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Mémoire portant sur le Front National : Les stratégies de communication d’un parti politique en pleine mutation

Sujet : Front National : stratégie(s) de communication d’un parti politique en pleine mutation

Titre : L’avènement d’une nouvelle communication politique : le cas de la dédiabolisation du FN

Problématique : En quoi les outils de communication mis en place par le FN permettent-ils de toucher un nouvel électorat et de dédiaboliser son image ?

Introduction

Aujourd’hui, et peut-être même depuis toujours, politique et communication sont indissociables. Pour pouvoir faire de la politique, il faut communiquer avec l’électorat, être présent sur tous les fronts et savoir se distinguer des autres partis en termes de politique de communication. La communication est donc politique, comme la politique peut être perçue comme une sorte de communication. Et le rôle que cette dernière joue dans l’univers politique est incontestable et avéré : « Nécessité d’unifier autour de valeurs communes des États à la forte démographie, accroissement de l’individualisme et bris des anciens liens sociaux et idéologiques, développement technologique : pour toutes ces raisons – et d’autres – l’exercice du pouvoir est de plus en plus dépendant des échanges communicationnels.1 »

Le pouvoir, la politique et la communication sont intrinsèquement liés. La communication politique, elle, ne permet pas seulement de véhiculer l’image et les idéaux d’un parti mais sert également à toucher ses cibles. Pour ce faire, on note l’existence de trois partis pris impliqués par cette dernière : le tenant du pouvoir, c’est-à-dire celui qui gouverne ou le parti politique, l’électorat que l’on veut toucher et les médias qui sont actuellement le moyen de communication politique le plus utilisé au monde. Ces trois intervenants sont souvent cités dans les différentes définitions que l’on donne à la communication politique dont celle de Gerstlé2 (2004) qui décrit cette dernière comme étant « L’ensemble des pratiques et techniques, représentationnelles et discursives, par lesquelles s’instaurent un échange et une interaction dans et entre les principales catégories de la société, à savoir les acteurs politiques, les citoyens et les intermédiaires issus de l’univers médiatique, des sondages d’opinion et des firmes chargées de gérer l’image des hommes politiques3 »

La communication politique consiste donc en un échange entre acteurs politiques et citoyens, étayé et diffusé par les médias. Chaque parti politique essaie tant bien que mal de toucher ses cibles en usant des Nouvelles Technologies d’Information et de Communication (NTIC) et de se démarquer en étant inventif et en rivalisant d’ingéniosité dans les démarches de communication politique. Le Front National en fait partie, et notre mémoire consistera en l’étude et l’analyse des outils de communication qu’il met en place pour toucher un nouvel électorat et dédiaboliser son image. En effet, malgré une popularité accrue et des partisans de plus en plus nombreux, le FN, parti politique fondé par Jean-Marie Le Pen et actuellement dirigé par sa fille Marine Le Pen, a une image controversée qui l’incite à procéder à cette dédiabolisation.

Quels sont les facteurs sociopolitiques qui font que davantage de personnes se sentent « proches » des idées du FN ? Quels sont les mécanismes de communication et d’influence qui font que de plus en plus de gens se raccrochent au vote frontiste ? Quelle est la véritable différence communicationnelle et la « valeur ajoutée » du FN par rapport aux autres grands partis politiques ? En somme, en quoi les outils de communication mis en place par le FN permettent-ils de toucher un nouvel électorat et de dédiaboliser son image ?

Afin de résoudre cette problématique, nous avons choisi d’illustrer ce mémoire par un plan décomposé en deux parties distinctes. Intitulée « Apparition des populismes et du Front National en Europe », la première partie relatera des généralités autour du concept de communication politique, des mécanismes de communication populiste et du Front National, de ses principaux acteurs et de sa communication. Elle nous servira de préambule à la seconde partie qui étudiera plus en profondeur notre sujet. Elle sera divisée en trois chapitres dont le premier relatera des mécanismes de communication politique, plus précisément des moyens utilisés par les partis politiques pour tenter de séduire l’opinion/ l’électorat. Le second chapitre sera orienté vers les mécanismes de communication populiste, notamment l’usage des partis extrémistes des outils de communication. Le dernier chapitre de cette première partie sera consacré au cas du FN et parlera de ses principaux acteurs ainsi que de sa communication.

La seconde partie du mémoire entrera dans le vif du sujet et tournera autour du « Front National, un tournant communicationnel ». Elle sera subdivisée en trois chapitres dont le premier sera focalisé sur le changement d’image du FN, le second sur le FN en tant que parti sur tous les fronts et le dernier sur l’ère de la dédiabolisation. Cette seconde et dernière partie du mémoire nous permettra de voir comment le FN se sert de la communication politique pour dédiaboliser son image.

