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Mémoire portant sur l’empowerment des usagers dans un contexte interculturel (CHU Migrants)

NOM Prénom

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Favoriser l’empowerment des usagers dans un contexte interculturel

Le CHU Migrants

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CAFERUIS 2017

 

 

ATTESTATION DE NON-PLAGIAT

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« Je soussigné, Badiane Malick, certifie que le contenu de ce mémoire est le résultat de mon travail personnel.

Je certifie également que toutes les données, raisonnements et conclusions empruntés à la littérature, sont exactement rapportés, cités, mentionnés dans la partie références.

Je certifie enfin que ce mémoire, totalement ou partiellement n’a jamais été évalué auparavant et n’a jamais été édité ».

 

Signature

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Liste des sigles

 

 

 

ANESM : Agence Nationale de l’Evaluation et de la qualité des Etablissements et services Sociaux et Médico-sociaux

CARRUD : Centres d’Accueil et d’Accompagnement à la Réduction des Risques pour Usagers de Drogues

CASF : Code de l’Action Sociale et des Familles

CASNAV : Centre Académique pour la Scolarisation des enfants allophones Nouvellement Arrivés et des enfants issus de familles itinérantes et de Voyageurs

CHU : Centre d’Hébergement d’Urgence

CIMADE : Comité Inter Mouvements Auprès Des Evacués

COMEDE : COMité pour la santé Des Exilés

CVS : Conseil de la Vie Sociale

ESMS : Etablissement Sociaux et Médico-Sociaux

FLE : Français Langue Etrangère

GIP HIS : Groupement d’Intérêt Public Habitat et Interventions Sociales

OFII : Office Français de l’Immigration et de l’Intégration

OFPRA : Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides

STIF : Syndicat des Transports d’Île-de-France

 

 

Table des matières

 

Introduction. 1

 

1ère partie- Le CHU migrants : accueillir pour les intégrer. 3

A-       La question délicate de la politique sociale à l’encontre des migrants. 4

1)    Une politique entre contrôle et accueil 4

2)    Le droit fondamental au logement 5

3)    La loi 2002-2 : l’individu acteur de son projet 6

4)    L’accompagnement des migrants : entre éthique, morale, droit et déontologie. 7

B-       Un dispositif récent 9

1)    Des bouleversements organisationnels au sein de la structure. 9

2)    Des missions multiples. 10

3)    Une culture d’établissement portée sur des approches innovantes 11

4)    La communication au service d’une variété de pratiques. 12

C-       L’organisation de l’accompagnement des migrants. 13

1)    Le public accueilli 13

2) Une équipe pluridisciplinaire. 14

3)    Les instances de décision collective. 15

4)    Le travail avec les partenaires extérieurs. 16

 

Conclusion 1ère partie. 18

 

2ème partie- Le diagnostic : renforcer la communication interculturelle. 19

A-       Une relation au public de qualité. 20

1)    La question linguistique. 20

2)    Une bonne communication. 21

3)    Une implication perfectible des migrants dans le fonctionnement du CHU.. 23

B-       Une organisation des pratiques imparfaitement adaptée à l’interculturalité. 24

1)    Des zones d’incertitude. 24

2)    Une difficulté à inscrire les pratiques sur le long terme. 25

3)    Des partenaires moins sollicités 26

 

 

C-       Des outils de participation insuffisamment utilisés. 27

1)    Le CVS. 27

2)    Une compréhension imparfaite de la documentation. 28

3)    L’insuffisance des compétences interculturelles. 29

Conclusion 2ème partie. 31

 

3ème partie- Le plan d’action : développer l’empowerment au CHU par un management participatif  32

A-       Mettre en œuvre un dispositif pour améliorer la communication linguistique et interculturelle  33

1)    L’empowerment 33

2)    La mise en place de groupes de travail autour de la communication linguistique et interculturelle  34

3)    La mobilisation des compétences des acteurs externes et internes. 35

B-       Mobiliser les compétences interculturelles pour faire participer davantage les usagers  37

1)    Mettre en place une communication plus visuelle autour des principes et des outils de la loi 2002-2  37

2)    Intégrer les usagers par des activités ludiques. 38

3)    Consulter fréquemment les usagers dans l’organisation des pratiques. 39

C-       L’évaluation. 40

1)    Les indicateurs et les critères d’évaluation. 40

2)    Les outils de l’évaluation. 41

3)    Les étapes de l’évaluation. 42

Conclusion 3ème partie. 43

Conclusion. 44

 

Bibliographie. 45

 

Annexes. 1

 

 

 

 

 

 

 

Introduction

 

J’occupe actuellement le poste de chef de service au sein d’un Centre d’Hébergement d’Urgence (CHU). Il accueille actuellement 250 demandeurs d’asile. Le CHU doit assurer une mise à l’abri temporaire des migrants dans des centres d’hébergement dignes. Il permet aux personnes accueillies de faire le point sur leur situation et aux équipes spécialisées d’effectuer une évaluation. Ce travail s’inscrit dans la perspective d’une orientation vers des structures d’accueil pour demandeurs d’asile, ou de la poursuite de leur parcours migratoire, ou même d’une orientation vers un processus d’aide au retour. Le CHU doit faciliter et fluidifier les démarches administratives pour ceux de ces migrants désireux de demander l’asile, afin de pouvoir les orienter aussi rapidement que possible vers le Dispositif National d’Accueil.

La question de l’accompagnement des migrants se pose avec une certaine acuité dans le contexte actuel. Elle en devient même une priorité politique, ce qui renforce les attentes institutionnelles vis-à-vis du CHU. Les professionnels du CHU doivent ainsi apporter leur soutien sur les questions administratives auxquelles sont confrontés les migrants, mais également sur une multitude d’aspects de la vie quotidienne (économie, psychologie, éducation, …). Les échanges avec les usagers, la communication constituent alors un pilier majeur du dispositif d’accompagnement, mais peuvent s’avérer difficile en raison de la barrière linguistique, et plus largement culturelle.

La qualité de la communication est aussi un préalable nécessaire pour favoriser la demande institutionnelle de mise en œuvre d’une participation accrue des usagers au fonctionnement des établissements sociaux et médico-sociaux. Cependant, pour le CHU, cette démarche se heurte à un problème de communication interculturelle avec les usagers. « La communication interculturelle est l’interaction interpersonnelle entre des membres de groupes qui se différencient respectivement par des niveaux de connaissances et les formes d’expression de l’action symbolique »[1]. Le caractère interculturel du profil des usagers du CHU doit amener à envisager autrement la participation des usagers pour en faire pleinement des acteurs de leur projet. Il s’agit de réfléchir à une organisation des pratiques pouvant améliorer la communication interculturelle et la participation des usagers par une logique d’« empowerment ». Cette notion, sur laquelle nous reviendrons de manière détaillée dans ce mémoire correspond à une volonté d’accorder des prérogatives aux individus pour influer sur leurs conditions de vie.

Ces éléments nous amènent à élaborer la question de départ suivante : dans quelle mesure un cadre intermédiaire peut-il impulser une démarche d’empowerment pour favoriser la participation des usagers au sein d’un CHU ?

 

       Dans un premier temps, il s’agit de présenter le cadre dans lequel s’inscrit la problématique de ce travail en donnant des éléments relatifs à l’évolution des politiques publiques et réglementaires et leurs conséquences sur le CHU. La démarche consiste aussi à décrire le contexte institutionnel, le fonctionnement de l’établissement, l’organisation des pratiques du personnel et les caractéristiques des usagers accueillis,

Je présenterai en deuxième partie un diagnostic de la qualité de la communication interculturelle et de la participation des usagers au sein du fonctionnement du CHU migrants. Il s’appuiera sur diverses ressources institutionnelles en identifiant les atouts et les faiblesses internes tout en analysant les opportunités et les menaces de l’environnement avant de construire et d’engager un plan d’action,

La troisième partie sera consacrée à la conception et à la mise en œuvre du projet qui reposera sur une démarche inclusive, sur un management participatif. Il s’agit également de proposer une évaluation partielle à chaque étape de travail engagé dans une démarche qui pourra ouvrir sur des réajustements et des remédiations. Il convient également de réaliser une évaluation globale qui permettra de mesurer les écarts entre les objectifs visés et l’efficacité du programme opérationnel mis en place.

 

 

 

 

 

 

 

1ère partie- Le CHU migrants : accueillir pour les intégrer

 

La réglementation et l’action du CHU s’inscrivent dans une évolution des politiques publiques à l’encontre des migrants qui a le souci de les accueillir, et de les intégrer.

Cependant, cette thématique demeure délicate car les autorités oscillent entre une volonté de contrôle de ces populations qui ne se trouvent pas en conformité, souvent malgré elles, avec la législation migratoire, et une volonté de respecter la tradition d’accueil de la France comme pays des droits de l’Homme défendant les droits fondamentaux des individus dans la détresse. L’action du CHU s’inscrit aussi dans une évolution des pratiques d’accompagnement des Etablissements Sociaux et Médico-Sociaux (ESMS), en l’occurrence une plus grande individualisation des pratiques visant à mettre les usagers au cœur de leur projet. L’ANESM (Agence Nationale de l’Evaluation et de la qualité des établissements et services Sociaux et Médico-sociaux) rappelle que cette démarche d’accompagnement des publics précaires résulte d’un équilibre entre l’éthique, la morale, le droit et la déontologie.

Même si la politique d’accompagnement des migrants a un certain nombre d’années, le dispositif CHU sous sa forme actuelle demeure récent. Il semble même se trouver dans une situation dans laquelle il cherche encore son fonctionnement organisationnel. Cette démarche est d’autant plus difficile à mettre en œuvre que l’établissement se voit attribuer une multiplicité de missions. Pour répondre à cette demande, la culture ou le projet d’établissement du CHU repose sur une capacité à mettre en place des approches innovantes pour faire face à des défis parfois inédits. Cette flexibilité implique également une adaptabilité constante des pratiques, c’est-à-dire un ajustement qui se fait dans une communication constante avec les usagers dans une démarche d’individualisation de l’accompagnement des personnes accueillies.

Le dispositif CHU correspond à une organisation spécifique de l’accompagnement des migrants. Il s’agit pour les professionnels de pouvoir répondre à la diversité des profils et des besoins du public, ce qui implique une complémentarité des compétences, une équipe pluridisciplinaire. L’interdisciplinarité de l’accompagnement implique aussi une concertation régulière entre les professionnels, d’où l’importance des instances de décision collective comme outil de fonctionnement, ainsi que le travail avec les partenaires extérieurs à l’établissement pour mieux répondre à la diversité des besoins des usagers du CHU.

 

A-   La question délicate de la politique sociale à l’encontre des migrants

 

1)      Une politique entre contrôle et accueil

 

D’un point de vue réglementaire, le Centre d’Hébergement d’Urgence s’insère dans une double logique. L’établissement a une finalité sociale, en l’occurrence fournir un hébergement à des personnes qui en ont urgemment besoin, mais le statut de migrants des usagers conduit également l’établissement à constituer peu ou prou un élément du dispositif de suivi administratif des migrants.

 

D’un côté, Le Code de l’Action Sociale et des Familles régit le fonctionnement du CHU. Il faut mentionner l’article 345-2-2 qui stipule que « Toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique et sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d’hébergement d’urgence ». Il précise également les prestations que le CHU fournit « cet hébergement d’urgence doit lui permettre, dans des conditions d’accueil conformes à la dignité de la personne humaine, de bénéficier de prestations assurant le gîte, le couvert et l’hygiène, une première évaluation médicale, psychique et sociale, réalisée au sein de la structure d’hébergement ou, par convention, par des professionnels ou des organismes extérieurs et d’être orientée vers tout professionnel ou toute structure susceptible de lui apporter l’aide justifiée par son état, notamment un centre d’hébergement et de réinsertion sociale, un hébergement de stabilisation, une pension de famille, un logement-foyer, un établissement pour personnes âgées dépendantes, un lit halte soins santé ou un service hospitalier ».

 

D’un autre côté, il faut également mentionner la législation relative aux migrants, notamment le « plan migrants » mis à jour le 17 juin 2016. « Le dispositif d’hébergement et d’accompagnement mis en place à Paris et en Ile-de-France s’inscrit dans ce plan gouvernemental. Il repose sur […] une action coordonnée des services de l’Etat, de la Ville de Paris, de l’OFII, du GIP HIS spécialement missionné, de l’OFPRA, de l’ARS et des associations gestionnaires des centres d’hébergement ». Il s’agit alors pour le CHU d’assurer une mise à l’abri temporaire des migrants le temps de l’évaluation par des équipes spécialisées en vue de leur orientation. Le CHU doit alors faciliter et fluidifier les démarches administratives pour les migrants demandant l’asile, afin de les orienter aussi rapidement que possible.

