Mise En Place D’Un Pole D’Accompagnement Des Entreprises En Difficulte Au Sein D’Un Cabinet D’Expertise Comptable
MISE EN PLACE D’UN POLE D’ACCOMPAGNEMENT DES ENTREPRISES EN DIFFICULTE AU SEIN D’UN CABINET D’EXPERTISE COMPTABLE |
ANDRES Véronique |
SOMMAIRE
Chapitre 1. Un environnement difficile pour les PME. 10
Section 1. Augmentation des défaillances des entreprises. 10
1.1 Statistique des défaillances des entreprises. 10
1.2 Principales causes de défaillances. 12
1.3 Symptômes de difficulté des entreprises. 15
Section 2. Procédures complexes pour le traitement des entreprises en difficulté. 18
2.1. Niveau de difficulté des entreprises. 18
2.2. Procédures à l’amiable. 19
2.3. Procédures collectives. 23
Chapitre 2. Rôle de l’expert-comptable dans l’accompagnement des entreprises en difficulté. 33
Section 1. Les dirigeants démunis devant les difficultés de leurs entreprises. 33
1.1 Blocage psychologique des dirigeants : peur de l’échec. 34
1.2 Faible compétence en gestion. 34
1.3 Méconnaissance des procédures de traitement des difficultés. 36
Section 2. La valeur ajoutée de la mission d’accompagnement des entreprises en difficulté. 37
2.1. Intérêt de la mission pour le cabinet d’expertise comptable. 37
2.2. Intérêt de la mission pour le client. 38
2.3. Principaux freins à la mise en place du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté 39
PARTIE 2. ORGANISATION INTERNE AU SEIN DU POLE D’ACCOMPAGNEMENT DES ENTREPRISES EN DIFFICULTE.. 42
Section 1. L’organisation humaine du pôle d’accompagnement des entreprises. 42
1.1 Collaborateurs affectés au pôle suivant les besoins. 42
1.2 Collaborateurs dédiés au pôle. 43
1.3 Relations du pôle avec les autres collaborateurs. 45
Section 2. Les besoins en compétences du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté. 46
2.1. Profil des collaborateurs dédiés au pôle. 46
2.2. Problèmes rencontrés par le cabinet. 48
2.3. Formation technique des collaborateurs. 49
Section 1. La formalisation des méthodes et des procédures de travail au sein du pôle. 50
1.1 Intérêt de la formalisation des méthodes et des procédures de travail 50
1.2 Démarche de la mission du collaborateur : proposition de check-list. 51
1.3 Le dossier de travail du collaborateur. 61
Section 2. Les outils à utiliser par les collaborateurs pour le traitement des dossiers clients. 63
2.1. Questionnaire sur l’évaluation de la situation du client. 63
2.2. Arbre de décision pour le traitement des entreprises en difficulté. 69
2.3. Check-list des acteurs intervenant dans les entreprises en difficulté. 72
Section 1. La constitution d’une offre commerciale. 75
1.1 Elaboration d’une offre commerciale. 75
1.2 Construction d’un argumentaire commercial 77
1.3 Formation commerciale des collaborateurs. 80
Section 2. La commercialisation du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté. 83
2.1. Mise en place des outils de communication. 83
2.2. Trouver des entreprises en difficulté. 85
2.3. Fixation d’objectifs aux collaborateurs. 87
Chapitre 2. Suivi de la performance du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté. 88
Section 1. La tarification des missions du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté. 88
1.1 Politique de prix pour le pôle d’accompagnement. 88
1.2 Prise en compte des autres missions du cabinet d’expertise comptable. 90
1.3 Taux horaire, forfait et outils de calcul 91
Section 2. La rentabilisation du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté. 92
2.1. Suivi de la performance commerciale. 92
2.2. Contrôle des temps et des avancements des dossiers clients. 94
2.3. Suivi et amélioration de la rentabilité de chaque dossier client. 96
Le nombre de défaillance des entreprises de 2013 se trouve au même niveau que celui de 2009 après la crise financière mondiale, et croît chaque année. Le présent mémoire explique les causes et les symptômes de défaillance des entreprises et détaille les procédures mises en place par le tribunal de commerce pour prévenir et traiter ces difficultés. Le mémoire se focalise en outre sur les démarches à entreprendre par un expert-comptable pour mettre en place un pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté. Des outils sont par ailleurs proposés afin de faciliter les travaux des collaborateurs.
AGS Assurance Garantie des Salaires
BEI Banque Européenne d’Investissement
CA Chiffre d’Affaire
CBC Concours Bancaire Courant
CCSF Commission des Chefs de Services Financiers
CIP Centre d’Information sur la Prévention
CODEFI Comité Départemental d’Examen des difficultés de Financement
FNGS Fonds National de Garantie des Salaires
LJ Liquidation Judiciaire
LME Loi de Modernisation de l’Economie
LOA Location avec Option d’Achat
MEDEF Mouvement des Entreprises de France
OCDE Organisation de Coopération et de Développement Economique
PIB Produit Intérieur Brut
PME Petite et Moyenne Entreprise
RJ Redressement Judiciaire
SWOT Strengths – Weaknesses – Opportunities –. Threats
TPE Très Petite Entreprise
TVA Taxe sur la Valeur Ajoutée
Le nombre de PME en faillite en France s’élève à 61 468 entreprises en 2013 avec une hausse de 3 % par rapport au nombre de faillites enregistrées en 2012. De manière générale, le taux de défaillance de l’ensemble des entreprises françaises est de 0,81% (toute forme juridique et toute taille confondues). L’assureur Crédit Coface « anticipe une stabilisation des défaillances en France à un niveau élevé » en 2014.
Les causes de défaillance des entreprises sont de nature conjoncturelle ou structurelle. Elles incluent :
- des problèmes d’activité qui peuvent entraîner une réduction drastique du chiffre d’affaire, de la marge et de la rentabilité de l’entreprise.
- des problèmes de trésorerie (fonds propres insuffisants, dégradation de la cotation fournisseurs, refus du banquier de l’entreprise d’accorder un prêt, retard de paiement des fournisseurs,…).
Le niveau de difficulté des entreprises se situe à deux niveaux :
- l’entreprise commence à avoir des problèmes de trésorerie et a du mal à payer ses fournisseurs et ses créanciers.
- l’entreprise a de graves difficultés financières et se trouve en état de cessation de paiement.
Les dirigeants des PME attendent trop souvent la présentation des comptes annuels pour connaître leurs situations financières réelles : les difficultés sont ainsi détectées tardivement. Certains dirigeants ne disposent pas suffisamment de compétences en gestion : ils n’arrivent pas à identifier les sources réelles de leurs problèmes, ils réagissent très tardivement ou réagissent de manière peu efficace.
Peu de dirigeants ont le réflexe de faire un diagnostic de leur situation et de définir des actions pour remédier aux problèmes. En effet, lorsque les premières difficultés apparaissent, ces derniers devraient normalement :
- analyser la rentabilité de chacun de leurs produits et se recentrer uniquement sur les offres les plus rentables, optimiser les charges et revoir les marges,
- établir un plan d’action pour redresser l’entreprise,
- identifier des indicateurs clés qu’ils auront à surveiller (exemple : suivi des délais de règlement des clients, suivi de la conversion des prospections en commande, suivi du portefeuille de commandes, suivi journalier de la trésorerie,…) pour s’assurer que leur situation se redresse.
Par ailleurs, des solutions variées existent pour chaque niveau de difficulté :
- lorsqu’une entreprise connaît des difficultés financières et qu’elle n’est pas en état de cessation de paiement, ses dirigeants peuvent recourir au mandat ad hoc ou à la procédure de réconciliation.
- lorsque les difficultés d’une entreprise peuvent la conduire à un état de cessation de paiement, ses dirigeants peuvent faire appel à la procédure de sauvegarde.
- une entreprise en cessation de paiement peut recourir à la procédure de redressement judiciaire pour apurer son passif et pour pouvoir poursuivre son activité.
Les dirigeants des entreprises en difficulté se trouvent généralement désemparés : ils ressentent ces mauvaises passes comme un échec personnel et sont convaincus que leurs difficultés vont les mener directement à la liquidation judiciaire. Ce blocage psychologique favorise leur inaction : ils méconnaissent les solutions possibles et n’ont pas forcément le réflexe de demander de l’aide auprès d’un expert-comptable.
L’expert-comptable est bien positionné pour accompagner les entreprises en difficulté. Il est l’interlocuteur privilégié des PME, ses conseils sont crédibles et la profession est reconnue comme compétente par les dirigeants d’entreprises. Il connaît très bien la situation d’une entreprise déjà cliente du cabinet et peut rapidement appréhender les difficultés. Pour une entreprise non cliente, l’expert-comptable est capable d’analyser rapidement la situation de l’entreprise, d’identifier les problèmes et leurs sources, de définir le caractère structurel ou conjoncturel des difficultés, de développer différents scénarios de sortie de crise, d’établir un plan d’actions, de préciser les moyens nécessaires au redressement, de procéder aux premières actions urgentes et de recourir aux procédures de traitement des entreprises en difficulté.
Compte tenu de l’importance du nombre de défaillances d’entreprises et du manque de compétences des dirigeants, la création d’un pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté constitue une opportunité de développement pour un cabinet. Cette stratégie répond par ailleurs à la nécessité pour ce dernier de diversifier ses offres, et de fournir des services de conseil et d’accompagnement aux chefs d’entreprises.
Ce mémoire s’articule autour de la problématique: « Quelles sont les démarches à entreprendre par un cabinet d’expertise comptable pour mettre en place un pôle d’accompagnement des PME en difficulté en son sein ? ». Il a pour objectif de fournir à l’expert-comptable un « check-list » des différentes étapes à réaliser pour réussir la mise en place d’un pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté.
Le mémoire répond aux sous-questions ci-après :
- Dans quelles ressources le cabinet d’expertise comptable doit investir pour mettre en place un pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté ?
- Comment est-ce que le cabinet d’expertise comptable s’assure que toutes les procédures et solutions disponibles ont été réalisées par les collaborateurs ?
- Comment est-ce que le cabinet peut vendre cette mission en dépassant le blocage psychologique du chef d’entreprise qui pense que ses problématiques sont sans solution et vont forcément aboutir à une liquidation judiciaire ?
- Quel mode de tarification le cabinet peut appliquer pour assurer sa profitabilité ?
- Comment assurer et surveiller la rentabilité du pôle ?
Le mémoire se divise en trois parties :
- la première partie concerne l’adéquation de la mission d’accompagnement des entreprises en difficulté avec les besoins des dirigeants d’entreprises.
- la deuxième partie se focalise sur l’organisation interne à mettre en place par l’expert-comptable au sein du pôle
- la troisième partie se réfère au suivi de la gestion et de la performance du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté.
PARTIE 1. ADEQUATION DE LA MISSION DU POLE D’ACCOMPAGNEMENT DES ENTREPRISES EN DIFFICULTE AVEC LES BESOINS DES ENTREPRENEURS
Cette première partie concerne le rôle de l’expert-comptable dans l’accompagnement des entreprises en difficulté. Elle fournit un état des lieux de la défaillance des entreprises en France, et donne une indication sur les symptômes et les niveaux de difficulté de celles-ci. Elle fournit un panorama des procédures et des recours auxquels une entreprise en difficulté peut recourir. Il permet au lecteur de comprendre la complexité des opérations à mener par l’expert-comptable. Cette partie aborde également l’intérêt du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté pour le cabinet, l’intérêt de cette mission pour les PME en difficulté ainsi que les principaux freins à la création du pôle.
Chapitre 1. Un environnement difficile pour les PME
Les statistiques montrent une augmentation croissante des défaillances d’entreprises en France. Les difficultés des entreprises peuvent être causées par la conjoncture économique ou par des faiblesses internes. Des procédures ont été instaurées pour répondre à chaque typologie de difficulté. Beaucoup d’entreprises se retrouvent cependant en état de cessation de paiement.
Section 1. Augmentation des défaillances des entreprises
Le nombre d’entreprises en faillite en France s’élève à 61 468 entreprises au titre de l’année 2013, ce qui représente une augmentation de 3% par rapport à 2012. Le niveau le plus élevé de défaillances a été connu en 2009 et en 2013.
Figure 1. Histogramme de l’évolution des défaillances en France sur 10 ans
Source : Altares, Bilan 2013 Défaillances et sauvegardes d’entreprises
Le niveau de défaillance des micro-entreprises sans salariés a connu une diminution au cours des cinq dernières années (- 4 400 entreprises en 5 ans). Cette baisse s’explique par le fait que ces entreprises n’ont pas un besoin immédiat et urgent de trésorerie pour payer des salaires. Les TPE employant 1 à 5 salariés sont les plus sinistrées avec une augmentation de 6% entre 2012-2013 pour les entreprises avec un effectif de 1-2 salariés (18 400 TPE en 2013), une augmentation de 3% pour les entreprises de 3 à 5 salariés (9 500 TPE en 2013) et une augmentation de 10% pour les entreprises de 6 à 9 salariés (4 600 TPE en 2013). Ce sont les entreprises âgées de moins de 5 ans qui sont par ailleurs les plus touchées avec une augmentation de 8% entre 2012-2013 (30 000 TPE en 2013).
Les secteurs servant directement les consommateurs s’effondrent en raison de la baisse du pouvoir d’achat des consommateurs. Le nombre de défaillances d’entreprises dépasse le niveau de celui de 2009 dans plusieurs secteurs incluant le commerce (augmentation de 3,2% par rapport à 2012, les services aux particuliers (augmentation de 8 ,35% par rapport à 2012).
Les secteurs qui travaillent directement avec les entreprises résistent tant bien que mal à la conjoncture économique. La construction n’a par exemple enregistré qu’une hausse de 1,8%. L’industrie manufacturière connaît une faible hausse de 0,7%.
Le tableau ci-après fournit la répartition des défaillances par type d’activités :
Tableau 1 : Statistique des défaillances (RJ/LJ) en France par activité
Activités | 2004 | 2005 | 2006 | 2007 | 2008 | 2009 | 2010 | 2011 | 2012 | 2013 |
Agriculture | 1409 | 1309 | 1254 | 1163 | 1203 | 1218 | 1183 | 1191 | 1125 | 1261 |
Construction | 12228 | 12711 | 12245 | 14249 | 16807 | 19357 | 17963 | 17143 | 17324 | 17649 |
Commerce | 11501 | 11953 | 11403 | 11839 | 12822 | 13832 | 13138 | 13449 | 13506 | 13939 |
Industrie | 5307 | 5066 | 4657 | 4292 | 4547 | 5264 | 4598 | 4440 | 4439 | 4472 |
Information & Communication | 1521 | 1588 | 1405 | 1393 | 1487 | 1659 | 1593 | 1524 | 1544 | 1577 |
Transport & Logistique | 1953 | 2003 | 1609 | 1451 | 1697 | 2026 | 1939 | 1783 | 1953 | 1937 |
Activités financières & assurance | 254 | 283 | 226 | 251 | 304 | 413 | 352 | 389 | 395 | 386 |
Services aux entreprises | 4638 | 4728 | 4756 | 4977 | 6563 | 7369 | 7221 | 7312 | 7359 | 7459 |
Services aux particuliers | 1383 | 1445 | 1528 | 1529 | 1778 | 2038 | 2230 | 2276 | 2431 | 2634 |
Hébergement, restauration, débits de boisson | 5285 | 5446 | 5093 | 5542 | 6377 | 6764 | 6471 | 6543 | 6910 | 7255 |
Autres activités | 2863 | 2763 | 2915 | 3164 | 2577 | 2373 | 2608 | 2968 | 2794 | 2899 |
Ensemble des activités | 48342 | 49295 | 47091 | 49850 | 56162 | 62313 | 59296 | 59018 | 59780 | 61468 |
Source : Altares, Bilan 2013 Défaillances et sauvegardes d’entreprises
Bien que le tissu économique se redresse progressivement après la crise financière de 2008 et que les entreprises commencent à réinvestir, le nombre de défaillances tend à augmenter traduisant des difficultés croissantes au sein des entreprises. La Médiation du crédit constate par ailleurs une augmentation sensible du nombre de dossiers traités.
Selon Deloitte, la progression des défaillances des entreprises ne dépend pas des tailles des entreprises et de leurs secteurs d’activité. Elle se fonde sur l’incapacité d’une entreprise à s’adapter à la baisse de la demande sur le marché (donc à la baisse des volumes). 30% des PME sont arrivées à adapter leurs organisations pour faire face à cette baisse : elles sont arrivées à innover, à investir, et même à exporter. Les 70% des PME restantes ont du mal à faire face à ce bouleversement économique. Selon la Banque de France, 20% des PME ont présenté une capacité d’autofinancement négative en 2012. Ces statistiques traduisent une profonde fracture dans le tissu économique français.
2/3 des causes des défaillances des PME sont prévisibles et 1/3 sont accidentelles. Les principales causes de défaillance incluent :
Des causes internes :
- la phase de développement de l’entreprise : une PME est très sensible durant les deux premières années suivant sa création, lors d’une transmission et durant sa phase de développement.
- les erreurs de gestion : les causes de défaillance incluent l’inadéquation du choix stratégique choisi par le chef d’entreprise, la méconnaissance des prix de revient, la mésentente entre les dirigeants, l’insuffisance de compétences de la direction et de la main d’œuvre, la défaillance des dirigeants, le départ d’un dirigeant, la faiblesse du système d’information, l’absence d’utilisation ou la faible maîtrise des tableaux de bord.
- les difficultés financières qui se traduisent par une sous capitalisation chronique, une rupture du cycle de trésorerie ou un investissement mal financé. Selon le rapport annuel 2012 de l’observatoire des délais de paiement, 25% des défaillances d’entreprises sont causées par des problèmes de trésorerie et ce sont les PME de 20 à 50 salariés qui sont les plus touchées. Entre 2007 et 2011, le nombre de PME ayant connu des problèmes de trésorerie a augmenté de 60%. Malgré l’application de la loi LME depuis 2008, 1/3 des entreprises (tous secteurs et toute taille confondus) perçoivent le règlement de leurs factures dans un délai supérieur à 60 jours. Les grands clients des PME contournent la loi en imposant des délais cachés pour retarder les paiements de leurs factures.
- le manque d’activité (la difficulté de remplir les carnets de commande) s’est accentué depuis la crise financière et s’est combiné avec la baisse de pouvoir d’achat des consommateurs français.
- le retard dans le démarrage d’un « start-up » ou la lenteur dans la mise en œuvre de l’entreprise : le chef d’entreprise peut se trouver rapidement en mal de trésorerie à cause des décalages entre le début de la production, le début de la commercialisation, et la date de premier paiement des charges fixes.
- la mauvaise qualité des produits et des services rendus,
- l’incapacité de réagir et de s’adapter : les entreprises en difficulté financière manquent de dynamisme : ce comportement est dû par des lacunes constatées dans le système de gestion (absence de vision stratégique, absence de diversification, capitalisation limitée, faible compétence des managers).
- la réaction tardive des dirigeants a généralement tendance à aggraver la situation de l’entreprise. Ces derniers attendent généralement une amélioration de la conjoncture et se disent que la situation va s’améliorer progressivement, ils confondent une crise structurelle et une baisse conjoncturelle, ils ne disposent pas de tableaux de bord mensuels fiables. Les budgets formulés sont trop optimistes.
- la réaction lente des dirigeants qui se caractérise par des études et des réunions occasionnant des pertes de temps, une hésitation dans la prise de décision, des désaccords des managers sur les mesures à prendre,..
- l’incapacité du dirigeant de l’entreprise à maîtriser son environnement :
- le dirigeant n’arrive pas anticiper les évolutions de l’environnement industriel de l’entreprise (obsolescence des matériels et outils de production de l’entreprise, inadéquation des procédés techniques, absence de recyclage).
- il n’arrive pas à maîtrise son environnement financier puisqu’il ne gère pas les déséquilibres monétaires sur le marché international alors que cette gestion est nécessaire si l’entreprise réalise plusieurs opérations d’importation et d’exportation.
Des causes externes :
- la saturation de la consommation des produits proposés par l’entreprise.
- l’existence d’une forte concurrence dans le secteur d’activité concerné.
- la non réalisation d’une communication de masse par les PME faute de budget, alors que ce type de communication est une condition nécessaire pour l’amélioration et l’augmentation des ventes.
- les turbulences économiques qui surviennent en France ou à l’international. La crise financière de 2008 a eu des impacts sur la défaillance des entreprises : beaucoup de PME n’étaient pas assez capitalisées en fonds propres et s’étaient vite retrouvées en difficulté de trésorerie.
- le pouvoir de négociation des grands donneurs d’ordre et de la grande distribution qui exercent une pression considérable pour la baisse des prix de vente, ce qui implique pour les entreprises de baisser leurs marges.
- le pouvoir d’achat des consommateurs a baissé suite à la conjoncture économique et au poids du transfert social et fiscal (les impôts et les charges sociales représentent environ la moitié du PIB en France).
- les charges fixes ont tendance à augmenter.
- la hausse des prix des fournisseurs surtout lorsque ces derniers bénéficient d’une situation de quasi-monopole sur le marché.
- les nouvelles réglementations : la loi LME génère parfois des impacts défavorables puisque le délai de paiement fournisseurs est passé à 60 jours alors que le délai de paiement des clients est resté à 90 jours, ce qui a eu pour conséquence un décalage de trésorerie.
- l’augmentation de la concurrence : plusieurs secteurs font face à l’arrivée de nouveaux entrants qui opèrent dans l’e-commerce combinée avec une importante baisse des prix en raison de la faiblesse des coûts fixes que ces derniers supportent par rapport à une entreprise classique. Ils ne paient pas par ailleurs de TVA et d’impôt sur les sociétés. Tous les secteurs sont touchés par cette concurrence de l’e-commerce à l’exception de la distribution de produits non alimentaires. Dans le secteur agroalimentaire, des entreprises étrangères viennent concurrencer les entreprises françaises avec des prix de vente inférieurs, elles achètent en effet des matières premières à un prix plus compétitif dans plusieurs pays européens ou en Chine.
Bien que plusieurs symptômes caractérisent une entreprise en difficulté, la rupture de trésorerie constitue le principal signe avant-coureur. Elle se traduit par une insuffisance de liquidité qui empêche l’entreprise de payer ses fournisseurs, ses salariés, ses charges sociales, ses charges fiscales et ses dettes (emprunts). Les difficultés sont généralement causées par l’association de plusieurs facteurs qui peuvent être internes ou externes à l’entreprise.