Première partie : Apparition des populismes et du Front National en Europe

Chapitre 1 : Les mécanismes de communication politique : les moyens utilisés par les partis politiques pour tenter de séduire l’opinion / l’électorat

Depuis plusieurs années, et peut-être même depuis jadis, la politique ne peut plus se passer de la communication. La communication politique est devenue un puissant instrument pour se faire connaître, vaincre la concurrence ou régner sur le peuple. Ce premier chapitre relatera de ses différents mécanismes, plus précisément des moyens dont les partis politiques usent pour tenter de séduire l’opinion ou l’électorat. Afin de bien s’immerger dans le contexte, nous allons le débuter par une définition des notions et concepts essentiels en communication politique.

  1. Définitions

    1. Qu’est-ce que la communication politique ?

Communication rime avec politique. Communiquer signifie échanger ou partager des informations, non seulement dans le but d’informer, mais aussi de faire passer un message. En politique, communiquer a plusieurs sens, et la communication politique est une notion qui a bine évolué au fil du temps. Wolton (1989) évoque cette évolution de la définition de la communication politique qui, au départ, « a désigné l’étude de la communication du gouvernement vers l’électorat (ce que l’on appelle aujourd’hui la communication gouvernementale) ; puis l’échange des discours politiques entre les hommes politiques au pouvoir et ceux de l’opposition tout particulièrement lors de campagnes électorales.4 »

Dans cette définition de Wolton (1989), nous constatons que la communication politique a d’abord été considérée comme une étude et qu’elle n’a impliqué que deux parties : le gouvernement et l’électorat. La communication a surtout été faite par le gouvernement à l’intention de l’électorat, et non l’inverse. La seconde partie de la définition nous montre que la communication est devenue un échange de discours politiques impliquant les hommes politiques d’un côté et leurs opposants, de l’autre. Elle est donc devenue un instrument lors de campagnes électorales, un outil servant à deux partis d’échanger et surtout de s’affronter.

Plus tard, la communication politique a pris un tournant décisif avec l’entrée en jeu des médias. Les définitions actuelles de ce concept tendent vers l’implication des médias dans le processus. Si nous nous référons toujours à Wolton (1989), il propose plusieurs définitions de la communication politique qui prennent en compte les médias, dont voici un échantillon :

      • « Intuitivement, la communication politique évoque tout ce qui a trait à la production et l’échange des discours politiques tenus parles différents acteurs et répercutés par les médias.5 »

      • « Aujourd’hui, la communication politique englobe l’étude du rôle de la communication dans la vie politique au sens large en intégrant aussi bien les médias que les sondages, le marketing politique et la publicité avec un intérêt particulier pour les périodes électorales6 »

      • « L’espace où s’échangent les discours contradictoires des trois acteurs qui ont la légitimité à s’exprimer publiquement sur la politique et qui sont les hommes politiques, les journalistes et l’opinion publique au travers des sondages7 »

      • « La communication politique est un processus indispensable à l’espace politique contemporain en permettant la confrontation des discours politiques caractéristiques de la politique : l’idéologie et l’action pour les hommes politiques, l’information pour les journalistes, la communication pour l’opinion publique et les sondages.8 »

Ces quatre définitions nous montrent que la communication politique est actuellement dépendante des médias. Si elle a pour but de communiquer, cette communication est diffusée au public par les médias qui ont désormais un rôle central dans le processus de communication et d’information. Les médias participent à la formation de l’opinion publique. Ils permettent d’étudier l’écart entre les préoccupations de l’opinion publique et la façon dont les hommes politiques se comportent. Ils servent également à analyser l’influence des sondages sur le public.

1 Viau E., Gingras, A.-M. (dir.), « La communication politique : état des savoirs, enjeux et perspectives », Communication, Vol. 24/1, 2005, pp. 266-270.

2 Jacques Gerstlé est professeur au département de science politique de l’Université Paris 1 (Panthéon-Sorbonne), membre du Centre de Recherche Politique de la Sorbonne (Umr-CNRS) et responsable du Diplôme d’Etudes Supérieures Spécialisées en Communication Politique et Sociale.

3 Gerstlé J., La communication politique. Paris : Armand Colin, 2004.

4 Wolton D., La communication politique : construction d’un modèle, Hermès, La Revue, n°4, 1989, p. 28.

5 Ibid.

6 Ibid.

7 Ibid., p. 30

8 Ibid., p. 35

Mémoire de fin d’études de 61 pages.

24.90

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