 

2)      Le droit fondamental au logement

 

Le droit au logement fait partie des droit sociaux fondamentaux au sortir de la Seconde guerre Mondiale. En 1948, la Déclaration universelle des Droits de l’Homme précise que « Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires ». Au niveau national, ce droit au logement a une valeur constitutionnelle puisqu’il figure dans les 10ème et 11ème alinéas du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946. La loi n° 82-526 du 22 juin 1982 relative aux droits et obligations des locataires et des bailleurs va plus loin et confirme le droit au logement comme un « droit fondamental »[2]. Dans la même volonté de garantir ce droit au logement, la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, dite aussi « loi Mermaz », interdit toute forme de discrimination dans l’accès au logement. Le 19 janvier 1995, le Conseil constitutionnel affirme « la possibilité de disposer d’un logement décent est un objectif à valeur constitutionnelle ». Enfin, la loi 2007-290 instaure le droit au logement opposable, c’est-à-dire que l’Etat se porte garant pour tout citoyen du droit à un logement décent et indépendant.

 

Cependant, pour qu’une personne puisse faire valoir ce droit fondamental au logement, elle doit être de nationalité française, ou résider sur le territoire français de façon régulière (sans condition d’ancienneté de son titre de séjour ou carte de résidence) et dans les conditions de permanence définies par les articles R.300-1 et R.300-2 du code de la construction et de l’habitation. Le CHU permet alors de corriger cette lacune juridique en proposant un hébergement, et donc en garantissant le droit fondamental au logement aux personnes, en l’occurrence les migrants, qui ne peuvent pas pleinement y prétendre d’un point de vue juridique.

 

3)      La loi 2002-2 : l’individu acteur de son projet  

 

« Les grandes orientations de la loi de 2002, affirmation et promotion des droits des bénéficiaires mais aussi obligation pour les établissements de se soumettre à une procédure d’évaluation et pour les départements d’élaborer un schéma départemental provoquent une avancée démocratique formelle pour les personnes accueillies mais aussi une obligation éthique pour tout le secteur social »[3]. Cette loi correspond à l’affirmation de droits nouveaux au sein des ESMS mais propose aussi des outils pour leur mise en œuvre[4]. Avec la loi 2002-2, l’usager se trouve désormais au centre du dispositif. Les professionnels doivent satisfaire les besoins de la personne, dans le respect de sa dignité et de son intégrité. En outre, les outils de la loi 2002-2 amènent les professionnels à rendre leurs actes plus techniques. L’usager est acteur doté de droits fondamentaux, et de plus les professionnels doivent le considérer comme un citoyen ayant un droit à la participation et à une liberté d’expression.

 

La loi du 5 mars 2007 s’inscrit dans la continuité de la loi 2002-2 et renforce la nécessité de faire de l’usager un citoyen à part entière, notamment par l’instauration du projet personnalisé[5]. Cet outil permet « de passer d’une démarche prescriptive à une démarche participative pour l’usager. Cette démarche met en relief les potentialités de l’individu alors qu’auparavant, seules les incapacités étaient retenues »[6]. L’ANESM souligne que la co-construction du projet personnalisé repose sur un dialogue régulier, une forte participation de l’usager, sur une dynamique du projet souple et adaptée à la personne, et sur une mobilisation générale des professionnels autour du projet personnalisé[7]. Le projet personnalisé a aussi pour mérite d’avoir un caractère structurel inscrivant la démarche d’individualisation de l’accompagnement dans la durée.

 

La loi 2002-2 cherche à renforcer les droits des usagers par différents outils, dont la charte des droits et des libertés de la personne accueillie. Le contenu de ce document est précisé dans l’arrêté du 8 septembre 2003 et l’article L311-4 du CASF. Il entérine des principes et des droits fondamentaux à respecter par les professionnels : principe de non-discrimination ; droit à une prise en charge ou à un accompagnement adaptés ; droit à l’information ; principe du libre choix, consentement éclairé et de la participation de la personne ; droit au respect des liens familiaux ; droit à la protection ; droit à l’autonomie ; principe de prévention et de soutien ; droit à l’exercice des droits civiques attribués à la personne accueillie ; droit à la pratique religieuse ; respect de la dignité de la personne et de son intimité.

 

4)      L’accompagnement des migrants : entre éthique, morale, droit et déontologie

 

Le changement de la politique sociale à l’encontre des migrants dépasse l’évolution des textes législatifs et réglementaires affirmant le respect des droits fondamentaux de ce public. Il s’agit également d’un changement d’état d’esprit des professionnels à la croisée de l’éthique, de la morale, du droit et de la déontologie. Il convient alors d’insister sur l’aspect sociologique des pratiques propre à chaque professionnel, aspect dépassant le texte de la réglementation et qu’il convient de prendre en considération pour comprendre la philosophie de la politique sociale à l’encontre des migrants.

 

Au-delà de la réglementation, les équipes du CHU cherchent quotidiennement à apporter leur aide aux migrants car elles considèrent leur action, dans une certaine mesure, comme un devoir moral. Cependant, le droit et les règles de fonctionnement d’un établissement vont aussi déterminer les pratiques professionnels dans leur démarche auprès des usagers du CHU, même si cela peut heurter des convictions. L’éthique va alors rechercher un équilibre entre droit, déontologie et morale.

 

« L’éthique professionnelle peut être analysée comme un ensemble de valeurs qui sous-tendent/étayent les pratiques professionnelles et qui leur donnent du sens. Parmi ces valeurs, certaines sont produites par la profession et délimitent ce que le professionnel doit respecter ou s’interdire de faire pour accomplir son travail convenablement, c’est-à-dire en harmonie avec les missions qui sont les siennes. »[8]. La recherche de cet équilibre entre l’aspect moral, juridique et déontologique s’appuie sur un processus de décision collégial, sur lequel nous reviendrons ultérieurement. Les modalités d’accompagnement résultent en grande partie d’une réflexion éthique collective.  Selon l’ANESM, cette démarche « émerge d’un questionnement pouvant venir des professionnels, des personnes accompagnées ou de leur entourage. Au plan institutionnel, il s’agit d’une réflexion collective associant une pluralité de points de vue (usagers, proches, représentants d’usagers, professionnels, personnes ressources…) déclenchée par des situations concrètes singulières où entrent en contradiction des valeurs ou des principes d’intervention »[9].

 

Pour récapituler cette sous-partie, la description de l’évolution de la politique sociale à l’encontre des migrants montre un intérêt porté aux droits fondamentaux, dont le droit fondamental au logement, de ce public. Néanmoins, la logique de contrôle qui régit la politique migratoire transparaît dans certains aspects de la réglementation du CHU. Comme les autres ESMS, l’établissement cherche à renforcer l’individualisation de l’accompagnement. A ce titre, le projet individualisé, inspiré par l’esprit de la loi 2002-2, constitue un instrument pour parvenir à un plus grand respect de la citoyenneté et du droit à la participation des usagers. Cet objectif double reflète aussi l’état d’esprit de l’empowerment, à savoir une volonté d’aide aux individus accompagnée d’une démarche de responsabilisation. Il s’agit plus largement d’une autre philosophie des pratiques, d’un équilibre entre le droit, la déontologie et la morale des professionnels et des usagers.

B-    Un dispositif récent

 

1)      Des bouleversements organisationnels au sein de la structure

 

Le CHU appartient à une association avec de multiples prérogatives. Créée en 1871, elle héberge, soigne et accompagne près de 30 000 personnes en situation de précarité ou d’exclusion vers une insertion sociale et professionnelle. Elle travaille dans un dialogue constant avec les autorités partenaires qui accompagnent et financent ses actions, à savoir l’Etat, les collectivités locales, les régions, les départements et les communes. Ses principaux champs d’intervention se situent surtout en Île-de-France et mais aussi dans cinq autres régions (Nouvelle Aquitaine, Auvergne- Rhône-Alpes, Grand-Est, Hauts-de-France et Pays-de-la-Loire).

L’association s’articule autour de trois champs d’actions prioritaires : l’hébergement, le soin et l’insertion. Plus concrètement, elle organise des maraudes, l’accueil et l’hébergement de personnes en situation d’addiction, des activités de réinsertion sociale et professionnelle à destination de personnes en rupture d’emploi ou handicapées, un hébergement et accompagnement de femmes victimes de violences, le soin de personnes en situation de précarité, l’hébergement et l’accompagnement de personnes en souffrance physique.

 

Le lieu de naissance du CHU migrants se trouve à Paris. En effet, dans le cadre des plans hivernaux successifs 2013 et 2014, cette structure devait avoir un caractère provisoire.

Le CHU migrants s’inscrit dans un dispositif comprenant 73 centres d’hébergement en Île-de-France. Il se trouve géographiquement bien situé : à 450 mètres de la préfecture d’un département francilien, à 600 mètres de l’Hôtel de ville, à proximité de cinq lignes de bus et de la ligne A du RER, c’est-à-dire à 20 minutes du centre de Paris. La structure est ouverte 7 jours sur 7 et 24h sur 24h. Le CHU migrants fait partie d’une entité plus large : l’association. Elle promeut une approche globale de l’accompagnement des personnes exclues, ce qui comprend trois principaux volets d’action : le soin, l’insertion et l’hébergement.

 

 

L’année 2016 a donc été une année particulière sur deux sites distincts, rythmée par un déménagement ayant entrainé une modification de l’organisation des pratiques. De fait, l’arrivée d’un nombre plus élevés de migrants sur le CHU a généré des bouleversements en ressources humaines. Plus de 75% de l’équipe sociale a été renouvelée. La grande capacité du centre a occasionné la création d’un binôme chef de service/directeur, incluant le recrutement de ce dernier.

 

2)      Des missions multiples

 

Afin de pouvoir proposer un accompagnement pertinent des hébergés et une organisation structurée, le CHU remplit un certain nombre de missions.

 

Il a en premier lieu une mission d’accueil, c’est-à-dire stabiliser l’hébergement au maximum, permettre aux personnes hébergées de se poser et de se reposer.

La principale mission du CHU consiste à faire le point sur la situation sociale des personnes accueillies, les accompagner dans les démarches médicales d’urgence (soins, soutien psychologique, …), favoriser l’accès à la régularisation administrative et au droit d’asile. Ainsi, les professionnels proposent un accompagnement dans les démarches administratives comme l’enregistrement à préfecture, la demande d’allocation ADA gérée par l’OFII, l’ouverture de doit à l’assurance maladie, l’ouverture de compte bancaire, la rédaction du récit de demande d’asile, la demande d’aide juridictionnelle pour les recours juridiques, l’orientation vers les soins, la constitution de dossier de demande de logement et dans certaines situations les professionnels sont amenés à accompagner physiquement les migrants. Le CHU a aussi un rôle de communication. L’équipe cherche ainsi à accorder une écoute active et disponible.

 

Le travail du CHU concerne également la scolarité et l’éducation. Il cherche à rescolariser les enfants, voire les migrants eux-mêmes. Il se doit aussi de prévenir les situations de maltraitance, de soutenir les parents dans l’éducation des enfants, d’animer leur vie quotidienne. Il faut également ajouter l’accompagnement dans l’apprentissage de la langue française et dans la traduction pour communiquer avec d’autres acteurs institutionnels. Il peut aussi s’agir d’un travail de traduction lors de l’écriture des récits de demande d’asile.

Par exemple, Nous avons mis en place des cours de français FLE financés par l’association à raison de deux jours par semaine. Le CHU propose une aide à la scolarisation des enfants qui ont l’âge d’être scolarisés. D’autres migrants sont inscrits à des cours de français à l’extérieur du CHU donnés par des associations comme « réfugiés welcome » ou des cours municipaux pour adulte.

 

Les professionnels du CHU réalisent aussi un travail d’animation. Il existe par exemple une équipe de foot de 15 migrants qui participent au Championnat de l’Intégration et de la Solidarité entre plusieurs centres d’hébergement de migrants. Le Centre propose l’accès à diverses infrastructures et équipements : jeu de billard, espace d’accès à internet avec 6 ordinateurs à disposition des hébergés, réseau WIFI ouvert aux hébergés, terrain de foot à 10m du centre ou certains hébergés s’entrainent au quotidien., atelier dessin animé par des services civiques, sorties culturelles animées également par des services civiques (nous en avons deux services civiques de l’association unicité), et une bibliothèque numérique de l’éducation sans frontière (IDEAS BOX) qui fait des animations culturelles via le numérique (ordinateur tablettes…) à raison de 3 jours par semaine.

 

3)      Une culture d’établissement portée sur des approches innovantes

 

L’association à laquelle appartient le CHU investit dans l’innovation pour mieux répondre aux nombreuses formes de l’exclusion, ce qui la conduit à réorienter régulièrement les projets d’établissement et à accompagner les salariés dans les mutations de compétences. La philosophie d’action des professionnels de l’association se caractérise également par un pragmatisme dénué de préjugés idéologiques et basé sur des principes humanistes, laïcs et solidaires. L’hébergement joue un rôle important dans l’action de l’association car il constitue un préalable à toute démarche de réinsertion. L’association est composée de cinq pôles d’activité thématiques dont le Pôle Urgence Sociale et Hébergement qui « va vers, accueille, héberge, loge, soigne et expérimente ». L’accueil et l’accompagnement de toute personne en détresse ou ayant besoin d’aide y sont inconditionnels. L’association cherche à promouvoir les approches transversales pour mobiliser au mieux les compétences. Dans cette logique, elle peut être amenée à développer des partenariats avec d’autres associations ou des services publics.