Le chef d’entreprise peut se baser sur différents types d’indicateurs pour définir si son entreprise est en difficulté ou pas. Ces indicateurs sont listés ci-après :
- Indicateurs d’exploitation
Les indicateurs d’exploitation se réfèrent à la connaissance par le chef d’entreprise de son secteur d’activité, des débouchés potentiels pour ses produits ou ses services et par la maîtrise de ses coûts. Ils revêtent une grande importance pour la pérennité de l’entreprise : en effet, celle-ci ne pourra pas par exemple se développer sans l’existence d’un marché et d’un besoin à satisfaire.
- une diminution des commandes reçues : le chef d’entreprise doit normalement en analyser rapidement les causes,
- une diminution du chiffre d’affaires qui traduit une diminution du carnet de commandes, un changement au niveau du marché ou un faible suivi des encaissements clients,
- une diminution de la performance des commerciaux,
- une augmentation des réclamations ou des litiges clients qui traduit un problème de qualité pour l’entreprise,
- une perte de marché à cause de la concurrence (meilleure offre technique, ou compétitive en termes de prix),
- une augmentation des charges de structure non cohérentes avec l’augmentation du volume d’activités,
- une baisse de la productivité ou un retard de fabrication suite à diverses problématiques (panne d’une machine de production, grève du personnel, non disponibilité des matières premières sur le marché, vétusté des matériels…),
- une baisse de la productivité causée par divers
- des créances qui sont fortement âgées,
- la faible rotation du stock (matières premiers, encours, produits finis)
- une faible marge dégagée sur les produits vendus.
- l’augmentation des coûts de facteurs (électricité, communication,…) que l’entreprise aura du mal à répercuter sur ses clients et qui viendront diminuer la marge dégagée.
- Indicateurs financiers
Le chef d’entreprise doit toujours associer l’analyse de ses indicateurs financiers avec une analyse de sa rentabilité. En effet, une entreprise qui dispose de faibles moyens financiers mais qui arrive à dégager une bonne rentabilité sur ses vente a de fortes chances de se développer. Ces indicateurs incluent :
- un résultat déficitaire,
- la baisse significative de la trésorerie et donc une augmentation du besoin en fonds de roulement,
- un fonds de roulement négatif,
- une augmentation du niveau d’endettement de l’entreprise par rapport à ses capitaux propres,
- une faible rotation des stocks,
- une augmentation des frais financiers dus aux crédits contractés par l’entreprise, aux découverts ou aux lignes d’escompte,
- le non remboursement des emprunts aux dates d’échéance,
- la non obtention de nouveaux concours bancaires,
- le non dépôt des comptes annuels,
- la demande de report de la date de réunion de l’assemblée générale.
- Indicateurs liés aux ressources humaines
Certains évènements survenant au niveau des ressources humaines peuvent également indiquer les prémices ou des difficultés réelles au sein d’une entreprise.
- un taux de rotation élevé du personnel,
- la faible compétence des dirigeants,
- la démission des dirigeants,
- des grèves fréquentes, une absence de communication ou une difficulté de communication avec le conseil d’entreprise,
- la sortie de capital de plusieurs actionnaires,
- Indicateurs juridiques et fiscaux
- l’augmentation des montants des garanties données aux créanciers,
- l’inscription de privilèges et de nantissements au tribunal de commerce,
- l’existence ou l’augmentation des contentieux avec les clients, les salariés, les organisations sociales ou fiscales,
- la rupture des contrats de l’entreprise (contrat de bail avec le propriétaire, ou contrat d’électricité,…),
- les redressements fiscaux.
- Signaux en provenance de tiers
Des actions réalisées par des tiers constituent également des symptômes de difficulté dans une entreprise. Elles concernent par exemple les actionnaires ou associés qui :
- expriment leurs inquiétudes en ce qui concerne la situation de l’entreprise,
- demandent à se réunir plus fréquemment que d’habitude et veulent recevoir des informations fréquentes sur l’évolution de la situation de l’entreprise,
- demandent à sortir du capital.
A cela s’ajoute la démission des administrateurs ou le refus de vote de décision suggéré par les dirigeants.
Section 2. Procédures complexes pour le traitement des entreprises en difficulté
Le processus classique de dégradation de la situation financière d’une entreprise se présente comme suit :
- l’entreprise connaît ses premières difficultés : elle perd des parts de marchés, elle subit des pertes fréquentes, son endettement augmente, la rentabilité de ses capitaux propres baisse. Ces difficultés sont habituellement d’origine stratégique ou conjoncturelle. Le dirigeant véhicule des messages rassurants auprès de son conseil d’administration. L’entreprise fait face à une baisse progressive de son fonds de roulement due par un investissement faiblement financé ou d’une perte et à une baisse de sa trésorerie.
- l’entreprise s’embourbe dans ses difficultés : la situation financière de celle-ci se dégrade de telle sorte que les banques lui refusent des lignes de crédit (concours bancaire) ou que le coût des crédits qu’elle a obtenu est devenu plus élevé. L’entreprise fait face à une trésorerie tendue et à une nette augmentation du besoin en fonds de roulement. Elle a des difficultés à honorer ses échéances : les négociations réalisées avec les fournisseurs et les partenaires ne suffisent plus à résoudre les problèmes. Elle rentre dans une spirale de retard de paiement et de promesses non tenues.
- l’entreprise est en difficulté : il existe de sérieuses tensions sur la trésorerie de l’entreprise, et sa crédibilité est sérieusement remise en cause par les fournisseurs ou les banquiers. Le dirigeant finit par déclarer un état de cessation de paiement.
Le chef d’entreprise ou son conseiller doit connaître l’origine de ses difficultés (conjoncturelle ou structurelle) ainsi que leur niveau de difficulté afin de pouvoir évaluer la possibilité de redresser. Cette analyse permet d’évaluer si :
- l’entreprise peut poursuivre son activité après l’injection de nouveaux financements sans procéder à une grande restructuration.
- l’entreprise peut poursuivre son activité mais doit céder une partie de ses activités.
- l’entreprise ne peut plus poursuivre ses activités.
- l’entreprise doit procéder à de majeures restructurations.
Les procédures à l’amiable sont préventives et confidentielles, elles permettent au dirigeant d’une entreprise en difficulté de résoudre ses problèmes et de négocier avec ses créanciers le règlement de ses dettes à l’amiable et en toute confidentialité. Elles se composent du mandat ad hoc et de la conciliation. Pour bénéficier de ces procédures à l’amiable, les entreprises :
- ne doivent pas être en état de cessation de paiement pour le mandat ad hoc,
- ne doivent pas être en état de cessation de paiement depuis plus de 45 jours pour la conciliation.
Un dirigeant d’entreprise qui connaît des problèmes sérieux de trésorerie peut solliciter par demande le tribunal de commerce qui va désigner par ordonnance un mandataire ad hoc ou un conciliateur. Le président du tribunal précise leurs missions et le délai dans lesquels ces derniers doivent lui soumettre des rapports.
- Le mandat ad hoc
Le mandat ad hoc constitue la procédure la plus souple à favoriser si l’entreprise dispose encore du temps. Il n’est pas soumis à des objectifs légaux. Les négociations avec les créanciers se font individuellement et non de manière collective : des solutions différentes sont ainsi proposées à chaque créancier afin de résoudre les problèmes de trésorerie de l’entreprise.
Le chef d’entreprise continue de gérer son entreprise et peut choisir lui-même son mandataire. Le dirigeant dépose une demande au tribunal de commerce en mentionnant le mandataire de son choix ; le président du tribunal de commerce approuve la demande et définit les conditions de rémunération du mandataire. Le mandataire ad hoc a pour principale mission d’assister le chef d’entreprise dans la recherche des meilleures solutions pour résoudre les problèmes de trésorerie et pour assurer le développement pérenne de la société. Il n’existe aucune durée légale limite du mandat ad hoc, elle peut être renouvelée plusieurs fois.
Les limites de cette procédure résident dans le fait que le mandataire ad hoc ne peut pas contraindre le dirigeant à adopter une mesure. Le succès de sa mission dépend ainsi de son autorité, de sa compétence, et du fait qu’il est lié directement au tribunal.
Si malgré la procédure, l’entreprise se retrouve en cessation de paiement, cette situation doit obligatoirement être déclarée dans les 45 jours de sa survenance. Le dirigeant doit donc saisir le tribunal pour l’ouverture d’une procédure de conciliation ou une procédure de redressement judiciaire. En cas de non respect de cette déclaration par le dirigeant, c’est le mandataire ad hoc qui doit s’en charger.
Le mandat ad hoc est clôturé sur simple demande du dirigeant auprès du tribunal de commerce.
La conciliation : cette procédure permet aux dirigeants, dont les entreprises connaissent des difficultés de trésorerie ou qui sont en état de cessation de paiement depuis moins de 45 jours, de trouver un accord avec leurs créanciers qui s’inscrit dans un cadre plus protecteur. En recourant à cette procédure, le dirigeant se voit aider par un conciliateur désigné par le tribunal du commerce qui l’assistera dans la mise en place d’accords tels que des moratoires ou la renégociation des emprunts. Le conciliateur est également autorisé à proposer des mesures destinées à redresser l’entreprise.
En absence d’accord, la procédure de conciliation s’arrête systématique et une autre procédure peut être ouverte dans les 3 mois. Si l’entreprise et ses créanciers ont conclu un accord, il est constaté par le président du tribunal de commerce. L’accord peut également être homologué par le tribunal : l’homologation a pour effet de purger la responsabilité des acteurs concernés dans le cadre de la négociation et d’ainsi éviter les actions en nullité des actes de gestion. Elle suspend par ailleurs les actions de recouvrement en justice des créanciers qui ont accepté de conclure l’accord. Elle accorde un privilège de New Money, c’est-à-dire, une priorité de remboursement et de paiement aux créanciers qui ont apporté de la trésorerie, un service ou un bien après l’ouverture de la procédure de conciliation en cas de procédure collective. L’homologation présente cependant l’inconvénient d’être publiée par le tribunal de commerce, l’accord n’est plus confidentiel et les fournisseurs peuvent accéder à cette information.
La conciliation ne peut pas dépasser la durée de 4 mois et peut être prolongée de 1 mois à la demande du conciliateur. La négociation avec les créanciers se fait durant cette période. La conclusion d’un accord entre l’entreprise et ses créanciers ainsi que son homologation suspend les actions intentées par ces derniers pour obtenir leurs paiements. Le dirigeant peut à nouveau émettre des chèques. La procédure de conciliation est clôturée lorsque le dirigeant et le conciliateur ne sont pas arrivés à trouver un accord. Une procédure de redressement judiciaire est ainsi ouverte si l’entreprise se trouve en cessation de paiement.
Différence entre les deux procédures : Le mandat ad hoc n’est pas applicable aux entreprises qui ne sont pas en état de cessation de paiement tandis que la conciliation est applicable à une entreprise qui se trouve en cessation de paiement depuis moins de 45 jours.
Le mandat ad hoc est généralement demandé lorsque l’entreprise connaît des problèmes de trésorerie. La conciliation est requise dès que le dirigeant sait avec certitude qu’il va affronter une difficulté économique, financière ou juridique. Le mandat ad hoc peut ainsi intervenir avant une procédure de conciliation.
Ces deux procédures diffèrent également au niveau de la durée : celle du mandat ad hoc est de 3 mois renouvelable plusieurs fois tandis que la conciliation ne s’applique que sur une durée de 4 mois renouvelable pour un mois. Le mandat ad hoc se caractérise par la conclusion d’un accord contractuel entre l’entreprise et les créanciers. Pour une conciliation, le constat d’un accord par le tribunal de commerce ou son homologation constitue une force exécutoire pour les parties.
Statistiques des procédures amiables
Le graphe ci-après fournit une évolution du recours aux procédures amiables sur les cinq dernières années :
Figure 2 : Evolution de l’ouverture des procédures amiables (2009-2013)
Source : Altares/Deloitte – sur un échantillon de 15 tribunaux
Les entreprises sont de plus en plus intéressées dans l’anticipation des difficultés puisque le recours aux procédures amiables a augmenté de 24% entre 2012 et 2013. Cette croissance dépasse largement celle connue entre 2008 et 2009 puisque l’augmentation n’était durant cette période que de 4%.
La mise en œuvre de procédures de mandat ad hoc a augmenté de 11,7% entre 2012 et 2013 tandis que la conciliation a connu une hausse plus élevée de 24%. La croissance du nombre de conciliations peut s’expliquer par celle du mandat ad hoc car ce dernier peut être suivi d’une procédure de conciliation. Les entreprises ont recours à cette dernière afin d’homologuer les accords négociés entre elles et leurs créanciers.
L’étude réalisée par les cabinets Altares/Deloitte a constaté que pour la période 2007-2011 :
- 82% des procédures de conciliation ouvertes ont abouti à la conclusion d’une homologation d’accord. La majorité de ces accords portent sur des reports d’échéances en capital, ou une remise partielle de dette. Les fournisseurs ne sont généralement pas impliqués pour préserver le besoin en fonds de roulement. Les procédures amiables sont adéquates pour traiter les dettes financières, sociales et fiscales.
- 75% des entreprises qui ont eu recours à une procédure amiable ont pu résoudre leurs difficultés et redresser leur situation en deux ans.
- 27% des procédures de conciliation ont débouché sur une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire.
L’étude a également mis en exergue le retard pris par les TPE pour recourir à une procédure amiable alors qu’elles ont déjà épuisé les alternatives possibles (cession Dailly, escompte,…) pour résoudre leurs problèmes de trésorerie de manière inefficace.
Les procédures collectives incluent : (i) la procédure de sauvegarde ; (ii) la procédure de redressement judiciaire, ainsi que (iii) la liquidation judiciaire. La procédure applicable dépend si l’entreprise se trouve en état de cessation de paiement ou non, et si elle peut apurer son passif et continuer ses activités ou non.
Présentation de la notion de cessation de paiement
Une présentation de la notion de cessation de paiement est fournie dans la présente section pour bien comprendre les procédures abordées. Selon l’article L631-1 du Code de commerce, une entreprise est en cessation de paiement lorsqu’elle se trouve dans « l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible ».
- Le passif exigible regroupe les dettes échues réclamées par les créanciers et reconnues par l’entreprise. Il n’inclut pas les concours bancaires courants, les effets escomptés non échus, les Dailly non échus pas en CBC, l’affacturage non échu, les réserves de crédit non utilisées, l’escompte/le Dailly/l’affacturage inutilisé, les découverts inutilisés ainsi que les dettes bancaires inférieurs à un an.
- L’actif disponible qui regroupe les actifs qui peuvent être rapidement convertis en trésorerie dans les meilleurs délais (disponibilité en banque et en caisse, les créances clients, les stocks, les réserves de crédit,…). Il regroupe ainsi des valeurs mobilières qui peuvent être rapidement cédées sur les marchés organisés ainsi que les créances clients qui peuvent faire l’objet d’escompte, de cession Dailly, d’affacturage).
Le tableau ci-après permet de calculer rapidement si l’entreprise est en état de cessation de paiement ou non.
Tableau 2 : Tableau d’évaluation de l’état de cessation de paiement
Désignation
|
Date |
Actif réalisable et disponible (à moins d’un an)
– Créances rattachées à des participations – Prêts et autres immobilisations financières – Avances et acomptes versés sur commandes – Créances clients et comptes rattachés (y compris effets escomptés non échus et créances cédées par loi Dailly – Autres créances – Capital souscrit appelé non versé |
|
Sous-total 1 (actif réalisable) | |
– Valeurs mobilières du placement
– Disponibilités |
|
Sous-total 2 (actif disponible) | |
Total 1+2 : Actif réalisable et disponible | |
Passif exigible (à un an au plus)
– Emprunts obligataires – Emprunts et dettes auprès des établissements de crédit – Emprunts et dettes financières divers – Avances reçues sur commandes en cours (hors acomptes sur travaux en cours) – Dettes fiscales et sociales (hors obligations cautionnées) – Dettes sur immobilisations et comptes rattachés – Atres dettes |
|
Sous-total 3 | |
– Effets escomptés non échus | |
– Créances cédées (loi Dailly
– Concours bancaires courants (sauf loi Dailly) – Obligations cautionnées |
|
Sous-total 4 | |
Total 3+4 : Passif exigible | |
DONT PASSIF ECHU Sous-total 5 | |
Situation de trésorerie | |
– Sous-total 2 (actif disponible) | |
– Sous-total 4 (passif exigible)
Sous-total 6 |
( ) |
Trésorerie nette | |
– Passif échu (sous-total 5) | ( ) |
– Créances financées par affacturage | ( ) |
Trésorerie nette retraitée | |
Pour information : réserves de financement non utilisés
– sur escompte – sur autres modalités de mobilisation – sur découverts et autres couvertures de crédit Sous-total 7 |
|
Synthèse
Actif disponible « réel » = sous-total 2 + sous-total 7 Passif exigible « réel » = sous-total 5 |
Source : Groupe RF
L’état de cessation de paiement suppose que l’entreprise se trouve dans une situation durable d’incapacité à payer ses dettes, il diffère donc d’une situation temporaire de problème de trésorerie.
La déclaration de cessation de paiement, appelée également dépôt de bilan, est réalisée auprès du greffe du tribunal de commerce. Des documents sont à fournir avec cette déclaration incluant les comptes annuels du dernier exercice, l’état de la trésorerie sur les 3 derniers mois, un inventaire des biens de l’entreprise, la liste des nantissements et des privilèges, l’état des créances et des dettes, les engagements hors bilan. Le dirigeant doit fournir des informations complètes et précises car elles vont servir de base au tribunal pour l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire immédiate. La date de cessation des paiements est fixée par le tribunal, elle correspond habituellement à la date de la première inscription d’un nantissement ou d’un privilège.
La procédure de sauvegarde
La procédure de sauvegarde est une procédure préventive à laquelle le chef d’entreprise peut recourir avant que sa société n’arrive à un état de cessation de paiement. Elle vise à anticiper le redressement judiciaire. Elle est ainsi dédiée aux entreprises qui subissent des difficultés financières qu’elles n’arrivent pas à redresser et qui peuvent les mener à la cessation de paiement. L’entreprise concernée se place sous la protection du tribunal de commerce lui permettant ainsi de :
- bénéficier d’une suspension des poursuites pour le paiement des créances antérieures à la procédure.
- bénéficier d’une suspension des voies d’exécution forcée pour le règlement des créances.
- se voir accorder également un arrêt du cours des intérêts.
- ne pas être exposée à des sanctions patrimoniales.
- établir un plan de restructuration qui vise la continuité de l’exploitation (avec la possibilité de céder une partie de l’entreprise). Ce plan est élaboré en collaboration avec les créanciers.
Deux mandataires de justice sont désignés lors d’une procédure de sauvegarde : (i) un administrateur qui assure une fonction de surveillance ou d’aide à la gestion ; (ii) un mandataire qui est responsable de l’établissement du passif.
Le dirigeant continue d’assurer en totalité la gestion de l’entreprise pendant un délai d’observation de 6 mois renouvelable une fois, il peut être aidé par un mandataire judiciaire. Il ne peut pas être forcé à céder ses actions.
En ce qui concerne les créances, celles survenues après la mise en place de la procédure sont payées normalement à leurs échéances. Les contrats en cours durant la phase de lancement de la procédure sont poursuivis et payés à l’échéance. En cas d’existence d’un plan social, aucune procédure spécifique n’est appliquée, le droit commun est mis en vigueur.
Durant la mise en œuvre de cette procédure, les entités publiques ainsi que les organismes sociaux et fiscaux peuvent faire une remise de dettes en principal. Les garants de l’entreprise bénéficient également d’une suspension des actions forcées de paiement durant la procédure, cette suspension est levée durant la mise en œuvre du plan de continuation.
La procédure de sauvegarde s’achève par la présentation d’un plan de remboursement du passif au tribunal du commerce après interrogation des créanciers. Les créanciers forment deux comités dont le comité des établissements de crédit et le comité des fournisseurs. Un créancier peut par ailleurs soumettre des propositions de plan à l’administrateur judiciaire. L’entreprise est supposée être capable de rembourser ce passif étant donné qu’elle n’est pas encore en cessation de paiement. Elle doit par ailleurs présenter un plan de continuité de ses activités. La procédure prend fin lorsque les difficultés qui ont conduit à son recours ont disparu. Elle est cependant convertie en redressement judiciaire si l’entreprise s’est retrouvée en état de cessation de paiement et en liquidation si elle ne peut pas être redressée.
Ce sont les TPE et PME employant moins de 50 salariés (avec un taux de 95%) qui ont le plus recours à la procédure de sauvegarde. Les entreprises hésitent à recourir à cette procédure en raison de la perte de confidentialité qui entraîne une baisse de leur notation auprès des assurances crédit et du financement des fournisseurs. En effet, il prendra plus de temps pour une entreprise de revenir à une note normale après la dégradation de sa note.
1 633 procédures de sauvegarde ont été ouvertes en 2013, avec une augmentation de 9% par rapport à 2012. Cette procédure est principalement utilisée par les entreprises opérant dans les secteurs du commerce et du service. Elle ne représente cependant que 3% de l’ensemble des procédures collectives.
Les procédures de sauvegarde aboutissent :
- à 49% à la présentation d’un plan de sauvegarde après un délai d’observation moyen de 13 mois. 63% des entreprises arrivent à réaliser avec succès ce plan. L’établissement d’un plan de continuation ou d’un plan de cession ne dépasse pas les 30%.
- à 18% à un redressement judiciaire.
- et à 28% à une liquidation judiciaire.
Figure 3 : Statistiques des ouvertures de procédures de sauvegarde
Source : Deloitte, Mars 2014
La procédure de redressement judiciaire
La procédure de redressement judiciaire aide les entreprises en état de cessation de paiement à résoudre leurs difficultés financières. Elle est obligatoirement ouverte pour les entreprises qui se trouvent en cessation de paiement dans un délai de 45 jours. La procédure d’ouverture est initiée par le tribunal de commerce, par le dirigeant lui-même ou par un créancier. L’ouverture de cette procédure implique :
- une suspension des actions pour le règlement des créances antérieures à cette ouverture.
- un arrêt des voies d’exécution forcée intentées par les créanciers pour se faire payer.
- une suspension du calcul des intérêts sur les dettes de l’entreprise.
La procédure comprend les étapes ci-après :
- la saisine du tribunal de commerce par le dirigeant qui déclare la cessation de paiement, ou par un créancier, ou sur requête du procureur ou sur assignation du tribunal lui-même.
- le jugement d’ouverture de la procédure : cette étape s’accompagne de la désignation d’un administrateur judiciaire pour les entreprises dont le chiffre d’affaires excède 3 millions € et avec un effectif supérieur à 20 salariés. La désignation ou non d’un administrateur pour les entreprises avec un CA et un effectif inférieur à ces seuils est laissée à l’appréciation du tribunal. Le dirigeant est assisté par un administrateur judiciaire dans la gestion de l’entreprise. Il peut cependant être évincé sur décision du tribunal.
