu de la numérisation. 10

2.3.       Le big data. 11

2.4.       Un impératif dans l’entreprise moderne. 12

  1. La libre concurrence. 12

3.1.       Définition. 12

3.2.       Opportunités à saisir 13

3.3.       Avantages pour les consommateurs. 13

3.4.       Désavantages. 14

Chapitre 2 : LE CONCEPT D’UBERISATION.. 15

  1. Source du concept et son évolution historique au niveau mondial 15

1.1.       La source du concept 15

1.1.1.       Le déclenchement 15

1.1.2.   Un processus bien maîtrisé. 16

1.1.3.   Un concept très attrayant 16

1.2.       Son évolution historique dans le monde. 17

1.2.1. La force du concept 17

1.2.2. Mais pourquoi un tel engouement ?. 18

  1. Motivation sociétale. 18
  2. Motivation économique. 19
  3. Motivation d’expérience en tant que clients. 19
  4. Motivation technologique. 19

1.2.3. Un succès qui gagne de nombreux secteurs. 20

1.2.4. Les limites de l’ubérisation. 21

1.2.5. Disruption numérique ?. 21

  1. Les principes fondateurs de l’ubérisation. 22

2.1.       Son fondement 22

2.2.       Les nouvelles formes économiques. 23

2.3.       Une reconfiguration du modèle économique historique. 24

2.3.1. La désintermédiation. 24

2.3.2. Un monopole à l’ère du numérique. 25

2.3.3. Les impacts sur l’emploi 25

DEUXIEME PARTIE : OBSERVATION ET ANALYSE DES PRATIQUES DANS LA GRANDE DISTRIBUTION   27

Chapitre 1 : PRESENTATION DE LA METHODOLOGIE. 28

Chapitre 2 : ETUDE DE CAS. 31

  1. Etude sur le cas d’un produit non-alimentaire en phase d’être « ubérisé » : la perceuse. 31

1.1. Panorama global du marché du bricolage. 31

1.2. Evolution des modes de consommation. 33

1.3. Processus d’ubérisation d’un produit non-alimentaire : « la perceuse » dans le domaine du bricolage  34

1.4. Les stratégies adoptées par chaque enseigne. 34

1.4.1. Plateforme communautaire. 35

1.4.2. Le concept du Click and Collect 37

1.4.3. L’Alliance avec une start-up. 38

1.5. Un marché toujours stable malgré les nouvelles pratiques. 38

  1. Etude sur le cas d’un produit alimentaire non encore « ubérisé » : les aliments frais. 39

2.1. Historique des modèles de distribution agroalimentaire française. 39

2.2. Les hard discounters. 41

2.3. L’évolution du comportement des consommateurs. 41

2.4. Le contexte actuel 42

2.5. Le commerce électronique. 43

2.5.1. Définition. 43

2.5.2. Le marché du e-commerce. 43

2.5.3. Qu’en est-il de l’alimentaire ?. 44

2.5.4. Un e-commerce à tendance « low cost ». 44

2.6. Le concept de Drive. 45

2.6.1. Pourquoi une telle expansion ?. 45

2.6.2. Les modèles de Drive. 45

2.6.3. Son évolution. 46

2.6.4. Les adeptes du concept 47

2.6.5. Les limites du Drive. 48

2.7. Le concept du Click et Collect 49

2.8. Le commerce via le mobile. 49

2.8.1. Le mobile : un atout majeur pour faire des achats en ligne. 50

2.8.2. Des consommateurs de plus en plus mobiles. 50

2.8.3. Un changement dans le processus d’achat 51

2.8.4. Des opportunités pour les enseignes. 51

2.8.5. La géolocalisation. 52

2.8.6. Géolocalisation : un potentiel à exploiter pour la distribution. 52

Chapitre 3 : ANALYSE SWOT DE L’UBERISATION DANS LE MILIEU DE LA GRANDE DISTRIBUTION   54

  1. Les impacts positifs. 54

1.1. Les Forces. 54

1.2. Les Opportunités. 56

  1. Les impacts négatifs. 57

2.1. Les Faiblesses. 57

2.2. Les Menaces. 58

2.2.1.       Ce qui fait d’Amazon une menace concurrentielle réelle. 58

2.2.2.       Que penser du concept d’Instacart ?. 59

Chapitre 4 : PROPOSITIONS ET PRECONISATIONS. 61

TROISIEME PARTIE : DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS. 62

Chapitre 1 : COMPARAISON ENTRE LES PRATIQUES ACTUELLES ET CELLES DES ANNEES « PRE-UBERISATION » EN MATIERE DE DISTRIBUTION.. 63

  1. Les pratiques des années « pré-ubérisation » dans la Grande Distribution française. 63
  2. Les pratiques actuelles dans la Grande Distribution. 63
  3. Les faiblesses de la grande distribution d’aujourd’hui 64

Chapitre 2 : COMPARAISON ENTRE LE MODELE AMERICAIN ET LA CONCEPTION EUROPEENNE   66

  1. La conception Européenne. 66
  2. Le centre commercial moderne américain : le « Mall ». 67

Chapitre 3 : LA SOCIETE UBERISEE DE DEMAIN : QUELLES VALEURS POUR LES GENERATIONS FUTURES EN L’ETAT ACTUEL DES CHOSES. 69

  1. La place de la technologie. 69

1.1. Emergence d’un consommateur digital 69

1.2.       La génération « Y ». 69

1.2.1.       Définition. 69

1.2.2.       Une génération hyper-connectée. 69

1.2.3.       Une génération consumériste. 70

1.2.4.       Une génération plus sociale. 71

1.3.       La génération « Z ». 71

1.4.       L’Internet des objets. 72

1.4.1.       Définition. 72

1.4.2.       Un concept révolutionnaire. 72

1.4.3.       Les impacts. 74

1.4.3.1 Reconfiguration des modèles économiques. 74

1.4.3.2 Les données au centre des enjeux. 75

1.4.3.3. Des services d’une efficacité opérationnelle. 76

1.4.3.4. Ciblage optimisé des clients. 76

  1. Les relations clients-fournisseurs. 77

2.1. Consommateur/client : acteur majeur de la production. 77

2.2. Le risque de désintermédiation. 78

2.3. Une relation privilégiée entre consommateurs et marques. 78

  1. Le rôle de l’Etat 78

Chapitre 4 : L’UBERISATION : FEU DE PAILLE OU VERITABLE REVOLUTION ?. 80

  1. Définition. 80
  2. Les différentes révolutions. 80
  3. Caractéristiques de la révolution numérique. 81
  4. Avenir de l’économie actuelle ?. 82

CONCLUSION.. 83

BIBLIOGRAPHIE.. 86

WEBOGRAPHIE.. 88

TABLE DES MATIERES. 90

 

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