 

Dans ce contexte, l’innovation doit être comprise comme une dynamique d’innovation sociale. Ainsi, « l’individu change sa manière de voir le monde, développe son potentiel et est encouragé à résoudre ses problèmes. L’innovation sociale peut être envisagée comme une organisation sociale solidaire visant à aider les individus à se réapproprier le pouvoir sur le déroulement de leur propre vie, c’est-à-dire à acquérir l’autonomie leur permettant de réorganiser leur existence »[10]. L’innovation sociale peut être également orientée sur le milieu, sur le réaménagement des institutions. Elle cherche alors à intégrer des composantes collectives et sociétales (valeurs, croyances, représentations, système productif, institutions). Cette démarche d’innovation sociale se rapproche de l’idée d’empowerment évoquée dans les propos liminaires de ce travail.

 

4)      La communication au service d’une variété de pratiques

 

L’échange et la communication constituent le cœur de métier des professionnels du CHU. Dès leur arrivée, les usagers expriment une demande d’accompagnement. L’équipe propose alors un premier entretien d’accueil afin de pouvoir faire un premier état de la situation administrative et/ou médicale. La disponibilité des agents hôteliers est souvent perçue comme une ressource pour les hébergés. Au quotidien, c’est eux qui assurent l’entretien, la restauration et qui répondent aux premières nécessités.

 

Cette volonté de communication s’inscrit dans une mission de soutien psychologique. Lorsque des usagers présentent des troubles ayant un lien avec leur parcours migratoire, l’histoire de leur exil ou des chocs liés à des périodes de guerre ou de grand danger. Certaines personnes peuvent plus simplement se présenter également comme étant très déprimées. Il s’agit pour les équipes de repérer certains discours pouvant être troublants et/ou incohérents lors des entretiens, plus particulièrement lors « du récit » pour accompagner les personnes repérées vers le soin. Le rôle des agents hôteliers et des veilleurs de nuit est aussi crucial dès lors que certains troubles se révèlent par des attitudes en collectivité ou à des moments avancés de la nuit.

 

La complexité des situations administratives dans lesquelles se trouvent les personnes accueillies au sein de l’établissement amènent les professionnels à devoir échanger longuement pour bien comprendre les enjeux et surtout pour pouvoir proposer un accompagnement dans la réalisation de ces démarches administratives dont l’aboutissement va conditionner le futur de ces personnes qui ont déjà eu un parcours migratoire chaotique.

 

Pour conclure cette sous-partie, la culture d’établissement du CHU se caractérise par une flexibilité à la fois subie et voulue. D’un côté, la structure a connu un des bouleversements organisationnels qui la situent dans un entre-deux. En outre, ses missions recouvrent un large spectre de pratiques qui amènent les professionnels à devoir répondre à une grande diversité de demandes. D’un autre côté, la flexibilité s’inscrit dans une volonté de l’association de faire preuve d’innovation sociale pour renouveler les réponses face à des problématiques inédites. De plus, la communication constante avec l’usager conduit à co-construire les pratiques avec le public sans a priori tout en restant dans le cadre institutionnel et réglementaire du CHU. Cette approche pragmatique constitue une condition préalable favorable pour l’empowerment.

C-   L’organisation de l’accompagnement des migrants

 

1)      Le public accueilli

 

Le CHU a pu par le passé héberger des personnes avec enfants. L’exception est faite de quelques familles accueillies en toute fin d’année dernière à la demande de la préfecture afin de participer au désengorgement des centres franciliens dédiés aux familles et femmes isolées. Ces cinq familles sont en attente d’une réorientation. Désormais, les résidents sont en totalité des adultes seuls, presque exclusivement des hommes. Le public accueilli de 250 personnes est composé de plus de 12 nationalités et vient pour la grande majorité de pays africains. Il faut également mentionner une moyenne d’âge assez jeune. Au-delà d’une situation administrative très complexe, il convient d’évoquer des grandes fragilités psychologiques de ces personnes après une migration traumatisante et un état de santé souvent dégradé.

 

Caractéristiques du public accueilli

Pays d’origine
Soudan : 39%, Afghanistan : 38%, Somalie : 10%, Pakistan : 5%, Erythrée : 4%, Guinée : 1%,

Tchad : 1%, Guinée Conakry : 1%, Tadjikistan : 0,5%, Ethiopie : 0,5% 

Age
18-24 ans : 46%        25-30 ans : 39%          31-40 ans : 12%           Plus de 40 ans : 2%
Situation familiale
              Adulte seul avec enfants : 90,5%                           Adulte seul sans enfant : 9,5%
Couverture médicale
                                En cours : 5%                   Oui : 84%                   Non : 11%
Ressources
Allocation pour les Demandeurs d’Asile : 75% Revenu de Solidarité Active : 7,5% Salaire : 0,5%    Aucune ressource : 15,5%

 

Ce tableau met en avant une grande majorité du public afghan et soudanais. Il faut nuancer cette idée d’homogénéité. En effet, les pays d’où sont originaires les personnes accueillies au CHU se caractérisent souvent par la cohabitation, voire la confrontation, de plusieurs nationalités, plusieurs ethnies, plusieurs confessions religieuses, qui parfois ne parlent pas la même langue. Cette diversité va sûrement s’accroître au regard de la forte hausse du public accueilli au sein Centre d’Hébergement d’Urgence migrants qui a été faiblement compensée par des sorties.

Arrivées de migrants au second semestre 2016

Mai Juin Juillet Août Septembre Octobre Novembre Décembre Total
43 105 3 14 67 0 36 40 308

 

2) Une équipe pluridisciplinaire

 

L’équipe du CHU se compose de : un directeur, un chef de services, sept travailleurs sociaux, une éducatrice de jeunes enfants, une équipe spécialisée en formation pour adultes, douze agents hôteliers et six veilleurs de nuit. A l’annonce d’une arrivée, l’ensemble des agents hôteliers et travailleurs sociaux se coordonne pour mettre en place la procédure d’accueil. L’équipe est présente pour proposer un champ linguistique aussi large que possible. Ensuite, un travailleur social référent est désigné pour assurer l’accompagnement social. Dans les deux jours qui suivent, le travailleur social attitré réalise un entretien d’accueil pour évaluer la situation et les besoins de l’usager.

 

Un coordinateur des agents hôteliers organise le travail quotidien, prévoit les commandes et assure la mise en œuvre des interventions techniques. Il propose également au chef de service des aménagements possibles en anticipant les éventuelles absences des salariés afin que les équipes demeurent toujours opérationnelles. Une transmission est réalisée quotidiennement lors du changement d’équipe et le cahier de liaison reste le premier outil de communication efficient. De manière hebdomadaire, les travailleurs sociaux sont réunis autour du chef de service, et du directeur ponctuellement, afin d’échanger les informations, de faire le point sur l’avancée des suivis et de permettre à chacun de se nourrir de l’expérience ou des connaissances en transversalité.

Suite à des restrictions budgétaires, il n’existe plus d’intervenant qui assure l’analyse des pratiques professionnelles permettant l’échange et la réflexion nécessaire aux professionnels. Il faut mentionner le fait que le déménagement de la structure s’est traduit par le renouvellement de 75% de l’équipe sociale et par le recrutement de professionnels dédiés aux nouveaux profils des hébergés. En effet, le fait d’avoir des migrants comme public cible de l’établissement nécessite une expertise spécifique. Le CHU s’appuie sur les compétences linguistiques des professionnels du CHU pour communiquer avec les usagers. Ainsi, les éducateurs parlent l’afghan (le pachto et le dari), l’anglais, l’espagnol, le russe, le soninké, le wolof, et l’arabe, mais n’ont pas de qualification particulière pour faire ce travail de traduction.

La proximité linguistique et/ou culturelle entre un professionnel et un usager ne constitue pas a priori une garantie de qualité de la communication, mais constitue néanmoins un facteur susceptible d’augmenter la réussite de l’établissement d’un échange constructif, surtout lors des premiers contacts.

 

3)      Les instances de décision collective

 

Les réunions permettent de restituer la vie de l’établissement et d’assurer la permanence de qualité de l’accompagnement. Elles aident à organiser l’activité, à surmonter les dysfonctionnements, à maintenir la réflexion, à analyser les pratiques, à décider des actions communes à mener en faveur des personnes accueillies. Ces réunions reflètent une intensité de la communication interne au sein du Centre d’Hébergement d’Urgence. « On appelle communication interne la communication qui s’effectue entre une organisation et ceux qui lui fournissent leur force de travail. [Elle] existe dans tout type d’organisation, publique ou privée, économique ou associative »[11].

 

Il faut ainsi mentionner trois types de réunion au CHU : une réunion hebdomadaire tous les jeudis après-midi qui réunit les travailleurs sociaux et parfois le chef de service ponctuellement, la réunion mensuelle des agents hôteliers qui mensuelle avec les agents, le chef de service et le directeur, la réunion générale mensuelle des équipes les agents, les travailleurs sociaux, le chef de service et le directeur, et enfin la réunion mensuelle entre les usagers et les professionnels.

 

4)      Le travail avec les partenaires extérieurs

 

Au regard de la multiplicité des missions du CHU, les professionnels sollicitent une démarche inter-institutionnelle pour pouvoir proposer un accompagnement individualisé, ce qui les amène à faire appel à des partenaires extérieurs. Il serait impossible de dresser une liste exhaustive des externes qui travaillent plus ou moins régulièrement avec les professionnels du CHU

 

Néanmoins, sur certains types de missions, il paraît possible d’identifier des partenaires extérieurs majeurs du Centre d’Hébergement d’Urgence. Pour le volet accompagnement administratif des usagers concernant le droit des étrangers et l’asile, les équipes travaillent régulièrement avec l’association France Terre d’Asile, la coordination d’Accueil des Familles demandeurs d’asile, le GIP, l’OFII et Coallia.

Les usagers ont souvent un état de santé fortement dégradé, du fait notamment de leur parcours migratoire. L’établissement n’a pas toutes les compétences en interne pour répondre pleinement à cette demande de soin. Il fait ainsi appel à des structures comme : MEDIPOLE, PASS des hôpitaux de la ville, la polyclinique de l’hôpital, la clinique du département et le SAMU social.

Cette demande de soins des usagers concerne souvent l’état de santé psychologique du public. L’échange permet de tenter de résorber en partie ces difficultés. Cependant, le CHU peut parfois s’appuyer sur l’aide de spécialistes extérieurs comme le Réseau Santé Précarité qui est rattaché à l’hôpital, le Centre médico-psychologique de secteur, les urgences de la PASS et le COMEDE (Comité pour la santé des exilés) qui est rattaché à un autre hôpital de la région Île-de-France.

 

Pour les thématiques liées au logement, le CHU va travailler avec des structures comme des associations de domiciliation : France Terre d’asile, Coallia, Facem, la Halte sociale, la permanence sociale d’accueil – chemin vert, et le centre Montparnasse rencontres.

Le CHU s’occupe aussi de l’accompagnement de femmes enceintes. Il faut alors solliciter des professionnels comme les puéricultrices de la PMI, les assistantes sociales et sages-femmes des maternités, le PASS.

Dans sa mission d’accompagnement pour la scolarité et l’éducation des usagers et de leurs enfants, le CHU peut compter l’Aide Sociale à l’enfance, les assistantes sociales scolaires, les mairies, l’Inspection académique-CASNAV (Centre Académique pour la Scolarisation des enfants allophones Nouvellement Arrivés et des enfants issus de familles itinérantes et de Voyageurs), et les associations de secteurs.

 

Pour récapituler cette sous-partie, l’accompagnement des usagers se caractérise par un suivi d’un public divers. La complémentarité des compétences constitue alors une réponse des professionnels à cette multiplicité de situations. La collégialité de fonctionnement, les échanges constants au sein des équipes constituent le maître-mot de l’organisation des pratiques du Centre d’Hébergement d’Urgence. Cependant, la multiplicité des missions de l’établissement ne lui permet pas de pouvoir compter uniquement sur les compétences en interne pour répondre de manière individualisée aux besoins des usagers. Le CHU sollicite assez régulièrement l’intervention de partenaires extérieurs. L’empowerment repose aussi sur l’idée que le professionnel ne peut pas tout régler par lui-même. Il doit ainsi savoir confier une partie de son travail à d’autres acteurs.

 

            Conclusion 1ère partie

 

Cette première amène à constater que le respect du droit fondamental au logement, ainsi que l’accueil des migrants, constituent des éléments importants des politiques publiques, comme le montre l’existence des CHU. Cependant, il peut exister une tension entre cette volonté d’aide et d’accueil et un besoin de suivi administratif et de contrôle des usagers, ressentie par les professionnels dans leurs pratiques.