Le tribunal nomme également un juge-commissaire ainsi qu’un représentant des créanciers. Sans ordonnance du juge-commissaire, le dirigeant n’est pas autorisé à payer des créances antérieures, à engager l’entreprise dans des hypothèques ou des nantissements, à décider d’actions qui ne sont pas liées directement à la gestion courante. Un représentant des salariés doit avoir été nommé par le comité d’entreprise ou les déléguées du personnel. Ces représentants ont pour rôle de s’assurer du respect des intérêts des créanciers et des salariés durant le déroulement de la procédure. Le jugement fixe la date de cessation de paiement et la durée de la période d’observation.
- la période d’observation fournit au dirigeant ou à l’administrateur le délai nécessaire pour établir un bilan économique et social, pour formaliser une proposition pour la continuité de l’entreprise. Elle est généralement fixée à 6 mois renouvelable en une fois. Le tribunal peut cependant prononcer après les 2 premiers mois une conversion en liquidation judiciaire en cas de non obtention d’informations suffisantes sur l’évolution de la situation après l’ouverture de la procédure. Le dirigeant ou l’administrateur doivent ainsi maintenir une communication régulière avec l’ensemble des acteurs concernés par cette procédure.
- l’établissement et la présentation d’un plan de redressement par le dirigeant ou l’administrateur. Il peut proposer une simple continuation de l’exploitation, une continuation de l’activité combinée avec une cession partielle des activités de l’entreprise.
Le juge-commissaire ou l’administrateur examine par ailleurs les offres proposées par les tiers. Ce plan de redressement doit inclure un compte d’exploitation et un plan de trésorerie prévisionnels.
- la décision du tribunal de commerce est rendue après consultation de l’administrateur judiciaire sur la pertinence du plan de redressement proposé, du représentant des créanciers et celui des salariés sur la prise en compte de leurs intérêts, du dirigeant d’entreprise défaillant.
- la présentation d’un plan de continuation qui est une étape retenue lorsque l’entreprise présente de sérieuses possibilités de rembourser son passif et de se redresser. Ce plan est proposé par le dirigeant de l’entreprise et présenté au juge-commissaire ou à l’administration. Il inclut l’identité du repreneur, la description du projet d’entreprise, les effectifs maintenus, les modalités de remboursement du passif, les modalités de reconstitution des fonds propres, les changements juridiques.
- en cas de cession partielle comme solution pour le redressement de l’entreprise, les éventuels acheteurs doivent présenter un plan de cession qui fournit l’étendue de l’acquisition envisagée, la détermination du prix de cession. Ce plan sera approuvé par le tribunal de commerce. Des éventuels repreneurs sont par ailleurs autorisés à présenter un plan de reprise totale ou partielle de l’entreprise.
Les incidences de la procédure de redressement judiciaire sur les créanciers sont similaires à celles de la procédure de sauvegarde : (i) les créances nées après la procédure d’ouverture sont réglées normalement à leurs échéances ; (ii) les contrats en cours à la date d’ouverture restent en vigueur. Les actions en paiement exercées contre les garants de l’entreprise sont également suspendues durant la procédure.
Le licenciement du personnel fait l’objet d’une procédure rapide : les rémunérations dues avant l’ouverture et les coûts du licenciement sont payés par les AGS.
Au terme de la procédure, la société peut se trouver dans deux situations : (i) soit elle dégage de nouveau des bénéfices et peut ainsi s’acquitter de son passif selon un plan de continuation; (ii) soit elle n’arrive pas à se redresser et fait l’objet d’une liquidation judiciaire.
La liquidation judiciaire
La liquidation judicaire est prononcée par le tribunal en cas d’impossibilité de redresser l’entreprise. Elle est décidée après la phase d’observation accordée lors de la procédure de redressement judiciaire, en cas de non exécution du plan de redressement, en cas d’échec du plan de continuation. Elle peut être demandée par l’administrateur judiciaire, le juge-commissaire, le représentant des créanciers ou le procureur.
Le tribunal du commerce nomme un liquidateur qui est chargé de :
- réaliser les opérations de cession du patrimoine de l’entreprise, et verser les montants perçus auprès de la caisse des dépôts et des consignations. Les cessions doivent être réalisées dans les 3 mois de l’ouverture de la procédure.
- engager les poursuites nécessaires pour pouvoir apurer le passif (incluant par exemple la remise en cause des transactions réalisées avec des tiers avant la cessation de paiement).
- vérifier l’état des créances et établir une liste des créanciers classés par ordre de priorité. Il poursuit les actions de l’administrateur judiciaire. Le juge-commissaire peut par ailleurs l’autoriser à poursuivre certains contrats en cours jusqu’à leur réalisation complète.
- procéder au paiement des créanciers,
- licencier le personnel de l’entreprise,
- engager des poursuites contre le chef d’entreprise et les dirigeants de fait qui peuvent être sanctionnés par une interdiction de gérer une autre entreprise, ou une contribution financière à l’apurement du passif.
La liquidation judiciaire doit être réalisée dans un délai d’un an à compter de sa prononciation. La clôture d’une liquidation est annoncée par le tribunal de commerce lorsque le passif a été apuré ou lorsqu’il n’y a plus d’actifs à céder. Cette décision de clôture annule par ailleurs les futures actions des créanciers pour insuffisance d’actif.
La liquidation judiciaire a pour conséquences :
- la saisie et la cession des actifs (immobiliers ou mobiliers) de l’entreprise aux enchères publiques, par adjudication amiable ou par entente directe avec des acheteurs selon la décision du juge-commissaire. Ce dernier fixe par ailleurs la mise à prix après consultation d’un expert.
- le paiement des créances suivant un ordre préétabli : les créances salariales sont payées en priorité suivies des frais de justice, des créanciers qui ont apporté de la trésorerie au titre de la procédure de conciliation, les créances hypothécaires, les créances titulaires d’un nantissement sur le matériel, les créances postérieures à l’ouverture d’une procédure et les créanciers restants.
D’un point de vue statistique, le nombre des redressements et des liquidations judiciaires a augmenté de 3% entre 2012 et 2013. Le nombre de redressement judiciaire a enregistré une très légère baisse (18 465 jugements d’ouverture contre 18 475 en 2012) à l’opposé des liquidations judiciaires qui ont augmenté de 4%. Ce sont les très jeunes TPE qui sont les plus exposées à la LJ.
Figure 4 : Statistiques des ouvertures des procédures collectives
Source : Deloitte, Mars 2014
Le schéma ci-après résume par ailleurs les procédures amiables et collectives appliquées par une entreprise en difficulté.
Figure 5. Synthèse des procédures amiables et des procédures collectives
Source : Deloitte 2014, Les entreprises en difficulté
Chapitre 2. Rôle de l’expert-comptable dans l’accompagnement des entreprises en difficulté
Ce chapitre se focalise sur la valeur ajoutée de la mission d’accompagnement des entreprises en difficulté par l’expert-comptable ainsi que les freins auxquels le cabinet peut se heurter lors de la mise en place de cette mission.
Section 1. Les dirigeants démunis devant les difficultés de leurs entreprises
Les procédures amiables et collectives apportent des solutions en réponse aux divers problèmes des entreprises en difficulté. Pour qu’elles donnent des résultats positifs, les dirigeants doivent cependant faire preuve de rapidité dans la mise en œuvre de ces procédures.
Or, les dirigeants des TPE et des PME nient habituellement la situation réelle de leurs entreprises et ne changent en aucun cas leur mode de gestion. D’autres paniquent totalement et adoptent des mesures non appropriées. Ils essaient à tout prix d’éviter de recourir à ces procédures car ils les perçoivent comme une reconnaissance de leur échec personnel. Ils craignent qu’en recourant à ces procédures, ils vont aboutir à la liquidation judiciaire. Avec ce blocage psychologique, les dirigeants prennent considérablement du retard dans le recours aux procédures.
L’expert-comptable doit tenir compte de ce blocage psychologique des dirigeants dans l’exercice de ses missions et de la rapidité à laquelle une difficulté financière peut rapidement se dégrader. Il devrait ainsi effectuer des interventions intermédiaires afin de déceler des situations problématiques dans les brefs délais. Face à ce blocage, l’expert-comptable doit expliquer les procédures, leurs avantages et leurs limites au dirigeant d’une entrepris en faisant preuve d’une grande pédagogie. Il doit dédramatiser les difficultés qui surviennent et travailler avec eux pour choisir la procédure appropriée.
Dès que les premiers symptômes de difficulté surviennent, l’expert-comptable et le dirigeant doivent analyser la situation de l’entreprise, définir les causes structurelles ou conjoncturelles des problèmes et établir une situation prévisionnelle de trésorerie. Ces démarches sont à réaliser avec le dirigeant afin de les habituer à prendre les bonnes mesures lors de la survenance de problèmes similaires.
Les dirigeants des TPE et PME doivent disposer de plusieurs compétences:
- une compétence de gestionnaire : le dirigeant doit être capable de collecter les informations sur son environnement afin d’adapter son offre. Il doit pouvoir tirer des leçons de ses expériences passées pour améliorer sa gestion. Il doit systématiquement réaliser une analyse des besoins du marché, des problèmes stratégiques de l’entreprise. Le dirigeant doit également maîtriser les notions de produits et de charges, d’investissement, de rentabilité, de besoin en fonds de roulement, de marge brute et de marge nette, de gestion de stock…
- une compétence en ressources humaines pour gérer le personnel en son sein : connaissance du droit de travail, de la convention collective qui s’applique au secteur d’activité de l’entreprise, de congés, de fiches de poste,…
- une compétence juridique pour maîtriser les contrats qu’ils concluent avec leurs clients (conditions générales de vente), leurs fournisseurs ou les tiers (contrat de bail),…
- une compétence commerciale pour bien vendre ses produits ou services, concevoir et mettre en œuvre une politique commerciale, gérer et animer une équipe de vente, fidéliser les clients.
- une compétence relationnelle pour gérer efficacement les interactions entre l’entreprise et les autres acteurs du marché,
Beaucoup de TPE et PME disparaissent cependant chaque année à cause principalement de problèmes de gestion. En effet, les études réalisées sur la survie de l’entreprise ont confirmé que les compétences en comptabilité, en gestion de la trésorerie et en marketing sont des éléments déterminants de la pérennité d’une entreprise. Selon l’OCDE (2002), « les entreprises couronnées de succès semblent être celles qui savent gérer efficacement leur trésorerie, ont une bonne stratégie commerciale, savent déléguer des responsabilités et ont une structure organisationnelle simple ».
Les dirigeants doivent disposer des compétences d’un bon manager pour améliorer les performances. Les qualités requises d’un dirigeant d’une PME dépassent actuellement les compétences de gestionnaire habituel. En effet, selon l’OCDE (2000), « Il est frappant d’observer la grande variété d’instruments de gestion et d’organisation mis en place par les entreprises à forte croissance. Ces instruments ne sont plus l’apanage des grandes sociétés. Plus que l’innovation elle-même, le facteur essentiel de la compétitivité d’une entreprise est une meilleure organisation du processus d’innovation et d’autres fonctions. »
Ces problèmes de gestion ont d’autant plus d’impacts sur le développement des entreprises car ces dernières ne disposent pas des financements nécessaires pour recruter une équipe de professionnels. Les entreprises emploient généralement des généralistes pour se charger de plusieurs domaines (analyse financière, prospection de marché, publicité et marketing,…) ou ces missions sont assurées directement par les dirigeants. Il s’avère dans la réalité que ces derniers ne disposent pas des compétences requises.
A cette faible compétence s’ajoute le fait que les dirigeants n’ont pas recours à la formation professionnelle pour plusieurs réponses : manque de temps, absence de budget pour la formation, faible conscience de la valeur ajoutée de la formation, contraintes financières, manque d’information…
En raison de leur faible compétence, plusieurs dirigeants d’entreprises méconnaissent les procédures existantes en matière de prévention et de traitement des difficultés. Ils ne sont pas suffisamment informés et ne sont pas par ailleurs affiliés à des organismes qui peuvent les conseiller dans leur gestion quotidienne. Les dirigeants d’entreprise doivent être membres de ces entités afin de pouvoir échanger leurs expériences avec d’autres dirigeants, de discuter de leurs difficultés puisqu’aucune entreprise n’est à l’abri. La perte d’un client, situation qui peut s’avérer imprévisible, peut conduire rapidement une société dans un état de cessation de paiement.
L’Etat a instauré les CIP en 1999 en réponse à cette méconnaissance suite au rapprochement entre les professionnels (experts-comptables, avocats et commissaires aux comptes) et les magistrats consulaires. Les CIP sont des associations qui regroupent des professionnels sensibles aux problèmes des entrepreneurs et souhaitant les aider pour mieux anticiper les difficultés et redresser les entreprises. Les bénévoles réalisent des entretiens qui sont confidentiels avec les dirigeants des entreprises. Ils écoutent ces derniers, échangent avec eux et informent sur les solutions pratiques existantes.
Section 2. La valeur ajoutée de la mission d’accompagnement des entreprises en difficulté
Les attentes des clients des cabinets d’expertise comptable ont profondément changé au cours des dernières décennies. En effet, les entreprises ne recouraient auparavant aux experts-comptables que par contrainte et demandaient généralement des prestations comptables. De nos jours, les clients demandent plus d’accompagnement de la part des experts-comptables pour les aider à piloter leurs entreprises et pour les assister dans l’amélioration de leur performance.
Les besoins des clients sont de plus en plus personnalisés, les dirigeants expriment clairement leurs attentes qui font appel à un large panel de compétences. Les cabinets d’expertise-comptable doivent ainsi développer de nouvelles missions qui répondent aux réels besoins des entreprises. Ils doivent obligatoirement s’adapter au risque de perdre leur clientèle. En personnalisant les missions offertes, l’expert-comptable peut garder et fidéliser la clientèle : en effet, il est présent dans 74% des entreprises. L’expert-comptable est par ailleurs bien positionné pour vendre ses nouvelles missions auprès de ses clients qui le considèrent comme un professionnel de confiance à 91%.
L’expert-comptable évolue par ailleurs dans un monde de plus en plus concurrentiel que ce soit sur les missions comptables ou les missions de conseil. La nouvelle réglementation a par ailleurs rendu plus flexible le cadre d’intervention de l’expert-comptable qui peut désormais commercialiser des services connexes. Il doit ainsi rentabiliser son activité en proposant des offres à forte valeur ajoutée et de préférence, se positionner sur une niche d’activités qui peut constituer son avantage comparatif. Créer un pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté permet à l’expert-comptable de :
- fournir un service de proximité à ses clients en répondant à leur besoin d’assistance dans le pilotage de l’entreprise. Les TPE ou PME, quelque soit leur taille, peuvent être demandeurs de ce type de mission. L’expression de ces besoins dépend cependant de la personnalité et des compétences des dirigeants qui peuvent être biaisées par le blocage psychologique évoqué précédemment. Les besoins des clients dépendront par ailleurs du cycle de vie de l’entreprise : en effet, ils sont plus demandeurs de la mission durant la phase de création.
- se positionner sur un marché peu exploité,
- proposer des services de forte valeur ajoutée et rentable
- devenir un expert opérationnel qui travaille en réseau (avec des avocats, des notaires, des fiscalistes…) pour le bénéfice du client.
- s’adresser à un large marché potentiel au vu des statistiques de défaillance des entreprises en France.
- proposer une prestation qui soit en continuité avec la mission comptable de l’expert-comptable (mission de présentation des comptes annuels). L’expert-comptable peut détecter les premiers symptômes de difficulté lors de l’exécution de la mission comptable, il peut ainsi proposer au client de mettre en œuvre les mesures ou les procédures qui s’imposent.
- s’organiser de manière à bénéficier d’une « économie d’échelle » puisque la production sera optimisée, les procédures standardisées et le personnel spécialisé dans le traitement des entreprises en difficulté. L’entreprise pourra par ailleurs optimiser ses coûts de promotion et communication. La création du pôle permet de professionnaliser la prestation.
L’intérêt de cette mission pour le client est qu’il se fait assister par un expert dans le diagnostic de sa situation. Cet œil externe lui permet d’appréhender ses difficultés réelles et de trouver la meilleure solution adaptée à sa situation. L’assistance de l’expert-comptable permet au dirigeant de surmonter son blocage psychologique et de ne pas paniquer.
Le client bénéficie des compétences, de l’expérience du terrain et du réseau de l’expert-comptable qui est bien positionné pour fournir des conseils au dirigeant. Un dirigeant absorbé par la gestion opérationnelle quotidienne peut ainsi être avisé par l’expert-comptable sur les premiers symptômes de difficultés. L’expert connaît très bien l’entreprise, son secteur d’activité, son historique et ses comptes financiers, il est capable de déterminer l’origine profonde des problèmes financiers de l’entreprise. Il facilite par la suite les prises de décision importantes. Le recours à un expert-comptable permet également au dirigeant de ne pas perdre du temps car ce dernier connaît toutes les démarches administratives, fiscales, sociales ou juridiques à effectuer. La rapidité constitue un élément primordial à la réussite des procédures amiables et de la procédure de sauvegarde. L’expert peut par ailleurs aider le dirigeant à définir et à mettre en œuvre des procédures pour sortir de la crise.
L’expert-comptable peut se heurter à un certain nombre de freins lors de la mise en place d’un pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté :
- des difficultés dans la commercialisation de la mission: Le client peut faire preuve d’une certaine résistance si l’offre de mission n’est pas bien expliquée et argumentée. En effet, le client peut penser que son entreprise ne connaîtra pas des difficultés sérieuses financières. Or, il suffit d’un changement de contexte économique ou de la perte d’un client pour que les problèmes financiers apparaissent. Il peut également estimer qu’il lui est possible de trouver des solutions pour faire face à des problèmes de trésorerie (cession Dailly, emprunt bancaire, …). Le dirigeant peut être réfractaire à l’ouverture d’une des procédures amiables ou des procédures collectives. Le poids des honoraires peut également constituer une limite à la commercialisation de cette mission puisque le dirigeant cherche à économiser ses coûts pour ne pas aggraver les difficultés financières que l’entreprise connaît déjà.
Du côté du cabinet d’expertise comptable, il peut être difficile pour les collaborateurs de trouver des entreprises qui ne sont pas encore en état de cessation de paiement. Il ne peut pas en effet apporter une valeur ajoutée au dirigeant lorsque la situation financière de l’entreprise est impossible à redresser. La mise en place de cette nouvelle mission requiert de l’expert-comptable de développer une vraie stratégie commerciale et il doit consacrer du temps pour sa mise en œuvre. Le cabinet peut également se poser des questions sur la possible rentabilité de cette mission puisqu’il s’expose à un risque élevé de ne pas se faire payer ses prestations en cas d’ouverture de procédures. L’expert-comptable peut cependant se positionner comme un mandataire ad hoc ou un conciliateur.
- la disponibilité des collaborateurs pour réaliser la mission: les collaborateurs existants dans le cabinet peuvent ne pas disposer de temps pour déceler les premiers symptômes de difficulté de leurs clients et pour leur proposer la présente mission. Ils peuvent adapter une attitude réactive au lieu d’une attitude proactive pour développer leur portefeuille.
- le manque de compétences des collaborateurs : pour bien réaliser la mission, le cabinet d’expertise comptable doit libérer certains de ses collaborateurs pour suivre des formations sur l’identification des difficultés, sur leur traitement, sur les différentes solutions et alternatives correspondant à chaque type de difficulté, sur les divers intervenants publics, sur le lancement et le déroulement de chaque procédure. Le cabinet doit peut être recruté des collaborateurs spécialisés qui peuvent représenter des coûts supplémentaires.
- la non adéquation des outils de production: le cabinet d’expertise comptable doit investir dans un ou des outils de production adaptés qui permettent aux collaborateurs de suivre la situation de chaque client et les démarches déjà effectuées. Le facteur temps (rapidité) étant primordial dans cette mission, les collaborateurs doivent pouvoir suivre et connaître en temps réel la situation de leurs dossiers. Ces outils sont d’autant plus essentiels que le cabinet peut gérer plus d’une centaine de dossiers.
- le cabinet peut présenter une offre illisiblepour les entreprises : ce type de mission peut être offert par d’autres cabinets concurrents, certaines opérations peuvent être réalisées par des cabinets de conseil. Compte tenu de la multitude d’offres sur le marché, le client peut ne pas savoir pourquoi il devrait choisir un cabinet au lieu d’un autre. L’expert-comptable doit ainsi réaliser des efforts pour définir son positionnement, bien asseoir son offre et se différencier de ses concurrents.
- le cabinet d’expertise comptable peut ne pas disposer des ressources et des compétences nécessaires : avant de développer la mission, l’expert-comptable doit analyser ses forces et ses faiblesses par le biais de l’analyse SWOT. Celle-ci doit prendre en considération plusieurs aspects tels que :
- le portefeuille client du cabinet,
- les types de clients (taille, secteur d’activité, …),
- le niveau de satisfaction des clients,
- le nombre de collaborateurs,
- la qualité de l’équipe (compétences, expériences, …),
- l’organisation du cabinet,
- l’existence d’une stratégie (approche commerciale, gestion des ressources humaines.
Cette analyse permet de définir les axes d’amélioration dans le cabinet et décider des orientations stratégiques sur lesquelles il doit se focaliser pour mettre en place le pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté. Il est recommandé au cabinet de prioriser ses faiblesses et d’y remédier pour ne pas éparpiller ses efforts.
L’analyse des menaces consiste pour le cabinet à définir s’il dispose des ressources et des atouts nécessaires pour faire face à la concurrence des cabinets d’expertise comptable, des autres cabinets conseils. L’expert-comptable doit ainsi lister ses concurrents au niveau régional et offrant le même type de mission.
- Les inconvénients de l’architecture en pôle: Ce sont les gros cabinets qui structurent généralement leurs organisations en pôles spécialisés : pôle comptable, pôle juridique, pôle fiscal, pôle gestion de patrimoine, pôle social,… La mise en place d’un pôle consiste à regrouper les mêmes compétences ou des compétences associées afin de pouvoir traiter rapidement et de manière efficace un sujet précis. Les contraintes impliquées par ces pôles peuvent cependant être nombreuses et inclure l’existence d’une barrière entre les différents pôles, l’insuffisance de communication entre les collaborateurs des pôles, la multitude d’interlocuteurs pour les clients ou la difficulté d’établir une tarification standard.
PARTIE 2. ORGANISATION INTERNE AU SEIN DU POLE D’ACCOMPAGNEMENT DES ENTREPRISES EN DIFFICULTE
Cette deuxième partie concerne l’organisation interne à mettre en place au sein du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté. Elle se réfère principalement aux ressources humaines à intégrer, et à la formalisation des méthodes et des procédures du travail au sein du pôle. En ce qui concerne les ressources humaines, cette partie aborde les besoins du pôle en collaborateurs (nombre, profil,…), l’option d’affecter des collaborateurs du cabinet à cette mission selon les besoins ou l’option d’y affecter des collaborateurs dédiés, les problèmes auxquels le cabinet peut se heurter, ainsi que la formation technique à dispenser au personnel. En ce qui concerne la formalisation des méthodes de travail, cette partie fournit des outils qui permettent aux collaborateurs de ne pas omettre une étape importante dans le traitement des entreprises en difficulté et d’améliorer la productivité des collaborateurs.
Chapitre 1. Organisation structurelle au sein du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté
Ce premier chapitre aborde les types d’organisation que le cabinet peut adopter ainsi que le mode de travail préconisé. Il traite par ailleurs du renforcement de compétences à réaliser pour l’ensemble des collaborateurs travaillant dans le pôle.
Section 1. L’organisation humaine du pôle d’accompagnement des entreprises
Le cabinet d’expertise-comptable peut opter pour l’affectation des collaborateurs selon les besoins et selon les dossiers. Cette organisation présente plusieurs avantages :
- le cabinet n’a pas besoin de recruter des collaborateurs spécifiques pour le pôle. Ce type de structure est plus facile à amortir en termes de coût.
- le cabinet assure une continuité entre la mission de présentation des états financiers (mission comptable) et la mission d’accompagnement dans le traitement de la crise. Le collaborateur comptable continue de travailler sur le dossier et est appuyé par d’autres spécialistes en cas de besoin (exemple : audit organisationnel et actions de redressement ou audit marketing et mesures de correction y afférentes).
- les collaborateurs peuvent être assignés sur d’autres missions si le volume des dossiers d’entreprises en difficulté n’est pas suffisant.
Cette organisation peut également présenter des inconvénients: les collaborateurs peuvent travailler sur plusieurs dossiers de différente nature et être débordés alors que le traitement des entreprises en difficulté requiert une grande concentration et une veille permanente.
Le cabinet d’expertise-comptable peut dédier des collaborateurs au pôle qui vont se charger des différentes démarches à réaliser dans la mission d’accompagnement des entreprises en difficulté incluant le premier diagnostic de l’entreprise, le choix de la procédure amiable ou collective et lancement des démarches nécessaires, la définition et la mise en œuvre des mesures d’urgence, le diagnostic approfondi de l’entreprise, l’élaboration d’un plan d’actions pour sortir la société de la crise. L’équipe du pôle peut inclure des experts-comptables, des juristes, des spécialistes en marketing, des spécialistes en organisation, des spécialistes en droit social.
Le nombre de collaborateurs dédiés varie en fonction du volume de portefeuille de clients du cabinet et de la compétence des collaborateurs qui peuvent être polyvalents (maîtrisé la comptabilité et/ou le droit et/ou l’organisation d’entreprises) ou non.
Le choix de cette structure dépend de :
- la taille du cabinet : un cabinet de petite taille n’a en moyenne que très peu de collaborateurs qui sont habituellement polyvalents. (2 à 3 en moyenne). Les cabinets de grande taille peuvent disposer de plus de collaborateurs (plus de 4).
- la volonté du cabinet à valoriser et à pousser en avant cette prestation d’accompagnement des entreprises en difficulté. L’expert-comptable se donne ainsi les moyens de réussir la mise en place du pôle.
- volume de dossiers à traiter par le cabinet et de la rentabilité de la prestation. Avoir une équipe dédiée au pôle implique en effet un coût de personnel pour le cabinet qu’il doit pouvoir honorer avec les ventes réalisées au sein du pôle.
L’avantage de cette structure est que des collaborateurs existent en permanence au sein du cabinet pour suivre le dossier d’un client en difficulté en cas de maladie, de congés ou d’absences d’un collaborateur. Cette possibilité de remplacement est très importante étant donné que le traitement des entreprises en difficulté nécessite des décisions rapides et des suivis fréquents. Le client inquiet pour ses difficultés, aura également besoin d’un interlocuteur disponible. Les collaborateurs du pôle connaissent par ailleurs les démarches à suivre pour le traitement des dossiers, les diligences à effectuer, les intervenants à contacter.
Cette structure présente par ailleurs la possibilité d’assigner deux collaborateurs travaillant en binôme sur un même dossier afin que l’un puisse le traiter en cas d’indisponibilité du deuxième collaborateur. Des réunions peuvent également être réalisées régulièrement dans le pôle pour discuter des dossiers en cours. Les collaborateurs peuvent ainsi connaître la situation de chaque dossier, ses enjeux, ses difficultés. Le dossier pourra être facilement pris en charge par un autre collaborateur en cas de nécessité. Cette structure permet par ailleurs de standardiser le mode de traitement de chaque dossier.
Comme mentionné précédemment, disposer de plusieurs collaborateurs présente un coût de personnel élevé pour le cabinet donc un coût de revient élevé. Le cabinet doit à cet effet jouer sur un certain volume de dossiers pour supporter ces charges et pour rentabiliser le pôle. Le développement d’un pôle spécifique peut également créer une sorte de division entre les différents pôles. La communication entre eux peut s’avérer difficile or les clients des autres pôles sont généralement les premiers clients à approcher pour cette mission d’accompagnement des entreprises en difficulté.
Outre la décision d’affecter des collaborateurs selon les besoins et dédier une équipe au pôle, l’expert-comptable doit également déterminer entre les deux modes de travail ci-après :
- confier intégralement le traitement d’un dossier à un collaborateur à qui d’autres spécialistes seront assignés au besoin. Le collaborateur principal prend connaissance de l’entreprise, réalise un premier diagnostic financier et non financier, décide de la procédure appropriée à la situation de la société, et définit les premières mesures pour redresser la trésorerie négative. Il peut se faire aider par d’autres collaborateurs plus spécialisés pour réaliser un audit marketing de l’entreprise (offre, marché, concurrence,…) ou un audit organisationnel.
- ou fragmenter chaque dossier en confiant les étapes à différents collaborateurs. Un même collaborateur réalise les premiers diagnostics, un autre collaborateur déclenche les procédures amiables ou les procédures collectives (sauvegarde, RJ) en aidant le dirigeant à fournir les documents requis par le tribunal de commerce. Un collaborateur se charge de définir les premières mesures et de surveiller leur mise en œuvre. Un collaborateur effectue l’audit marketing, un autre l’audit organisationnel, et un autre l’audit social pour tous les dossiers.
La première option semble la plus adéquate en termes d’organisation et de productivité car elle évite la déperdition des informations sur l’entreprise et permet une meilleure cohérence de toutes les mesures à mettre en œuvre. Les dossiers sont ainsi assignés à un collaborateur par ordre d’arrivée.
Le développement d’un nouveau pôle peut être perçu de manière négative par les autres collaborateurs : en effet, la mission de présentation des comptes annuels est assurée par un collaborateur qui a décelé les premiers signes de difficulté. Ces derniers identifient généralement les difficultés de trésorerie à partir des états financiers établis (bilan et compte de résultat). Les dossiers sont par la suite transférés au pôle. Certains collaborateurs peuvent sentir ce transfert comme une dépossession de leur dossier. Ce système peut par ailleurs déstabiliser le client qui change d’interlocuteur. Pour y remédier, l’expert-comptable peut décider d’associer un collaborateur comptable qui sera l’interlocuteur unique d’un client. D’autres collaborateurs peuvent travailler en back-office avec ce collaborateur désigné pour traiter les dossiers des clients. Pour que ce mode de travail soit efficace, l’expert-comptable doit mettre en place un système qui permette de transmettre rapidement des informations sur un dossier entre collaborateurs. Les informations doivent en effet circuler pour ne pas perdre de temps et pour ne pas se décrédibiliser devant les clients : le collaborateur comptable dispose des premières informations sur le client qui correspondent à celles obtenues après la phase de prise de connaissance et de diagnostic rapide de l’entreprise. La communication de ces informations permet ainsi au collaborateur du pôle de gagner du temps, d’avoir un premier état des lieux de l’entreprise avant sa discussion avec le dirigeant. Le collaborateur comptable peut également fournir des éléments importants pour la réalisation de la mission. Ce mode de travail peut néanmoins présenter une difficulté pratique si l’interlocuteur du client ne connaît pas à fonds le dossier, les démarches déjà effectuées, les problématiques rencontrés, les souhaits et les réactions du client lors de chaque étape.
Des collaborateurs dédiés au pôle peuvent en quelque sorte monopoliser leurs clients et ne plus les considérer comme des clients du cabinet. Ce type de comportement doit être évité avec prudence car les clients doivent être gérés de manière à leur proposer les différentes missions que le cabinet peut assurer. Un client satisfait et sorti de ses difficultés fera confiance à l’expert-comptable et n’hésitera pas à lui demander des missions supplémentaires.
Section 2. Les besoins en compétences du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté
La mission du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté inclut :
- un diagnostic rapide financier et opérationnel de l’entreprise,
- une proposition de mesures d’urgence pour les problèmes de trésorerie,
- un diagnostic approfondi financier et opérationnel de l’entreprise,
- un accompagnement de l’entreprise en difficulté qui comprend les activités ci-après :
- une revue des plans d’affaires et des projections financières de l’entreprise,
- une identification des leviers de redressement,
- un suivi des réalisations et des engagements de l’entreprise,
- un examen des options de sortie incluant une analyse coût-bénéfice des options,
- une élaboration d’un plan de continuation opérationnel et financier,
- une mise en place d’outils de gestion financière.
- un accompagnement de l’entreprise dans sa transmission auprès d’un repreneur.
Le cabinet d’expertise comptable peut opter entre :
- l’affectation des collaborateurs comptables ou ceux d’autres pôles au pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté.
- ou le recrutement de nouveaux collaborateurs.
Il n’existe pas de formation académique sur le traitement des entreprises en difficulté. Les formations existantes abordent des thèmes plus généralistes tels que l’interprétation des soldes des postes du bilan et des comptes de résultat. Tous les collaborateurs dédiés à ce pôle auront ainsi besoin d’une formation additionnelle.
Les profils requis peuvent inclure un bac 3/4 en comptabilité ou en gestion, en sciences économiques. Les collaborateurs doivent avoir une expérience approfondie dans le diagnostic financier d’une entreprise car ces derniers seront appelés à cerner les problématiques liées au besoin en fonds de roulement (surtout pour les entreprises dont les activités sont saisonnières ou celles qui détiennent plusieurs contrats à long terme) ; à maîtriser les financements sur actifs d’exploitation (cession Dailly, affacturage,…). Ils doivent également être capables de faire des modélisations et d’anticiper les paramètres à prendre en considération étant donné qu’en période de difficulté financière, ces derniers ont tendance à dévier des tendances normales.
La possession de notions en marketing et en organisation constitue un atout puisque le diagnostic de l’entreprise couvre un ensemble de domaines. Les collaborateurs ne doivent pas être des purs comptables mais doivent connaître le monde de l’entreprise et l’entrepreneuriat pour pouvoir réaliser les diagnostics rapides et proposer les mesures d’urgence et les mesures pour la sortie de crise
Les collaborateurs à recruter ou à affecter au pôle doivent également avoir des qualités relationnelles et pédagogiques. Le collaborateur est en effet en relation directe avec un client inquiet, paniqué et qui craint les procédures judiciaires. Il doit être en mesure d’expliquer les démarches à suivre au client, les résultats attendus, les contraintes de la mission ainsi que les limites de chaque étape. Il doit être capable d’exposer la situation et de convaincre le dirigeant de mettre en œuvre une décision même si celle-ci va à l’encontre des souhaits de ce dernier. Il doit lui apprendre à détecter les difficultés, à interpréter les outils de gestion (tableaux de bord), à réagir efficacement face à une difficulté, à prendre des actions qui permettent de la redresser.
Les qualités relationnelles des collaborateurs sont essentielles car ils seront en interaction avec plusieurs intervenants et ils doivent par ailleurs aider l’entreprise à trouver des accords pour l’échelonnement du paiement des dettes. Ils discutent ainsi avec les banques, la CCSF, les organismes sociaux, la médiation du crédit et les autres intervenants pour négocier des échelonnements des dettes, de nouveaux emprunts et autres. Les collaborateurs doivent ainsi disposer d’une forte capacité de négociation.
Ils doivent être fortement orientés sur les résultats car la pérennité de l’entreprise dépend de la qualité des mesures recommandées par l’expert-comptable (mesures d’urgence et mesures de sortie de crise).
Le pôle étant appelé à réaliser un diagnostic opérationnel des entreprises en difficulté et à proposer un plan de retournement opérationnel, l’expert-comptable doit également disposer d’une équipe pluridisciplinaire expérimentée dans plusieurs domaines à savoir l’administration judiciaire, le domaine juridique, le management dans l’industrie et les services, en organisation, en gestion des ressources humaines, en droit, en commerce international.
La majorité des cabinets d’expertise-comptable connaissent des problèmes de recrutement et de fidélisation des collaborateurs. Ce constat est confirmé par le rapport de l’OEC portant sur la « Gestion des cabinets d’expertise comptable » en date de Novembre 2012. En effet, 80 % environ des cabinets enquêtés recrutent leurs collaborateurs à partir des candidatures spontanées reçues et par le biais de leur réseau. Ce problème de recrutement est causé par une absence d’image attractive de la profession. A cela s’ajoute la recherche de collaborateurs disposant de plusieurs compétences techniques afin de faire face à l’évolution du métier vers des missions de conseil et à la concurrence des cabinets d’avocats et autres.
Un cabinet de petite taille ne dispose généralement pas de service dédié aux ressources humaines. Il aura un peu de difficulté pour trouver les collaborateurs répondant parfaitement au profil recherché. Il peut identifier des candidatures à partir des dossiers spontanés reçus, ou recourir à son réseau professionnel, ou effectuer une annonce d’offre d’emploi pour trouver les bons candidats. En guise de solution alternative, le cabinet peut affecter à cette mission des collaborateurs qui sont fortement expérimentés en conseil (en diagnostic, en établissement de plan d’affaire, ou en évaluation d’entreprise) et qui peuvent rapidement comprendre la situation et apprendre. Les collaborateurs choisis doivent également avoir l’expérience de plusieurs secteurs d’activité même pour des missions comptables. Cela leur permet de connaître les spécificités et les contraintes de chaque secteur.
Lors du recrutement de ses collaborateurs, l’expert-comptable doit souligner l’attractivité du poste proposé. En effet, travailler dans le pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté leur permettra d’enrichir leurs compétences comptables, financières, juridiques, commerciales et entrepreneuriales. Ils bénéficieront d’une solide expérience en conseil et pourront travailler sur les cas d’entreprises de différente taille, opérant dans divers secteurs d’activité et sur plusieurs types de difficultés financières. Le collaborateur n’est donc pas assigné à des tâches routinières, sera plus motivé à travailler et facile à fidéliser.
Les collaborateurs affectés au pôle doivent bénéficier d’une formation pour renforcer leurs compétences afin que ces derniers puissent réaliser efficacement la mission d’accompagnement des entreprises en difficulté. Ces derniers doivent en effet bénéficier de compétences multiples avec un bon niveau. Ces formations incluent :
- une formation sur la prévention des difficultés financières et leur traitement : ce module concerne la connaissance du déroulement des procédures amiables et collectives.
- une formation sur les dispositifs de soutien aux entreprises en difficulté : ce module concerne la connaissance de la mission des divers intervenants tels que le tribunal de commerce, la CCSF, la médiation du crédit,…Elle permettra au collaborateur de connaître tous les intervenants nationaux ou internationaux qui pourront aider ses clients.
- une formation sur l’établissement d’un plan d’affaires financier et non financier. Elle permettra au collaborateur de définir des mesures qui correspondent à la situation réelle de l’entreprise en difficulté.
- une formation sur les bases du marketing et sur l’audit marketing. Elle permettra au collaborateur d’identifier lors du premier diagnostic les problèmes qui caractérisent l’offre de l’entreprise, le marché, la concurrence,…
- une formation sur les bases de l’organisation et sur l’audit organisationnel. Elle permettra au collaborateur de vérifier si le personnel de l’entreprise dispose des compétences nécessaires pour chaque fonction assurée, si l’organisation est bien optimisée.
- une formation sur le droit social : cette notion est nécessaire lorsque le plan de redressement de l’entreprise prévoit le licenciement d’une partie du personnel.
Chapitre 2. Mise en place de méthodes, de procédures de travail et d’outils de traitement des entreprises en difficulté
Le présent chapitre détaille les démarches entreprises par l’expert-comptable et ses collaborateurs pour la réalisation des missions du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté. Il propose par ailleurs les outils à utiliser par ce dernier pour faciliter ses travaux.
Section 1. La formalisation des méthodes et des procédures de travail au sein du pôle
La formalisation des méthodes et des procédures de travail consiste à préciser dans un document les tâches ou les opérations à réaliser, la personne responsable de l’exécution de chaque tâche, la manière d’exécuter les tâches (mode opératoire, instructions spécifiques), le moment pendant lequel une tâche doit être initiée ainsi que la durée d’exécution. Elle porte à la fois sur le fond et sur la forme : les informations que chaque collaborateur doit vérifier lors de la phase de diagnostic sont ainsi précisées dans le document. La forme concerne la restitution des informations dans le dossier de travail du collaborateur, une même présentation est ainsi développée afin de faciliter la compréhension des dossiers de chaque client.
La formalisation présente l’avantage de :
- faciliter l’intégration de nouveaux collaborateurs dans le cabinet d’expertise-comptable. Ils peuvent ainsi comprendre rapidement la manière de travailler et les démarches à effectuer. Ils sont d’autant plus faciles à comprendre car les tâches à réaliser sont présentées d’une manière séquentielle.
- réaliser la mission d’une manière professionnelle et de fournir un travail de qualité : les collaborateurs doivent en effet exécuter les tâches et les opérations suivant un enchaînement bien défini et suivant des outils prédéterminés (check-list, questionnaire, matrice,…). Les documents à préparer et fournir pour chaque opération sont précisés (citons par exemple les documents à remettre à des intervenants tels que le tribunal du commerce ou la CCSF ou la médiation de crédit. Les risques d’erreur et d’omission des collaborateurs sont minimisés réduisant ainsi les risques de remise en cause professionnelle de l’expert-comptable.
- réfléchir sur l’organisation du cabinet d’expertise-comptable. Les documents, qui formalisent les méthodes de travail (manuel de procédures par exemple) ne sont pas figés, ils peuvent être révisés au fur et à mesure des changements d’organisation au sin du cabinet ou des changements règlementaires qui peuvent impacter sur les procédures à suivre.
Le déroulement de la mission de l’expert-comptable se décompose en plusieurs étapes incluant :
- Etape 1: la prise de connaissance générale de l’entreprise. Cette étape a pour objectif de connaître l’entreprise et son environnement. La mission de l’expert-comptable consiste à connaître les produits ou les services commercialisés par l’entreprise, leur niveau de technicité, l’existence de produits ou de services de substitution, sa clientèle, son positionnement par rapport à la concurrence, son avantage concurrentiel. Il prend par ailleurs connaissance du secteur d’activité de l’entreprise (niveau de croissance, réglementation, technologie,…). La connaissance de l’entreprise, du secteur d’activité et de son
- Etape 2: l’analyse de la situation financière de l’entreprise à partir des données comptables et extracomptables. Cette étape a pour objectif de :
- identifier le niveau de difficulté de la société.
- définir s’il est possible de continuer l’activité en injectant de nouveaux fonds, et/ou en restructurant l’entreprise, et/ou en cédant une partie des activités.
L’expert-comptable doit analyser les besoins en fonds de roulement de l’entreprise et mettre en exergue la trésorerie qui lui est nécessaire pour financer son cycle d’exploitation. Il prend en compte les postes stocks, créances clients, fournisseurs ainsi que les dettes fiscales et sociales. L’objectif de cette analyse est de déterminer si l’entreprise dispose de ressources de trésorerie de court terme. Il vérifie si les comptes clients sont financés en totalité ou en partie, et que toutes les dettes (fournisseurs, organismes sociaux, Etat) ont été prises en compte. Il doit prendre en considération la saisonnalité de l’activité de l’entreprise car celle-ci peut impacter le calcul du BFR.
L’expert doit analyser l’endettement financier à moyen et à long terme de l’entreprise. Il vérifie la liste des emprunts et détermine s’il est possible de restructurer les dettes de l’entreprise. Il examine par ailleurs les postes capitaux propres et immobilisations afin de déterminer si l’entreprise dispose des moyens de financement nécessaires pour faire face aux investissements et au BFR. L’insuffisance du haut de bilan peut expliquer un déséquilibre structurel de financement.
L’expert-comptable doit par la suite identifier les risques et les engagements hors bilan de l’entreprise qui peuvent impacter sur la trésorerie. Il effectue une revue des contentieux de l’entreprise (existants ou potentiels). Il peut se référer aux avocats de la société pour évaluer les risques et vérifie également les provisions constatées. Il doit examiner si la difficulté financière de l’entreprise a des impacts sur ses filiales.
Il doit également analyser la rentabilité de l’entreprise en étudiant comment son résultat se forme. Il calcule la trésorerie générée et la trésorerie consommée mensuellement. Cet exercice a pour objectif de définir si :
- l’entreprise dégage des marges ou des pertes qui vont grever un peu plus sa situation financière.
- l’activité génère une trésorerie ou des besoins additionnels de trésorerie.
- les marges dégagées par l’entreprise permettent ou non de rembourser ses dettes.
L’expert-comptable doit par ailleurs vérifier si l’entreprise est en état de cessation de paiement ou non.
- Etape 3: l’analyse de l’implication des difficultés financières de l’entreprise. L’expert-comptable doit également examiner des éléments financiers qui pourraient être utiles lors du choix de la procédure à appliquer. Il doit en premier lieu vérifier la liste complète des créanciers de l’entreprise (fournisseurs, banques, investisseurs, organismes sociaux, Etat,…) et dégager ceux dont les créances sont les plus significatives. Cet exercice lui permettra d’évaluer la possibilité d’obtenir des crédits additionnels ou de bénéficier d’un échelonnement des créances. L’expert-comptable pourrait dans ce cas opter pour une procédure amiable. Suite à une discussion avec le dirigeant, il doit également définir si un licenciement de certains membres du personnel est nécessaire pour redresser l’entreprise. En cas de licenciement significatif, les procédures collectives peuvent être plus appropriées car elles permettent une accélération des procédures de licenciement et l’entreprise pourra bénéficier d’une avance sur le coût des licenciements.
- Etape 4 : le choix de la procédure à appliquer. L’expert peut conseiller à l’entreprise de recourir aux procédures prévues par la loi telles que :
- les procédures amiables (mandat ad hoc ou conciliation),
- les procédures collectives (sauvegarde, redressement judiciaire, liquidation judiciaire)
L’expert-comptable doit se baser sur des critères précis pour le choix de la procédure à adopter.