En termes d’accompagnement, il faut pouvoir trouver un équilibre entre éthique, morale, droit et déontologie. Leurs actions se situent entre l’administratif, l’éducatif, le social et le médical. Comment concilier diversité des profils des personnes accueillies et individualité de l’accompagnement ? Le projet personnalisé constitue un instrument important pour parvenir à atteindre cet objectif.

Il convient de souligner que le CHU se caractérise par une grande souplesse de fonctionnement et par une prédominance de la communication, tant interne qu’externe, comme élément structurant de l’organisation des pratiques. Les changements organisationnels survenus en 2016 ont conduit les équipes à s’adapter à un nouveau contexte et à repenser leurs pratiques en ce sens. L’existence d’une équipe pluridisciplinaire assure une souplesse des professionnels face à des situations de précarité et sanitaires très dégradées et très variées.

Toutefois, il convient d’évaluer la qualité de la communication dans un contexte interculturel car la qualité de l’accompagnement des usagers dépend fortement de cette dernière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2ème partie- Le diagnostic : renforcer la communication interculturelle

 

Dans cette partie, je souhaite mener un diagnostic centré sur la mise en œuvre de la communication interculturelle au sein du Centre d’Hébergement d’Urgence. Pour ce faire, j’ai mobilisé divers outils de recueil de données et d’analyse : l’observation participante, un entretien avec quatre professionnels et des questionnaires fermés distribués aux professionnels[12].

L’observation participante « implique de la part du chercheur une immersion totale dans son terrain, pour tenter d’en saisir toutes les subtilités […] cette méthode permet de vivre la réalité des sujets observés et de pouvoir comprendre certains mécanismes difficilement décryptables pour quiconque demeure en situation d’extériorité. En participant au même titre que les acteurs, le chercheur a un accès privilégié à des informations inaccessibles au moyen d’autres méthodes empiriques »[13].

L’échantillon des personnes interrogées pour cette investigation empirique qualitative se compose de la manière suivante : le directeur, une éducatrice de jeunes enfants, une éducatrice spécialisée en formation, trois travailleurs sociaux, sept agents hôteliers.

Je souhaitais initialement avoir des questionnaires remplis par les usagers, mais la maîtrise inégale du français à l’écrit par les migrants aurait créé un biais rendant les réponses non-représentatives du point de vue des usagers dans leur ensemble. Il peut exister des interprétations différentes d’une attitude. Il demeure difficile pour les usagers d’exprimer librement leur pensée et l’ensemble des subtilités d’une réflexion dans une langue étrangère. De plus, l’interviewé va changer d’attitude si la personne qui l’interroge est étrangère. Il va chercher à donner des réponses qu’il estime idoines, pensant à une corrélation éventuelle entre ce questionnaire et son orientation future.

Le diagnostic fait apparaître une communication de qualité avec les usagers et une participation de ces derniers à certains aspects du fonctionnement de l’établissement. Cependant, il peut exister des points concernant l’organisation des pratiques qui reste imparfaitement adaptée à l’idée de communication interculturelle. Cela résulte en particulier d’une appropriation insuffisante des outils de la loi 2002-2 visant à favoriser la participation des usagers.

 

A-   Une relation au public de qualité

 

1)      La question linguistique

 

En effet, la question la maîtrise de la langue constitue un élément pour des professionnels du CHU dont les pratiques reposent en grande partie sur l’oralité et sur la qualité des échanges avec usagers. Il faut également ajouter les situations d’illettrisme dont peuvent souffrir certains usagers. Cela pose problème notamment pour la mise en œuvre de la loi 2002-2, dont les outils nécessitent une compréhension préalable de la documentation fournie par l’établissement aux usagers. Il convient de rappeler que l’apprentissage linguistique restent le premier, mais pas le seul, vecteur d’intégration des usagers au sein de l’établissement, et plus largement pour envisager une intégration sociale, professionnelle et durable au sein de la société française.

 

Une telle situation crée une inégalité, une hétérogénéité dans l’accompagnement proposé par les professionnels aux usagers du Centre d’Hébergement d’Urgence. En effet, en l’absence de barrières linguistiques, il s’avérera plus facile de répondre aux besoins des migrants accueillis au sein de l’établissement. Bien qu’un bon nombre de personnes soit engagé d’une manière ou d’une autre dans l’apprentissage de la langue française, il semble prioritaire de développer davantage l’offre sur le site.

 

Dans les réponses aux questionnaires, les agents hôteliers semblent insister davantage sur cette difficulté linguistique que les autres professionnels interrogés. Cela peut se comprendre dans la mesure où ils sont les plus amenés à échanger avec les usagers. Cependant, au quotidien, les équipes parviennent à s’adapter et à surmonter ces obstacles pour établir une communication avec tous les usagers, indépendamment de leur niveau de maîtrise de la langue française. Ainsi, un agent hôtelier explique que : « la communication avec les usagers est bonne dans l’ensemble, malgré la difficulté et la barrière de la langue, car même avec les signes nous arrivons à communiquer et amenons les usagers à s’intéresser à la langue française en essayant de comprendre la leur aussi ». Les usagers comprennent rapidement, quelle que soit la manière dont est transmis le message, ce que les professionnels d’attendent d’eux. Les propos d’un agent hôtelier vont dans ce sens : « A part le problème de la langue, une fois le message passé, tout se passe bien. Ils sont très réceptifs ». Cela amène à nuancer l’importance du facteur linguistique comme élément d’un échange de qualité.

 

2)      Une bonne communication

 

Les résultats des questionnaires et mes observations personnelles permettent d’affirmer que la communication avec les usagers semble globalement satisfaisante et que le volume d’échanges paraît important.

 

Comment évaluez-vous la qualité de la communication avec les usagers ?

Très bonne Bonne Mauvaise Très mauvaise
0% 84% 8% 8%

 

            Au regard des résultats de ce tableau, il paraît indubitable de constater que l’équipe est parvenue à remplir avec succès une de ses principales missions : établir une communication de qualité avec des personnes qui appartiennent à des univers linguistiques différents. Cela constitue la première et indispensable étape à franchir pour mettre en œuvre une communication interculturelle qui va favoriser la participation des usagers au sein du Centre d’Hébergement d’Urgence. Des professionnels affirment même avoir établi des relations proches avec les usagers. Cependant, il faut signaler qu’aucune personne interrogée n’a qualifié la communication de « très bonne » et 16% la considère comme mauvaise, en particulier les agents hôteliers.

 

Cette difficulté de communication dépasse la question linguistique. Il peut alors exister une incompréhension en termes d’attentes. Ainsi, le directeur soulignait que les moments d’échange organisés par le CHU ne permettaient pas toujours d’apporter une réponse satisfaisante aux demandes groupales ou individuelles des usagers. Des travailleurs sociaux ont même pu déplorer une impossibilité à établir une relation socio-éducative. La difficulté à communiquer relève aussi de causes pratiques. Le CHU accueille un grand nombre de migrants et les travailleurs sociaux ne disposent pas du temps nécessaire pour chacun d’entre eux.

 

Ces éventuelles déficiences du schéma communicationnel entre deux porteurs de cultures différentes, c’est-à-dire entre professionnels et usagers, résulte de trois types d’attitudes pouvant heurter l’interlocuteur.

La première correspond à un « déni de la différence »[14]. L’altérité n’est pas reconnue en tant que telle par le professionnel ou par l’usager. Une telle perception va conduire l’individu à neutraliser la culture étrangère. Il va s’inscrire dans une logique d’assimilation ou d’acculturation et non d’intégration, ce qui peut sembler prématuré pour le public du CHU. Dans les pratiques, la personne va considérer son interlocuteur comme un semblable, bien qu’il soit porteur d’une autre culture. Ce type d’attitude peut heurter et être perçu comme une provocation sciemment voulue.

A l’inverse, un relativisme excessif peut également constituer une cause de dégradation des relations interpersonnelles et interculturelles entre deux individus porteurs de cultures distinctes. Ainsi, « la différence conduit au rejet parce que l’on ne pense pas possible la communication »[15]. Ayant conscience de ne pas partager l’ensemble des codes culturels de son interlocuteur, la personne va refuser d’entreprendre un processus de discussion avec la personne qui a une autre appartenance culturelle.

La troisième attitude consiste à hiérarchiser. Les personnes appartenant à une autre culture se retrouvent alors « classées selon une même échelle axiologique dont on occupe soi-même le sommet et incarne les valeurs positives »[16]. Le comportement de l’individu repose alors sur des préjugés et des a priori et sur une vision déformée de la culture d’autrui. Cette perception nourrit un sentiment de supériorité à l’encontre de l’interlocuteur ce qui rend impossible un dialogue équilibré et constructif. Ce type de comportement est contraire à l’éthique professionnelle des équipes du CHU, s’apparente peu ou prou à de la xénophobie ce qui peut constituer une infraction à la loi.

 

3)      Une implication perfectible des migrants dans le fonctionnement du CHU

 

Les questionnaires et mon expérience invalident clairement l’idée d’une population accueillie passive qui ne participerait pas au fonctionnement du CHU, et surtout à l’entretien des lieux. Au contraire, ils cherchent à aider autant que faire se peut les travailleurs sociaux et les agents hôteliers dans leurs tâches. Ils entretiennent leur espace de vie comme s’il s’agissait de leur propre maison, preuve que le CHU a réussi à représenter pour les usagers un endroit pour se poser et se reposer.

 

Néanmoins, il semble exister des points à améliorer concernant la participation des usagers dans le sens que lui donne l’ANESM (Agence Nationale de l’Evaluation et de la qualité des Etablissements et des services Sociaux et médico-Sociaux). Elle définit ainsi la participation : « expression d’une opinion, d’une préférence dans le cadre d’une institution ; participation à la prise de décision qui me/nous concerne (allant de la consultation à la co-décision »[17]. Elle identifie quatre registres de participation : la citoyenneté, la capacité à prendre la parole, le pouvoir de prendre des initiatives et de revendiquer une qualité de service.

 

Les usagers peuvent-ils participer davantage au fonctionnement du CHU ?

Oui Plutôt oui Plutôt non Non
38% 54% 0% 8%

 

Ce tableau montre que d’après les personnes interrogées, il existe encore des possibilités pour accroître l’implication des usagers, leur participation au sein de l’établissement. Les réponses négatives mettaient en avant les problématiques liées à la sécurité des usagers. Ainsi, un agent hôtelier déclare : « Je ne veux pas qu’ils fassent une faute ou se blessent. Je serai responsable ».

 

Pour récapituler cette sous-partie, le schéma de communication entre les professionnels et les usagers du CHU est globalement fluide. Ainsi, il n’existe pas de situation de rupture de communication totale avec les migrants, des comportements basés sur des préjugés. Cependant, il peut y avoir des malentendus et des incompréhensions à caractère culturel. Cette qualité de la communication favorise l’implication des usagers dans le fonctionnement du Centre d’Hébergement d’Urgence. Cependant, la participation des migrants à la vie de l’établissement pourrait être significativement améliorée sur certains points, à savoir la participation aux instances collectives du CHU issues de la loi 2002-2. Une approche comme l’empowerment peut s’avérer intéressante à ce titre.

 

B-    Une organisation des pratiques imparfaitement adaptée à l’interculturalité

 

1)      Des zones d’incertitude

 

La paternité du concept de « zones d’incertitude » revient à Michel Crozier[18]. Il peut se définir comme « L’ensemble des règles formelles, ensemble qui fait système, ne définit pas les rôles de manière rigoureuse, mais représente les marges de jeu de chaque acteur. […] En effet, toute organisation est soumise en permanence à des masses d’incertitudes très élevées, techniques, commerciales, humaines, financières, etc. »[19].

 

La souplesse de définition de fonctionnement du CHU a le mérite d’éviter qu’un cadre réglementaire rigide ne puisse venir entraver les pratiques et ne vienne limiter les équipes dans la manière d’exercer leur métier. Ainsi, les professionnels peuvent s’adapter davantage aux spécificités des personnes accueillies, notamment les spécificités culturelles. Cependant, cette souplesse peut aussi créer un manque de repères, une certaine anxiété chez les professionnels qui évoluent dans un cadre aux contours flous, c’est-à-dire favorisant une diversité d’interprétations, et donc de malentendus.

 

Ce poids des zones d’incertitude se fait ressentir davantage dans le contexte de bouleversements organisationnels qu’a connus le CHU ces derniers mois. Ainsi, un professionnel interrogé souligne des « flous autour des missions, de contradictions fortes entre les nécessités administratives et politiques, et celles liées au travail social ». Une autre professionnelle évoque l’idée de « Faire en sorte que les mêmes personnes ne se retrouvent pas à accomplir toutes les tâches. Peut-être qu’il faudra détailler les fiches de poste ». Il s’agit alors de rendre les acteurs mieux « armés » institutionnellement face aux problématiques liées à la gestion de l’interculturalité au sein de l’établissement.

 

2)       Une difficulté à inscrire les pratiques sur le long terme

 

Une communication interculturelle pleinement réussie s’inscrit dans un long processus. Il manque en l’état actuel du fonctionnement du Centre d’Hébergement d’Urgence un dispositif permettant de rendre durable cette qualité de la communication interculturelle. Les professionnels interrogés dans le cadre de cette investigation empirique le reconnaissent volontiers.

 

Ainsi, le directeur de l’établissement explique : « Il existe quelque chose de nécessaire dans la recherche de responsabilisation des usagers, à travers leur participation par exemple, mais qui à mon sens doit rester organisé et structuré […] Néanmoins, la recherche de l’échange et la prise en compte des avis et besoins exprimés par les usagers est un outil qui reste encore trop peu utilisé dans certaines structures et qui est pour moi un préalable à l’hospitalité ». Ensuite, un autre professionnel souligne qu’il manque des préalables pour inscrire durablement la bonne gestion de la communication interculturelle au sein des pratiques professionnelles et du fonctionnement de l’établissement.

 

Cette problématique est à mettre en corrélation avec un questionnement plus large sur les dispositifs d’accompagnement. Ainsi, une professionnelle s’interroge : « Pour quelle durée peut-on établir un projet d’accompagnement ? et dans combien de délais ? Comment aborder la question d’accompagnement quand on est amené à traiter un grand nombre des personnes ? Comment s’outiller pour accueillir un public de plus en plus vulnérable et fragilisé, et admis dans notre établissement en grand nombre, en particulier les personnes en procédure Dublin ?  Comment trouver le sens du travail collectif pour le personnel d’établissement, quand nos missions sont amenées à changer très rapidement ?  (ex. prévu pour une durée de séjour temporaire, mais en réalité, accueillir le public pour plus d’un an ou deux )».

 

Ces propos soulignent la complexité de la situation pour favoriser une participation plus forte des usagers dans le fonctionnement organisationnel et institutionnel du CHU. En effet, il paraît contradictoire de chercher à solliciter les migrants pour qu’ils s’investissent davantage alors qu’ils ont peu possibilité pour influer peu ou prou sur leur orientation future, sur laquelle d’ailleurs les professionnels du CHU ne peuvent guère intervenir davantage. De plus, il peut paraît inutile aux usagers de chercher à s’investir fortement dans le fonctionnement de l’établissement puisqu’ils ne doivent y rester que de manière temporaire, même si les dysfonctionnements administratifs amènent le provisoire à durer.

 

3)      Des partenaires moins sollicités

 

Nous avons vu précédemment que le Centre d’Hébergement d’Urgence avait besoin de recourir fréquemment à des partenaires pour pouvoir remplir au mieux l’intégralité de ses missions envers les migrants accueillis au sein de l’établissement. Pour reprendre les propos du directeur, « l’inscription du CHU dans le tissu territorial dont il dépend, permet aujourd’hui de proposer aux usagers une diversité d’actions, culturelles, médicales, administratives, sportives ou encore de solidarité. Elle permet aux professionnels en charge des accompagnements une véritable palette de possibilités (Inscription dans des activités sportives ; inscription dans des scolarités des formations voire des cursus universitaires ; des aides ponctuelles et solidaires : aides financières, alimentaires et matérielles ; un accès au soin, un accompagnement juridique, des activités culturelles et cultuelles ».

 

Cependant, l’analyse des entretiens menés pour la réalisation de ce diagnostic fait apparaître des besoins non-satisfaits chez les professionnels du CHU en termes de partenariats extérieurs. Ainsi, des professionnels évoquent des partenariats qui paraissent intéressants pour améliorer l’accompagnement des personnes accueillies au sein du Centre d’Hébergement d’Urgence. Une professionnelle évoque « CIMADE ; COMEDE ; etc. concernant le sujet d’exil/migration ; CAARUD etc. pour le sujet d’addiction ; Primo-Levi, etc. sur la question de trauma lié à l’exil/à la violence extrême ». Un autre évoque les aspects administratifs, logistiques et linguistiques en insistant sur le besoin de renforcer le partenariat avec « les barreaux franciliens, les associations FLE, le STIF ». En effet, les associations de Français Langue Etrangère travaillent régulièrement avec les migrants.

 

Pour synthétiser cette sous-partie, la question de la communication interculturelle pour renforcer la participation des usagers au sein du fonctionnement du Centre d’Hébergement d’Urgence demeure peu inscrite dans les logiques organisationnelles. L’empowerment peut constituer un moyen pour l’inscrire dans la culture d’établissement du CHU. En effet, la question de la communication interculturelle fait partie de ces éléments autour desquels il peut exister une incertitude, un manque de repères. Le CHU ne mobilise pas non plus les partenaires en ce sens. Cette situation se traduit en particulier par une utilisation insuffisante des outils permettant la participation des usagers.

 

C-   Des outils de participation insuffisamment utilisés

 

1)      Le CVS

 

Le Conseil de la Vie Sociale (CVS) fait partie des outils issus de la loi 2002-2. Il s’agit d’un organe consultatif pouvant émettre un avis sur des thèmes relatifs au fonctionnement de l’établissement : organisation intérieure et la vie quotidienne du CHU, activités et animations socioculturelles, projets de travaux et d’équipement, affectation des locaux collectifs, l’entretien des locaux, projets de modifications du règlement, conditions d’accompagnement des usagers. Il doit surtout permettre l’expression et la participation des usagers et il instaure une logique participative et collaborative dans le fonctionnement de l’établissement. Il doit être composé de : deux représentants des usagers, d’un représentant du personnel, d’un représentant de l’organisme gestionnaire et d’un représentant de la mairie[20].

 

« Il me paraît essentiel d’intégrer les acteurs de la démocratie dans les espaces construits. S’ils n’existaient pas, il faudrait se mobiliser pour les inventer, puisqu’ils existent, il convient de les habiter, de les rendre vivants[21]». Le CVS s’intègre pleinement dans cette démarche, mais ne remplit pas tout à fait son rôle de renforcement de la participation des usagers du CHU. Ainsi, le directeur constate que « la limite est ténue à l’endroit d’une réelle démocratie dans une structure avec un CVS où, nous le savons bien, les usagers n’ont pas de pouvoir décisionnaire ». Cela conduit à se poser de nouveau la question : comment demander à quelqu’un de participer au fonctionnement du CHU alors qu’il n’a aucun pouvoir sur son orientation ? Les outils de la loi 2002-2 ne permettent donc pas à ce type de public de pouvoir exercer pleinement leur droit à la participation.

 

2)      Une compréhension imparfaite de la documentation

 

La participation des usagers passe par une appropriation des outils existants au sein du Centre d’Hébergement d’Urgence. Or, les migrants accueillis au sein de l’établissement semblent avoir des difficultés ou des réticences à s’emparer de ces dispositifs visant à faire d’eux des acteurs de leur projet d’accompagnement.

 

Il ne faut évidemment pas blâmer les migrants eux-mêmes, mais porter un autre regard sur l’organisation des pratiques au sein du CHU, c’est-à-dire repenser le sens de l’accompagnement envers les usagers au sein de l’établissement. En effet, l’ANESM souligne que « ce droit à la participation et à l’expression, favorisé dans les ESMS, ne se traduit pas par une « bonne pratique » exigible de l’usager. Il relève plutôt de « bonnes pratiques professionnelles » facilitant les conditions d’émergence de la parole de l’usager. Pour autant ce dernier a la liberté de participer ou non »[22].

 

Il faut peut-être expliquer cette situation par un défaut de pédagogie autour du rôle et des bénéfices que peuvent apporter aux usagers les outils favorisant la participation. Il peut aussi exister une certaine appréhension du public vis-à-vis de ces dispositifs pouvant s’apparenter à des logiques administratives envers lesquelles les migrants ont développé une grande méfiance tout au long de leur périlleux parcours migratoire. En effet, il faut tenir compte du fait que les migrants rencontrent moultes difficultés face à l’administration et à la complexité de ses procédures.

 

Les propos des professionnels interrogés pour la réalisation du diagnostic de ce mémoire semblent aller dans ce sens. Une professionnelle explique « qu’il y a beaucoup d’informations à assimiler ». Néanmoins, une autre personne interrogée souligne une dynamique d’« amélioration considérable dans les documents et les informations ». Le directeur évoque même une initiative qui a été mise en œuvre au sein de l’établissement pour améliorer la compréhension de la documentation par les usagers. Il parle ainsi des « récentes mises à jour, tout comme le travail réalisé par uns stagiaire autour d’un livret d’accueil, permettent de proposer des documents adaptés aux situations ainsi qu’aux nécessités linguistiques ».

 

3)      L’insuffisance des compétences interculturelles

 

La notion de compétences interculturelles correspond à « un ensemble d’aptitudes analytiques et stratégiques qui élargissent l’éventail d’interprétations et d’actions de l’individu dans son interaction interpersonnelle avec des membres d’autres cultures. Ces aptitudes intègrent les connaissances générales sur d’autres cultures, entraînant un effet de modification des attitudes et comportements initiaux et une sensibilisation vis-à-vis des avantages liés à la différence »[23].

Il semble alors possible d’avancer l’hypothèse d’une difficulté pour les professionnels à prendre pleinement en considération les spécificités culturelles du public pour rendre les échanges avec les usagers plus constructifs. Les migrants peuvent aussi faire preuve d’une certaine incompréhension culturelle vis-à-vis des us et coutumes françaises (culture, culture alimentaire, rapport à des interdits religieux…). Par exemple, un migrant qui fait ses ablutions sur le lavabo au réfectoire. Tout va bien au départ, sauf quand il a mis ses pieds dans le lavabo pour se laver les pieds comme le fait un musulman. L’agent hôtelier n’a pas pu accepter ce geste et pourtant il le voyait se laver les mains et le visage sans rien dire. L’agent le traite de malpropre, chose que l’usager n’a pas acceptée.

 

La question des compétences amène à aborder celle du besoin en formation des professionnels du Centre d’Hébergement d’Urgence. Les entretiens font ressortir des demandes spécifiques, et diverses, sur ce point. Ainsi, un professionnel pense qu’il lui serait nécessaire de renforcer ses savoir-faire et ses compétences sur les droits des demandeurs d’asile, l’interculturalité, la gestion de la relation à l’usager, et des thématiques générales liées aux sciences humaines. Une autre professionnelle estime que l’établissement manque de médiateurs formés, c’est-à-dire ayant un bon niveau de compétences interculturelles et non pas des agents hôteliers servant de traducteurs. Elle insistait plus sur une réflexion collective sur les pratiques que sur des formations spécifiques, notamment une réflexion sur les postures liées à l’interculturalité, sur les outils et connaissances psychologiques pour trouver des approches de travail et d’intervention adaptées et adéquates pour les situations relevant des vécus violents/trauma. Le directeur considère que le point le plus important concernant les formations porte sur la question linguistique, c’est-à-dire former les usagers.

 

Pour résumer cette sous-partie, les dispositifs et les outils pour renforcer la communication interculturelle et la participation des usagers existent mais demeurent peu ou mal exploités. Ainsi, le CVS doit pouvoir permettre de renforcer la place de l’usager dans le fonctionnement du CHU, mais dans les faits il ne parvient pas tout à fait à remplir sa mission. Les usagers doivent pouvoir s’approprier pleinement la documentation et les procédures pour renforcer leur participation, mais un défaut de pédagogie ne permet pas d’aboutir à ce résultat. L’empowerment pourrait alors représenter une autre approche pour réaliser une autre pédagogie autour de ces outils. La communication interculturelle nécessite des compétences interculturelles, qui demeurent encore insuffisantes chez les professionnels du CHU.

            Conclusion 2ème partie

 

Pour conclure cette partie portant sur le diagnostic de la communication interculturelle et de la participation des usagers au fonctionnement du Centre d’Hébergement d’Urgence, il me semble intéressant de mobiliser un outil stratégique de manager, le SWOT. Il s’agit d’un sigle : Strenghts, Weaknesses, Opportunities et Threats (Forces, Faiblesses, Opportunités, Menaces). Il permet l’identification des forces et des faiblesses de l’organisation, des équipes et du public face à ces problématiques. Il aide également à s’inscrire dans une perspective stratégique en identifiant les opportunités et les menaces pouvant peser sur le projet d’un cadre intermédiaire.

Forces

Equipes : Qualité de la communication

Organisation : Souplesse de fonctionnement

Public : Implication dans certains aspects du fonctionnement de l’établissement

Faiblesses

Equipes : Manque de compétences interculturelles

Organisation : Zones d’incertitude

Public : Faible participation au CVS

Opportunités

Equipes : Meilleure compréhension de la situation des migrants

Organisation : Accompagnement plus individualisé et plus globale

Public : Participation au CHU comme préalable à une intégration en France

Menaces

Equipes : Pratiques non-renouvelées

Organisation : Impossibilité à remplir l’ensemble de ses missions

Public : Rupture de la communication

 

Au regard de ce SWOT, une meilleure appropriation des outils par les usagers passe en premier lieu par un changement de pratiques des équipes pour aboutir à un renforcement du niveau d’implication des usagers au sein du CHU. En tout cas, le plan d’action de ce mémoire visant à promouvoir l’empowerment pour une forte participation des usagers du CHU a été conçu dans cet état d’esprit. Ce diagnostic a été transmis à ma hiérarchie avant d’envisager la conception et la mise en œuvre du plan d’action.