- En état de cessation de paiement ou non : Le premier élément déterminant du choix de l’expert-comptable est l’existence d’un état de cessation de l’entreprise ou non, la possibilité de redresser l’entreprise ou non déterminées durant l’analyse financière de la situation de la société. L’expert doit par exemple préconiser le mandat ad hoc pour une entreprise qui ne se trouve pas en état de cessation de paiement et lorsque le dirigeant et/ou l’expert ont trouvé un accord avec les créanciers pour le gel de leurs créances pendant la durée de la procédure. Il doit opter pour la conciliation si l’entreprise se trouve dans un état de cessation de paiement depuis moins de 45 jours. La procédure de sauvegarde est recommandée pour les entreprises qui ne sont pas en cessation de paiement ou qui ne le seront pas à court terme mais qui connaissent d’importantes difficultés difficiles à surmonter.
- Conséquences de l’ouverture des procédures sur l’exigibilité des dettes : Le paiement des créanciers se fait normalement et un accord est établi avec les créanciers pour le gel des créances durant la durée de la procédure. Aucune entité ne peut assigner l’entreprise en redressement ou liquidation judiciaire durant cette période. Le recours aux procédures collectives (sauvegarde, RJ, LJ) implique un gel du passif antérieur à l’ouverture de la procédure et un paiement normal des dettes postérieures à celle-ci.
- Conséquences sur les cautions : Le mandat ad hoc n’implique aucun changement au niveau de l’exigibilité des cautions. Elles peuvent être inclues dans l’accord conclu avec les créanciers dans le cadre d’une conciliation. Elles sont suspendues pour les procédures de sauvegarde pendant la période d’observation et bénéficient des conditions du plan de sauvegarde. De même pour la RJ, elles font l’objet de suspension mais sont exigibles une fois que le plan de redressement est adopté.
- La durée des procédures : Ce critère est important puisqu’une situation financière difficile peut être redressée rapidement en 3 mois ou en 1 an ou en plusieurs années suivant l’importance de l’endettement de l’entreprise, sa taille ou la complexité de ses opérations.
- La possibilité de reprise de l’entreprise par des tiers : Le dirigeant de l’entreprise n’est pas obligé de céder une partie de ses activités pour une procédure amiable. Il peut procéder à la cession partielle de ses activités dans le cas d’une procédure de sauvegarde. Les tiers peuvent soumettre une offre de reprise pour les procédures de RJ et LJ et ces offres seront examinées par les intervenants.
- La responsabilité des dirigeants sur le passif : La responsabilité des dirigeants n’est pas remise en cause dans le cas des procédures amiables. Il en est de même pour la procédure de sauvegarde sauf s’ils n’ont pas respecté les termes du plan de sauvegarde. Ils peuvent être personnellement responsables du comblement du passif dans le cas des procédures de RJ et LJ.
- Situation des intérêts, des pénalités et des majorations de retard : Les intérêts, les pénalités et les majorations de retard sont à négocier avec les créanciers concernés (administration fiscale, banques, …) dans le cas des procédures amiables. Ils sont remisés dans le cas des procédures collectives à l’exception des intérêts bancaires qui sont gelés si les concours bancaires durent moins d’un an et qui sont exigibles pour une durée supérieure à un an.
- Etape 5: l’identification des premières mesures à réaliser. Le choix de procédures est réalisé avant la mise en œuvre des premières mesures car les procédures ne sont efficaces que si elles sont prises rapidement. Une fois que les procédures sont ouvertes, l’expert-comptable et le dirigeant doivent également établir et mettre en œuvre un plan d’action pour redresser le problème de trésorerie.
L’expert doit discuter avec les principaux directeurs ou responsables de l’entreprise pour les aspects tels que les ventes (le directeur commercial), les achats (le directeur des approvisionnements), la production (le directeur de la production), le directeur des ressources humaines,… pour s’assurer de bien cerner les spécificités de chaque opération et fonction, pour sensibiliser les acteurs de l’entreprise sur la nécessité de combler au plus vite la trésorerie.
- Encaisser rapidement les créances clients : L’expert et les responsables de l’entreprise doivent en premier lieu encaisser les créances échues auprès de ses clients en mettant en œuvre des actions de recouvrement (relance téléphonique, envoi des factures d’avoir en retard, mise en demeure,…). Ils doivent également envoyer toutes les factures en retard et les encaisser rapidement. Ils peuvent mettre en place un système qui automatise l’envoi des factures avec les livraisons, et le recouvrement des créances aux dates d’échéance. L’entreprise doit par ailleurs réduire les délais de paiement accordés à ses clients. L’expert et le dirigeant doivent par ailleurs examiner avec les banques et les assureurs-crédit la possibilité de céder les créances professionnelles dans le cadre de la cession Dailly ; de recourir à l’escompte ou à l’affacturage.
- Retarder le paiement des fournisseurs : Pour gérer au mieux sa trésorerie, le dirigeant peut également retarder le paiement de certains fournisseurs. L’expert-comptable établit à cet effet la liste des fournisseurs vitaux pour l’entreprise dont les fournisseurs doivent être réglés à l’échéance et ceux qui ne sont pas prioritaires. L’expert peut également négocier avec les fournisseurs de l’entreprise un paiement au comptant des nouvelles factures, un échelonnement de la dette antérieure sur une période déterminée. Il peut par ailleurs étudier l’option de reverse factoring pour financer un délai de paiement aux fournisseurs.
- Maintenir et piloter une situation de trésorerie : L’expert doit mettre en place une situation de trésorerie journalière incluant les échéanciers clients et les échéanciers fournisseurs ainsi qu’une situation prévisionnelle sur un à deux mois. Ces situations doivent être mises à jour en temps réel et examinées fréquemment.
- Négocier un échelonnement des dettes : L’expert doit contacter l’administration fiscale et les organismes sociaux pour négocier un échelonnement des dettes fiscales et sociales.
- Travailler en flux tendus : Afin de disposer de trésorerie, l’expert-comptable doit examiner le stock de l’entreprise, liquider le stock en surplus qui ne correspond pas à des commandes confirmées pour les 1 à 2 prochains mois. L’entreprise ne doit acheter des intrants que lorsque des commandes sont confirmées. Le stock peut par ailleurs être gagé contre du crédit bancaire.
- Revoir l’organisation dans l’entreprise : Tous les niveaux de l’entreprise doivent au maximum limiter les coûts (stock, coût de communication, coût de déplacement,…). Ils doivent être sensibilisés par l’expert-comptable et le dirigeant sur la nécessité de privilégier la gestion par la trésorerie. Une réorganisation peut être ainsi nécessaire pour l’approbation de toutes les dépenses pouvant impacter la situation financière de l’entreprise. L’expert étudie le fonctionnement, l’autorisation, le contrôle au niveau des opérations pouvant impacter sur les charges de l’entreprises (achat, stock, production, logistique,…).
- Stopper les investissements: L’entreprise doit stopper tous les investissements immobiliers ou mobiliers. Elle peut vendre certains mobiliers qui ne sont pas utiles pour l’exploitation. Elle peut par exemple réduire le parc de véhicule et recourir à la location.
- Augmenter les capitaux propres: L’expert peut proposer une augmentation de capital et la suspension du versement des dividendes. Une augmentation du fonds de roulement peut également inclure la baisse des immobilisations d’exploitation qui génèrent une très faible rentabilité ; la conversion de dettes à court terme en dette à moyen terme.
- Etape 6 : Préparation de la sortie de crise de l’entreprise. Une fois que les premières mesures d’urgence ont été mises en œuvre et qu’elles aient apporté une amélioration de la trésorerie, l’expert-comptable doit implémenter un certain nombre de mesures pour s’assurer que l’entreprise ne se retrouve plus dans le même type de difficulté à l’avenir.
- Réaliser un diagnostic approfondi de l’entreprise
L’expert-comptable a réalisé un diagnostic de l’entreprise durant la phase de prise de connaissance (étape 1). Pour connaître les causes structurelles des problèmes survenus, il doit effectuer un diagnostic approfondi pour savoir si les problèmes étaient dus à une faiblesse du contrôle interne, ou une faiblesse de l’organisation, ou une faible compétence des ressources humaines, ou une mauvaise stratégie, ou un business model peu adéquat. Chaque aspect doit faire l’objet d’une analyse séparée.
Il doit inciter la direction à étudier l’offre de l’entreprise qui est au cœur même de sa stratégie en utilisant la matrice de Porter, à étudier la rentabilité de chacun des produits commercialisés. L’objectif étant pour l’entreprise de réorienter son offre si nécessaire sur des produits qui génèrent une marge élevée et qui correspondent à des besoins réels des consommateurs. Une des mesures prises peut être par exemple d’abandonner la production et la vente de produits qui présentent le plus faible volume de ventes et la plus faible marge. Le dirigeant et l’expert peuvent se faire aider par des spécialistes.
Ce diagnostic peut également mettre en évidence la nécessité pour l’entreprise de se concentrer sur son cœur de métier :
- en cédant une partie de ses activités (même si cette cession n’est pas obligatoire). Lorsque cette mesure est envisagée, l’expert-comptable doit préparer rapidement un dossier de cession pour la partie à céder.
- en s’associant à un partenaire.
L’expert doit réaliser un diagnostic commercial, social/organisationnel (organigramme, fiches de poste, qualifications du personnel existant, …), un diagnostic financier ainsi qu’un diagnostic de la production de l’entreprise. La production se comprend au sens large : elle inclut l’approvisionnement, la gestion des stocks, la fabrication proprement dite, le conditionnement, la logistique et le transport. Le tableau 3 ci-après indique les différents domaines à diagnostiquer dans l’entreprise.
Une fois que le diagnostic est effectué, l’expert-comptable remplit un tableau résumant les domaines concernés (production de l’entreprise, commercial, social, financier…), les points forts par domaine, les points faibles, les mesures préconisées à court terme ainsi que les mesures à moyen terme. Une matrice est jointe en annexe x. Pour la rubrique « social », les mesures prises peuvent consister par exemple à la formation du personnel, au licenciement de certaines personnes, à la réaffectation de certaines personnes à des postes différents qui représentent plus de valeur ajoutée pour le développement de l’entreprise. Ces mesures seront incorporées dans le plan d’affaire mentionné ci-dessous ou dans le plan de redressement.
Tableau 3. Démarches de diagnostic approfondi d’une entreprise en difficulté
Diagnostic commercial | Diagnostic social | Diagnostic production | Diagnostic financier |
Marché | Equipe de direction | Capacité,
Niveau technologique, organisation, productivité |
Performance économique |
Clientèle | Hommes et organisation | Gestion des stocks | Trésorerie d’exploitation |
Concurrence | Opérationnel, personnel, fonctionnel | Méthodologie des coûts | Indépendance financière |
Produits | Climat social | Gestion des achats | Emplois/
Ressources |
Choix marketing : politique de produit, politique de prix, politique de distribution, politique de communication | Système de communication | Niveau de sous-traitance | Scoring |
ê |
|||
Points forts et points faibles | |||
Contraintes externes | ê | Contraintes internes | |
Mesures et plan d’actions | |||
ê | |||
Contrôle des résultats et analyse des écarts |
Source : Daigne J.F, 1991
- Etudier la rentabilité de l’entreprise
L’expert-comptable doit étudier la rentabilité de :
- chaque produit ou service commercialisé par l’entreprise,
- chaque opération (par centres de coûts),
- l’ensemble des produits et services,
- chaque site de production,
- chaque filiale de l’entreprise,
- chaque client.
Des mesures doivent être adoptées pour les produits non rentables, elles peuvent consister par exemple en la fermeture ou le regroupement de sites de production, l’externalisation de certaines opérations, la sous-traitance d’une partie de la production, l’abandon de certains produits,…
L’expert-comptable doit mettre en place une comptabilité analytique si elle n’existe pas dans l’entreprise, ou contrôler la pertinence et l’adéquation de celle qui existe. Il doit vérifier si l’entreprise utilise les éléments fournis par cette comptabilité analytique pour prendre des décisions telles que la définition du prix de revient et du prix de vente des produits, la rémunération des salariés de production…
- Identification des leviers de restructuration
Le diagnostic financier de l’entreprise permettra d’identifier les mesures qu’il est possible d’adopter :
- réaménagement des échéances de la dette,
- injection de l’argent frais,
- réduction du besoin en fonds de roulement,
- mise en place d’une gestion par le cash,
- cession d’actifs non stratégiques,
- financement sur actifs.
Le diagnostic opérationnel permettra également d’identifier des mesures correctives pour redresser l’entreprise. La mise en œuvre de ces mesures nécessitera des coûts additionnels, et l’équipe du cabinet d’expertise-comptable doit évaluer le retour sur investissement des nouveaux fonds injectés, les perspectives de rentabilité et de cash- flow après la restructuration.
- Etablir un plan d’affaire
Des réorientations stratégiques sont mises en œuvre dans l’entreprise (modification ou nouvelles offres commerciales, nouvelle organisation, nouveaux outils ou procédés de fabrication, externalisation ou sous-traitance,…), elles sont supposées apporter des améliorations dans la continuité et la profitabilité de l’exploitation. L’expert- comptable doit établir un plan d’affaire qui tienne compte de ces nouvelles orientations (volume de production, volume de vente, prix de vente, sous-traitance, rémunération du personnel,…). Le plan d’affaire inclut une description du projet, les mesures recommandées en ce qui concerne l’offre de l’entreprise, la production, les achats, la logistique, le positionnement et le marketing, l’organisation/les ressources humaines. Le plan de sauvegarde et le plan de redressement sont des plans d’affaire.
Les mesures identifiées lors du diagnostic doivent être converties en coûts afin que le dirigeant puisse connaître le coût du redressement et trouver les financements nécessaires à leur mise en œuvre. Les responsables de la mise en œuvre de chaque mesure doivent par ailleurs être précisés (le directeur commercial, le directeur de production, …). Le calendrier de la mise en œuvre des mesures doit également être précisé. Les coûts et le calendrier peuvent être inclus dans l’annexe x.
- Réaliser un suivi du plan d’affaire
L’expert-comptable doit veiller à la mise en œuvre du plan d’affaire. Il doit s’assurer que les mesures ont donné les résultats attendus. Il doit par ailleurs veiller à ce que le dirigeant de l’entreprise dispose des outils de pilotage nécessaires pour assurer ce suivi.
Un récapitulatif des démarches à effectuer par l’expert-comptable est résumé en annexe x.
Le dossier de travail constitue un outil qui regroupe les informations relatives à une mission effectuée par l’expert-comptable ou un collaborateur. Il présente plusieurs utilités à savoir :
- la revue par l’expert-comptable de la réalisation du programme de travail et des travaux réalisés par le collaborateur.
- la recherche plus facile des informations lors des discussions et des réunions de travail avec le client.
- l’amélioration continue de la qualité des interventions, la mise à jour du programme de travail.
- la prise de connaissance du dossier et la transmission d’information d’un collaborateur à l’autre en cas d’absence, de congé, ou de départ.
- la constitution de preuve justifiant l’accomplissement des diligences professionnelles dans la réalisation des travaux.
- la matérialisation des constats réalisés par le collaborateur et la justification des conclusions et des recommandations émises.
Le dossier du collaborateur inclut les documents ci-après :
- les informations liées à la mission: la fiche signalétique du client, les questionnaires d’acceptation et de maintien de la mission, la lettre de mission et ses avenants, les dates d’intervention, le programme de travail.
- les informations générales et économiques sur le client:
- les informations collectées à l’issue de la prise de connaissance de l’entreprise : historique et présentation de la société dont une brochure ou une plaquette de présentation par exemple, secteur d’activité, liste des établissements, mode d’exploitation, typologie et principaux clients, typologie et principaux fournisseurs, typologie et principaux partenaires (sous-traitants), organigramme…
- les informations juridiques : extrait K Bis, statuts, liste des administrateurs, liste des associés (dernière feuille de présence), répartition du capital, état des filiales et des participations, certificats de dépôts des comptes, contrats (baux, assurances, LOA,…), état des inscriptions (privilèges et nantissements).
- les informations comptables et financières du client : les partenaires financiers, les emprunts, les crédits-bails, les engagements cautions, les états financiers, la situation de la trésorerie, la convention collective, les états des salaires et des obligations sociales, les projections financières de l’entreprise,
- les informations fiscales : l’état des obligations fiscales (régimes, impôts et taxes), liasse fiscale des derniers exercices, conclusions des derniers contrôles fiscaux, …
- les informations reçues du client et des tiers (lettres, rapports,…).
- les documents élaborés par l’expert-comptable incluant les différentes fiches de travail utilisées pour réaliser la mission, l’état de calcul de la cessation de paiement ou non de l’entreprise, l’évaluation de son niveau de difficulté, le rapport de diagnostic rapide, les propositions de mesures urgentes à mettre en œuvre le rapport de diagnostic opérationnel et financier approfondi, la proposition de mesures opérationnelles et l’analyse coût-bénéfice de la mise en place de ces mesures, la modélisation du retour sur investissement de chaque option, le plan de restructuration de l’entreprise, le rapport de suivi de la mise en œuvre du plan.
- les documents portant sur le suivi de la rentabilité de la mission : le budget et les éléments qui ont servi à établir le devis ; le suivi des temps de travail passé par les chefs de missions, les collaborateurs, l’expert-comptable, les factures….
Section 2. Les outils à utiliser par les collaborateurs pour le traitement des dossiers clients
L’expert-comptable peut utiliser un questionnaire pour évaluer rapidement la situation de son client. Cet outil se présente sous forme d’un tableau dans lequel les points à vérifier par l’expert sont listés. Ce dernier doit cocher les cases concernées, fournir des éléments chiffrés lorsque c’est applicable.
Outre l’évaluation de la situation de l’entreprise, ce questionnaire met par ailleurs en exergue les différents points sur lesquels l’expert-comptable doit :
- définir les premières mesures pour gérer la crise.
- identifier des mesures pérennes lors de la préparation de la sortie de crise.
Questionnaire pour définir le niveau de difficulté de l’entreprise
- Analyse de la structure du bilan : L’expert-comptable vérifie si les capitaux propres présentent un solde négatif et si cette situation est associée à l’existence d’un découvert bancaire, à une augmentation des dettes fournisseurs, des dettes fiscales et sociales, à l’augmentation des inscriptions de privilèges, à une augmentation des engagements hors bilan (nantissements, hypothèques..), au non remboursement des emprunts. Si l’expert coche « oui » sur la ligne « augmentation des dettes fiscales et sociales », il doit ainsi négocier ces dettes avec le CCSF.
- Analyse de la structure du résultat : L’expert-comptable vérifie si les ventes ont baissé d’une année à l’autre, si les charges d’exploitation ont considérablement augmenté et si ces variations sont accompagnées de la baisse de la marge dégagée. Si l’expert coche « oui » sur la ligne « baisse de marge », il doit s’assurer lors de la préparation de la sortie de crise d’étudier la rentabilité de l’offre de l’entreprise (par produit, par gamme de produit,…).
- L’entreprise et ses banques : Certaines décisions et actions des banques traduisent la difficulté d’une entreprise. L’expert-comptable doit ainsi vérifier la survenance des faits ci-après :
- les appels réguliers de la banque pour confirmer une opération avant de l’exécuter,
- le refus de payer les opérations de l’entreprise : chèque, virement, prélèvement, …
- le refus de la banque d’ouvrir une nouvelle ligne de crédit malgré les garanties offertes par l’entreprise et la suppression des concours bancaires (découvert bancaire, autorisation Dailly,…),
- le dépassement régulier des limites d’autorisation des crédits (ligne de découvert,…),
- l’obtention de crédits mais à des taux élevés,
- l’appel fréquent à l’affacturage pour les créances.
- L’entreprise et ses clients : L’expert-comptable doit examiner si l’entreprise a enregistré une baisse de ses chiffres d’affaires, si elle a perdu des clients importants, si elle a reçu des réclamations ou si elle a des litiges en cours avec des clients à cause des délais de livraison, de la qualité ou de la défaillance des produits et services vendus. Il vérifie si l’entreprise connait des retards de paiement de la part de ses clients, si elle a enregistré des annulations de commande ou si elle a accordé plus de remises que d’habitude (en volume ou en valeur). Les pertes de clients et les commandes annulées peuvent être par exemple à l’origine des difficultés.
- L’entreprise et ses salariés : Le retard fréquent dans le règlement des salaires du personnel indique une difficulté financière de l’entreprise. L’expert doit aussi vérifier si l’absentéisme et la rotation du personnel sont élevés, si des conflits sociaux existent au sein de la direction, si des salariés occupant des postes clés ont démissionné, si l’entreprise a eu recours à un chômage partiel. Il examine par ailleurs si la société a interrompu des contrats de travail précaires avant ou en cours d’exercice.
- L’entreprise et ses fournisseurs : L’expert-comptable vérifie si des fournisseurs ont supprimé des délais de règlement accordés, si certains d’entre eux refusent de livrer l’entreprise, si celle-ci connaît des retards répétitifs dans le paiement des fournisseurs, si ces derniers ont émis des injonctions à payer, des protêts ou des assignations pour des créances non contestées. Le changement fréquent de fournisseurs peut également constituer un signe de difficulté.
- L’entreprise et les organismes sociaux et fiscaux : Les faits ci-après peuvent constituer des signes de difficulté : les retards répétitifs dans la déclaration fiscale et sociale auprès de l’URSSAF, du Trésor Public… ; les retards dans le paiement des obligations fiscales et sociales ; la réception de commandements à payer de ces organismes ainsi que les redressements après la réalisation de contrôles.
- Procès et procédures d’alerte : L’expert-comptable vérifie aussi si l’entreprise a été condamnée en justice dans un procès prud’hommes ou avec des clients et doit contrôler si les sanctions financières sont importantes. Il s’informe si le bail de la société a été dénoncé et assorti avec de nouvelles conditions inacceptables. Lors de la mission de revue des comptes, le commissaire aux comptes a l’obligation d’émettre une procédure alerte lorsqu’elle est applicable. L’expert vérifie dans quelle phase la procédure d’alerte se situe (phase 1 à phase 4 qui est la plus grave).
Un exemple de questionnaire est rattaché en annexe. Il a été élaboré à partir du questionnaire préconisé par le CIP pour lequel quelques améliorations ont été apportées.
Questionnaire pour l’analyse approfondie de la situation de l’entreprise
- Diagnostic commercial et marketing
Le cabinet d’expertise comptable va aborder dans le questionnaire plusieurs éléments incluant :
- Etude de la pertinence de la politique commerciale : étude d’image et enquête de satisfaction clientèle ; analyse du positionnement commercial ; cohérence entre la stratégie et les moyens disponibles.
- Les produits : la gamme de produits de l’entreprise, le degré d’innovation de ces produits, à la mode ou non, nouveaux ou vieux produits, la position des produits sur leur courbe de vie, la répartition du chiffre d’affaires par produit, gamme trop élargie ou non, l’existence de produits non rentables, la marge par produits, l’existence de produits de substitution sur le marché.
- Le marché : l’étude de la situation et de l’évolution de son marché (en hausse, en baisse, constant), la structure de sa clientèle, le nombre de clients de l’entreprise, la répartition du chiffre d’affaires par clients et par marché (local, régional, international), l’évolution de cette structure, le degré de dépendance de l’entreprise envers les clients (20% des clients réalisent-ils par exemple plus de 80% du chiffre d’affaires), l’existence d’une clientèle stable, le délai de règlement moyen des clients.
- La concurrence : l’arrivée d’un nouveau concurrent, la montée en puissance d’un concurrent existant, le changement de stratégie d’un concurrent, l’intensité de la concurrence.
- La performance commerciale : le nombre de clients potentiels, contactés, prospectés, le nombre de devis envoyés, le nombre de devis transformés en commande ferme, le nombre de commerciaux, la performance des commerciaux, la répartition des clients par commercial, la méthode de prospection, l’existence d’un outil de suivi de la performance commerciale individuelle et générale.
- La politique de prix : existence d’un outil performant pour le calcul du prix de revient, le taux de marge appliqué, les contraintes sur le prix de vente (prix du marché, prix fixé par la réglementation ou par la distribution).
- La politique de distribution : les canaux de vente actuels, le chiffre d’affaire par canal de distribution, la marge réalisée par canal, le délai de vente des produits et les conditions de paiement par canal, le coût du service après-vente, la nécessité d’avoir un SAV.
- La politique de communication : existence d’un outil de mesure de l’efficacité des promotions et des publicités, la suffisance des activités de promotion, l’adéquation des communications avec l’offre et la stratégie commerciale de l’entreprise, le budget de la publicité par rapport au CA.
- Étude de la structure et de l’organisation commerciale: organisation et fonctionnement du service commercial; actions commerciales déjà réalisées: types et résultats;
analyse des outils de vente et de communication; analyse des méthodes de prospection et de la base de données clients.
- Diagnostic de la production
- La gestion des achats: le nombre de fournisseurs de l’entreprise, les fournisseurs vitaux, la méthode de sélection des fournisseurs, le pouvoir de négociation de l’entreprise avec les fournisseurs (est-ce que 80% des achats sont effectués auprès de moins de 20% des fournisseurs ?), les conditions obtenus (coût, délai).
- La production : état des lieux du système organisationnel de la commande jusqu’à la livraison (en passant par la production), les typologies de la production, l’analyse de chaque opération et de chaque poste et leur niveau d’optimisation, l’analyse des dysfonctionnements et des gaspillages (matières premières, énergie,…), le taux de retour des produits, l’analyse des temps de travail pour chaque opération, le niveau de qualité des produits, le niveau de productivité, la productivité par rapport à la capacité réelle, le délai de production, la récurrence ou non des pannes de matériels, les coûts de production pour chaque opération, l’existence d’une comptabilité analytique fiable. Le diagnostic de la production inclut par ailleurs l’analyse du système de gestion et de contrôle de la production (programmation/lancement de la production, contrôle, suivi de la performance dans les ateliers), la programmation de la production, la productivité et la qualité des matériels et équipements utilisés, le délai de parcours entre les chaînes de production, le service conditionnement et le point d’enlèvement des marchandises ainsi que l’organisation du contrôle qualité.
- Diagnostic de l’organisation interne
Le diagnostic organisationnel a pour objectif de déterminer les forces, les faiblesses de l’organisation interne de l’entreprise :
- au niveau des cadres dirigeants, des directeurs et du personnel.
- Entre les activités de l’entreprise et au sein de chaque département/unité.
Il inclut la gestion des compétences, l’évaluation du personnel, la définition des postes, …
Le collaborateur en charge du diagnostic :
- définit la partie de l’entreprise à diagnostiquer (un département, un service, une usine, un poste de travail, une activité, un processus,…). Cette définition dépend de l’objectif du diagnostic, qu’il s’agisse d’un problème (gestion de la qualité) ou d’une opportunité (développement d’un nouveau produit).
- définit l’ensemble des acteurs en relation avec la partie de l’entreprise à diagnostiquer : dans le cas d’un diagnostic d’un service de laverie dans une entreprise textile par exemple, le collaborateur doit étudier les relations du service avec les fournisseurs (produits, sous-traitants, …) et ses clients (le service commercial de l’entreprise).
- réalise une analyse fonctionnelle pour identifier les avantages, les limites du fonctionnement de la partie étudiée ainsi que les problèmes organisationnels.
- analyse la coordination dans la partie concernée.
- identifier des pistes d’amélioration possibles, examiner leurs avantages, leurs limites, leurs coûts, les délais nécessaires pour leur mise en place.
Les questions peuvent concerner :
- l’organisation des postes (descriptions et profils de qualification/compétences),
- la planification des besoins en effectifs, (quantité et profil),
- les procédures d’accueil et d’intégration de nouveaux employés.
- le taux de rotation de la main d’œuvre,
- le niveau des salaires par rapport au marché,
- la structure de rémunération,
- les indices de gestion du personnel (absentéisme, assiduité,…),
- la gestion de la discipline,
- la participation du personnel aux aspects de la gestion (amélioration continue, santé, sécurité,…),
- les indices de qualité (gestion de plaintes,…),
- la forme de reconnaissance du rendement,
- la gestion des employés difficiles,
- la procédure et l’outil d’identification des besoins en formation,
Les questions à aborder dans le diagnostic organisationnel dépend du secteur de l’activité de l’entreprise (commerce, unité de transformation ou entreprise de service), de la partie à diagnostic et des objectifs visés.
L’arbre de décision permet à l’expert-comptable de connaître rapidement les procédures auxquelles l’entreprise peut recourir au vu de son niveau de difficulté. L’expert choisit ainsi entre l’option la plus adéquate en utilisant le graphe 6 ci-dessous: mandat ad hoc, conciliation, procédure de sauvegarde, redressement judiciaire, liquidation judiciaire.
Une fois qu’il a déterminé les options possibles, il finalise son choix en prenant en compte plusieurs paramètres tels que le souhait de maintenir la confidentialité de la procédure par exemple.
Figure 6. Arbre de décision sur le choix des procédures
Entreprise en difficulté |
Cessation de paiement (CP) |
Problèmes de trésorerie |
Problèmes de trésorerie ou difficulté financière prévisible ou
CP < 45 jours |
Problèmes graves de trésorerie pouvant mener à un
CP |
CP depuis 45 jours |
Mandat ah hoc |
Procédure de conciliation |
Procédure de sauvegarde |
Redressement judiciaire (RJ) |
oui |
non |
non |
non |
Accord constaté |
Accord homologué |
RJ si en CP |
Plan de remboursement du passif |
Plan de restructuration |
RJ si en CP |
Plan de redressement
Plan de continuation
Plan |
Liquidation judiciaire si plan non respecté ou échec du plan |
Le tableau ci-après résume les principaux critères pris en considération par l’expert-comptable pour le choix d’une procédure dans le cadre du traitement d’une entreprise en difficulté.
Tableau 4 : Critères pour le traitement des entreprises en difficulté
Options | Missions | Plein pouvoir des dirigeants | Confidentialité de la procédure | Paiement des salaires et frais de licenciement par AGS | Sort des cautions du dirigeant |
Médiation du crédit | Négociation avec les banques : concours bancaires, emprunts | OUI | OUI | NON | Non appelé |
CCSF | Négociation des dettes fiscales et sociales | OUI | OUI | NON | Non appelé |
Mandat ad hoc | Négociation avec les banques, les fournisseurs, les organisations fiscales et sociales (jusqu’à 18 mois) | OUI | OUI | NON | Non appelé |
Conciliation | Négociation avec les banques, les fournisseurs, les organisations fiscales et sociales (jusqu’à 4 mois) | OUI | OUI (si accord constaté)
NON (si accord homologué) |
NON | Non appelé |
Plan de sauvegarde | Gel de toutes les dettes antérieures à l’ouverture de la procédure | OUI | NON | OUI (pour licenciement économique et pendant période d’observation) | Non appelé |
Redressement judiciaire | Gel de toutes les dettes antérieures à l’ouverture de la procédure | NON (remplacé par administrateur judiciaire qui est le deuxième signataire pour les opérations bancaires) | NON | OUI (à l’ouverture de la procédure et durant la période d’observation)
(salaires, congés, 13ème mois, frais de déplacement
|
Non appelé pendant la période d’observation
Appelé après adoption du plan de continuation |
Un tableau synthétique des critères qu’il est possible de considérer ainsi que les caractéristiques correspondantes de chaque procédure est attaché en annexe x.
Plusieurs acteurs interviennent dans l’assistance aux entreprises en difficulté. L’expert-comptable est appelé à travailler en étroite collaboration avec ces acteurs, ils incluent :
- Le tribunal de commerce: Il peut assister les entreprises en difficulté dans la gestion des litiges commerciaux. Il peut utiliser des outils tels que des injonctions à payer ou des référés. Il peut également intervenir dans la résolution de conflits entre entreprises par le biais de la médiation judiciaire. Il aide les entreprises en difficulté en les assignant à la conciliation sur la base des informations détenues par le greffier telles que l’absence de dépôt des comptes annuels depuis plusieurs années, des comptes qui font apparaître d’importants déséquilibres financiers. Un entretien est réalisé en toute confidentialité entre le tribunal du commerce et le dirigeant afin de connaître les problématiques de ce dernier. Il a pour objectif pour le tribunal d’écouter le dirigeant, de lui faire prendre connaissance des conséquences possibles de ses difficultés et de l’orienter sur les mesures possibles.
- Les délégations territoriales du MEDEF: Ce sont les représentations du MEDEF qui constitue un réseau d’entrepreneurs. Ils défendent les intérêts des entreprises de toutes tailles et de tous secteurs d’activité, et sont représentés dans les différents dialogues avec le secteur public. Environ 90% des membres du MEDEF consistent en des entreprises de moins de 50 salariés. Ces délégations peuvent soutenir les entreprises en difficulté et solliciter en cas de besoin une intervention de la médiation du crédit et celle de la sous-traitance.
- Le Centre d’Information sur la Prévention des Difficultés des Entreprises: La mission du CIP a été explicitée en première partie. Il présente l’avantage de regrouper des professionnels comptables, des anciens juges des tribunaux de commerce, des avocats,…Cette plateforme partage les bonnes pratiques existantes et propose des outils d’aide à la gestion.
- Les assureurs-crédit : Ces assureurs protègent les entreprises contre les impayés. Celles-ci reçoivent le règlement de leurs créances de la part des assureurs à défaut de paiement des clients. L’assurance-crédit permet par ailleurs à l’entreprise de bénéficier plus facilement de crédits car elle rassure les partenaires financiers.
- Les assurances santé de l’entreprise auprès de six compagnies d’assurance telles que Axa, Covéa risks, Chartis, Hiscox, Groupama et CFPD. L’entreprise devrait souscrire à cette assurance santé afin de pouvoir couvrir les honoraires des experts auxquels le dirigeant fait appel pour sauver son entreprise en cas de difficulté. Ces experts peuvent inclure les experts-comptables, les avocats, les mandataires ad hoc ou les conciliateurs.
- La Banque Européenne d’Investissement (BEI) : La BEI accorde des prêts et des conditions de crédit favorables aux TPE-PME d’une durée entre 2 à 12 ans. Bien que cette banque ne satisfasse pas directement les problèmes de trésorerie à court terme, elle peut accorder des prêts pour mettre en œuvre les mesures planifiées lors de la sortie de crise (acquisition de matériels de production ou financement de fonds de roulement,…).
- La Commission départementale des Chefs de Services Financiers (CCSF) : La CCSF octroie des moratoires pour les dettes fiscales et sociales d’une durée de 24 mois, pouvant aller jusqu’à 36 mois dans certains cas. Un expert-comptable qui souhaite négocier le passif fiscal et social de son client doit ainsi s’adresser à la CCSF qui examine le dossier soumis. Les majorations de retard et les pénalités peuvent être annulées par la CCSF si l’entreprise respecte les délais de paiement échelonnés.
Le dossier soumis à la CCSF comprend une note de présentation des difficultés de l’entreprise, le détail du passif social et fiscal, le plan d’action pour redresser l’entreprise, les prévisions de trésorerie, l’échelonnement et la garantie proposée (caution bancaire, nantissement ou hypothèque), l’attestation de l’URSSAF sur le paiement des parts salariales, les copies des bilans des 3 dernières années.
- Le Médiateur du crédit: La Médiation du crédit est un service fourni gratuitement aux entreprises qui connaissent des difficultés envers les banques et les assurances-crédit. Il aide les entreprises en difficulté en identifiant des solutions adaptées à leurs problèmes de trésorerie en collaboration des établissements financiers. Ces solutions peuvent concerner le court terme ou le long terme par l’apport de fonds propres par exemple. L’expert-comptable peut ainsi recourir à un médiateur de crédit lorsque la banque de l’entreprise refuse d’octroyer un nouveau crédit ou des facilités de caisse ou refuse l’échelonnement des emprunts.
- Le Fonds National de garantie des salaires : Fonds géré par l’Unedic, le FNGS permet aux entreprises en état de cessation de paiement de bénéficier d’une avance pour payer les arriérés de salaire correspondant à un maximum de 60 jours avant l’ouverture d’une procédure collective. Les éléments de paie sont remis au mandataire judiciaire. Les fonds sont par la suite octroyés au représentant des créanciers qui se charge par la suite de payer les salariés.
- Le Comité Départemental d’Examen des Difficultés de Financement des Entreprises : Le CODEFI accueille les entreprises en difficulté et les oriente sur des solutions qui permettent leur redressement et leur développement. Il peut financer un audit qui a pour objectif de valider les hypothèses de redressement et/ou accorder un prêt pour la restructuration de l’entreprise.
Une liste des acteurs intervenant dans le traitement des entreprises en difficulté ainsi que leurs principales missions est attachée en annexe X.
PARTIE 3. SUIVI DE LA GESTION ET DE LA PERFORMANCE DU POLE D’ACCOMPAGNEMENT DES ENTREPRISES EN DIFFICULTE
Cette troisième partie concerne le suivi de la gestion et de la performance du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté. Elle aborde les étapes nécessaires à mettre en œuvre pour s’assurer que le pôle soit rentable et qu’il contribue à la rentabilité du cabinet d’expertise comptable en général. Elle se réfère ainsi à la constitution d’une offre commerciale, à la formation commerciale des collaborateurs ainsi qu’à la gestion commerciale. Elle aborde également la question de tarification des missions d’accompagnement des entreprises en difficulté ainsi que l’analyse de la rentabilité de chaque dossier client.
Chapitre 1. Positionnement de l’offre du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté auprès des clients
Ce premier chapitre concerne les dispositions à prendre par l’expert-comptable pour la commercialisation du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté. Il aborde la constitution d’élaboration d’une offre commerciale, la construction d’un argumentaire, la conception des outils de communication, la formation commerciale des collaborateurs.
Section 1. La constitution d’une offre commerciale
L’expert-comptable doit définir les principales prestations standards commercialisées par le pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté. Ces prestations standard présentent l’avantage de montrer aux clients ce que le pôle peut faire et les résultats attendus, la possibilité de morceler les prestations selon les besoins, les attentes et le budget du client et de présenter un tarif standard approprié à chaque prestation. Dans le cadre du pôle étudié, l’offre commerciale peut inclure :
- la prestation de diagnostic (première phase) accompagnée de la proposition et de suivi de mesures d’urgence. Pour cette offre, le cabinet évalue le niveau de difficulté de l’entreprise, détermine rapidement l’origine immédiate des difficultés de trésorerie et propose des mesures rapides pour remédier aux problèmes de trésorerie (exemple : gestion par le cash). Cette prestation aurait pour objectif d’aider le dirigeant à prendre les premières décisions pour redresser sa situation et à mettre en œuvre des solutions rapides pour corriger la trésorerie.
- et/ou un diagnostic approfondi de l’ensemble de l’entreprise suivi de l’élaboration d’un plan d’affaires (ou d’un plan de redressement). Cette offre implique pour l’expert-comptable de réaliser un diagnostic intégral des fonctions de l’entreprise (approvisionnement, production, logistique, commercial, marketing, distribution,…), de déterminer leurs forces et faiblesses ; de redéfinir les axes stratégiques de l’entrepris et d’élaborer un plan de redressement en fonction des nouvelles stratégiques et mesures proposées. L’expert-comptable chiffre par ailleurs le coût de ce redressement afin de définir les besoins nécessaires en financement.
- et/ou un diagnostic sur un ou deux fonctions jugées faibles par la direction et l’expert-comptable constituant l’origine des difficultés financières de l’entreprise suivi de l’élaboration d’un plan de redressement (incluant le calendrier et le budget) et du suivi de leur bonne mise en œuvre. Au cas par exemple où l’origine des problèmes de trésorerie vient du non recouvrement de plusieurs factures, de l’absence de facturation ou de la facturation tardive des clients, l’expert-comptable évalue un diagnostic financier de l’entreprise et des procédures relatives au cycle clients/ventes. Il propose par la suite des mesures pour s’assurer que l’entreprise reçoive des bons de commande pour ses ventes, que les livraisons soient effectuées et bien retracées, que des factures sont émises avec la livraison, qu’elles soient enregistrées, qu’elles soient enregistrées dans un échéancier de clients, qu’elle procède au recouvrement des factures après la date d’échéance.
Lorsque l’offre de l’expert-comptable intègre un suivi et un accompagnement, ce dernier consiste ici à s’assurer que l’entreprise a bien mis en œuvre les recommandations de l’expert, que les impacts des mesures recommandées donnent les résultats escomptés. Au cas où ces derniers ne concordent pas avec les attentes, l’expert peut proposer rapidement des mesures correctives. Le suivi implique de :
- contrôler la bonne mise en place des procédures préconisées pour améliorer par exemple la gestion financière (procédures du cycle achat/fournisseurs, ou du cycle clients/ventes ou du cycle trésorerie) ou la gestion de la production (procédures de suivi des mises au rebut, de remplacement des consommables,…).
- contrôler l’application des mesures préconisées (par exemple, alléger la gamme de produis vendus par l’entreprise en abandonnant ceux qui génèrent une très faible marge ou sous-traiter les activités de production qui ne constituent pas le cœur de métier de l’entreprise).
- vérifier l’impact des mesures mises en œuvre au niveau des états financiers et de la situation de la trésorerie.
Les cibles du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté sont constituées par des entreprises qui connaissent des difficultés financières ou qui sont en état de cessation de paiement sans qu’elles soient en redressement ou en liquidation judiciaire.
Les clients des cabinets d’expertise comptable ont changé de comportement au cours des dix dernières années. Le dirigeant d’entreprise consultait auparavant un expert-comptable pour diverses prestations, la relation était fondée sur la confiance et la réputation du cabinet. De nos jours, un dirigeant d’entreprise s’informe, consulte plusieurs cabinets d’expertise comptable, compare les offres et négocie comme avec un fournisseur. La profession est désormais rentrée dans une logique de marché concurrentielle. Les clients sont actuellement de plus en plus demandeurs de missions de conseil avec une diminution progressive de la demande des missions comptables traditionnelles. Avec ces missions de conseil, l’expert doit désormais argumenter ses prestations et ses prix.
Le dirigeant d’une entreprise en difficulté peut émettre plusieurs objections au vu de l’offre de l’expert-comptable :
- il craint que les procédures conseillées par l’expert mènent son entreprise à la liquidation judiciaire, et perdre son entreprise constitue pour un dirigeant un échec lourd à porter psychologiquement.
- il pense qu’il peut s’en sortir sans l’appui de l’expert-comptable ou que la mission de ce dernier n’apportera pas de vraie valeur ajoutée étant donné qu’un cabinet d’expert-comptable n’est pas tenu à une obligation de résultat mais de moyen uniquement ou que cette mission est inutile puisqu’à son avis, son entreprise ne pourra pas être redressée. Il met ainsi en doute la rentabilité de la prestation.
- au vu de ses difficultés de trésorerie, l’entreprise n’a pas les moyens pour financer les honoraires de l’expert et que les fonds disponibles restants devraient servir dans les opérations d’exploitation urgentes.
- il est possible également qu’un cabinet d’expertise comptable concurrent ou un cabinet conseil lui a proposé une mission plus ou moins similaire et à un meilleur prix.
L’expert-comptable et ses collaborateurs doit connaître les possibles objections qu’un prospect peut formuler afin de développer un bon argumentaire commercial.
Objection pour manque de trésorerie
En ce qui concerne par exemple l’objection pour insuffisance de trésorerie, donc manque de financement : le cabinet ne peut pas systématiquement baisser ses prix car sa mission lui impose de fournir une prestation de qualité et il doit faire preuve de diligence dans son exécution. Un collaborateur ne peut pas réaliser un diagnostic sommaire sur quelques fonctions (sur la production par exemple en négligeant le commercial, le marketing et la logistique) et établir un plan de redressement sur la base des seules informations obtenues. Lors de sa première approche, l’expert-comptable doit essayer de connaître la situation réelle de l’entreprise en discutant et en écoutant le dirigeant. Il doit évaluer s’il est possible de la redresser compte tenu des informations obtenues. Il doit pouvoir détailler le contenu de la prestation proposée et expliquer en quoi les activités vont permettre de l’aider à redresser ses problèmes financiers. Pour la mission d’accompagnement des entreprises en difficulté, le dirigeant :
- bénéficie d’un diagnostic rapide et de recommandations sur les mesures immédiates à mettre en œuvre. L’expert-comptable peut par exemple donner un exemple de mesure à prendre (vendre les stocks en surplus) pour renflouer rapidement la trésorerie de l’entreprise. Un dirigeant a besoin d’être rassuré sur la capacité de l’expert à lui apporter des solutions.
- bénéficie par la suite d’un diagnostic plus approfondi sur l’ensemble des fonctions et des opérations de l’entreprise, et d’un plan de redressement. L’expert peut montrer des exemples de diagnostic et de plan pour que le dirigeant puisse les juxtaposer par rapport à sa situation et visualiser les livrables à obtenir.
Il faut par ailleurs que l’expert-comptable explique le détail des activités à réaliser avec un langage clair et compréhensible par le dirigeant. Une fois que le dirigeant est accroché par la prestation offerte, l’expert-comptable peut lui proposer des pistes pour réduire le prix sans remettre en cause la qualité de la mission.