3ème partie- Le plan d’action : développer l’empowerment au CHU par un management participatif

 

L’élaboration et la mise en œuvre du plan d’action constituent des moments essentiels pour un cadre intermédiaire. Je me dois alors de réussir la transition d’une réflexion, d’une analyse d’un diagnostic vers des mesures concrètes et opérationnelles, hiérarchisées autour d’objectifs, en mobilisant les moyens à ma disposition. Le projet « se centre autant sur un processus (…) que sur un résultat défini à obtenir. Tout se passe comme si les activités à projet impliquaient une dynamique à deux temps : le premier temps est consacré à l’esquisse obligatoire de l’activité à réaliser, qui fera fonction de schéma directeur (…) Une telle esquisse vise à anticiper le second temps, qui est la réalisation de l’activité proprement dite »[24].

            La nature des problématiques liées à la participation des usagers au sein du fonctionnement du CHU, notamment la dimension communicationnelle, amène à devoir faire le choix du management participatif. « Le manager participatif va consulter ses salariés, discuter du problème avec eux, dès lors une décision en commun sera prise. Ce type de management prône donc la communication, le dialogue et la délégation de pouvoir. Il en résulte la naissance d’une véritable culture d’entreprise »[25]. Comme cadre intermédiaire, ma fonction consiste alors à jouer un rôle d’impulsion du projet. Les mesures constitutives du plan d’action résultent d’une collaboration constante entre les professionnels, mais aussi avec ma hiérarchie et les usagers.

Le plan d’action se structure autour de deux axes stratégiques majeurs :  mettre en œuvre un dispositif pour améliorer la communication linguistique et mobiliser les compétences interculturelles pour faire participer davantage les usagers à l’aide de l’empowerment. Enfin, au-delà des mesures constitutives de ce plan d’action et dans une volonté d’amélioration continue des pratiques, il convient de mener une évaluation du projet à court, moyen et long terme. Celle-ci s’appuie sur des critères prédéfinis et des indicateurs afin de mesurer l’efficacité des mesures mises en œuvre, d’amender et pérenniser les nouvelles pratiques ou proposer des adaptations.

 

A-   Mettre en œuvre un dispositif pour améliorer la communication linguistique et interculturelle

 

1)      L’empowerment

 

La notion d’empowerment permet d’englober les deux éléments principaux du constat, en l’occurrence la problématique de la communication interculturelle et les imperfections dans les modalités de participation des usagers au fonctionnement du CHU. Ce terme difficile à traduire peut se définir comme « la possibilité pour les personnes ou les communautés de mieux contrôler leur vie »[26]. La démarche repose sur quatre axes d’action principaux : adoption d’une unité d’analyse « acteur en contexte », négociation de la définition du changement visé et de ses modalités avec les personnes concernées, prise en compte des contextes d’application et introduction d’une démarche conscientisante[27].

En d’autres termes, il s’agit d’analyser les situations individuelles en se basant davantage sur le contexte que sur un référentiel des outils de la loi 2002-2 pouvant paraître en décalage avec les spécificités des profils des migrants. La posture du professionnel ne doit pas être infantilisante, ce qui pourrait apparaître comme une sorte de mépris à leur égard, voire une condescendance culturelle. Il faut consulter les usagers pour recueillir leur avis et leurs conseils sur les modalités d’accompagnement proposées par le CHU. La démarche « conscientisante » correspond alors une pédagogie autour des valeurs françaises et de attendus pour une intégration future dans la société et dans le monde du travail français.

Yann Le Bossé résumait l’attitude des travailleurs sociaux agissant dans les principes de l’empowerment par la formule : « ni flic, ni sauveur »[28]. Ce changement de paradigme des pratiques conduit à redéfinir les bases du schéma de communication existant avec les migrants dans la perspective de favoriser une plus grande participation. En termes de management, l’empowerment doit se traduire par une pratique managériale plus participative.

 

Cette démarche semble réalisable car le fonctionnement du CHU repose en grande partie sur une communication orale et privilégie les échanges constants entre l’ensemble des acteurs et des usagers. Il faudra ainsi élaborer des outils permettant de surmonter les obstacles linguistiques à la mise en œuvre du management participatif au sein du CHU migrants. Cela passe donc par un apprentissage renforcé de la langue française pour améliorer la qualité de la communication linguistique. L’association a toujours privilégié la formation et l’innovation dans les pratiques. En effet, l’empowerment ne s’improvise pas. Il s’agit d’une remise en cause profonde de l’approche des pratiques, ce qui nécessite d’accompagner les professionnels dans ce travail de transformation de leur philosophie d’action, de leur savoir-faire. En ce qui concerne les compétences interculturelles, il existe des formations qui aident à mieux appréhender et à maîtriser les échanges interculturels.

 

2)      La mise en place de groupes de travail autour de la communication linguistique et interculturelle

 

Les groupes de travail s’inscrivent dans la démarche du management participatif. Ils reprennent l’approche des cercles qualité, assez sollicitée dans les ESMS. Inventé dans les années 1960, le cercle qualité peut se définir comme un : « petit groupe d’employés qui se réunit régulièrement, de manière à rechercher collectivement et méthodiquement des moyens d’améliorer quantitativement et qualitativement la production, et d’une manière plus générale les conditions de travail dans l’entreprise »[29]. Ces groupes de travail correspondent à des moments de rencontre limités dans le temps et en nombre de participants.

 

L’initiative répond à un double objectif. En premier lieu, ces groupes de travail doivent se comprendre comme des moments de réflexion collective autour de la communication interculturelle et linguistique, mais aussi autour de l’idée de renforcer la participation des usagers au sein du CHU. Ensuite, ces groupes de travail ne se résument pas à des moments d’échange. En effet, ils ont également pour finalité de permettre de formuler des propositions pour aboutir à l’élaboration de nouveaux procédés. Dans une logique de management participatif, le cadre intermédiaire doit chercher à s’appuyer sur les compétences, les savoir-faire et les expériences de chacun, tant les professionnels, les partenaires extérieurs que les usagers.

 

Dans la mise en œuvre des groupes de travail, après accord de ma hiérarchie, mon rôle ne consiste pas à imposer des solutions « clés en main », mais à parvenir à mobiliser les savoir-faire de chacun des acteurs qui participent peu ou prou à la vie du Centre d’Hébergement d’Urgence afin que les solutions soient acceptées par tous. Il me semble envisageable de réunir ces groupes de travail, dont la composition varierait selon le thème abordé, à un rythme régulier, à raison d’une à deux fois par mois. Je pense structurer le travail de ces réunions à l’aide d’un cahier de prise de notes. Les remarques émises lors des réunions seraient ainsi consignées. Un récapitulatif effectué à chaque fin de réunion permettrait de fixer le thème de la réunion suivante. Au bout d’un trimestre, il me semble possible d’évaluer la mise en œuvre et les premiers résultats de cette démarche.

 

3)      La mobilisation des compétences des acteurs externes et internes

 

Le diagnostic soulignait un besoin de formation interculturelle et linguistique tant chez les professionnels que chez les usagers de l’établissement.

 

La formation constitue un instrument efficace pour fédérer les professionnels autour d’un projet commun dans une démarche d’empowerment , et ainsi de « se construire un vocabulaire commun, sans pour autant produire une pensée unique, elle diminue les risques de malentendus et donc de tensions, mais développe aussi la notion d’équipe et d’appartenance à un groupe, facteurs de dynamisme ».[30] Pour savoir sur quel point en priorité former les professionnels, il me faut dans un premier temps recenser les besoins des professionnels en formation, en particulier sur les compétences interculturelles et éventuellement linguistiques. Pour certains professionnels, il est possible de solliciter des cursus axés sur les compétences interculturelles par le dispositif de la VAE (Validation des Acquis et de l’Expérience), ou de mobiliser d’autres droits à la formation. Dans une approche managériale participative, le choix de formation individuelle ne doit pas être imposé par le cadre intermédiaire. Il doit se faire sur la base du volontariat des professionnels. A mon niveau, mon rôle est alors de mobiliser les équipes du CHU sur la nécessité de se former sur les questions de la communication linguistique et interculturelle. Il convient aussi de consulter la direction pour faire un état des lieux de l’utilisation actuelle du budget formation, ainsi que du rôle que pourrait jouer OPCA dans cette démarche.

 

La formation peut aussi être collective. Il faut tout de même avoir à l’esprit qu’une telle initiative représente un coût pour l’établissement que ce dernier ne peut pas forcément se permettre dans le cadre d’une contrainte budgétaire que connaissent beaucoup d’ESMS. Par exemple, il existe des formations pour développer les compétences interculturelles. Elles doivent aider à mieux appréhender et à mieux maîtriser les échanges interculturels. Il s’agit aussi de favoriser la cohabitation et la collaboration entre des personnes ayant diverses appartenances culturelles dans un même contexte professionnel. Ces formations poursuivent trois objectifs[31]. Le premier est de comprendre et d’identifier les valeurs du pays d’origine de l’interlocuteur avec lequel le professionnel travaille. Le second va insister sur l’acquisition des éléments nécessaires pour appréhender des situations nouvelles. Le troisième objectif porte sur l’adaptation du comportement de l’individu à un environnement culturel nouveau. Ce dernier point concernerait davantage les usagers du CHU.

 

Il semble aussi intéressant de mobiliser les usagers pour renforcer les compétences interculturelles des professionnels et inversement. Le fonctionnement du CHU reposerait alors davantage sur la logique de l’organisation apprenante. L’ANACT définit l’organisation apprenante comme une structure pouvant « faire face à l’imprévu, de faire de cet imprévu une opportunité d’apprentissage tant individuel que collectif, d’ajuster son fonctionnement et ses procédures en apprenant elle-même de l’imprévu, selon une logique d’évaluation continue »[32]. La mise en œuvre de cette initiative peut s’appuyer sur les instances de travail collectif pour renforcer continûment les compétences des professionnels du CHU. Chaque acteur, usagers et professionnels, devient une force de proposition, mais également d’action.

 

Pour résumer le propos cette sous-partie, il convient d’insister sur la volonté d’impulser une dynamique nouvelle et inclusive pour repenser collectivement les modalités de la communication interculturelle et linguistique au sein du CHU. L’instauration de groupes de travail semble s’inscrire pleinement dans cette dynamique d’empowerment. Il semble possible de mobiliser les compétences et internes pour renforcer les savoir-faire des professionnels et des usagers du Centre d’Hébergement d’Urgence quant à la communication linguistique et interculturelle.

 

B-    Mobiliser les compétences interculturelles pour faire participer davantage les usagers

 

1)      Mettre en place une communication plus visuelle autour des principes et des outils de la loi 2002-2

 

Confucius disait « une image vaut mille mots ». Etant convaincu par la justesse de ces propos, j’estime que la communication visuelle reste le meilleur moyen pédagogique pour faire passer un message a priori complexe, en l’occurrence les principes et les outils de la loi 2002-2, auprès d’un public dont la maîtrise de la langue française s’avère peu ou prou imparfaite. Ainsi, la vidéo semble un support intéressant pour sensibiliser à la notion de citoyenneté ou expliquer l’intérêt du projet personnalisé. Ce support a le mérite de toucher davantage le public, néanmoins l’obstacle linguistique demeure.

 

La bande dessinée me semble aussi être un bon support pour réaliser ce travail. Ce choix peut a priori s’apparenter à un processus d’infantilisation des usagers. Toutefois, je reste convaincu que ces bandes dessinées facilitent la visualisation des enjeux et la mémorisation des droits et des démarches. Reste à savoir où trouver une telle documentation. La question de la citoyenneté et des valeurs fondamentales de la République française occupe une place importante dans les manuels scolaires des jeunes Français dès leur plus jeune âge. Il semble alors possible de trouver des documents visuels conçus pour les plus jeunes pouvant convenir au public du CHU. En l’absence de documentation répondant aux attentes de cette démarche, il est envisageable de la construire avec les équipes.

 

2)      Intégrer les usagers par des activités ludiques

 

Même si le CHU propose un hébergement temporaire et d’urgence aux personnes accueillies, la durée du séjour demeure significative. Ainsi, la difficulté à trouver des structures adaptées vers lesquelles réorienter les migrants, mais aussi les multiples difficultés administratives auxquelles ils peuvent être confrontés contribuent à augmenter la durée de séjour de certains usagers. Cette situation permet alors d’envisager des dispositifs d’intégration des usagers dans le fonctionnement du CHU sur la durée, au moins sur du moyen terme.