Objection portant sur la rentabilité de la mission
Un dirigeant d’entreprise peut rejeter l’offre de mission pour la simple raison qu’il considère que c’est inutile. L’expert-comptable doit démontrer que sa mission lui permettra de gérer et de sortir de la crise de manière efficiente. Il doit au préalable s’assurer lors de la discussion que l’entreprise n’est pas en état de cessation de paiement sévère et qu’il a de fortes chances d’être redressée. Pour argumenter, l’expert peut se baser sur des vécus et des « success stories » d’entreprises en difficulté pour lever l’objection du dirigeant. Il peut relater les difficultés de ces dernières, le niveau de difficulté, les mesures qui ont été obtenues ainsi que les résultats. Le dirigeant dispose ainsi d’une base de références qu’il peut contacter. De même que pour l’objection sur le prix, l’expert devra également expliquer la teneur et le contenu de la mission, les livrables ainsi que les possibles impacts pour l’entreprise. Il doit ainsi soigneusement préparer sa présentation de la mission et veiller à ce que le dirigeant puisse identifier ses propres problématiques, ses propres vécus et craintes dans la présentation et les argumentations du cabinet.
Objection portant sur une meilleure offre de la concurrence
Le cabinet ne peut pas échapper à la concurrence d’autres cabinets comptables ou d’autres cabinets conseils. La principale difficulté est que les cabinets n’adoptent pas la même approche pour fixer leurs prix. Certains experts-comptables se basent sur une comptabilité analytique (suivi des temps, imputation des charges fixes), d’autres ont recours à des pratiques plus empiriques. Il est ainsi difficile d’expliquer à un client pourquoi son concurrent propose une prestation 10% ou 30% moins cher. La démarche ici consiste pour le cabinet à bien connaître ses concurrents pour ne pas être déstabilisé face aux remarques du client, de soigner sa présentation, de bien accrocher avec le dirigeant, d’expliquer en détail le contenu de la missions et sa manière de travailler avec un client.
L’expert-comptable et ses collaborateurs doivent ainsi veiller à démontrer dans son argumentaire commercial que :
- les prestations commercialisées par le pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté répondent aux attentes et aux besoins réels des dirigeants.
- les prestations apportent des réponses et des résultats aux problématiques des dirigeants.
Il doit également rassurer et expliquer de manière pédagogique au dirigeant les procédures existantes pour traiter les entreprises en difficulté et leurs conséquences afin de lever leur blocage psychologique. Il doit également argumenter à partir de vécus réels d’entreprises en difficulté et pour lesquels il a formulé des propositions de redressement pour expliquer les démarches entreprises, les résultats obtenus, la confirmation de la sortie de crise.
L’expert-comptable, les chefs de mission et les collaborateurs du cabinet prospectent des clients : ils doivent ainsi disposer à la fois d’une compétence commerciale et d’une compétence technique. Certains d’entre eux ont du mal à vendre des missions et à aller chercher des clients : ils se contentent d’attendre que les dirigeants des entreprises les contactent. Ils n’ont aucune idée de la vente alors qu’ils sont chargés de vendre des prestations durant l’année. Certains collaborateurs sont mal à l’aise à l’idée de commercialiser de nouvelles prestations ou des prestations additionnelles. Ce décalage vient du fait que les chefs de missions et les collaborateurs ont plus une vocation de technicien que de commercial alors qu’ils sont les mieux positionnés en raison de leur relation de proximité avec les clients.
Pour pouvoir positionner ses produits de manière efficace, l’expert-comptable et les collaborateurs doivent être formés sur les techniques de vente. Les modules de formation peuvent inclure entre autres :
- les techniques d’approche: ce module a pour objectif d’aider les formés à acquérir les bases des techniques de vente, de maîtriser les fondamentaux des rendez-vous, de perfectionner leurs méthodes de vente. Le contenu de la formation inclut les avantages d’un rendez-vous, les étapes clés pour bien vendre, les outils de communication à utiliser, les techniques de vente. Le collaborateur apprendra à gérer un rendez-vous difficile, à connaître les stratégies des prospects, à définir une stratégie commerciale individuelle, à adopter une attitude commerciale, à améliorer sa capacité de vente.
Il est par exemple recommandé que le premier rendez-vous entre l’expert-comptable et le dirigeant se fasse dans les locaux de l’entreprise. Le déplacement de l’expert et ou de ses collaborateurs constitue un signe fort de leur intérêt. Dans son entreprise, le dirigeant pourra plus facilement parler de ses difficultés, montrer le fonctionnement de sa société, monter les éléments chiffrés disponibles. Le collaborateur peut avoir une première idée sur l’organisation de l’entreprise, sur la complexité de son secteur d’activité, sur les centres de coûts existants, … Ce premier rendez-vous facilite la deuxième rencontre puisque le collaborateur pourra déjà s’informer sur le secteur et préparer des éléments adaptés à la situation réelle de l’entreprise. Cette approche permet également de se différencier des autres cabinets concurrents qui peuvent opter pour une première rencontre dans leurs locaux afin d’économiser sur les coûts de déplacement et afin de gagner du temps.
Les prospections commerciales pouvant se faire également par téléphone, les collaborateurs doivent être formés sur la prospection téléphonique, ses étapes et ses techniques ; la détection des besoins et des attentes des prospects au téléphone, le traitement des objections, l’organisation des séances d’appel, l’attitude à adopter au téléphone.
- les techniques de présentation du cabinet et de l’offre commerciale: Envoyer un devis par email au prospect sans avoir pris la peine d’expliquer la teneur des travaux n’est pas avantageux pour le cabinet. En effet, face à un devis, le dirigeant aura comme réflexe de regarder directement le montant du devis et pourra facilement y objecter. L’expert-comptable devra ainsi prendre du temps pour expliquer le détail du contenu de la mission, le mode de fixation du prix, le fonctionnement du cabinet, les outils de travail afférents à la mission proposée. Cette approche a le mérite d’instaurer un climat de confiance entre le collaborateur et le dirigeant. Le collaborateur doit également savoir comment présenter le cabinet d’une manière claire, rapide et bien structurée. Une présentation ennuyante constitue un mauvais départ pour l’expert.
- les techniques pour répondre aux objections des prospects: le collaborateur doit apprendre comment déceler la personnalité d’un dirigeant, comment attirer son attention, comment répondre de manière intelligente à ses objections. A l’issu de la formation, le collaborateur sera capable de connaître les différents types d’objections, de comprendre les besoins exprimés derrière les objections, de sentir le changement de perception d’un client (dynamisme, scepticisme, déception), de maîtriser les techniques de réponse aux objections, de savoir utiliser les outils de communication adéquats, de constituer une liste des objections possibles avec les réponses correspondantes, de se différencier des concurrents, de détecter le niveau de pollution de l’objection.
- les techniques de négociation: compte tenu de ses difficultés financière, le dirigeant d’une entreprise voudra négocier le prix des prestations soumis par le cabinet d’expertise-comptable. L’expert-comptable doit être capable de défendre sa marge et de satisfaire également son futur client en adoptant une approche gagnant-gagnant. Il peut par exemple accepter une baisse de prix sous réserve que le client se charge d’une tâche complémentaire définie entre les deux parties. III Bien v
- les techniques relationnelles: le collaborateur doit avoir un bon sens de l’écoute et savoir écouter son client. Il doit laisser parler son client pendant 80% du temps de la réunion afin de connaître les intérêts, les besoins et les attentes de ce dernier. Les réunions doivent cependant être cadrées en utilisant des questionnaires structurés pour s’assurer d’obtenir les éléments nécessaires à la bonne réalisation de la mission. Une bonne écoute combinée avec une bonne structuration des réunions permet de fournir une approche personnalisée au client. Ces techniques permettent d’apprendre comment être à l’aise avec tous les clients ou comment gérer un client difficile.
Les cabinets qui proposent des formations commerciales pour les experts-comptables et les collaborateurs, réalisent habituellement une analyse des compétences du personnel ainsi qu’une analyse de l’organisation commerciale du cabinet avant de commencer la formation proprement dite. Durant la période de formation, certains formateurs accompagnent également l’expert et ses collaborateurs sur la mise en application des principes acquis.
Section 2. La commercialisation du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté
La profession d’expertise comptable peut désormais recourir à la publicité depuis 2004 et réaliser des démarchages depuis 2011. Elle fait face à un problème de concurrence de plus en plus croissant. Le cabinet doit ainsi se doter d’outils de communication comme une véritable entreprise commerciale pour assurer son développement. Ci-dessous quelques exemples de supports à développer par l’expert-comptable :
- création d’un site internet ou valorisation du nouveau pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté dans le site internet existant du cabinet : pour que son outil soit efficace, l’expert doit s’assurer d’avoir un site attractif, ergonomique et bien référencé. Il doit pouvoir connaître le nombre de visiteurs sur son site.
- création de contenu pour le site web : technologie oblige, l’expert-comptable doit également surfer sur la communication web 2.0. Le site web doit être valorisé par des contenus mis à jour fréquemment. Un contenu intéressant permet de capter l’attention d’un prospect. Ces contenus concernent par exemple des articles sur plusieurs thématiques ayant attrait à la comptabilité et à la gestion de l’entreprise, des vidéos, des newsletters ou des livres blancs… Pour valoriser la mission du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté, l’expert peut animer son site avec des articles portant sur la thématique des entreprises en difficulté. Les thèmes peuvent par exemple concerner une explication sur la procédure du mandat ad hoc, sur les mesures simples pour redresser une mauvaise trésorerie,… L’expert peut également insérer des témoignages de clients satisfaits dans son site web, les témoignages d’autrui facilitent un peu plus la confiance d’un éventuel client dans la qualité de prestation d’un cabinet. Ce changement fréquent de contenu permet par ailleurs de bien référencer le site web.
- animation d’une campagne de communication sur les réseaux sociaux (facebook, twitter,…). Elle permet de présenter le cabinet, de constituer une communauté de clients sur les réseaux sociaux, de partager de nouvelles informations comme la création ou la valorisation du nouveau pôle, de fidéliser les clients. Les internautes peuvent par ailleurs s’échanger des informations, leur satisfaction. Cet outil de communication permet d’améliorer ou de renforcer l’image et la notoriété du cabinet d’expertise comptable. Il permet également au cabinet d’avoir de nouveaux clients sachant que le bouche à oreille positif et les recommandations des anciens ou des clients en cours constituent des sources importantes de clientèle. L’expert-comptable doit cependant surveiller l’e-réputation de son cabinet.
- supports visuels permettant de présenter le cabinet d’expertise-comptable et ses pôles. Ils peuvent contenir une présentation générale du cabinet ou se focaliser sur le pôle d’accompagnement. Ces supports peuvent inclure une identité visuelle, une brochure, une plaquette de présentation en version papier ou en version numérique, une fiche mission, des diaporamas de présentation…
Il est recommandé à l’expert-comptable d’inclure dans ses outils de communication des paragraphes qui mentionnent :
- les missions du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté dans un langage clair et compréhensible par les dirigeants : ce paragraphe a pour objectif de mettre en exergue ce que le pôle peut faire pour l’entreprise.
- des réponses aux objections possibles des clients potentiels : ce paragraphe permet déjà de fournir au prospect des réponses à ses objections dès la lecture des supports. L’objectif est d’inciter le prospect à contacter le cabinet même si des doutes subsistent encore chez ces derniers.
- des témoignages de clients qui sont satisfaits des services fournis par l’expert-comptable. Les extraits à publier doivent préciser en quoi l’expert-comptable a aidé le dirigeant de l’entreprise et les résultats concrets obtenus.
Les brochures, plaquettes de présentation et autres documents visuels présentant le pôle doivent contenir des informations concises telles que précisées ci-dessus. Ils ne doivent cependant pas être surchargés d’information,
La recherche des prospects pour le pôle doit être organisée. L’expert-comptable dispose de plusieurs moyens pour trouver des entreprises en difficulté financière :
- les chambres de commerce et de l’industrie qui peuvent avoir été approchées par des dirigeants d’entreprises.
- les intermédiaires spécialisés comme les avocats ou les commissaires aux comptes.
- le réseau relationnel de l’expert-comptable : famille, amis, proches, clients, associés,… Le bouche à oreille constitue un véhicule de communication pour bénéficier d’une nouvelle clientèle.
- les banques commerciales locales peuvent également constituer une source d’information non négligeable.
- les groupements professionnels qui peuvent communiquer des informations sur la mission du cabinet auprès de leurs membres.
- les collectivités locales ou les conseils généraux qui peuvent connaître des entreprises pour lesquelles leurs dirigeants envisagent une cession.
- la souscription auprès d’une plateforme professionnelle de mise en relation entre fournisseurs et acheteurs comme Recherche Expert Comptable ou Companeo. Ces plateformes capent les contacts des entreprises qui recherchent des experts-comptables par le biais de leurs sites web qui bénéficient d’un bon référencement. Elles mettent alors les entreprises en relation avec un nombre limité d’experts-comptables qui peuvent acheter les contacts correspondants à leurs cibles. Le cabinet intéressé peut ainsi contacter l’entreprise pour lui faire une offre. Cette technique permet de gagner du temps en termes de prospection : l’expert-comptable et ses collaborateurs se concentrent plutôt sur la manière de convertir le prospect en client. Le principal inconvénient est que plusieurs cabinets peuvent acheter le contact d’un client et le contacter. Ce dernier ne manquera pas alors de comparer les offres de service mais surtout les honoraires des cabinets. Cette technique est adaptée aux cabinets qui privilégient une stratégie de pénétration du marché par les prix. Un cabinet avec un pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté pourrait néanmoins recourir à ces plateformes puisqu’en tant que pôle, il arrive à minimiser ses coûts généraux et pourrait proposer des prix intéressants. Le prospect devra être obligatoirement sensibilisé sur l’importance des services de conseil et que la seule prise en compte du prix n’est pas judicieuse.
- L’e-mailing constitue toujours un moyen efficace pour trouver des entreprises en difficulté. Il présente l’avantage de pouvoir atteindre un grand nombre d’entreprises, de pouvoir rappeler à la mémoire des dirigeants l’existence du cabinet. A la date du premier envoi d’un e-mailing, une entreprise peut ne pas avoir encore été en situation de difficulté financière. A la date d’un second envoi, la même entreprise peut se trouver en plein désarroi financier. Cette technique ne génère quasiment aucun coût pour le cabinet. La rédaction du contenu de l’e-mailing doit faire l’objet d’une grande attention : il doit être agréable à lire en termes de forme, il doit attirer l’attention du lecteur sur le fait qu’une entreprise peut être soumise à des difficultés financières tout au long de son existence. Il doit mettre en exergue les offres de service du cabinet ainsi que son avantage comparatif. Il est recommandé de réaliser un test sur un échantillon afin de vérifier l’efficacité du contenu de l’e-mailing en vérifiant le taux d’ouverture des emails et le nombre de visites sur le site web du cabinet ou le nombre d’appels après les envois.
- La prospection téléphonique s’effectue également sur la base d’une liste de prospects préalablement préparée (contacts de prospects identifiés ou achetés). L’entretien téléphonique doit soigneusement être préparé: définition de l’objectif, construction d’un argumentaire bien structuré, préparation des documents nécessaires, disposition d’un environnement calme pour effectuer les appels.
- un cabinet doit par ailleurs veiller à favoriser un bouche à oreille positif pour se faire connaître et pour être recommandé par ses clients. Les conditions d’un bouche à oreille incluent la satisfaction du client sur les missions rendues par le cabinet; la réponse du cabinet aux attentes du client; le maintien d’une bonne relation avec le client (newsletter, réseaux sociaux,…). Le cabinet peut recourir aux outils qui collectent les avis des clients sur les services des prestataires ou les produits des fournisseurs (exemple Opinion System). Etant certifiés, ces outils sont crédibles pour les internautes. Un cabinet satisfait peut par ailleurs demander à son client de le recommander auprès de ses relations d’affaires.
Des objectifs doivent être assignés aux commerciaux afin de bien cadrer leurs activités et de permettre une évaluation basée sur des indicateurs précis. Les objectifs commerciaux doivent être fixés en fonction de la stratégie de l’entreprise, ils sont associés à un calendrier et à un budget défini. En effet, pour pouvoir commercialiser les missions du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté,
L’expert-comptable doit prévoir le chiffre d’affaires de l’année à venir et arrive ainsi à définir les objectifs commerciaux à atteindre. Ils sont par la suite communiqués et expliquées aux collaborateurs concernés.
L’expert-comptable fixe ainsi des objectifs de marché incluant le chiffre d’affaires et la marge. Il est essentiel de vérifier la marge car une mission peut venir augmenter le montant du chiffre d’affaire bien qu’elle ait été vendue à perte. Ce type d’objectif peut également inclure le taux de recouvrement des créances par le commercial.
Les objectifs assignés peuvent être à la fois individuels (collaborateurs) et globaux (pour l’ensemble du pôle). Il est ainsi possible de fixer un objectif de rentabilité pour le pôle: l’ensemble des collaborateurs fournira alors des efforts pour optimiser leur budget, pour maîtriser les coûts rattachés au pôle et pour augmenter leurs chiffres d’affaire. L’expert peut également fixer des objectifs de méthode: ils se réfèrent au respect des procédures de travail standardisées, à la qualité des documents livrés aux clients.
Les objectifs individuels permettent aux collaborateurs de se surpasser, de faire preuve d’imagination et de créativité pour trouver de nouvelles approches. Les objectifs collectifs permettent d’instaurent une cohésion et un esprit d’équipe au sein du pôle.
La fixation des objectifs constitue un exercice qui permet à l’expert-comptable de:
– exprimer sa vision de son cabinet,
– convertir les axes stratégiques en actions,
– faire participer les collaborateurs au développement du cabinet,
– programmer ses budgets en cohérence avec sa stratégie et ses objectifs,
– superviser et évaluer les collaborateurs.
Les objectifs doivent être simples, faciles à comprendre et à calculer, faciles à évaluer et à vérifier. Ces indicateurs incluent pour le cas du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté :
- le nombre de prospects contactés par un collaborateur,
- le nombre de prospects convertis en clients,
- le chiffre d’affaires réalisé par collaborateur,
- le taux de satisfaction des clients par collaborateur,
- le taux de recouvrement par collaborateur.
Chapitre 2. Suivi de la performance du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté
Ce second chapitre concerne la tarification des missions du pôle ainsi que le suivi de leur rentabilité nécessaire pour assurer le développement du cabinet d’expertise comptable. L’expert-comptable doit pouvoir maîtriser ses coûts et assurer une marge correcte.
Section 1. La tarification des missions du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté
Une bonne politique de prix constitue un élément essentiel pour le développement et la pérennité du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté. Les honoraires doivent permettre au pôle (a) de couvrir l’ensemble de ses charges et de dégager un bénéfice, et de (b) réaliser sa mission avec les diligences requis et à fournir une prestation de qualité. Ils doivent cependant être raisonnables, équitables pour le client.
L’expert-comptable doit impérativement définir au préalable le contenu de la mission qui constitue la contrepartie des honoraires à payer par le client. Les résultats financiers (bénéfices, pertes) dégagés par le client après l’intervention de l’expert ne peuvent pas constituer un facteur de rémunération de l’expert.
Le cabinet doit définir une politique de prix pour le pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté :
- un prix d’appel : l’expert-comptable peut choisir d’appliquer un prix d’appel surtou lors de lancement et de la promotion de la mission. Ce prix se conforme à une stratégie marketing : le prix d’appel correspond à une prestation bien précise. Le client doit payer un surplus pour les autres prestations. Dans le cas du pôle par exemple, le diagnostic rapide de l’entreprise ainsi que l’appui du client dans la mise en place des procédures de mandat ad hoc, de conciliation peut constituer le produit d’appel. Le client doit payer un surplus pour chaque prestation additionnelle telle que la proposition de mesures d’urgence, le diagnostic approfondi, l’élaboration du plan de sortie de crise. Cette politique de prix n’est pas toujours appréciée par le client qui peut y voir une méthode pour lui soustraire plus d’argent même s’il a été avisé dès le départ.
- un prix tout compris : il consiste à proposer un prix forfaitaire pour un ensemble complet de prestations. Il présente l’avantage de ne pas devoir argumenter chaque fois avec le client, d’assurer la continuité du travail fourni. Son principal inconvénient est que pour une même mission, le temps de travail fourni peut être différent selon le niveau de difficulté de l’entreprise, la taille de l’entreprise, la l’organisation de cette dernières (existence de contrôle interne ou pas, existence d’outils de gestion ou pas) ou la complexité du secteur d’activité. Le cabinet ne réalise pas les mêmes marges sur tous ses clients.
- un prix ajusté qui se détermine de manière aléatoire selon la tête du client. L’expert-comptable fixe un prix selon son jugement de la capacité de l’entreprise à payer ou selon la forte volonté et le souhait du dirigeant de sortir de ses difficultés financières ou selon le fait que ce dernier panique et est incompétent, l’expert veut en profiter pour taxer son prix. Cette politique peut causer des dommages à moyen terme sur le cabinet.
- l’application du prix juste : elle constitue la meilleure politique tarifaire à appliquer au sein du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté. La prestation est divisée en multitudes de tâches auxquelles correspondent des temps de travail et des coûts. Elle permet de tenir compte des tâches qui sont confiées au client et qui ne sont donc pas facturées. Elle permet de prendre en considération les tâches qui vont s’avérer complexes compte tenu de l’envergure et du fonctionnement de l’entreprise (les diagnostics approfondis peuvent par exemple prendre plus de temps pour une entreprise manufacturière). Les remises fournies au client pourront être également soigneusement étudiées afin de s’assurer de ne pas grever les profits de l’entreprise.
Il est recommandé aux experts-comptables d’adopter une méthode formalisée pour déterminer le prix de vente des missions fournies par le pôle. Ils ne peuvent pas en effet estimer de manière empirique leurs coûts de revient sur la base de leur expérience au risque de demander des prix non cohérents pour deux différentes missions. Un client du cabinet paie un certain montant pour la mission de tenue comptable et de présentation des comptes annuels. Il a également fait appel au cabinet pour assurer une mission sociale (établissement des fiches de paie, déclarations sociales, etc…). Il contacte par la suite le cabinet pour l’aider à gérer et à sortir d’une crise financière assez sévère. Le dirigeant du cabinet ne constate aucune cohérence dans les prix totaux demandés par le cabinet, dans les volumes horaires et dans les coûts horaires. Ce constat peut remettre en cause le sérieux et le professionnalisme du cabinet. Le dirigeant peut percevoir cette incohérence comme le fait de vouloir aggraver son malheur alors qu’un expert-comptable est supposé l’accompagner dans l’amélioration de sa gestion et dans le développement de son entreprise. Ce cas démontre par ailleurs que l’expert-comptable doit étudier les prix à accorder pour les clients déjà fidèles.
Il arrive également que deux associés demandent deux prix différents pour une même prestation et pour un client présentant une situation similaire. La politique tarifaire doit être déterminée d’un commun accord entre les associés dans un cabinet, elle doit par la suite être unanimement appliquée et contrôlée.