 

A l’image des supports imagés, les activités ludiques peuvent apparaître comme infantilisantes et chronophages. Néanmoins, elles présentent une vertu pédagogique et constituent souvent un moyen de souder des individus autour d’un collectif et de véhiculer des valeurs. Par exemple, les activités ludiques et sportives véhiculent des valeurs positives qui se rapprochent de celles des droits fondamentaux : respect de soi et de l’autre, sentiment d’appartenance à un collectif, agir en prenant en compte les droits et les devoirs de chacun, observer les règles acceptées et élaborées par tous.

 

Il me semble alors possible de s’appuyer sur une série d’activités ludiques déjà mises en place pour les inscrire dans une progression qui aboutirait à un plus grand respect et à une plus grande prise de conscience de la participation au sein du CHU. Par exemple, nous pourrions organiser des « Jeux Olympiques » en constituant des équipes en fonction des appartenances culturelles des usagers, ou tout simplement par affinités personnelles et pour éviter des tensions à caractère ethniques et/ou confessionnelles. Les activités ludiques constituent alors un moyen intéressant pour intégrer davantage les usagers à la vie du CHU.

 

3)      Consulter fréquemment les usagers dans l’organisation des pratiques

 

Le diagnostic fait apparaître une position de retrait des usagers par rapport à certains processus susceptibles de favoriser leur implication dans le fonctionnement du CHU, par exemple le CVS. Il s’agit alors de mettre en place une consultation fréquente mais moins formalisée qui inscrit l’usager dans une relation égalitaire. Il est ainsi conforté dans son rôle d’acteur impliqué. Il devient, d’une certaine manière, reconnu comme expert de sa propre situation, expertise légitimée par une expérience intime de ses difficultés. Il faut éviter que cette volonté de participation des usagers ne s’apparente à une procédure administrative et trop formelle. La démarche consiste plutôt à nouer des liens de proximité avec les résidents en s’appuyant sur la qualité de la communication existante entre les professionnels et le public.

 

Il me semble intéressant de profiter de ces moments d’échange, individuels ou collectifs, pour demander aux usagers leur avis sur l’organisation des pratiques. La démarche doit dépasser la simple écoute des remarques des usagers. Ils doivent pouvoir être force de proposition et les professionnels vont alors chercher à intégrer, dans la mesure du possible, ces recommandations pour mieux satisfaire leurs besoins.

 

Pour résumer cette sous-partie, la participation de l’usager au fonctionnement du CHU passe par une interaction plus complexe, mais aussi plus égale entre les professionnels et les usagers. Il me semble pertinent dans un premier temps de repenser la pédagogie autour des principes et des outils de la loi 2002-2. Les activités ludiques forment un levier d’action intéressant pour promouvoir autrement l’idée de participation et de communication interculturelle. La participation de l’usager au fonctionnement du CHU doit en fin de compte correspondre à une plus forte implication des usagers dans l’organisation des pratiques. En tant que cadre intermédiaire, mon rôle va aussi consister à évaluer la pertinence et l’efficacité de ces mesures.

 

 

C-   L’évaluation

 

1)      Les indicateurs et les critères d’évaluation

 

« Evaluer c’est apprécier la pertinence des actions au regard des besoins et apprécier les effets-impact au regard des objectifs »[33]. En tant que cadre intermédiaire, je dois vérifier la cohérence entre le plan d’action initial et la réalité du terrain à travers le diagnostic. Il s’agit de mesurer l’écart éventuel entre l’intention et le résultat pour proposer un plan d’amélioration. Il faut s’appuyer sur deux éléments : les indicateurs et les critères. Les indicateurs, qualitatifs ou quantitatifs, peuvent se définir comme : « un élément, une donnée, une variable représentative qui permet d’observer d’éventuelles progressions en fonction des objectifs tactiques poursuivis, des activités pilotées, des besoins et des préférences. Il doit délivrer une information en temps réel ou mise à jour très régulièrement, liée à l’objectif »[34]. Quant aux critères, ils doivent aider à identifier six éléments faisant la réussite d’un projet : la pertinence, la cohérence, l’efficience, l’efficacité, l’impact et la viabilité.

 

Critères et indicateurs de l’évaluation du projet

Objectifs généraux Objectifs opérationnels Critères Indicateurs
Création d’un dispositif autour de la communication linguistique et interculturel Groupes de travail Echanges constructifs Nombres et qualité des propositions
Recours à des formations pour développer les compétences interculturelles Réception des informations par les professionnels Prise en compte du contenu d l’intervention dans les pratiques
Mettre en place une organisation apprenante Implication et force de proposition des professionnels Evolution qualitative et renouvellement des pratiques
Participation de l’usager au fonctionnement du

CHU

Communication visuelle autour de la notion de citoyenneté Rassemblement de documentation visuelle Quantité et pertinence des documents recueillis
Organisation d’activités ludiques Cohérence des activités ludiques à moyen et long termes Feuille de route des activités envisagées
Consultation fréquente des usagers Mobilisation des participants Nombre et qualité des échanges

2)      Les outils de l’évaluation

 

Tout d’abord, il convient de signaler un manque d’outils pour évaluer la dimension communicationnelle du plan d’action. Effectivement, « la communication interne est la dernière grande fonction dont l’efficacité n’est pas systématiquement mesurée »[35]. Cette situation s’explique par la dimension qualitative, et en grande partie informelle, des échanges qui existent entre les usagers et les professionnels du CHU. En tant que cadre intermédiaire, il faut mobiliser mes capacités d’observation, et celles de mes collègues, afin de réussir à évaluer la progression de la communication interne. Il m’est cependant possible de structurer mon analyse autour de six thèmes qui, d’après les travaux de Christian Michon, structurent la communication interne, c’est-à-dire l’information, la convivialité, la participation, la fédération, l’implication et l’identification.[36]

 

Il semble toutefois possible de m’appuyer sur divers outils pour effectuer une mesure quantitative, en partie qualitative, du niveau d’avancement des mesures et de leurs effets : le calendrier des groupes de travail, le compte-rendu des réunions de professionnels et des usagers, des enquêtes de satisfaction qu’il est possible de remettre aux usagers et aux professionnels en s’inspirant du modèle des questionnaires ayant servi au diagnostic de ce mémoire, les projets personnalisés des usagers, et une feuille de route pour le suivi des activités ludiques. Ces outils doivent surtout permettre de réaliser l’évaluation de la progression des initiatives sur différentes temporalités, tout en précisant la pérennité des différents axes du projet.

 

3)      Les étapes de l’évaluation

 

A court terme, c’est-à-dire moins de trois mois, il s’agit en premier lieu de s’assurer de la qualité du contact et des échanges. Par exemple, l’évaluation de qualité des groupes de travail autour de la communication linguistique et interculturelle et l’évaluation de la qualité des échanges lors des réunions avec les usagers peut se faire assez rapidement. En ce qui concerne les entretiens individuels avec les usagers, cela va dépendre de la personnalité de l’individu. Ce dernier peut avoir un fort caractère et faire preuve dans un premier temps d’une certaine réticence vis-à-vis de la démarche du plan d’action. A moyen terme, c’est-à-dire entre six mois et un an, il semble possible d’évaluer plus d’initiatives du plan d’action. Dans ce délai de temps, nous pouvons envisager avoir réuni les documents nécessaires sur les principes et les outils de la loi 2002-2 et les avoir adaptés aux besoins et aux spécificités des usagers. Ce délai me semble raisonnable pour apercevoir les premiers résultats des activités ludiques élaborées.

Les mesures qui ont un caractère organisationnel demandent un temps plus important avant de pouvoir être évaluées. Effectivement, la mise en œuvre de l’empowerment et de l’organisation apprenante constitue un changement significatif dans la philosophie des pratiques professionnelles de l’établissement. A ce titre, la démarche fait l’objet de longues discussions entre l’ensemble des acteurs. Même si les équipes ne manifestent pas une forte résistance au changement et que l’association a une culture qui privilégie l’innovation, une telle démarche constitue tout de même une profonde remise en cause de la culture professionnelle et nécessite forcément du temps.

 

Il existe donc une palette assez importante d’outils pour effectuer le recueil des données sur les différents aspects du plan d’action, et ainsi évaluer les initiatives qui le composent. D’un côté, il s’agit de mesurer la dimension quantitative des initiatives. D’un autre côté, il est possible d’utiliser certains instruments d’évaluation pour analyser la dimension qualitative des initiatives du plan d’action. Il est possible de réaliser une évaluation des aspects communicationnels à court terme. Les mesures qui reposent sur l’organisation d’activités peuvent assez rapidement porter leurs fruits, et ainsi être évaluées à moyen terme. Cependant, les mesures à caractère organisationnel et structurel touchent aux pratiques professionnelles. Elles doivent être envisagées et évaluées sur un plus long terme.

            Conclusion 3ème partie

 

En tant que cadre intermédiaire, ma démarche consiste donc à savoir comment il est possible à mon niveau de réussir à mettre œuvre un projet managérial, tout en tenant compte du caractère interculturel du profil des usagers du CHU, pour renforcer la participation des usagers à l’aide de l’empowerment et en faire pleinement des acteurs de leur projet. Il s’agit d’identifier des outils permettant d’atteindre cet objectif et de réfléchir à une organisation des pratiques pouvant améliorer la communication interculturelle et la participation des usagers. La réussite de l’organisation du travail basée sur le management participatif a un caractère collectif, mais dépend en partie de la personne qui la met en œuvre. Elle doit parvenir à convaincre les participants de son bien-fondé pour éviter toute résistance au changement. Elle doit aussi veiller à ce que les outils proposés soient accessibles à tous. Il faut faire preuve de capacité de dialogue pour parvenir à réunir les conditions d’un travail en équipe, mais aussi de patience pour que le projet s’inscrive dans la durée.

Ce plan d’action se conçoit comme une trame et pas comme une solution clés en main imposée par le cadre intermédiaire. En effet, le management participatif sur lequel repose ce projet de développement de l’empowerment comme instrument de participation plus forte des usagers a pour but de peaufiner la structure de ce plan d’action. Les groupes de travail doivent notamment permettre de compléter cette trame par des mesures concrètes résultant des propositions des acteurs, professionnels et usagers, pour aboutir à une plus grande participation des migrants du CHU dans un esprit indispensable de consensus.

 

 

 

 

 

 

Conclusion

 

Comme tout changement organisationnel, la modification des pratiques dans l’optique d’un renforcement de la participation des usagers par la mise en œuvre de l’empowerment demeure une démarche toujours délicate et susceptible de faire l’objet de résistance de la part des professionnels, ainsi que des usagers. En tant que cadre intermédiaire, ma démarche a consisté à privilégier un management participatif pour pouvoir inclure l’ensemble des acteurs dans une dynamique commune. En effet, le diagnostic réalisé dans le cadre de ce mémoire a souligné la nécessité de réaliser des progrès par rapport à la communication interculturelle entre les acteurs.

Le projet était alors structuré autour de groupes de travail et d’un effort pédagogique autour des outils et des principes de la loi 2002-2 pour renforcer la qualité de la communication interculturelle et l’implication des usagers du CHU. Il s’agit aussi de créer une dynamique et une culture de pratiques nouvelles en adoptant des initiatives innovantes. En tant que cadre et au regard des éléments qui ressortaient du diagnostic, une de mes missions était de pouvoir proposer un plan d’action multidirectionnel, qui intègre en l’occurrence des éléments matériels, organisationnels, ainsi que des facteurs relevant davantage de la psychologie et de la subjectivité des acteurs.

La réussite du plan d’action est aussi tributaire de mon positionnement professionnel. Je dois parvenir à être une force de conviction, et dans une moindre mesure de proposition. Pour être acceptées par tous et mises en œuvre sans difficulté, les mesures du projet doivent en partie correspondre à des propositions formulées par les acteurs eux-mêmes. La démarche managériale participative s’accompagne aussi d’un travail de pédagogie autour des mesures et des outils envisagés afin que ces derniers soient compris, et ainsi acceptés de tous les acteurs, professionnels et usagers du CHU.

L’élaboration et la formulation de ce plan d’action pour répondre à cette demande institutionnelle du CHU n’auraient sans doute pas été possibles sans la formation Caferuis. Les enseignements que j’ai reçus m’ont permis d’intégrer des concepts théoriques, des approches managériales et méthodologiques qui m’étaient inconnues jusqu’à alors. Tout cela a donné une consistance et une pertinence à mes initiatives. Je parviens ainsi à construire une approche multifactorielle des problématiques et à inscrire les mesures et les stratégies sur du court, moyen et long terme.

Bibliographie

 

I-Ouvrages

 

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ANESM, Le questionnement éthique dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux, juin 2010.

ANESM, Expression et participation des usagers dans les établissements relevant du secteur de l’inclusion sociale, Saint-Denis, 01/2012.

BARRETTE, Christian, GAUDET, Edith, LEMAY, Denyse, Guide de communication interculturelle, Montréal, Éditions du Renouveau Pédagogique, 1996.

BILET, Virginie, GUERRIN, Valérie, LIOTTIER, Miguel, Réussir le DSCG 5- Management des systèmes d’information, Paris, Eyrolles, 2012.