Les remises accordées au client doivent également être formalisées, justifiées et être cohérentes par rapport aux pratiques habituelles du cabinet. Elles doivent être utilisées dans des contextes bien précis tels que :
- la facturation initiale d’un montant élevé permettant de dégager une marge élevée,
- la demande est effectuée par un client stratégique (le plus gros client du cabinet) ou un client fidèle (l’expert connaît très bien l’entreprise et peut donc réduire les temps de travail sur la partie diagnostic par exemple) ou un client à forte potentialité.
Le temps de travail d’un collaborateur sur un dossier client constitue la principale unité d’œuvre du prix de vente d’une prestation de l’expert-comptable. Les frais de structure, le coût des formations, les fournitures sont par la suite ajoutés au coût de revient. Pour définir son prix de vente, l’expert-comptable doit procéder aux étapes ci-après :
- Définir les collaborateurs qui interviennent directement sur une mission ainsi que les personnes qui contribuent de manière indirecte à la réalisation de la mission (celles qui sont chargées des tâches administratives). Une catégorie de collaborateurs est déterminée afin de simplifier le calcul et un taux horaire est défini pour chaque type de catégorie. Cette catégorisation permet d’établir un devis en fonction des opérations ou des tâches, et de ne pas facturer selon les rémunérations qui peuvent changer d’un collaborateur à un autre. Les catégories de collaborateurs intervenant sur la mission du pôle d’accompagnement peuvent inclure:
- Les chefs de missions qui vont superviser les travaux et se charge des diagnostics des outils de gestion utilisés par l’entreprise par exemple et de la formulation des mesures de recommandations.
- Les collaborateurs comptables qui se chargent de faire les diagnostics sommaires incluant ceux des états financiers, l’appui de l’entreprise pour recourir aux procédures.
- Les spécialistes en marketing qui vont se charger de l’audit marketing et commercial.
- Les spécialistes en organisation qui vont se charger de l’audit organisationnel.
Un spécialiste en marketing peut coûter plus cher qu’un collaborateur comptable. L’expert doit assigner une tâche à la personne disposant des compétences et de l’expérience nécessaires et non à une personne surqualifiée sous risque de payer plus cher la prestation
- Lister les différentes tâches à réaliser pour chaque catégorie de prestation et déterminer le temps de travail à passer par les collaborateurs sur chacun des tâches. Les heures de travail nécessaires doivent être déclinées en tenant compte de plusieurs paramètres :
- Le niveau de difficulté de l’entreprise.
- La taille de l’entreprise (le temps nécessaire pour réaliser un diagnostic et établir un plan d’affaire pour une PME est moindre par rapport à une grande entreprise).
- La complexité de l’activité de l’entreprise (le temps nécessaire pour réaliser un diagnostic approfondi dans une entreprise de service es moindre par rapport à une entreprise de transformation par exemple).
L’expert-comptable doit tenir compte de la complexité du dossier lors de l’établissement de son devis.
- L’expert-comptable détermine le taux horaire de vente à appliquer (suivant la catégorie de collaborateurs concernés) pour chaque tâche. Il doit par ailleurs décider s’il va facturer la tâche au taux horaire ou au forfait. Pour la mission d’accompagnement des entreprises en difficulté, l’expert peut par exemple fixer un forfait pour le premier diagnostic, le choix de la procédure à appliquer ainsi que la formulation des premières mesures d’urgence. Le pôle facture par la suite au temps le diagnostic approfondi et l’élaboration d’un plan de redressement dans le cadre de la sortie de la crise.
Section 2. La rentabilisation du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté
L’expert-comptable doit suivre la performance commerciale du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté. Il doit contrôler la performance commerciale de chaque collaborateur ou de chaque commercial ainsi que la performance commerciale de l’ensemble des collaborateurs/commerciaux.
Il doit à cet effet maintenir un tableau de bord commercial qui inclut plusieurs indicateurs permettant de piloter son activité commerciale:
- les objectifs en termes de nombre de clients et de chiffres d’affaires,
- le nombre de clients prospectés par commercial et pour le pôle,
- le nombre de prospects qui ont établi des échanges avec le pôle,
- le nombre de prospects qui présentent de fortes de chances de conversion (cet indicateur permet de définir le chiffre d’affaire prévisionnel du pôle)
- le nombre de devis envoyés,
- le nombre de devis convertis en lettres de mission,
- le taux de conversion des prospections en missions,
- le chiffre d’affaire par commercial, par région,
- le montant moyen des missions,
- le % des collaborateurs qui ont atteint leurs objectifs commerciaux.
L’expert-comptable doit réaliser un suivi régulier de son tableau de bord commercial afin de connaître sa situation en temps réel : capacité de production du pôle remplie à 100% ou plus, insuffisance des missions d’où un risque de manque à gagner et de perte d’exploitation pour le pôle. Ce suivi devrait permettre à l’expert de :
- évaluer régulièrement la performance de son équipe commerciale.
- changer la stratégie commerciale du pôle en fonction des résultats obtenus (mode de prospection, outils de communication, approche des prospects…).
- renforcer les activités de promotion et de communication.
- former les commerciaux et les collaborateurs sur les techniques de vente et les techniques de négociation.
- licencier et recruter de nouveaux commerciaux.
Le suivi de la performance commerciale implique également pour le cabinet d’expertise-comptable de connaître le niveau de satisfaction des clients sur les missions fournies. Il pourrait ainsi mettre en place un questionnaire de satisfaction à remplir par les clients afin d’évaluer la satisfaction des clients sur :
- la compréhension des attentes et des besoins des clients.
- le temps mis par les collaborateurs pour répondre aux requêtes des clients.
- le temps de réactivité du cabinet.
- la clarté des mesures préconisées et des actions prises.
- l’information en temps réel des clients sur la situation de leur dossier.
- l’efficacité des mesures préconisées.
- le taux de succès du cabinet dans le redressement d’entreprises.
- le taux de retrait de dossier par les clients ou le taux de remise en cause professionnelle.
Les commentaires reçus des clients peuvent inclure : un délai de réponse relativement long pour les demandes envoyées par email, ou un collaborateur difficilement joignable au téléphone, ou des mesures préconisées non comprises par le client. La connaissance de la satisfaction des clients permet au pôle d’améliorer de manière continue la qualité de la mission et de prendre les mesures nécessaires que ce soit en termes d’organisation interne, de communication avec les clients ou de communication interne également.
Un format de tableau de bord commercial peut être attaché en annexe
L’expert-comptable doit par ailleurs maintenir un état de suivi des missions en cours qui inclut le nom du client, une description de la mission en cours, le montant de la commande, le calendrier de la mission (date de début, date de la fin de mission), le niveau d’exécution de la mission par rapport au calendrier, les problématiques rencontrés, la résolution des problèmes, les dates de facturation. Un bon suivi commercial implique également de suivre le recouvrement des créances facturées.
Le suivi des avancements des dossiers clients permet à l’expert-comptable de s’assurer que : (1) les collaborateurs n’ont pas pris du retard dans leur traitement et que les dates butoir pour les différentes démarches ont été respectées ; (2) tous les dossiers sont bien pris en charge surtout lorsque l’équipe est débordée. Il lui permet également de connaître les difficultés ou les contraintes rencontrées par les collaborateurs et d’échanger sur les alternatives possibles. L’expert pourra par ailleurs connaître si des missions pourront être réalisées plus vite que prévu ou non.
Des réunions doivent être organisées par l’expert-comptable avec les collaborateurs pour discuter de l’avancement des projets. Les collaborateurs pourront ainsi connaître la situation de chaque dossier et se partager les bonnes pratiques. L’expert attentionné pourrait également connaître les points forts et les points faibles des collaborateurs d’un point de vue technique et en termes d’organisation. Il peut ainsi prendre des dispositions pour remédier à leurs points faibles.
Les missions des experts-comptables sont des prestations intellectuelles et leur coût de revient est principalement constitué par les coûts horaires des collaborateurs. En effet, les charges d’un cabinet sont composées de charges fixes avec une forte proportion de la masse salariale. Pour assurer sa rentabilité, l’expert doit effectuer un suivi étroit du temps de son personnel : il doit connaître sur quels clients, sur quels projets et sur quelles activités les collaborateurs travaillent. Le suivi des temps devrait permettre de :
- connaître le planning d’activité de chaque collaborateur.
- définir le temps de travail pour chaque type d’activité et chaque projet/client et ainsi d’identifier les activités rentables de celles qui ne le sont pas. L’expert-comptable peut par exemple définir combien de temps un collaborateur a mis pour établir un diagnostic sommaire, pour définir un plan d’action d’urgence, pour réaliser un diagnostic approfondi (par domaine) et pour établir un plan de redressement.
- déterminer le coût de la mission d’un client et de contrôler l’adéquation du montant facturé avec le coût réel,
- contrôler la productivité de chaque collaborateur. L’expert peut ainsi savoir quelle activité prend le plus de temps et analyser les raisons pour lesquelles une mission ou une activité ont pris anormalement beaucoup du temps.
- constituer une base de données objective pour gérer les collaborateurs et pour pouvoir établir un dialogue sur des données réelles. L’expert peut ainsi dire et prouver à un collaborateur que sa productivité est largement en dessous de ce qui a été fixé, et de ce que les autres collaborateurs réalisent. Ces données permettent par ailleurs d’améliorer la constitution des devis et la fixation des objectifs commerciaux. Cette base de données est également utile pour déterminer les primes à payer aux collaborateurs, pour justifier les promotions…
- renégocier le budget avec le client sur la base de temps réel,
L’évaluation de la productivité d’un collaborateur doit toujours être associée à l’évaluation de la qualité de la mission fournie (livraison dans les délais, efficacité des mesures préconisées, satisfaction du client). En effet, l’évaluation de la seule productivité n’est pas suffisante puisque comme c’est le collaborateur qui remplit la fiche temps, il peut lisser et répartir ses heures de travail entre ses clients, ses missions et les activités réalisées, surtout s’il sait qu’il sera évalué en fonction des objectifs qui lui ont été assignés.
Un exemple de tableau de suivi des temps est fourni en annexe.
La majorité des dirigeants d’entreprises sont fortement focalisés sur l’augmentation de leurs chiffres d’affaires. Ce comportement s’explique par :
- la valorisation qu’un dirigeant ressent à voir son chiffre d’affaire augmenter d’une année à l’autre,
- l’importance accordée par les partenaires financiers (les banques) à la hausse du chiffre d’affaires qui constitue pour eux, un signe de la croissance de l’entreprise.
La rentabilité constitue un élément vital pour le développement et la pérennité d’un cabinet d’expertise comptable. Or, baser l’analyse de la rentabilité sur la base du chiffre d’affaires peut tromper le dirigeant de toute entreprise. En effet, les ventes peuvent augmenter, les bénéfices peuvent cependant ne pas être au rendez-vous. L’expert-comptable doit ainsi :
- vérifier la rentabilité de chacun des dossiers traités au niveau du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté en prenant en considération le volume horaire et les coûts horaires passés par les collaborateurs sur le dossier ainsi que les autres charges indirectes qui peuvent y être imputées (coût des fonctions support, fournitures de bureau, communication, …). L’expert doit par la suite comparer la marge réalisée sur chaque dossier avec la marge prévue et expliquer les écarts. Cette démarche permettra à l’expert-comptable et aux collaborateurs de prendre des mesures correctives pour les prochaines missions : augmentation des taux horaires, augmentation des frais généraux,…
- segmenter ses clients par catégorie (taille des entreprises, secteur d’activité, niveau de difficulté, type d’entreprises) et déterminer à partir de l’analyse de rentabilité quel segment représente le plus de valeur ajoutée pour le cabinet.
- identifier les évènements qui sont survenus ou les facteurs qui peuvent impacter de manière négative sur sa rentabilité à savoir :
- la défaillance d’un collaborateur à mener à bien un dossier,
- le dérapage d’un collaborateur (erreur, oubli, remise en cause professionnelle,…),
- le turnover fréquent de collaborateurs sur un même dossier,
- la faible organisation des collaborateurs (engendrant des pertes de temps, soit un volume horaire élevé pour traiter un dossier).
Des mesures correctives doivent être prises pour corriger ces facteurs qui ont un impact direct sur la rentabilité de l’entreprise.
- séparer les coûts du cabinet en dépenses stratégiques et non stratégiques. Les dépenses stratégiques visent à capter de nouveaux clients et incluent les dépenses commerciales, les dépenses de publicité et de communication, les dépenses pour le système d’information, les dépenses de production. Les dépenses non stratégiques sont constituées par les dépenses qui n’ont pas un lien direct dans l’augmentation du portefeuille client du cabinet. L’expert-comptable doit identifier les moyens nécessaires pour réduire les dépenses stratégiques. Les mesures peuvent inclure de :
- rattacher les primes et les récompenses des collaborateurs/commerciaux et des employés à l’atteinte des objectifs de performance assignés par l’expert-comptable. Cette technique permet d’inciter les collaborateurs non performants à quitter le cabinet sans heurt et de recruter de nouveaux collaborateurs/commerciaux.
- justifier systématiquement les dépenses du pôle et du cabinet. L’expert en charge de l’approbation doit ainsi vérifier s’il perd des chiffres d’affaires ou si ses marges sont impactées s’il ne les autorisait pas. Il doit trouver des moyens pour réduire les charges externes du cabinet qui représentent environ 40% des charges totales. Le responsable des achats pourrait par exemple recourir dorénavant à des appels d’offres pour les achats significatifs ; négocier les prix et les conditions de paiement; imposer des réductions de prix aux fournisseurs ; se renseigner sur les prix obtenus par les clients ; ne valider les achats des matériels de bureau ou matériels informatiques que s’ils correspondent à des besoins réels et s’ils permettent d’améliorer la productivité du pôle ;
- établir un budget serré pour que les responsables du cabinet puissent trouver des solutions créatives afin de respecter le budget fixé.
- vérifier les petites dépenses. Il doit contrôler les notes de frais, les coûts de communication, les coûts des fournitures et des consommables, les coûts de l’électricité.
L’expert-comptable doit également analyser :
- la rentabilité du pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté par rapport aux autres pôles (s’il existe d’autres pôles dédiés à d’autres missions) du cabinet.
- la contribution du pôle par rapport à la rentabilité de l’ensemble du cabinet afin de connaître si le pôle fournit une mission de forte valeur ajoutée ou au contraire, s’il est peu rentable.
La rentabilité passe ainsi par l’augmentation du portefeuille des clients du cabinet, un taux de marge moyen acceptable, ainsi que par une maîtrise des coûts. En réalisant un suivi de sa rentabilité, l’expert comptable connaît la situation du pôle et peut prendre des mesures en temps réel pour améliorer sa rentabilité.
Pour rappel, ce mémoire porte sur la définition des démarches à entreprendre par un cabinet d’expertise comptable pour mettre en place un pôle d’accompagnement des PME en difficulté en son sein.
Le pôle d’accompagnement des entreprises en difficulté propose les missions ci-après aux dirigeants des entreprises connaissant des difficultés financières :
- un diagnostic rapide financier et opérationnel de l’entreprise,
- une proposition de mesures d’urgence pour les problèmes de trésorerie,
- un diagnostic approfondi financier et opérationnel de l’entreprise,
- un accompagnement de l’entreprise en difficulté qui comprend les activités ci-après :
- une revue des plans d’affaires et des projections financières de l’entreprise,
- une identification des leviers de redressement,
- un suivi des réalisations et des engagements de l’entreprise,
- un examen des options de sortie incluant une analyse coût-bénéfice des options,
- une élaboration d’un plan de continuation opérationnel et financier,
- une mise en place d’outils de gestion financière.
- un accompagnement de l’entreprise dans sa transmission auprès d’un repreneur.
Une équipe pluridisciplinaire sera dédiée au pôle d’accompagnement et doit avoir des compétences et des solides expériences en gestion et comptabilité, en finance, en modélisation, en audit du marketing, en audit organisationnel, en entrepreneuriat, en management des entreprises industrielles/de commerce/ ou de services, en traitement des difficultés financières. Le cabinet d’expertise comptable peut rencontrer des difficultés pour recruter ces différents profils et doit ainsi rendre les postes à pourvoir plus attractifs. Les collaborateurs doivent par ailleurs être formés.
Pour réaliser ses missions, l’expert-comptable et ses collaborateurs peuvent utiliser des outils destinés à faciliter leurs travaux. Ces outils incluent un tableau de vérification de la situation de cessation de paiement de l’entreprise ou non ; un check-list des démarches à suivre par le collaborateur ; le questionnaire de définition du niveau de difficulté de l’entreprise ; le tableau récapitulatif des procédures amiables et collectives ; la matrice récapitulant les mesures à adopter suite à la réalisation des diagnostics ; la liste des acteurs intervenant dans le traitement des entreprises en difficulté.
La tarification adéquate pour le pôle se base principalement sur le volume horaire passé par les chefs de mission et les collaborateurs pour réaliser la mission. Le choix de cette option s’explique par le fait que le volume horaire dépend de la taille de l’entreprise, du secteur d’activité, de la complexité de l’activité et du niveau de difficulté de l’entreprise. La facturation au volume horaire permet par ailleurs au cabinet d’expertise comptable de détailler le devis par activités, ce qui renforce la compréhension de l’envergure des travaux à réaliser.
La stratégie commerciale et la capacité commerciale du cabinet sont d’une importance vitale pour assurer son développement. Le cabinet d’expertise comptable doit ainsi disposer de collaborateurs capables de vendre les missions du pôle ou des « commerciaux ». Le pôle peut cependant se heurter à un blocage psychologique des dirigeants d’entreprises qui ont peur de l’échec et qui de ce fait réagissent tardivement ou lentement. Ils craignent de recourir aux procédures amiables et collectives existantes de peur d’aller droit à la liquidation judiciaire. En raison des difficultés financières de l’entreprise, le pôle d’accompagnement pourra faire face à plus d’objections de la part des prospects. Ces objections incluent la non disponibilité de trésorerie pour payer les prestations d’un expert-comptable, la perception de la faible valeur ajoutée des missions du pôle puisque le dirigeant perçoit ses difficultés comme sans issue. Les collaborateurs du pôle doivent être capables de répondre à ces différentes objections et doivent donc être formés. L’expert-comptable doit mettre en place un tableau de bord pour suivre la performance commerciale de son pôle.
Le cabinet doit par ailleurs suivre la rentabilité du pôle en effectuant en premier lieu un suivi du temps réel passé par les collaborateurs afin de pouvoir comparer le prix de la mission avec le coût de revient réel. Il doit également disposer d’une comptabilité analytique pour pouvoir incorporer les frais de structure, les coûts de personnel non rattachés directement à la production des missions. Il doit revoir les marges réalisées par dossier.
Ouvrages
- Académie des sciences et techniques comptables et financières, Le management des entreprises en difficulté, Cahier de l’académie n°15, 2009, 107p.
- AFIC, De la sous-performance à la sortie de crise: guide pratique pour les investisseurs et les dirigeants, 2ème édition, 2007, 54p.
- BIETTE Bertrand, GORRIAS Stéphanie, Le régime de la prévention et du traitement des difficultés des entreprises, Joy éditions, 2ème édition, 2013, 368p.
- BRICARD Agnès, AUDAS Janin, Guide des missions de l’expert-comptable en gestion et sortie de crise, Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts-Comptables, 2009, 176 p.
- DELOITTE/ALTARES, L’entreprise en difficulté en France : s’adapter à la crise, 2013, 32p.
- DELVAUX Gerard, Rôle du professionnel du chiffre dans la nouvelle procédure, Editions Comptabilité et productivité ASBL, 2011, 121p.
- DFCG, Comment procéder face à une difficulté de trésorerie ?, Cahier technique de l’association nationale des directeurs financiers et de contrôle de gestion, 2009, 30p.
- LIENHARD Alain, Procédures collectives, Edition Delmas, 4ème édition, 2011, 599p.
- ROUSSEL Philippe Galle, Entreprises en difficulté, Editeur Lexis Nexis, 2012, 986p.
Articles
- BRICARD Agèns, (2012), Il faut se mobiliser pour éviter l’étranglement des PE et des PME, Les Echos, n°21283, p.25
- LELIEVRE Yves, (2013), La prévention au Tribunal de Commerce de Nanterre, La lettre de l’observatoire consulaire des entreprises en difficulté, n°39, pp.1-4
- SEVERIN Eric, (2012), Entreprises en difficulté : pour une meilleure maîtrise des risques, Revue Banque, n°747, octobre, pp. 22-43
- SCHLUMBERGER Edmond, (2011), Plan de sauvegarde ou de redressement, La lettre de l’observatoire consulaire des entreprises en difficulté, n°37, pp.1-12
Mémoire
- DAUDIGNON Muriel, Place et missions des professionnels de la comptabilité dans le cadre des procédures appliquées aux entreprises en difficulté, 2011.
- MORESQUI Bruno, Guide méthodologique pour l’expert-comptable dans l’accompagnement des TPE/PME en difficulté : de la cessation des paiements à l’homologation du plan de continuation, 2012.
- ROTOL Emmanuel, La procédure de sauvegarde : définition, accompagnement dans sa mise en œuvre et opportunités, 2011.
- ROUSSEL Stéphanie, L’expert-comptable et l’accompagnement des entreprises en difficultés : proposition et mise en place d’un dossier de travail didactique, 2011.
- SIX-HUCHIN, Céline, Comment détecter et vendre de nouvelles missions dans les cabinets d’expertise comptable de petite et moyenne taille? Passage d’un comportement de réactif à un comportement d’anticipation. La démarche commerciale à adopter, Novembre 2005
- THIEBAUT Grégoire, L’entreprise en difficulté : le rôle de l’expert-comptable dans l’aide à la décision, une méthodologie en relation avec le dirigeant, l’administrateur judiciaire et l’avocat spécialisé, Novembre 2008.
Sites internet
- Portail des PME: http://portail-des-pme.fr/entreprises-en-difficulte/ (consulté Février 2014) : ce site fournit des informations pour les dirigeants des PME en difficulté.
- Le site des entreprises en difficulté : http://www.entreprisendifficulte.com/ (consulté Février 2014) : ce site fournit des informations sur les procédures de traitement des entreprises en difficulté, des informations financières et juridiques.
- Le site des experts-comptables sur la prévention: http://www.entrepriseprevention.com/ (consulté Janvier 2014) : ce site fournit des documentations et des fiches techniques explicatives sur le traitement des entreprises en difficulté.
- Base de données des entreprises en France et à l’international : http://www.altares.fr/ (consulté Janvier 2014) : ce site fournit des statistiques sur les défaillances des entreprises en France.
- Centre d’information sur la prévention des difficultés des entreprises http://www.cip-national.fr/ (consulté Janvier 2014) : ce site fournit des conseils aux entreprises pour traiter leurs difficultés.
Nombre de pages du document intégral:102
€24.90