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BOUTINET Jean-Pierre, Anthropologie du projet, Paris, PUF, 2015.

CHEVRIER, Sylvie, Le management des équipes interculturelles, Paris, PUF, 2000.

COLAS, René, Comment, par l’écoute, améliorer la compétitivité de votre entreprise ?, Paris, Société des écrivains, 2013.

CROZIER, Michel, FRIEDBERG, Erhard, L’acteur et le système, Paris, Editions du Seuil, 1997.

GACOIN, Daniel, Guide de l’évaluation en action sociale et médico-sociale, Paris, Dunod, 2010.

JANVIER, Roland, MATHO, Yves, Comprendre la participation des usagers, Paris, Dunod, 2011.

LIBAERT, Thierry, Introduction à la communication, Paris, Dunod, 2014.

MAGAKIAN, Jean-Louis, 50 fiches pour comprendre la gestion stratégique des ressources humaines, Paris, Bréal, 2003.

MONTEIL Bernard, Cercles de qualité et de progrès pour une nouvelle compétitivité, Paris, Ed. d’Organisation, 1983.

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PETTER, Alain, Le Conseil de la vie sociale, Vernon, 2010.

SACRISTE, Dominique, Développer le projet personnalisé, Mémoire de l’École Nationale de Santé Publique, Paris, 2001.

 

II-Articles

 

CLOUTIER, Julie, « Qu’est-ce que l’innovation sociale ? », in Cahier du CRISES, 11/2003.

CONJARD, Patrick, DEVIN, Bernard, « Formation-organisation : une démarche pour construire une organisation apprenante », in Etudes et documents, Lyon, Réseau Editions ANACT, 07/2001.

DICQUEMARRE Daniel, « La résistance au changement, produit d’un système et d’un individu », in Les Cahiers de l’actif, n°292-293, septembre-octobre 2000.

LEVY, Lionel, « Une efficacité qui cherche à se mesurer », in Stratégies Magazine, n°1418, 15/06/2006.

MELCHIOR, Jean-Philippe, « De l’éthique professionnelle des travailleurs sociaux », in Informations sociales, 5/2011 n° 167.

MICHON, Christian, « Management et communication interne : les six dimensions qu’il faut considérer », in Communication et organisation, n°5, 1994.

PIERRE, Philippe, « Le difficile croisement des cultures en entreprise », in Communication et organisation, n°22, 2002.

RAPPAPORT, Julian, «Terms of empowerment/exemplars of prevention : toward a theory for community psychology», in American journal of community psychology, 1987, vol.15, n°2.

SOULE, Bastien, « Observation participante ou participation observante ? Usages et justifications de la notion de participation observante en sciences sociales », in Recherches qualitatives, n°1, vol.27, 2007.

VALLERIE, Bernard, LE BOSSE, Yann, « Le développement du pouvoir d’agir (empowerment) des personnes et des collectivités : de son expérimentation à son enseignement », in Les Sciences de l’éducation – Pour l’Ère nouvelle, vol. 39, n°3, 2006.

 

III-Sites

 

legifrance.gouv.fr

http://www.terresneuves.com/fr/terres-neuves/approche-methodologique

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Annexes

 

Annexe 1 : Les outils de la loi 2002-2

 

Le livret d’accueil Il est remis à l’usager et/ou son représentant légal dès le premier entretien à l’occasion de la procédure d’accueil. Il présente l’établissement et donne des repères afin de garantir les droits de la personne

 

 

Le contrat de séjour Il détermine les objectifs, la nature de l’accompagnement et détaille la liste et la nature des prestations offertes par l’établissement

 

 

Le règlement de fonctionnement Il définit les droits et devoirs de la personne accueillie mais aussi de l’établissement dans le respect de la vie en collectivité
La charte des droits et libertés de la personne accueillie Elle est remise à l’usager et expliquée à l’admission.  Elle précise 12 règles : principe de non-discrimination, droit à un accompagnement adapté, droit à l’information, principe de consentement éclairé et du libre choix, droit à la renonciation, celui du respect des liens familiaux, de  la protection, à l’autonomie, un principe de prévention et de soutien, le droit à l’exercice des droits civiques, à la pratique religieuse et au respect de la dignité

 

La personne qualifiée Elle intervient pour aider l’usager à faire valoir ses droits en cas de conflit avec l’établissement
Le projet d’établissement Il a été réactualisé et tient compte de la règlementation en vigueur, d’éléments relatifs aux droits des personnes, à la vie collective et au respect de la singularité de chaque personne accueillie
Le Conseil de Vie Sociale (CVS) Il se réunit trois fois par an. Il donne un avis et formule des propositions sur le fonctionnement de l’établissement.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Annexe 2 : Grille d’entretien

 

  • Comment évaluez-vous la qualité de la communication avec les usagers ?
Très bonne Bonne Mauvaise Très mauvaise
       
  • Les usagers peuvent-ils participer davantage au fonctionnement du CHU ?
Oui Plutôt oui Plutôt non Non
       

 

  • Les documents et les informations vous paraissent-ils clairs pour les usagers ?

Oui                              Non                             En partie

Pourquoi ? :

  • Sur quel(s) point(s) la communication avec les usagers peut-elle être améliorée ?

 

  • Quel outil de la loi 2002-2 (ou d’une autre loi) vous paraît le plus adapté pour renforcer la participation des usagers au sein du CHU ? Pourquoi ?

 

 

  • Vous considérez les relations avec les usagers comme :

-Proches           -Neutres          -Distantes

 

  • Hormis la question linguistique, identifiez-vous des facteurs susceptibles de rendre plus difficile l’accompagnement du public ?

 

  • Comment l’appartenance culturelle d’un usager peut-elle influencer votre relation avec lui ?
  • Ressentez-vous un besoin de formation pour mieux accompagner les usagers ? Si oui, sur quel point de votre pratique professionnelle porte-t-il ?
  • De nouveaux partenariats extérieurs vous semblent-ils pertinents pour améliorer l’accompagnement du public ? Si oui, pensez-vous à une ou des structures en particulier ?
  • Dans quelle mesure les changements organisationnels de ces derniers mois ont-ils pu fragiliser vos pratiques professionnelles ?
  • Quel regard portez-vous sur l’idée d’empowerment (responsabilisation) des usagers du CHU et de compétences interculturelles pour améliorer la relation à l’usager ?

 

NOM Prénom Septembre 2017
Mémoire du Certificat d’Aptitude aux Fonctions d’Encadrement et de Responsable d’Unité d’Intervention Sociale.
Favoriser l’empowerment des usagers dans un contexte interculturel : Le CHU migrants
J’occupe le poste de chef de service au sein d’un Centre d’Hébergement d’Urgence (CHU). Le CHU doit assurer une mise à l’abri temporaire des migrants dans des centres d’hébergement dignes. La qualité de la communication est aussi un préalable nécessaire pour favoriser la demande institutionnelle de mise en œuvre d’une participation accrue des usagers. Cependant, pour le CHU, cette démarche se heurte à un problème de communication interculturelle avec les usagers.

Dans quelle mesure un cadre intermédiaire peut-il impulser une démarche d’empowerment pour favoriser la participation des usagers au sein d’un CHU ?

Le respect du droit fondamental au logement, ainsi que l’accueil des migrants, constituent des éléments importants des politiques publiques. Le CHU se caractérise par une grande souplesse de fonctionnement, à la fois volontaire et subie, et par une prédominance de la communication, comme élément structurant de l’organisation des pratiques.

Le diagnostic fait apparaître une communication de qualité et une participation des usagers à certains aspects du fonctionnement de l’établissement. Cependant, il peut exister des points concernant l’organisation des pratiques qui reste imparfaitement adaptée à l’idée de communication interculturelle. Cela résulte en partie d’une appropriation insuffisante des outils favorisant la participation des usagers.

Le plan d’action va chercher à mettre en œuvre une démarche empowerment par le management participatif se structure autour de deux axes stratégiques majeurs :  mettre en œuvre un dispositif pour améliorer la communication linguistique et mobiliser les compétences interculturelles pour faire participer davantage les usagers du CHU.

 

 

 

Mots-clés : CHU, migrants, participation, empowerment.

Nombre de pages : 44 Volume annexes : 2

 

 

[1] BARRETTE, Christian, GAUDET, Edith, LEMAY, Denyse, Guide de communication interculturelle, Montréal, Éditions du Renouveau Pédagogique, 1996, p.149.

[2] Textes législatifs disponibles sur legifrance.gouv.fr

[3]BONNEFOY, Christine, De l’exercice du pouvoir entre parents et professionnels dans le cadre de la protection de l’enfance : études des conditions d’exercice du pouvoir, entre contrainte et négociation, quelle place pour le conflit, Mémoire au Collège coopératif Rhône-Alpes, Lyon, 2007, p.23.

[4] Outils de la loi 2002-2 en annexe

[5]http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000823100

[6]SACRISTE, Dominique, Développer le projet personnalisé, Mémoire de l’École Nationale de Santé Publique, Paris, 2001, p.31.

[7]ANESM, Les attentes de la personne et le projet personnalisé, Saint-Denis, 12/2008, 52p.

[8]MELCHIOR, Jean-Philippe, « De l’éthique professionnelle des travailleurs sociaux », in Informations sociales, 5/2011 n° 167, p.124.

[9]ANESM, Le questionnement éthique dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux, juin 2010, p.18.

[10] CLOUTIER, Julie, « Qu’est-ce que l’innovation sociale ? », Cahier du CRISES, 11/2003, p.29

[11] LIBAERT, Thierry, Introduction à la communication, Paris, Dunod, 2014, p.55.

[12]Questionnaires en annexes

[13]SOULE, Bastien, « Observation participante ou participation observante ? Usages et justifications de la notion de participation observante en sciences sociales », in Recherches qualitatives, n°1, vol.27, 2007, p.128.

 

[14] CHEVRIER, Sylvie, Le management des équipes interculturelles, Paris, PUF, 2000, p.142.

[15] PIERRE, Philippe, « Le difficile croisement des cultures en entreprise », in Communication et organisation, n°22, 2002, p.5.

[16] Ibid.

[17] ANESM, Expression et participation des usagers, Saint-Denis, 2008, p.12.

[18] CROZIER, Michel, FRIEDBERG, Erhard, L’acteur et le système, Paris, Editions du Seuil, 1997, 500p.

[19] MONTOUSSE, Marc, Cent fiches de lecture, Paris, Bréal, 2003, p.149.

[20] PETTER, Alain, Le Conseil de la vie sociale, Vernon, 2010, 11p.

[21] JANVIER, Roland, MATHO, Yves, Comprendre la participation des usagers, Paris, Dunod, 2011, p.148.

[22] ANESM, Expression et participation des usagers dans les établissements relevant du secteur de l’inclusion sociale, Saint-Denis, 01/2012, p.1

[23] MAGAKIAN, Jean-Louis, 50 fiches pour comprendre la gestion stratégique des ressources humaines, Paris, Bréal, 2003, p.186.

[24] BOUTINET Jean-Pierre, Anthropologie du projet, Paris, PUF, 2015, p.99

[25] COLAS, René, Comment, par l’écoute, améliorer la compétitivité de votre entreprise ?, Paris, Société des écrivains, 2013, p.42.

[26] RAPPAPORT, Julian, «Terms of empowerment/exemplars of prevention : toward a theory for community psychology», in American journal of community psychology, 1987, vol.15, n°2, p.121.

[27] VALLERIE, Bernard, LE BOSSE, Yann, « Le développement du pouvoir d’agir (empowerment) des personnes et des collectivités : de son expérimentation à son enseignement », in Les Sciences de l’éducation – Pour l’Ère nouvelle, vol. 39, n°3, 2006, pp. 87-100.

[28] Ibid.

[29] MONTEIL Bernard, Cercles de qualité et de progrès pour une nouvelle compétitivité, Paris, Ed. d’Organisation, 1983, p.31.

[30] DICQUEMARRE Daniel, « La résistance au changement, produit d’un système et d’un individu », in Les Cahiers de l’actif, n°292-293, septembre-octobre 2000, p 91.

[31] http://www.terresneuves.com/fr/terres-neuves/approche-methodologique

[32] CONJARD, Patrick, DEVIN, Bernard, « Formation-organisation : une démarche pour construire une organisation apprenante », in Etudes et documents, Lyon, Réseau Editions ANACT, 07/2001, p.12

[33]GACOIN, Daniel, Guide de l’évaluation en action sociale et médico-sociale, Paris, Dunod, 2010, p.116.

[34]BILET, Virginie, GUERRIN, Valérie, LIOTTIER, Miguel, Réussir le DSCG 5- Management des systèmes d’information, Paris, Eyrolles, 2012, p.103.

[35]LEVY, Lionel, « Une efficacité qui cherche à se mesurer », in Stratégies Magazine, n°1418, 15/06/2006.

[36]MICHON, Christian, « Management et communication interne : les six dimensions qu’il faut considérer », in Communication et organisation, n°5, 1994.

Mémoire de fin d’études de 55 pages.

24.90

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